Christmas isn't a season
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@mabel griffiths, maddy griffiths & family

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Six semaines, déjà.

Comme si l’accouchement de Mabel n’était pas assez imminent, il va falloir se coltiner l’horrible cousin Bryan ce soir. Doux Jésus. Maddy a été ravie d’apprendre cette nouvelle lorsque sa mère l’a appelé pour la énième fois pour savoir si elle rajoutait un couvert pour Isaac. Comme à son habitude, l’ainée Griffiths a trouvé une excuse pour exempter son faux petit ami de ce repas de famille. Celui de Thanksgiving avait été amplement suffisant, et Maddy dira à sa mère qu’elle a « rompu » avec Isaac dans quelques jours car leurs emplois du temps devenaient trop compliqués à coordonner. Mais ce soir, elle ne voulait pas ruiner l'ambiance. Après tout, les agences de stars sortaient toujours cette excuse lorsque la relation de deux célébrités prenait fin. Matilda vit dans un film grandeur nature, elle ne se posera pas -trop- de questions, la plus compliquée à convaincre sera Mabel au final. Like always. Cependant Maddy implore sa bonne étoile : sa petite sœur à d’autres occupations en ce moment que les histoires de cœurs de son ainée.

A l’heure actuelle, Maddy a un souci plus préoccupant. La jeune femme a le plaisir de découvrir les joies du premier trimestre de la grossesse : les nausées. Elle est incapable de manger autre chose que de la compote et du coca ou sinon, elle finit au-dessus de la cuvette des toilettes. La jeune femme espère pouvoir avaler un peu de purée au repas. Maddy soupire en sortant de la douche, son corps est déjà en train de changer. Elle a peur des semaines à venir. Pour l’instant, elle parvient à gérer sans Sergio, mais pour combien de temps ? Le temps : voilà un autre problème que redoute la Griffiths. Elle le sait : sa grossesse -dans l’optique où elle évite la fausse couche- ne va pas rester cachée éternellement. Les questions vont rapidement fuser sur le bébé mais aussi sur l’identité du père alors que Maddy est connue pour être célibataire depuis son ex petit-ami. Maddy enfile une jolie robe, maquille ses yeux, arrange sa coiffure et monte dans sa voiture, direction la maison familiale des Griffiths.

Comme à son habitude, Maddy est en avance. Les sœurs Griffiths ne vivent pas sur le même fuseau horaire. Matilda ouvre la porte et prend dans ses bras sa grande fille. « Maddy chérie, comme je suis contente de te voir ! » L’ainée se force à sourire et répond. « Moi aussi je suis contente de te revoir maman. » Maddy dépose son manteau et va mettre les cadeaux sous le sapin avant de se diriger vers la cuisine. « Maman, tu as besoin d’aide pour quelque chose ? » Fatale erreur, Maddy oublie parfois qu’elle est enceinte et que se comporter comme la fille parfaite s’avère être plus compliqué que prévu. Les odeurs de nourriture lui font mal au cœur. Elle recule sagement. « Non c’est bon ma chérie, va t’installer dans le salon, ta sœur va bientôt arriver. » Maddy ne dit rien et se dirige vers le séjour. « Bonsoir papa. Salut Bryan. » Papa a le droit à une bise, par contre Maddy prend soin d’éviter son cousin qui l’a contrarié au précédent repas.

« Et Maddy, en avance comme d'habitude ! On ne te changera pas, hein ? » Trente minutes plus tard, Mabel fait enfin son entrée aux bras de son époux. Maddy ignore son commentaire en plissant des yeux. « Bonsoir Mabel. » qu’elle répond avec son éternelle nonchalance à l’attention de sa petite sœur avant d’entendre Madilda. « Maintenant que vous êtes tous arrivés, je propose qu'on commence par l'apéritif. On ouvrira les cadeaux juste après ? » Maddy s’empresse de dire. « D’accord maman, je vais chercher les boissons. » Et accessoirement son père qui doit avoir la tête dans le frigo en train de saliver devant les buches de Noël. Maddy prend l’initiative de gérer les boissons ce soir, car elle ne peut plus boire d’alcool étant donné sa condition actuelle. « Papa, Mabel et son mari sont arrivés, tu es réclamé au salon. » Elle lui offre un sourire, avant de prendre sa place devant le frigo, sortir la bouteille de champagne, le casis, du coca et l’eau. Pour une fois, le soda ne sera pas pour Mabel. Maddy revient dans le salon le plateau des boissons dans les mains et le dépose sur la table. Elle tend champagne à son père pour qu’il l’ouvre et fasse le service. Elle approche la carafe d’eau de sa sœur et se prend le coca de son côté. « Maddy tu voudras du cassis dans ton champagne ? » La blonde essaye de rester imperceptible et répond d’une voix calme. « Je vais prendre du coca ce soir papa, j’ai fait une intoxication alimentaire il y a quelques jours. J'ai encore un peu mal au ventre. » A ses mots, elle ouvre la canette et remplit son verre. « Oh ma pauvre chérie ! » que s’exclame Matilda avant de tourner la tête vers Mabel, les yeux pétillants rivés sur son ventre arrondi. « Qu’est-ce que j’ai hâte de rencontrer notre premier petit-enfant ! Comment se passe la fin de sa grossesse ma chérie ? » Maddy fait mine de rien mais elle se sent super mal à l’aise de cacher une grossesse à sa famille, elle va essayer de survivre à ce réveillon.

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Les repas familiaux chez les Griffiths sont synonymes de faux-semblants et d’hypocrisie. Encore une fois, Madeline interprète son rôle d’ainée « parfaite » de la famille, un rôle qu’on lui a inculqué dès la naissance. Depuis quelques années, la protagoniste se sent comme un imposteur dans ses mises-en-scène où elle accumule mensonges sur mensonges. Les récents souvenirs de Thanksgiving lui restent encore au travers de la gorge. Elle a eu à peine le temps de digérer cet événement, qu’une nouvelle surprise est apparue sous son nombril. Un futur bébé. Un espoir aussi puissant que fragile et surtout une nouvelle chose qu’elle va devoir cacher à ses proches les premières semaines, le temps que la grossesse se stabilise. Madeline a connu bien trop d’échecs par le passé, elle ne veut pas précipiter cette nouvelle, d’autant plus qu’elle n’assume pas la conception de cet enfant.

Son verre de soda à la main, Maddy s’installe sur un fauteuil du salon. Son premier mensonge semble être passé inaperçu. L’attention des parents se dirige automatiquement vers Mabel qui est la star de la famille depuis les neuf derniers mois. Même si l’ainée ne le manifeste pas de vive voix, elle est soulagée d’avoir une pression de moins sur les épaules, même si un nouveau stress est en train de grandir au creux de son ventre. Elle repense aux paroles étrangement bienveillantes de son agent : elle doit apprendre à gérer les événements étape par étape, afin d’engendrer le moins de stress possible qui serait nocif pour le bébé. Maddy va essayer d’appliquer docilement les conseils de son manager et accessoirement futur père de son enfant. La phrase sonne encore bizarre dans son esprit. « J'ai hâte que ce soit fini, et de pouvoir me déplacer comme je veux sans avoir l'impression de peser une tonne. » Maddy ne dit rien laissant à Mabel le plaisir de répondre aux questions incessantes de leurs parents. « Mais je me dis que je dois profiter des derniers jours, avant de ne plus dormir et de devoir gérer ce petit bébé ! » Avec la grossesse de sa benjamine, Maddy a un aperçu de ce que à quoi la grossesse peut ressembler. Elle a de nombreux exemples dans son entourage entre Rosalie, Penny et Mabel ; et elle constate que les femmes ne sont pas logées à la même enseigne concernant cette heureux événement. C’est le jeu de la loterie : le ticket sera-t-il gagnant ? « Vraiment, je ne comprends pas pourquoi tu ne prends pas de nourrice ! C'est ce que j'ai fait avec Maddy et toi, et c'était plus simple pour tout le monde ! » Les yeux de Maddy se dirigent automatiquement sur son verre. Elle veut boire comme pour ignorer les paroles de sa mère, mais elle a peur que le coca lui provoque une nausée. Alors elle le regarde tristement tandis que ses oreilles sifflent, ne préférant émettre aucun commentaire. Une voix masculine se lève à son tour dans les airs, et cette fois-ci ce n’est pas celle de Bryan. Dieu merci. « Dans ma famille, on a jamais eu de nourrices, et ça se passait tout aussi bien. Pour l'instant, ça nous convient parfaitement de faire comme ça. » Bienvenue chez les Griffiths. Maddy repose son verre sur la table, un léger sourire sur les lèvres. L’innocence du mari de Mabel face à sa belle-famille après toutes ses années est presque attendrissante.

« Et si on commençait la distribution des cadeaux ? » Mark est impatient, quelle que soit la situation qui se présente à lui. Lorsqu’il ne s’agit pas des délicieux desserts de son épouse, il est comme un gosse à attendre les cadeaux. « Tu es toujours aussi impatient Mark ! » que rigole joyeusement Matilda avant de commencer la distribution des cadeaux. Elle va chercher ses précieux paquets qu’elle pose devant les filles. Maddy appréhende l’ouverture de son cadeau. Après plus de trente ans d’existence, les parents ne sont pas capables de connaître les goûts de leurs propres enfants. Maddy regarde l’emballage cadeau, le présent semble fin et léger. Maddy déchire le papier et découvre le contenu. « Oh. Un bon cadeau pour un spa en duo. » Maddy est sceptique, elle ne sait pas comment elle doit accueillir le cadeau. « Papa et moi on a pensé que cela serait bien pour toi en ce moment, le tournage a du tellement te fatiguer ma chérie et… tu trouveras forcément quelqu’un pour t’accompagner. » Matilda se rend compte de sa maladresse tandis que Maddy esquisse un sourire poli, dissimulant son malaise grandissant. Sa mère a dû très probablement acheter le cadeau avant l'incident Isaac et a eu la paresse de le changer. « Je.. euh.. c’est gentil merci. » Sur le coup c’est plutôt Mabel qui aurait besoin d’un soin comme celui-ci. A son tour, Maddy se redresse et commence sa distribution. Elle dépose à côté de Bryan son cadeau (des chaussettes, elle a mis aucun effort après l'insolence de son cousin), ensuite elle tend le coffret de spiritueux qu’elle a spécialement choisi pour son père. Par la même occasion, elle vient embrasser ses parents pour les remercier et pose entre les mains de sa mère son présent (son parfum préféré). Finalement, elle s’avance vers Mabel et son mari, donnant le cadeau à sa sœur. « C’est pour votre petit famille, j’espère que ça vous plaira. Joyeux Noël. » Malgré les relations conflictuelles avec sa sœur et le fait qu'elle s'était clairement éloignée de cette dernière à cause de sa grossesse, Maddy a voulu choisir un cadeau significatif pour montrer son soutien dans l'agrandissement de la famille. Elle espère sincèrement que le cadeau plaira aux futurs parents. Après un bref échange de sourire, Maddy retourne sagement à sa place, après avoir jeté un coup d'œil au cadeau vraiment étrange que venait de recevoir sa sœur de la part des parents.

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Depuis sa place, Maddy observe la réaction Mabel et son mari déballer le papier cadeau. Elle est presque envieuse de cette vision. Ils ont l’air vraiment heureux ensemble. Tout ce que Maddy n’a jamais réussi à accomplir avec son ex-compagnon. Elle s’est toujours demandée si sa famille l’avait réellement apprécié. Enfin bref, c’est de l’histoire ancienne. Elle ne veut pas remuer le couteau dans la plaie alors que Noël est censé être un événement festif et joyeux. « C'est superbe, Maddy ! Et très doux. » Maddy sourit doucement aux mots de sa sœur. Dans le langage de sa benjamine cela veut dire merci. « Et l'avantage, c'est qu'on n'aura plus à se disputer sur le doudou à emmener à la maternité ! Celui-ci sera parfait. Merci Maddy. » Le mari de Mabel a toujours eu le chic de voir le bon côté des choses. « Le plaisir est pour moi. » qu’elle répond sur un ton sincère, alors qu’elle observe le mari de Mabel glisser sur le côté du canapé le présent de Matilda. Les parents ont toujours été nuls pour connaître les goûts de leurs filles, voilà ce qui arrive lorsqu’on confit leur garde à une armée de nourrices, qui ne sont jamais restés très longtemps (merci Mabel).

La distribution des cadeaux continue, après les parents et Maddy, c’est au tour de la benjamine de la famille. L’ainée des Griffiths ne peut s’empêcher de rire lorsque Bryan reçoit des pins aux couleurs du drapeau gay et elle impressionne par le cadeau que Mabel offre à leurs parents. Quelle générosité, même si elle se doute qu’il y a une raison cachée derrière un tel présent. « Des vacances en amoureux ! C'est une superbe idée ! J'ai toujours rêvé de visiter les plages blanches de Polynésie » s’enthousiasme Matilda. Après quelques secondes de réflexion, Maddy réalise que les soeurs auront un peu de vacances si les parents sont absents durant quelques temps. Ce n’est pas plus mal étant donné la situation actuelle de Maddy. Cette simple pensée lui procure des crampes au ventre et Maddy essaye de rester concentrer lorsque Mabel s’approche d’elle pour lui tendre son cadeau. « Merci Mabel. » que répond l’ainée, préférant regarder son cadeau qu’affronter le regard de sa sœur. Elle redoute ses pouvoirs de divination. La Griffiths essaye d’agir le plus naturellement possible et déballe son cadeau avec précaution avant de découvrir le pull en laine. Elle affiche un petit sourire, elle pourra le rajouter à tous les autres habits que sa sœur lui a déjà offerts. « C’est très joli, tu aimes prendre soin de ma penderie depuis que nous sommes devenues adultes. » qu’elle jette à sa sœur, une petite allusion à toutes les fois où elle lui a piqué des affaires étant plus jeune.

Finalement c’est au tour de Bryan de faire la distribution de ses cadeaux. Il offre une collection de cigares à Mark, une écharpe en lin à Matilda et des tshirts floqués au nom des Griffiths aux cousines. Maddy a le droit au numéro 1 et Mabel au numéro 2. Il les prend pour une équipe de foot ou quoi ? L’ainée trouve le cadeau de son cousin de très mauvais gout, rappelant une énième fois la « compétition » entre les sœurs. « Merci Bryan.. c’est.. » Elle regarde sa sœur, le regard désespéré, dans l’espoir qu’elle trouve quelque chose à dire, car la situation frôle le ridicule. Mabel a toujours été plus douée dans le maniement des pics. « J’en perds mes mots. » qu’elle préfère conclure avant de porter son verre de coca à ses lèvres. Le repas de Noël risque d’être très -très- long.

Maddy reste silencieuse, ne préférant émettre aucun commentaire supplémentaire. Bryan et elle ont tendance à se chamailler très rapidement. Les souvenirs de Thanksgiving lui glacent encore le sang et elle préfère que l’attention soit dirigée sur sa petite sœur. Discrètement, Maddy regarde le ventre arrondi de Mabel. Par automatisme, elle ne peut pas s’empêcher de s’imaginer quelques mois plus tard. Enfin, dans l’optique où sa grossesse tienne le coup. Toute cette histoire la stresse, Maddy comme à son habitude cache de nombreux secrets. Comment la nouvelle de sa grossesse va-t-elle être accueillie au sein de sa propre famille ? Que vont dire les gens lorsqu’ils apprendront l’identité du père ? Maddy a le tournis à cette simple pensée et elle ne voit même pas qu’on lui tend l’assiette de petits fours. « Maddy, est-ce ça va ? » La voix stridente de Matilda la réveille. « Oui oui, ça va maman. » Mensonge. Maddy attrape l’assiette et se saisit d’un toast. Elle ne risque pas de le manger, cependant elle se sert par obligation afin de ne pas éveiller les soupçons. Elle tend ensuite l’assiette à cousin Bryan avec un sourire forcé.

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C’était Mathilda qui m’avait envoyé un texto, il y a quelques jours ; une photo floue d’un article de magazine qu’elle avait vu chez son coiffeur, où l’on pouvait me voir sur un plateau de tournage en train de rire. L’article s’intitulait “la révélation de cette fin d’année”. Ma tante avait ajouté une série d’émojis qui applaudissent, je l’avais remerciée, et elle avait répondu, sûrement innocemment ou par politesse, que je devrais passer au repas de Noël, que ça faisait une éternité que je n’étais pas venue les voir. Maddy et Mabel seraient là aussi, avait-elle précisé, comme si cela était censé me faire plaisir. J’avais fixé l’écran de mon téléphone, hésitant un long moment, avant de répondre, comme si je lui faisais une faveur - j’adorais, malgré moi, me faire désirer.

Oh, pourquoi pas, j’ai déjà quelque chose de prévu mais j’essaierais de passer !

J’avais verrouillé mon téléphone, le jetant au loin sur mon canapé, et poussé un soupir théâtrale. Pourquoi pas, après ? Je ne ratais jamais une occasion de me faire remarquer.

***

Les jours suivants, j’avais fait des rêves étranges, agités. Dans l’un d’eux, je me regardais dans le miroir, et y voyait Maddy dans le reflet, ses longs cheveux blonds toujours bien coiffés, son petit air poli. Un soir, avant de m’endormir, sans trop savoir pourquoi, j’avais cherché sur Youtube les vieilles vidéos de Mabel, où on pouvait la voir en train de chanter, accompagnée de sa guitare. Elle avait commencé à les poster à Londres, et à l’époque, je traquais encore ses moindres mouvements, cherchant à reconstituer les petites pièces d’un puzzle qui s’était évaporé de mon quotidien. Je me souvenais regarder les vidéos depuis l’appartement où j’étais en colocation, mes écouteurs vissés dans les oreilles, l’estomac noué. Maintenant, j'éprouvais un détachement étrange en regardant le petit sourire de cette Mabel figée dans le temps sur l’écran de mon portable. Tout cela me paraissait loin, très loin.

Cette année, mes parents étaient partis en voyage à Tokyo pour Noël, sur un coup de tête, oubliant évidemment de me proposer que je me joigne à eux. A ce stade, c’en était presque risible : j’étais après tout leur fille unique, et j’avais le temps, et l’argent, pour me joindre à eux. Mais comme toujours, ils étaient dans leur bulle, et après tout Noël n’avait jamais été une fête très importante pour la famille. Je n’avais même pas envie d’aller à Tokyo avec eux - j’avais juste envie qu’ils m’invitent, au moins, par politesse ou par amour. Mais tant pis, au moins, je serais tranquille, pas besoin d’être coincée à les regarder se roucouler dessus et m’offrir des cadeaux qui ne me correspondaient pas. Cette année, en plus, je n’avais jamais eu autant d’argent sur mon compte en banque, et je pouvais bien me faire plaisir, à moi comme aux gens qui comptaient. J’avais envoyé des colis à tous mes amis proches, avec des beaux cadeaux que j’avais pris plaisir à sélectionner pour chacun d’entre eux. Avant de partir pour chez mon oncle et mon tante, je réalisais avec tristesse que je n’avais aucune idée de ce qui pourrait leur faire plaisir, à eux comme à mes cousines. Je m’étais arrêtée chez un caviste, et achetée une bouteille de vin pour chacun.

Je m’amusais à les sélectionner avec soin. Pour mon oncle et ma tante, une bouteille de rouge chacun, pour mon oncle, un rouge un peu lourd et puissant, pour ma tante, un rouge plus acide. Pour Bryan, un vin blanc pétillant. Pour Maddy, un vin blanc tellement sucré qu’il en devenait presque écoeurant. Et pour Mabel, bien sûr, un rosé très sec et amer. Je souris à la caisse en tendant ma carte bleue, fière de ma petite pique que personne ne verrait vraiment.

En sortant de la voiture, mes paquets sous les bras, j’inspirai un grand coup et réajustai un peu ma robe à sequins rouge que j’avais mise pour l’occasion. Je me sentais bien dedans, j’étais assurée, je revenais en conquérante. Bordel, toutes les rumeurs parlaient d’une nomination pour un Golden Globes pour mon premier rôle télévisé ! Je sonnai à la porte, préparant mon plus beau sourire. De l’autre côté de la porte, j’entendis une certaine agitation. J’étais prête à parier que personne ne m’attendait. Ce fût ma tante qui ouvrit la porte, avec un grand sourire, et me claqua un baiser sur la joue, toute mielleuse.

“Maaaaarceline, oh, rentre, ça fait si longtemps !”

Ils étaient tous dans le salon, au milieu de papiers cadeaux froissés. Je levai mes deux bras pour montrer mes paquets, et adressai mon plus beau sourire à l’assitance.

“J’arrive pile à temps,” lançai-je avec une petit rire. “Désolée, j’étais occupée toute la journée, mais j’avais promis à Mathilda d’essayer de passer en cours de soirée.”

Il n’y avait pas à dire, le regard de Maddy et Mabel étaient assez priceless. Moi qui aimait les entrées remarquées…. Je distribuai à chacun leur paquet, toujours avec des grands sourires. Arrivée devant Mabel, je lui tendis le cadeau en la regardant droit dans les yeux.

“Oh, je crois que je n’ai pas eu l’occasion de te féliciter pour le bébé. Bravo,” dis-je avec un immense sourire. J’avais envie de lui jeter son verre de soda au visage, mais j’étais bien éduquée. Je me tournai vers celui qui semblait être son mari, et que je connaissais pas. Je lui serrai la main. “Marceline, enchantée. Tu as dû entendre parler de moi,” je lançai un coup d’oeil à Mabel et eut un petit rire, “en bien, j’espère,” ajoutai-je avec un clin d’oeil.

Rien n’était moins sûre. Je me laissai tomber dans un fauteuil libre, et pris le verre de champagne que me tendait mon oncle.

“Mabel, ma chérie, montre à Marceline le livre que je t’ai offert ! Tu vas voir, Marceline, ça parle des actrices hollywoodiennes. Tu vas finir dans un tel livre un jour, toutes les critiques le disent ! Enfin, il faudra que tu tournes dans des films, plutôt que des séries, bien entendu !”

Typique de ma chère tante : un compliment et un jugement, le tout bien emballé dans une réplique livré avec un grand sourire un peu faux. Ah, les repas de famille… Je regardai le livre dont elle parlait, et eu un petit pincement au cœur en me disant qu’elle l’avait offert à Mabel, qui était pourtant la seule à n’avoir jamais percé en tant qu’actrice. Cela me faisait un peu de peine pour elle… Je secouais la tête. Je détestais quand ma vieille affection pour ma cousine revenait, comme si je pouvais encore la comprendre.. Je ne la connaissais plus, après tout.

“J’ai déjà accepté mon prochain rôle, et ça sera dans un film,” lui expliquai-je, et le visage de Mathilda sembla s’illuminer de curiosité. “C’est encore en cours, donc c’est top secret, bien évidemment.” Je me tournai alternativement vers Mabel, puis Maddy. “Et vous les filles alors, vous avez des projets ? Je ne crois pas vous avoir vu dans quelque chose, récemment, mais ça m’a peut-être échappé ?” Demandai-je innocemment.

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« Oh, je suis tombée sur de vieilles photos de vous enfants, en faisant un peu de rangement. J'ai pensé qu'on pourrait les regarder tous ensemble ! » Mark s’empresse d’installer l’ordinateur sous les incitations de Matilda. Assise dans son fauteuil, Maddy assiste à une scène de ménage entre ses parents qui ne sont pas d’accord sur la façon de procéder. L’actrice profite de cette agitation pour faire tomber le petit-four dans le pot de Strelitzia qui se trouvait à côté d’elle. Elle trouvera un prétexte pour le nettoyer plus tard, en arrosant les plantes par exemple. A peine sa mission accomplie qu’elle entend la voix de sa petite sœur s’élever dans les airs. « Je trouve que t'as l'air un peu trop content. » Maddy retourne sa tête et range sagement ses doigts. « Rien, je vous trouve juste suspicieuses, l'une comme l'autre, à ne pas manger. » Bryan est insupportable, il est constamment à chercher la petite bête avec ses cousines. La main crispée de Mabel n’échappe pas au regard de sa grande sœur. Habituellement Maddy n’aurait pas pris la parole, se terrant dans son silence, mais ce soir c’est plus fort qu’elle. On ne parle pas mal à une Griffiths. Il n’a jamais été un vrai Griffiths de toute façon. Maddy tolère de moins en moins l'attitude de Bryan, surtout depuis Thanksgiving. « Et toi si tu continues à être insupportable Bryan, tu ne seras plus invité à nos repas de famille. » qu’elle affirme sur un ton ferme, sans pour autant trop élever la voix pour que les parents n'entendent rien. Ils sont toujours occupés par l’ordinateur en train de se chamailler. Bryan aura beau protester, être l’ainée comporte quelques avantages, comme demander des faveurs à son paternel.

Contre toute-attente, la sonnette de la maison retentit de nouveau. Maddy fronce les sourcils alors qu’elle voit sa mère accourir vers la porte d’entrée et son père se frotter les mains après avoir réussi à installer l’ordinateur à sa façon, sans écouter les moindres recommandations de sa femme. « Papa, tu as invité quelqu’un d’autre ? » que demande Maddy d'une voix incertaine, elle commence à connaître les entourloupes de son père. Ça suffit les invités surprises. Maddy jette un regard interrogateur à sa sœur avant de tourner la tête et découvrir sa cousine Marceline dans le salon, les bras chargés de cadeaux. Oh oh, la nouvelle star de Netflix est de sortie. Une bouffé de chaleur envahie la corps de la femme enceinte. Comment cette soirée va-t-elle finir ? Elle a très peur des prochains événements, elle veut éviter toutes questions compromettantes. Maddy se redresse sur son siège alors qu’elle assiste à une nouvelle distribution de cadeaux. Elle se retrouve avec une bouteille de vin blanc liquoreux au possible entre les mains. Maddy affiche un sourire en guise de remerciement, ne sachant pas trop quoi dire étant donnant sa situation actuelle, et la situation tout court à laquelle elle est en train d’assister. Alors elle se contente de répondre. « Merci Marcel. » qu’elle la surnomme, une vieille habitude qu’elle a gardé, même si les relations entre cousines ont toujours été compliquées et distantes dans cette famille.

Marceline continue à jouer les mères Noel et s’approche de son autre cousine. Heureusement Mabel a toujours su se défendre. Par contre le mari de sa petite sœur a le plaisir de découvrir le « phénomène » Griffiths de la famille. Matilda malaisante au possible parle de cinéma, elle n’a que ce mot à la bouche. Marceline en profite pour vanter ses nouveaux rôles, ses nouveaux projets, Maddy l’écoute que d’une oreille, elle n’a pas vraiment la tête à cela ce soir. Depuis septembre dernier, elle a repris le chemin des plateaux de tournage et ça lui a apporté pas mal de problèmes, comme le petit bébé qui est en train de pousser sous son nombril. Alors que Mabel est en train de rétorquer à sa cousine « Ça a dû t'échapper, mais j'ai eu quelques rôles ces derniers temps. Ça reprendra à la fin de mon congé maternité. » Maddy regarde discrètement son propre ventre, toute cette ambiance est pesante, les carrières respectives des Griffiths sont en constante comparaison. Maddy est fatiguée de vivre cette pression depuis le plus longtemps car elle est la plus âgée de sa génération. Elle a hâte que ce repas soit fini pour rentrer chez elle dans un environnement calme et non stressant. Alors Maddy fait ce qu’elle sait le mieux faire : éviter un sujet de conversation déplaisant. « Maman, tu voulais pas regarder les photos. » qu’elle rappelle à sa mère. Aussitôt Matilda se reprend et donne un coup de coude à son mari pour qu’il lance le diaporama.

Maddy ne sait pas si c’était la meilleure idée du monde, mais cela apporte un peu de calme dans la pièce afin d’éviter les discussions gênantes ou malaisantes. A chaque cliché, les parents ne peuvent s’empêcher de faire des commentaires. De temps à autre, on entend le petit rire moqueur de Bryan en arrière fond. Maddy boit en silence son verre de coca, dépitée de voir ses parents autant à l’ouest. Ils s’extasient devant ses souvenirs qui sont tous « heureux » à leurs yeux. Oui bien sûr, les photos des sœurs en couches sont adorables, mais dès que l’école a commencé la compétition a démarré. Les photos avancent, les années défilent et on voit l’arrivée de Marceline sur les clichés, rappelant l’époque où elle était venue vivre chez les Griffiths durant l’adolescence. Quand soudainement, un cliché des trois cousines lors d’un réveillon apparait sur l’écran. La photo est absolument ridicule et cela en grand partie à cause de leurs accoutrements. Elles sont tous les trois  assises sur le canapé avec un chapeau de Père Noel pour l’une, un serre-tête de renne à clochettes pour l’autre et un chapeau de lutin pour la dernière. Le sourire de Matilda s’élargit et elle sort une boîte contenant les fameux accessoires. Maddy fait les gros yeux, elle a peur de comprendre la suite des événements. Le diaporama s’arrête et sa mère annonce l’air chantonnant. « Puisque c’est si rare de vous avoir toutes les trois réunies, c’est l’occasion de refaire la même photo. Vous en dites quoi les filles ? » Venant de Matilda c'est une affirmation et non une question. Maddy est déjà tendue par cette réunion familiale, mais son état de stress vient d'atteindre son paroxysme. Elle repose son verre de coca, n’osant aller contre la volonté de sa mère, alors que Matilda est déjà en train de distribuer les accessoires et son père préparer son téléphone pour la photo.

La loterie de Noel:

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Ah, si la rivalité avait été un sport olympique, Maddy, Mabel et moi, on se serait sûrement disputées la première place du podium avec ferveur - à ce stade, ce n’était pas même plus une habitude familiale, c’était maladif. Il faut dire qu’il était difficile de s’extraire de cette dynamique quand toute la famille baignait dans ce mauvais travers. Il suffisait d’un coup d'œil sur le “cadeau” que Bryan avait fait à mes cousines pour le voir. Pourtant, peu important combien j’en étais consciente, j’étais incapable de ne pas m’y prélasser moi aussi. Il y avait quelque chose de grisant à pénétrer dans cette pièce, à sentir qu’on me regardait, qu’on était surpris de me voir, moi, la petite Marceline qui brillait de tout le succès qu’elle avait accumulé cette année, et dans un domaine qui était si apprécié par la famille. Implicitement, je crois que ça avait toujours été la question qui se posait, quand on regardait mes cousines et moi. Laquelle serait une star la première ? Maddy avait longtemps été donnée gagnante, puis elle avait subitement disparu de la course, me laissant une place de choix puisque Mabel ne semblait pas être capable de tirer son épingle du jeu. Les Griffiths regardaient ma carrière dans le théâtre avec du respect, mais toujours une pointe de déception : ce n’était pas le grand écran du cinéma. Même une série Netflix, finalement, ce n'était pas si impressionnant que ça… Mais cette série n’était qu’un tremplin, et enfin, j’avais presque signé pour mes prochains rôles, des films que les gens verraient dans une salle noire et un fauteuil rouge… Je regardais Maddy et Mabel, assises, étrangement lointaines. Oui, j’en étais sûre : c’était moi qui serait la première véritable star des cousines Griffiths.

Peut-être que si j’avais été honnête avec moi-même, j’aurais pu admettre que j’aurais facilement troqué cette célébrité pour une relation avec mes cousines. Je sentis quelques picotements le long de ma colonne vertébrale lorsque Maddy m’appela Marcel, et je fis semblant de ne pas le relever. Je ne savais pas pourquoi cela me mettait dans un tel état. Evidemment, Mabel répondit à ma question faussement innocente avec une réponse tout aussi faussement innocente, toutes les deux prises dans un petit jeu de bienséance et de piques discrètes mais aiguisées. Et bien entendu, Maddy était là pour éviter le conflit, avec un grand sourire, elle changea de sujet.

Il allait me falloir beaucoup de champagne pour tenir le carrousel de photos qui s'enchaînent montrant la famille Griffith, mes cousines lorsqu’elles étaient, les deux sœurs adorables qui jouent ensemble, se tirent les cheveux sur une photo et s’embrassent sur l’autre… Je sentis l’acide me remonter dans l’estomac, incapable de contenir ma jalousie face à leur évidente complicité, ce lien de soeur que personne ne pouvait briser malgré leur relation qui me paraissait inexistante aujourd’hui. Je connaissais la suite des photos, et pourtant, ma respiration se perdit dans ma gorge dès que je vis mon visage d’adolescente qui venait s'ajouter aux photos. Ces années de ma vie où j’avais vécu avec elles… Je bus cul sec la fin de ma coupe de champagne.

D’un coin de l'œil, je regardais Maddy et Mabel, et je sentis l’émotion m’envahir : je les avais vraiment considérées comme mes sœurs, et j’avais cru que ce lien spécial, ces sœurs choisies, serait sacré malgré toutes nos discordes. Pourtant, ça n’avait rien empêché, pas la distance, pas l’abandon, pas le silence. Aujourd’hui, je ne connaissais plus rien d’elles.

« Puisque c’est si rare de vous avoir toutes les trois réunies, c’est l’occasion de refaire la même photo. Vous en dites quoi les filles ? »

J’étais tellement absorbée par mes pensées que j’en avais oublié de regarder la photo que pointait ma tante. Je grimaçais. Comment est-ce que ma tante pouvait être aussi… Je retins le mot par politesse. Bien sûr, j’étais l’abrutie avec le costume de lutin, Maddy étant bien sûr la petite cheffe avec son rôle de Père Noël. Bryan, lui, semblait jubiler. Incapable d’opposer ma chère tante, je fis un grand sourire.

« Pourquoi pas, » répondis-je, en jetant un regard à moitié horrifié à mes cousines. Étrangement, la situation me donnait presque envie de rire avec elles, comme on le faisait avant, quand on savait faire bloc face aux adultes. L’éclat dans les yeux de Mabel, me rappelait presque notre complicité perdue.

On s’installa devant le sapin à contre-coeur - Mathilda poussait des petits piaillements de joie à nous voir, s’agitant autour de nous comme une photographe professionnelle. En voilà une photo que je ne risquais pas de mettre sur mon instagram, pensai-je. Mabel s’agitait dans son coin, visiblement mal à l’aise physiquement, et Maddy tentait de garder un sourire de Miss Parfaite qui n’était pas très convaincante.

« Maddy, tu as une mèche qui dépasse, juste là, » pointai-je en faisant un signe vers une mèche de cheveux qui cassait très légèrement son brushing parfait.

J’étais en train de faire un grand sourire à l’objectif, lorsque je remarquai que quelque chose avait changé dans la pièce, subtilement d’abord, puis envahissant complètement l’espace : une odeur de fumée étrange, amère, qui piquait les narines, et tout à coup, il y avait de la fumée qui se dégageait de la cuisine, et tout le monde se mit à s’agiter dans tous les sens, Bryan agitant sa main en poussant des cris aiguës comme s’il était lui même brûlé à vif. Quelque chose avait été laissé trop longtemps au four, et un parfum âcre remplaçait celui des cires des bougies de la table - ma tante courut vers la cuisine tandis que le visage de Maddy s’était vidé de toutes ses couleurs, comme si elle allait tourner de l’oeil.

Christmas isn't a season
it's a feeling

@mabel griffiths, @marceline griffiths, maddy griffiths & family

***
« Pourquoi pas. » Elle croisa le regard horrifié de Marceline. Les trois cousines avaient l’air enchanté de reproduire cette photo de famille à l’identique. Marceline fut la première à se lever et prendre la direction du sapin. « T'avais tout prévu, maman ? » Bien évidement que Matilda Griffiths avait tout prévu, le contraire serait mal la connaître. Fidèle à elle-même, Maddy ne dit rien qui pourrait aller à l’encontre de la volonté de l’un de ses parents. Sagement elle attrapa son bonnet de mère Noel qu’elle déposa sur sa chevelure blonde, s’armant de son meilleur sourire afin de cacher les apparences. « Maddy, tu as une mèche qui dépasse, juste là. » Maddy lança un regard en biais à sa petite cousine avant de replacer ladite mèche. « Trop aimable Marcel. » qu’elle répondit les dents serrées avant de se poser devant le sapin aux côtés de Marceline le lutin. Maddy fit une drôle de tête en sentant la fragrance de sa cousine. Depuis le début de sa grossesse, son odorat était devenu hypersensible. Bon sang, qu’avait-elle mis ? On remarquait suffisamment sa présence à des kilomètres, elle voyait sa tête à chaque fois qu’elle lançait son Netflix sur la télévision. Après quelques difficultés à se lever, Mabel arriva à son tour et le photoshoot commença. Matilda poussait des petits cris de joie à chaque nouveau cliqué que Mark prenait, quand soudainement une odeur de cramé embauma la pièce. Les sourcils de la Griffiths se froncèrent. « Maman.. tu as oublié quelque chose dans le four ? » « Oh mon dieeeeu ! Le gratin. » Matilda laissa tout en plan et piqua un sprint vers la cuisine pour sauver le repas de ce soir. Habituellement, Maddy aurait prêté main forte à sa mère mais là, elle devait se tenir au loin de toutes ces odeurs. Elle essayait de calmer sa respiration car elle sentait des hauts le cœur la menacer. « Je me sens pas bien » que commença à s’agiter Mabel à côté d’elle, alors que son mari ouvrit les fenêtre et l’emmena faire un tour sur la terrasse. A peine quelques secondes d’intervalle, le teint de Maddy vira au blanc. Le parfum et le gratin carbonisé étaient de trop. « Moi non plus. » Pour une fois, l’ainée ne cherchait pas à voler la vedette à qui que ce soit, elle avait simplement parler à voix haute, alors que son ventre était en train de la marteler de l’intérieur. Oh mon dieu. Maddy mit sa main devant de boucher et accéléra le pas vers les toilettes en entendant le rire moqueur de son cousin Bryan sur son passage. Le petit con. Maddy avait vraiment le mauvais rôle d’être l’ainée « parfaite » en permanence. Elle supportait de moins en moins toute cette mise en scène et elle n’arrivait plus à contrôler ses petits secrets qui s’accumulaient. Alors qu’elle referma la porte des toilettes derrière elle pour finir la tête sur les cuvettes juste à temps, elle était terrifiée à l’idée que quelqu’un ait remarqué son attitude étrange. Maddy priait intérieurement que tous les regards soient posés sur Mabel. Après quelques minutes, la blonde se releva et se passa un coup d’eau sur son visage. Elle fouilla dans les tiroirs pour chercher de quoi se laver les dents et arranger sa coiffure, quand soudainement elle entendit des pas. « Bah alors cousine, on cache quelque chose ? » que lança Bryan d’une voix moqueuse à travers la porte. Maddy soupira. Elle referma le robinet d’eau et rangea les affaires avant d’ouvrir la porte et le toiser d’un regard supérieur. « Et toi c’est quand que t’arrête de nous cacher ton copain ? » qu’elle rétorqua le défiant du regard, elle connaissait très bien le point sensible de Bryan qui était son homosexualité refoulée. Maddy usait du bluff dans ses paroles mais elle savait qu’il y avait une part de vérité. Ce n’était pas pour rien que Mabel avait offert des pins aux couleurs du drapeau gay pour Bryan. « Excuse-moi, mais t’es sur mon passage. » qu’elle le poussa légèrement pour reprendre la direction du salon et découvrir ce qu’il s’était passé durant son absence. L’ainée de la famille n’était pas au bout de ses surprises.

La Griffiths revint sur la scène principale de ce drame familial, son bonnet père Noel à la main. Elle vit sa petite sœur pousser un cri et le regard de l’ainée s’alarma. Il se passait quelque chose de grave ? Mabel soufflait à travers la fenêtre, les mains crispés sur son ventre. « Je crois que j'ai des contractions. » C’est à ce moment-là que Matilda revint dans le séjour après avoir régler le soucis en cuisine. « Mon dieu ! J’ai entendu crier, qu’est-ce qu’il se passe, Mabel tu vas bien ? » Elle accourut vers sa fille alors que les autres restaient plantés sur place, ne sachant quoi faire. « Maman, n’étouffe pas Mabel. Ce n’est pas le moment. » qu’elle dit d’une voix calme mais ferme. Elle s’approcha de sa maternelle pour lui prendre le bras afin qu’elle évite de coller aux basques de sa benjamine. Le regard de Maddy se posa sur le corps de sa petite sœur qui souffrait. Maddy n’était pas magicienne, mais elle avait une idée de ce qui était en train de se produire sous leurs yeux. « Je pense qu’ils seraient plus sage que vous alliez faire un check à la maternité. » « Mais le réveillon de Noel ? » que geignit Matilda. Maddy regarda avec des gros yeux sa mère. « Maman, tu es sérieuse ? Il y a plus important que ce repas de famille ! De toute façon, ton gratin a brûlé. » Et que tout le monde avait envie de se barrer d’ici.

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'tis the damn season
write this down

Je ne sais pas à quoi je m'étais attendue ; c'était une repas de famille chez les Griffiths, bien sûr que la catastrophe rodait toujours, prête à bouleverser le moment et créer un chaos toujours bien trop mélodramatique pour être complètement sincère. Parfois, j'avais l'impression de jouer un rôle dans une série sur une famille dysfonctionnelle, tous les éléments étaient toujours là, chacun dans son petit rôle qui l'attendait sagement. Maddy, l'ainée parfaite et pleine de secret, toujours à sourire mais prête à vous abandonner d'un jour à l'autre, mais toujours avec politesse, à se faire remarquer tellement elle brillait. Mabel, et son caractère bien trempé, qui provoquait toujours des disputes pendant les déjeuners, parce qu'elle ne savait pas se retenir, et j'avais toujours adoré la regarder s'enflammer, parce que j'étais ainsi moi aussi, mais là où je n'en oubliais jamais mon numéro de charme, Mabel, elle, n'hésitait pas être complètement elle-même. Au fond, c'était quelque chose que j'admirais. C'était étrange, d'ailleurs, je la trouvais bien calme aujourd'hui. Peut-être qu'elle avait changé, après tout, je ne l'avais pas vu depuis si longtemps. Je sentis un poids dans mon estomac lorsque je réalisais que je ne me rappelais pas vraiment la dernière fois que je l'avais vue, qu'on avait discuté, vraiment.

« Je me sens pas bien » Ah, bah oui, évidemment qu'elle se sentait mal, la Mabel et son immense ventre qui prenait autant de place que l'égo de toutes les personnes dans la pièce.

« Moi non plus. »

Tiens, voilà que Maddy s'y mettait aussi ! Je levai les yeux au ciel, et murmurai, assez fort pour qu'elle m'entende, évidemment :

« Bah tiens, comme par hasard, toi aussi... »

Les minutes qui suivirent ressemblaient à une pièce de théâtre, chacun qui s'agitait, sa réplique, Maddy qui quitta la pièce théâtralement comme si elle était au bord de l'apoplexie, Matilda qui s'agitait pour son gratin comme s'il s'agitait de la fin du monde. Je me laissai tomber sur le canapé et me servis une nouvelle coupe de champagne que je bus d'une traite, avant d'en reprendre une à nouveau. Non mais, sérieusement, qu'est-ce que je foutais là moi, toujours au milieu du drame alors que j'aurais pu être chez moi, à boire du vin blanc et regarder une rediffusion de Sex And The City. Ah, oui, bien sûr, j'avais imaginé que peut-être quelqu'un se serait intéressée à moi, puisqu'on ne m'avait pas vu depuis si longtemps, que j'étais devenue "l'étoile montante à suivre de près" d'après tous les magazines. Mais évidemment, ici, je n'étais que Marceline, la petite cousine, qui passerait toujours derrière les sœurs Griffiths.  

« Je crois que j'ai des contractions. »

Je manquai d'éclater de rire.

« Il ne manquait plus que ça ! Joyeux Noël tout le monde ! » Dis-je en levant ma coupe de champagne.

Le mari de Mabel me lança un regard noir et je lui adressai mon plus beau sourire. Bryan, lui, se délectait du chaos.

« Mon dieu ! J’ai entendu crier, qu’est-ce qu’il se passe, Mabel tu vas bien ? » Matilda, toujours aussi douce et pas du tout trop dramatique, elle aussi - elle s'agitait partout comme s'il y avait encore le feu dans le salon. « Maman, n’étouffe pas Mabel. Ce n’est pas le moment. » Maddy qui faisait la leçon, quoi de neuf ? « Elle s'inquiète simplement, » ajoutai-je, pas vraiment pour défendre ma tante, mais pour lancer une petite pique dans le complexe de sauveuse de Maddy qui voulait absolument tout gérer.

« Je pense qu’ils seraient plus sage que vous alliez faire un check à la maternité. »
« Mais le réveillon de Noel ? »Franchement, de l'extérieur, ce repas était presque hilarant tellement il était grotesque.
« Maman, tu es sérieuse ? Il y a plus important que ce repas de famille ! De toute façon, ton gratin a brûlé. »

Je me levai du canapé et m'approchai de l'épicentre du drame où tout le monde semblait vouloir voler le rôle principal. Bon, Mabel et son accouchement, ça risquait de remporter l'Oscar ce soir, c'était certain.

« Matilda, je comprends que tu sois déçue pour le réveillon, » Je lui fis un grand sourire compréhensif, et je jetai un coup d'oeil à Maddy, l'air de lui dire eh toc, « Mais je crois qu'en effet Mabel a besoin d'aller à l'hôpital. On refera un dîner une autre fois, après tout, c'est tellement bien quand on est tous réunis, n'est-ce pas les cousines ? »

Je leur adressai mon plus beau sourire hypocrite. Mon oncle et ma tante étaient bien trop autocentrés pour comprendre les piques qui étaient en train d'être lancées. Je récupérai mes affaires, reprenant mon sac à main, prête à quitter la maison après ce fiasco complet.

« Eh bien, on a pas trop eu le temps de discuter, c'est dommage, j'avais tellement de choses à vous raconter, mais bon, tant pis, de toute façon, ce n'est jamais facile avec Maddy et Mabel à côté, » soupirai-je, amère. Je repartais comme j'étais arrivée, théâtralement. Quitte à ce que ce repas se termine ainsi, je voulais être la première partie, avoir le plaisir de presque claquer la porte, de quitter la situation comme une princesse qui refusait de prendre part. Je voyais bien que je réagissais comme une gamine, que Mabel était littéralement sur le point de pondre un enfant dans le salon, mais c'était plus fort que moi. « Mais ça m'a fait plaisir de vous voir ! » Mentis-je avec mon plus beau sourire.

Christmas isn't a season
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@mabel griffiths, @marceline griffiths, maddy griffiths & family

***
Maddy ne savait plus à partir de quel moment la soirée avait dégringolé. A l’ouverture des cadeaux ? A l’arrivée surprise de leur cousine Marceline ? Ou bien la séance photo manigancée par Matilda ? A tel point qu’elle avait oublié son gratin dans le four. Il devint soudainement la seule préoccupation de leur mère, laissant Mark en plan avec l’appareil photo, alors que Mabel fut prise de contractions. Le surplus d’odeurs dans le séjour des Griffiths avait provoqué des nausées à l’ainée. Elle s’était éclipsée cinq bonnes minutes, en espérant que cela passe inaperçu. En revenant dans le salon, Mabel soufflait toujours aussi fort. Elle observa les traits de son visage se tendre, ce qui l’inquiéta profondément. Malgré le fait que l’ainée s’était montrée sacrément absente durant toute la grossesse de sa petite sœur, cela lui fait quelque chose de voir sa benjamine souffrir. Rapidement, elle essaya de calmer furie Matilda qui accourut vers sa fille. Comme d’habitude diva Marceline ne put s’empêcher de glisser une remarque sur les agissements de Maddy. L’ainée soupira, alors que tout le monde s’agitait, elle au moins, elle essayait de remettre d’ordre dans cette cacophonie. Elle avait envie d’étranger Bryan qui se marrait dans son coin. Sagement, Maddy conseilla forcement à Mabel et son mari de se rendre à la maternité. Le repas de Noel, ça sera pour la prochaine année, de toute façon personne ne voulait y participer, à part Matilda et Mark bien sûr.

Pour une fois, Marceline eut une réaction mature, en essayant de raisonner sa tante. « Matilda, je comprends que tu sois déçue pour le réveillon, »  Enfin à moitié, il ne fallait pas trop lui en demander. « Mais je crois qu'en effet Mabel a besoin d'aller à l'hôpital. On refera un dîner une autre fois, après tout, c'est tellement bien quand on est tous réunis, n'est-ce pas les cousines ? » Ce fut au tour de Maddy de souffler et elle se contenta d’adresser un sourire forcé à sa petite cousine en guise de réponse. A croire qu’elle avait préparé toutes ses répliques à l’avance. Et elle continua. « Eh bien, on a pas trop eu le temps de discuter, c'est dommage, j'avais tellement de choses à vous raconter, mais bon, tant pis, de toute façon, ce n'est jamais facile avec Maddy et Mabel à côté. Mais ça m'a fait plaisir de vous voir ! » Quelle bonne actrice elle fait, pas la peine d’en remettre une couche ou sinon Mabel va finir par accoucher au milieu du salon.

Pourtant Mabel ne se laissa pas faire, c’était mal connaître la benjamine des Griffiths. « Je suis sûre qu'on aura bientôt plein de temps pour discuter ensemble, Marcel. A moins que tu refuses de céder ta place de vedette de la famille à ton petit-cousin ou ta petite-cousine ? » Bien jouée Mabel. Maddy était bien trop parfaite pour avoir de tels propos, mais sur le moment, elle n’en pensa pas moins. Théâtralement, Marceline quitta la maison des Griffiths.

Matilda était toujours en train de se lamenter sur le réveillon qui finissait en tragédie. Pendant ce temps, le regard de Maddy se posa sur sa petite sœur, toujours aussi inquiète. « C’est le moment ou jamais de fuir. » qu’elle murmura à sa petite sœur, le regardant droit dans les yeux. Ni une ni deux, Mabel et son mari s’activèrent. « Maman, merci de nous avoir invité pour le repas, même si on a rien mangé. Les autres, contente de vous avoir vu aujourd'hui, et joyeux Noël ! » Dans la précipitation, Mabel récupéra seulement un cadeau. La petite peluche qu’elle lui avait offerte. Maddy eut un léger sourire ayant tout juste le temps de dire. « Bon courage Mabel. » Et le couple s’éclipsèrent de la maison, direction la maternité.

Le calme revint enfin dans le séjour. Mark et Bryan ne savaient pas quoi dire alors que Matilda était à deux doigts de pleurer. « Oh maman, ne pleure pas. Mabel est partie pour une bonne raison, tu le sais bien. » que s’approcha Maddy en caressant doucement le dos de sa mère. « Je veux bien rester pour manger le dessert. » Etant donné que le plat principal était carbonisé et que de toute façon, Maddy ne pouvait qu’avaler du sucré. Sa mère retrouva un petit sourire et sécha ses larmes. Encore une fois, Maddy avait endossé le rôle de l’ainée pour réparer les pots cassés des deux tornades Griffiths.

THE END