| (aleddie #2) my heart is a haunted house |
| | (#)Mar 28 Déc 2021 - 19:31 | |
| We walked through the darkness, we walked in the sun We shared all our sorrows, we shared all our love You fell like an angel to me and you broke your wings Now you are a ghost from the past
Si Eddie fait le déplacement jusqu’à la maison de ses parents cet après-midi-là c’est pour la bonne cause, et pas autre chose. En temps normal ils n’ont déjà pas beaucoup de choses à se dire mais depuis son opération il sent bien que le fossé entre sa mère et lui s’est encore un peu plus creusé, en cause ses mensonges qu’elle ne lui a de toute évidence pas pardonné. Il est pourtant allé au front à sa place en intervenant dans le conflit avec une insupportable voisine quand elle le lui a demandé mais Sun-Hi a dû considérer que ce n’était pas assez, ou disons plutôt qu’elle était bien contente de le trouver ce jour-là pour ne pas avoir à gérer elle-même ses problèmes de voisinage. Il retient Eddie, les efforts qu’il peut faire personne n’en a rien à secouer et il faut croire qu’il paiera toute sa vie pour le fait d’avoir dissimulé une malheureuse blessure. Son erreur a été d’attendre le tout dernier moment pour en parler, littéralement trois jours avant de passer sur le billard, mais il ne voit pas l’intérêt de rester éternellement bloquée dessus alors qu’il perçoit le bout de sa convalescence et que son genou semble en passe de se remettre totalement. Si sa mère a prévu de lui faire la tête à vie pour ça c’est qu’elle doit être à cours de reproches à lui faire, or elle n’en a jamais manqué jusqu’ici. Eddie pourrait énumérer tout ce que ses parents ont l’habitude de pointer du doigt chez lui mais la liste serait longue, on y retrouverait ses ambitions qui n’ont jamais correspondu à leurs attentes, ses choix amoureux au sujet desquels ils ont longtemps trouvé à redire ou bien encore ses changements capillaires jamais à leur goût puisque même pour ça il doit régulièrement rendre des comptes. Alors forcément en sollicitant sa mère aujourd’hui pour une collecte de jouets Eddie ne s’attend pas à ce qu’elle accepte de lui prêter main forte mais Sun-Hi se montre bel et bien coopérative, sûrement touchée par l’initiative d’offrir une seconde vie à des jouets qui reviendront à des enfants dans le besoin. À deux ils parviennent à mettre la main sur quelques trésors parmi lesquels le camion de pompier de ses premières années, retrouvé en parfait état et d’anciennes peluches de bébé Callie que la Callie adulte ne devrait pas trop regretter. Eddie n’est pas mécontent de se dire qu’ils finiront entre les mains de jeunes défavorisés et qu’avec un geste tout simple il contribuera à illuminer leur Noël, c’est même plutôt bon pour sa conscience. Les enfants sont un peu plus sa tasse de thé depuis ses missions à l'hôpital et puis il n’est pas sans cœur, ces jouets seront bien mieux à leurs côtés qu’à prendre la poussière dans un grenier entre deux toiles d’araignée. Ce sont deux de ses voisins qui parlaient de cette collecte l’autre jour à la sortie de l’ascenseur et ces temps-ci Eddie ne crache sur aucun moyen de se rendre utile. Il a déjà profité de sa mise au repos pour entreprendre du bénévolat auprès d’animaux dans un refuge, comme quoi il ne devait pas blaguer le jour où il a prétendu mettre ces mois de pause à profit pour devenir une meilleure version de lui-même. Il y a du bon à se regarder un peu moins le nombril, c’est probablement l’une des morales qu’il pourra tirer au terme de tout ça et maintenant il ne lui reste plus qu’à s’assurer que ces jouets finiront bien sous le sapin des petites âmes qui en rêvent.
Avec son camion de pompier sous un bras et ses peluches dans un sac tenu par le second Eddie est pour le moins chargé lorsqu’il rejoint le cœur de Brisbane, où les festivités de Noël semblent avoir réuni beaucoup de monde en ce début de soirée. Il y est accueilli par de délicieuses senteurs mais son premier réflexe est de poser tout ce qui l’encombre à ses pieds pour capturer l’immense sapin trônant tout près de là, une photo qu’il envoie aussitôt à Halston car l’américaine occupe ses pensées à défaut d’être à ses côtés. Eddie n’a pas prévu de s’éterniser bien longtemps par ici, il n’a pas vraiment le cœur à fêter quoi que ce soit en ce moment même s’il doit bien reconnaitre que la ville a encore fait très fort niveau décorations cette année. Il en prend plein les yeux mais n’oublie pas sa mission du jour, le danseur se met donc à la recherche du fameux point de collecte dont ses voisins avaient parlé et il repère une boite à quelques mètres de là qui pourrait bien remplir ce rôle. Elle se trouve à côté d’un restaurant et un écriteau sur la devanture de celui-ci annonce une remise sur une crêpe pour chaque jouet déposé, une offre mise en place pour inciter aux dons qu'Eddie découvre seulement maintenant et on ne pourra au moins pas lui reprocher de s’être laissé influencer par gourmandise. Il dispose dans un premier temps les souvenirs de son enfance dans la boite puis se demande s’il va céder à la tentation d’une crêpe, lui qui s’est beaucoup privé ces derniers mois afin d'éviter des excès que son corps n’aurait pas pu compenser par la danse. Sauf que sa reprise est proche à présent, ce n’est plus que l’affaire de quelques semaines alors Eddie tranche rapidement avec lui-même et estime qu’une crêpe ne fera possiblement pas trop de dégâts, sans parler de cette petite remise qui ne se refuse tout simplement pas. Il entend encore Michaela lui dire de se faire un peu plaisir et pour une fois il va l'écouter, au moment de passer commande il se lâche même complètement en optant pour une base pâte à tartiner avec supplément chantilly. Ce n’est pas raisonnable mais il s’en souciera demain, il a fait sa bonne action du jour alors voilà sa récompense. Eddie ressort avec sa crêpe copieusement garnie dans une main et s’accorde quelques instants avant d’y toucher puisqu'elle lui brûle les doigts, et c’est en se faufilant à travers les passants qu’une silhouette retient son attention parmi la foule, une vision qui lui provoque un long frisson. Il jurerait reconnaitre la posture et les vêtements de cette brune qui lui tourne le dos, un nom lui vient même comme un flash et sans tellement savoir pourquoi Eddie s’avance vers elle comme pour vérifier que sa mémoire ne lui fait pas défaut. « Alexis ? » il laisse entendre d’une voix plutôt assurée car il ne pense pas se tromper, mais le temps parait s’arrêter les secondes d’après quand la brune se retourne pour lui faire face et que le regard azur d’Alexis rencontre le sien pour la première fois depuis bien longtemps. Eddie en perd d’abord ses mots, il savait qu’il avait des chances de la revoir un jour parce qu’il était peu probable qu’Alexis ait pu quitter la ville mais c’est une chose de s’y attendre et une autre de le vivre. « Je te reconnais encore de dos. » il souffle après plusieurs longues secondes de blanc durant lesquelles il n’a pas réussi à décrocher ses yeux des siens. Certaines choses ne changeront jamais, Alexis reste parfaitement reconnaissable pour lui parce qu’il était bien trop familier avec ce corps autrefois pour ne pas en discerner le moindre contour, encore aujourd’hui. La revoir fait ressurgir beaucoup de choses, leur rupture d’il y a quatre ans lui revient brutalement en mémoire et ce n’est pas une époque qu’Eddie se remémore avec joie. Il en a bien plus souffert qu’il n’osera jamais l’avouer et il lui en a voulu, après coup, de l’avoir laissé ce soir-là et les années qui ont suivi avec des sentiments difficiles à éteindre. « Tu as l'air en forme. » Elle a en tout cas meilleure mine que la dernière fois qu’ils se sont vus, mais ça Eddie le garde pour lui. « Et tu fumes toujours. » il complète alors qu’il ne peut pas prétendre être tellement surpris. C’est une mauvaise habitude qu’elle a gardé du temps où ils étaient ensemble tout comme lui a gardé les siennes, en témoigne son genou opéré récemment trahissant un rapport à la danse toujours aussi chaotique. Eddie n’a plus de béquille mais il boite encore un peu et son équilibre n'est plus ce qu'il était, ce qu’elle remarquera peut-être, et dans tout ça il n’a toujours pas touché à sa crêpe alors que la chantilly commence à lui couler sur les doigts.
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| | | | (#)Mer 29 Déc 2021 - 15:21 | |
| Cette journée va être longue. Tu le sens déjà, et tu soupires. Déjà, tu as passé la matinée à épousseter tout ce qui pouvait être épousseté, tu as aspiré tout ce qui pouvait être aspiré, et enfin, tu as fait subir la serpillère à ton sol de studio. L’avantage d’avoir une petite surface, c’est que le ménage est effectué plus rapidement. Pas besoin d’y passer des heures. La raison pour laquelle tu as gâché (oui, gâché) ta matinée entière à nettoyer ton studio, c’est ta fâcheuse habitude à faire des pauses d’une heure pour un travail de cinq minutes. Tu n’es pas aussi fainéante sur ton lieu de travail, fort heureusement, mais lorsqu’il s’agit d’une tâche aussi barbante que le ménage, autant dire que tu es une flemmarde. Flemmarde, et tu l’assumes. De toute façon, la manière dont tu nettoies ton habitation, ça ne regarde que toi, non ? Tu soupires à nouveau d’agacement alors que ton regard se pose sur la pile de jouets que tu as retrouvé en retournant sens dessus-dessous ton studio. Tu as sorti les jouets des vieux cartons poussiéreux où ils se trouvaient pour les libérer, les laisser quelque peu… respirer. Ce sont de purs jouets d’enfant, dont tu n’auras certainement plus jamais l’utilité. Pourquoi les as-tu pris avec toi lors de ton déménagement, d’ailleurs ? Sûrement par nostalgie. C’est la seule explication. Tout ça pour dire que tu as entendu parler de l’énorme collecte de jouets organisée par la ville, et que tu comptes y aller aujourd’hui. L’idée te fatigue en elle-même, alors tu sors une cigarette de ton paquet sur ta table basse et t’assois sur ton canapé avant de l’allumer avec le briquet que tu as dans la poche. Besoin d’une pause.
Besoin de retarder la sortie.
La sortie qui est imminente, parce qu’autant tu n’as pas envie de décoller, autant il va falloir que tu te rendes à cette collecte de jouets aujourd’hui. Tu passes ta langue sur tes lèvres après avoir exhalé ce qu’il restait de fumée en toi après la dernière taffe, histoire de les humidifier, et tu te relèves. Tu regardes par la fenêtre : le temps est clément aujourd’hui. Ce n’est pas pour te déplaire. Déjà que tu n’aimes pas sortir, si c’est pour qu’il pleuve en plus… ce n’est même pas la peine. Mais aujourd’hui ce n’est pas le cas. Aujourd’hui il fait beau et, force est d’avouer que c’est une parfaite journée pour se rendre à la collecte de jouets. De toute façon, tu te rassures en te disant que tu n’y passeras que cinq minutes, le temps de déposer ce que tu as à déposer, et peut-être de prendre une crêpe, parce qu’il parait qu’il y a un stand crêperie juste à côté de la collecte, selon le voisinage que tu as entendu parler l’autre jour. Il est temps d’y aller. Tu charges autant de jouets que possible dans un sac à dos, avant de ranger le reste dans deux sacs plastique que tu transportes l’un dans la main gauche, l’autre dans la main droite. Coup de chance, tout est rentré. Adroitement, tu attrapes tes clés qui sont sur la table basse comme d’habitude -histoire que tu les aies toujours à l’œil- et sors de ton studio, avant de refermer la porte derrière toi à double tour.
[…]
L’ambiance est beaucoup trop bondée à ton goût. Brisbane est en fête, c’est bien normal puisque les fêtes approchent à grand, grand pas mais pour autant, ça te parait injuste. Toi, tu vas sûrement aller dans l’épicerie asiatique du coin, près de ton studio, pour ramasser de quoi faire des ramen parce que tu ne t’en fais pas souvent et que tu adores ça. Mais c’est tout. Tu seras seule, pour les fêtes cette année, comme souvent à vrai dire. Ta mère travaille comme une dingue et tu ne peux pas lui en vouloir. Elle fait de son mieux. Tu es même plutôt admirative d’elle, mais tu dois bien avouer qu’elle va te manquer pour Noël. Voilà que tu déprimes en plein milieu des rues festives de Brisbane. Tu veux en finir au plus vite avec cette corvée et revenir rapidement à ton studio pour arrêter de penser et peindre, peindre jusqu’à tomber d’épuisement. C’est ainsi que tu arrives rapidement à l’endroit de la collecte de jouets et que tu déposes tout ce que tu as ramené devant les personnes qui s’occupent de tenir le stand. Loin de toi l’envie d’être désagréable, tu arrives tout de même à forcer des sourires -tu es en train de faire un don de jouets sûrement pour des enfants défavorisés- et à souhaiter de bonnes fêtes aux personnes qui t’accueillent. Une fois la bonne chose de faite, comme tu dirais, l’envie irrépressible de rentrer chez toi te titille et à la fois, l’odeur sucrée des crêpes fait appel à ta gourmandise. Tu fermes les yeux un instant et soupires avant de céder au petit plaisir d’une crêpe au sucre. Ce n’est pas le plus gourmand qu’ils proposent au stand, mais ça te suffira largement. Et puis, ce n’est qu’un détour avant de retourner à la maison. Tu as un échange avec le teneur du stand, commandes ta crêpe, la règles puis la réceptionne en souriant lorsqu’elle arrive. Tu te positionnes dans un coin non loin, là où il y a un peu moins de passants, pour manger ta crêpe. A vrai dire, tu ne la manges pas, tu l’engloutis. Sa chaleur et son goût sucré t’enveloppent dans un havre de paix temporaire, dans lequel tu te laisses emporter quelques instants avant d’allumer une cigarette pour digérer.
Seulement, il ne faut jamais baisser sa garde.
« Alexis ? » Tu reconnaitrais la voix entre mille, et pourtant tu refuses de le croire. Cette voix vient de bien trop loin, d’un passé piétiné par la force du dépit, pourtant elle t’atteint aujourd’hui. Alors que tu te retournes, c’est bien Eddie, Eddie Yang pour être plus précise, que tu aperçois. Ton premier réflexe est de baisser le bras pour que la cigarette soit moins visible, comme si tu venais de te faire prendre la main dans le sac. Qu’est-ce que tu cherches à prouver, au juste ? Ce n’est pas comme s’il allait te gronder. Ton visage est immobile alors que tu prononces sans enthousiasme le prénom de ton ex. « Eddie. » Tu as un mal de tête qui te taraude tout d’un coup, parce qu’il est là, parce que les passants sont là, parce qu’il te parle, ça fait beaucoup trop de stimuli pour ton pauvre cerveau sensible. Pourtant, tu tiens le coup. Tu as envie de fuir, mais tu ne le feras pas. « Je te reconnais encore de dos. » Qu’est-ce qu’il croit faire en disant ça ? Soudainement, tu remarques que sa présence t’agace au plus haut point et cette interaction que vous avez encore plus. Tu n’étais pas prête à lui parler aujourd’hui, tu n’avais pas signé pour une retrouvaille entre ex, bon sang ! Voilà ce qu’on gagne à vouloir être altruiste pour les enfants dans le besoin… Tu soupires et marmonnes une réponse clairement agressive qui n’est audible que pour toi, parce qu’elle se perd dans le brouhaha des rues de Brisbane avant de pouvoir arriver au niveau d’Eddie : « Tu veux une médaille, peut-être. » Que tu le veuilles ou non, ça t’affecte beaucoup de le croiser ici aujourd’hui. Cela faisait longtemps, très longtemps que vous ne vous étiez pas vus… et c’était pour le mieux. Alors pourquoi il a fallu que le destin vous réunisse juste avant Noël en plein milieu des rues beaucoup trop bruyantes pour toi ? « Tu as l'air en forme. » Pour un peu plus, tu exploserais de rire. En quoi as-tu l’air en forme, là tout de suite ? Tu es dépitée. A moins que… A moins que tu avais l’air encore pire il y a quatre ans. Ouais, en y réfléchissant, c’est plus que probable qu’il te compare à la Alexis d’il y a quatre ans, et que ça justifie cette remarque. Ce qu’il ne sait pas, c’est que tu souffres toujours ; seulement tu t’es habituée à la souffrance. « Comparé à il y a quatre ans, oui, peut-être… » C’est tout ce que tu trouves à lui répondre. Est-ce qu’entendre ta voix lui fait le même effet qu’à toi ? Tu as l’impression que ton passé est une immense piscine et qu’on vient de te forcer à plonger dedans. Maintenant t’es dans l’grand bain, devine comment on nage. A toi de tout faire pour pas te noyer. Décidément, tu es sur la défensive quant à cette retrouvaille avec Eddie. « Et tu fumes toujours. » Comment ça, baisser le bras au niveau de la hanche pour cacher la cigarette n’a pas marché ? Tu soupires en ne sachant pas deviner ce que ton ex veut dire avec cette phrase. Il ne montre pas vraiment d’émotion. Est-il déçu que tu fumes toujours, ou fait-il juste un simple constat ? Dans tous les cas, tu optes pour l’attitude fière. Tu jettes l’assiette en carton sur laquelle on t’avait donnée la crêpe dans une poubelle juste à côté, et reprends la clope au bec, tires une taffe et souris timidement à Eddie en lui soufflant la fumée presque au visage. « Pourquoi j’aurais arrêté ? » Prends ça. Tu fais la fière, mais en même temps, il va se rendre compte bien rapidement qu’au jeu de qui a la meilleure vie depuis la rupture, il gagne sûrement. Ton sourire s’étire légèrement alors que tu observes la chantilly de sa crêpe à lui, lui dégouliner entre les doigts. « Je crois que tu ferais mieux de vite manger cette crêpe avant qu’elle ne t’échappe. » C’est presque un petit rire qui s’enfuit de tes lèvres. Tu l’observes et le détailles et remarques qu’il a l’air aussi dérangé par ces retrouvailles forcées que toi. Choqué, en tout cas. Alors tu prends une autre taffe de ta cigarette, souffles cette fois la fumée en l’air et plonges ton regard dans le sien. « Tu sais, on n’est pas obligés de se parler plus que ça. Je veux dire, si on n’a pas envie… » Eddie a-t-il envie de s’attarder et prendre de tes nouvelles ? « On n’a pas à se forcer. » Toi, tu as clairement envie de passer ton chemin mais tu es aussi assez aimable s’il te fait part de son envie de discuter un peu. Et puis, let’s face it, tu es aussi curieuse de savoir ce qu’il est devenu, Eddie. |
| | | | (#)Lun 3 Jan 2022 - 19:07 | |
| We walked through the darkness, we walked in the sun We shared all our sorrows, we shared all our love You fell like an angel to me and you broke your wings Now you are a ghost from the past
Il ne s’est pas méfié, Eddie, en quittant cette crêperie car il aurait pu croiser absolument n’importe qui dans le coin, surtout à cette période de l’année où le tout Brisbane semble de sortie pour admirer les illuminations de Noël ou pour faire, comme lui, leur bonne action mensuelle. C’est avec l'esprit léger qu’il regagne l’extérieur, délesté de ses jouets et frappé par un grand soleil l’aveuglant un instant. Il prévoit déjà de rentrer après ça car prolonger sa visite des lieux ne lui dit rien sur le moment, c’est pourtant l'occasion pour lui de mettre un peu le nez dehors après être très peu sorti de son appartement ces derniers mois mais l’envie n’est pas trop là, alors une autre fois peut-être. Sa crêpe il compte la manger sur le chemin du retour mais aujourd’hui il n’a pas le plein contrôle de son destin, et s’apprête à le réaliser de la plus déstabilisante des manières. C’est qu’il est observateur Eddie, même lorsqu’il erre dans un endroit où il ne connait - a priori - personne ses yeux naviguent de visage en visage et de silhouette en silhouette, tracer sa route en regardant droit devant lui sans considérer une seconde les gens autour il faut croire qu’il ne sait pas trop faire. Et c’est cette habitude qui l’empêche de passer à côté d’une présence bien familière, qu’il n’aurait jamais cru détecter par ici. Sur l’instant Eddie pourrait croire à une hallucination ou à une illusion due au soleil qui lui barre la vue par moment, mais il est incapable de poursuivre son chemin et de laisser cette possible revenante là où il l’a vue, pas sans vérifier que ses sens ne le trompent pas. À mesure qu’il s’en approche le rythme de son cœur s’accélère parce qu’il sait qui il s’attend à voir lorsque cette personne se sera retournée, il n’est juste pas certain de savoir comment gérer un tel retour dans sa vie. Elle revient de loin, de très loin et il a beau tenter de se préparer sur les toutes dernières secondes Eddie n’est pas sûr de vouloir, ni de pouvoir affronter l’ancien grand chapitre de sa vie nommé Alexis.
« Eddie. » Son nom tombe à son tour comme un couperet et les voilà prisonniers de ces retrouvailles, dans un cadre enchanteur qui autrefois n’aurait sûrement pas eu le même effet sur eux. Eddie en oublie les fêtes et même où il se trouve, son passé le rattrape et Alexis lui apparait tel un fantôme revenu le hanter. Il ne sait pas s’il aurait pu y avoir un bon moment pour tout ça et s’il aurait été davantage prêt à la revoir dans un autre contexte, la seule chose de sûre c’est qu’il avait déjà la tête sous l’eau entre sa santé capricieuse et sa situation familiale désastreuse alors c’est un peu comme si on l’invitait à se noyer pour de bon. En ramenant Alexis dans sa vie l’univers le trahit une énième fois mais il commence à avoir l’habitude, comment arrive-t-il encore à être surpris avec tout ce qui lui tombe dessus ? Il se risque à lui dire qu’elle a l’air en forme et il ne sait pas trop dans quoi il s’aventure, ce qu’il sait en revanche c’est qu’il l'a déjà vue dans des états bien plus tristes. Alors oui Alexis a l’air d’aller bien à en juger son apparence, quoique lui aussi doit à peu près faire illusion malgré sa patte folle. « Comparé à il y a quatre ans, oui, peut-être… » Sa réplique lui tire une légère grimace tandis que des sons et des images lui reviennent en tête, et pas les plus plaisants. Un flot de souvenirs remonte alors et le parallèle entre la Alexis face à lui et celle qui l’a quitté quatre ans plus tôt devient inévitable. À choisir Eddie préfère la voir comme ça, même sans savoir de quoi est aujourd’hui faite sa vie son ex petite amie lui parait plus apaisée qu’à l’époque et en même temps ce n’est pas dur. Il ignore le chemin qu’elle a pu parcourir pendant ces quatre ans et si le temps écoulé lui a été bénéfique parce qu’il n’était pas, ou plus là pour voir ça. « Je n’ai pas forcément envie d’y repenser. » il souffle en remuant doucement la tête pendant que ses yeux se font fuyants. Pourtant il s’en rappelle Eddie, comme si c’était hier. Des larmes d’Alexis ce soir-là, de ses derniers mots envers lui et de cet ultime regard qu’elle lui a jeté avant de disparaitre de son appartement et de sa vie. Il ne reviendrait en arrière pour rien au monde parce qu’il a eu trop de mal à se sortir de tout ça, cette rupture ne l’a pas laissé indemne et quelque chose lui dit qu’Alexis n’a pas été épargnée non plus. Ils s’aimaient tous les deux, on ne tourne pas la page de trois ans d’amour juste en le voulant alors ça ne pouvait pas être autre chose qu'éprouvant. « Mais en tout cas tu n’as pas changé. » Et cette fois ses yeux la détaillent pour vérifier ce qu’il avance. Il peut dire que le temps a effacé beaucoup de choses mais pas la fraîcheur d’Alexis, qui parait même ne pas vieillir. De son côté Eddie ne saurait pas dire s’il s'en sort aussi bien, surtout en ce moment où il n’est pas vraiment copain avec son miroir. Ce qu’il remarque aussi c’est la cigarette qu'elle tente de cacher, qu’il avait à vrai dire pu sentir avant même de la voir. Cette odeur il la tolère mais il n’a de son côté jamais été tenté de s’y mettre, Alexis sait pourquoi. En tant que danseur Eddie se doit de conserver de bons poumons, il a aussi répété beaucoup de fois à son ex qu’elle façonnait son futur cancer avec ces cochonneries mais ce qu’elle peut faire de sa santé ne le regarde plus, n’est-ce pas ? « Pourquoi j’aurais arrêté ? » Un point pour elle. Il hausse les épaules, conscient qu’elle n’a de comptes à rendre à personne et certainement pas à lui. « C’est vrai, c'est toi que ça regarde. La seule personne qui devait t’embêter avec ça n’est plus là pour le faire. » À moins qu’elle n’ait aujourd’hui dans sa vie quelqu’un d’autre pour lui faire gentiment la morale à ce sujet, elle peut toujours le contredire et affirmer qu’il a tort puisqu'il ne pourra même pas le vérifier.
Et puis il y a ce sourire qu'il décèle chez elle, Eddie se demande bien ce qui peut l’amuser ici mais il le comprend vite à ses yeux clairs qui fixent sa main et à ces mots qu’elle formule « Je crois que tu ferais mieux de vite manger cette crêpe avant qu’elle ne t’échappe. » Il ne s’en était même pas rendu compte et ne l'avait pas davantage senti, car il est vrai que cette crêpe il l’avait un petit peu oubliée. « Ah, oui, exact. » Il esquisse à son tour un fin sourire puis se met à lécher la chantilly sur ses doigts, avant de mordre une première fois dans sa crêpe. Pas de gâchis avec lui même s’il déteste manger devant les autres et se sentir observé en le faisant, elle le sait. « Tu t’es laissée tenter par une crêpe aussi ? » il demande histoire de faire la conversation, parce qu’il doit avouer que croiser Alexis dans un lieu aussi bondé le surprend assez. Elle devait avoir à faire dans le coin, peut-être même qu’elle a participé comme lui à la collecte de jouets, il s’imagine à peu près tout. « Tu sais, on n’est pas obligés de se parler plus que ça. Je veux dire, si on n’a pas envie… » Bon, sa dernière question était peut-être de trop maintenant qu’il y pense. « On n’a pas à se forcer. » Alexis ne doit pas avoir envie de le voir ni de lui parler si elle dit ça, et pour peu Eddie se sentirait bête de ne pas vouloir expédier cet échange trop vite de son côté. « Je ne m’en sens pas forcé. » Il ne s’explique pas ce besoin qu’il a de lui parler et de savoir comment elle va, surtout. La retrouver le perturbe et ravive certaines peines mais ce n’est pas insoutenable pour lui, pour elle par contre il ne s’avancera pas. « Mais je peux partir manger cette crêpe plus loin si ma présence t’indispose. » Il le fera si elle le lui demande parce qu’il la respecte encore bien trop pour lui imposer une discussion dont elle ne voudrait pas. Pour s’imposer tout court, en fait. « Tu sais.. » il débute, finissant quand même sa bouchée de crêpe pour qu’elle ne croit pas que durant ces années ses bonnes manières se sont fait la malle. « Je me suis beaucoup demandé ce que tu devenais pendant ces quatre ans. Si tu peignais toujours, si tu vivais même encore ici, quoique.. pour ça je n’avais pas trop de doute. » Il n’imaginait pas Alexis quitter Brisbane, c’était même la seule chose dont il était à peu près sûr quant à ce qu’elle avait pu devenir. Eddie délaisse un instant sa crêpe pour reporter ses yeux sur elle, et c’est avec sérieux qu’il reprend. « Comment tu vas après tout ce temps Alexis ? » Prononcer à nouveau son prénom lui retourne le bide parce qu’il en avait perdu l’habitude, et qu’autrefois ce prénom était aussi le plus beau qu’il connaissait. Ce n’est plus pareil de le dire aujourd’hui, c’est aussi un regard différent qu’il pose sur elle et ça n’est pas plus simple de lui parler, il prend juste sur lui car à cet instant la curiosité et l’envie de s’assurer qu’elle va bien sont les plus fortes.
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| | | | (#)Mar 4 Jan 2022 - 10:24 | |
| Brisbane recèle son lot de surprises. Le monde est bien trop petit à ton goût. Tu ne t’attendais pas à croiser ton ex ici, mais alors pas du tout. Tu l’avais tellement effacé de ton disque dur que, en vérité, tu ne t’attendais à le croiser nulle part. Ironique puisque, vous habitez quand même toujours dans la même ville. La difficulté de ta journée consistait seulement à sortir, à voir du monde que tu ne connaissais pas, à interagir quelques instants le temps de déposer les jouets, puis celui d’acheter une crêpe. En aucun cas tu avais prévu dans ton programme de croiser les prunelles foncées d’Eddie. Rien que son iris est complètement contraire au tien… idiotement, tu te dis que ça aurait dû te mettre la puce à l’oreille quant à votre compatibilité. Mais c’est bête, de penser à ça. Si les yeux clairs n’allaient qu’avec les yeux clairs et les yeux foncés qu’avec les yeux foncés, ça se saurait tout de même. Tu te moques intérieurement de toi et maudis le fait que tu n’oses pas prendre une taffe de ta cigarette, ici et maintenant. Pourtant, tu pourrais. Ce n’est pas comme si Eddie ne t’avait pas vue. Et puis de toute façon, tu ne lui dois rien. Alors pourquoi tu ressens cette espèce de proximité gênante ? Ça fait quatre ans que vous ne vous êtes pas vus. Tu t’es sorti Eddie de la tête depuis longtemps. A moins que… A moins que tu n’aies fait que le mettre dans un coin de ta tête, sans l’en sortir complètement. C’est plus plausible, moins facile à admettre cependant. Et alors qu’il apparait devant toi, avec sa crêpe entre les mains, tout te semble dater d’hier. Les pleurs, la colère, le dépit. Non vraiment, ce n’est pas une bonne chose que vous vous soyez croisés ici.
En plus, il ose te dire que tu as bonne mine. Du moins, que tu as l’air en forme. Il ne sait pas à quel point il se trompe, mais tu n’es pas prête à lui cracher la vérité à la figure, alors tu te contentes de faire une comparaison avec la dernière fois qu’il t’a vue, en admettant que c’est possible que tu sois en meilleure forme aujourd’hui qu’il y a quatre ans. Mais est-ce vraiment le cas ? Te poser la question te chamboule, tu n’avais pas signé pour ça aujourd’hui. Eddie semble aussi gêné que toi de te recroiser. « Je n’ai pas forcément envie d’y repenser. » Un sourire ironique de ta part. Tu arrives à croiser se yeux fuyants malgré tout. Evidemment qu’il n’a pas envie d’y repenser, si tu avais une sale gueule il y a quatre ans, c’était la faute de qui ? « Tu m’étonnes. » Parce que tu sais que c’était ta faute te vient à l’idée, mais tu ne le diras pas, parce que tu n’es pas foncièrement méchante. Pourtant, parfois, quand tu y penses, peut-être qu’il mériterait que tu le sois. Juste un peu, au moins, afin de mettre les points sur les i. Tu ravales ta méchanceté gratuite – parce que là, Eddie n’a rien fait de mal, le pauvre – et fixes le jeune homme qui a une autre remarque dont tu ne sais pas quoi penser. « Mais en tout cas tu n’as pas changé. » Tes sourcils se froncent. Ça peut vouloir dire mille et une choses, ce qu’il vient de te dire. Tu prends une grande inspiration et choisis de bien le prendre. C’est bientôt Noël après tout. « Je le prends bien. » Parce qu’il peut bien vouloir dire que tu es aussi jolie qu’il y a quatre ans, par exemple, qui sait. Comme il peut vouloir dire que tu as l’air aussi paumée qu’avant. L’idée que ça puisse être la seconde option t’agace et te blesse. Mais non, réfléchis, si c’était ça, il se serait tu. Tu vois mal Eddie te dire de but en blanc que tu ne ressembles à rien. Et encore, il en serait capable tellement il peut être maladroit dans ses mots de temps en temps. Du moins, du temps où tu le connaissais. Peut-être a-t-il changé, et qu’il mérite le bénéfice du doute ?
En tout cas, s’il voit bien que tu n’as pas changé, tu peux dégainer ta cigarette, non ? Tu prends une taffe en lui demandant pourquoi diable tu aurais arrêté, et tu sens dans son regard qu’il a déjà abandonné. Qu’il ne va pas essayer de te convaincre du fait que c’est une mauvaise chose, et patati et patata. A la place, il a une remarque qui te met mal à l’aise, c’est vrai. « C’est vrai, c'est toi que ça regarde. La seule personne qui devait t’embêter avec ça n’est plus là pour le faire. » Ces mots t’attristent. Parce qu’une partie de toi aurait préféré que la personne dont il parle reste à tes côtés, quitte à ce que tu aies à arrêter la cigarette. Mais c’est trop dangereux comme chose à dire, alors tu te contentes d’un sourire contrit. Ça te donnerait presque envie de jeter ta cigarette alors qu’elle n’est qu’à moitié consommée. Tu ne le feras pas, parce que tu as quand même développé une certaine addiction à la nicotine, c’est certain, mais s’il y a bien quelqu’un qui pourrait te dégoûter de la cigarette, ce serait Eddie. Sans aucun doute. Comme il l’a dit cependant, il n’est plus là pour t’embêter à ce sujet. Alors tu prends une taffe juste avant de lui faire remarquer qu’il faudrait qu’il s’occupe de sa crêpe, et il confirme avant de prendre une ou deux bouchées, en prenant soin de lécher la chantilly qui commençait à couler. C’était un excellement moyen de dévier la conversation, mais tu sens que ne va pas durer. Pourtant, il te demande si toi aussi tu t’es laissée tenter. « Oui, j’en ai pris une au sucre. Plus facile à manger. » déclares-tu avant de cette fois, lui offrir un sourire sincère presque malgré toi. Mais cette mascarade ne pourra pas durer éternellement. C’est trop dur pour toi de croiser Eddie, et de ne te contenter que de parler de choses futiles telles que les crêpes que vous avez achetées. Tu as tendance à penser en noir et blanc, et tu préfèrerais soit que vous parliez franchement, soit que vous ne parliez pas du tout. Tu t’adresses alors finalement à Eddie pour crever l’abcès et lui dire que vous n’avez pas à vous forcer à faire la discussion si c’est trop dur de se retrouver d’une telle manière. Il répond à cela ce que tu redoutais. « Je ne m’en sens pas forcé. » Evidemment. Est-ce que ça veut dire qu’il est quelque part content de te croiser par ici ? Tu n’arrives pas à déchiffrer ses émotions comme tu y arrivais jadis et ça te perturbe. Tu hoches la tête et mimes un d’accord avec tes lèvres, un peu gênée. « Mais je peux partir manger cette crêpe plus loin si ma présence t’indispose. » A ces paroles s’ajoute un rire de ta part, un rire parce que ça en devient ridicule. Est-ce que tu es gênée du fait de recroiser Eddie ? Oui. Est-ce que pour autant, tu vas lui demander de s’éloigner pour manger sa pauvre crêpe ? Absolument pas.
« Non, tu peux rester, évidemment. » Sa présence ne t’indispose pas… juste, ce n’est pas facile de recroiser l’ex qu’on a cru être l’homme de sa vie pendant un moment. Je dirais même pire, la grande romantique en toi oserait même penser que c’est un signe que tu croises Eddie aujourd’hui et qu’il faudrait que tu te rapproches de lui. Mais c’est une pensée stupide, que tu renfloues loin derrière dans ta tête. Alors que tu prends une taffe finissant bientôt ta cigarette, le brun reprend la parole et tu l’écoutes attentivement. « Tu sais… » commence-t-il en finissant sa bouchée, alors que tu redoutes ce qu’il va dire ensuite. Ton cœur se met à battre un peu plus fort sous ta poitrine. « Je me suis beaucoup demandé ce que tu devenais pendant ces quatre ans. Si tu peignais toujours, si tu vivais même encore ici, quoique… pour ça je n’avais pas trop de doute. » Ah… C’est dur pour toi d’avouer ça, mais à toi aussi il t’est arrivé de te poser de telles questions. A la seule différence près qu’un de tes plus proches amis, Clément, était anciennement très ami avec Eddie, alors tu as pu avoir des nouvelles de temps en temps. Sans parler de l’incident de l’agression de Clément, qui ne t’est pas encore sorti de la tête. Tu serais bien curieuse de savoir ce qu’Eddie a à dire pour sa défense. Malheureusement, il t’achève avec une question qui te taraude. « Comment tu vas après tout ce temps Alexis ? » Comment répondre à ça, alors qu’il te prend au dépourvu ? Comment répondre à ça, après quatre ans de blanc ? Ou plutôt d’obscurité ? Quatre ans d’absence mutuelle qui ne se sont pas soldées pour le mieux du côté d’Alexis. Tu as envie de parler de toi le plus vite possible pour vite pouvoir aborder le sujet de l’agression de Clément. Le regard fuyant, tu débutes ta réponse. « Je peins toujours... » Avant de préciser l’évident. « La peinture c’est toute ma vie, tu le sais. » Ces derniers mots, comme pour se rassurer qu’il te connait toujours, au moins un peu, Eddie, même si ça fait quatre ans que vous ne vous êtes pas parlés. « Je vis toujours ici, parce que je m’y sens bien. J’ai un studio à Fortitude Valley… » Oula, tu donnes un peu trop d’informations là non ? De toute façon, qu’est-ce qu’il pourrait bien en faire ? Venir te faire des visites surprises ? Tu doutes qu’il s’embarque là-dedans. Mais au fond, est-ce que ça ne te ferait pas un peu plaisir ? Tu prends la dernière taffe de ta cigarette, l’éteins dans ton cendrier portable avant d’enchainer sur la partie qui te rend nerveuse parce qu’elle ne fait que te rappeler que tu es une ratée. « Et j’ai trouvé un job en tant que fleuriste, pour pouvoir vivre, tu vois ? » Sûrement qu’il comprend. Défaitiste, tu poursuis. « Parce que ce n’est pas comme si je pouvais vivre de mes peintures. »
Sourire en coin, gêné bien évidemment. Tu te demandes si Eddie va prendre le parti de défendre ton talent, comme il le faisait autrefois – ou s’il va être indifférent. Tu ne lui en voudrais pas si la seconde option s’avérait être celle qui se déroulerait, parce qu’après tout, il ne te doit plus rien, si ? Sortant une autre cigarette de ton paquet (oui, recroiser son ex de manière inattendue fait partie des situations qui justifient une consommation accrue), l’allumant avec ton briquet que tu sors de ta poche, tu laisses un blanc s’imposer avant de renvoyer la balle à ton ex. « Et toi ? Qu’est-ce que tu deviens ? On agresse les gens des studios de danse concurrents au sien, maintenant ? » Tu lâches un rire maladroit et lui lances un clin d’œil. Tu n’aurais pas dû le balancer comme ça, mais c’était plus fort que toi. Tu dois obtenir la vérité sur cette affaire, qui a tant coûté à ton ami Clément. Tu espères, au fond de toi, qu’Eddie va démentir la rumeur, la démentir mais aussi la démonter. Tu espères qu’il n’y est pour rien, parce qu’au fond, tu as toujours de l’affection pour ton ex, même si tu n’oseras pas le dire. |
| | | | (#)Ven 7 Jan 2022 - 20:28 | |
| We walked through the darkness, we walked in the sun We shared all our sorrows, we shared all our love You fell like an angel to me and you broke your wings Now you are a ghost from the past
Je ne te reverrai plus. Jamais.
Ces mots l’ont hanté longtemps après ces prétendus adieux d’il y a quatre ans et refont surface des tréfonds de sa mémoire aujourd’hui. Eddie n’a jamais cru qu’il ne la reverrait réellement plus, il a toujours pensé ou espéré au fond de lui que sa route finirait par recroiser celle d’Alexis parce que ça le rassurait d’une part, et parce qu’il avait aussi trop entendu dire qu’ils étaient faits l’un pour l’autre. Beaucoup s’accordaient à le dire et Eddie lui-même l’avait cru. Qu’il ferait sa vie au côté d’Alexis et qu’il ne connaitrait l’amour qu’avec elle. Il était très jeune et aussi très amoureux, et l’avoir aujourd’hui face à lui le replonge dans les meilleurs comme dans les pires moments de sa vie. Le temps du bonheur puis le vide, vertigineux, qu’Eddie aura mis un temps fou à combler. Son cœur est longtemps resté cadenassé comme si Alexis était partie avec la clé de ce dernier, le retenant prisonnier d’une histoire qu’il avait à tout prix besoin de dépasser pour pouvoir avancer. Eddie n’aime pas ressasser le passé, pour tout ce qu’il y a laissé. Des amitiés brisées comme cet amour sacrifié mais parfois le passé ressurgit sans prévenir pour rappeler d’anciennes erreurs, d’anciennes blessures plus ou moins cicatrisées. Alexis demeure dans un coin de son cœur sous la forme d’une plaie pas totalement refermée parce qu’il sait qu’il lui a fait du mal, et parce qu’elle lui a aussi infligé de la souffrance en le quittant en retour. Il s’en veut autant qu’il lui en veut, cette histoire n’est définitivement pas réglée alors c’est peut-être bien l’occasion de se dire enfin clairement les choses. Il ne sait pas s’il trouvera les mots pour ça mais il sait ce qu’il aimerait exprimer, c’est déjà un début.
Repenser à il y a quatre ans lui coûte mais il ne peut pas retrouver Alexis sans que leur dernier échange ne lui revienne brutalement dans la figure. La fin de l’année 2017 s’apparente à un lointain cauchemar quand il entreprend le désagréable effort d’y replonger, il se rappelle la froideur de son départ comme le fait d’avoir regretté, après coup, de ne pas l’avoir retenue ce soir-là. Il n’aurait sûrement pas pu sauver leur couple mais il aurait pu montrer que ça l’affectait, au lieu de rester dans un coin spectateur de la fin de leur histoire. « Tu m’étonnes. » Elle semble avoir encore pas mal de rancœur envers lui, ses mots sont durs mais Eddie les mérite certainement. Il encaisse sans rien dire avant de lui faire remarquer qu’elle n’a pas changé, sans préciser toutefois ce qu’il entend par là. C’est un compliment mais ça ne se devine pas, Eddie ne se voyant pas lui dire qu’elle est toujours aussi jolie même s’il le pense, car cette rencontre est suffisamment gênante pour ne pas en rajouter une couche. « Je le prends bien. » « Tu peux. » il répond du tac au tac d’une voix claire. Car oui, les années ont été clémentes avec elle au moins à ce niveau, il doit bien l’admettre autant qu’il pourrait avouer que son regard a toujours le même effet hypnotique sur lui si ça non plus, ce n’était pas trop. Il n’y peut rien Eddie, il se perd facilement dans des yeux clairs et il ne peut qu'être déstabilisé quand le regard qui le rendait particulièrement faible autrefois recroise le sien après autant de temps.
Il ne peut même pas se dire déçu de voir qu’Alexis fume toujours parce qu’il n’a plus le droit de lui reprocher ça, les habitudes qu’elle a ou non conservées du temps de leur relation ne le concernent plus. Et il serait de toute façon mal placé pour lui faire la morale alors qu’il s’est jeté à corps perdu dans ce qui les avait séparés : la danse, cette passion destructrice à travers laquelle il fait lui aussi prendre des risques à sa santé. Eddie n’a rien d’un modèle alors sa remarque sur ses cigarettes il la remballe, laissant Alexis gérer ses addictions pendant que lui gère les siennes. C’est mieux ainsi, pour une fois il reste à sa place. Pendant ce temps sa crêpe refroidit et son ex est plus concentrée que lui sur celle-ci, mais il faut dire qu’Eddie a un peu la tête ailleurs depuis le début de ces retrouvailles. Il finit par y goûter et le fait d’avoir opté pour la combo pâte à tartiner/chantilly lui parait d’un coup bien ambitieux, à moins qu’il ne commence à culpabiliser pour cet excès et n’assume pas non plus sa gourmandise devant Alexis, ou un peu tout ça à la fois. Il n’est toutefois pas le seul à avoir cédé à la tentation d’une crêpe mais Alexis s’est montrée plus raisonnable que lui. « Oui, j’en ai pris une au sucre. Plus facile à manger. » Et cette cigarette c’est pour digérer il présume, à l’époque en tout cas c’est l’excuse qu’elle lui donnait. Mais qu’il arrête avec cette fixette ridicule, encore une fois elle ne lui doit rien. Son regard la détaille à nouveau et c’est dur, vraiment dur de l’avoir face à lui après toutes ces années. Ça l’est aussi de l’entendre, cette voix l’ayant laissé sur un douloureux au revoir quatre ans plus tôt. Eddie n’a pas prévu de se contenter d’une discussion futile, lui parler de ce qu’il a longtemps ruminé en lui risque simplement d’être compliqué. Pour autant il tient à rester là si Alexis peut tolérer sa présence, ce n’est pas parce qu’ils ne sont plus ensemble qu’ils doivent s’éviter toute leur vie et Eddie aimerait obtenir certaines réponses à ses questions si jamais leurs chemins doivent à nouveau se séparer après ça. Il sait que c'est une possibilité parce qu'Alexis semble encore beaucoup lui en vouloir, il l'imagine donc mal chercher à garder contact et de son côté il n'est pas certain que ce serait une très bonne idée. Mais il y pense, forcément, pour en venir à se dire tout ça.
Elle rit et sur le moment Eddie ne sait pas comment le prendre, comme s’il n’était plus très bien capable de déchiffrer ses réactions. Peut-être que sa question est stupide mais il préfère savoir si elle peut rester au même endroit que lui sans que ce soit invivable, étant donné qu’il y a quatre ans elle paraissait étouffer à ses côtés et ressentir une terrible envie de le fuir. « Non, tu peux rester, évidemment. » Il ne sait pas pourquoi cette réponse le soulage, peut-être parce qu’il se serait éloigné à contre cœur si elle le lui avait demandé. Et maintenant qu’il est autorisé à rester Eddie veut savoir ce qu’elle devient, il ose la questionner à ce propos quitte à entendre que ça ne le regarde pas, ça non plus. C’est peut-être bien vrai et pourtant il aurait du mal à en rester là, sans information sur la vie que mène aujourd’hui Alexis. Il s’en soucie comme on se soucie de ce que deviennent ces personnes qui ont compté dans une vie, elle l’a certes plaqué sans ménagement mais il ne l’a jamais détestée pour autant et n’a jamais considéré non plus qu’elle n’existait plus pour lui. Le regard clair d’Alexis laisse penser que cette question la gêne et il sait déjà qu’il n’insistera pas si y répondre s’avère trop difficile pour elle. « Je peins toujours... » Un sourire nait le long des lèvres du danseur. Il n’est pas surpris de l’apprendre mais il aime surtout entendre qu’elle n’a pas renoncé à sa passion, à travers laquelle il l’avait beaucoup soutenue par le passé. « La peinture c’est toute ma vie, tu le sais. » Eddie hoche lentement la tête sans perdre son sourire. « Oui et tu étais même très douée pour ça. » Il le pensait sincèrement à l’époque et sans doute le penserait-il encore s’il voyait ses peintures aujourd’hui. Alexis a toujours eu énormément de talent aux yeux de son ex petit ami et jamais Eddie n’affirmera le contraire, son amertume ne l’a pas rendu de mauvaise foi là-dessus. « Je vis toujours ici, parce que je m’y sens bien. J’ai un studio à Fortitude Valley… » C’est une nouvelle information qu’Eddie range dans un coin de sa tête, sans savoir si elle lui servira un jour. Pourquoi le servirait-elle, d’abord ? Ce n’est pas comme si Alexis avait envie de le revoir, il en doute en tout cas fortement tout comme il ne pense pas qu’elle accepterait encore de partager ses œuvres avec lui. « Et j’ai trouvé un job en tant que fleuriste, pour pouvoir vivre, tu vois ? » Ça, ça le fait déjà plus tiquer. Eddie fronce légèrement les sourcils alors que la suite n’a vraiment rien d’étonnant quand on connait Alexis. « Parce que ce n’est pas comme si je pouvais vivre de mes peintures. » C’est bête, mais sur le moment il est tenté de déposer une main sur son épaule avant de finalement se raviser. Il n’oserait pas la toucher comme ça mais il ressent encore l’envie qu’il avait à l’époque de la soutenir dans son art, lui qui a toujours cru en elle. « Tu pourrais peut-être en vivre si tu acceptais de les montrer au monde. » il l’informe d’une voix calme, toute en bienveillance. « Parce que ça, j’imagine que ça n’a pas changé. » Qu’Alexis rechigne toujours à exposer ses peintures parce qu’elle doute d’elle, autrefois en tout cas Eddie avait beaucoup de mal à lui ouvrir les yeux sur son talent et sa légitimité d’artiste. « Tu sais ce que j’en pense, que pour moi c’est du gâchis. » il finit par souffler avant de mordre une nouvelle fois dans sa crêpe, son regard ne quittant pas celui d’Alexis.
Elle passe à une autre cigarette et lui soupire, par réflexe. Un court blanc s’installe durant lequel Eddie poursuit la dégustation de sa crêpe mais il s’arrête net face à la question qui lui est renvoyée, reçue comme le plus violent des retours de boomerangs. « Et toi ? Qu’est-ce que tu deviens ? On agresse les gens des studios de danse concurrents au sien, maintenant ? » Il relève la tête, croise son regard et se tend devant le rire qui échappe à Alexis. Nerveux sans doute mais peu importe, il est de trop ici comme à vrai dire toute la dernière partie de sa question. Il bloque sur ce qu’il entend et ce qu’il ressent se rapproche sûrement de la douleur qu’engendrerait un coup de poignard dans le ventre. « Alors toi aussi tu t’y mets ? » il constate durement tout en la fixant de son regard dépité. Ces accusations venant d’elle font encore plus mal que quand elles provenaient de Clément parce qu’elle le connait mieux que quiconque pour avoir partagé sa vie pendant trois ans. Elle sait, ou est censée savoir que la violence l’horripile sous toutes ses formes alors comment peut-elle croire qu’il pourrait avoir demandé à des gars de s’en prendre physiquement à Clément ? Ils ont beau avoir été longuement en froid tous les deux ce n’est pas comme ça qu’Eddie règle ses différends avec les autres, et il aurait pensé qu’Alexis prendrait au moins sa défense là-dessus. « Je croyais que tu me connaissais mais les années ont visiblement effacé beaucoup de choses. » Il est déçu Eddie, blessé aussi que son ex petite amie doute aussi facilement de lui. Ça lui fait mal au cœur et lui ferait presque regretter ces retrouvailles alors qu’il n’était pas mécontent de la revoir, jusqu’ici. « Tu ne sais plus comment me diaboliser alors tu as pensé que ça ce serait bien ? » Le fait que Clément lui ait parlé de ses soupçons ne le choque pas, mais le fait qu’elle ne se soit pas automatiquement dit que ça ne lui ressemblait pas l’affecte beaucoup.. trop. « Ça m’a coupé l’appétit. » il annonce en ne parvenant plus à toucher à sa crêpe, et il doit avoir l’air un peu ridicule sur le moment avec de la pâte à tartiner au coin de la bouche. Eddie ne s’en défendra pas auprès d’elle car à quoi bon ? Elle l’en croit capable alors à partir de là il estime ne plus rien lui devoir. Les choses ont été clarifiées avec Clément, celui-ci n’a désormais plus aucun doute quant à sa possible implication mais Eddie déplore que son ami n’ait pas averti Alexis que son innocence avait été avérée. Et d’un autre côté il ne devrait pas avoir eu besoin de le faire car c’est évident, ça devrait l'être. « Pour le reste.. » Oui, il compte quand même répondre à sa question puisqu’elle l’a fait la première mais ça lui coûte. Il ne sait pas s’il a très envie de lui dire ce qu’il devient après ça mais une part de lui en ressent quand même le besoin comme pour lui prouver qu’elle ne l’a pas complètement achevé quatre ans plus tôt en le quittant. « Je suis toujours danseur, passé chorégraphe depuis peu. Et les fins de mois sont encore difficiles parfois. » Ça ce n’était pas utile qu’il le précise mais il le fait quand même et ils sont deux, du coup, à vivre difficilement de leur art. Les temps sont durs, même pour un danseur expérimenté comme lui et encore il lui épargne le couplet sur sa récente blessure parce qu’Alexis serait peut-être tentée de s’en moquer. Après ses allusions à l’agression Eddie se méfie, et quelque part il n’assume pas non plus. « J’ai déménagé peu de temps après notre.. » Rupture. Pourquoi c’est encore si compliqué à dire ? « Je vis à Redcliffe maintenant, dans un appartement à peine plus grand que l’ancien. Et la nouveauté c’est que j’ai trois chats. » Elle ne lui a pas vraiment connu cet amour des animaux et particulièrement des chats, qui s’est révélé à lui du jour au lendemain alors il est possible que ça la surprenne. « Et si jamais tu te le demandais.. oui, la fin de notre histoire a été douloureuse pour moi aussi. » Supposant qu’elle l’a été pour elle, ce dont il ne doute pas vraiment. Il ne sait pas pourquoi il va jusqu’à lui avouer ça, il faut croire que c’est une vérité qu’il doit à Alexis autant qu’à lui-même. Elle ne se posait peut-être même pas la question mais il a toujours pensé qu’elle sous-estimait l’impact que les choses avaient eu sur lui. Ce n’est pas parce qu’il s’était montré négligent qu’il n’en a pas souffert, la vie sans elle a même été difficile pendant longtemps. « J’ai voulu te le dire beaucoup trop de fois alors voilà, c’est fait. » Eddie soupire un grand coup. Il pensait que l’admettre de vive voix serait au moins un peu libérateur mais même pas, tout ce qu’il obtient c’est un peu plus mal au bide.
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| | | | (#)Sam 8 Jan 2022 - 14:02 | |
| Tu sais quoi ? Garde-les. Ca te fera un souvenir, j’imagine…
Il y avait quoi, à tout casser ? Un gilet, deux ou trois T-shirts trop grands que tu utilisais pour dormir, peut-être une mini-toile que tu avais peinte là où il habitait à l’époque, et du coup, un pinceau, peut-être ? Tu te remémores cet échange que vous avez eu il y a quatre ans. Qu’est-ce qu’Eddie a bien pu faire de toutes ces affaires ? Les a-t-il gardées soigneusement ou les a-t-il jetées sous l’effet de la colère et du chagrin ? Tiens, c’est une bonne question, ça aussi. A-t-il seulement ressenti du chagrin lorsque tu l’as plaqué, en décembre deux mille dix-sept ? C’était seulement il y a quatre ans, pourtant tu as l’impression que c’était il y a une éternité. Et pourtant, il y a en toi des plaies qui rappellent des blessures qui auraient pu avoir lieu hier. Pendant tout ce temps, tu n’as eu des nouvelles d’Eddie que via Clément, pratiquement, médium biaisé donc, en plus. Tu n’as pas eu l’occasion de lui demander comment il allait, ce qu’il faisait. Ça fait quatre ans, bon sang, depuis la dernière fois que vous vous êtes regardés, que vous vous êtes parlés, que vous vous êtes… embrassés, même. Il y a encore un peu plus de quatre ans, Eddie était tout ton monde, grande romantique que tu as toujours été. Les relations humaines te fascinent. Comment peut-on passer d’étrangers à amis, amants et encore plus, pour finalement redevenir étrangers ? Ce constat te semble être une fatalité qui te brise le cœur. Tu dois te rendre à l’évidence : quatre ans après la rupture avec ce qui te semblait être l’homme de ta vie, tu as toujours des séquelles profondes.
« Tu peux. » il a répondu rapidement comme si c’était une évidence, une évidence que le fait que tu n’aies pas changé soit quelque chose que tu puisses prendre positivement. Qu’est-ce qu’il a pu bien entendre par là ? Que tu es toujours aussi jolie qu’il te trouvait à l’époque ? Mais ce serait prétentieux de penser que c’est ça qu’il a voulu dire, non ? Pourquoi chacune de vos interactions constituent toujours de plus grandes interrogations pour toi ? Tu te prends trop la tête, voilà tout. Tu devrais prendre votre échange non pas comme des retrouvailles au sommet, mais comme deux individus qui se connaissaient il y a longtemps et qui se recroisent par hasard. Parce qu’après tout, c’est ça la réalité. Seulement voilà, tu ne l’admets pas mais il y a une petite partie de toi qui espère que c’est quelque chose en plus. Que ce n’est pas du simple hasard – que c’est le destin peut-être, sûrement. Qu’Eddie a changé, qui sait, qu’il a mûri sur les sujets à propos desquels vous étiez en désaccord. Mais ce n’est pas ça, à coup sûr, parce que tu te trompes souvent. Tu prends les événements pour beaucoup plus que ce qu’ils sont vraiment. Parce que tu prends trop les choses à cœur, Alexis. Il n’y a pas de complot supérieur, ou quelqu’un qui aurait fait en sorte que vous vous retrouviez au même endroit au même moment – non, c’est du pur hasard, et c’est dur à accepter. Pour rendre les circonstances un peu plus légères, Eddie et toi vous mettez à parler de vos crêpes. Tu lui ferais remarquer qu’il devrait s’occuper de la sienne avant qu’elle ne s’échappe, et il s’exécute. Pensant sûrement faire la conversation, il t’interroge sur si tu as pris une crêpe, toi aussi, et c’est en souriant que tu lui réponds que tu as opté pour l’option la moins salissante : celle au sucre.
Seulement un changement de sujet ne peut pas durer indéfiniment, et c’est toi qui mets les pieds dans le plat en indiquant à ton interlocuteur que, puisque cette rencontre est due au hasard et rien d’autre, rien ne vous oblige à catch up, rien ne vous force à prendre des nouvelles de l’un et de l’autre. Puis il a visiblement peur de te déranger et te propose d’aller manger sa crêpe plus loin, ce que tu refuses parce que tu trouverais ça ridicule. Si tu dis que la présence d’Eddie te perturbe, c’est surtout pour te protéger. En vérité, tu ne saurais dire à quel point tu es contente de le recroiser ici aujourd’hui pour espérer obtenir quelques nouvelles. Néanmoins, c’est à son tour de mettre les pieds dans le plat lorsqu’il te demande de but en blanc ce que tu deviens. Il te pose une colle, Eddie, pourtant tu arrives à rassembler les informations importantes et à lui donner, timidement mais avec succès. Tu mentionnes évidemment la peinture qui, il le sait, a toujours été très importante pour toi. Ton échappatoire, ton moyen d’expression. « Oui et tu étais même très douée pour ça. » Il te fait esquisser un sourire, le type de sourire qu’il savait toujours te décrocher lorsque vous étiez ensemble. Ca te fait bizarre d’arborer une telle expression faciale, que tu semblais disparue en même temps que votre couple. Il semblerait que monsieur sache toujours te faire sourire comme une princesse après tant d’années. Gênée malgré tout, tu laisses à ton sourire le rôle de dire merci et tu poursuis sur le sujet de ce que tu deviens. Tu ne peux pas t’empêcher de mentionner ton boulot de fleuriste en précisant bien que c’est parce que tu ne serais pas capable de vivre de tes peintures, et tu vois Eddie tiquer. Décidément, à quelques détails près, on se croirait bien quatre ans en arrière. « Tu pourrais peut-être en vivre si tu acceptais de les montrer au monde. » Ca, c’est ce qu’il croit, d’ailleurs ça a toujours été son opinion, à Eddie. Il t’a toujours incitée à parler de tes peintures, c’est une chose, mais aussi et surtout à les montrer. Combien d’opportunités d’expositions as-tu loupé au grand dam de ton petit copain de l’époque ? Tu te rappelles avec tendresse de cette période où Eddie croyait en toi et en ta passion dur comme fer, où il aurait été prêt à tout faire pour te décrocher la lune. Tu affiches un sourire triste alors qu’il poursuit. « Parce que ça, j’imagine que ça n’a pas changé. » Affirmatif, mon capitaine. Mais tu as honte, alors tu te contentes de hausser les épaules pour lui répondre. Il semble presque déçu que tu n’aies pas avancé sur cette facette de ta vie, et toi tu as juste envie de baisser les yeux et disparaître. « Tu sais ce que j’en pense, que pour moi c’est du gâchis. » Cette dernière phrase t’achève. Elle te blesse, même. Tu ne sais pas pourquoi mais il te semble qu’Eddie est tout sauf encourageant alors qu’au contraire, tout ce qu’il aimerait c’est que tu montres ton talent au monde, même après quatre ans sans avoir vu ni ta personne, ni l’évolution de tes peintures. A l’époque où vous vous fréquentiez, tu ne faisais que de l’abstrait, aujourd’hui tu es devenue plus polyvalente. Tu es capable de dessiner puis de peindre des portraits réalistes. Mais voilà, ses derniers mots à Eddie ne te donnent pas envie de partager ça avec lui. Tu as l’impression qu’il ne prend pas en compte à quel point c’est difficile pour toi, et maladroite comme tu es, tu vas le blesser aussi.
Parce que tu es curieuse, parce que tu ne peux pas rater une occasion de lui faire mal à Eddie, mal comme il t’a fait mal il y a quatre ans. Pourtant, tu n’es pas méchante de nature, non loin de là, et tu ne veux pas qu’il souffre… mais là, au moment où tu lui retournes la question, c’est trop tentant ; tu fais allusion à l’agression que Clément a subi, et surtout tu insinues que Eddie est derrière tout ça. Seulement lorsque son regard croise le tien, tu te rends compte à quel point tu viens de l’offenser, mais c’est déjà trop tard. « Alors toi aussi tu t’y mets ? » Quelque chose te dit que ce n’est pas la dernière chose qu’il dira, alors tu te tais et tu attends qu’il poursuive. En attendant tu as soudainement une boule au ventre, à la gorge, et les larmes, qui tu le sens, se préparent. « Je croyais que tu me connaissais mais les années ont visiblement effacé beaucoup de choses. » Il n’a pas tort, Eddie, il y a des années tu ne l’aurais pas cru capable d’une telle chose. Mais l’amertume et la rancœur ont eu raison de l’opinion que tu te faisais jadis de lui. Il y a aussi ce rôle qu’il a volé à Clément il y a des années de cela qui t’ont poussé à réévaluer ton opinion du brun. Ce que tu entends néanmoins dans ce qu’il dit, c’est qu’il n’était absolument pas à la tête de ceux qui ont agressé ton ami, et ça te suffit, comme réponse, mais Eddie semble dégoûté. Presque aussi dégoûté que toi le jour de votre rupture ; c’est pour dire. « Tu ne sais plus comment me diaboliser alors tu as pensé que ça ce serait bien ? » Cette question te fout un coup de couteau, mais pas au bide, non, directement au cœur. Il y a une raison pour laquelle au fil des années tu t’es doucement mais sûrement attelée à effectivement, diaboliser Eddie. Mais ile ne comprend pas, non il ne peut pas comprendre… Tu sers le poing gauche alors que ta cigarette meurt doucement entre tes doigts de l’autre main. Tu écoutes attentivement Eddie. « Ça m’a coupé l’appétit. » Tu marmonnes un « pardon » presque inaudible et justement, il ne semble pas l’entendre. A cet instant, tu te sens comme une petite fille qui se fait gronder par son père. Tu faisais la maligne, mais tu es bien trop sensible pour ces conneries. Eddie continue malgré tout de parler et, même si ça te rassure, tu sais qu’il est désormais profondément dégoûté. « Je suis toujours danseur, passé chorégraphe depuis peu. Et les fins de mois sont encore difficiles parfois. » Tu n’es pas heureuse d’entendre que le quotidien peut aussi être difficile pour ton ex. Sa passion pour la danse avait fini par te blaser, mais tu respectais toujours le fait que c’était ce qu’il voulait faire de sa vie et même, tu continuais d’être fière de lui. Le fait qu’il soit passé chorégraphe… te donne envie d’esquisser un petit sourire. Un sourire contrit, coupable, qui dit désolée de me permettre d’être contente pour toi, pour une raison que t’ignores. « J’ai déménagé peu de temps après notre… » Il ne dira pas le mot mais tu sais très bien ce qu’il sous-entend. Alors il poursuit en prenant comme acquis le fait que tu aies compris. « Je vis à Redcliffe maintenant, dans un appartement à peine plus grand que l’ancien. Et la nouveauté c’est que j’ai trois chats. » Ca aussi, ça te fait sourire, et tu t’exclames silencieusement « Oh ! » parce que le fait qu’il ait des chats désormais… ça te ravit. Ca ne peut que lui faire du bien. Seulement le visage d’Eddie s’assombrit avant qu’il ne reprenne.
« Et si jamais tu te le demandais… oui, la fin de notre histoire a été douloureuse pour moi aussi. » C’est vrai que parmi toutes les questions que tu te posais, celle-ci était prédominante. Parce que tu l’avais senti attristé certes, la dernière fois que tu l’avais vu, mais tu pensais qu’il s’en remettrait vite. Un ou deux pas de danse, des sorties avec les camarades et il t’aurait vite oubliée. Visiblement, la vérité est toute autre, et le brun tenait à le dire : « J’ai voulu te le dire beaucoup trop de fois alors voilà, c’est fait. » Toi aussi il y a quelque chose que tu aimerais lui dire désormais. Et tu te demandes si c’est le bon moment, vu que vous en êtes visiblement aux confessions. Lui dire impliquerait de revenir sur une de ses paroles qui date d’il y a quelques minutes, mais après tout, vu où vous en êtes, pourquoi pas ? « Tu sais, je… je ne t’ai pas diabolisé pour le plaisir. » Tu t’approches tout doucement de lui, désormais il n’y a plus que quelques centimètres qui vous séparent et bien que cette proximité te trouble, tu ressens le besoin de l’instaurer à ce moment précis. Tu baisses les yeux quelques instants, rougissante, puis tu déposes une main délicate sur la joue d’Eddie, que tu caresses doucement en affichant un tendre sourire. « Je devais trouver des raisons de te détester parce que sinon je n’aurais pas d’autre choix que de t’aimer, et… » Tu cherches tes mots, alors qu’une larme se déloge de ton œil pour glisser le long de ton visage. « Et c’est pas ce qu’on veut, hein, Eddie ? » Tu plonges ton regard océan dans le sien et cherches une approbation. Parce que s’il répond dans l’autre sens, alors là, ça va devenir compliqué. « Je suis désolée d’avoir douté de toi… je m’excuse. » finis-tu par lâcher, les larmes coulant désormais librement sur tes joues. Gênée, tu rebondis sur un autre élément. « Comment… comment ils s’appellent, tes chats ? » interroges-tu finalement, la voix cassée par les pleurs et un tout petit sourire qui passe entre les gouttes. |
| | | | (#)Jeu 13 Jan 2022 - 18:49 | |
| We walked through the darkness, we walked in the sun We shared all our sorrows, we shared all our love You fell like an angel to me and you broke your wings Now you are a ghost from the past
Lui seul sait ce qu’il a fait des affaires qu’Alexis avait laissées chez lui quatre ans plus tôt en le quittant, il pourrait le lui dire mais il n’est pas certain que ça l’intéresse, ou qu’elle se pose seulement la question. Jeter ses vêtements était inconcevable pour lui, il aurait eu l’impression de mettre le souvenir d’Alexis à la poubelle et ça Eddie n’aurait vraiment pas pu. Ces vêtements n’ont pas quitté le carton dans lequel il les avait mis en déménageant, un carton se trouvant toujours dans sa chambre et contenant pas mal d’autres affaires du passé sur lesquelles Eddie ne s’attarde plus vraiment mais qu'il garde par attachement. Ce sont quelques uns de ses rares souvenirs d’elle, Alexis ne lui ayant au final pas laissé grand-chose et c’est peut-être aussi pour ça qu’il n’a pas pu s’en séparer. Parce qu’elle est partie avec un bout de son cœur et qu’il s’est retrouvé sans rien, du jour au lendemain. Il a beaucoup de regrets par rapport à ce fameux soir de décembre, leur dernier ensemble. Des choses qu’il aurait voulu dire, ou faire avant qu’elle s’en aille même s’il aurait sûrement du mal à mettre des mots dessus aujourd’hui. Le sujet Alexis reste difficile à évoquer pour lui, ses proches le savent et évitent généralement de l’aborder pour celles et ceux ayant vu combien cette rupture l’avait affecté. Trois ans de relation et tout autant de temps pour en guérir, ou tout du moins parvenir à y penser sans que ça ne fasse trop mal. Parce qu’il gardera toujours cette profonde culpabilité d’avoir négligé ce qu’il avait de plus précieux à l’époque, et la frustration d’avoir échoué à rendre sa petite amie heureuse quand il le pouvait. Alexis reste son plus vieux tabou, voilà pourquoi la revoir le déstabilise autant. Il n’a même pas encore réussi à parler d’elle à Halston, ne trouvant jamais de bon moment pour ça et ne sachant pas non plus s’il veut vraiment que les fantômes de son ancienne relation puissent planer sur sa relation actuelle. Car ce n’est pas une petite porte de son passé qu’il ouvrirait, Alexis a été sa première grande histoire, le genre d’histoire qui ne se résume pas. Une histoire au souvenir aussi doux qu'amère, et forcément très sensible comme lorsque Callie lui a rappelé dernièrement qu’il brisait toutes les personnes qu’il aime et qu’Alexis avait été la première. Il ne risque pas de l’oublier Eddie, ce n’est pas parce que quatre ans ont passé qu’il est en paix avec lui-même par rapport à ça. Et il n’attend pas non plus d’Alexis qu’elle lui ait pardonné ses manquements, parce qu’il ne sera sûrement jamais pardonnable là-dessus.
Elle peint toujours Alexis, et c’est fou ce que cette information pourtant prévisible fait du bien à entendre. Il se doute qu’elle a toujours autant de mal à montrer au monde l’or qu’elle a au bout des doigts mais au moins elle n’a pas renoncé, elle s’accroche à sa passion comme lui s’est accroché à la sienne et c’est une chose qu’on peut bien leur reconnaitre à tous les deux : ils ont ça dans le sang, la peinture pour elle et la danse pour lui. Deux artistes aux ambitions très différentes qui, pourtant à l’époque, étaient incroyablement complémentaires. Elle assistait à ses spectacles et lui l’encourageait à chaque peinture, leur couple était beau aussi pour ça. Ces moments Eddie se les remémore avec beaucoup de nostalgie, quand il profitait par exemple de ses cheveux attachés pour déposer un baiser sur sa nuque pendant qu’elle peignait, ou lui apportait un verre d’eau lorsqu’elle passait un peu trop de temps sur une toile au point d’en oublier de s’hydrater. C’est avec tendresse qu’Eddie la regardait s’adonner à sa passion, même si elle le faisait trop discrètement à son goût. Pendant longtemps il a été le seul à voir son potentiel et l’un de ses plus grands regrets par rapport à leur couple est aussi de ne pas avoir réussi à lui faire pousser les ailes dont elle aurait eu besoin pour prendre son envol artistique. Il s’est toujours senti privilégié de voir ce que tant d’autres ne voyaient pas, à savoir l’étendue de son talent. Ça lui tenait à cœur parce qu’il croyait en elle et ne cessera d’ailleurs jamais de le faire, tout comme il veut croire qu’un jour Alexis aura la reconnaissance qu’elle mérite. « Je crois que je serais curieux de voir ton évolution. » il ajoute même, en prenant le risque d’entendre qu’il a perdu son droit de regard sur ses œuvres le jour où il l’a perdue, elle. Si c’est le cas il ne pourra que l’accepter, Alexis étant parfaitement libre de partager son art avec les personnes de son choix même s’il croit comprendre qu’elle reste encore très pudique vis-à-vis de ses peintures, ce qu’il ne peut que déplorer. Eddie ose parler de gâchis sans se douter que ses mots peuvent la blesser car ce discours est le même que celui qu’il tenait autrefois, il n’est juste plus très bien placé pour le laisser entendre, il faut croire. Et pourtant il n’a rien perdu de sa bienveillance à l’égard de l’artiste qu’elle est, qu’il respecte et admire malgré l’amertume qui l’a longtemps rongé. Rien ne saurait effacer ça, pas même la violente déception qui l’attend au tournant juste après et qu’Eddie ne voit absolument pas venir.
Que Clément ait pu douter de lui c’est une chose, après sa trahison il ne savait peut-être plus très bien de quoi Eddie était capable. Mais qu’Alexis s’y mette aussi en ayant pourtant partagé sa vie pendant trois ans, non, ça ne passe pas. Il tombe de haut Eddie, non seulement ces accusations lui reviennent en pleine figure aujourd’hui mais elles proviennent en plus de la dernière personne qu’il aurait cru pouvoir le soupçonner. Alexis le connait pourtant, elle peut penser du mal de lui sans forcément l'imaginer capable du pire, parce qu'il ne voit pas bien ce qui peut se placer au-dessus d’un règlement de comptes par la violence en terme de gravité. Surtout entre anciens amis, il n’aurait vraiment pas pu s’en prendre à Clément de cette façon ni envoyer quelqu’un le faire à sa place. Parce qu’il a toujours estimé le brun et ne voudra jamais autre chose que son bien. Son regard désabusé parle pour lui, Eddie n’arrive pas à croire que son ex petite amie ne sait même plus qui il est et quelles sont ses valeurs. Elle n’aurait jamais pu rester trois ans avec un mec violent, elle le sait très bien mais ça ne l’empêche pas d’associer son nom à cet acte odieux pour.. il ne sait même pas pourquoi, à vrai dire. Ce qu’elle cherche en le piquant là-dessus, si ce n’est lui faire du mal peut-être. Est-ce une façon de se venger de lui ? Il espère bien que non, parce que d’un coup Eddie n’est plus trop sûr de tenir à ces retrouvailles. Il pense même partir mais il n’en fait rien, préférant répondre à sa question quant à ce qu’il devient. Puisqu’elle l’a fait, il peut bien le faire aussi. Alexis étire un sourire lorsqu’il partage avec elle sa nouvelle casquette de chorégraphe, elle qui ne l'a connu que comme danseur autrefois. C’est un accomplissement dont Eddie est particulièrement fier et pendant un instant Alexis semble fière, elle aussi. De lui ? Il ose difficilement le croire, surtout après sa désillusion. Son déménagement a l'air de la surprendre, ou plutôt le fait qu’il vive à présent avec trois chats car ça aussi c’est nouveau, et il devine au sourire élargi de son ex que cette information l’attendrit. C’est officiel, il ne sait plus sur quel pied danser. Alexis parait contente pour lui mais il n’oublie pas ses mots blessants, et le fait qu’elle ait douté de lui. Affronter son regard après ça s’avère encore plus difficile parce qu’il ne sait plus vraiment ce qu’il y lit, tout comme il s’interroge sur ce qu’elle pense réellement le concernant. N’est-elle pas déçue d’apprendre que la danse tient toujours une place importante dans sa vie, cette même danse qui les avait séparés ? Elle n’en donne pas l’impression mais il n’est pas dans sa tête, tandis que lui s’apprête par contre à confier des pensées gardées enfouies pendant bien trop longtemps.
La façon dont il a vécu la fin de leur histoire Eddie n’en a jamais parlé à personne, véritablement. Ce ne sont pas des mots qu’il pose facilement, ni des moments qu’il se remémore avec plaisir mais aujourd’hui Alexis doit savoir, il veut lui en parler pour enfin s’en libérer. C’est une souffrance qu’il peut encore ressentir quand il replonge trop profondément dans ses souvenirs, une souffrance dont elle ne soupçonnait peut-être pas l’existence. Eddie n’a pas montré sa peine le jour où Alexis l’a quitté sans se retourner mais c’est pendant les semaines et les mois qui ont suivi qu’il a vraiment morflé, car lui dire que la vie après leur histoire a toujours été facile serait lui mentir. Il a mis du temps à s’en relever, à être heureux de nouveau et s’il n’était pas extrêmement fier il pourrait ajouter qu’elle lui a brisé le cœur au point de l’avoir rendu complètement hermétique à l’amour. Eddie a connu des jours sombres et l’avoue encore difficilement, s’il s’est aussitôt renfermé dans le boulot c’est parce que cette nouvelle solitude était pesante et qu’Alexis lui manquait beaucoup trop. Il s’est rendu compte du joyau qu’il avait quand il l’a perdu, un grand classique. Et à présent que les choses sont dites Eddie ne sait pas vraiment quelle réaction il espère susciter chez elle, il sait juste qu’il serait doublement déçu si elle n’en manifestait aucune. « Tu sais, je… je ne t’ai pas diabolisé pour le plaisir. » Enfin elle sort de son silence, et avec des mots qui tendraient presque à le rassurer. Eddie reste statique et ne la quitte pas des yeux pendant qu’elle amorce un lent déplacement vers lui, qu’il n’attendait pour ainsi dire pas du tout. Et que dire de cette main qu’elle dépose sur sa joue, dont le contact le fait frissonner.. Le temps semble s’arrêter. Il ferme les yeux puis exerce un très léger mouvement de recul, perturbé par cette proximité qu’il avait désespérément cherchée le soir où Alexis l’a quitté. Cette main qui ne l’a plus touché depuis quatre ans, cette main qu’il est incapable de repousser. Et ces mots qui ne l’aident vraiment pas à garder les idées claires : « Je devais trouver des raisons de te détester parce que sinon je n’aurais pas d’autre choix que de t’aimer, et… » Eddie rouvre ses yeux et capte aussitôt ceux d’Alexis dont une larme s’échappe, lui provoquant un pincement au cœur. Il déteste toujours autant la voir pleurer, surtout pour lui et s’il se focalise autant sur cette larme c’est peut-être aussi pour ne pas penser à ces mots qu’elle a prononcé et qui le travaillent de l’intérieur. « Et c’est pas ce qu’on veut, hein, Eddie ? » Il déglutit sans parvenir à défaire son regard du sien, son cœur s’affolant alors qu’il remue doucement la tête. « Non.. » il souffle d’une voix à peine audible, sa gorge en devenant presque douloureuse. Alexis ne doit surtout pas l’aimer, l’avoir fait par le passé l’a rendue malheureuse et il ne supporterait pas de lui faire encore du mal. La peur de la briser une deuxième fois le saisit et Eddie se sent mal, très mal face à une Alexis ne retenant officiellement plus ses larmes. « Je suis désolée d’avoir douté de toi… je m’excuse. » « Alexis.. » Il avait besoin d’entendre qu’elle ne pensait pas vraiment ce qu’elle disait, il comprend maintenant pourquoi elle s’était mis de telles idées en tête et ça l’attriste autant que ça le soulage. « Pas de larmes, s’il te plait. » il reprend dans un léger sourire tandis que sa main libre part chasser délicatement les larmes sur les joues d’Alexis, exactement comme il y a quatre ans. Un geste d’un grand naturel même si cette impression de ne réussir qu’à la faire pleurer le dépite, il en a mal au cœur. « Je ne t’en veux pas. » Non, il s’en sent incapable alors que quelques instants plus tôt ses allusions l'avaient profondément révolté. « Ce qui compte c’est que tu saches que je ne ferais jamais de mal à Clément. » Sa main continue de balayer ses larmes dans un mouvement lent et délicat pendant que ses yeux restent profondément ancrés dans les siens. « Ni à personne d’autre. Je suis toujours autant allergique à la violence, ça n’a pas changé. » Et c’est avec beaucoup de sérieux qu’il le dit, comme s’il cherchait encore à lui prouver quelque chose ou à lui montrer qu’une part de lui qu’elle appréciait à l’époque est intacte.
« Comment… comment ils s’appellent, tes chats ? » Cette question le sort de ses pensées et il retire doucement sa main après s’être assuré que ses larmes ne coulent plus. « Poby, Loopy et Missy. » Eddie parle toujours de ses chats avec le sourire et Alexis s’apprête à découvrir à quel point ces petites bêtes ont pris de l’importance dans sa vie. « Les deux premiers sont des mâles, la petite dernière une femelle. Les gens trouvent toujours ça bête que je les considère comme mes enfants, mais c’est le cas. » il avoue tendrement et sans honte. Est-ce qu’elle trouvera ça stupide elle aussi ? Il prend le risque et ne s’en formalisera pas, car s’il n’assumait pas Eddie n’en parlerait pas. « Leur présence m’a beaucoup aidé quand.. » Sa voix reste en suspens un instant tandis que ses yeux fuient à présent son regard azuré. « Je ne savais pas vraiment vers qui me tourner. » Il a côtoyé la solitude de près ces dernières années parce qu’Alexis n’était pas la seule absente, sa meilleure amie était déjà constamment en voyage et sa petite sœur effectuait encore ses études à l’étranger. Quant à ses camarades du groupe ils avaient leur vie avec laquelle Eddie osait rarement interférer, il a même longtemps préféré dealer avec sa peine seul plutôt que de la faire entendre autour de lui. S’il va beaucoup mieux c’est avant tout grâce à un long travail sur lui-même, qui n’aura pas été vain, et parce que ses nouvelles responsabilités de papa-maitre lui ont aussi permis d’en finir pour de bon avec l’ennui et empêché ainsi de trop ruminer le passé. Les chats ont beau être très indépendants les siens ne sont jamais les derniers pour demander de l’attention, et ce qu’il ne dit pas c’est à quel point ils sont gâtés avec lui, Eddie en étant totalement gaga. « Est-ce que.. tu vis toujours seule ? » C’est une autre question qu’il désirait lui poser, Alexis ayant seulement précisé vivre dans un studio à Fortitude Valley. Il n’en sait pas plus et de toute évidence ça l’intéresse, peut-être même un peu trop. « Ah.. Si tu avais un mouchoir j’avoue que je serais preneur. » Eddie laisse échapper un rire en réalisant que sa crêpe laissée à l’abandon lui a définitivement coulé sur les doigts, pour peu il en aurait même presque taché sa veste. « Tu as bien failli te retrouver avec de la pâte à tartiner sur les joues. » il ajoute dans un sourire amusé, une chance qu’il ait utilisé la bonne main pour essuyer ses larmes et ne les ait pas remplacées par des trainées de chocolat.
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| | | | (#)Ven 14 Jan 2022 - 12:09 | |
| Oh you're taking me down haunting my dreams ; I'm at the end of the world with you.
La colère qui t’animait en ce mois de décembre deux mille dix-sept, tu t’en souviens très bien. Tu te souviens même avoir élevé la voix, que dis-je, crié sur ton petit-ami de l’époque. La colère, dont je parle, était justifiée en son temps. Du moins selon toi. Cela faisait déjà plusieurs longues semaines -si ce n’est plus- qu’Eddie te négligeait au profit de ses entrainements de danse et, tu le soupçonnes, des sorties entre danseurs. Le réconfort après l’effort, hein ? Sauf que tu aurais aimé que le réconfort, ce soit plutôt venir te rejoindre et te câliner, que ce soit chez lui ou chez toi. Il faisait d’autres choix, et tu ne faisais pas partie des options, ou que très peu. Le pire, c’est que tu avais compris en ce fameux soir de décembre, qu’Eddie ne faisait même pas vraiment exprès. Ça aurait peut-être dû te rassurer, mais ça ne faisait que te mettre davantage en colère à ce moment-là. Comment n’avait-il pas pu se rendre compte du mal qu’il faisait ? Puis c’était toujours la même chose, le même cercle vicieux : ensuite, c’était toi-même que tu blâmais. Parce que tu n’avais rien dit avant. Parce que tu supportais en silence la négligence. Que, peut-être que si tu avais ouvert ta bouche plus tôt, votre couple serait sauvé. C’est sûrement l’erreur que tu as faite, de ton côté. Parce que rien n’est tout noir ni tout blanc, tout est en nuances de gris, et ça tu l’as appris en grandissant aussi. Parce qu’en deux mille dix-sept, tu avais certes vingt-deux ans, mais Eddie était ta toute première relation sérieuse et aujourd’hui, tu admets qu’il est fort possible que tu aies fait des erreurs, toi aussi. Bien plus difficile à admettre à voix haute, cela dit.
Alors quand t’y penses, quand ça te traverse l’esprit pour une raison que t’ignores, tu marmonnes en face de ta toile, en même temps que tu peins. Parce que oui, tu peins toujours, et visiblement ton interlocuteur est ravi de l’apprendre. Son seul regret étant le « gâchis » que tu en fais, selon lui, en gardant tes œuvres chez toi, les laissant prendre la poussière au lieu de les trimballer à droite à gauche pour les exposer et peut-être, -je dis bien peut-être-, les vendre. Ses paroles t’offusquent, mais au fond tu sais qu’il a raison, tu le sais depuis hier, tu le sais depuis des années. Que te manque-t-il pour te lancer ? Très bonne question. Une bonne dose de confiance en soi, déjà, c’est sûr et certain. Peut-être qu’en deux mille vingt-deux tu auras la résolution d’exposer davantage ton art ? Un élément t’y motive, en tout cas. « Je crois que je serais curieux de voir ton évolution. » Un sourire gêné s’esquisse sur tes lèvres alors que ce genre de phrase te met du baume au cœur. La vérité, c’est que tu serais ravie d’avoir l’opinion d’Eddie sur tes dernières toiles. Rien que pour se rappeler le bon vieux temps… rien que pour se donner l’illusion que rien n’a changé. Pourtant, c’est faux, n’est-ce pas ? Tout a changé, et je pèse mes mots. Tout a changé ce fameux soir où tu as décidé de laisser ton petit-ami sans regarder en arrière. Tout a changé parce que ça fait bien quatre ans que vous ne vous êtes pas croisés : pourtant le monde est petit, vous étiez tout les deux à Brisbane. Alors pourquoi le hasard a fait que vos retrouvailles aient lieu en pleine rue, entre une collecte de jouets et les crêpes dégoulinantes ? L’endroit où tu es le moins à l’aise.
Est-ce la rancœur ou l’amour qui s’exprime au moment où tu l’accuses à ton tour pour l’agression de Clément ? Les limites sont fines, floues, en tout cas tu sais que tu as tapé là où il fallait pour lui faire mal, à Eddie, parce que tu vois et entends sa réaction, qui te brise le cœur et te fait regretter tes accusations presque instantanément. Pour une raison que tu ignores, tu peux supporter beaucoup de choses, mais pas le voir déçu de toi. La colère, tu peux gérer, ce n’est qu’un sentiment souvent passager, éphémère : mais la déception… ça fait tout de suite plus mal au cœur. C’est beaucoup plus lourd à porter. Puis quand tu y réfléchis, évidemment que ça t’étonne grandement qu’Eddie soit impliqué dans une affaire de violence, quelle qu’elle soit. Quelque part, ça te rassure qu’il réagisse de manière aussi véhémente : tu n’as vu Eddie réagir d’une telle façon que rarement, et pour toi, c’est certainement gage de vérité. Aurais-tu cherché à le tester, sans forcément t’en rendre compte ? C’est quand même mesquin, non, ça ne te ressemble pas… Tu ne peux pas croire que cela ait été le cheminement de pensée dans ton esprit. Non, tu penses tout simplement que tu t’es laissée porter par les sentiments quand cette affaire a éclaté. D’une part, ta loyauté envers Clément t’a empêchée de remettre en cause ce qu’il pensait être vrai. D’autre part, ta rancœur envers Eddie rendait le terrain propice aux accusations faciles. Voilà, on trouve toujours des explications sensées quand on réfléchit ! En attendant, tu es contente que ton ex petit ami enchaine tout de même avec des nouvelles sur sa personne. Il a dû penser que si tu l’avais fait, il n’avait aucune raison de ne pas le faire, même s’il était dégoûté de tes accusations. Tu l’écoutes attentivement et apprendre qu’il est passé chorégraphe en plus d’être danseur t’emplit de joie… pour lui. Oui parce que toi, tu penses toujours qu’il en fait trop, qu’un jour il va regretter de s’être trop donné dans la danse, d’une manière ou d’une autre. Mais comme tu es civilisée et que tu veux surtout son bien, tu ne diras pas ça. Tu lui offres un grand sourire quand il parle de son progrès, ça suffit amplement. Puis il parle des trois chats qu’il a visiblement chez lui, détail qui t’attendrit sans aucun doute. Tu ne l’expliques pas, c’est juste comme ça. Et tu serais restée dans cet état attendri si monsieur n’avait pas ensuite placé dans la discussion le fait qu’il a aussi souffert après votre rupture.
Ce « détail » te fait baisser les yeux avant que tu prennes la parole, à ton tour, pour lui dire que tu ne l’avais pas diabolisé par pur plaisir. Que c’était simplement plus facile de faire ou dire des choses pour le détester, parce que sinon tu ne ressentirais que de l’amour pour Eddie, et que ça tu ne peux pas te le permettre. Caressant sa joue délicatement, tu cherches de l’approbation dans son regard, qu’il ne tarde pas à te donner. « Non… » Et quelque part, ce simple mot te brise. Parce que la grande romantique que tu es au fond aurait osé rêver qu’il te contredise et que vous finissiez par vous échanger un précieux baiser, là, au plein milieu du brouhaha de Brisbane. Qu’il veuille dire quelque chose ou pas, cette tournure des événements aurait été… sympathique ? Peut-on employer un mot si nonchalant ? Peu importe, tu mets ta petite déception de côté et ne peux t’empêcher de te mettre à pleurer lorsque tu t’excuses auprès d’Eddie d’avoir douté de lui. « Alexis… » L’entendre prononcer ton prénom d’un tel ton t’attriste encore plus. Ca diffère malheureusement beaucoup trop du Alexis ! enjoué qu’il t’adressait jadis quand il rentrait des entrainements de danse. Aujourd’hui tu n’entends plus que l’amer son du regret lorsqu’il le prononce. « Pas de larmes, s’il te plait. » Comment peut-il demander ça ? C’est beaucoup trop compliqué pour toi. Tu es capable d’être dure et froide, mais finalement pas avec Eddie. Pas après tout ce que vous avez partagé, traversé ensemble. Tu essaies cependant de répondre à sa demande en réduisant tes pleurs à l’état de sanglots. De toute façon, lui t’aide en essuyant les larmes qui coulent sur tes joues, comme il l’a fait il y a quatre ans… décidément, cette scène de retrouvailles est surréaliste. « Je ne t’en veux pas. » Voilà des paroles qui te font soupirer de soulagement, et même esquisser un sourire à travers les quelques larmes restantes. « Ce qui compte c’est que tu saches que je ne ferais jamais de mal à Clément. » Tu le sais aujourd’hui. Tu en es sûre désormais. Tu hoches la tête doucement en regardant le brun dans les yeux. Tu l’écoutes attentivement. « Ni à personne d’autre. Je suis toujours autant allergique à la violence, ça n’a pas changé. » Du tac au tac, tu prononces d’une voix douce les mots suivants : « Je sais, Eddie. » suivis d’un doux sourire. Tu es sûre de toi et ça fait du bien.
Le moment émotions étant (presque) passé, tu demandes à Eddie quels sont les prénoms de ses petits chats. En vérité tu ne sais pas s’ils sont petits ou grands, tu t’en fiches un peu, c’est juste l’image de ton ex petit ami avec trois chatons qui t’attendrit plus que jamais. « Poby, Loopy et Missy. » Sourire qui s’élargit, larmes qui se font déjà oubliées. « Les deux premiers sont des mâles, la petite dernière une femelle. Les gens trouvent toujours ça bête que je les considère comme mes enfants, mais c’est le cas. » Sourire qui se transforme en rire, ce rire que tout le monde apprécie tellement chez toi puisqu’il est plutôt rare. Tu ne te moques pas d’Eddie, non, son engagement envers ces petites créatures te rend juste profondément heureuse. « Moi je trouve ça très responsable ! » Ca lui fera sûrement plaisir de le savoir. Et puis tu es bien placée pour connaître le côté doux et attentionné de ton ex petit ami qui correspond parfaitement bien à l’adoption de petits chats. C’est là que tu le reconnais, pas dans une vulgaire histoire d’agression d’un ancien ami à lui. Eddie semble bien parti pour te parler de ses animaux de compagnie et tu le laisses faire parce que ça t’attendrit, parce que ça te fait plaisir de l’entendre parler de ça. « Leur présence m’a beaucoup aidé quand... » Le temps s’arrête, se suspend. Tu sais ce qu’il veut dire et tu l’encourages en souriant pour qu’il finisse sa phrase. « Je ne savais pas vraiment vers qui me tourner. » Il parle sûrement des suites de votre rupture et ça t’attriste. Lui aussi il a beaucoup souffert, alors… tu le savais, parce qu’il l’a mentionné auparavant, mais tu t’en rends de mieux en mieux compte au fur et à mesure qu’il place des remarques y faisant allusion par-ci par-là. « Je vois… » Tu ne peux faire qu’acquiescer. Remarque stupide, peut-être, mais tu te sens obligée, maladroitement, de la poser sur la table : « Je suis désolée que tu aies souffert. » C’est évident, mais tu n’as jamais vraiment eu l’occasion de lui dire : maintenant est le bon moment. Quant à Eddie, il semble réfléchir un court instant avant de te poser une question qui te fait sourire tristement. « Est-ce que.. tu vis toujours seule ? » Bon… un peu d’humour ne peut pas faire de mal, si ? « Non ! Je ne vis pas seule… » réponds-tu en laissant ton dernier mot en suspens. « Je vis avec mes peintures, voyons ! » termines-tu en riant encore une fois. Tu te dit que ça doit lui faire plaisir, à Eddie, de t’entendre rire. Il en était particulièrement friand il y a de ça quelques années… « Ah.. Si tu avais un mouchoir j’avoue que je serais preneur. » Ton rire s’intensifie alors que tu remarques toi aussi un peu trop tard que le contenu de la crêpe de ton interlocuteur s’est définitivement fait la malle entre ses doigts. Un mouchoir ? Tu dois bien avoir ça dans ton sac à dos, et effectivement, tu en as. Tu donnes directement le petit paquet à Eddie, qu’il puisse utiliser le nombre qu’il lui faudra. Tu le regardes s’essuyer les doigts en esquissant un sourire. « Tu as bien failli te retrouver avec de la pâte à tartiner sur les joues. » Tu rougis alors qu’il fait allusion à son geste de toute à l’heure, quand il essuyait tes larmes de tes joues. « Oui, c’est vrai. Heureusement, tu as utilisé l’autre main. » constates-tu en lâchant un autre petit rire. Finalement, ces retrouvailles se font de plus en plus légères, ce qui te rassure. Pendant qu’il finit de se nettoyer les mains, tu ancres de nouveau ton regard océan sur son visage puis plus particulièrement dans ses yeux à lui. « Et toi… à part tes jolis petits chats… tu vis seul ? » Yeux à présent baissés, parce que l’option que tu vas mentionner te reste un peu en travers de la gorge. « Ou… tu as trouvé quelqu’un ? » Il se peut bien que la réponse t’achève, mais vous en êtes là. |
| | | | (#)Mer 19 Jan 2022 - 19:20 | |
| We walked through the darkness, we walked in the sun We shared all our sorrows, we shared all our love You fell like an angel to me and you broke your wings Now you are a ghost from the past
Curieux de voir son évolution, à quoi pense-t-il au juste en le disant ? Il ne sait pas vraiment Eddie, ce doit être le fait de parler de tout ça qui le rend nostalgique et il se rappelle qu’à l’époque il aimait autant poser ses yeux de copain que sa sensibilité d’artiste sur les peintures d’Alexis. C’est tout un monde qu’elle lui ouvrait et à travers lequel il se laissait absorber, il n’y comprenait pas forcément tout mais il n’avait pas besoin de ça pour reconnaitre le talent de sa petite amie. La regarder peindre était parmi les choses qu’il préférait faire même si c’est une habitude qu’il a progressivement perdue, quand la danse a commencé à prendre trop de place et à lui faire détourner les yeux. Il réalise qu'il aimerait bien savoir ce qu’est devenue Alexis du point de vue de ses peintures, que c’est une case vide en lui qu’il voudrait peut-être bien combler. On pourrait se demander pourquoi il semble avoir bien vécu dans son ignorance pendant quatre ans et s’en préoccupe soudainement, mais en réalité Eddie s’est plus d’une fois demandé si la passion d’Alexis avait survécu au poids des années. Il avait, c’est vrai, cette petite crainte qu’elle abandonne, lui qui avait bien connu ses insécurités vis-à-vis de ses œuvres et qui n’avait pas réussi à la pousser suffisamment à s’affirmer comme artiste. C’est rassurant de savoir qu’elle n’a pas renoncé mais il faut croire que ça ne satisfait pas totalement sa curiosité, sinon il ne laisserait certainement pas entendre son envie de voir à quel point elle a pu évoluer. Alexis ne lui répond pas mais elle lui sourit, de quoi le laisser penser qu’elle n’est peut-être pas contre cette idée. Il ne sait même pas ce qu’il espère Eddie, qu’elle l’invite un jour dans son atelier ? Si c'est le cas il n'ose en tout cas pas le formuler de cette façon parce qu’il vient à peine de revenir dans sa vie et ne veut en rien s’imposer. Et puis ça ne doit plus être très naturel pour elle, autrefois il était son soutien numéro un et aujourd’hui ? La soutenir il le pourrait toujours parce qu’il a continué de croire en elle bien après leur rupture, mais ce n’est pas parce qu’il a gardé un réel intérêt pour ce qu’elle fait qu’Alexis est encore disposée à partager son art avec lui. Au fond de lui Eddie espère peut-être aussi continuer ce qu’il avait commencé des années plus tôt, et achever de la convaincre de se donner une chance de faire connaitre ses peintures. Il serait peut-être plus persuasif aujourd’hui avec la maturité qu’il a prise, mais il se dit qu’elle l’écouterait peut-être aussi un peu moins. Car que vaut encore son avis, quel poids a encore sa voix ? Il ne doit plus être très légitime dans ce rôle mais il n’aura pas mis longtemps à tenter de le retrouver comme s’il voulait finalement croire que pour ça, au moins, les choses n’ont pas changé.
Admettre la souffrance qui a été la sienne après son départ est un sacré pas en avant qu’il entreprend, parce que pendant ces quatre ans cette souffrance Eddie n’en parlait pas. Lui, meurtri par sa première rupture et incapable de refaire une place à quelqu’un dans sa vie à cause de ça ? Il n’en montrait pas grand-chose et le disait encore moins, car la seule personne à qui il aurait voulu le crier n’était plus là pour l’entendre. Il a longtemps espéré qu’Alexis souffrait elle aussi pour ne pas être le seul à se sentir aussi vide, un sentiment qu’il a comblé par la danse autant qu’il l’a pu et pas toujours très sainement. Certains enchaînent les conquêtes après une peine de cœur pour oublier l’être aimé, lui c’est sur un parquet de danse qu’il a évacué tout ça. Il a dansé avec ses tripes toutes les fois où son absence pesait trop lourd et ça a été souvent le cas, une intensité salvatrice mais aussi destructrice parce qu’à côté il a fait prendre tous les risques à son corps. Et c’est un peu tout le paradoxe autour d’Eddie, c’est à cause de la danse qu’il a perdu Alexis mais c’est dans la danse qu’il a trouvé refuge une fois son grand amour évaporé. Il en revient toujours à elle, cette passion première qui au moins ne l’abandonnera jamais. Il se rend compte qu’il a encore beaucoup d’amertume en lui et il comprend qu’elle aussi. Quand elle lui met l’agression de Clément sur le dos c’est parce que ça l’arrange bien de le voir comme le méchant de l’histoire, elle dit avoir besoin de ça pour ne pas ressentir autre chose et cet aveu le trouble autant que cette main sur sa joue. La voir pleurer brise quelque chose en lui comme ce fut le cas il y a quatre ans, cette vision Eddie ne la supporte pas et la tournure de ces retrouvailles l’attriste pour ces larmes qu’il voit couler et dont il se sent une fois de plus responsable. Des larmes qu'il se met à chasser lui-même, c’est un réflexe datant de leur relation qui lui revient et qu’il ne réfrène pas. D’un point de vue extérieur on ne se douterait peut-être pas qu’ils sont deux ex se revoyant après quatre ans compte tenu de cette proximité entre elle et lui et pourtant c’est le cas, il y a encore une heure Alexis n’était qu’un fantôme de son passé et à présent il semble la retrouver telle qu’il l’a perdue. Cette scène lui rappelle tristement leur séparation car il a l’impression d’y tenir le même rôle et ce parallèle fait mal, son unique lot de consolation étant finalement ces doutes complètement dissipés du côté d’Alexis quant à son implication dans l’agression. « Je sais, Eddie. » Il respire à nouveau en entendant ces mots, ultime confirmation qu’Alexis n’a pas oublié qui il est et qu’elle ne renie pas non plus le souvenir qu’elle a gardé de lui.
Eddie retrouve toute sa consistance au moment de parler de ses chats, le lancer sur le sujet étant toujours un très bon moyen de l’adoucir parce qu’il est une sorte de papa poule pour eux. Ses chats sont aussi ses enfants, il a beau avoir récolté beaucoup de commentaires sur cette façon de les nommer il n’a en ce qui le concerne jamais trouvé que c’était incongru et Alexis n’est pas de cet avis, elle non plus. « Moi je trouve ça très responsable ! » C’est plaisant à entendre après le rire qu’elle a manifesté et qui aurait très bien pu signifier autre chose, après quatre ans Eddie n’anticipe plus aussi bien ses réactions mais son ouverture d’esprit est intacte, le voilà rassuré. « C’est peut-être le seul rôle de père que j’endosserai dans ma vie. » il remarque dans un léger sourire, Alexis n’ignorant pas que les enfants, les vrais, n’ont jamais tellement été sa tasse de thé. Il ne pourrait pas dire s’il en aura un jour, il sait juste qu’il a eu la peur de sa vie cette année quand il a bien cru devenir père pour de vrai mais ça il le garde pour lui. Avouer que la présence de ses chats l’a aidé à vaincre sa solitude ces dernières années n’est pas simple, c’est une autre vérité un peu compliquée à exprimer mais c’est assez libérateur une fois que c’est dit. « Je vois… » Son regard croise celui d’Alexis avec une certaine appréhension parce qu’il redoute un peu sa réaction après ça, sans qu’il ne sache vraiment pourquoi. « Je suis désolée que tu aies souffert. » Lui aussi à vrai dire trouve ça plutôt désolant mais il parait qu’il ne peut s’en prendre qu’à lui-même d’avoir sombré de cette façon, après l’avoir faite souffrir c’était à son tour de trinquer. « C’est comme ça. » il réplique dans un bref haussement d’épaules, une pointe d’amertume se devinant dans sa voix tandis que son regard se détourne soigneusement du sien. Et Alexis dans tout ça, c’est vrai qu’il se demande si comme lui elle peut compter sur une présence animale ou bien humaine au quotidien, même si la deuxième option le surprendrait un peu plus la connaissant. « Non ! Je ne vis pas seule… » « Ah ? » Eddie relève complètement la tête, cette réponse n’étant pas franchement celle qu’il s’attendait à recevoir. « Je vis avec mes peintures, voyons ! » Oh. Il doit avoir l’air bête à y avoir cru le temps d’un instant mais il est parvenu à la faire rire, alors ça en valait quand même le coup. « Bien sûr, j’aurais dû y penser. » il commente d’un air amusé puis ajoute « Ce rire m’avait manqué. » avant de se rendre compte qu’il ne comptait pas forcément formuler cette deuxième partie à haute voix. Mais c’est dit et ce rire fait du bien à entendre car ses larmes semblent à présent bien loin. Eddie préfère tellement la voir comme ça, il se réjouit d’avoir au moins réussi à lui décrocher un rire tout en légèreté lors de ces retrouvailles car les précédents étaient plutôt nerveux. Elle lui remet un paquet de mouchoirs lorsqu’il en sollicite un auprès d’elle afin d’essuyer le chocolat sur ses mains, car sa crêpe a de toute évidence montré des signes d’impatience durant cet échange. « Oui, c’est vrai. Heureusement, tu as utilisé l’autre main. » Il lui accorde un merci silencieux dans un sourire avant de nettoyer cette petite catastrophe, et peut s’estimer heureux de n’avoir taché rien ni personne dans cette histoire. « Et toi… à part tes jolis petits chats… tu vis seul ? » Cette question arrive à le surprendre alors qu’Alexis ne fait que lui retourner la sienne, mais peut-être aussi qu’il redoute de devoir y répondre ici, et maintenant. « Ou… tu as trouvé quelqu’un ? » Rectification : cette question le met bien plus en difficulté que la précédente, parce qu’il a été jusqu’ici incapable de lui avouer qu’il avait retrouvé quelqu’un. Est-ce une vérité qu’il lui doit ? Il n’en sait rien. La question ne se posait pas avant ça mais à présent c’est le cas et il suppose qu'il se doit d'être honnête, que c'est ce qu'elle attend de lui. Il en a fait du chemin Eddie, son cœur n'est officiellement plus à prendre car une femme est venue y combler il y a quelques mois le vide qu’Alexis avait laissé quatre ans plus tôt, et ça il n'a sans doute pas le droit de le lui cacher. « J’ai vécu seul avec mes chats pendant longtemps, plus de trois ans en fait. » il commence par annoncer, jugeant important de souligner que si sa situation a effectivement évolué c’est très récent, parce qu’il ne voudrait pas qu’elle pense que la souffrance évoquée plus tôt n’a en fait jamais existé. Il a été sincère jusqu’ici et va l’être à nouveau, son regard s’interdisant de fuir celui d’Alexis tandis qu’il poursuit. « Aujourd’hui j’ai quelqu’un oui, mais.. je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur endroit pour en parler. » La mettre à jour sur sa vie amoureuse est déjà gênant mais le faire ici l’est d’autant plus, ce n’est tout simplement pas une discussion qu’Eddie souhaite avoir devant une crêperie. Il préfère en tout cas qu’elle l’apprenne de lui plutôt que de Clément, avec qui il est enfin réconcilié parce que c’est le genre de choses qu’elle mérite d’entendre de sa voix, c’est en tout cas ce qu’il pense. « Je devrais peut-être y aller Alexis. » Il est possible qu'il donne l’impression de fuir comme un lâche mais Eddie a surtout besoin de digérer ces retrouvailles, ils ont encore beaucoup de choses à se dire et à s’apprendre mais il considère avoir eu son lot d’émotions fortes pour aujourd’hui et suppose qu’il en va de même, aussi, pour elle. « On pourrait en reparler une autre fois, enfin.. si ça te dit. » Sa voix est un peu hésitante mais il lui propose bel et bien de se revoir, car maintenant qu’il l’a retrouvée Eddie aimerait notamment s’assurer qu’elle va aussi bien qu’elle le dit. Il ne veut étrangement pas penser que ces retrouvailles pourraient ne mener à rien, il faut croire que ça le décevrait trop. « J’ai toujours le même numéro mais je ne sais pas si tu l’as gardé. » il glisse d’un air entendu et n’hésitera pas à le lui redonner s’il s’avère qu’Alexis n’en a pas gardé la moindre trace, même si la première chose dont il souhaite s’assurer est évidemment qu’elle est intéressée par le fait de rester en contact. Si ce n’est pas le cas il repartira d’où il vient et la laissera tranquille, car ne pas vouloir donner suite est son droit et il respectera ça, même s'il ne pourra sans doute pas s'empêcher de trouver ça dommage.
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| | | | | | | | (aleddie #2) my heart is a haunted house |
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