Le retour à la vie dite normale n’a finalement absolument rien de normal et il te faut occuper tes journées autant que possible pour ne pas laisser la panique t’envahir de manière constante. Ce n’est pas que tu n’es pas heureuse, ce n’est pas que tu regrettes ton choix, ce n’est rien de tout ça, non. C’est plutôt que tu n’as pas encore eu le temps de réellement te faire à l’idée. L’information existe quelque part (partout) dans ton cerveau, mais cette dernière n’a pas encore été complètement assimilé, intégré. Tu te convaincs que le temps finira par faire son œuvre, comme il l’a si souvent fait dans les deux dernières années, et l’anxiété subsistera enfin pour laisser place à quelque chose de plus beau, de plus doux, bien plus à l’image de ta relation avec Isaac. Isaac qui n'est pas là pour te rassurer, Isaac qui ne cesse d’enchaîner les quarts de travail à l’hôpital, jumelé à toutes ses autres obligations qui font que tu es loin de le voir autant que tu ne l’aurais imaginé considérant que vous êtes tous les deux à Brisbane, ensemble, pour plus de deux semaines d’affilée pour la première fois pratiquement depuis le début de votre relation. Ton horaire te semble d’ailleurs cruellement léger depuis votre retour de Los Angeles et tu peines à remplir tes journées autant que tu le voudrais. C’est d’apercevoir cette veste oubliée sur ta commode qui t’offre l’échappatoire du jour sous la forme d’un anglais que tu n’as pas vu depuis bien trop longtemps déjà.

Ça semblait être la nouvelle norme, entre Swann et toi. Des rencontres allant du dramatique au plus inconfortable des malaises, quelques semaines de silence et puis un semblant de normalité retrouvé. Tu avais vu Rory il y a quelques jours à peine, apprenant finalement pour les retrouvailles entre les deux jeunes hommes, et tu ne pouvais être plus heureuse de voir ce sourire enfin réapparaître sur le visage du Craine à la mention de l’anglais. Si tu avais rappelé à ton meilleur ami à plusieurs occasions à quel point tu étais heureuse pour lui, pour eux, tu avais bien envie d’en faire autant en face à face avec Swann, surtout qu’ultimement, tu devais bien lui ramener cette veste qu’il t’avait prêté quelques mois plus tôt déjà. Tu devais admettre que tu étais grandement soulagée de savoir que personne ne te tenait rigueur des évènements qui se sont produits ce soir-là, que ce soit Swann, Rory ou même Isaac qui n’avait jamais démontré la moindre once de jalousie malgré le portrait de la situation ce matin-là. Et puis les photos étaient parues dans différents journaux et magazines, t’associant faussement à l’anglais, ce qui n’était vraiment qu’une rumeur de plus dans un océan de fausseté qui t’attachait sans cesse au moindre homme que tu côtoyais. Heureusement, le malentendu n’était plus maintenant que tu t’étais officiellement affichée avec Isaac dans les médias et tu espérais sincèrement que si tu venais à être surprise en compagnie de Swann à nouveau, les paparazzis ne chercheraient pas à vendre une histoire rocambolesque, bien que tu n’eusses pas grand espoir sachant que c’est exactement ce qu’ils aiment faire.

Tu avais donc pris toutes les précautions nécessaires lorsque tu avais pris la route pour cette maison à l’opposée de Toowong. Tu avais décidé d’y aller à pied, profitant de cette belle journée qui annonçait l’arrivée imminente de l’été. Tu étais toujours plus alerte des gens autour de toi lorsque tu n’étais pas derrière le volant, et puis il était plus facile de te camoufler avec une paire de lunettes soleil et un énorme sac que tu collais contre toi, dans lequel tu avais placé la veste de Swann. Le chemin n’est pas extrêmement long entre la maison d’Isaac, ou devrais-tu plutôt dire ta nouvelle demeure, et la maison de l’anglais et c’est sans t’être préalablement annoncé que tu frappes quelques coups contre la porte. Tu te souviens soudainement que l’anglais ne vit pas seul et tu redoutes quelque peu de faire face à l’une de ses colocataires, mais c’est bien le visage du blond que tu découvres une fois la porte ouverte. Tu lui offres un large sourire avant de plonger une main dans ton sac et tu lui tends sa veste, prétexte parfait pour une visite de courtoisie. « Ce n’est pas aussi galant que des fleurs, mais je me suis dit que ça te ferait peut-être plaisir de la retrouver. » que tu souffles avec un léger rire, faisant évidemment référence à cette fois où il était venu te rendre visite sans s’annoncer – exactement comme tu le fais en ce moment – bouquet de fleurs en main. « Les rumeurs disent que la sœur de Rory a accouché, est-ce que ça veut dire que je peux te surnommer tonton Swann maintenant? » que tu offres avec humour, relevant tes lunettes de soleil sur le dessus de ta tête. Ce ne sont pas que de simples rumeurs quand tu étais avec Rory à l’hôpital lorsqu’il attendait d’avoir des nouvelles de son aînée, mais ça, ce n’est qu’un détail quand tout ce que tu cherchais vraiment à faire, c’est laisser sous-entendre que tu savais pour Rory et lui, même si ce n’était plus un secret pour personne apparemment.

Penny n’était pas bien classée dans la liste des personnes qu’il s’était attendu à voir en ouvrant la porte de son appartement, mais ce n’est pas pour autant qu’il n’est pas heureux de sa présence - bien au contraire. Il sera toujours heureux de la retrouver, surtout lorsque leur relation est au beau fixe et qu’il n’a plus l’impression de lui cacher quoi que ce soit: elle sait pour Rory et lui. Les mots ne sont pas venus de sa propre bouche, l’annonce se devant d’être faite par l’acteur, mais le résultat reste le même. Qu’elle s’empresse de lui présenter sa veste sous le nez a tout pour l’amuser davantage, surtout alors qu’elle la présente pour ainsi dire comme un trophée. L’anglais étouffe un rire bref et franc. « Ce n’est pas aussi galant que des fleurs, mais je me suis dit que ça te ferait peut-être plaisir de la retrouver. » Il attrape le tissu du bout des doigts, ouvrant déjà la porte en grand pour qu’elle puisse s’engouffrer dans l’appartement sans avoir à attendre devant comme une mal propre. “Merci, au moins j’aurai pas à penser à l’arroser.” La vérité, c’est qu’il aurait amené les fleurs chez Rory pour que ce soit lui qui en prenne soin pour leurs derniers jours, mais il se retient encore de parler de lui, se demandant avec amusement combien de temps Penny peut résister avant de le faire.

Cinq secondes, voilà le temps qu’elle met avant de déjà ne plus pouvoir se retenir de prononcer le prénom de son petit-ami sans que, bien sûr, cela ne pose le moindre problème au blond. « Les rumeurs disent que la sœur de Rory a accouché, est-ce que ça veut dire que je peux te surnommer tonton Swann maintenant? » Elle est originale et il ne peut décemment pas lui tenir rigueur pour de telles paroles, bien au contraire. L’anglais est amusé par ces mots et ne cherche même pas à le cacher. Pourtant, il prend son temps avant de répondre, la priant de rentrer d’un geste de la main, pour qu’il puisse mieux refermer la porte ensuite et leur assurer une certaine intimité. Quand bien même cela n’a plus rien d’un secret, désormais. “Je suis déjà tonton, qu’est-ce que tu penses de la variante ‘Swann le meilleur et le plus fort’, du coup ?” Il assure, s’amusant de ses chevilles faussement gonflées. Bien sûr qu’il a l’impression d’être lui-même tonton de cet enfant, cela va de soi, et Penny n’a besoin d’aucune confirmation de sa part pour déjà s’en douter. “Tu veux boire quelque chose ? Manger ? T’as l’air un peu fatiguée.” Il prend déjà du recul sur leur discussion et une pause avec, soudainement soucieux pour elle quand bien même il ne cherche pas à le lui montrer. Après tout, il est toujours sur le dos de ses proches à éternellement s’assurer qu’ils se portent au mieux, elle n’en sera pas étonnée. “Ça peut aller de pair avec l’interrogatoire que tu rêves de me faire passer.” Il y ajoute un clin d’oeil, nullement gêné à l’idée de parler de Rory avec elle. Ils ont dit ce qu’ils avaient à se dire, savent tout ce qui doit l’être aussi. Elle veut sans aucun doute s’assurer que tout va mieux pour eux et Swann n’a aucune raison de la faire douter sur ce point, son sourire immuable en étant déjà un indice important.

Tu es contente de te retrouver devant Swann. Il faut dire que tu n’es pas particulièrement fière de la tournure de votre dernier tête-à-tête, même si ce dernier t’a permis d’en apprendre un peu plus sur l’anglais. Tu t’es souvent demandé s’il se serait confié à toi de la sorte, si ce n’était pas des circonstances exceptionnelles de ce soir-là. Peu importe au fond, quand désormais, tu as l’impression de le connaître un peu mieux. Assez pour dire que le sourire qui s’affiche là sur son visage semble complètement sincère et qu’il transpire d’un bonheur qui est à la fois nouveau et familier. Oh, tu la connais, la raison derrière ce sourire-là et ça ne sera certainement pas long avant que tu lui poses tout pleins de questions, de la même manière que tu avais fait avec Rory il y a quelques jours de ça à peine. « Merci, au moins j’aurai pas à penser à l’arroser. » Tu ris doucement alors qu’il t’invite à rentrer dans son appartement, et même si tu es déjà venue ici – que tu as déjà passé la nuit ici aussi – tu as l’impression de découvrir l’endroit pour la première fois. Sans doute le fait que cette fois-ci, tu es complètement sobre pour noter les petits détails de l’endroit alors que Swann vous guide jusqu’à la cuisine.

« Je suis déjà tonton, qu’est-ce que tu penses de la variante ‘Swann le meilleur et le plus fort’ du coup? » « C’est vrai? Je savais pas. » Tu ne savais pas qu’il était déjà tonton, comme tu réalises au fond que tu ne connais pas grand-chose de sa vie en dehors de sa relation avec Rory et du peu que vous avez partagé ensemble depuis, qui tourne inévitablement autour de l’acteur. « Pour ce qui est de la variante, je suis pas convaincue. » que tu souffles amusée alors que tu déposes ton sac sur la table, ton regard suivant la silhouette de l’anglais. « Tu veux boire quelque chose? Manger? T’as l’air un peu fatiguée. » Tu as l’estomac noué à la simple idée de manger et tu te pinces les lèvres pour réprimer un haut le cœur, de ceux que tu ne parviens pas à contrôler et qui t’achale nuit et jour. Que celui qui a dit que les femmes enceintes n’avaient que des nausées matinales périssent en enfer parce que clairement, il ne savait pas du tout de quoi il parlait. « Le décalage horaire n’est pas clément avec moi ce coup-ci. » que tu prétends, sachant très bien que tu ne partirais pas d’ici sans lui avoir annoncer ta nouvelle. Tu voulais toutefois prendre le temps d’avoir de ses nouvelles avant de tout simplement lâcher ta nouvelle. Tu te doutais bien que Rory se mourrait d’envie de la lui partager, mais tu tenais à être celle qui le lui dit de vive-voix. « Je veux bien un verre d’eau s’il-te-plaît. » C’est la seule chose que tu es capable de boire en ce moment de toute façon.

« Ça peut aller de pair avec l’interrogatoire que tu rêves de me faire passer. » « Rory m’a déjà pas mal raconté. » que tu admets, même si la conversation avait été parsemé d’angoisses de part et d’autres, entre ta propre nouvelle et le fait que vous vous étiez retrouvés à l’hôpital à attendre des nouvelles de son aîné. « J’ai qu’une question toutefois. » Tu reprends un air un peu plus sérieux alors que tu t’installes sur l’une des chaises de la cuisine. « T’es sûr de toi? » Ta voix est aussi douce et compréhensive que possible, il n’y a ni malice, ni mauvaise intention dans ta question. Ce n’est pas que tu doutais de Swann, ni de l’affection qu’il éprouvait pour Rory, bien au contraire. Vous en aviez discuté la dernière fois, tu le savais sincère dans ses sentiments pour le Craine, mais tu avais été là après leur rupture, tu avais vu Rory naviguer les ravages de son cœur brisé et tu redoutais dans quel état il pourrait se retrouver si les choses se compliquaient ou pire, se finissaient à nouveau avec l’anglais. « Rory est mon meilleur ami et tu sais que je t’adore, mais il est ma priorité. » Tout comme tu espérais qu’il était de nouveau et qu’il resterait éternellement la priorité de Swann aussi. « Je veux vraiment que vous soyez heureux, ensemble. » C’était sincèrement ton souhait le plus cher.

« C’est vrai? Je savais pas. » L’anglais hausse les épaules, loin d’être vexé par son aveux. Il ne peut pas parler de ses neveux autant qu’il le voudrait puisque, après tout, ils restent tout de même les enfants d’autres et il ne les voit pas autant qu’il le voudrait. Encore plus depuis le départ de ses deux sœurs, il ne voit plus ni les jumelles, ni même Noah qui est déjà un grand garçon. Ce dernier est toujours à Brisbane mais il estime n’avoir aucun droit de visite à demander à Ezra, ni même aucune raison de s’assurer de façon visuelle qu’il s’occupe bien de son fils. Au contraire de beaucoup d’autres, le blond n’en doute pas un seul instant et, sans plus approfondir le sujet, il laisse Penny entrer dans l’appartement sans plus de cérémonies. « Pour ce qui est de la variante, je suis pas convaincue. » Il plisse les yeux, faussement menaçant, faussement blessé. “C’est le temps que tu t’y fasses.” Parce que mise à part elle, il est certain que n’importe qui dans la rue l’appelle effectivement ‘Swann le meilleur et le plus fort’, il est même étonné qu’elle puisse sérieusement en douter.

En quelques mots, il lui annonce se soucier de son état de santé qui ne semble pas être au beau fixe, lui l’éternel ami occupé à toujours s’en faire pour le monde entier. Il observe ses lèvres se pincer à sa question et il a même l’impression que son teint devient un peu plus livide encore. Pour autant, Swann ne pose pas davantage de questions, ne voulant pas l’oppresser. « Le décalage horaire n’est pas clément avec moi ce coup-ci. » Il hoche la tête aussitôt, voulant lui-même se convaincre de l’explication, comme si elle n’avait pas pris l’habitude de ces changements d’horaire depuis toutes ces années sur les plateaux. “Bien sûr.” Mais oui, bien sûr, il n’insiste pas. Il lui posera la question autrement plus tard, sans doute, mais si elle ne veut pas aborder le sujet maintenant alors il ne la forcera pas. Ce n’est sûrement qu’un mauvais rhume. « Je veux bien un verre d’eau s’il-te-plaît. » Cette fois-ci, c’est avec bien plus de conviction qu’il hoche la tête, sachant par avance que si un verre d’eau n’a aucun pouvoir médicinal, il ne pourra en tout cas pas lui faire de mal. Ainsi, c’est en direction de la cuisine qu’il se détourne déjà, laissant Penny faire comme si elle était chez elle puisqu’à ses yeux, elle y a toute sa place.

« Rory m’a déjà pas mal raconté. » L’eau coule du robinet, il laisse son regard se déposer un temps sur la blonde pour lui offrir un sourire amusé. Ainsi, il sait déjà ce qu’elle s’apprête à lui demander, si elle a déjà eu le droit à la version de Rory - laquelle est la seule vérité, là n’est pas la question. Il sait qu’il lui aura dit les choses telles qu’elles sont, il n’a pas de secret à garder et c’est tant mieux ainsi. Ils en ont trop eu, pendant trop longtemps. « J’ai qu’une question toutefois. » Le ton sérieux laisse déjà comprendre le chemin qu’elle s’apprête à prendre. A force, l’anglais commence à y être habitué, sans doute. Il sait à quoi rime le sourire qui meurt peu à peu sur le visage de son interlocuteur et c’est donc sans aucune crainte supplémentaire qu’il pose entre ses mains le verre rempli aux trois quarts. « T’es sûr de toi? » La jeune femme prend place sur l’une des chaises hautes du bar, l’anglais s’en accapare une autre juste en face, ses yeux ne lâchant pas la même teinte brune des siens. Puisqu’elle a encore des choses sur le coeur, c’est évident, il se confond encore dans son mutisme pour l’enjoindre à aller jusqu’au bout de ses pensées. « Rory est mon meilleur ami et tu sais que je t’adore, mais il est ma priorité. » Ça tombe bien, puisque Rory est aussi la priorité de Swann. Leur avis se veut divergent sur bien des sujets, mais ils continueront toujours de s’entendre là-dessus, peu importe ce qu’il se passe entre eux. « Je veux vraiment que vous soyez heureux, ensemble. » - “Moi aussi.” Qu’ils soient heureux, mais surtout qu’ils le soient ensemble, de façon officielle pour la première fois depuis cinq ans. “On se connaît depuis bientôt six ans, lui et moi. Et ça va faire autant de temps que je l’aime. Je pensais pas qu’on pouvait ressentir ça pour la même personne pendant autant de temps et jamais se demander ce qu’il se passerait le jour où les sentiments s’en iraient.” L’anglais a beau être romantique, il ne se pensait simplement pas capable de toujours avoir des étoiles dans les yeux à la vue de la même personne, chaque jour durant des années. “Son bonheur passe avant tout le reste. Et s’il avait été plus heureux avec quelqu’un d’autre, je me serais effacé.” Avec un pincement au cœur, il avoue difficilement. Il sait qu’il l’aurait fait même si, de son côté, cela n’aurait en rien rimé avec un quelconque bonheur. Il l’aurait fait, pour lui. “Mais c’est pas le cas. On a eu du mal à aborder le sujet mais maintenant, je le sais.” Et, surtout, il en est assuré. Rory l’aime tout autant que le contraire est vrai. “On en parle d’abord à nos proches et nos familles et on laissera les choses devenir publiques ensuite.” Oui, il est sûr de lui. “J’ai pas envie d’être une personnalité publique comme vous mais je lui imposerai plus de mentir à tout le monde. Ça se passera sans doute pas aussi bien que je peux l’espérer mais tout ira bien pour Rory, et c’est le plus important.” Pas vrai ? Rory, leur priorité à tous les deux. Il saura répondre aux questions des journalistes, il saura canaliser leur curiosité et parler de leur histoire sans tout dévoiler aux rapaces. Il sait y faire, tout le monde l’aime, et une fois l’annonce passée alors plus personne n’en aura sans doute plus rien à faire de Swann - tout du moins, dans la théorie, c’est la version qu’il préfère entendre. “J’aurais pas fait ce que j’ai fait s’il avait été à mes côtés, cette année.” Cette fois-ci, ce sont des mots destinés à Penny et à Penny seule, aucun des proches de Rory venant le questionner au sujet de leur relation n’y aura le droit. S’il était resté à ses côtés durant l’année écoulée et si Swann ne l’en avait pas chassé, alors il sait que jamais il n’aurait voulu mettre fin à ses jours, jamais il n’aurait voulu arrêter soudainement une vie dans laquelle il le rendait tant heureux, peu importe à quel point elle s’acharnait sur sa personne pour devenir difficile. Une vie avec lui mérite toujours d’être vécue dans son entièreté.

« Bien sûr. » Pour une actrice, tu offres parfois de très mauvaises performances. Aujourd’hui en est une alors que tu peines à camoufler la fatigue qui s’accumule encore et toujours malgré ton horaire plus-que-léger depuis ton retour de Los Angeles et les nausées qui te font perdre du poids plutôt que d’en gagner, même si tu es toujours dans les premières semaines de ta grossesse et que tu ne t’attends pas à ce que ça paraisse, du moins physiquement parlant parce que c’est plus dur que tu ne le pensais, que de cacher tes autres symptômes. Ils sont bien plus désagréables que tout ce que tu aurais pu t’imaginer aussi, mais tu as espoir que ça cesse d’ici quelques semaines, quand le premier trimestre sera derrière toi et que tu auras droit à ce second souffle d’énergie qui vient apparemment avec le deuxième trimestre. Du moins, c’est ce que tu as lu sur internet. Mais il n’insiste pas Swann, et tu le remercies silencieusement pour ça. Non pas parce que tu ne veux pas lui annoncer ta nouvelle, mais parce que tu veux parler de Rory et lui avant que la conversation ne se concentre uniquement sur toi comme elle risque de le faire.

Ce que tu dis à Swann ensuite ne se veut pas être des menaces, même si ça peut sonner un peu ainsi. Tu ne connais pas tous les détails de leur histoire, tout comme tu ne connais pas tous les détails de leurs retrouvailles malgré les quelques confidences de Rory et loin de toi l’idée de présumer de quoique ce soit. C’est tout simplement ton côté protecteur qui ressort, l’affection que tu portes au Craine prenant beaucoup de place dans ta vie. « Moi aussi. » Tu es soulagée de l’entendre, tout comme le témoigne le léger sourire qui s’installe sur tes lèvres. « On se connaît depuis bientôt six ans, lui et moi. Et ça va faire autant de temps que je l’aime. Je pensais pas qu’on pouvait ressentir ça pour la même personne pendant autant de temps et jamais se demander ce qu’il se passerait le jour où les sentiments s’en iraient. » Tu écoutes attentivement. Tu ne t’y connais pas assez en relation longue durée, ni même en sentiments amoureux de manière générale pour vraiment comprendre ce à quoi il fait référence. Ton histoire, aussi intense soit-elle, avec Isaac est encore toute récente et même si tu n’imagines pas le jour où il ne te fera plus ressentir une montagne russe d’émotions, tous plus exaltants les uns des autres, tu sais que parfois, la passion des débuts s’évapore et ne se transforme pas toujours comme on l’aurait souhaité, ce qui te fait d’autant plus peur vu le virement que s’apprêtait à prendre votre relation. « Son bonheur passe avant tout le reste. Et s’il avait été heureux avec quelqu’un d’autre, je me serai effacé. » « Je sais. » Tu étais bien placée pour le savoir, après tout. « Mais c’est pas le cas. On a eu du mal à aborder le sujet mais maintenant, je le sais. » Tu te souvenais avoir eu des conversations distinctes, autant avec un qu’avec l’autre, sur ces sentiments qui n’étaient pas morts ni d’un côté, ni de l’autre et ne pouvoir qu’attendre et qu’espérer qu’ils trouveraient le bon moment pour enfin se retrouver. « On en parle d’abord à nos proches et nos familles et on laissera les choses devenir publiques ensuite. J’ai pas envie d’être une personnalité publique comme vous mais je lui imposerai plus de mentir à tout le monde. Ça se passera sans doute pas aussi bien que je peux l’espérer mais tout ira bien pour Rory, et c’est le plus important. » « Qu’est-ce qui te fait le plus peur, dans tout ça? » que tu t’oses à lui demander. Tu ne connaissais pas vraiment les raisons qui les avaient poussés à garder leur couple secret pendant toutes ces années. Était-ce seulement parce que Swann ne voulait pas se retrouver sous les projecteurs comme il le décrétait, ou avait-il eu du mal à assumer d’être en couple avec un homme? Dans un cas comme dans l’autre, tu pouvais comprendre et surtout, tu ne jugeais pas, jamais. Parce que tu comprenais trop bien que de se retrouver sous l’œil public n’avait rien d’une partie de plaisir bien souvent et même si tu n’avais jamais caché ta bisexualité, ça demeurait un sujet tabou, surtout dans un monde aussi féroce et injuste que celui des médias. « Je suis certaine que tout va bien se passer et puis connaissant Rory, il te laissera aller à ton rythme. » que tu tentes de l’encourager. C’était un grand pas qu’ils s’apprêtaient à prendre tous les deux et tu espérais sincèrement que tout se passe le plus calmement possible.

« J’aurais pas fait ce que j’ai fait s’il avait été à mes côtés, cette année. » Ton cœur se serre légèrement alors que ses confidences te reviennent. Tu pinces légèrement les lèvres, ton regard scrutant le sien, à la recherche de quelconques indices pouvant t’indiquer que quelque chose cloche à nouveau, mais tu ne trouves rien à ton plus grand soulagement. « Il est au courant? » Tu te doutes bien que oui, mais tu préfères demander, ne serait-ce que pour être certaine. Ce n’est pas un sujet de conversation que tu aborderais avec Rory, par respect pour l’anglais qui est en droit d’en discuter avec qui il le veut, de la manière dont il s’en sent capable. Tu sais seulement que c’est le genre de chose que Rory voudrait savoir, ne serait-ce que pour être présent pour Swann. « Et ça va mieux, maintenant? » que tu demandes ensuite, pour t’assurer que derrière le sourire qui habite ses lèvres à la mention du Craine ne se cache pas un désespoir qu’il saurait bien camoufler. Tu ne saurais dire si ce sont les grosses émotions, le fait que tu n’as rien avaler depuis quelques heures ou simplement cette grossesse qui fait des siennes, mais tu es soudainement prise d’un haut le cœur que tu peines à gérer. « Les toilettes sont où déjà? » que tu demandes rapidement, mettant une main sur ta bouche alors que tu peines à voir la direction que Swann t’indique et ça ne prendra que quelques secondes avant que tu ne disparaisses dans la salle d’eau.

« Son bonheur passe avant tout le reste. Et s’il avait été heureux avec quelqu’un d’autre, je me serais effacé. » - « Je sais. » Et il sait en retour que c’est le cas, ils ont déjà eu cette conversation, il le lui a déjà expliqué aussi. Pourtant, Swann ressent le besoin de revenir dessus, de préciser ses mots, de se dédouaner et, surtout, de s’excuser. Rory aurait été heureux à ses côtés, il en est persuadé, mais il est aussi intimement convaincu que personne n’aurait su le rendre aussi heureux que lui. Leur histoire n’est pas aussi rose qu’il le voudrait mais c’est en traversant de nombreuses épreuves qu’ils ont appris à s’aimer et à se soutenir, chose que personne d’autre ne pourrait comprendre. « Qu’est-ce qui te fait le plus peur, dans tout ça? » Oh, Penny. Swann lui partage un sourire attendri, sachant pertinemment qu’elle n’essaye pas de le blesser ni même de trouver ses faiblesses ; elle les connaît, maintenant, de toute façon. La seconde suivante, le rire qu’il étouffe n’a rien de réellement amusé. “Absolument tout.” Son sourire ne meurt pas, ne voulant pas dramatiser une discussion qui n’en a certainement pas besoin. Penny mérite d’entendre la vérité mais il ne demande pas davantage d’empathie de sa part: elle a déjà bien assez donné à ce niveau-là. “L’idée de faire un coming-out, l’exposition dans les médias, le jugement d’inconnus, le fait que notre historique en vienne à être connu, l’idée qu’on cherche à fouiller dans mon passé, …” Il précise, bien malgré-lui, la liste non exhaustive de tout ce qui l’empêche de s’endormir sereinement les soirs où les bras de Rory empêchent toutes insécurités de s’immiscer dans son esprit. “J’ai peur de le perdre dans le processus.” Finalement, par dessus toutes choses, c’est ce qui le terrifie réellement. Il sait être capable d’affronter tout le reste, peu importe tout ce que cela pourrait lui coûter, mais il ne peut pas forcer Rory à rester auprès de lui et à l’aimer s’il en vient à devenir un homme différent. Tout en sachant que c’est justement le secret imposé qui les a perdus lors de leurs premières années ensemble, il ne peut s’empêcher de craindre que le contraire les mène tout aussi irrémédiablement au même point. Il baisse les yeux, serre les dents, sans doute honteux de penser au pire. « Je suis certaine que tout va bien se passer et puis connaissant Rory, il te laissera aller à ton rythme. » Il relève ses yeux sombres en sa direction, hochant doucement la tête pour aller dans le sens de ses paroles. “Il a toujours fait passer mes besoins avant les siens.” Nul besoin de préciser encore une fois qu’il est question du secret ayant longtemps entouré leur couple. Si un problème devait survenir, il est certain qu’il ne serait en rien la faute de Rory. Swann a peur de bien des choses mais certainement pas de l’amour que son petit-ami lui porte, ni même de sa fidélité ou de sa confiance.

Une dernière fois, il se permet de confesser à Penny tout l’amour qu’il peut à son tour porter au brun ainsi que l’impact éminemment positif qu’il a dans son existence, au point où il n’aurait jamais pensé à en finir s’il l’avait gardé à ses côtés. « Il est au courant? » La jeune femme est touchée, c’est une évidence autant que la raison pour laquelle il tente en retour de la rassurer d’un sourire franc. C’est une histoire qui appartient au passé et seulement au passé. “On a pas vraiment abordé le sujet à nouveau.” Swann confesse, désolé. Ils n’en ont plus parlé depuis que Rory est arrivé chez lui le souffle court, les larmes aux yeux, image que Swann ne se pardonnera jamais d’avoir provoquée. Depuis, il ne s’est jamais imaginé en parler à nouveau, pas même pour lui annoncer à sa façon qu’il l’aime plus que tout au monde, bien avant sa propre vie. Ils en reparleront, un jour. « Et ça va mieux, maintenant? » Doucement, il esquisse un pas en direction de la jeune femme pour l’embrasser tendrement contre la tempe. S’il a bien plus été doué pour s’exprimer par les gestes plutôt que les mots, l’anglais sait pourtant que l’absence de réponse verbale mènerait à bien plus de craintes qu’autre chose, raison pour laquelle il ajoute quelques mots, plus sincères que jamais. “J’ai jamais été aussi heureux. Ne t'inquiète pas pour moi.” Même les craintes qui entourent son avenir ne suffisent à mettre à mal un tel état d’esprit. Il a un travail qui lui plaît, des amis formidables et un petit-ami avec qui il passe le plus clair de son temps, alors tout va pour le mieux, même si les mois passés n’ont pas été aussi simples qu’il n’y paraît.

« Les toilettes sont où déjà? »

La question le prend par surprise mais il ne fait aucun commentaire, se contentant d’un simple pas en arrière et d’une main pointée en direction de ladite pièce. Sur son visage se lit pourtant tout le soucis qu’il se fait pour elle alors que la jeune femme a déjà une main fermement posée contre sa bouche. Finalement, il ne lui laisse que quelques secondes d’avances avant de s’annoncer à sa suite, inquiet. Du bout de ses phalanges, il toque à la porte de la pièce. Son ton est bas, comme s’il ne voulait pas la déranger davantage. “Pen… Ça va ? Tu veux un verre d’eau ?” Parce qu’il est bien connu que les verres d’eau règlent tous les problèmes du monde, non ?

« Absolument tout. » Tu fais une légère grimace à cette réponse, qui en soit n’est pas réellement surprenante même si tu peux facilement t’imaginer le niveau d’anxiété qui accompagne l’anglais, aussi sûr soit-il de la décision qu’il a prise. « L’idée de faire un coming-out, l’exposition dans les médias, le jugement d’inconnus, le fait que notre historique en vienne à être connu, l’idée qu’on cherche à fouiller dans mon passé, … » Ce serait beaucoup pour n’importe qui et ça te donne le tournis juste d’y penser, même si tu es toi-même passée par une étape similaire, bien que pour des raisons totalement différentes. Tu as choisi le métier d’actrice, tu as choisi de vivre avec l’exposition et les jugements qui accompagnent une profession de ce genre. Ce n’était pas le cas de Swann. Lui, il n’est coupable que d’être amoureux d’un homme qui vit sa vie sous le scrupule incessant des médias. « J’ai peur de le perdre dans le processus. » « Impossible. » que tu t’empresses de répondre, non seulement pour le rassurer, mais aussi parce qu’au fond de toi, tu en es persuadée. « Je connais assez Rory pour savoir qu’il ne laissera rien ni personne s’immiscer entre vous. » Il en a tellement rêvé, de ses retrouvailles, que tu peines à croire que quelque chose puisse venir se mettre dans le chemin de leur histoire, pas même les angoisses de Swann vis-à-vis ce qu’une relation mise publique représente. « Tu crains la réaction de tes proches vis-à-vis de ton coming out, ou seulement celle d’inconnus qui vont lire ton nom une fois dans un magazine People et l’oublier l’instant d’après? » C’est ça, le monde des médias. Tu fais parler de toi un temps, si scandale il y a (ce qui n’est pas le cas ici) et puis les gens tournent la page et passent à la prochaine histoire. Oui, Rory et toi êtes familiers avec la presse people et des scandales plus souvent faux qu’autrement, mais du peu d’expérience que tu possèdes, souvent les outsiders attachés à une célébrité sont rapidement oubliés. « La première fois que j’ai été photographié avec une femme, ça a fait jaser pendant quelques semaines, et puis quelqu’un a fait quelque chose de considérer plus choquant et tout le monde a oublié que j’étais bisexuelle. » Si c’était le genre de détails qui faisait encore son apparition ici et là dans des articles te concernant, il y avait longtemps que ce n’était plus l’attraction principale. « Ce que j’essaye de te dire, c’est que ça va peut-être te sembler ingérable au début, pendant quelques semaines, quelques mois tout au plus, et puis la vie va suivre son cours, pour tout le monde. Toi inclus. » C’est facile de croire qu’il est impossible de s’habituer à se voir dans les magazines People, mais la vérité c’est que ça devient rapidement lassant, même pour quelqu’un d’aussi sensible que toi ou Swann. « Il a toujours fait passer mes besoins avant les siens. » Tu échappes un petit rire, parce que c’est ce que Rory fait le mieux de manière générale, faire passer les besoins de ceux qui lui sont proches avant les siens. Et tu ne vois pas le jour où cela changera. « Et je sais que toi, tu vas t’assurer de faire passer les siens avant les tiens. » Et quelque part, tu ne doutes pas qu’ils réussiront à retrouver cet équilibre qui leur avait si bien réussi quatre ans durant.

Aborder à nouveau ce secret qu’il t’a confié la dernière fois est quelque chose qui te met légèrement mal à l’aise, tout comme tu as l’impression que c’est nécessaire, autant pour lui que pour toi. Lui pour être complètement honnête dans ses réponses et dans ses intentions et toi pour être complètement rassurée qu’il va mieux aujourd’hui et que son sourire ne cache rien de sinistre. « On a pas vraiment abordé le sujet à nouveau. » Tu hoches la tête, te doutant que ce n’est pas le genre de sujet qui s’évoque dans une conversation de la vie de tous les jours. Tu n’oses pas réellement élaborer plus longuement sur ce point, consciente que ce terrain n’appartient qu’à Swann et Rory et qu’il en revient à l’anglais de choisir quand et comment il se sent à l’aise de s’ouvrir sur sa tentative avec son petit-ami. Toi, tu ne peux faire qu’une chose : prendre de ses nouvelles et t’assurer que l’anxiété qu’il vit ne vient pas miner dangereusement son moral. Il s’approche de toi légèrement et quand ses lèvres se posent avec affection sur ton front, tu comprends que oui, il va mieux. Que non, son sourire ne ment pas et que rien ne pourrait noircir son esprit à nouveau comme il l’a été il y a quelques mois. C’est puissant parfois, le langage du non-verbal. Malgré tout ce que tu as compris sans qu’il n’ouvre la bouche, il ajoute sur une voix rassurante « J’ai jamais été aussi heureux. Ne t’inquiète pas pour moi. » ce qui t’arrache un petit rire. « C’est ce que font les amis. » Ils s’inquiètent, ils s’interrogent et surtout, ils font tout en leur pouvoir pour s’assurer que les nuages gris restent aussi loin que possible.

Tu aurais aimé pouvoir élaborer plus longuement sur le sujet, mais c’est soudainement impossible quand tu te lèves en trombe, demandant le chemin de la salle de bain seulement pour t’y rendre en moins de 10 secondes, juste le temps de claquer la porte derrière toi avant de te retrouver la tête dans la cuvette. C’est la pause vomi, et c’est complètement déprimant de penser qu’à tous les jours, plusieurs fois par jour, il y a cette ‘pause’ qui s’impose dans ton quotidien, te rappelant une bonne nouvelle oui, mais de la manière la moins agréable qui soit. Tu entends quelques coups contre la porte, devinant que Swann t’a suivi et qu’il a certainement tout entendu, à ton plus grand désarroi. Elles sont foutument difficiles à cacher, tes nausées, et plus ça va, plus elles trahissent ce que tu peines déjà à garder secret. « Pen… Ça va? Tu veux un verre d’eau? » « Oui, s’il-te-plaît. » Tu réponds sans ouvrir la porte, te disant que le temps qu’il retourne chercher ton verre, tu pourrais te relever et te nettoyer un peu. Tu aimerais dire que ça va mieux, mais ce n’est pas vraiment le cas. Quand tu entends ses pas derrière la porte, tu l’ouvres et attrape le verre qu’il te tend. « Merci. » Tu prends une longue gorgée et puis lèves le regard vers l’anglais qui semble toujours aussi inquiet. « T’inquiète. Ce que j’ai n’est pas contagieux. » Un sourire se forme sur tes lèvres et puis tu reprends une autre gorgée avant d’annoncer « Je suis enceinte. », craignant comme toujours la réaction de la personne à qui tu partages la grande nouvelle. Parce que ta relation est récente, que c’est rapide, que ça peut sembler inconscient d’avoir pris la décision de le garder dans ces conditions, mais tu espères vraiment que Swann saura comprendre et être heureux pour toi, comme tu étais heureuse pour lui.

« Impossible. » C’est arrivé une première fois déjà, pourtant. « Je connais assez Rory pour savoir qu’il ne laissera rien ni personne s’immiscer entre vous. » Mais puisque ce n’est pas une bataille qu’il veut gagner et bien au contraire, l’anglais se réconforte bien volontiers dans les paroles de son amie. Elle sait ce dont elle parle, elle connaît elle aussi Rory et le fait qu’elle puisse apporter un point de vue différent sur la situation a tout pour rassurer l’anglais, finalement. Tout ce qu’il souhaite, c’est pouvoir à son tour assurer qu’il ne laissera plus rien ni personne s’immiscer entre eux à partir de maintenant, mais sa propre confiance en lui continue éternellement de lui faire défaut. « Tu crains la réaction de tes proches vis-à-vis de ton coming out, ou seulement celle d’inconnus qui vont lire ton nom une fois dans un magazine People et l’oublier l’instant d’après? » Le sourire qu’il affiche semble réellement heureux, dénué de tout rapport avec la discussion, et pourtant il ne fait que porter un masque pour ne pas avoir à entrer dans un pathos inutile. “Tout le monde n’est pas capable de voir les choses de cette façon.” Lui le premier. Il aimerait avoir son recul et être capable de se dire que l’avis d’inconnus n’a aucune importance pour lui mais c’est faux. Swann ne ressent pas même le besoin de répondre à sa question, pouvant de toute façon s’avancer en disant que lui faire part de ses craintes ne suffira pas à les résoudre. Tout ce qu’il peut faire, maintenant, c’est tenter de se préparer au mieux aux retombées médiatiques tout en se rappelant que Rory en vaut largement la peine et qu’il mérite que quelqu’un prenne enfin des risques pour lui. « La première fois que j’ai été photographié avec une femme, ça a fait jaser pendant quelques semaines, et puis quelqu’un a fait quelque chose de considérer plus choquant et tout le monde a oublié que j’étais bisexuelle. » Tant mieux pour elle. Penny mérite de pouvoir vivre sa vie comme elle l’entend et ce n’est pas parce qu’elle joue dans des films que quiconque devrait avoir le droit d’interférer avec son quotidien et celui de ses proches. Si Swann n’avait pas entendu parler de cette histoire de photographies, il était pourtant au courant de la bisexualité de son amie, raison pour laquelle il n’est pas étonné de son aveux. “Tes proches le savaient déjà, à l’époque ?” Est ce qu’elle a eu le temps de faire son propre chemin avant que les médias n'accélèrent les choses de façon artificielle ? « Ce que j’essaye de te dire, c’est que ça va peut-être te sembler ingérable au début, pendant quelques semaines, quelques mois tout au plus, et puis la vie va suivre son cours, pour tout le monde. Toi inclus. » Cette fois-ci, le sourire qu’il affiche est bien moins assuré mais bien plus réaliste. Il a peur, c’est un fait, mais il sait qu’il est aujourd’hui capable de traverser cette épreuve pour enfin la considérer derrière lui, derrière eux, et mieux se concentrer sur leur quotidien et leur avenir. “Merci.” L’anglais souffle finalement, conscient du caractère précieux des mots de la jeune femme qui connaît le milieu bien mieux que cela ne sera jamais son cas. Que la vie suive son cours, voilà tout ce dont Swann peut réellement rêver. La normalité, et le bonheur.

La discussion connaît pourtant une fin abrupte lorsque Penny demande rapidement l’emplacement de la salle de bain pour s’y rendre tout aussi vite, laissant derrière elle un anglais inquiet. Il ne tarde pas à la suivre, toquant de quelques maigres coups contre la porte pour lui demander si elle va bien, si elle a besoin de quoi que ce soit. S’il n’a pas la moindre envie d’envahir son intimité, il sait pourtant qu’une telle réaction soudaine n’a rien de rassurante. « Oui, s’il-te-plaît. » Le verre d’eau ainsi accepté, il consent à faire quelques pas en arrière pour retrouver la cuisine et le lui remplir rapidement. Ce n’est pas un verre d’eau qui résoudra tous ses problèmes mais il ne lui fera sûrement pas de mal.

La porte s’ouvre sur son passage et il tend aussitôt le verre à la jeune femme, non sans l’analyser de la tête aux pieds, comme s’il avait la faculté de comprendre ce qui ne va pas avec son amie. « Merci. » Les lèvres scellées de l’anglais ne trouvent pas le temps de répondre quoi que ce soit, il a la tête ailleurs. « T’inquiète. Ce que j’ai n’est pas contagieux. » Ce dont il n’avait pas eu crainte un seul instant mais si la jeune femme est encore capable d’humour, c’est que les choses ne doivent pas être si graves qu’il aurait pu l’imaginer. « Je suis enceinte. » Pour autant, cela ne fait pas partie des possibilités qu’il avait explorées, et la surprise n’a aucun mal à se lire sur le visage du blond. “C’est une bonne ou une mauvaise nouvelle pour toi ?” Penny ferait une mère merveilleuse, ne vous y détrompez pas, mais l’anglais sait aussi que son couple en est encore à ses balbutiements et qu’une telle nouvelle aurait de quoi décontenancer n’importe qui. Tout ce qu’il souhaite savoir, c’est comment accueillir la nouvelle à son tour et s’il doit se réjouir pour elle ou lui proposer de l’épauler autant que possible. Parce que les amis sont présents dans les bons comme dans les mauvais moments et que c’est au moins un rôle qu’il a toujours su tenir.

« Tout le monde n’est pas capable de voir les choses de cette façon. » Et tu sais très bien que par tout le monde, c’est de lui qu’il parle, mais tu sais aussi que ce n’est pas quelque chose qui est figé dans le temps, quelque chose d’insurmontable. « C’est comme tout le reste, ça s’apprend. » Ce n’est pas un changement qui se fera en un claquement de doigt, tu en conviens. C’est un travail à long terme, de ceux qui n’ont aucune date d’expiration parce qu’il y a toujours quelque chose à améliorer, mais ce n’est pas impossible. C’est de se défaire peu à peu de ce qu’on a toujours cru, de ce qu’on se croit capable de faire, de surmonter, de supporter et puis de réaliser peu à peu que le regard d’autrui n’a pas à tenir autant de valeur. Tu sais aussi pertinemment que s’il y a une personne pour qui Swann serait prêt à faire tout ça, c’est Rory. Alors même si tu sais qu’il s’inquiète, même si tu sais que ce sera sans doute un mauvais moment a passé, même si tu aimerais pouvoir prendre toutes ses craintes et les faire disparaître sans que ce ne soit possible, tu n’es pas vraiment inquiète par la suite, pour leur suite parce que tu sais que les deux hommes veulent faire les choses bien cette fois-ci et que c’est ça, le plus important de tout. « Tes proches le savaient déjà, à l’époque? » Tu fais signe que oui de la tête. Ce n’est jamais quelque chose que tu as cherché à camoufler depuis ton premier girl crush au début de l’adolescence. Tes parents ont toujours été extrêmement ouverts face à ça, ce qui t’a sans doute donné le courage d’accepter et d’assumer qui tu es dès le départ. « La plupart, oui. J’ai eu droit à des jugements et des remarques désagréables, mais ça permet de faire le ménage dans son cercle social. » Tu lui offres un léger sourire. Tu sais bien qu’il ne s’imaginait sûrement pas faire un tel coming-out, surtout que ça s’appliquait à bien plus qu’à ses proches, mais ceux qui jugent, amis ou pas, ne méritent pas la moindre attention à ton avis. « Merci. » Ta main trouve la sienne et puis tu serres doucement. Tu n’as pas fait grand-chose, mais si tu peux avoir aider à calmer ses appréhensions ne serait-ce qu’un peu, alors tu le vois comme une victoire.

Et puis ce sont les nausées qui prennent la prochaine victoire quand elles s’imposent au beau milieu de la conversation. Tu as vraiment hâte que ça se calme d’ailleurs, même s’il est bien impossible de dire à quel moment tu seras enfin libérée de ce fardeau qui te rappelle sans cesse tous les changements qui se produisent actuellement dans ton corps. Tu ne sais pas si le verre d’eau va réellement aider, mais ça ne peut certainement pas faire de tort. Tu en prends de longues gorgées, espérant que ça soit suffisant pour t’épargner une prise deux dans la salle de bain. Swann te regarde de la tête au pied, comme s’il tentait de t’analyser du regard, mais lorsque tu lui expliques la raison derrière tes nausées soudaines, c’est la surprise qui triomphe sur tout le reste. « C’est une bonne ou une mauvaise nouvelle pour toi? » Cette fois-ci, c’est toi qui es surprise. Il est le premier à te demander ça de cette façon. Rory et Angus s’étaient tous les deux exclamés de surprise et puis t’avaient félicité, sans réellement savoir quelle position tu prenais face à cette nouvelle surprenante. Il n’y aucune malice derrière sa question, aucun jugement. Il est prudent, Swann, il l’a toujours été. « C’est une nouvelle inattendue. » Il en comprendra donc que ce n’était pas quelque chose de planifier, même si ça, ce n’est pas bien difficile de le deviner puisque ça fait à peine six mois que tu connais Isaac, et encore moins de temps que vous êtes officiellement ensemble. « Mais c’est une bonne nouvelle. On est contents. » Oui, vous l’êtes. Tu ne réalises pas encore et tu vas sûrement mettre quelques semaines encore avant que ça ne s’incruste pleinement dans ta tête. « Je sais que c’est rapide. » Et le commentaire est bien plus pour toi que pour lui, même si tu ne doutes pas que la pensée lui ait traversé l’esprit.

« C’est comme tout le reste, ça s’apprend. » Qu’il apprenne ou non n’est plus vraiment le sujet, maintenant. Swann sait qu’il saura passer outre et ce peu importe ce qu’il lui en coûte, il a déjà donné bien trop d’importance à ses peurs innombrables et irraisonnées pour les laisser lui gâcher une vie avec Rory. Au moins, il est rassuré de savoir que le coming out de Penny est passé par un processus bien moins long et bien moins douloureux aussi. A son hochement de tête il accuse un sourire en coin, fier, quand bien même il n’y a pas participé ni de près ni de loin puisqu’ils ne se connaissaient pas encore, à l’époque. « La plupart, oui. J’ai eu droit à des jugements et des remarques désagréables, mais ça permet de faire le ménage dans son cercle social. » Le sourire du blond répond à celui de son amie et il s’élargit davantage encore lorsqu’elle chasse ses dernières craintes en prenant sa main dans la sienne. Swann ne veut pas faire de ménage dans son cercle social, il aime bien trop chaque personne qui le compose pour en venir à une telle extremité et il sait qu’il saurait accepter tous les reproches de leur part. La seule chose qui pourrait le faire changer d’avis serait que les reproches changent justement de cible pour se concentrer sur son petit-ami, ce qu’il ne saurait accepter.

Soudainement placé de l’autre côté de la porte de la salle de bain, l’anglais se montre patient avec l’espoir enfantin que son amie aille soudainement mieux, sans pour autant savoir ce dont elle souffre exactement. Ainsi, c’est en apportant un verre d’eau qu’il tente de se rendre utile ou au moins de faire semblant de l’être. Lorsque Penny lui avoue être enceinte, il se rend pourtant compte de l’inutilité la plus totale de son geste, même si seule la surprise demeure ancrée sur son visage. Du bout des lèvres, il demande à son amie comment est-ce qu’elle gère la situation et, surtout l’annonce de sa grossesse, pour à son tour pouvoir réagir en conséquence. Il existe bien trop de paramètres à prendre en compte pour qu’il puisse anticiper sa réponse avec précision, Swann s’en remet donc pleinement aux mots de la jeune femme alors qu’il sait qu’elle lui dira la stricte vérité. Avec lui, elle n’a pas besoin de mentir. « C’est une nouvelle inattendue. » Ce dont il se doutait très largement déjà. Il hoche la tête pour lui laisser le temps de trouver ses mots tout en lui faisant comprendre qu’il l’écoute attentivement. « Mais c’est une bonne nouvelle. On est contents. » Alors, soulagé et heureux de l’entendre, il se permet finalement de sourire avec une certaine émotion. Penny va être maman. Elle sait faire face à l’imprévu, nul doute qu’elle saura tout mettre en place pour l’arrivée de cet enfant dans l’année à venir, tout comme le fait qu’elle sera une mère formidable, douce et aimante. L’anglais arrête de l’analyser de long en large pour ne finalement plus que poser son regard dans le sien, ému et toujours sous le choc d’une telle nouvelle. « Je sais que c’est rapide. » Les mots sonnent comme une excuse, comme un reproche qu’elle s’apprête déjà à entendre aussi.

Du bout des doigts, il reprend le verre d’eau pour le poser contre l’évier, agissant avec une délicatesse infinie pour finalement poser une main à l’arrière du crâne de son amie et l’autre contre son dos. Sur sa tempe, il dépose un baiser, faisant de son mieux pour ne pas l’étouffer sous le bonheur qu’il ressent pour elle. “Vous ferez des parents formidables, le timing n’est pas important.” Pas dans leur cas, pas s’ils accueillent la venue de ce bébé avec joie, pas alors qu’ils s’aiment réellement. A sa place, il aurait été le plus heureux du monde à l’idée d’accueillir un enfant dans sa vie plus tôt que prévu mais force est de constater que ce n’est pas ce qui risque de lui arriver à en juger par la composition de son couple. “Je suis heureux pour toi, vraiment.” Il assure finalement, quand bien même ses gestes parlaient sûrement déjà pour lui. “Tu seras une mère formidable.” Et ça, elle a sûrement besoin de l’entendre, parce qu’aucun geste affectif ne saurait le traduire.

Tu te sentais un brin hypocrite alors que pendant ce qui te semblait être d’éternelles secondes, tu redoutais la réaction de Swann vis-à-vis la nouvelle de ta grossesse. Toi qui venais de passer de longues minutes à le réconforter sur le fait que tout autre avis que le sien ou celui de Rory sur son couple n’étaient que du bruit qu’il finirait par oublier, qu’il ne devait pas se soucier de la mauvaise opinion de qui que ce soit, voilà que tu faisais exactement le contraire quand tu apprenais à tes amis les plus proches que tu étais enceinte. Tu savais pourtant que Swann ne porterait aucun jugement, tout comme Rory et Angus avant lui et pourtant, tu n’étais pas en mesure de faire taire ton monologue interne qui te rappelait à quel point c’était de la folie, que c’était bien trop vite, que tu ne pouvais pas être si certaine de toi et de tes sentiments après si peu de temps, que c’est à peine si tu connaissais réellement Isaac, et il continuait ainsi pendant longtemps, bien trop longtemps le monologue alors que tu t’efforçais de te rassurer. Parce que si le temps semblait jouer contre vous, tu ne remettais aucunement en doute les sentiments que tu éprouvais pour l’infirmier et ce vœu cher qu’il fasse de ta vie pour longtemps encore.

Tu aurais voulu que la petite voix méfiante se taise, qu’elle disparaisse, et c’était presque le cas alors que la surprise sur le visage de Swann se changea pour une joie qu’il ne tentait plus de camoufler de quelconque façon que ce soit. Il attrape le verre d’eau que tu tenais encore et vient le déposer sur le comptoir avant de te prendre dans une étreinte qui te fait du bien, de celles qu’on ne sait pas avoir besoin mais qui pourtant font toute la différence. Tu t’accroches à lui pendant quelques secondes d’ailleurs, étires le tout quand il tente de se reculer et c’est seulement après qu’il ait déposé un baiser contre ta tempe que tu te recules enfin, relevant la tête pour croiser son regard, le bonheur qui se lit sur son visage se réciproquant sur le tien, sans gêne et sans honte mal-placée cette fois. « Vous ferez des parents formidables, le timing n’est pas important. » « Isaac sera merveilleux. » Si tu doutes de tes propres capacités à être une bonne mère, tu sais sans l’ombre d’un doute que ton amoureux sera incroyable dans ce nouveau rôle. « Je suis heureux pour toi, vraiment. » « Merci Swann. » Et si tu sens les larmes qui te montent aux yeux, tu blâmeras les stupides hormones qui te rendent plus émotives qu’à l’ordinaire. « Tu seras une mère formidable. » « Est-ce que ça se voit tant que je suis absolument terrifiée à l’idée? » que tu souffles sur un ton amusé bien que tu sois complètement sérieuse, notant qu’il t’avait complimenté sur ton futur rôle de mère deux fois en quelques secondes à peine. Tu te mordilles légèrement la lèvre et attrapes le verre d’eau que tu portes à tes lèvres avant de reprendre le chemin du salon, n’ayant pas particulièrement envie de poursuivre la conversation entre la toilette et le lavabo. « Si ça se trouve, on va faire la une en même temps, mais pas ensemble cette fois. » C’est une blague, mais pas vraiment puisque tu te serais bien passée des rumeurs t’associant à Swann, et tu sais que lui aussi. « On sera deux à fuir l’opinion du public. » Il y a quelques semaines à peine, tu annonçais la présence d’un homme dans ta vie et voilà déjà que tu te préparais à leur annoncer ta future maternité. Si tes amis avaient des bons mots à ton égard en ce moment, tu te doutais que ce ne serait pas le cas pour tout le monde. Faut bien se consoler comme on peut.