Voilà quelques semaines passées que Dinis avait appris la confirmation de sa paternité. Il savait qu’il avait un fils, il savait que cette fois, Alyssa n’avait pas divaguée et choisi une victime au pur hasard. Il avait toujours des questions dont les réponses ne lui seraient sans doute jamais apportée, simplement parce qu’il n’avait pas revu Alyssa et qu’il n’avait pas l’intention de la revoir. Au final, il savait qu’il n’avait plus qu’à accepter l’information. Dinis a un fils, c’est tout. Et tant que celui-ci n’allait pas chercher à en savoir davantage sur lui, il ne ferait rien. Du moins, c’est ce dont il s’était persuadé, sans admettre que sans avoir les vrais résultats, il ne pourrait jamais venir vers lui pour chercher à savoir qui était vraiment son père. Et à la fois, comme disait Elise, un père, il en avait déjà un. Dinis ne prendrait jamais sa place. Tant mieux, fin de l’histoire.
C’était de plus en plus facile, de voir Elise, jour après jour, sans avoir à se faire la gueule pendant plusieurs autres jours entre deux. Ils apprenaient à s’apprivoiser petit à petit et Dinis lui, savait sur quels terrains il ne devait pas mettre les pieds.  Partisan de la paix dans le monde, s’il pouvait éviter les conflits, bien sûre qu’il le ferait. Pas envie d’aller au front avec Elise et en même temps, elle avait l’air plus apaisée au fur et à mesure que le temps passait. En tout cas, c’est ce qu’il aimait penser. C’est ce dont il avait envie de croire. Et lui avait envie de lui offrir un environnement apaisant, qui pourrait lui faire du bien. Peut être que pour la première fois depuis bien longtemps, Dinis serait capable de faire passer quelqu’un avant lui-même.


« Depuis quand est-ce qu’on peut dire qu’on est ensemble ? » c’est quoi, notre date ? Tout les couples ont une date, un événement qui fait que c’est depuis ce jour là que tout a vraiment commencer. C’était pas la date de notre mariage, elle le sait bien, tout comme moi. C’était peut être la date où on a rencontré Alyssa ensemble, la première fois ? Le bateau ? L’hôtel au parc de Lamington ? Ce serait plus probable. J’en sais rien. Ma question sort de nulle part, ça fait juste presque une demie heure que j’attends qu’elle se réveille et que j’me demande encore et toujours comment j’en suis à avoir la plus belle femme à mes côtés. Je dépose un baiser sur son front quand elle ouvre les yeux, elle doit rien comprendre. « Ma mère arrive dans deux heures… » c’est tout de suite moins fun, comme information, mais je la prends pas par surprise, elle le sait déjà. On s’était mis d’accord pour rester chez moi, parce que pour rencontrer Elise, c’était aussi bien d’être ici. Ma mère, mon terrain. « tu stresse pas trop ? » parce que j’avoue que moi, j’en avais presque mal au bide. D’où mon réveil un peu matinal.


un petit bouche à bouche pour ta survie  @Elise Irish

« Depuis quand est-ce qu’on peut dire qu’on est ensemble ? » « Hm ? » C'est quoi ce questionnaire alors que t'es même pas réveiller ? Tu grognes un peu, te blottis un peu plus contre Dinis, souffle un coup, déjà prête à retourner au pays des rêves. Il est trop tôt pour avoir ce genre de discussion. Et puis, qu'est-ce que ça change de toute manière ? « Si on met une date, je vais pouvoir t'en vouloir à chaque année quand tu vas oublier. » que tu ajoutes à moitié endormi, sourire en coin a l'appuie. Chaque année, voilà une phrase prometteuse. Il y a quelques semaines à peine, tu avais du mal à te projeter à demain et, ce matin, tu parles des prochaines années à venir. Ah, l'amour, ce que ça peut faire. Tu finis par ouvrir les yeux un après l'autre en redressant la tête pour le regarder. « Tu veux toujours savoir ? » Non sûrement pas. Tu y réfléchis quand même. À partir de quel moment tu as su que t'étais dans la merde ? Dans les heures qui ont suivi son départ précipité du bateau.

« Ma mère arrive dans deux heures… » Et merde. Déjà ? S'il voulait trouver le moyen de te tirer définitivement du sommeil, c'est bien réussi. Deux heures. C'est pas assez. Tu te redresses dans le lit en remontant la couverture sur toi. Tes mains se glissent contre ton visage. « tu stresse pas trop ? » À vrai dire, tu n'y pensais pas trop jusqu'à maintenant. Mais ouais, ça te stresse un peu. C'est bien la première fois où l'opinion de quelqu'un t'importe vraiment. C'est connu les belles-mères qui détestent leurs belles-filles. Pendant une fraction de secondes tu peux presque te mettre dans la peau de Megan et regretter ton comportement envers elle. Juste une fraction de seconde avant que tu te souviennes qu'elle en à rien à foutre de ce que tu penses d'elle. Qu'elle ne compte pas vraiment. Qu'elle n'est qu'une pièce rapportée que personne ne désire. C'est pas pareil. La situation n'a rien à voir. « Non, ça va. » Mensonge. « Depuis l'temps qu'elle attend ça, ses attentes ne doivent pas être trop élevées. » que tu le taquines. Ton nez se fronce légèrement avant que tu te penches vers lui pour l'embrasser.

Ton bras s'étire vers le sol pour attraper le tee-shirt de Dinis qui y traîne que tu viens enfiler avant de sauter en bas du lit. Bon. Deux heures. Pas le temps de se prélasser au lit. Du café pour commencer. Après avoir raté au moins trois fois la recette de la cafetière, ça va. Maintenant tu te débrouilles. Pas d'empoisonnement en vue pour ce matin. Tu bailles un coup devant la machine qui ne coule pas assez vite à ton goût quand soudainement la porte s'ouvre d'un coup sans avertissement. Tu sursautes en te retournant. C'est quoi ses conneries ? C'était pas verrouillé ? Pourquoi ça t'étonne même pas venant de Dinis ? T'as aucune foutue idée de ce à quoi ressemble la mère de Dinis, mais tu sais déjà que c'est elle. Avec son nouvel amoureux évidemment. Ah. Bien sûr qu'elle est d'avance, elle a dû avoir si hâte qu'elle est partie plutôt. Tu pourrais être complètement nue devant elle que tu serais pas plus mal à l'aise. « Dieu merci, elle existe vraiment. » Ah ? Alors elle n'y croyait vraiment pas hein ? Vraiment un cas désespéré ce cher Dinis. Même pour sa mère qui vient te prendre dans ses bras sans aucun malaise. Ah ? Bon d'accord dans les familles normales, on se prend dans les bras. T'es pas trop certaine d'être très à l'aise - le fait d'être à moitié tout nue y est pour beaucoup. Tes yeux s'arrondissent quand ils entrent en contact avec Dinis qui est sortie de sa chambre probablement alertée par tout ce grabuge.

« Si on met une date, je vais pouvoir t'en vouloir à chaque année quand tu vas oublier. » Silence. Chaque année. Est-ce que ca sert vraiment à quelques choses alors ? On pouvait déjà au moins compter en mois, c’était pas mal. Une première et même, un exploit. Mais y a qu’à voir le sourire dont elle est même pas consciente qui se dessine sur ses lèvres, ses yeux encore fermés. « Tu veux toujours savoir ? » qu’elle demande alors en ouvrant les yeux et son regard me fait l’effet d’une bombe en même temps. C’est juste que la bombe est pas mortelle, elle fait même pas mal. Aucune blessure à l’horizon. « j’mettrai une alarme dans mon téléphone pour m’en rappeler. » ça veut peut être dire oui. Ca veut dire qu’au moins, si ca doit arriver, j’oublierai pas et que j’pourrais même anticiper un peu. Bref, ma mère arrive, c’st sans doute bien plus sérieux à aborder.
Ca a l’air même un peu agressif pour Elise comme réveil, ça. J’comprends, j’crois que si elle me disait que son père allait passer le pas de la porte dans les heures à venir, je serai loin de faire le malin. Comme un gosse qui a besoin de demander l’autorisation pour sortir avec une fille. Franchement. Enfin, pas la peine d’y penser, apriori, c’est pas dans les plans, et ça me convient aussi bien comme ça. « Non, ça va. » mensonge. Ca m’fait sourire. « Depuis l'temps qu'elle attend ça, ses attentes ne doivent pas être trop élevées. » elle se moque ce qui ne fait qu’étirer mon sourire et lever les yeux au ciel. « Une chance pour toi. » oh, bien sûre qu’Elise était surement bien au-delà de toutes les espérances de Rita Chavez. Elle avait fini par baisser les bras et ne plus y croire, et il y a bien longtemps qu’elle avait fait un trait sur la possibilité d’être grand-mère un jour. J’espère qu’elle ne comptait pas déterrer ce vieux sujet. Ce serait bien trop gênant, à la fois pour Elise mais encore plus pour moi, sachant qu’en réalité, il y a déjà plusieurs années qu’elle était grand-mère. Enfin, elle n’en avait que le titre, pas du tout la fonction dans les faits. « Bien trop haut classé. » je réponds à son baiser avant de la sentir filer hors du lit. Elle sera prête bien avant moi, cette fois car étrangement, j’avais déjà la flemme de mettre un pied au sol pour sortir de cette chambre, mais, ça arrivait.
Je prends mon téléphone pour voir si j’avais quelques messages, juste ma mère qui me prévient qu’ils quittaient Port Macquarie, tout était ok, jusqu’à ce que je m’attarde sur l’heure d’envoi du message. Le calcul est rapide pour comprendre que leur arrivée était pas d’ici deux heures mais plutôt assez imminente. « merde ! » je sors rapidement du lit quand j’entends la porte d’entrée s’ouvrir. « merde… » debout devant la porte de la chambre, mon crâne lourd part en arrière et mes mains recouvrent mon visage. « Dieu merci, elle existe vraiment. » que je l’entends dire, bien trop fort pour que ma sœur ne l’ai pas entendu non plus à l’étage. Je sors de là, voyant Elise avec un t shirt et son joli petit cul à peine caché. Bordel. « Maman… » je m’approche d’Elise pour me mettre légèrement devant elle. « vous êtes en avance… » je me tourne vers ma charmante femme pour lui glisser de filer s’habiller. « On est pas prêts. » Mister homme parfait pour son âge trop vieux entre à son tour dans l’appartement. « Je suis pas certain d’être bien garé, les flics passent pas souvent dans l’coin, hm ? » j’ai l’impression que c’est à moi qu’il s’adresse. « Non, pas dans l’quartier. » je m’approche pour prendre les bagages de leurs mains. « Qu’elle est charmante. » que ma mère me glisse, supposée chuchoter, suffisamment fort pour que ça résonne partout quand même. « La plus belle. » j’embrasse ma mère. « Evite de l’effrayer, tu veux. »

« j’mettrai une alarme dans mon téléphone pour m’en rappeler. » Tu te redresses sur ton avant-bras pour mieux le regarder. Il veut vraiment mettre une date sur tout ça ? Il avoue déjà à moitié qu'il sera incapable de s'en rappeler par lui-même, mais tu vas faire semblant de pas avoir compris. Pourvu qu'il fasse bien le transfert de données lorsqu'il changera de téléphone - trop loin ? Peut-être bien. Tu réfléchis quelques secondes, sûrement pas assez longtemps pour pouvoir prétendre que tu n'y avais jamais pensé. La date logique devrait être celle du mariage. Mais comme il n'y a rien de logique entre vous deux… « Le 16 Octobre. » Date qui correspond à votre balade jusqu'au Lamington Park. Avant, ce ne serait pas vraiment logique. Même si la fois sur le yacht a été plutôt révélatrice, elle s'est trop mal terminée pour que ce soit le début de quelque chose. Tu te demandes si c'est la date à laquelle il aurait lui aussi pensé. Tu te demandes à partir de quel moment il n'avait plus envie de voir d'autres filles, c'est sûrement ce moment là, la vraie date. « Une chance pour toi. Bien trop haut classé. » Évidemment. Ton sourire vient se perdre contre ses lèvres avant que tu ne sortes du lit très peu vêtu. Mais bon, vous n'êtes que tous les deux, ça fait rien, hm ?

Ça faisait rien jusqu'à ce que sa mère débarque en trombe dans l'appartement de Dinis. Et merde, soudainement, ce tee-shirt te semble drôlement trop court - il l'est. Personne ne semble toutefois en faire de cas. Enfin, personne sauf toi. Comme première impression, c'est sûrement pas la meilleure que tu pouvais faire. « Maman… » Dinis vient s'interposer entre sa mère et toi. Au moins un qui a eu le temps de se vêtir avant l'arrivée hâtive - et surtout surprise - de vos deux invités. « vous êtes en avance… » Prévenir ou juste frapper avant d'entrer, c'est trop demandé ? Tu profites tout de même de la présence de Dinis pour te sauver dans la chambre à coucher. « On est pas prêts. » que tu entends au même moment où tu refermes la porte pour fouiller dans ton sac à la recherche de fringue pour te changer. « Je suis pas certain d’être bien garé, les flics passent pas souvent dans l’coin, hm ? » Ah bon, t'es pas la seule à trouver que Dinis vit dans un ghetto. « Non, pas dans l’quartier. » Pas de flic dans un ghetto non. La porte que vous sépare ne t'empêche visiblement pas de manquer un seul bout de la conversation. « Qu’elle est charmante. » Quelque chose te dit que ce sera le festival des compliments pour toi ce soir - et jusqu'à ce que sa mère reparte chez elle. « La plus belle. » Ça te fait sourire. Peut-être que tu devrais rester ici pour entendre le reste de cette conversation, mais bon c'est pas comme si Dinis savait pas que tu entendais tout ce qui se passe. Aucune révélation choc en vue. « Evite de l’effrayer, tu veux. » Ça va te prendre plus que ça pour t'effrayer.

Tu termines de t'habiller et ressort de la chambre au bout de quelques minutes. Scène un, prise deux. « Vous vivez ici ? C'est pas très grand. » qu'elle avance (critique) en observant les lieux alors que tu reviens près de Dinis. Pas très grand pour deux personnes ou…. ? Non c'est déjà trop petit juste pour lui. Quoique tu doutes que chez elle ce soit très grand aussi. Elle n'était jamais venue ici ? Ou elle espérait qu'il soit déménager ailleurs avec toi ? « J'crois pas que j'arriverais à le faire partir d'ici. » C'était pas dans les plans… plan que personne ne suit vraiment jusqu'à l'instant. Mais non, tu ne vis pas ici. Tu ne vivras jamais ici non plus. C'est même pas négociable une seule seconde. « Vous arrivez juste à temps pour le café. » que tu reprends en filant vers la cuisine, te demandant s'il avait quatre tasses de cafés dans ses armoires. Quatre pareilles ? Faut quand même pas trop en demander.

16 octobre. Ca semblait à la fois si proche et à la fois si loin. Il faudrait que j’regarde exactement de quand date la réservation a l’hotel pour savoir sur quoi elle se base. J’retiens jamais les dates, la seule que je retiens, c’est mon anniversaire. Ma mère a souvent droit à un message d’excuse le lendemain, parce que c’est ma sœur qui me prévient. Ma sœur qui, n’a pas la même mère que moi, y a rien de logique dans tout ça. Et Elise, c’est quand son anniversaire ? J’devrai regarder le contrat du mariage, parce que si je lui demande, c’est une balle dans le pied que j’me tire. Parce qu’elle partira du principe que si elle me donne la réponse, j’aurai pas droit à l’erreur. Un rappel un mois plus tôt, une semaine plus tôt, la veille et le jour même, faut au moins ça. Bref, pas le temps de trainer.
Encore moins le temps quand Madame Chavez fait une entrée de star dans l’appartement. Fallait qu’elle se pointe plus tôt, c’était plus fort qu’elle. Petit tour de diversion pour permettre à Elise d’aller s’habiller plus convenablement. Pas que ça me plaisait pas de voir ses jambes nues en permanence, mais ma mère elle, n’avait pas besoin de ça, encore moins Pierce Brosnan à côté. Je débarrasse leur affaires et les glisse près de la porte de la chambre, c’est là qu’ils dormiront et en réalité, l’idée d’aller nous réfugier chez Elise chaque nuit me venait en tête assez logiquement. C’était prévu de dormir sur le canapé – pour moi en tout cas – mais, si je pouvais avoir une excuse pour ne pas supporter ma mère vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce serait très bien. Ce serait pas si contraignant. « Vous vivez ici ? C'est pas très grand. » c’est pas comme si elle était jamais venu. « Maman, ca fait dix que tu me fais la même remarque. » trop petit pour une seule personne d’après elle, encore pire pour deux alors. « J'crois pas que j'arriverais à le faire partir d'ici. » j’échange un regard avec Elise, elle voudrait me faire partir pour aller où ? Vraiment, j’me sens bien ici et j’ai pas envie d’être chez elle en permanence en sachant qu’elle y a aussi habité avec quelqu’un d’autre pendant trop longtemps. Sans compter les squattages intempestifs de parasites musiciens. « Vous arrivez juste à temps pour le café. » c’était sans compte sur les quelques viennoiserie sorties du sac de ma mère. Elle avait prévu le petit déjeuner aussi. J’allais pas m’en plaindre. « Elise, ma chérie, laisse-moi faire, vas t’installer. » que lance ma mère avec une familiarité surprenante. Elle ouvre les placards comme si elle avait retenu absolument tous les emplacements de mes affaires depuis sa seule et unique visite ici. Il y a cinq ans. « On va venir s’installer à Brisbane avec Antonio. » ah, donc c’était pas une idée en l’air. « J’ai ma famille ici aussi. » qu’il précise alors que je me contente de hocher la tête en réponse. « Vous avez prévu ça pour quand ? » le café déjà près sur la table, c’est avec un sourire non dissimulé que ma mère répond en regardant tour à tour Elise et moi. « dans une semaine. » ah. Bordel c’est trop rapide. « Le camion de déménagement arrive vendredi prochain, on a pris de l’avance, mais on ne repart plus à Port Maquarie. » je sais absolument pas comment prendre cette nouvelle. « Il est hors de question que je ne vois pas grandir mes petits-enfants. » coup de chaud, warning enclenchés. « t’as des enfants, Antonio ? » c’est ma seule carte de sortie, j’espère qu’elle parle de ces petits enfants, à lui. « Laisse le tranquille avec ça. » je comprends rien. « J’ai un fils, décédé il y a deux ans. » bonne ambiance, bienvenue à la maison. Au moins, j’ai ma réponse tout en me sentant très con. Elise, sors moi de là.

« Elise, ma chérie, laisse-moi faire, vas t’installer. » Elle t'arrête dans ton élan d'aller vers la cuisine alors qu'elle passe devant toi. Elle semble même mieux connaître l'emplacement des affaires que toi. Comment est-ce possible de retenir quoique ce soit alors qu'il n'y a aucune logique dans son rangement ? Elle s'occupe de tout, revient avec les quatre cafés et une boîte de viennoiseries qu'elle a pris le temps de venir chercher avant d'arriver ici. Ils sont partis en plein milieu de la nuit ou quoi ? « On va venir s’installer à Brisbane avec Antonio. » « J’ai ma famille ici aussi. » Ah. Dinis qui croyait qu'elle racontait n'importe quoi, c'était pas n'importe quoi finalement. Enfin, c'est pas encore fait non plus. Elle doit bien avoir une maison à vendre là bas, une a racheté ici. Bref, ce n'est pas pour demain matin. « Vous avez prévu ça pour quand ? » « dans une semaine. » Ah. Dans une semaine. Donc quoi ? Ils prévoient rester ici pendant une semaine entière ? Ils vont repartir dans 2-3 jours pour revenir après ? « Le camion de déménagement arrive vendredi prochain, on a pris de l’avance, mais on ne repart plus à Port Maquarie. » Ah, non, ils restent. C'est définitivement trop petit ici. Mais bon, ce n'est pas ton problème. C'est celui de Dinis. Toi, tu peux partir d'ici quand tu veux.

« Il est hors de question que je ne vois pas grandir mes petits-enfants. » Tu t'étouffes avec la gorgée de café que tu venais tout juste d'avaler. De quels petits-enfants elle parle ? Les soeurs de Dinis ? Ceux de son mec ? Parce que si elle déménage ici juste pour les vôtres, elle fait tout ça pour rien. « t’as des enfants, Antonio ? » Ouais c'est sûrement le raisonnement le plus logique. Les petits-enfants par alliance. « Laisse le tranquille avec ça. » Ah ? Ça sonne comme le type qui a rencontré la femme de sa vie trop tard pour avoir lui-même des enfants. Tu pourrais lui faire la même remarque pour son fils à elle. « J’ai un fils, décédé il y a deux ans. » Okay celle-là, tu ne l'avais pas vu venir du tout. Dinis semble être à court de ressources, probablement terrifié que sa mère revienne sur le sujet des petits-enfants. « Vous avez des photos ? » Après deux ans, on se met encore à chialer sur la mort d'un enfant ? Pas sûr que tu t'en remettrais un jour. Aucun parent ne devrait vivre plus longtemps que ses enfants. Ça semble quand même suffire comme distraction quand ce charmant Antonio accompagné de l'aide de Rita semble tenter de comprendre comment marche ce smartphone pour faire défiler les photos. Ça, c'est son fils en train de faire si. Ça, c'est son fils avec telle personne, etc. Ça devient un peu chelou quand il montre le reste de sa voiture après l'accident. Ah. Puis, on passe complètement à autre chose sur le petit voyage improvisé par le nouveau couple là où Antonio a déclaré sa flamme à sa douce. C'était très romantique si on écoute belle-maman. Pas certaine d'avoir la même signification du romantisme qu'elle. L'important, c'est que le sujet du bébé est bien loin, bien oublié. « Où est-ce que tu vas mettre tes affaires quand le bébé sera là ? » Ou pas. Elle doit sûrement parler de sa chambre noire qui devra devenir la chambre du bébé. A l'écouter parler, on dirait que t'es pas au courant d'être déjà enceinte. « Tu devrais louer un local. » Pour mettre ses affaires donc. Ta tête se tourne vers Dinis quelques secondes, croque dans une viennoiserie comme si avoir la bouche pleine devenait ta défaite pour ne pas pouvoir répondre. De toute façon, tu ne sais pas quoi répondre à ça. La vérité ou un mensonge ?

« Vous avez des photos ? » Ca me semble être une façon très étrange de rebomdir. Demander les photos d’une personne morte, c’est pas réellement comme ça que je comptais sur elle, mais ça semble choquer personne. J’en ai rien à faire des photos d’un mec que je connais pas, qu’on vienne même pas me dire que c’est mon frère qui est mort dans cet accident. Qui garde même les photos d’un accident de voiture où son fils est décédé ? Il avait quel âge ce mec ? A en voir les photos, il était surement déjà plus vieux que moi, il fait bien plus vieux que moi. Sauf qu’Antonio a le même âge que ma mère, si mes souvenirs sont bons. Et ma mère m’avait eu suffisamment tôt pour que ce soit pire pour Antonio. Ca doit être juste qu’il fait plus vieux que son âge. Bref, semblerait qu’il faille faire semblant de s’intéresser, pour être poli hein. J’suis certaine qu’Elise en a rien à faire non plus des photos de voyages. Elle sait bien mieux que moi faire semblant. Elle est impressionnante et en même temps, j’aurai pas apprécié qu’elle soit trop sincère. Au moins, ça semble faire plaisir à ma mère, c’est le principal. J’aurai tout le temps de m’excuser auprès d’Elise pour toutes les maladresses de Rita. Enfin, là, c’était plus une maladresse, c’était de l’acharnement. « Où est-ce que tu vas mettre tes affaires quand le bébé sera là ? » elle est complétement folle. J’suis pas prêt à subir ça pendant une semaine. « Tu devrais louer un local. » Elise me regarde, son croissant dans la bouche, j’sais pas bien si cette fois elle compte rebondir mais j’ai l’impression que ça lui fait une bonne excuse pour pas à avoir à rebondir. « Maman… » je rassemble mes deux mains paumes contre paumes pour appuyer le sérieux de ce que je m’apprête de dire. « Quand je te dis de ne pas effrayer Elise, tout ça, ca en fait partie. » c’est peut être sûrement moi qu’elle effraie le plus. « Ca fait deux mois qu’on est ensemble. On habite pas ensemble. » qu’elle retienne bien chacune de ces informations. « Ici, c’est chez moi. » je me pointe du doigt, au cas où elle comprenne pas. « Elise, habite chez elle. » jusqu’ici, ça semble clair. « Pas de bébé à venir. » c’est maintenant la crise cardiaque ? elle lève les yeux au ciel. « Va falloir trouver un autre endroit alors. » je termine cul sec le café devant moi. « Maman, va falloir arrêter, s’il te plait. J’ai 43 ans, j’ai pas envie de ça. » j’ai jamais eu envie de ça. Et c’est surement pas le moment de mettre le sujet sur la table. Les événements récents sont encore trop frais et je risque de m’emporter plus que de raison. « Vous allez aller faire un tour, pendant qu’on s’occupe de préparer tout, pour tout à l’heure. Y a plein de choses à voir à Brisbane, va falloir vous familiariser avec la ville et ce serait bête de louper les marchés de Noel. » ca sonne pas comme une proposition, ca sonne comme une obligation. « Ca a l'air d'être une bonne idée. Aller, Rita, on peut aller visiter la ville et voir le quartier de notre future maison! » voilà Antonio, on va être amis, lui et moi, finalement.

« Maman… Quand je te dis de ne pas effrayer Elise, tout ça, ca en fait partie. » C'est sûrement pas le temps de lui faire la remarque que tu n'es toujours pas effrayée. Mieux vaut te taire et le laisser gérer sa mère. Il l'a connait. Il sait comment s'y prendre, non ? « Ca fait deux mois qu’on est ensemble. On habite pas ensemble. » C'était pas quelque chose qui avait déjà été mis au clair toute à l'heure ? Apparemment non. Elle doit être si contente qu'elle n'écoute qu'à moitié. Mais devant Dinis qui pèse bien chacun de ses mots, elle n'a d'autre choix que de l'écouter. « Ici, c’est chez moi. Elise, habite chez elle. » T'es presque convaincu qu'elle va demander un décompte des chambres chez toi. Ça risque de plus lui plaire qu'ici. Ici, c'est trop petit pour une personne. Chez toi, c'est trop grand pour deux personnes. « Pas de bébé à venir. » Ton regard quitte Dinis pour aller se reposer sur sa mère dont la première réaction est de lever les yeux au ciel. Un geste qui semble vouloir dire; arrête de dire des bêtises. Ce ne sont pas des bêtises. Aucun bébé à venir ni maintenant, ni demain. « Va falloir trouver un autre endroit alors. » Tu ne dis pas non à trouver un autre endroit, mais pas pour les raisons qu'elle souhaite. « Maman, va falloir arrêter, s’il te plait. J’ai 43 ans, j’ai pas envie de ça. » Bon, ça semble être le moment parfait pour trouver une distraction et changer de sujet avant que Dinis pète les plombs contre sa mère qui n'est là que depuis quelques minutes. Ça va être quoi après une semaine ? Mais avant que tu n'aies le temps de dire quoique ce soit, Dinis prend les devants. « Vous allez aller faire un tour, pendant qu’on s’occupe de préparer tout, pour tout à l’heure. Y a plein de choses à voir à Brisbane, va falloir vous familiariser avec la ville et ce serait bête de louper les marchés de Noel. » Et se débarrasser de sa mère semble être la meilleure option pour lui. Elle semble déçue. « Ca a l'air d'être une bonne idée. Aller, Rita, on peut aller visiter la ville et voir le quartier de notre future maison! » Les encouragements d'Antonio ne semblent pas vraiment suffire à effacer la déception sur son visage - ou peut-être qu'elle est blessée ?  « Très bien. » Elle se lève, accepte son sort, jusqu'à ce qu'une illumination semble passer sur son visage. « Tu viens avec nous Elise ? » Ah. Un moyen comme un autre de se débarrasser de Dinis pour pouvoir te questionner à sa guise sans être dérangée. Tu la vois venir à des kilomètres à la ronde. Tu peux gérer ça. « Hum, oui, d'accord. J'veux bien. » Voilà quelques mots qui semblent faire oublier ses déceptions à Rita. Tu fais signe à Dinis de laisser tomber lorsqu'il semble vouloir répliquer quelque chose. Tu profites du fait que les deux amoureux quittent l'appartement en premier pour te retourner vers Dinis; « J'suis pas effrayée. » C'est toi qui l'est. Tu te demandes combien de paquet de clopes il va fumer le temps que vous serez partie.

* * *

Tu as naïvement cru que ce serait un petit saut rapide, pas que tu serais partie pendant trois heures. Il s'en passe des choses en trois heures. C'est le temps de beaucoup, beaucoup de questions. Honnêtement, Rita connait sûrement mieux ta vie que Dinis avec ses millions de questions dont tu as parfois été honnête et d'autres fois, tu les as agilement évité. Dinis a l'air bien moins zen que toi lorsque tu passes la porte de son appartement. Il aurait dû venir s'enfiler des vins chauds au marché de Noël, ça l'aurait aidé à se détendre. T'es parfaitement détendue. « J'ai convaincu ta mère de t'acheter le pull le moins laid. » que tu annonces en venant glisser tes bras autour de ses épaules, lui dérobant un baiser au passage. « Fais semblant d'être surpris quand tu vas le développer. » Ça lui donne encore quelques heures pour pratiquer ses expressions de joie. « Ils sont partis à Redcliffe. » que tu lui réponds avant même qu'il pose la question. Leur nouvelle maison est là-bas. Pas trop loin. Pas trop près. Tu te demandes s'ils seront toujours rendus ici.

« Très bien. » elle dit le contraire ce qu’elle pense, son visage est un livre ouvert, mais c’est pas comme si ça allait changer quelques chose à ce que je venais de dire. Que ça lui plaise ou non, c’était pareil. Elle avait toujours considéré les filles de mon père comme ses propres filles, quasiment, alors elle pouvait aussi dire qu’elle avait déjà une petite fille. Si elle était si bête pour accépter que mon père l’ai quitté pour faire une nouvelle famille et accepter les gamines en prime, elle devait bien pouvoir donner une enveloppe à Noel à mes nièces pour continuer dans son déni. Elle avait qu’à s’y faire. « Tu viens avec nous Elise ? » bah voyons. Je me tourne vers Elise qui semble ne pas vouloir croiser mon regard à ce moment là. « Hum, oui, d'accord. J'veux bien. » Bon, les préparatifs allaient être très sympathiques maintenant que j’allais tout me taper tout seul. Et puis ok, c’était de bonne guerre, si ca faisait en sorte de pas subit un interrogatoire gênant, qu’Elise aille faire semblant de s’interesser à des décorations kitch sur un marché de Noel. Elle savait pas qu’elle allait être obligée de dire à ma mère que le bougeoir taillé dans un coquillage était très beau. Elle allait surement rentrer avec des bibelots qu’elle saura pas où mettre sans les oublier pour la prochaine fois. Ca prend la poussière et c’est moche, voilà ce que ma mère aime. Les trucs moches. « J'suis pas effrayée. » tiens donc. “ tu sais pas ce qui t’attend.” que je lance un peu vexé qu’elle me laisse tout seul quand même. “rentrez pas à quatre heure non plus.” de toutes façons, je lui laisse moins d’une heure avant d’avoir envie de faire demi tour pour rentrer.

* * *

Le temps est long. Beaucoup plus qu’une heure, comme j’avais pu penser. J’ai eu le temps de tout débarrasser, de fumer un demi paquet, de mettre la table, de recevoir le plat traiteur qu’Elise m’avait conseillé pour pas foirer le repas. De me changer une première fois, puis une deuxième fois après avoir fait une tâche en ouvrant les différents plats à réchauffer et maintenant j’avais le temps de me faire chier et de demander quand ils allaient revenir. J’étais à deux doigts de commencer à manger l’entrée.
La porte s’ouvre et je me redresse pour jeter un oeil vers la porte. Elise à l’air d’être seule. « J'ai convaincu ta mère de t'acheter le pull le moins laid. » j’dois avoir peur? Je redresse la tête quand elle vient près de moi pour m’embrasser. « Fais semblant d'être surpris quand tu vas le développer. » D’être surpris de pas savoir qu’elle m’a acheté un pull ou surpris et de faire semblant qu’il soit vraiment choisi avec goût? « Ils sont partis à Redcliffe. » Je hoche la tête et fini par me lever, regardant la table prête et toujours personne pour s’y installer. J’avais pourtant sorti la nappe rouge et les serviettes en tissu. J’espère qu’on a pas fait tout ça pour rien. “Et ils ont l’intention de revenir quand même ou elle fait toujours la gueule?” et puis, il s’est passé quoi de si intéressant pour que ça dure aussi longtemps? “Vous avez fait quoi? A part choisir un pull moche? toujours pas effrayée?” qu’elle me dise un peu de quoi ils avaient parlé, au final? J’suis persuadé qu’elle avait eu droit à toutes les questions qui brûlaient aux lèvres de ma mère.

« Et ils ont l’intention de revenir quand même ou elle fait toujours la gueule? » Depuis le temps que vous êtes partis, et avec toutes les discussions que vous avez eu (pauvre Antonio qui s'est retrouvé à moitié oublié) tu n'es même plus certaine que Rita se souvienne qu'elle était d'abord partie d'ici sans vraiment le vouloir, et un peu contrariée même. Elle avait l'air de trouver l'idée de la sortie entre filles excellente. « T'inquiète, c'est déjà oublié. Elle devrait plus t'embêter avec ça. » Avec ça, le bébé en route qui est bien loin d'être en route. Après des excuses non-nécessaire de Rita pour les paroles de son fils, des ne t'en fais pas, il va changer d'avis, tu as opté pour une direction plus radicale, mais qui passait tout de même mieux que de simplement lui dire que vous n'en vouliez pas ensemble. Le message semble avoir bien passé. Enfin, tu crois. À voir si elle ne tente pas une énième solution encore dans les prochains jours. « J'crois qu'elle est un peu déçue que mon fils ait 21 et pas 6 ans. » Parce que c'était facile de voir qu'elle allait le prendre comme si c'était son propre petit-fils. C'était aussi évident à voir qu'elle avait envie de catiner à nouveau et non de gérer un autre adulte. Tu doutes que le deuxième pull moche soit destiné pour Damon. Encore heureux qu'il soit hors du continent. Il faudrait d'abord qu'il rencontre Dinis avant de rencontrer sa mère.

« Vous avez fait quoi? A part choisir un pull moche? toujours pas effrayée? » Un sourire se dessine sur tes lèvres. Évidemment qu'il se montre curieux Dinis. Il ne saura rien du tout. « Toujours pas. Toi, tu l'es ? » Il a peur de ce que sa mère a bien pu lui dire à son sujet ? Il a peur qu'elle ait été trop intrusive ? Qu'elle t'es mise mal à l'aise ? « J'crois qu'elle garde les anecdotes croustillantes pour ce soir. » que tu lui réponds en lui adressant un clin d'œil. Les mères ont toujours des anecdotes humiliantes - et adorables - sur leurs enfants. Sans oublier les horribles photos de quand il était gosse qu'elle se fera un plaisir de te monter quand ils seront installés dans leur nouvelle maison. « J'espère que j'ai passé le test. Tu m'diras. » Si ça se trouve, elle est bien hypocrite et elle préfère encore que son fils soit seul plutôt qu'avec toi. Elle n'aurait peut-être pas tout à fait tort. Tu te doutes bien qu'elle finira par dire à Dinis ce qu'elle pense réellement de toi un coup qu'ils seront seuls tous les deux. Tu sais bien que Dinis s'en moque sûrement de ce que pense sa mère, que ça ne changera rien pour vous deux, mais quand même, t'espères vraiment avoir passer le test ou peu importe ce que c'était surtout si elle déménage pas trop loin et qu'elle est plus souvent dans les parages.

« T'inquiète, c'est déjà oublié. Elle devrait plus t'embêter avec ça. »  je donne pas 30 secondes a ma mère avant de remettre le sujet sur la table . C’est être bien naïf de croire qu’elle était passée a autre chose si rapidement.  A moins qu’Elise soit aussi convaincante avec elle qu’elle ne l’avait été avec Alyssa. Tiens, manquerait plus qu’elle se pointe elle aussi pour que ce soit cerise sur le gâteau. Pas de brune a l’horizon, pour le moment, j’espère qu’elle va trouver meilleure occupation pour les fetes de fins d’années. « J'crois qu'elle est un peu déçue que mon fils ait 21 et pas 6 ans. » faut croire que ma mère en sait déjà alors plus sur Elise que j’en sais moi-même. Damon est pas un sujet qui vient trop entre nous. Je sais qu’elle a un fils, qu’il s’est mmari avec Megan et on s’arrête la. Maintenant, je sais qu’il a 21 ans. J’me doutais bien qu’il avait pas moins de 20 ans quand même. « vous avez plus de secrets l’une pour l’autre du coup. »

pour autant, j’ai pas l’impression que ma charmante femme soit vraiment traumatisée de ce moment passé avec ma mere. « Toujours pas. Toi, tu l'es ? » j’hausse les épaules. Peut être que c’est moi qui flippe le plus de ces rencontres, c’est possible. Elle par contre, qui voulait pas que nos mondes se croisent, la voilà pourtant en plein cœur du mien. Ça semble toujours pas trop la terrifier. « ma mère est a la fois prévisible et surprenante. Ou l’inverse… » capable de tout, sans s’y attendre et a la fois sans que ce soit étonnant.  « J'crois qu'elle garde les anecdotes croustillantes pour ce soir. » « c’est donc ça ? Tu vas savoir a quel age j’ai fais mes premiers pas ? Mon premier mot et mon premier vrai bisous ? » Pourquoi ce genre d’anecdote c’est toujours important pour les autres ? « J'espère que j'ai passé le test. Tu m'diras. » Je jete un œil à l’heure, visiblement, on devrait avoir encore un peu de temps pour nous avant qu’ils n’arrivent. « y a pas de raison. » je quitte le canapé pour en faire le tour et venir plus proche d’Elise. « pour tout te dire, j’trouve ça encore surprenant qu’on soit ici, a attendre que ma mère revienne avec son nouveau mec. Ça m’semble surréaliste d’y penser et que ce soit bien vrai. » Mes doigts glissent contre sa joue. « ce qui m’effraie le plus, c’est que ça puisse s’arrêter du jour au lendemain… »

« vous avez plus de secrets l’une pour l’autre du coup. » C'est quoi ça ? Des reproches ? De la jalousie ? C'est pas parce que Rita a posé des questions et que tu as répondu que tu n'as plus de secret pour elle. Loin de là. La différence entre ne pas péter un câble quand Rita pose une question et que Dinis en pose une, c'est qu'à l'une ça te gêne pas de lui dire ce qu'elle a envie d'entendre et qu'à l'autre tu ne veux pas lui mentir - et donc n'est pas forcément prête à lui répondre. « ma mère est a la fois prévisible et surprenante. Ou l’inverse… » Imprévisible et banal ? Peu importe ce qu'il veut dire avec ses paroles, ça prouve tout simplement que c'est bel et bien lui qui est en train de flipper et non l'inverse. « c’est donc ça ? Tu vas savoir a quel age j’ai fais mes premiers pas ? Mon premier mot et mon premier vrai bisous ? » C'est qu'il a l'air presque déçu à l'entendre parler. « Je suis presque sûr qu'elle a quelque chose de plus croustillant à me raconter. » Qu'est-ce que tu en a à faire de ses premiers pas ? Dinis n'était sûrement pas un ange irréprochable dans son adolescence. Rita a sûrement une ou deux anecdotes sous le coude à te raconter après une coupe ou deux.

« y a pas de raison. » Hm. Facile à dire. Il n'était pas là. Il ne peut pas dire. C'est pas parce que tu lui suffit à lui, que c'est le cas pour sa mère. Il finit par (enfin) se lever du canapé pour venir près de toi. Tu lèves automatiquement la tête vers lui. « pour tout te dire, j’trouve ça encore surprenant qu’on soit ici, a attendre que ma mère revienne avec son nouveau mec. Ça m’semble surréaliste d’y penser et que ce soit bien vrai. » Tes yeux se ferment quelques secondes sous le contact de sa main contre ta joue. Quand on repense à l'endroit où part votre relation à la base, m'ouais, c'est sûrement surprenant ce qui se passe aujourd'hui. « ce qui m’effraie le plus, c’est que ça puisse s’arrêter du jour au lendemain… » Si tu t'attendais à ça comme réponse… absolument pas. Tu poses un regard tendre sur lui alors que tes bras s'enroulent autour de sa nuque. Tu viens l'embrasser juste avant de poser ton front sur le sien. Pense pas à ça, que t'as envie de lui dire, qu'il ne pense pas à la possible fin qu'il pourrait ? aura ? lieux entre vous deux. Mieux vaut profiter du moment présent. C'est ce que tu aurais voulu lui dire. « Je t'aime. » Ah ? Trop tôt ? Probablement. Quoi qu'il vient de te présenter sa mère... « Flippe pas. » que tu t'empresse d'ajouter, regrettant presque c'est trois petits mots, à deux doigts de lui dire oublie ça. Sauvé par le gong ? Moment gâché ? Sa mère entre presque au même moment t'obligeant à reprendre une distance raisonnable de ton mari.

« Je suis presque sûr qu’elle a quelque chose de plus croustillant à me raconter. » mes conneries d’adolescent, c’est ça qu’elle veut savoir ? J’peux lui dire, si elle veut, mais peut etre que ma mère a pas la même notion du croustillant que moi, peut être qu’Elise a pas la même notion non plus. J’vais laisser ma mère se faire plaisir si ça peut mettre de côté les questions indélicates qu’elle a eu jusqu’à présent. J’suis prêt à en prendre pour mon grade et faire semblant de rigoler aux anecdotes de ma mère. Vraiment hâte. Mais pour le moment c’était peut être le temps de profiter qu’on soit encore tous les deux. D’après moi, on avait sans doute une bonne heure, voire plus devant nous.
Le regard d’Elise semble traduire de sa surprise. Qu’est-ce qui peut être le plus surprenant ? Que la table soit mise pour quatre personnes à la période de Noël, comprenant ma femme et ma mère et que ça me semble normal, ou de penser que ça puisse finir du jour au lendemain et que ça tienne a rien ? Ses lèvres répondent d’un goût rassurant, comme si y avait pas de questions à se poser et qu’Elise avait pas l’intention d’y mettre un terme. Un goût de réconfort. Mon étreinte se ressert un peu plus autour d’elle. « Je t’aime. » pardon ? Mes doigts relâchent aussi tôt leur emprise sur Elise. Je suis pas foutu de dire si ma soudaine tacchicardie est le fruit d’une angoisse ou de l’effet de surprise. « Flippe pas. » trop tard ? Les rares fois où j’avais entendu ces quelques mots, ça avait suffit a plus donner de nouvelles et passer a autre chose. Elle attend quoi de moi, Elise ?
La porte s’ouvre, mes calculs étaient mauvais mais tant mieux. « Vous avez déjà fait le tour du proprio ? » je me précipite vers ma mère, comme pour m’éloigner d’elise et trouver un échappatoire et une bonne excuse pour oublier ça. « prend ça, Elise m’a aider à choisir, il va être parfait pour toi. » le fameux pull donc ? J’ouvre la paquet et fait semblant d’être surpris. C’est vraiment moche mais semblerait que ce soit le moins pire. « fallait pas. » posé sur le bureau a l’entrée, on verra si je le porterai un jour. «Tu sais Dinis, je suis sûre que tu as trouvé la perle rare avec Élise. » finalement, j’aggripe a nouveau le pull. « j’vais ranger ça et on passe à table. »
Il est peut être encore un peu tôt? Aucune idée. Je disparaîs un moment dans la chambre et ressors avec une cigarette en main. « quand est-ce que tu vas enfin t’arrêter de ruiner ta santé avec ça ? » a peine la porte du balcon ouverte que mon briquet fait une flamme, comme par provocation.