Le réveillon de Noël est certainement l’événement dans l’année qui rassemble le plus de monde d’une même famille autour d’une table. Depuis ses dix-huit ans, Jake a l’habitude de le vivre seul. Cette solitude a provoqué de la pitié chez quelques-uns de ses amis et c’est vrai que, durant quelques années, il est allé chez les uns et chez les autres sans jamais réussir à se sentir à sa place. En regardant la vie que les autres menaient, il se remémorait sa mère et son père. Quand elle était encore vivante et qu’elle s’impatientait que son fils ouvre ses cadeaux, quand son géniteur ne le détestait pas encore pour son orientation sexuelle et qu’il se déguisait avec plaisir en père Noël. Amoureux de cette fête mais désespéré, il a fini par arrêter d’accepter les invitations et de trouver une excuse parfaite avec son travail. Aux urgences, il y a toujours besoin de monde. Peu importe que ce soit la plus belle soirée de l’année et que l’on veuille être avec sa famille. Durant près de vingt ans, Jake a offert la possibilité à un autre infirmier de ne pas travailler en prenant sa place. Il s’est rendu compte qu’il était destiné à ça, finalement, en ce soir si spécial ; être auprès de ses patients, les soutenir et leur faire comprendre que non, eux non plus ne sont pas seuls. Pas cette année. Cette année, lui aussi a des cadeaux à offrir et à ouvrir. Lui aussi a un repas à préparer et une table à mettre. Lui aussi a un sapin fraîchement coupé et parfaitement décoré à montrer à ses invités. Lui aussi a le droit de célébrer sa fête préférée, entouré des personnes qu’il préfère également. Melchior et Albane. Son fils et une de ses amies. Si on lui avait dit l’année dernière à cette même période qu’il fêterait Noël avec son enfant l’année d’après, il aurait ri. Nerveusement ou juste pour cacher son désespoir, ça, ça restera incertain. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que s’il sourit aujourd’hui, ce n’est que parce qu’il est heureux. Dans la cuisine, il vérifie une dernière fois que tout est prêt et que le chat n’est pas passé par là pour ruiner ses efforts. Il sait cuisiner mais n’est pas un maître en la matière, c’est pourquoi il n’a rien tenté de trop compliqué pour ce soir. Il a fait des toasts ; ce n’est pas très coûteux et il ne faut pas être un chef étoilé pour y parvenir. Saumon, foie gras, fromage et tartinades aux légumes, il y en a pour tous les goûts. Jake ne sachant pas faire dans la demi-mesure, il y a malgré tout évidemment une dinde à l’orange qui cuit au four. Il sait qu’il aura des restes pour toute la semaine, au moins. L’infirmier se lave les mains et s’avance vers la chambre d’amis – chambre de Melchior actuellement – pour voir où en est son fils de sa préparation. « Alors, qu’est-ce que ça donne ta veste ? » Pour l’occasion, il a insisté pour lui prêter une veste de costume qu’il emmenait partout quand il était plus jeune. Oui, Jake se transforme en ce père collant et pressant qui veut voir son fils réaliser le même schéma que lui – en mieux. « Tout est plus ou moins prêt et Albane ne devrait pas tarder. » Avec le dessert, Jake l’a mise au défi de réaliser quelque chose de comestible pour ce soir. Il a hâte de découvrir ce qu’elle a fait – et hâte de savoir s’ils vont devoir tous remettre la main à la pâte tout à l’heure ou si elle a réussi son coup, cette fois. « Ça va ? » Il lui pose cette question environ dix fois par jour depuis qu’il l’a récupéré chez lui et compte le faire jusqu’à ce qu’il s’en aille – et même après – parce que pour lui, il n’y a rien de plus important que la santé mentale. Et il pense qu’avec cette soirée et ces dernières semaines ensemble, il n’y a aucune raison pour que ça n’aille pas de son côté.

@Melchior Nicholls  @Albane Dumas :merry:

Si au début de l’année on m’avait dit que je passerais le réveillon de Noël chez mon père je pense que j’aurais ri. Je n’aurais jamais imaginé le rencontrer un jour alors passer le réveillon avec lui c’était encore plus farfelu comme idée. Pourtant aujourd’hui je sens que c’est ici qu’est ma place. Je suis soulagé de ne pas avoir à passer le réveillon avec Matthew. On a toujours passé la soirée du 24 ensemble avec maman mais cette année c’est différent. Maman n’est plus là alors quand j’ai appelé Matt pour lui dire que je passais le réveillon chez Jake. Il n’a pas eu l’air embêté et il m’a expliqué de toute façon qu’il n’avait pas très envie de fêter noël cette année. Si Jake n’était pas entré dans ma vie je pense que j’aurais passé le réveillon seul aussi, j’ai passé une année difficile, un mois de novembre et de décembre particulièrement douloureux alors je n’avais pas trop le cœur à la fête. Avec Matt on s’est tout de même mis d’accord pour se voir le 25, pas pour dîner mais pour aller voir notre mère au centre de soins. Malgré tout je suis heureux d’être là ce soir, de passer mon premier réveillon avec mon père. J’aimerais que les circonstances soient différentes, j’aimerais que la chambre d’ami dans laquelle je suis en train de m’habiller ne soit pas celle que j’occupe depuis presque deux mois maintenant. J’aimerais habiter toujours avec Ade et que toutes ces histoires ne soient jamais arrivées mais c’est comme ça. Je me sens bien chez Jake mais je dois trouver une solution, je ne peux pas rester éternellement dans sa chambre d’amis. Une de mes résolutions pour l’année 2022 ce sera de trouver un appart et d’essayer de me reprendre en mains. Ce que Matt me répète en boucle depuis toujours, ce que je n’ai jamais été capable de faire. Assis sur le rebord du lit je boutonne ma chemise et j’essaie de chasser ces pensées négatives qui sont en train de ruiner mon état d’esprit. J’essaie de me concentrer sur les bonnes choses : je vais passer le réveillon avec Jake, Albane que j’apprécie beaucoup et ce sera une très bonne soirée. Une fois ma chemise boutonnée j’attrape dans l’armoire le cintre où la veste que Jake m’a prêtée. Elle est vraiment très belle, de bonne qualité et ça me touche qu’il veuille me prêter une de ses vestes. C’est sa façon d’essayer de rattraper le temps perdu. De mon côté je lui raconte des anecdotes sur mon enfance, je lui parle de moi, je réponds à ces questions. Je sais qu’on ne pourra jamais rattraper 25 ans mais on apprend à se connaître pas à pas et c’est tout ce qui compte. J’enfile sa veste et Jake entre dans la chambre. « Alors, qu’est-ce que ça donne ta veste ? » Je me tourne vers lui et je lui dis avec un petit sourire. « Elle est super, pas trop serrée, pas trop grande, pile comme il faut. C’est gentil de me la prêter, tu devais avoir la classe avec ça. » Mon « c’est gentil » c’est une alternative pour éviter de le remercier constamment, je sais qu’il n’a pas envie ou besoin d’entendre des remerciements à longueur de journée mais c’est plus fort que moi. Il en a fait énormément pour moi et il continue de m’aimer malgré tout ce qui s’est passé alors j’aurais toujours envie de le remercier pour ces petits riens qui me font me sentir bien, me sentir aimé. « Tout est plus ou moins prêt et Albane ne devrait pas tarder. » Je souris en pensant à Albane, ou plus précisément à la soirée dégustation au vignoble de Dani qui était une excellente soirée où nous avions appris à nous connaître au travers d’histoires plus ou moins glorieuses. « Parfait, je suis prêt aussi. » Je jette un coup d’œil rapide dans le miroir, je n’ai pas une mine resplendissante depuis quelques temps mais je suis prêt pour ce premier noël si spécial. « Ça va ? » Jake est quelqu’un de très protecteur et ça me fait du bien.  Il me demande souvent comment je vais et petit à petit je m’ouvre à lui. Si au début je lui disais que ça allait alors qu’au fond j'avais l'impression de me noyer, maintenant j’ose lui parler de ce que je ressens et j’essaie de me nourrir de ses conseils et ça m’aide à aller mieux. Il commence à me connaître et il a bien dû voir que j’étais un peu stressé et que quelque chose clochait. « Ça va…je suis content qu’on passe le réveillon ensemble mais je suis un peu stressé pour demain. » Je lui ai un petit peu parlé d’Adriana et du traditionnel déjeuner de noël où je suis invité depuis des années. Repas où sa mère et son frère sont présents et si d’habitude je suis ravi de passer noël avec eux cette année j’appréhende énormément ce repas. Ils savent que nous ne sommes plus ensemble mais même si elle m’a assuré ne pas avoir expliqué les raisons de notre rupture en détail ou mon infidélité j’ai toujours peur qu’ils le sachent. Et au-delà de cette peur, entre Ade et moi même si elle m’a pardonné c’est toujours bizarre et je ne sais pas si je vais pouvoir me comporter normalement. « Je sais qu’elle n’a pas donné de détails à sa famille mais je vais avoir du mal à parler avec eux comme si rien ne s’était passé. » J’inspire un grand coup, ce n’est pas la seule chose qui m’angoisse pour la journée de demain. « Et avec Matt on va aussi aller voir maman demain. » J’ai très envie de revoir ma mère, c’est très difficile de passer noël loin d’elle mais j’appréhende ses réactions. Si elle est dans un bon jour ça ira, le problème avec Alzheimer c’est les mauvais jours. Ceux où elle ne nous reconnaît pas, ceux où elle nous demande de partir ou ceux où elle ne parle pas. Je ne sais pas si je suis assez fort pour encaisser ça, la dernière fois qu’elle était dans un mauvais jour j’ai passé le reste de la journée à pleurer sur le canapé. Parce que c’est trop dur, même si j’ai trouvé un père cette année j’ai perdu ma mère et je ne vois pas d’issue à cette situation. La sonnette se fait entendre. « Ah ça doit être Albane. »

Depuis plusieurs semaines, Albane redoutait Noël. C'était devenu le lot annuel depuis la mort de Blanche, ce sentiment de manque, de tristesse et de colère. Son absence lui pesait et malgré tous ses efforts pour tenir le cap, Albane n'y arrivait pas vraiment. Elle partait bien trop souvent à la dérive ces derniers temps, et elle avait beau en avoir tristement conscience, cela ne la faisait pas cesser pour autant. Pourtant, elle n'était pas encore résignée à se laisser couler. Cette année encore, elle ne rentrerait pas en France, ses parents ayant cessé de célébrer ou de prétendre être heureux. Ils lui avaient dit qu'il était inutile de revenir, elle les avait cru. Son planning de travail quant à lui lui avait offert une soirée de repos pour Noël, chance qu'elle avait décidé de ne pas contester. Il y avait pire que de devoir se rappeler l'absence de sa sœur ; il y avait passer la soirée au milieu d'autres âmes au Noël bousillé. Cela ne lui ferait aucun bien, de quelque manière que ce soit. Alors la française s'était décidée ; comme toujours, elle prétendrait que tout irait bien. Jake l'avait invitée chez lui pour célébrer. Il y aurait Melchior. Ce serait amusant. Elle jouerait le jeu. C'est qu'elle y avait mis de la bonne volonté au final, ayant pris avec un goût de défi la demande de son ami de préparer le dessert. C'était risqué, et si ça n'avait tenu qu'à elle, elle aurait probablement misé sur un gâteau dans une pâtisserie réputée de la ville. Mais Jake voulait une préparation maison ? Il l'aurait. Un projet franchement ambitieux qui avait nécessité un nombre incalculable de relectures de la recette, trois tentatives ratées, un bon nom d'injures lors de la réalisation. Le résultat final était une bûche à la mousse de chocolat et aux marrons, qui en toute impartialité était plutôt jolie à voir. Gustativement parlant, ce serait la surprise de la soirée. Dans le pire des cas, ce ne serait pas la première fois qu'ils auraient à préparer un dessert de dernière minute.
Ce fut donc avec une pile de cadeaux empilée dans le bras gauche, avec une bûche précautionneusement tenue dans sa main droite, et des oreilles de rennes sur la tête qu'elle se présenta face à la porte de son ami. Avec un équilibre précaire, elle appuya sur la sonnette avec son coude, son esprit dévoué à prier pour ne pas commettre de catastrophes dans les prochaines minutes. Elle eut l'impression qu'une éternité s'écoula avant qu'enfin, le visage de Jake apparaisse. "Joyeux Noël !!!" Un enthousiasme sorti du fond du cœur, avant que la grimace ne prenne le dessus. "Un peu d'aide, s'il te plaît." Elle ne pourrait pas supporter la fin tragique de sa bûche avant que celle-ci soit déclarée comestible -ou non, d'ailleurs-. Aussi, elle se sentit obligée de marquer son soulagement d'un soupir audible en réalisant qu'il n'y aurait pas de telle catastrophe aujourd'hui. "J'ai cru que j'y arriverai jamais" Mais maintenant, elle n'avait plus qu'à déposer les cadeaux au pied du sapin, qui était bien plus réussi que le sien, il fallait bien l'avouer. La chose faite, ce fut le tour à tour pour les étreintes. Jake, puis Mel, puis le chat qu'elle attrapa au vol. Il était habitué. "Merci beaucoup de m'avoir invitée, en tout cas. Je sais que ce Noël est spécial pour vous." Leur premier ensemble. De quoi justifier le fait de ne pas avoir voulu s'imposer, au début. Elle n'en était que plus reconnaissante.

Tout semble parfait lorsque Jake va vérifier si Melchior est prêt. Ils n’ont plus qu’à débuter cette soirée de réveillon, plus qu’à profiter de l’un, de l’autre, et d’Albane aussi : s’il l’a invitée, ce n’est pas par pitié mais par envie. Passer Noël qu’avec son fils aurait pu être intéressant, oui, mais ça aurait eu l’allure d’une soirée normale, comme les autres, avec seulement quelques cadeaux en plus. Inviter Albane, c’est ajouter quelque chose de supplémentaire et remplir son cœur d’une joie qu’il ne s’explique pas. Il l’adore, il sait que c’est réciproque, il sait aussi que Mel et elle s’entendent bien : la soirée ne peut qu’être bonne. « Elle est super, pas trop serrée, pas trop grande, pile comme il faut. C’est gentil de me la prêter, tu devais avoir la classe avec ça. » « Pas plus que toi. » Il doit encore avoir des preuves, de vieilles photos de lui qui porte cette veste. Elle va mieux à Melchior qu’à lui, et il est content de le voir la porter. Ça lui donne la sensation de réellement lui transmettre quelque chose, même si ce n’est qu’un bout de tissu et non tout un apprentissage digne d’un père. Il lui dit que tout est prêt – ou presque – et qu’Albane est sûrement en route. « Parfait, je suis prêt aussi. » Ce qui leur laisse quelques minutes pour discuter avant que les festivités ne commencent. « Ça va… je suis content qu’on passe le réveillon ensemble mais je suis un peu stressé pour demain. Je sais qu’elle n’a pas donné de détails à sa famille mais je vais du mal à parler avec eux comme si rien ne s’était passé. Et avec Matt on va aussi aller voir Maman demain. » Jake hausse ses épaules, un peu comme s’il ne voyait pas le problème. « Ce que tu as fait ce soir-là ne représente pas l’homme que tu es. Une erreur ne vaut pas un jugement, selon moi. Et le fait qu’ils ne savent pas arrange la chose, reste toi-même, parle avec eux et profite de ce moment. Si tu veux rester ami avec Adriana, ne te range pas dans la case de celui qui doit se racheter mais de celui qui l’a déjà fait. » Même si les excuses n’ont pas encore été acceptées – ou sont en cours de l’être – il ne doit pas se mettre en position de victime constamment. Quelqu’un sonne à la porte. « Ah ça doit être Albane. » Il hoche son visage et commence à avancer vers la porte d’entrée. « Et pour ta mère, je te souhaite bon courage. J’espère qu’elle sera dans l’un de ses bons jours, ce serait un merveilleux cadeau pour ton frère et toi. » Car retrouver sa mère le temps d’un instant, c’est sûrement la meilleure offrande pour un enfant qui a vu son parent être emporté par Alzheimer en un rien de temps. Il ouvre la porte et trouve une Albane en galère totale avec sa bûche et ses cadeaux. « Joyeux Noël !!! » « Oh, un petit renne. » Il le dit avec un grand sourire en ouvrant la porte de toute sa largeur, pour que Melchior puisse la voir également de loin. « Un peu d’aide, s’il te plaît. » « Oui, bien sûr. » Il parle en attrapant la bûche, qui ne risque plus rien maintenant qu’il la tient de ses deux mains. Il referme la porte d’un léger coup de pied une fois la brune rentrée. « J’ai cru que j’y arriverai jamais. » « Tu aurais pu me dire que tu étais à ce point encombrée, ça m’aurait pas dérangé de venir te chercher. » Il sait qu’elle le sait, il le dit quand même. Il s’approche du réfrigérateur pour y mettre la bûche, déjà impatient du moment où il faudra la goûter. « Merci de m’avoir invitée, en tout cas. Je sais que ce Noël est spécial pour vous. » Il jette un regard dans la direction de Mel avant de reporter son attention sur elle. « Il est encore plus spécial si tu es avec nous. Pas besoin de nous remercier, juste de profiter. Je ne veux pas que tu penses être incrustée ici, t’as autant ta place que nous deux. » Et le dire dès le début a son importance, selon lui. Son four se met à sonner, il retourne donc se cacher derrière le comptoir pour voir ce qu’il en est de la cuisson. « J’espère que vous avez faim, tous les deux ! » Parce qu’il a vraiment trop préparé pour seulement trois personnes.

@Melchior Nicholls @Albane Dumas

« Pas plus que toi. » Je souris et je suis fier de porter sa veste, c’est par ces petites attentions que nous réussissons à apprendre à nous connaître et que l’on se rapproche alors je n’ai pas besoin de plus pour que ça me fasse sourire. « Faudra qu’on fasse une photo ensemble, ton costume te va super bien aussi. » Cette soirée est spéciale et j’aimerais avoir un souvenir de cette soirée, de ce premier noël en famille. Je jette un coup d’œil à mon polaroïd qui traine sur le bureau, je viendrai le chercher un plus tard dans la soirée. Lorsque Jake mentionne l’arrivée imminente d’Albane je lui dis que ça tombe bien puisque je suis prêt, je n’ai qu’à ajouter une touche de parfum et le tour sera joué. Il me demande comment je me sens et j’apprécie qu’il fasse autant attention à ma santé mentale. Les deux derniers mois ont été éprouvants et je sais que mon état d’esprit peut être pesant et difficile à supporter. Alors je lui suis reconnaissant de prendre soin de moi, de ne pas me juger et de me laisser le temps dont j’ai besoin pour me reconstruire. Je lui réponds honnêtement sur mes inquiétudes vis-à-vis de la journée de demain qui s’annonce éprouvante. « Ce que tu as fait ce soir-là ne représente pas l’homme que tu es. Une erreur ne vaut pas un jugement, selon moi. Et le fait qu’ils ne savent pas arrange la chose, reste toi-même, parle avec eux et profite de ce moment. Si tu veux rester ami avec Adriana, ne te range pas dans la case de celui qui doit se racheter mais de celui qui l’a déjà fait. » Je hoche la tête, il sait toujours trouver les mots et ça me rassure toujours autant d’entendre qu’il dissocie mes erreurs de qui je suis vraiment. Je sais qu’il a raison et que je dois rester moi-même mais j’ai du mal à appliquer ses conseils. J’ai toujours été anxieux vis-à-vis des autres, la peur du rejet, de blesser les autres ça a toujours été mon talon d’Achille. Alors je ferai au mieux pour avoir l’air normal mais au fond je ne pourrais pas m’empêcher de me dire qu’ils soupçonnent quelque chose ou qu’ils sont en colère contre moi, ce qui me blesserait énormément puisque j’apprécie beaucoup la famille d’Ade. « Non c’est vrai tu as raison, c’était pas moi, je vaux mieux que ça. Je vais essayer de rester moi-même mais je pense qu’avec Adriana ça prendra du temps pour qu’on redevienne comme avant. » Je hausse les épaules et je rajoute. « Enfin je sais pas si on y arrivera, ça sera forcément différent mais on verra bien. » On verra ça demain, avant ça j’ai envie de profiter de cette soirée et d’essayer de me concentrer sur de bons moments plutôt que de m’enfermer à nouveau dans des pensées négatives qui me pourrissent déjà la vie depuis deux mois. « Et pour ta mère, je te souhaite bon courage. J’espère qu’elle sera dans l’un de ses bons jours, ce serait un merveilleux cadeau pour ton frère et toi. » J’esquisse un petit sourire, il y a toujours de l’espoir. « On croise les doigts, ce serait un beau cadeau oui. » Et quelqu’un sonne, Albane est arrivée et je suis impatient de la revoir. Jake s’avance et je lui emboite le pas pour aller accueillir Albane. Elle est chargée et son enthousiasme est communicatif. Je la salue avec une étreinte, le chat rejoint la petite réunion et je me dis que c’est bon on est au complet maintenant. Elle nous remercie de l’avoir invitée pour ce réveillon si spécial pour nous deux. Jake me regarde et je lui souris. « Il est encore plus spécial si tu es avec nous. Pas besoin de nous remercier, juste de profiter. Je ne veux pas que tu penses être incrustée ici, t’as autant ta place que nous deux. » Et je partage tout à fait son point de vue. J’aime beaucoup Albane que j’ai pu découvrir chez Dani pendant la soirée dégustation et lors de ses nombreuses visites chez Jake. « Oui ça nous fait plaisir de te voir. » Le four sonne et nous interrompt, le repas est prêt et il s’annonce délicieux. « J’espère que vous avez faim, tous les deux ! » C’est un repas gargantuesque qui nous attend, à en croire la quantité que Jake a préparé on pourrait croire que l’on attend un régiment. Mais je ne suis pas mécontent puisque tout a l’air très bon et il y a mis de temps et d’énergie. « Je meurs de faim ! Ca sent tellement bon » Je regarde Albane et je lui dis. « Et ta bûche a l’air réussie aussi. » Jake m’a parlé des talents culinaires d’Albane encore au stade de l’expérimentation mais on voit bien qu’elle a fait de son mieux et c’est le principal. « Vous vous êtes surpassés tous les deux. Je me sens un peu nul d’avoir rien cuisiné mais bon c’est pas trop mon truc. » J’ai fini mon service en milieu d’après-midi je n’ai pas pu aider Jake autant que je l’aurais voulu et je n’avais ni le temps ni le talent de préparer quelque chose. J’ai jamais été le roi des fourneaux donc plutôt que de préparer un plat plus que moyen en vitesse je suis passé acheter une bouteille de champagne. Je fais un aller-retour rapide dans ma chambre et je ramène la bouteille que je leur présente. « Mais je suis passé prendre ça, je me suis dit que ce serait une bien pour fêter notre premier noël comme il se doit. » Parce que c’est un jour de fête, le premier d’une longue série qui s’annonce et que je suis heureux de passer la soirée avec deux personnes que j’apprécie énormément. « Je vous sers un verre ? » Et mon regard est furtivement attiré vers les paquets cadeaux qui sont disposés au pied du sapin, je suis curieux de les ouvrir mais surtout de pouvoir leur offrir mes cadeaux, il n’y a plus qu’à patienter encore un peu.

Venir chez Jake lui avait toujours donné l’impression d’une bouffée d’oxygène, et encore plus ce soir. Cela s’accompagnait évidemment de son éternelle peur de déranger, mais le visage des hommes suffisait à rendre son sourire plus sincère. Elle aurait sans doute passé un Noël bien plus déprimant s’ils n’avaient pas été là, et comptait bien en profiter plutôt que de laisser ses démons prendre le dessus. Difficile d’être négative avec un tel accueil, en tout cas, et une fois la bûche sécurisée et les cadeaux posés à leur place, la française était prête à leur accorder toute l’attention du monde. Ça lui faisait du bien de se sentir bien accueillie, à sa place. Alors qu’ils auraient eu toutes les raisons de vouloir profiter de ces premières fêtes entre père et fils, se créer le genre de souvenirs qu’ils n’avaient pas su avoir encore. « Mhh dites donc, vous n’auriez pas un lien de parenté vous deux ? » Elle les taquine face à leur bienveillance si similaire, le chat dans ses bras déjà occupé à manifester sa satisfaction d’un ronronnement bruyant. Mais quand bien même la blonde appréciait l’animal, le bruit du four réveilla son estomac qui se manifesta dans un gargouillis discret. « Je suis affamée aussi. » L’impatience de se mettre à table était palpable pour elle aussi, même si elle adressa une moue peu convaincue à Mel et son compliment sur la bûche. En théorie, elle avait l’air réussie. En pratique… « C’est gentil. Mais je nie toute responsabilité si aucun dessert de secours n’a été prévu. Jake, on compte sur toi ! » L’important, c’était de participer. Même si les mots restèrent coincés entre ses lèvres, Albane ne put que sourire au serveur et à sa soudaine culpabilité de ne pas en avoir fait assez. Le simple fait qu’il soit présent était probablement l’un de plus beaux cadeaux que Jake aurait pu avoir. Alors rien que pour cela, c’était amplement suffisant. De toute manière, ce n’était pas comme s’il n’avait pas participé car la bouteille de champagne qu’il vint leur présenter suffit à illuminer le regard de la jeune femme. Ça, c’était une chouette idée. « Je pense aussi qu’on a toutes les raisons du monde de célébrer, ce soir. » D’ailleurs, Jake aussi devait avoir prévu le coup à en juger par les flutes qui attendaient sagement sur la table du salon. Dans sa volonté de se rendre utile, Albane vint donc les prendre pour les ramener jusqu’à la table basse. Peu importe ce qui embaumait le four ne semblait pas être pour tout de suite, leur laissant le loisir de se mettre à l’aise autour de la table basse. « On devrait s’installer. » Chose dont elle ne se priva pas, malgré la contrariété du chat d’avoir perdu son spot sur le canapé. « Pour être honnête, c’est mon premier Noël australien. Je n’ai aucune idée de ce que vous faites différemment, à part peut-être mourir de chaud. » Chose qui la fait doucement de rire, tout comme la présence de bonhommes de neiges parmi les décorations du salon. Mauvais continent. Précautionneusement, elle tendit les verres à Melchior une fois la bouteille débouchée, l’observa avec un léger rire tenter de maîtriser la mousse folle qui s’en échappa. Puis les coupes furent servies, prêtes à trinquer avec les autres. « A nos rencontres, alors ? »

« Faudra qu’on fasse une photo ensemble, ton costume te va super bien aussi. » La première photo d’un père et de son fils, vingt-cinq ans après la naissance de ce dernier. Jake ne veut pas prendre le temps de réfléchir à la question, de peur de se perdre dans une culpabilité qu’il ne ressentait pas il y a encore quelques mois. « Avec plaisir. » Il répond plus vite qu’il ne pense, et ça lui fait du bien quand il n’y a que du positif qui en ressort. Il serait ravi d’avoir des photos à accrocher sur son frigo ou dans des albums qu’il n’ouvrira probablement jamais. Peu matérialiste, ce sont ces objets-là qui ont une grande valeur aux yeux de l’Australien. Il demande à son fils comment il se sent et celui-ci confie ses ressentis sur la journée à venir. Jake fait de son mieux pour le conseiller et l’aiguiller, même s’il ne peut pas avoir réponse à tout. « Non c’est vrai tu as raison, c’était pas moi, je vaux mieux que ça. Je vais essayer de rester moi-même mais je pense qu’avec Adriana ça prendra du temps pour qu’on redevienne comme avant. Enfin je sais pas si on y arrivera, ça sera forcément différent mais on verra bien. » Ils y arriveront, Jake n’en doute pas, lui. « Il m’aura fallu vingt-cinq ans pour avoir un fils, la patience est une vertu. » Avec du temps, tout arrive : c’est le message qu’il essaie de faire passer. Il lui dit également qu’il espère que sa mère sera apte à les recevoir quand lui et son frère iront la voir. « On croise les doigts, ce serait un beau cadeau oui. » Jake ne répond rien, il ouvre la porte à Albane qui se trouve derrière et la débarrasse de tout ce qu’elle a ramené. Qu’elle le pense ou non, elle emmène avec elle quelque chose de lumineux : ils étaient déjà bien, tous les deux. Ils sont encore mieux maintenant qu’elle est là. Jake ne tarde pas à le lui dire, Melchior surenchérit : « Oui ça nous fait plaisir de te voir. » « Mhh dites donc, vous n’auriez pas un lien de parenté vous deux ? » Jake hausse ses épaules, comme si elle soulevait un point qu’ils n’avaient encore jamais envisagé. « Dans la famille des bisounours, je te demande le père. » Il lève la main, tout content de sa blague, avant d’aller voir son four qui l’appelle. « Je meurs de faim ! Ça sent tellement bon. Et ta bûche a l’air réussie aussi. » Jake n’a pas pu s’empêcher de raconter à Melchior l’histoire du gâteau d’Albane. Finalement, celui aux pommes était excellent. Comme quoi, l’idée qu’elle ne doive cuisiner que sous sa supervision se tient. « Je suis affamée aussi. C’est gentil. Mais je nie toute responsabilité si aucun dessert de secours n’a été prévu. Jake, on compte sur toi ! » La bûche sera très bonne, il essaie de ne pas en douter. « Au pire, j’ai des chocolats pour tout un régiment. » Il n’arrive jamais à passer au-delà des promotions de Noël et se retrouve toujours avec un caddie plein de sucreries. En général, ils finissent sur les bureaux des membres de l’hôpital ou offerts à des personnes que Jake rencontre fréquemment, comme son facteur. Il vit dans un univers alternatif, dans un téléfilm de Noël, que personne ne cherche à l’embêter là-dessus. Pour une fois – et même si la bûche n’est pas ratée – les paquets vont être ouverts. « Vous vous êtes surpassés tous les deux. Je me sens un peu nul d’avoir rien cuisiné mais bon c’est pas trop mon truc. » Melchior les abandonne une seconde le temps d’aller récupérer quelque chose dans sa chambre. « Mais je suis passé prendre ça, je me suis dit que ce serait une bien pour fêter notre premier Noël comme il se doit. Je vous sers un verre ? » « Je pense aussi qu’on a toutes les raisons du monde de célébrer, ce soir. » Jake abandonne sa dinde, presque cuite, pour les rejoindre derrière le comptoir. « On devrait s’installer. » Et ce qu’elle dit, elle le fait. Jake vient s’installer à ses côtés et laisse à son fils la joie d’ouvrir la bouteille. « Pour être honnête, c’est mon premier Noël australien. Je n’ai aucune idée de ce que vous faites différemment, à part peut-être mourir de chaud. » Les verres pleins, Jake prend le sien pour trinquer avec Albane et Melchior. « A nos rencontres, alors ? » « A nos rencontres. » De trinquer ainsi, ça lui va pleinement. Il boit une gorgée du champagne et se lève pour aller récupérer les premiers toasts, histoire qu’ils aient déjà de quoi manger sur la table basse. « Faites gaffe au saumon, le chat est un petit chenapan. » Il a l’habitude de venir le piquer en douce et de s’enfuir à toute vitesse – environ un centimètre à l’heure, pour le point le plus élevé. « Et sinon… Je me suis éduqué tout seul aux téléfilms de Noël, j’ai l’impression de ne pas vivre ici quand on est en décembre. Je vois de la neige partout même si je fonds au soleil moi-même. » Il hausse ses épaules. « Mais dis-nous ce que vous faites, en France, et on te dira si on refait la même chose ici ou non. » En règle générale, mis à part la température, il n’y a pas une très grande différence entre les Noël de l’hémisphère sud et ceux de l’hémisphère nord. « J’avoue que ça me plairait bien d’avoir un vrai Noël blanc, un de ces jours. J’ai souvent pensé à partir le célébrer ailleurs mais je n’en ai jamais eu l’occasion, finalement. Il faudrait peut-être que je me le note en résolution pour l’année prochaine. » S’organiser un voyage en décembre, en tant que soignant, ça n’a jamais été envisageable ou envisagé par Jake. Il pourra le faire et accuser la crise de la cinquantaine, au pire.

@Albane Dumas @Melchior Nicholls

Je parle de ma relation avec Adriana qui est au point mort depuis plusieurs semaines. J’essaie de me montrer un peu optimiste même si au fond je doute que tout puisse redevenir comme avant. Tout simplement parce que c’est peut-être impossible et qu’il y aura un avant et un après. « Il m’aura fallu vingt-cinq ans pour avoir un fils, la patience est une vertu. » Je souris et je hoche la tête, il marque un point, rien n’est jamais perdu et il y a toujours une forme d’espoir tant qu’il y a de l’amour. Je lui parle un peu de Maman et j’espère qu’elle sera dans un bon jour pour que Noël soit un peu moins difficile à passer sans elle à ma table. Albane arrive et nous lui partageons notre enthousiasme. « Mhh dites donc, vous n’auriez pas un lien de parenté vous deux ? » Je regarde Jake qui hausse les épaules et ça me fait rire parce qu’elle a raison on se ressemble beaucoup. Au-delà de notre lien de parenté nous avons des caractères similaires et la colocation se passe plus que bien. Je n’aurais pas pu rêver mieux comme père. Je m’étais toujours demandé si je ressemblais à mon père et aujourd’hui je peux affirmer que c’est le cas. « Dans la famille des bisounours, je te demande le père. » Il retourne dans la cuisine et l’air amusé j’ajoute. « Et le fils ! » Je complimente Albane sur sa bûche puisque d’après ce que Jake m’a dit Albane n’est pas la reine des fourneaux. « Je suis affamée aussi. C’est gentil. Mais je nie toute responsabilité si aucun dessert de secours n’a été prévu. Jake, on compte sur toi ! » « Au pire, j’ai des chocolats pour tout un régiment. » Et il ne plaisante pas, Jake et le chocolat c’est une grande histoire d’amour. Je suis toujours surpris de la vitesse à laquelle les boites se vident avec lui, mais il a bien raison et je ne vois pas pourquoi il devrait s’en priver. Je vais chercher la bouteille de champagne puisque mes talents en cuisine ne sont pas meilleurs que ceux d’Albane. « Je pense aussi qu’on a toutes les raisons du monde de célébrer, ce soir. » « Oh oui. » Ce réveillon s’annonce parfait, ça méritait bien un peu de champagne. Jake nous rejoint derrière le comptoir et j’en profite pour ouvrir la bouteille. Le bouchon saute avec un joli bruit et j’attrape des flutes pour servir Albane et Jake. « Pour être honnête, c’est mon premier Noël australien. Je n’ai aucune idée de ce que vous faites différemment, à part peut-être mourir de chaud. » Et c’est un premier noël pour nous aussi alors personne n’est au courant des traditions des autres. C’est peut-être l’occasion d’en créer de nouvelles tous les trois. « C’est une première pour nous aussi alors je pense que c’est une découverte pour tous les trois ce soir. » Jake attrape son verre et je fais de même. « A nos rencontres, alors ? » « A nos rencontres. » « A nos rencontres oui ! » Et nous trinquons. Je goûte le champagne et il n’est pas mal du tout. Je n’ai jamais été un grand fan des boissons avec des bulles mais le champagne ça a toujours été une exception. « Faites gaffe au saumon, le chat est un petit chenapan. » J’ai pu observer les talents du chat, il est d’une rapidité et d’une discrétion redoutable. « T’en fais pas je commence à avoir l’habitude, je le surveille. » Je me souviens de la fois où j’avais laissé mon assiette pleine quelques instants pour aller chercher quelque chose dans ma chambre, à mon retour mon assiette était vide et le coupable était reparti se coucher. « Et sinon… Je me suis éduqué tout seul aux téléfilms de Noël, j’ai l’impression de ne pas vivre ici quand on est en décembre. Je vois de la neige partout même si je fonds au soleil moi-même. » Il a raison il fait bien trop chaud et la veste que Jake m’a prêtée est de trop, je meurs déjà de chaud. « On est pas prêts de voir de la neige pour noël ici. » Je décide de l’enlever, je la remettrai peut-être quand nous prendrons des photos mais là avec la chaleur du four et bientôt celle du champagne c’est intenable. « Mais dis-nous ce que vous faites, en France, et on te dira si on refait la même chose ici ou non. » C’est une excellente question, j’avoue que je ne connais rien à la France, ce sera l’occasion d’en apprendre plus sur ce pays. « J’avoue que ça me plairait bien d’avoir un vrai Noël blanc, un de ces jours. J’ai souvent pensé à partir le célébrer ailleurs mais je n’en ai jamais eu l’occasion, finalement. Il faudrait peut-être que je me le note en résolution pour l’année prochaine. » Je hoche la tête, je rêverai de passer un noël sous la neige et ça me donne des idées ce qu’il dit. Ce serait chouette de partir ensemble l’année prochaine pour fêter noël sous la neige. Je n’ai jamais eu l’occasion de quitter l’Australie mais j’ai envie de découvrir quelque chose de nouveau. Nos premières vacances en famille, je me garde l’idée dans un coin de la tête pour plus tard. « J’avoue que j’arrive pas à imaginer de la neige pour noël. T’as déjà eu de la neige pour noël toi ? »

Les deux hommes lui donnaient l’impression d’avoir mis les pieds dans un cocon de douceur. C’était la première fois qu’elle les voyait ensemble et ne pouvait qu’admirer la dynamique entre eux, la façon qu’ils avaient de se comporter comme s’ils se connaissaient depuis toujours. Elle se sentait à l’aise ici, rassurée de voir que sa présence ne changeait rien à l’esprit de Noël qui planait au-dessus de leurs têtes. Pour le moment, tout était parfait. Elle ne savait pas du tout comment cela se finirait, si elle serait par exemple la cause d’une intoxication alimentaire avec sa bûche, ou si les chocolats les mèneraient droit à la crise de foie. Un risque qu’elle préférait occulter pour l’instant, trop concentrée sur l’humeur festive autour de la table. Presque aussi pétillante que les bulles du champagne dans leurs flûtes. Son regard gourmand se retrouva à lorgner sur l’apéritif qui était disposé sur la table. Pile au moment où Jake les prévint pour le chat et la forte probabilité qu’il tente de chaparder quelque chose. « S’il tente quoique ce soit, je le prends sur mes genoux et il est emprisonné pour la soirée. » Comme un gosse qu’on punirait. Ce pauvre animal n’était pas assez sauvage pour se débattre et la haïrait probablement, mais elle avait cette manie de vouloir le garder avec elle dès qu’elle venait ici. Ce serait le parfait prétexte. En attendant, il fallait bien admettre que s’il n’y avait pas un sapin dans le salon et des décorations un peu partout, avec ces températures, il serait assez compliqué pour la jeune femme de réaliser qu’ils étaient bien à Noël. « Je ne crois pas avoir déjà vu un film de Noël australien… Mais la simple perspective de faire un barbecue sous 40° avant de passer aux cadeaux me sidère toujours autant. » L’hiver à Noël lui manquait, à ce moment-là, et elle eut une moue contrariée en direction de Mel. « Je vais monter un comité pour la défense de bonhommes de neige dans les décorations de Noël en Australie. » Quoiqu’il fallait admettre que cela avait eu le mérite de la faire sourire plus d’une fois, tant cela manquait de logique. « Je suppose que nos traditions sont assez similaires. On fait un énorme repas avec des fruits de mer, un chapon ou une dinde, du fromage, et la fameuse bûche de Noël. On ouvre généralement les cadeaux à minuit… ah, et on accroche des chaussettes à la cheminée qu’on remplit de chocolats. » Bane s’en sentait presque nostalgique, à repenser à tous ces souvenirs de Noël, à toutes les fois où Blanche et elles avaient essayé de trouver des raccourcis pour ouvrir les cadeaux plus tôt ou pour manger des chocolats avant le repas. Ça paraissait tellement lointain aujourd’hui. « On a eu de la neige certaines années, oui. On devrait aller à la neige pour Noël l’année prochaine. Ce serait si chouette. » Elle se sentait comme une gosse à l’idée de se retrouver dans un chalet avec ces humains en particulier, bercés par un tapis de neige blanc. « Et vous ? Des traditions locales ? »

La nourriture disposée sur la table attire autant l’œil des humains que celui du chat, c’est pourquoi Jake leur demande de faire attention. Il a l’habitude de son animal, lui, et ne serait pas contre l’idée de lui laisser dérober quelques toasts, mais il paraît que ça ne se fait pas trop. « T’en fais pas je commence à avoir l’habitude, je le surveille. » Melchior vit ici depuis quelques longues semaines, maintenant, et c’est vrai qu’un lien entre le chat et lui s’est rapidement tissé. « S’il tente quoique ce soit, je le prends sur mes genoux et il est emprisonné pour la soirée. » Cette remarque fait rire Jake, qui connaît bien trop l’amour d’Albane pour ce chat pour la prendre au sérieux. « Tu te ferais un cadeau à toi-même. Je vois clair dans ton jeu. » L’animal serait probablement contrarié de ne pas pouvoir atteindre le saumon mais malgré tout heureux d’avoir des câlins. Une punition agréable, en vérité. Albane venant de France et les deux hommes d’ici, c’est le moment pour eux de comparer les traditions autour de Noël. La grosse différence, ce sont déjà les saisons qui ne sont pas les mêmes entre les deux pays. « J’avoue que j’arrive pas à imaginer de la neige pour Noël. T’as déjà eu de la neige pour Noël toi ? » C’est à Albane qu’il le demande. En France, il y a des régions où il neige et d’autres où il ne fait qu’un peu froid. Comme quoi, tous les français ne peuvent pas non plus se vanter d’un Noël blanc. « Je ne crois pas avoir vu un film de Noël australien… Mais la simple perspective de faire un barbecue sous 40° avant de passer aux cadeaux me sidère toujours autant. » « C’est juste une autre manière de cuire la dinde. » Il le dit en haussant ses épaules, comme s’il ne s’agissait qu’un détail. Evidemment qu’il rigole, il se rend bien compte que l’ambiance ne doit pas du tout être la même. « Je vais monter un comité pour la défense de bonhommes de neige dans les décorations de Noël en Australie. » C’est vrai que ça n’a absolument aucune logique. « Ils doivent tous avoir le même pouvoir qu’Olaf. Comme quoi, il n’est pas si unique. » Ne lui demandez pas combien de fois il a vu la reine des neiges, ce serait un peu trop gênant d’avouer ce nombre. « Je suppose que nos traditions sont assez similaires. On fait un énorme repas avec des fruits de mer, un chapon ou une dinde, du fromage, et la fameuse bûche de Noël. On ouvre généralement les cadeaux à minuit… ah, et on accroche des chaussettes à la cheminée qu’on remplit de chocolats. » Ce qu’elle décrit est la parfaite description de tous les films qu’il a pu voir. Ils ont l’air d’avoir les mêmes traditions, que ce soit en France ou en Amérique. « On a eu de la neige certaines années, oui. On devrait aller à la neige pour Noël l’année prochaine. Ce serait si chouette. » Choisir une destination, s’y rendre et profiter. C’est quelque chose qui peut se faire, oui, selon Jake. « Et vous ? Des traditions locales ? » Il cherche au fond de sa mémoire. Il y en a évidemment, mais pas énormément. « Il y a des concours de surf en étant déguisé en père Noël, quand les fêtes approchent. Je ne sais pas si c’est réellement une tradition d’ici. Enfin, je pense. Ça m’étonnerait qu’ils fassent ça en France s’il fait froid à ce point. » C’est toujours rigolo de les voir affronter les vagues en étant déguisés comme lui. « Et aussi… Je sais que certaines personnes qui emménagent en Australie après avoir été dans un pays de l’hémisphère nord ne supportent pas d’avoir un Noël en été. Du coup, ils reportent. Il y a toute une communauté dans le coin qui fête Noël en juillet. Tu as des restaurants qui font des menus spéciaux, des hôtels qui se transforment en chalets et toutes ces choses-là… Si vous voulez un Noël blanc sans quitter l’Australie, on peut voir ça dans quelques mois. » Il le dit tant à Albane qu'à Melchior, ça. Et ça peut être amusant de fêter noël deux fois dans la même année, en plus.

@Albane Dumas  @Melchior Nicholls

« S’il tente quoique ce soit, je le prends sur mes genoux et il est emprisonné pour la soirée. » Une prison très agréable. « Tu te ferais un cadeau à toi-même. Je vois clair dans ton jeu. » . Le chat comme Jake l’a si habilement nommé est une vraie boule d’amour et moi qui n’ai jamais eu d’animaux de compagnie je l’ai adopté et je crois qu’il m’a adopté aussi. J’aime voir son regard curieux quand il me voit répéter ou juste quand il vient ronronner contre moi quand je suis sur le canapé avec mes écouteurs et mon vieil Ipod.  « Je veux bien me sacrifier aussi si besoin. » Nous trinquons et Jake souligne le décalage qu’il existe entre les représentations de noël qu’on voit à la télévision et le temps radieux que l’on a chaque noël à Brisbane. « Je ne crois pas avoir vu un film de Noël australien… Mais la simple perspective de faire un barbecue sous 40° avant de passer aux cadeaux me sidère toujours autant. » Et j’aimerais bien voir un film de Noël australien. C’est un peu pénible de voir toujours les mêmes intrigues fades : une mère célibataire qui rencontre un jeune homme lui aussi au cœur brisé qui s’avouent leurs sentiments après que la neige se mette à tomber. « C’est juste une autre manière de cuire la dinde. » Je souris à la réponse de Jake c’est vrai que ça doit être plutôt bizarre pour elle de voir un Noël aussi différent, un choc culturel que j’ai du mal à imaginer. Les plaisanteries s’enchaînent et ça me réchauffe le cœur, je sens qu’on passera une très bonne soirée. Jake interroge Albane sur les traditions de Noël françaises et je dois avouer que je suis curieux de savoir aussi. Je n’ai jamais quitté l’Australie alors imaginer l’Europe c’est pas évident pour moi. « Je suppose que nos traditions sont assez similaires. On fait un énorme repas avec des fruits de mer, un chapon ou une dinde, du fromage, et la fameuse bûche de Noël. On ouvre généralement les cadeaux à minuit… ah, et on accroche des chaussettes à la cheminée qu’on remplit de chocolats.” Je hoche la tête, effectivement c’est assez similaire. La grande question arrive ensuite : a-t-elle déjà vécu un Noël blanc comme tous les téléfilms de Noël veulent nous le faire croire ? « On a eu de la neige certaines années, oui. On devrait aller à la neige pour Noël l’année prochaine. Ce serait si chouette. » Aller à la neige, le genre de vacances difficiles à envisager ici, la neige est bien trop rare à Brisbane. « Ca fait rêver ce genre de vacances. » Il faudra que je pense à voyager quand j’aurais mis un peu d’argent de côté, j’aimerais découvrir de nouveaux pays et voir Noël sous la neige c’est le genre de trucs qui pourrait être dans ma bucket list . « Et vous ? Des traditions locales ? » « Il y a des concours de surf en étant déguisé en père Noël, quand les fêtes approchent. Je ne sais pas si c’est réellement une tradition d’ici. Enfin, je pense. Ça m’étonnerait qu’ils fassent ça en France s’il fait froid à ce point. » Je n’ose même pas imaginer des surfers dans de l’eau glacée. « J’espère pour eux qu’ils ne font pas ça non. » Ce serait le meilleur moyen de transformer le père Noël en bonhomme de neige glacé. « Et aussi… Je sais que certaines personnes qui emménagent en Australie après avoir été dans un pays de l’hémisphère nord ne supportent pas d’avoir un Noël en été. Du coup, ils reportent. Il y a toute une communauté dans le coin qui fête Noël en juillet. Tu as des restaurants qui font des menus spéciaux, des hôtels qui se transforment en chalets et toutes ces choses-là… Si vous voulez un Noël blanc sans quitter l’Australie, on peut voir ça dans quelques mois. » Il n’a pas tort, je me souviens j’avais des amis qui faisaient ça mais ça n’a jamais été notre truc, Noël est en décembre un point c’est tout. Je mets à réfléchir aux traditions de notre famille parce que je sais que même s’il existe des traditions générales il y a toujours des petites choses qui changent. “C’est pas vraiment une tradition locale mais plutôt une tradition de famille. Avec mon frère et ma mère on ouvrait toujours les cadeaux avant le repas. Parce qu’on était très peu patients et je pense que ma mère en a eu assez de nous surprendre en train d’essayer d’ouvrir les cadeaux en douce ou d’être intenables.” Matthew a toujours été extrêmement curieux et il m’entrainait toujours dans ses bêtises. Au fur et à mesure des années nous avons appris à déjouer les stratagèmes ingénieux que ma mère mettait en place pour cacher les cadeaux ou nous empêcher de les ouvrir avant minuit. Elle a toujours échoué parce que si elle était inventive, deux gamins curieux parviennent toujours à leurs fins. C’était devenu comme un jeu entre nous, ça l’amusait plus que ça ne l’agaçait et en grandissant c’est devenu la tradition : les cadeaux avant le repas. “Je sais pas si ça vous dit ou si vous préférez attendre un petit peu ? » Mon regard se pose sur les cadeaux au pied du sapin et j’ai hâte qu’ils les ouvrent. « Alors Albane, c’est pour toi et Jake c’est celui-là. » Un kit à pâtisserie pour Albane et pour Jake un cadeau un peu différent. Ce n’est pas quelque chose que j’ai acheté dans un magasin mais plutôt quelque chose qui me tient à cœur et qui je pense lui fera plaisir. C’est un album photo. J’ai récupéré tout un tas de photos de mon enfance chez ma mère et j’en ai fait un album. Un moyen pour lui de pouvoir rattraper un petit peu le temps perdu. S’il n’était pas là pour mes premiers pas ni mes premiers mots là au moins il pourra avoir un aperçu de tous ces moments. Je me fiche pas mal qu’il débarque dans ma vie au bout de 25 ans, il est là et c’est le principal. « Bon c’est pas grand-chose mais j’espère que ça vous fera plaisir. »