no one knows which way we’re going

@elise irish

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Les traditions ne lui importaient que peu, en réalité, au jeune italien. Même si certaines d’entre elles lui avaient été inculquées de gré - voire plutôt de force - par ses parents au fil des années et du temps passé, ce n’était pas pour autant qu’au présent, il y portait une grand attention. Cependant, pour les semaines qui venaient se s’écouler et pour toutes celles qui s’apprêtaient à venir, les traditions allaient forger la différence, allaient venir créer la parfaite illusion. Et même s’il n’était pas de ceux appréciant les traditions, la dernière de sa vie d’homme célibataire, il se devait de la respecter autant que possible.

Alors, pour ne pas voir la mariée avant le moment fatidique où ils allaient se retrouver devant l’autel - ou devant l’église, en l’occurence pour eux -, Damon n’était pas resté à l’appartement la veille au soir du grand événement. Un retour à la case départ, dans la maison qui l’avait accueilli dans un premier temps lorsqu’il avait déménagé en Australie, serait nécessaire et ce fut avec son costume emballé dans une main et une pizza dans l’autre qu’il vint passer le seuil de la maison. « Bonsoir, maman. » Il vint déposer un baiser tendre sur la joue d’Elise, alors qu’elle refermait la porte derrière lui. S’il avait pris pour habitude depuis des semaines désormais d’appeler son père Saül et non par ce surnom affectif qu’il avait pourtant chéri pendant des années, il n’avait su se résoudre à agir de la sorte pour Elise; elle resterait sa mère à ses yeux et il venait lui pardonner bien des torts qui ne passaient plus auprès de son aîné pourtant. « Je me suis permis de passer prendre une pizza pour le diner, j’espère que ça te dérange pas. » Pour son dernier repas en tant que célibataire, il n’imaginait pas que sa mère allait broncher de quelconque sorte; et puis, si tel en venait à être le cas, il n’en avait pas grand chose à faire en réalité. S’il avait toujours plié aux exigences de ses parents jusqu’alors, ces dernières semaines le comportement du blond était venu changer; au début de façon presque imperceptibles, puis d’une manière bien plus marquée au fil des semaines. Certains - et ils n’auraient pas tout à fait tort - blâmeraient l’arrivée de Megan dans sa vie; d’autres bien plus observateurs pourraient tout simplement comprendre que le vase était désormais plein.

Damon vint se débarrasser du carton de la pizza, encore bien chaude, sur la table de la cuisine avant de filer dans sa chambre pour y déposer avec délicatesse son costume. Même s’il n’était en rien ravi des événements qui s’en venaient à grande vitesse, ce n’était pas pour autant qu’il ne faisait pas les choses correctement; il s’y prenait d’ailleurs à merveille: il avait eu des années pour répéter auprès de ses parents. Esquissant une petite moue peinée, il fit le chemin inverse par la suite pour venir retrouver sa mère dans la cuisine. « Encore merci, de m’accueillir ce soir. » Elise aurait pu refuser; après tout, les affaires entre le fils et le père ne la regardaient que de très loin et elle aurait pu préférer ne pas en faire partie du tout. Pourtant, elle n’avait pas hésité un seul instant pour répondre à l’appel lorsque Damon lui avait avoué avoir besoin d’un endroit où se réfugier ce soir.

« Bonsoir, maman. » Un sourire illumina rapidement ton visage à la vue de ton fils de l'autre côté de la porte. C'était un peu à la dernière minute qu'il t'avait demandé de venir passer la nuit ici, mais tu n'avais pas hésité une seule seconde à l'accueillir. Il pourrait débarquer sans prévenir qu'il serait toujours le bienvenue. À vrai dire, tu ne t'attendais pas une seule seconde à ce qu'il respecte cette vieille tradition de ne pas voir la mariée la veille du mariage. À quoi bon respecter toutes les traditions ? Ce mariage était maudit d'avance. C'est quand même pas toi qui va se plaindre de l'avoir pour toi toute seule ce soir. Ces moments se font de plus en plus rares. « Allez, viens. Entre. » que tu lui dis en lui faisant signe d'entrer d'une main, chose qu'il fait alors que tu refermes la porte derrière lui.

« Je me suis permis de passer prendre une pizza pour le diner, j’espère que ça te dérange pas. » Il va déposer la boîte de pizza qu'il a dans l'une de ses mains sur la table de la cuisine, alors que dans l'autre se trouve la housse qui contient probablement son habit pour demain. « Bien sûr que non. C'est parfait. » Tu avais exagérément dévalisé le marché du coin parce que tu ne savais pas ce qui lui ferait plaisir pour ce soir, mais tu voulais être prête pour chaque éventualité. Tu avais même regretté d'avoir manqué de temps pour finaliser le tout à ton goût. Finalement, il a été lui-même se chercher une pizza et ça lui convient ainsi. Voilà ce qu'il est, un jeune homme qui a grandi dans la complexité, mais qui aime la simplicité. C'est à rien n'y comprendre, mais c'est tout à son honneur. Il en profite d'ailleurs pour aller porter son habit à l'étage, dans sa chambre dont rien n'a bougé depuis qu'il est parti voilà presque un an maintenant. Le temps passe à une vitesse folle. Cosimo revient quelques minutes plus tard dans la cuisine alors que tu fouilles dans les armoires pour sortir des assiettes et ustensiles à mettre sur la table. « Encore merci, de m’accueillir ce soir. » C'est un doux sourire qui orne ton visage alors que tu as un peu de mal à discerner l'expression que cache le sien. Il est triste ? Anxieux ? Il veut en parler ? Il veut faire comme si demain n'existait pas ? « Tu es ici comme chez toi. Tu sais bien. Tu viens quand tu veux. » La porte lui sera toujours ouverte, jour et nuit. Ici, ce sera toujours l'endroit où il pourra se réfugier quand il sera fatigué de faire semblant. Ici, il peut être lui tout simplement, sans faux semblant, sans faux mariage heureux. « Comment tu te sens ? » que tu ne peux t'empêcher de lui demander. Comment il va lui. Tu en feras toujours une priorité, même si en ce moment, tu te sens complètement impuissante et démunie pour chasser ses malheurs. Il ne sera sûrement pas heureux, mais avec un peu de chance, il ne sera pas malheureux non plus. Il finira sûrement pas y trouver son équilibre. Tu lui souhaites du moins.

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Le sourire qui vint illuminer le visage de sa mère alors qu’elle vint apercevoir son fils sur le pas de la porte de la maison qu’ils avaient, fut un temps, partagé, fit du bien au coeur du jeune italien. S’ils n’étaient plus faits pour venir vivre ensemble désormais, il avait l’avantage de toujours se sentir chez lui lorsqu’il arrivait chez Elise - et ça, ça n’avait pas de prix. « Allez, viens. Entre. » Damon ne se fit en rien prier pour venir obtempérer, et l’instant d’après il se trouvait dans la demeure. En venant jeter un coup d’oeil circulaire, alors qu’il déposait la pizza achetée en chemin sur le plan de travail de la cuisine, il put s’apercevoir que certaines choses avaient changé depuis sa dernière visite ici. « Bien sûr que non. C'est parfait. » Il vint faire glisser le carton sur le marbre, avant de reprendre le chemin initial de son entrée ici: celui de l’étage, la housse contenant son costume pour la cérémonie le lendemain commençant à peser. Et alors qu’il passait le seuil de sa chambre, il pouvait dire sans même regarder plus d’un instant que rien n’avait changé dans cette pièce; elle était telle qu’il l’avait laissé presque un an auparavant, lorsqu’il avait fui la maison dite familiale, après avoir appris qu’en réalité, ses parents et lui n’avaient rien d’une famille comme ils avaient pu le prétendre pourtant pendant des années. Damon ne savait pas si c’était le fait d est trouver de nouveau dans sa chambre ici qui le rendait de la sorte, ou simplement l’effet de savoir qu’il allait se marier le lendemain, mais il fut pris d’une vague de nostalgie. Pas bien longtemps, juste un instant, mais assez pour qu’il en vienne à laisser échapper un soupire, un petit sourire attristé sur les lèvres, avant de venir descendre rejoindre sa mère dans la cuisine.

Elise vint se retourner lorsque la voix de son fils se fit de nouveau entendre derrière elle. Elle se trouvait en train de mettre la table pour deux, alors qu’il devait certainement l’interrompre dans son flot de pensées. Deux assiettes signifiait quelque-chose d’assez rassurant en cet instant pour Cosimo: aucun autre homme ne viendrait se joindre à eux ce soir. C’était égoïste, mais il se sentait soulagé. Il avait besoin de venir passer cette soirée uniquement avec sa mère et personne d’autre dans le tableau. « Tu es ici comme chez toi. Tu sais bien. Tu viens quand tu veux. » Ce n’était pas le seul endroit de la ville où il était ici comme chez lui, mais c’était parmi les rares où il avait envie de pouvoir venir quand il le souhaitait tout en se sentant chez lui. Le jeune homme avait eu l’habitude d’être emmené à droite et à gauche, au cours de ses jeunes années, et d’avoir cette sensation de ne jamais vraiment être chez soi nulle part. Ce n’était pas une sensation qu’il avait envie de voir perdurer dans sa vie désormais. « Comment tu te sens ? » Venant croiser un instant le regard d’Elise, Damon vint finalement détourner le sien, en laissant échapper un long soupire. La question qu’elle venait lui poser là était bien plus complexe qu’il n’y paraissait, venait aborder plus d’un sujet à la fois. Mais le mot qui venait surement résumer d’une façon bien plus simple tout ce qu’il pouvait ressentir en ce moment, en cet instant, était le suivant: « Dépassé. » Le contrôle de la situation ne lui avait jamais appartenu, Saül ne lui ayant pas laissé la moindre occasion que ce soit le cas; et lorsqu’il avait tenté de venir ne serait-ce que tenter d’être maitre de son destin, les choses ne s’étaient pas déroulées comme il s’y attendait. « Mais je suppose que c’est normal lorsqu’on est sur le point de se marier. »

Et comme d’ordinaire, il vint minimiser l’impact que la situation pouvait avoir sur lui. A l’instar de son comportement habituel, il préféra venir prétendre que tout était sous contrôle lorsque chaos et le désordre étaient pourtant les deux rois de ces derniers mois dans sa vie personnelle. C’était plus simple, de se dire que tout allait bien aller même lorsque ce n’était en rien le cas; au moins cela laissait apercevoir l’espoir d’une accalmie à travers la tempête. Finalement, après un instant de silence, il vint attraper le carton de pizza pour venir la découper en parts égales, en déposant une dans l’assiette de sa mère et une dans la sienne. L’appétit n’était pas bien présent, mais il se devait de conserver le peu de forces qui lui restait pour ne pas se décomposer devant tous les invités le lendemain: il avait un rôle important à jouer dans cette pièce de théâtre. « Tu voudras partager ma voiture demain pour se rendre à l’église ou Saül passe te chercher ? » Même aux cotés d’Elise, Damon ne faisait même plus l’effort d’appeler Saül papa et là était le signe que ce dernier était allé bien trop loin dans ses gestes et ses paroles ces derniers temps.

« Dépassé. » Il aurait dû dire nerveux, mais excité. C'est ce qu'on dit quand on est à quelques heures de passé la bague au doigt à la femme qu'on aime. Cosimo, lui, il est dépassé de passer la bague au doigt d'une inconnue. Ton coeur est en mille miettes, tout comme le sien. Tu savais déjà que tu n'aurais pas dû poser une telle question. La réponse est trop difficile à entendre. « Mais je suppose que c’est normal lorsqu’on est sur le point de se marier. » « Je suppose. » que tu répètes à ton tour en te concentrant plutôt sur ta tâche de mettre la table pour deux histoire de fuir cette situation qui te met mal à l'aise et que tu ne sais toujours pas comment gérer. À t'entendre parler, on dirait que tu ne sais pas ce que ça fait de se marier. C'est pas faux de dire que tu ne sais pas ce que ça fait d'être marié sous ces conditions. Ça fait si longtemps. Tu t'en souviens comme d'un rêve, comme si c'était arrivé à quelqu'un d'autre. Parfois, c'est ce que tu souhaiterais. D'autre fois, tu ne changerais pas une seule minute de ta vie.

C'est dans un silence que Damon coupe deux pointes de la pizza qu'il dépose dans chacune des assiettes. Tu prends place sur l'une des chaises alors qu'il fait de même. « Tu voudras partager ma voiture demain pour se rendre à l’église ou Saül passe te chercher ? » « Non. » Tu ne réalises même pas à quel point ton non est dit sèchement. Le seul fait d'entendre le prénom de ton ancien époux suffit à te faire hisser le poil sur les bras. Tu deviens toute crispée tout d'un coup. C'est vraiment pas contre lui, même si on dirait que c'est le cas. « J'veux dire, oui, je viendrais avec toi. » que tu te reprends réalisant que ce n'était sûrement pas clair pour quelle partie de sa question s'adressait ton non. Il était pour Saül. Pas pour lui, évidemment. « On ne s'est pas parlé depuis des semaines avec Saül. » Et s'il peut juste t'ignorer comme il sait si bien le faire tout au long de la cérémonie ça ferait bien ton affaire. C'est probablement brisé à tout jamais Saül et toi. Tu es bien loin d'être convaincu que vous allez vous relever de votre dernière dispute qui a été particulièrement violente. Pire que d'habitude. « J'suis pas certaine que ça va se régler cette fois-ci. Je suis désolée. » que tu lui réponds en prenant une première bouchée de ton assiette. L'appétit n'est clairement pas au rendez-vous ce soir. Il doit s'en foutre Cosimo que votre famille vole en éclat, que ta relation avec son père ne peut même plus être cordiale pour lui, mais toi, ça te rend quand même triste. Ce sont vingt ans d'effort pour préserver cette famille réduit à néant. Tout ça pour rien. Tu peux pas le concevoir. Pourtant, c'est bien là. C'était sûrement inévitable. Tu as toujours été le pont entre Saül et son fils. Donc, sans toi… non. Ils n'ont pas fait long feu les deux Williams. Eux aussi, ils sont sûrement détruit à tout jamais. Tant que ta relation avec Cosimo ne tourne pas de la même manière. C'est tout ce que tu souhaites.

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« Je suppose. » Elle supposait également, alors que pourtant le mariage était un rayon que Elise connaissait bien. Pendant des années, elle était venue parer le bras de Saül dans un mariage dont Damon ne connaissait, heureusement pas, toutes les ficelles. Mais même si elle venait dire qu’elle supposait que ce type de ressenti était normal, cela ne venait en rien rassurant le jeune homme. Bien sur qu’il aurait préféré entendre de la part de sa mère que tout ceci était normal, que son ressenti était légitime et que tout allait bien se passer. Après tout, elle n’était pas à un mensonge près à lui dire, surtout si ce dernier pouvait venir rassurer le coeur de son fils.

Ils prirent tous les deux places autour de la table, chacun ayant une assiette remplie d’une part de pizza. Il fut un temps où ils se faisaient des soirées comme celle là régulièrement, rien que tous le deux. Damon avait toujours apprécié passer du temps avec sa mère; de ses deux parents, elle avait été celle toujours présente à ses côtés, et aujourd’hui en était encore la preuve. Il ne blâmait plus Saül autant qu’il pouvait l’avoir fait étant plus jeune, Cosimo, ayant par la force des choses compris qu’il ne pourrait pas obtenir une présence plus régulière de son père à ses côtés, bien qu’en pleine construction de l’adulte qu’il allait devenir. Mais il avait sa mère à ses côtés et pendant des années, cela avait suffi. Alors, ce fut naturellement qu’il vint lui demander si elle serait une fois de plus à ses côtés le lendemain, lorsqu’il se rendrait sur les lieux de la cérémonie; ou si Elise attendait que Saül passe la chercher, comme il le faisait fut un temps. « Non. » La réponse rapide et sèche de sa mère vint lui faire froncer les sourcils. Elle dut se rendre compte qu’elle n’avait pas été des plus claires, car elle vint sans même lui laisser le temps de formuler à haute voix ses doutes, reprendre la parole. « J'veux dire, oui, je viendrais avec toi. » Il eut un petit soupire de soulagement; silencieux, mais bien présent tout de même. Cela venait lui mettre du baume au coeur que de savoir qu’elle serait à ses côtés pour affronter cette journée qui s’annonçait d’avance musclée et sportive.

« On ne s'est pas parlé depuis des semaines avec Saül. » Venant remplir deux verres d’eau avec la cruche présente sur la table, Damon en glissa un devant l’assiette de sa mère. S’il avait fut un temps où ce type d’aveux l’aurait laissé de déboussolé, Cosimo n’était plus un enfant désormais, il avait grandi. Et avec cet événement, il en était venu à comprendre que les choses ne pouvaient rester roses entre ses parents alors que ces derniers n’avaient plus qu’une dose de patience limitée l’un envers l’autre. « J'suis pas certaine que ça va se régler cette fois-ci. Je suis désolée. » Déposant sa part de pizza dans son assiette, il vint relever son regard pour capter les azurs de sa mère, étirant un petit sourire se voulant rassurant à son égard. « C’est pas grave, tu sais. » Parce-qu’il la connaissait assez pour savoir qu’elle s’en voulait surtout par rapport à lui. « Je ne suis plus un enfant maman, tu n’as plus besoin d’être désolée pour moi. » Elle pouvait l’être pour elle, s’il lui semblait justifié de l’être. Mais pour Cosimo, l’enfant perdu au milieu d’une mer contre laquelle il n’avait jamais su lutter, il ne fallait pas se donner tant de peine. « J’ai bien compris que vous avez mieux à faire séparés qu’ensemble. » Il vint poser sa main sur celle de sa mère. « Et puis, si ça peut te rassurer, t’es pas la seule à qui il parle à peine ces derniers temps. » Il ne voulait pas qu’elle le prenne en pitié, mais plutôt qu’elle comprenne qu’une fois de plus, ils étaient dans le même bateau. Et que dans ce même bateau, ils étaient ensemble. Plus contre le reste du monde comme ça avait pu être le cas pendant des années, une décennie de cela, mais qu’ils étaient toujours ensemble mine de rien.

« C’est pas grave, tu sais. » Quand même un peu non ? Tu t'es battu toute ta vie pour maintenir cette famille là debout. Et pour quoi ? Pour que ça se termine ainsi ? Il est énorme le sentiment d'échec que tu ressens au fond de toi. Le sentiment d'avoir échoué ta vie au grand complet. Ils reviennent brutalement les mots horribles que Saül t'a craché au visage. Incapable de te sauver toi-même. Incapable de sauver ton fils. Personne n'arrive à nager à la surface. Tout le monde se noie et Saül est juste là pour regarder le spectacle. « Je ne suis plus un enfant maman, tu n’as plus besoin d’être désolée pour moi. » « Oui, je sais. » Tu le sais parfaitement même si tu passes ton temps à l'oublier. C'est plus fort que toi. Ce sentiment, ce besoin plutôt de le protéger de tout, c'est pas prêt de s'en aller. C'est plus fort que toi. Tu n'arrives pas à faire autrement. Il ne s'en est jamais plaint Cosimo, mais il a dû te trouver étouffante à de nombreuses reprises. Même s'il a trouvé son départ difficile, New York lui a sûrement permis de vivre un peu mieux son adolescence comme un enfant (presque) comme les autres. Il est toujours bien difficile de se dissocier de l'étiquette de fils de.

« J’ai bien compris que vous avez mieux à faire séparés qu’ensemble. » Sans doute oui. Tu ne pensais tout de même pas que être séparés viendrait avec le fait de couper les ponts complètement. Tu pensais que les vingt dernières années ensemble suffirait à garder quelque chose entre vous deux. Ça n'a pas toujours été facile, plus souvent difficile même. Mais ça n'a pas été que difficile, non ? Il faut croire que c'est juste toi. Saül n'a jamais voulu de toi dans sa vie. Il a été parfaitement clair. Le voilà débarrasser de la vermine une bonne fois pour toute. « Et puis, si ça peut te rassurer, t’es pas la seule à qui il parle à peine ces derniers temps. » qu'il te dit Damon en venant doucement poser sa main sur la tienne. Il se veut rassurant, alors que ce n'est pas son rôle. Et puis, ses paroles ne te rassurent pas non. Saül t'adresse à peine la parole depuis que vous vous êtes officiellement séparé. Donc son silence des derniers jours n'a rien de bien inquiétant. La différence entre avant, c'est que s'il tentait de te contacter, tu ne répondrais à aucun de ses appels et ne lui ouvrirait jamais la porte. Tu as envie de dire que ce n'est que passager. Des élans de colère contre ton ex époux, tu en as eu à plusieurs reprises, mais ils étaient rapidement oubliés. Là, c'est différent. Tu accepterais probablement ses excuses, mais elles ne viendront jamais, tu n'es pas assez idiote pour les espérer. C'est la fin. Tu le sens. Demain sera la dernière fois que tu vas côtoyer le père de ton fils. Pourquoi est-ce que ça fait si mal d'y penser ? Ça devrait pourtant te soulager. « Peu importe. » Ces deux petits mots semblent tellement difficiles à sortir de ta bouche tellement ta gorge est noué, tellement ça te demande un effort surhumain pour ne pas juste éclater en sanglots. Tu veux être forte pour Damon, mais y'a longtemps que tu ne l'es plus, que tu es juste à bout de souffle. « On va pas le laisser gâcher cette soirée. » que tu ajoutes comme pour clôturer le sujet Saül pour la soirée. Tu ne sais même pas comment tu fais pour arriver à lui faire un sourire réconfortant. « Qu'est-ce qui te ferait plaisir ce soir ? » Qu'est-ce que tu as envie de faire de ta dernière soirée de célibataire - ou d'homme libre plutôt ?

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« Oui, je sais. » Entre savoir et agir en conséquence de ce savoir, il y avait un monde. Damon ne venait pas nier qu’Elise ait tellement acquis l’idée qu’il ne soit plus un enfant, mais ce n’était pas pour autant qu’elle venait agir en conséquence derrière. S’inquiéter pour son fils alors que ce dernier savait pertinemment que les relations entre ses parents ne seraient jamais de nouveau ce qu’elles étaient, c’était considérer Damon comme un enfant. Et il aurait pu venir pester après tout ça, mais ce n’était pas la raison de sa présence ce soir ici et il ne voulait en rien commencer à s’engager sur cette voie - pas avec sa mère en tous cas. A la place, il vint étirer un petit sourire tendre, vint poser sa main sur celle d’Elise, se voulant être le plus rassurant possible. Certes, la famille qu’ils avaient autre fois composé n’était plus et pouvait être comparée à des ruines désormais. Mais ce n’était pas pour autant que les choses s’arrêtaient là et qu’il n’y avait plus rien à reconstruire; ce serait juste différent et parfois, c’était cette différence qui faisait du bien. Si Saül préférait faire cavalier seul, ils apprendraient à naviguer en tandem - il avait de toutes façons toujours eu tendance à venir les isoler tous les deux du reste du monde, ce ne serait que la suite logique de ses pensées et ses actions déjà aperçues par le passé. « Peu importe. » Il valait mieux s’en tenir à peu importe, effectivement. « On va pas le laisser gâcher cette soirée. »

Et il vint vraiment tenter de toutes ses forces de garder la face, de rester de marbre, de faire persister son sourire, Damon. Il se devait d’agir de la sorte et de ne pas céder face à des paroles si simples, comme celles qu’Elise venait de prononcer. Il allait rencontrer bien d’autres personnes qui en auraient des plus salées, des plus acerbes, des paroles; ce n’était pas en restant aussi proche du nid qu’il pouvait se permettre de se laisser abattre par de tels mots. Il était vrai qu’ils ne devaient pas se laisser avoir et permettre à Saül de venir ainsi gâcher leur soirée - s’ils avaient voulu en arriver à une telle fin, il aurait invité l’italien à prendre part à leur table des jours plus tôt déjà. Ils ne l’avaient pas fait, la question n’existait même pas mais la réponse était pourtant déjà toute dite - ils ne désiraient pas qu’il vienne changer quoi que ce soit entre eux. Cependant, à entendre sa mère prononcer sa phrase de cette sorte, Damon reçut la vérité en pleine figure: non, il ne laisserait pas Saül venir gâcher cette soirée, mais en contrepartie il ne disait rien quand ce dernier venait lui gâcher le restant de sa vie. Avec grand peine, il déglutit, pris un morceau de pizza et une gorgée d’eau, se contentant de venir hocher la tête pour répondre à Élise.

« Qu'est-ce qui te ferait plaisir ce soir ? » Au moins, avec un changement de sujet de la sorte, il pourrait reprendre contenance assez rapidement. Cela leur permettait de venir penser à autre chose qu’au lendemain, qu’à ce que Damon s’apprêtait à réaliser. Ce soir, ils pouvaient de nouveau juste être mère et fils comme ils l’avaient été pendant des années. Reprenant sa main toujours posée jusqu’alors sur celle de sa mère, il vint hausser quelque peu les épaules. « J’y ai pas spécialement réfléchi en réalité. » Pour lui, l’idée de venir se réfugier chez sa mère ce soir permettait de mettre de côté les six derniers mois comme s’ils n’avaient jamais existé, comme si la vie avait toujours été aussi simple que juste ramener une pizza dans un carton en guis de dîner en fin de journée. Cela lui permettait de reprendre une dernière fois correctement son souffle avant le grand plongeon. Il n’avait jamais réellement été jusqu’à planifier ce qu’ils pourraient faire, en concret, ce soir mais cela n’était pas vraiment dérangeant. Il vint insuffler à son visage un petit sourire, l’espace d’un instant. « Je crois que juste rester sur le canapé avec un bon bouquin me suffit. » Il n’avait pas vraiment la tête à venir s’imaginer faire la fête jusqu’au bout de la nuit. « A moins que tu aies quelque-chose en tête ? » Et qu’elle attende le bon moment pour venir lui en parler ? Finalement, il était désormais intrigué, ne pouvant empêcher l’un de ses sourcils de venir légèrement s’arquer sur son front.

Tes lèvres se pincent doucement à voir la tête que fait Damon suite à tes paroles. Il ne dit rien, tente de ne rien laisser paraître, mais c'est peine perdue. Ça se lit facilement sur ton visage. Ce n'est pas ce que tu as voulu insinuer. En même temps, il est le seul responsable de ce qui lui attend demain. Si tu choisis de ne pas laisser le sujet de Saül entaché cette soirée-ci, c'est Damon qui laisse Saül gâcher le reste de son existence. Il avait le choix. Tu ne connais pas tous les enjeux qui se cachent sous ce mariage. Tu n'as aucun doute sur les capacités de Saül à se montrer persuasif pour obtenir ce qu'il désire, mais Damon, lui, à sous-estimer la capacité de ceux qui était prêt à l'aider à se sortir de là. Saül n'est qu'un humain comme les autres. On a parfois tendance à l'oublier. Tu aurais été prête à te brûler plus d'une plume pour sortir ton fils de cette misère. Alors, oui, il est le seul à blâmer, le seul à pouvoir se sortir de cette affaire, mais ce n'est sûrement pas le temps de le lui balancer en pleine figure. Mieux vaut se taire et tenter maladroitement de changer de sujet. Voilà qui est mieux.

« J’y ai pas spécialement réfléchi en réalité. Je crois que juste rester sur le canapé avec un bon bouquin me suffit. » De juste faire comme si la vie d'avant était toujours là, comme si ce soir était un soir aussi banale que les autres. Tu hoches la tête. « Tu as tout ce qu'il te faut à l'étage. » que tu précises s'il a envie de ressortir l'un de ses vieux bouquins. Il l'a sûrement déjà remarqué que rien n'a bougé depuis qu'il est parti lorsqu'il est monté serré ses affaires. Rien ne compte bouger dans un avenir rapproché non plus. Il aura toujours cette pièce pour lui s'il ressent le besoin de se réfugier du monde extérieur de temps en temps. « A moins que tu aies quelque-chose en tête ? » Tu tournes la tête de droite à gauche. Non, tu n'avais rien prévu toi non plus. Tu n'avais même pas pensé une seule seconde que tu devais préparer quelque chose. Vous n'avez rien à fêter. Tu te sens plus comme si tu t'en allais à des funérailles qu'à un mariage demain.  « Non, je demandais juste. » Au cas où. Plutôt décevant en fait. Il faut dire que l'annonce de dernière minute n'avait pas aidé à ce que tu planifies quoi que ce soit. Si Damon a seulement besoin d'un havre de paix pour la nuit, qu'il en soit ainsi.

Tu marques une pause pour prendre le temps de bien réfléchir aux prochains mots qui sortiront de ta bouche. Tes sourcils se froncent légèrement. C'est sûrement pas une bonne idée d'aller vers ce terrain là ce soir. Y a-t-il vraiment un bon moment pour ces choses-là ? « Tu sais, si un jour tu as envie de me parler de ce garçon- » Ce garçon qui n'a toujours aucun prénom ni aucune personnalité relié, qui n'est qu'un inconnu, mais qui a pris une grande place dans la vie - dans le coeur ? - de ton fils. Ce n'est sûrement pas raisonnable de parler de lui alors qu'il lui dit adieu à tout jamais en prenant Megan pour épouse. « - je suis prête à t'écouter. » Parce que même si tu as vaguement abordé le sujet, tu n'étais pas prête à entrer dans les détails de cette relation tabou qui n'a pas lieu d'être. « Ou même si c'est là-bas que tu as envie d'être ce soir… » Comme une dernière fois, comme un adieu. Tu diras rien. Tu es même prête à gérer la colère de Saül s'il devait l'apprendre. « Oublie ça. C'est déplacé. » que tu ajoutes automatiquement en te levant d'un coup pour ramasser la vaisselle sur la table pour éviter le malaise que tu venais de créer. Dire à son fils d'aller rejoindre son amant la veille de son mariage ? On peut appeler ça déplacé oui.

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« Tu as tout ce qu'il te faut à l'étage. » Un fin sourire vint se glisser sur les lèvres du jeune homme. Il avait vu que toutes ses affaires, du moins celles qu’il avait laissé lors de son passage dans cette maison quelques mois plus tôt, presque une année entière désormais, n’avaient en rien bougé. Toutes choses reposaient exactement à la place où il les avait laissé; Élise n’avait jamais caché qu’il était toujours chez lui ici, de toutes façons, rien de bien étonnant dans cette situation alors. A la suite, il vint tout de même demander si la question de sa mère était là pour venir introduire un programme particulier pour la soirée, ou si la curiosité était de mise. Il était ouvert à tout programme, étant donné qu’il n’avait jamais pris le temps de venir imaginer à quoi pourrait ressembler sa dernière soirée en tant que jeune homme. « Non, je demandais juste. » Damon vint hocher de la tête. « Alors toi, moi, un bon bouquin et un verre de vin, ça me suffit largement. » Comme ils avaient tant eu l’habitude de le faire, au fil des années. Là était à tous les deux leur refuge, lorsque Saül en venait à les mettre de côté, à presque les oublier - ne l’avait-il finalement pas fait, à plus d’une reprise ? -, ils avaient au moins la chance de pouvoir se retrouver tous les deux, de s’épauler, de se soutenir.

« Tu sais, si un jour tu as envie de me parler de ce garçon- » Ce qu’ils n’avaient en revanche pas eu l’habitude de faire, c’était de venir se confier sur la vie sentimentale et privée l’un de l’autre, et inversement, si bien que la surprise vint facilement se lire sur le visage du jeune homme. Un sourcil s’était haussé, sans aucune discrétion ou retenue, au dessus de ses yeux, et aucun son ne vint sortir de sa bouche entre-ouverte. « - je suis prête à t'écouter. » Déglutissant quelque peu avec peine, Damon vint boire une gorgée de son verre d’eau avant de le reposer sur le comptoir. Son regard ne lâchait pour aucune sa mère, alors qu’il peinait à croire les paroles qu’elle venait de lui adresser. Pas qu’il ne croyait pas en l’effort qu’elle faisait, celui également qu’elle lui démontrait, mais simplement qu’il avait du mal à imaginer Elise comme prête à l’écouter s’épancher au sujet d’une autre personne du même sexe que lui. « Ou même si c'est là-bas que tu as envie d'être ce soir… » Les deux yeux de l’italien étaient désormais écarquillés, alors que son regard venait se perdre bien au delà de l’épaule de sa mère, alors que ses joues devaient venir prendre une teinte rosée. Avec toute autre personne - comprendre ici que Saül n’apparaissait pas dans cette catégorie, bien sûr -, il n’aurait eu aucun mal à venir expliquer ce qu’il pouvait ressentir pour Angus. Avec n’importe qui d’autre, il serait venu ajouter un petit en rien gêné aux mots qu’il venait entendre, et aurait sûrement même répondu que l’idée ne le désenchantait pas. Mais il s’agissait de sa mère, en face de lui. Et cette dernière dut comprendre que malgré toute sa bonne volonté, elle  avait été un brin trop loin, car il ne lui fallut qu’un instant pour venir s’agiter, prendre la vaisselle et l’amener à l’évier, pour venir balayer le sujet de conversation aussi vite qu’elle l’avait mis sur la table. « Oublie ça. C'est déplacé. » C’était déplacé, Damon ne viendrait pas dire le contraire. Et pourtant…

« Il s’appelle Angus, ce garçon, comme tu dis. » Et pourtant Damon vint plonger tête baissée dans ce sujet de conversation qu’il aurait autant voulu repousser qu’elle. Il serait toujours le plus à l’aise des deux, mais cela ne voulait pas dire qu’il l’était, justement, à son aise. S’il y avait bien deux personnes à qui il avait caché cette part là de sa personnalité, c’étaient bien ses parents; aucun des deux n’avaient besoin d’être au courant de quoi que ce soit, et il était sur qu’au moins l’un des deux ne l’accepterait peut-être jamais avec cette nouvelle information dans la balance. « Il bosse aussi à la MHI, c’est comme ça qu’on s’est rencontrés. » Un fin sourire, si fin qu’il pourrait presque ne pas exister, se montra sur les lèvres du jeune homme; un brin amusé, un brin attristé. Dire qu’au début, Angus et lui ne pouvaient pas se voir en peinture - et que désormais, ils ne pouvaient pas se voir pour leur propre bien. « Je suis sûr que tu l’aimerais bien, tu sais. » Parce-que Sutton avait toutes les qualités requises pour être considéré comme un bon garçon aux yeux d’Elise - après tout, il ne voulait que le bien de son fils, cela ne pouvait être que quelqu’un de bien. Finalement, après un petit instant de silence, Damon vint lâcher un soupire. « Ce serait déplacé d’aller chez lui ce soir, c’est vrai. C’est pas l’envie qui me manque, que d’aller le voir. Mais c’est pas dans les plans. Tu n’auras pas à mentir face à Saül, ne t’en fais pas. » Au fur et à mesure qu’il était venu faire entendre ses paroles, il s’était déplacé à son tour dans la cuisine jusque sa mère, qu’il finit par prendre par les épaules afin de la serrer dans ses bras. « Merci de l’avoir proposé, quand même, malgré tout. » Malgré tout.

Ce n'est sûrement pas le meilleur moment pour choisir de remettre sur le tapis les fréquentations "déplacés" de ton fils à l'aube de son mariage. Y a-t-il vraiment un bon moment pour discuter de ce qui, aux yeux de tous les autres, n'a jamais existé ? Non sûrement pas. Damon ne semble pas vraiment à l'aise non plus. Parce que c'est toi ou parce qu'il préfère lui aussi faire comme si ça n'avait jamais existé ? C'est sûrement plus facile à accepter ainsi. Probablement un peu des deux. De toute façon, à peine es tu entré dans le vif du sujet que tu en ressors rapidement, débarrassant rapidement la table comme distraction. C'est réussi ? Non, sûrement pas, mais dans cette famille, on est tous doué pour fermer les yeux quand vient le temps de le faire. Ce qu'on ne voit pas n'existe pas, en un sens. Et c'est comme ça qu'on fait pour accumuler des années de problèmes qui vous éclatent au visage l'un après l'autre. « Il s’appelle Angus, ce garçon, comme tu dis. » Tu te retournes vers Damon au son de sa voix. De coller un prénom sur cette fréquentation rend la chose beaucoup plus réel. Angus, donc. Quoi d'autre ? « Il bosse aussi à la MHI, c’est comme ça qu’on s’est rencontrés. » Tes sourcils se froncent doucement alors que les liens se font dans ta tête. Angus de la MHI, ça explique bien des choses sur ta seule et unique rencontre avec le jeune homme. Dire que tu croyais qu'il t'avait abordé pour avoir des conseils sur comment bien cirer les pompes de son patron. T'étais bien loin du compte. Soudainement, tu regrettes de ne pas avoir été plus curieuse et pas aussi rigide sous ses questions. « Oui, je vois qui c'est. » Parce qu'en plus d'avoir un prénom, il a désormais un visage, mais tu ne peux pas en dire plus. Quelques paroles échangés ne suffisent pas à avoir une opinion sur une personne. Tu dois tout de même dire que ça te surprend un peu qu'il se soit intéressé à quelqu'un du même milieu que son père. Si Angus avait été une fille, Saül aurait sans aucun doute approuvé le choix de Cosimo. « Je suis sûr que tu l’aimerais bien, tu sais. » « J'suis sûr que oui. » Comme si c'était impossible de dire le contraire. Tu n'as aucun doute sur la capacité de Damon à choisir une personne convenable avec qui partager sa vie. « Ce serait déplacé d’aller chez lui ce soir, c’est vrai. C’est pas l’envie qui me manque, que d’aller le voir. Mais c’est pas dans les plans. Tu n’auras pas à mentir face à Saül, ne t’en fais pas. » Comme si c'était un problème pour toi que de mentir à Saül. Surtout si c'était pour que Damon soit heureux pour une dernière fois avant que sa vie ne soit liée à celle d'une personne qu'il n'a pas choisi jusqu'à ce que la mort les sépare. Imposer à son fils une promesse qu'il n'a même pas tenu lui-même, voilà ce qu'il fait Saül. « Merci de l’avoir proposé, quand même, malgré tout. » qu'il ajoute Damon alors qu'il se lève pour venir te prendre dans ses bras. C'est un sourire triste qui prend inévitablement place sur ton visage. Ça ne devrait pas se passer ainsi, mais tu ne peux plus rien y faire. Damon a fait son choix. Avec de la chance, il va se dégonfler demain une minute avant la cérémonie.

Et puis, tant qu'à avoir ouvert le sujet des personnes qu'on aime peut-être…

« Hum, moi aussi j'aimerais te parler de quelqu'un… » que tu débutes alors que vous passez au salon sans trop savoir si c'est le moment ou non pour aborder la nouvelle présence d'un homme dans ta vie. Tu voudrais pas parler de ça à Damon si Dinis n'est pour être que de passage, mais vu que lui prévoit te présenter à sa mère… c'est sûrement la moindre des choses de dire à ton fils que quelqu'un existe. « J'vois quelqu'un depuis quelques semaines et ça semble vouloir être sérieux. » Votre relation est un peu en dent de scie, mais, ouais, au final, tu éprouves réellement de l'affection pour lui et ça semble partagé. « J'voulais juste te prévenir au cas où tu viennes ici et qu'il soit là. » Ce qui ne serait pas impossible si l'un et/ou l'autre venait ici sans prévenir. Et ce n'est pas vraiment par surprise que tu voulais que Damon l'apprenne. « Il s'appelle Dinis. Il est photographe… comme Megan. » Est-ce une manière détournée d'expliquer que tu as découvert ce que la future femme de ton fils fait réellement ? Peut-être bien. Est-ce que Damon va t'en dire plus ? Sûrement pas.

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@elise irish

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Les sourcils qui vinrent se froncer sur le visage de sa mère ne passèrent pas inaperçus. « Oui, je vois qui c'est. » Était-ce une bonne nouvelle ? Étais-ce une nouvelle qui méritait d’être prise en considération, tout simplement ? Qu’Elise vienne dire qu’elle connaissait en réalité Angus - ou tout du moins, qu’elle voyait de qui il s’agissait -, ne leur permettrait pas pas de venir arranger la situation. Si leur conversation actuelle avait servi de prologue à une présentation officielle entre Sutton et les parents de l’italien, alors le fait qu’ils se soient déjà rencontrés aurait eu un poids sur la balance. En l’occurrence, Damon devait se contenter aujourd’hui de venir parler à sa mère de l’absence de quelqu’un dans son quotidien, et non de sa présence; qu’elle puisse mettre un nom sur un visage ne changerait donc rien à la réalité, malheureusement. Mais le jeune homme savait tout de même qu’Elise aurait apprécié Angus, si les circonstances avaient différentes. « J'suis sûr que oui. » Ils avaient beau être tous les deux certains de cette vérité, ce n’était pourtant pas celle qu’ils avaient la chance et le loisir de venir côtoyer. Et même si cela déchirait le cœur de Damon, et même si cela ne venait en rien l’aider à affronter ce qui l’attendait le lendemain, l’idée que sa mère ne le rejette pas complètement, elle, bien qu’il assume à demi-mots ce que son père appelait un défaut, venait lui insuffler une dose d’amour qu’il ne pensait pas avoir besoin pour passer le reste de la soirée. Il n’irait pas se réfugier dans les bras d’Angus ce soir, bien que l’envie était follement présente chez lui, parce-que ce n’était pas de la sorte qu’il serait prêt à affronter la journée du lendemain. A défaut, il pouvait toujours venir remercier Élise des efforts qu’elle semblait prête à fournir de son côté; ce ne serait pas le même réconfort, mais quel garçon d’une vingtaine d’années, à la veille de son mariage, n’avait pas besoin du réconfort de sa mère ?

Ils se rendaient au salon, lorsque l’ancienne épouse Williams vint finalement rompre le silence qui s’était avec délicatesse installé entre eux deux. « Hum, moi aussi j'aimerais te parler de quelqu'un… » Les pas de Damon vinrent ralentir, alors que son regard se relevait en direction de la blonde. Un sourcil venant se hausser sur son visage - il était prêt à tout entendre. La dernière fois que sa mère avait démarré une conversation de cette sorte, c’était pour lui annoncer que le lien qu’elle entretenait avec Jack n’était en rien ce que son fils pouvait imaginer. Allait-il s’agir d’un autre ami de Saül, ou d’un total inconnu cette fois-ci ? Damon préférerait que ce soit la seconde option choisie cette fois-ci, même si son avis sur la question n’était pas de ceux à prendre en compte. Simplement, il n’y avait plus besoin d’exemple pour prouver que de rester trop dans le cercle proche de Saül Williams n’était pas des idées vous apportant joie et fortune. « J'vois quelqu'un depuis quelques semaines et ça semble vouloir être sérieux. » Un fin sourire, quelque peu amusé, se glissa sur les lèvres du blond alors qu’il se laissait de son côté glissé dans le premier fauteuil à portée de main. « Ah oui ? » - « J'voulais juste te prévenir au cas où tu viennes ici et qu'il soit là. » Ses lèvres vinrent compléter son sourire. Oh, c’était donc sérieux à ce point là - au point où Dinis, de son prénom apparement, pouvait se pointer chez Élise sans prévenir, au point où il semblait donc posséder les mêmes clefs que le fils de cette dernière. « Je le sortirai quand même de la maison si on tombe ici au même moment et que t’es pas là. » Il vint tout de même ajouter un petit clin d’œil pour venir illustrer ses paroles. Il n’était pas réellement sérieux - pas tout à fair - peut-être que si finalement. Disons que ce n’était pas nouveau, l’idée que Damon soit un brin protecteur envers sa mère et qu’il en soit à se méfier des hommes lui tournant autour; après tout, le dernier mari en date avait laissé quelques traces de son passage dans les esprits des deux liés.

« Il s'appelle Dinis. Il est photographe… comme Megan. » Un instant, Damon vint détourner son regard. Il ne savait si elle avait découvert seule cette information, si Saül lui avait transmise ou si Megan elle-même était venue discuter de son métier avec sa belle-mère. Aucune de ces options ne semblaient soit plaisante, soit plausible, mais le jeune homme espérait fortement que ce soit sa fiancée qui lui en ait parlé. Cela indiquerait moins de problèmes sous-jacent à connaître cette information. Finalement, Damon vint remonter son regard vers sa mère. « Ils auront quelqu’un avec qui avoir des points communs, comme ça. Aux dîners de famille. » Qu’importe ce que cela voulait dire - quels seraient les dîners de famille, désormais, alors que rien ne semblait tourner rond désormais chez les Williams ? Était-ce réellement une famille, toujours, à se tirer dans les pattes de la sorte ? « Est-ce que Dinis sera présent demain ? » Damon se doutait que la réponse serait négative, mais il posait la question par politesse - et pour souligner, sans un mot, que de son côté il serait plus que ravi de pouvoir rencontrer un homme qui rendait sa mère heureuse.

« Ah oui ? » C'est un sourire amusé qui se glisse sur les lèvres de ton fils lorsque tu évoques le sujet d'un nouvel homme dans ta vie. C'est aussi ainsi que devrait se dérouler les discussions concernant la femme qui compte épouser demain; avec amusement et légèreté. Mais bien sûr, rien n'est comme il le devrait chez les Williams. « Je le sortirai quand même de la maison si on tombe ici au même moment et que t’es pas là. » Ton sourire ricoche rapidement sur le sien. Oui, les chances que les deux hommes se croisent par hasard ici étaient de plus en plus élevées au fil des journées qui passent, mais les possibilités que Damon croise Dinis ici sans que tu sois présentes sont très faibles. « Ça ne devrait pas. J'crois qu'il n'aime pas trop ça ici. » que tu lui réponds en haussant légèrement les épaules. Il l'a jamais évoqué à voix haute, mais c'est évident qu'il préfère se retrouver dans ses affaires que dans les tiennes. La faute au fantôme de Saül ? Probablement, mais pas que. Enfin, faut dire que l'inverse est aussi vrai. Il trouve que chez toi, c'est trop et tu trouves que chez lui, c'est pas assez.

« Ils auront quelqu’un avec qui avoir des points communs, comme ça. Aux dîners de famille. » « Sans doute, oui. » Forcément qu'ils auront des points communs. Dinis ne semblait avoir rien de mal à dire contre Megan. C'est bien dommage. T'as pas envie qu'il l'apprécie. Tu voudrais qu'il la déteste, qu'il ait des saloperies à dire sur elle. Il devrait détester tout le monde que tu détestes. Le hic, c'est que, même à lui, t'es pas prête à lui avouer ce petit secret. Tu n'avouera jamais a voix haute que tu peux pas supporter la femme de ton fils - surtout que tu n'as aucune bonne raison de la détester. Mais bon, s'ils peuvent meubler les silences sans que tu aies à faire un quelconque effort, tu prends. « Est-ce que Dinis sera présent demain ? » Tes sourcils se froncent doucement alors que tu hoches la tête de gauche à droite. Envoyer Dinis dans la fosse au lion ? Certainement pas. Il ne faudrait pas le traumatiser alors qu'il débarque à peine dans ta vie. Il aura bien d'autres occasions d'y être. Demain, ce n'est pas le moment pour les premières présentations. Ce sera déjà assez anxiogène pour toi sans devoir ajouter ça en plus. Il y a une toute petite partie de toi qui voudrait qu'il soit présent demain, mais la plus grande préfère qu'il n'y assiste pas. Ça se terminerait sûrement mal. « Non, mais peut-être que lorsque vous serez de retour de votre lune de miel, vous pourriez venir dîner ici ? » Loin de toi l'envie d'inclure Megan dans le projet. Tu aimerais qu'elle est la décence de simuler un malaise pour expliquer son absence. Mais ce serait déplacé de ne pas faire semblant qu'elle soit la bienvenue. Tout comme elle sait que ce serait déplacé de ne pas faire acte de présence. C'est dérangeant qu'elle soit politiquement correcte. Elle peut pas juste être la garce que tu as droit de détester ? « Si tu as envie, bien sûr. » De venir, de le rencontrer, que Megan soit présente ou pas.

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La façon de répliquer du jeune homme eut au moins le don de venir décrocher un sourire à Élise, et rien que pour ça, Damon en était fier. Ceci dit, cela ne changeait rien à ses paroles qui restaient on ne pouvait plus vraies: il y avait de fortes chances qu’il sorte Dinis de la maison s’ils s’y croisaient par hasard, que ça plaise à ce dernier ou non. Après tout, c’était lui le seul homme à véritablement rester dans la vie de sa mère - même si ce n’était en réalité pas exactement comme ça que les choses étaient supposées se passer, mais il balayait d’un revers de la main ceux qui prenaient cet angle d’attaque. « Ça ne devrait pas. J'crois qu'il n'aime pas trop ça ici. » Le jeune homme fronça le bout du nez, le regard empli d’une malice qu’il avait eu tendance à perdre ces derniers temps. « Tant mieux. »

Air de malice qui vint cependant quitter regard et traits de visage lorsque Élise vint lui révéler non seulement que Dinis était également paparazzi, mais qu’elle connaissait sans aucun doute désormais le métier que pratiquait Megan. Oh, jusqu’à avant cette discussion, le jeune italien n’aurait pas eu besoin de venir demander l’avis de sa mère que cette profession - elle devait détester ça, sûrement penser que cela n’était digne de rien du tout. Maintenant qu’il comprenait qu’elle avait un faible pour quelqu’un de cette branche, il en venait à douter quelque peu quant à l’image des paparazzi que se faisait désormais l’ancienne Williams. Ce n’était cependant ni le moment, ni l’ambiance qu’il désirait instaurer pour ce soir sous ce toit, alors Damon vint retenir ses commentaires et se contenta de venir souligner qu’au moins deux pièces rapportées de cette famille - aussi étrange que cette dernière pouvait l’être - auraient une chose en commun à partager aux prochains dîners de famille. « Sans doute, oui. » Et peut être qu’il se trompait tout du long, mais là était une pensée qui pouvait venir les rassurer quelque peu tous les deux; pour des raisons bien différentes mais la précision n’avait lieu d’être.

« Non, mais peut-être que lorsque vous serez de retour de votre lune de miel, vous pourriez venir dîner ici ? » Ah que pardon ? « Si tu as envie, bien sûr. » Plusieurs informations à venir relever dans cette prise de parole. Tout d’abord, Élise venait de rassurer Damon - il fallait le souligner - en lui confirmant que Dinis ne serait pas de la partie le lendemain pour le mariage, et c’était important d’avoir cette précision. En revanche, alors qu’elle avait elle-même refusé leur invitation de rester dîner chez eux quelques semaines plus tôt, sa mère venait de lui faire une proposition similaire ? Il y avait là de quoi perturber un instant Damon, qui resta silencieux peut être une seconde ou deux de trop. « Oui, oui bien sur. » Peut-être également qu’il répondait bien vite et qu’il aurait du consulter Megan pour donner ce type de réponse - et apparement, un fou furieux nommé Otto qui avait déjà prévu que les choses ne se dérouleraient pas exactement comme ça au moment de cette conversion -, mais il venait là malgré tout répondre avec son cœur et il ne pensait pas que la jeune femme lui en voudrait réellement pour ça. Et puis, c’était sa mère, il ne saurait lui dire non. « Un peu surpris mais ce sera avec plaisir, maman. » Il vint se mordre les lèvres avant d’ajouter sa prochaine réponse. « Si tu en as vraiment envie aussi ? »

« Tant mieux. » Ce n'est pas exactement les mots que tu aurais choisis, mais, oui, c'est sûrement tant mieux pour lui. Pas forcément pour toi. Ça va du moment où vous choisissez de continuer de vivre votre vie chacun de votre côté. Ça deviendra sûrement compliqué lorsque vous aurez envie de vivre ensemble et qu'aucun de vous deux n'aura envie de déroger de votre mode de vie - ce qui est plutôt idiot de la part de Dinis, mais il se dit sûrement la même chose de toi. La suite de la conversation semble toutefois surprendre Damon. La surprise peut facilement se lire sur son visage. Bonne ou mauvaise surprise ? Tu attends sa réponse qui met quelques secondes à arriver. « Oui, oui bien sur. » Un sourire se forma rapidement sur ton visage. À quoi pouvait bien ressembler un dîner en famille sans Saül dans l'équation ? Ce sera sûrement étrange. Peut-être plus conviviale ? Moins catastrophique ? Il reste encore Megan qui rendra ce moment probablement moins naturelle. Ça te brise le cœur de te dire que les rôles seront inversés. Alors que tu as joué un rôle pendant des années, c'est au tour de ton fils de faire son entrée en scène. « Un peu surpris mais ce sera avec plaisir, maman. Si tu en as vraiment envie aussi ? » Si tu as vraiment envie que Damon rencontre Dinis ? Oui, absolument. S'ils peuvent arriver à plus ou moins bien s'entendre ce sera un bonus. Si tu as vraiment envie que Megan soit présente ? Non, absolument pas. Mais, est-ce que tu as vraiment le choix ? Que tu le veuilles ou non, elle fait dorénavant partie de la famille. « Bien sûr, je n'aurais pas proposé sinon. » que tu mens de ton sourire le plus rassurant. « Je vais essayer de faire en sorte de pas te compliquer la vie plus qu'elle ne l'est déjà. » que tu ajoutes ensuite en sachant très bien qu'il n'avait pas à gérer la haine entre sa mère et sa fiancée en plus de tout le reste. Après tout, vous n'êtes plus à un mensonge près, à une pièce de théâtre de plus ou de moins. Pourvu que Megan fasse elle aussi un minimum d'effort, qu'elle ne joue pas les arrogantes, qu'elle ne fasse pas exprès de piquer juste pour piquer. Cette situation n'est facile pour personne. Un peu d'hypocrisie ne fera de mal à personne. Mais, oui, tu es parfaitement honnête cette fois-ci. Tu veux vraiment faire un effort pour Damon. Mais le vouloir et la réalité sont deux choses bien différentes. « Est-ce que la maison à Grenade a plu à Megan ? » Si elle veut vraiment t'insulter, elle n'a qu'à dire non. Grenade reste bien le dernier beau souvenir de la famille que vous avez déjà formé avec Cosimo et Saül. Elle n'est peut-être pas si extraordinaire sans les souvenirs qui viennent avec. Mais Damon lui a sûrement expliqué la valeur sentimentale qu'elle avait suite à ton départ de chez lui. Si ça se trouve, ils n'ont pas encore pris le temps de regarder tout ça. Tu sais bien que leur dernière semaine avant le mariage doit être particulièrement chargée.

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@elise irish

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C’était évident, même si Elise ne venait pas mettre les mots exactes dessus, qu’elle n’appréciait guère Megan. Damon ne lui en voulait pas - après tout, la situation était assez complexe pour qu’il puisse comprendre d’où venaient ces sentiments négatifs. L’inverse était vrai aussi, d’ailleurs, et il avait compris que tant que la Monroe serait à ses côtés il était presque inespéré d’avoir quelque-chose de plus évoluée qu’une relation cordiale entre les deux femmes. Et encore, c'était parce-qu’il se situait au milieu des deux, justement. Mais il s’en accommoderait - ce ne serait pas la première fois qu’il servirait de tampon entre deux personnes afin d’apaiser des tensions sous-jacentes -, car c’était là de toutes façons la seule de venir faire en sorte que les choses fonctionnent correctement. Il s’accommoderait du fait que peu de personnes dans cette famille pouvaient désormais se voir en peinture, et que le mot famille perdait de plus en plus de sens au fil des semaines qui s’écoulaient.

En revanche, ce qu’il n’avait pas vu venir, c’était l’invitation de sa mère à ce que le couple de futurs mariés viennent diner chez elle un de ces jours - lorsque les choses seraient plus calmes, et Dieu seul savait à ce moment là à quel point elle s’apprêtaient à s’aggraver encore davantage. « Bien sûr, je n'aurais pas proposé sinon. » Elle aurait proposé dans tous les cas, il n’était pas idiot; mais il aurait préféré que cette demande lui vienne véritablement du coeur, qu’elle ne voit aucun inconvénient à ce que son fils et sa femme viennent chez elle diner. « Je vais essayer de faire en sorte de pas te compliquer la vie plus qu'elle ne l'est déjà. » Mais Elise n’avait pas eu besoin de venir préciser quoique ce soit pour que Damon comprenne qu’effectivement, elle venait agir de la sorte afin de rendre le quotidien de son fils plus doux plutôt que parce-qu’elle le désirait réellement. Il s’y ferait - il saurait, de toutes façons, faire en sorte d’y trouver son compte -, mais cela lui déchirait quelque peu le coeur de voir la femme qui l’avait éduqué durant toutes ces années se plier en quatre pour quelqu’un qui ne vivait même plus sous le même toit qu’elle. Pour deux personnes, en réalité, derrière le rideau tiré; l’une d’elle n’osait même presque pas admettre que toute cette mascarade était tirée pour lui. « Merci, maman. » Au moins pour lui, elle faisait les efforts nécessaires là où ils étaient attendus.

« Est-ce que la maison à Grenade a plu à Megan ? » Damon vint relever le regard vers sa mère, alors qu’un sourire tirant vers une tendresse nouvelle, inédite, se fit voir sur son visage. C’était la tendresse qu’il éprouvait lorsqu’il en venait à parler de Megan, à la mettre en avant, alors que leur relation semblait enfin venir à minima s’accorder avec l’image qu’ils donnaient désormais au grand public. « Elle lui a plu, parce-qu’elle sait à quel point elle est importante pour moi. » C’était ce genre de détail qui faisait que Damon commençait à avoir quelque-chose qui pourrait s’apparenter à un point faible pour la demoiselle - son coeur ne battait pas pour elle, loin de là, mais il apprenait doucement à venir l’apprécier à sa juste valeur. Une fois de plus, si seulement il était au courant de ce qui se tramait en réalité dans son dos, il ne verrait surement pas les choses de la même façon. « J’ai hâte de lui montrer pour de vrai, et je sais d’avance qu’elle va adorer. » Le jeune homme ne pouvait savoir si la possibilité de venir y créer des souvenirs, de la même façon que ses parents et lui l’avaient fait pendant des années, était dans les cartes mais au moins il pouvait caresser l’idée de s’y rendre pour passer de bons moments; ces derniers risquant d’être malheureusement emprunts d’une certaine nostalgie qui se savait, d’avance, incapable de contrôler ou dissimuler. « Comment ne pas l’aimer ? » Il vint alors déposer un baiser sur la joue de sa mère, avant de finalement poser sa tête contre son épaule pour fermer les yeux quelques instants. Pas grand chose, mais assez pour que cela soit ressourçant, qu’il ait l’impression une dernière fois d’être le petit garçon à sa maman, d’être Cosimo, d’être sous le soleil espagnol là où semblait être d’une simplicité enfantine.