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 (cary) all these scars are somehow like a tattoo

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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyMer 29 Déc 2021 - 20:40


☾ all these scars are somehow like a tattoo
I'll never cry because I know that it'll never change. I'll stay standing and endure it in an unknown place. There will be many times I'll almost fall, but alone, I reach out my hand, alone, I stand back up.
@LILY KEEGAN ☆ CARL FLANAGAN


Rien ne va et tout l’agace alors qu’il n’a même pas encore pris le chemin du café, de quoi l’amener à partir travailler à reculons aujourd’hui plus que n’importe quel autre jour. Le simple fait de ne pas retrouver les chaussettes assorties à sa veste qu’il tenait à tout prix à mettre manque déjà de le faire pleurer, Carl ose même à peine sortir de sa chambre par crainte de croiser Mason et de ne pas supporter ce qu’il pourrait encore lui dire. Oui c’est bien lui qui a fait tomber son téléphone la nuit dernière et probablement réveillé tout le monde en sursaut, et non il ne l'a pas fait exprès. C’est qu’il a deux mains gauches Carl quand il est sur les nerfs, ses réflexes déjà très pauvres en temps normal l’abandonnent et dans tout ça il peut quand même s’estimer heureux de ne pas avoir ruiné son cellulaire car ç’aurait vraiment été la goutte de trop. Il n’a aucune envie de mettre le nez dehors et qui plus est avec un tel soleil, ça ne lui dit vraiment rien et pourtant il n’a pas le choix, s’il veut garder son boulot il a même tout intérêt à s’activer car si quelqu’un ne peut pas trop se permettre d’arriver en retard au café c’est bien lui. Il n’y est pas très bien vu Carl, embaucher un gars comme lui avec les casseroles qu’il se trimbale entraine forcément son lot de conséquences que Matt n’avait peut-être pas bien mesurées. Il est le premier à vouloir se faire oublier mais il n’a rien facilité en restant en Australie, il le sait. Et tout ça pour quoi ? Pour que son père lui claque à chaque fois la porte au nez, car il n’est définitivement pas un fils que l’on peut assumer et dont on rêve de parler autour de soi. Non Carl c’est plutôt le gamin que l’on cache, à sa nouvelle femme comme à ses nouveaux enfants, qu’il espère quand même pouvoir rencontrer un jour même si son père semble vraiment décidé à le tenir à l’écart de tout ça. Et dire qu’il pensait gagner son attention en allant faire le clown à la télé, pour qu’au final la situation devienne dix fois plus compliquée que ce qu’elle était avant qu’il s'aventure là-dedans. Il a vraiment tout faux Carl, hier encore il a fallu qu’il se rende chez son père pour une énième tentative de dialogue mais qu’est-ce qu’il croyait, qu’il allait avoir Owen à l’usure ? C’est bien mal connaitre ce dernier et le jour où il comprendra que lui laisser du temps ne signifie pas se présenter à sa porte toutes les deux semaines il progressera, déjà.

C’est en trombe qu’il quitte la maison en profitant d’un moment où la voie est libre pour ne pas risquer de faire retomber sa mauvaise humeur sur Talia ou Maya, qui ne méritent clairement pas ça. Il ne veut pas parler de ce qui le chagrine, il ne veut pas mettre de mots sur tout ça parce qu’il n’est même pas sûr que quiconque puisse le comprendre. Il ne pourrait pas évoquer le rejet de son père sans parler de ce que ce dernier lui reproche, autant dire qu’il est un peu forcé de garder tout ça pour lui parce qu’il n’est pas question de se trahir auprès de Talia qui ne connait pas son honteux passé. Le jour où elle l’apprendra elle le mettra certainement dehors elle aussi alors qu'il ne pourrait vraiment rien arriver de pire au bonhomme. Il se sent bien chez et avec elle, c’est parce qu’elle ne sait pas tout de lui que Carl vit à peu près sereinement jusqu’ici et c’est au moins un petit lot de consolidation dans un quotidien qui ne file jamais droit et où le jugement des autres l'attend à chaque coin de rue. Si seulement sa patronne pouvait le regarder normalement elle aussi, il appréhenderait beaucoup moins ses venues au café. Ce n'est pas sa journée, il le savait avant d'arriver et c'est rapidement confirmé. Un client décide de se montrer particulièrement pénible le jour où il n'a pas du tout la patience et la résistance pour gérer ça, et c'est comme si quelqu'un là-haut cherchait à alourdir son fardeau. Peut-être bien qu’il s’est trompé et lui a apporté le mauvais café mais est-ce une raison pour lui parler aussi mal ? L’homme ne semble pas vouloir en rester là et face à lui Carl se contient autant qu’il peut, ses mains tremblantes démontrent tout le mal qu’il se donne pour ne pas craquer ici, devant tout le monde comme un faible. Il voudrait juste souffler Carl, il ne trouve pas normal de se faire enguirlander de la sorte pour un pauvre café mais il tient bon, il essaie tout du moins. Et alors qu’il parait enfin libre d’aller rectifier son erreur voilà que le plateau entre ses mains lui échappe, c'est même à se demander s'il le tenait réellement. Le café est à présent répandu sur le sol et le client rouspète de plus belle, les choses pourraient difficilement être pires et pourtant le bonhomme n’est pas au bout de ses peines. C’est d’un bond qu’il se redresse en réalisant que Lily veille à un mètre de là, il ne sait pas ce qu’elle peut penser à cet instant mais il doute que ce soit beaucoup de bien de lui. « Je.. je vais ramasser. » il balbutie en rassemblant son plateau et la tasse miraculeusement intacte, avant de courir chercher de quoi éponger tout ce café au sol. Du beau gâchis, il n’en est vraiment pas fier. « Désolé Lily.. j’ai l’impression d’avoir les mains trouées aujourd’hui. » Il a toujours été un garçon maladroit mais c’est la première fois qu’il fait de tels dégâts ici, ce qui ne risque pas d’arranger franchement ses affaires. Carl continue d’éponger tout en sentant Lily s’approcher dans son dos, et à cet instant difficile de dire s’il s’adresse à elle ou bien à lui-même tandis qu’il pousse un long soupir. « Je commence à avoir mal au crâne en plus, c’est vraiment pas un bon jour. » Parce qu’il y a aussi cette migraine qui s’annonce et contre laquelle il sait d’avance qu’il ne peut rien, ça commence par des troubles visuels et ça se termine par une irrépressible envie de se taper la tête contre un mur. Il connait Carl, il les enchaine depuis quatre ans. « J’crois que j’aurais mieux fait de pas me lever en fait, tout va de travers en ce moment de toute façon. » À nouveau sa voix flotte sans qu’on sache précisément à qui ces mots se destinent, mais ce ne serait pas la première fois que le bonhomme parle tout seul. « Pardon. » il finit par souffler en se relevant avant de s’éclipser dans les cuisines une fois son œuvre nettoyée. Il tente de fuir une confrontation qu’il n’est pas sûr de pouvoir endosser aujourd’hui, persuadé que Lily va lui passer un savon parce que c’est tout ce qu’il mérite. Sauf qu’il ne peut pas entendre ça Carl, il préfère encore qu’elle le vire sur le champ plutôt que de connaitre ses pensées le concernant là tout de suite. Les larmes lui montent aux yeux mais il s’interdit de les lâcher comme ça, refusant d’être un pleurnichard entre ces murs où on lui associe déjà beaucoup trop de défauts.



Dernière édition par Carl Flanagan le Sam 29 Oct 2022 - 19:24, édité 2 fois
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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyMar 11 Jan 2022 - 19:24

Ce matin encore, le résultat du test de grossesse est revenu négatif. Elle ne sait de toute façon pas à quoi d’autre elle pouvait bien s’attendre, Lily: elle ne présente aucun signe de grossesse. Tout ce dont elle se contente désormais, c’est de prier pour qu’un jour le résultat soit différent. Pour autant, plus personne là-haut ne semble vouloir l’écouter: par deux fois elle a eu sa chance d’enfanter et par deux fois elle n’a pas réussi à mener ses grossesses à terme. Cela doit bien vouloir dire quelque chose, au fond, mais la jeune femme est trop bornée pour abandonner l’idée de fonder sa propre famille à son tour et rien ni personne, pas même la disparition prématurée de son mari, ne sauraient l’arrêter. C’est ainsi qu’elle retrouve une robe longue et enfile son plus beau masque de sourire pour se rendre au Death Before Decaf’, profitant ainsi de son jour de repos à l’Association Beauregard pour s’assurer que les garçons ne mettent pas le feu au café bar de son mari. Bien qu’elle ne puisse pas consacrer autant de temps qu’elle le voudrait à l’établissement, elle continue de garder un œil dessus et n’hésite pas à rappeler, lorsque le besoin se fait ressentir, qu’elle est désormais la seule et unique patronne des lieux. En somme, tout avis divergeant au sien est dans le tort.

Postée sur une table quelque peu en retrait, c’est du coin de l’oeil que la jeune femme continue d’observer Carl autant que Deklan, soucieuse que chacun fasse son travail aussi bien qu’il le peut. Le DBD n’est pas son œuvre mais c’est justement pour la mémoire de Matt qu’elle continue de donner autant d’énergie à la tâche tout en s’assurant qu’il en soit de même pour tous les employés. Sous sa garde, le bar n’a pas le droit de fermer ses portes, elle ne le tolérerait pas. Cela signifie, par extension, que les erreurs ne sont pas tolérées, tout comme la médiocrité ne l’est pas non plus. Les employés embauchés par Matt n’ont pas été remerciés par pure générosité de la part de la jeune femme mais cela ne l’empêche pas d’avoir un avis critique à leur sujet l’immense majorité du temps. Paradoxalement, aujourd’hui fait exception à la règle, même lorsque sous ses grands yeux bleus Carl se confond en excuses face à un client mécontent, jusqu’à en venir à faire tomber son plateau au sol. Dans une expiration silencieuse, Lily abandonne sa paperasse pour calmer les choses entre les deux hommes et donner raison à l’adage expliquant que le client est roi - adage qu’elle déteste au plus haut point, soit dit en passant. « Je.. je vais ramasser. » Le garçon murmure en même temps que la brune vérifie qu’il n’a rien cassé, non pas parce qu’elle craint de perdre une vulgaire tasse mais bien parce qu’elle ne voudrait pas qu’il en vienne à se couper. Carl est le plus jeune de l’équipe et quiconque pourrait s’en rendre compte rien qu’en regardant ses traits enfantins et son attitude qui l’est tout autant. Beaucoup diraient qu’à vingt et un ans il a déjà pourtant un pied dans le monde adulte mais Lily refuse de le lui concéder. Il n’est qu’un enfant. « Désolé Lily.. j’ai l’impression d’avoir les mains trouées aujourd’hui. » Ses mots sont bas mais elle tend assez l’oreille pour les entendre, bien plus concernée par le garçon que le client. Sans lui répondre pour le moment, elle passe une main contre son épaule pour le rassurer, avant de finalement reporter son attention sur l’homme mécontent. Armée de son plus beau sourire, c’est ainsi qu’elle lui demande ce qu’il avait initialement commandé, avant de lui assurer qu’elle s’en occupe désormais personnellement et que la maison offre tout. A vrai dire, n’importe quel autre geste de sa part n’aurait sûrement pas été jugé suffisant et c’est bien dans des instants tels que celui-ci, forcée de ployer le genou face à un parfait inconnu, qu’elle se rend compte d’à quel point elle déteste ce métier. « Je commence à avoir mal au crâne en plus, c’est vraiment pas un bon jour. » Sur ça, au moins, ils peuvent aisément tomber d’accord aujourd’hui: ce n’est pas un bon jour mais chacun fait de son mieux. Carl a simplement du mal à faire semblant, mais c’est une chose qui s’apprend. « J’crois que j’aurais mieux fait de pas me lever en fait, tout va de travers en ce moment de toute façon. » Le garçon semble parler seul, Lily couvre assez sa voix pour que le client ne l’entende pas et ne risque pas de lui faire la moindre remarque. « Pardon. » Elle allait lui proposer de prendre une pause, sans aucun doute touchée par sa détresse, mais il s’éclipse bien trop vite pour qu’elle ait le temps d’ajouter quoi que ce soit. Le client lui demande trop de temps et d’énergie pour qu’elle puisse pleinement s’occuper de Carl comme elle le voudrait, raison pour laquelle elle finit par lui accorder une entière minute de son attention pour mieux le remercier d’un grand sourire et finir par retrouver le serveur en cuisine.

Il semble encore largement bouleversé par les événements, au point où Lily en vient à se demander si elle n’a pas raté une partie de la scène ou d’autres remarques de la part de l’inconnu. A cette heure-ci de la journée, au moins, il peut apprécier le calme des cuisines pour reprendre son souffle et ses esprits à son rythme. Ne voulant pas le troubler, la jeune femme s’avance donc doucement, faisant connaître sa présence par une simple toux, fausse au possible. “Carl ?” Non pas qu’elle doute de l’identité du jeune homme, elle cherche simplement à capter son attention sans le brusquer. “Il s’est passé quelque chose ? Il t’a dit quoi ?” Ils n’ont jamais été proches, ils n’ont jamais su s’entendre comme Carl pouvait facilement rigoler avec Matt, mais pourtant elle ressent le besoin de prendre une place qui ne sera jamais la sienne: il n’est qu’un enfant, il a besoin d’être protégé. Il a besoin de quelqu’un sur qui s’appuyer, quelqu’un qui puisse le défendre, et quand bien même elle ne le ferait jamais frontalement - besoin de garder son image intacte oblige -, elle serait pourtant la première à verser Dieu sait quel poison dans le prochain café offert par la maison. Pour le moment encore, elle reste à quelques pas de lui, ses grands yeux clairs l’observant avec attention, l’expression empathique de son visage ayant pour une fois tout de sincère. “Je ne viens pas te faire de reproches.” qu’elle précise enfin, ne voulant pas qu’il doute de ses intentions.
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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyJeu 20 Jan 2022 - 20:07


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@LILY KEEGAN ☆ CARL FLANAGAN


Il déteste le parallèle que fait son cerveau avec ces images qui lui reviennent, en flashs, devant ce client qui hausse un peu le ton. Carl croirait entendre Hector lorsque celui-ci avait pour habitude de pointer du doigt sa maladresse et l’effet est immédiat : le garçon se crispe de tout son long et se retrouve incapable d’affronter le regard de cet homme mécontent de lui, qui n’est pas son beau-père mais qui le lui rappelle beaucoup trop. Ce n’est qu’une erreur de commande au départ, il aurait pu s’en sortir mais il a fallu qu’il fasse aussi tomber ce fichu plateau, et prouve à tout le monde qu’il n’est vraiment bon à rien. C’est comme ça que Carl le ressent, comme une preuve de plus qu’on ne peut rien attendre de lui car quoi qu’il fasse il n’est jamais à la hauteur. Ce qu’on lui demande n’est pourtant pas bien compliqué et ce boulot il le connait bien, on ne peut pas dire qu’il soit nouveau ici. Ses marques il est censé les avoir prises depuis longtemps et pourtant certains jours Carl est un empoté qui ferait certainement honte à Matt s’il était encore là, c’est en tout cas ce qu’il se dit. Et Lily, qu’en pense-t-elle ? Sur le moment il n’est pas certain de tenir à le savoir parce que l’imaginer guetter la scène tout près de là le terrorise déjà, il aurait vraiment tout donné pour qu’elle n’y assiste pas car c’est un regard de plus qui pèse beaucoup trop lourd ajouté à celui du client. Il se soucie même bien plus de ce que Lily peut penser de lui et pas seulement parce qu’elle est sa patronne, même si c’est évident qu’il ne tremblerait pas comme une feuille s’il ne pensait pas risquer sa place avec toutes les bêtises qu’il peut faire. Elle était dure avec lui au départ et Carl s’était juré de faire des efforts pour qu’elle le tolère un peu plus, ce qui semblait être le cas ces derniers mois après la disparition de Matt. Il a senti les choses changer et venait travailler un peu plus apaisé, seulement les jours comme celui-ci Carl a l’impression de piétiner ses efforts et de retourner à la case départ, comme s’il faisait toujours dix pas en arrière après en avoir fait un ou deux en avant. Le garçon est une catastrophe ambulante, depuis toujours, mais il y a des lieux où il peut moins se le permettre et ce café n’a sûrement pas besoin d’un fléau dans son genre. La main de Lily déposée sur son épaule n’y fait rien, la tension redescendant et le client calmé non plus. Carl opte pour la fuite et part se cacher comme il sait si bien le faire, une réaction pouvant sembler excessive mais finalement à l’image de celles qu’on lui connait la plupart du temps. S’il doit craquer il préfère que ce soit loin des clients qui en ont suffisamment vu aujourd’hui, et il refuse de faire un peu plus honte à Lily après le désordre qu’il a déjà causé.

C’est drôle, Carl en oublie son début de migraine une fois soustrait à la vue de tout ce petit monde et parfois c’est à se demander s’il n’utilise pas ses crises comme excuse, pour se tirer d’une situation compromettante ou pour justifier le fait d’être un peu à côté de ses baskets. À présent réfugié dans les cuisines le bonhomme s’adosse contre un mur et se laisse doucement glisser le long de celui-ci, se retrouvant assis à même le sol et profitant du calme y régnant pour appliquer ses exercices de respiration censés lui permettre de s’ancrer de nouveau dans ce monde qu’il a un peu quitté, quelques minutes plus tôt, en même temps qu’il a perdu ses moyens. C’est qu’il est facilement déphasé Carl, quand les émotions s’emparent trop brutalement de lui il n’est pas rare qu’il se perde et doive retrouver un point d’ancrage. Se concentrer sur sa respiration lui permet de reprendre doucement conscience de son corps mais il reste secoué par cet échange avec le client, perçu par le garçon comme bien plus violent qu’il ne l’était réellement puisque Carl a une sensibilité bien à lui qui peut être facilement ébranlée. Lily semble l’avoir compris car c’est avec une grande précaution qu’elle le rejoint, et s’annonce pour ne pas lui infliger un choc de plus. « Carl ? » Le garçon relève d’abord la tête puis réalise la position qui est la sienne, il se redresse alors aussitôt sur ses deux jambes pour que Lily ne le voit surtout pas piteusement échoué au sol. « Il s’est passé quelque chose ? Il t’a dit quoi ? » Oui, il s’est passé qu’il a fait n’importe quoi, comme d’habitude. Carl soupire lourdement, cet accrochage avec le client n’est vieux que de quelques minutes mais il a l’impression de devoir profondément fouiller en lui pour en restituer le contenu. « Que j’ai qu’à changer de boulot si j’suis même pas capable de prendre correctement une commande. » On pourrait être tenté de lui donner raison lorsque Carl peine autant à rester professionnel, ce qui est forcément un problème quand la satisfaction du client est censée primer sur tout le reste - et notamment sur ses états d’âme à lui. « Je sais pas où j’avais la tête, j’ai pas réalisé mon erreur et même si je me suis excusé il a rien voulu savoir. En plus il a un peu crié et ça, ça m’a fait peur alors.. j’ai lâché le plateau. » La tête il ne l’avait pas là où il fallait, c’est la seule chose de sûre. Il n’a pas dû comprendre ce que le client désirait parce qu’il ne devait l’écouter que d’une oreille, classique et si peu étonnant venant de lui. « Je ne viens pas te faire de reproches. » Les mots de Lily combinés à cette distance qu’elle semble maintenir pour ne pas le brusquer traduisent une incroyable douceur, Carl a même du mal à croire qu’elle ne soit pas en train de lui passer un savon avec le cirque qu’il a encore fait. Il s'était attendu à autre chose et s'il a fui c'est aussi par crainte d'avoir droit à des remontrances qu'il ne pourrait pas du tout encaisser. « Ah bon ? » il questionne d’un air désorienté tout en ouvrant de grands yeux. « Tu pourrais pourtant, je sais que je les mérite et le client là il.. il a peut-être bien raison. » Avec le peu d'estime qu’il a de lui-même Carl ne risque à vrai dire pas de lui donner tellement tort, et pourtant ça le dévasterait de perdre ce boulot parce que Matt et Lily ont été les premiers à lui donner sa chance quand il s’est retrouvé dans la tourmente, et que les portes lui étaient claquées à la figure les unes après les autres. « J’ai du mal à me concentrer en ce moment mais j’te jure que je ferai plus attention Lily. Et désolé si j’ai fait perdre de l’argent au café.. » C’est étrangement ce qui l’inquiète le plus, les conséquences pour Lily et sa trésorerie alors qu’on parle ici d’une commande pas bien coûteuse, le plus embêtant étant finalement que le client en question ne reviendra peut-être pas. « Tu.. veux que je reste plus tard ce soir pour me rattraper ? Je peux même faire le ménage, ou rembourser la commande offerte au client de ma poche, c’est pas un souci. » Carl ferait n’importe quoi pour faire oublier sa faute, au point qu'il se tient presque déjà prêt à dégainer son portefeuille ou à attraper le premier balai qu'il trouvera.

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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyMar 25 Jan 2022 - 21:29

A pas de loup, la jeune femme se fraie un chemin jusque dans l’arrière salle du bar après avoir annoncé à Deklan qu’elle s’occuperait de Carl. A en juger par le regard étonné de ce dernier, il est sûrement prêt à appeler la police et/ou une ambulance à tout instant, de crainte qu’un crime soit commis. Pour autant, les pensées de la jeune femme se trouvent bien loin de ce qu’il pourrait penser, preuve en est qu’elle fait tout son possible pour ne pas rendre le garçon un peu plus mal à l’aise encore. Si Lily n’arrive pas pleinement à comprendre son mode de pensée, elle sait au moins qu’il est sensible et à fleur de peau et qu’un telle interaction avec un client a largement dû le chambouler. Preuve en est, il est parti se cacher là où personne ne pourrait rien lui reprocher, là où il pourrait retrouver son souffle en paix. A en juger par la respiration contrôlée qu’elle entend au travers du silence des lieux, c’est justement ce qu’il est en train de faire et une entreprise dans laquelle elle se veut désolée de le déranger, l’appelant par son prénom en premier lieu pour ne pas risquer de le surprendre. Le garçon se relève rapidement, attitude sur laquelle la jeune femme se garde bien de poser le moindre commentaire alors qu’elle mime ne rien avoir vu, enchaînant déjà sur des questions ne le touchant pas personnellement. Ainsi, elle tente de se montrer le moins invasive possible, tentant pourtant toujours de l’aider lui. « Que j’ai qu’à changer de boulot si j’suis même pas capable de prendre correctement une commande. » sont les mots que le client lui aurait (a) balancé à la figure, ce qui suffit à la Keegan pour déjà le maudire sur plusieurs générations. Si elle ne tenait pas autant à ce que ce bar préserve sa réputation, elle n’aurait pas attendu d’avoir des explications avec Carl pour renvoyer le client impoli manu militari. Pourtant, cet endroit est l'œuvre de Matt et non la sienne, alors elle se doit de le préserver. « Je sais pas où j’avais la tête, j’ai pas réalisé mon erreur et même si je me suis excusé il a rien voulu savoir. En plus il a un peu crié et ça, ça m’a fait peur alors.. j’ai lâché le plateau. » - “Les clients ont tendance à penser que leur commande doit être le centre de notre vie.” Elle explique, ne voulant pas se murer dans un certain silence et laisser au garçon plus de temps pour se repasser en esprit les récents événements et la façon dont la situation lui a échappée. Le passé ne saurait être changé, peu importe à quel point on le souhaite parfois ardemment. Elle le sait d’expérience. “Ils sont peut-être les rois en théorie, mais dans la réalité tu n’as pas à prendre leurs remarques aux pieds de la lettre.” Sa voix se veut aussi douce que possible alors qu’elle ne fait que le conseiller et non lui donner des ordres: tout un état d’esprit ne saurait être changé d’un claquement de doigts, c’est un long processus. Il apprendra sûrement en grandissant, ce n’est pas parce qu’il est majeur qu’il est pleinement adulte pour autant. La nuance est à prendre en compte.

Lorsqu’elle annonce de vive voix ne pas vouloir lui faire le moindre reproche, l’attitude désinvolte de Carl a tout pour la prendre de court et l’émouvoir bien plus qu’elle ne le devrait. « Ah bon ? » Il ressemble à un enfant, ses grands yeux clairs relevés en sa direction. Lily ne sait que lui sourire tendrement, chaleureusement. « Tu pourrais pourtant, je sais que je les mérite et le client là il.. il a peut-être bien raison. » Non, bien sûr que non. Lily pourrait le faire taire à tout jamais si elle le voulait et ainsi, au moins, Carl ne craindrait plus le jugement de cet inconnu qui vient à lui seul de faire trembler les fondations du jeune homme. “Pense à tous les clients qui ont été très heureux de ton travail. Celui-ci ne représente qu’une infime proportion.” Il est maladroit, c’est vrai, mais personne ne peut nier son envie de bien faire. Ce qui n’a pas été un argument auprès de Lily pendant bien longtemps en est finalement devenu un de poids, sa vision des choses ayant changée du tout au tout depuis la disparition soudaine de Matt. « J’ai du mal à me concentrer en ce moment mais j’te jure que je ferai plus attention Lily. Et désolé si j’ai fait perdre de l’argent au café.. » Ses cheveux volent doucement alors qu’elle bouge la tête de droite à gauche, lui signifiant par la même occasion qu’il n’y a rien dont il devrait se sentir coupable. “Ce n’est pas avec un café de perdu que tu risques de faire couler le bar, tu sais.” Elle assure donc dans un nouveau sourire, tentant d’en faire fleurir un sur son visage en retour en utilisant une touche d’humour. La perte se monte sûrement à un euro, deux tout au plus, alors il ne devrait pas avoir à s’en faire le moins du monde. Pourtant, le brun ne semble pas accepter les paroles de la trentenaire aussi facilement alors qu’il insiste pour réparer ses torts de toutes les façons possibles, sans nul doute exagérées à en juger par les pertes de l’entreprise. « Tu.. veux que je reste plus tard ce soir pour me rattraper ? Je peux même faire le ménage, ou rembourser la commande offerte au client de ma poche, c’est pas un souci. » - “Tu as dit que tu avais du mal à te concentrer, c’est à cause de quelque chose en particulier ?” Elle ne connaît rien de lui si ce ne sont ses heures de travail et Lily a l’intime conviction qu’elle devrait inverse la balance, apprendre à le connaître pour avoir davantage de raisons de l’apprécier sincèrement et ne plus le considérer comme un simple employé. Elle a envie de découvrir la personne qu’il est derrière cette carapace fragile, et il est hors de question qu’il fasse la moindre heure supplémentaire pour réparer une si vulgaire et futile erreur. “Tu n’as pas besoin de faire quoi que ce soit, c’est déjà oublié. Je suis certaine que le client sera déjà reparti quand on retournera en salle, de toute façon.On, parce qu’elle ne compte pas le laisser seul, à ruminer d’un rien et en faire une montagne. Il mérite de profiter de la vie à son âge et non de déjà se demander comment il aurait pu mieux faire les choses de son passé. “Carl… c’est uniquement ici que tu prends autant les choses à coeur ? Ou c’est tout le temps ?” Elle ne sait pas quelle réponse serait la plus rassurante à entendre. Soit il se sent stressé au point de tout surinterpréter au DBD parce que quelqu’un lui a donné une raison d’avoir aussi peu confiance en lui en ces lieux, soit il se tue à petit feu à avoir le même genre de réaction dans la vie quotidienne, ce qui aurait tout pour inquiéter Lily.
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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyVen 4 Fév 2022 - 19:10


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@LILY KEEGAN ☆ CARL FLANAGAN


Changer de boulot, Carl ne pourrait peut-être même pas s’il le voulait. L’odieux client n’a pas l’air d’avoir tiqué sur sa bouille alors il ne peut pas se douter que le garçon a connu toutes les difficultés du monde pour trouver un emploi avant que le défunt mari de Lily ait accepté de lui laisser sa chance. Quand il a décroché ce job de serveur Carl n’y croyait vraiment plus, sa sortie de l’émission ayant été incroyablement mouvementée et les retombées désastreuses pour lui il en était même venu à se dire que sa vie était fichue. Qu’on ne voudrait plus jamais de lui nulle part, qu’on lui claquerait un nombre incalculable de portes au nez sans jamais tenter de voir ce qu’il pourrait valoir. Sans le DBD Carl ne sait pas où il en serait aujourd’hui, ce travail ce n’est même pas une question d’argent pour lui parce qu’il n’a pas touché à sa cagnotte et n’est pas dans le besoin. Non, ce travail c’est la preuve qu’il peut encore servir à quelque chose dans ce monde et une seconde chance qu'il n'attendait plus, il a une bonne raison de se lever le matin et pendant longtemps Carl n’en avait aucune. Il s’y plait dans ce café, même si certains jours sa maladresse le rattrape le bonhomme se donne quand même du mal parce qu’il sait tout ce qu’il doit à Lily, que sans elle il chercherait encore sa place et son utilité dans une société qui l’a rejeté. Des clients mécontents il n’en croise pas tous les jours mais quand c’est le cas il n’arrive pas à passer outre. Quand les mots blessent, quand les regards rabaissent, Carl est directement touché au cœur et ne sait pas cacher sa vulnérabilité. Dans ces cas-là fuir est encore ce qu’il sait faire de mieux mais ce n’est jamais bon de le laisser seul avec lui-même après ces mini crises, ça Lily semble l’avoir compris. « Les clients ont tendance à penser que leur commande doit être le centre de notre vie. » C’est vrai que ce monsieur avait l’air de croire que le monde tournait autour de lui, à peine s’était-il assis qu’il semblait déjà mécontent de l’attente et du fait que les serveurs pouvaient être pris par d’autres clients. « Ils sont peut-être les rois en théorie, mais dans la réalité tu n’as pas à prendre leurs remarques aux pieds de la lettre. » Carl hoche timidement la tête. Il aimerait tellement être capable de survoler ces remarques dont elle parle, que ça ne l’atteigne pas autant. Les autres serveurs y ont parfois droit eux aussi mais aucun ne part se réfugier dans les cuisines après coup, il n’y a vraiment que lui pour réagir de cette façon et quand il y pense, il se trouve assez ridicule d’être parti comme ça. « Il.. il avait peut-être passé une mauvaise journée ? » Le voilà qui chercherait presque des excuses au client, c’est un peu le monde à l’envers mais Carl est souvent animé par ce genre de contradictions. Après tout il ne connait pas la vie de ce monsieur, et si sa mauvaise humeur était à mettre sur le compte d'une journée éprouvante ? Et si ce café représentait un rare moment de détente qu’il a honteusement gâché ? Et si, et si.. Cet homme ne s’est pas demandé, lui, si Carl était dans un bon jour pour lui parler de cette façon alors il ferait peut-être bien d’arrêter de chercher des justifications partout, ce ne serait pas le premier client naturellement exécrable que ce café aurait vu passer. « Au moins je sais que j’aurai pas de pourboire. » il reprend dans un bref haussement d’épaules et ça ce n’est pas trop une chose qui l’inquiète à vrai dire. Lily ne le sait pas mais il a pris l’habitude de glisser ses pourboires dans la caisse parce qu’il n’estime pas en avoir le besoin, ni tellement les mériter non plus.

Elle ne lui reproche pas son attitude, elle ne le blâme pas pour sa négligence alors qu’il s’attendait pourtant à se faire taper sur les doigts après tout ça. Et pas parce que Lily l’a habitué à ses remontrances, non, plutôt parce que Carl était autrefois abonné à toutes sortes de punitions quand il avait le malheur de faire tomber un verre ou de renverser quelque chose. Hector était sans pitié et ne lui pardonnait jamais rien, s’il avait été face à lui à la place du client tout à l’heure Carl sait qu’il aurait la joue particulièrement marquée à cet instant. Et quand son beau-père ne manifestait pas sa violence par ses gestes il le faisait à travers ses mots, combien de fois a-t-il été traité d’incapable ou de raclure parce qu’il n’était pas assez habile de ses mains ? Il ne veut pas donner raison au client qui pense que sa place est ailleurs mais cette remarque le hante, une fois de plus il déteste la façon dont tout ça le touche et tourne en boucle dans sa tête. « Pense à tous les clients qui ont été très heureux de ton travail. Celui-ci ne représente qu’une infime proportion. » Des clients que Carl aurait rendu heureux.. c’est vrai, il y en a eu. Lily parvient à trouver les mots pour raviver une lueur de positivité chez le garçon, la flamme qui s’était éteinte renait tout doucement en lui alors qu’un sourire vient en même temps se frayer un chemin le long de ses lèvres. « Oui.. d’ailleurs une cliente m’a dit que j’étais bien habillé hier, ça m’a fait plaisir. » Carl se le remémore même avec tendresse car les bonnes choses il les retient aussi, son cerveau n’effectuant pas (toujours) un tri pour ne garder que le mauvais. Cette cliente d’âge mûr aurait pu être sa grand-mère et il se souvient avoir glissé un petit chocolat en plus sur la soucoupe de son café pour la remercier. Un café qui était arrivé à destination sans encombres, et n’avait pas fini sa course au sol comme celui du client mal bigorné. Carl a conscience du gâchis que ça représente même s’il a tendance à dramatiser un peu la chose - étonnant, n’est-ce pas. « Ce n’est pas avec un café de perdu que tu risques de faire couler le bar, tu sais. » Certes il en faudrait beaucoup plus pour menacer la survie de l’établissement et c’est en réalisant le prix du café en question que Carl se dit que la situation aurait pu être tellement pire. « Heureusement que c’était pas un café trop rare, ni trop cher. T’imagines si j’avais ruiné un Blue Mountain ? » Ce n’est quand même pas souvent que ce grand cru des cafés est servi ici et pour cause, rares sont les clients prêts à y mettre le prix. Le jour où l’un d’entre deux désirera se faire servir un Blue Mountain il ne faudra en tout cas pas confier la commande à Carl, la pression risquerait de le rendre plus maladroit encore car oui, il peut l’être davantage. « Tu as dit que tu avais du mal à te concentrer, c’est à cause de quelque chose en particulier ? » Cette question le déboussole, il ne pensait même pas que sa triste vie pouvait intéresser Lily au point de creuser les raisons de ses étourderies. Carl déglutit avant de porter son regard loin devant lui, de douloureuses images lui revenant en tête et son cœur se serrant aux prochains mots qu’il prononce. « En fait c’est pas un bon jour, ni une bonne semaine parce que.. je me suis encore fait rejeter par mon père. » Étonnamment sa voix ne déraille pas sur père, le garçon semble même terriblement vide en le mentionnant car à force l’espoir diminue, il en vient à ne plus trop savoir à quoi il s’accroche. « Il veut pas de moi dans sa vie mais un jour ça changera peut-être.. Je veux pas avoir fait tout ça pour rien. » Et tout ça c’est sa participation à l’émission qui a chambardé son existence toute entière pour en faire un calvaire de tous les instants. Carl voulait à tout prix attirer l’attention de ce père qui ne le regardait plus depuis des années et pour ça tous les moyens étaient bons. Surtout les pires. Il propose à Lily de rester plus tard ce soir pour compenser ce petit incident mais il comprend vite qu’elle n’attend rien de lui à ce niveau. « Tu n’as pas besoin de faire quoi que ce soit, c’est déjà oublié. Je suis certaine que le client sera déjà reparti quand on retournera en salle, de toute façon. » « Qu’il s’en aille oui. » il rétorque sans réfléchir car il n’est plus question de lui trouver la moindre excuse. Il choisit finalement d’en vouloir à cet homme dont il ne parvient pas à oublier le regard, dur et empreint de jugement. « J’espère qu’il reviendra pas. » S’il ne devait émettre qu’un seul souhait ce serait celui-là, et si Carl n’avait pas peur de déclencher le détecteur de fumée des cuisines il sortirait son paquet de cigarettes car après un coup de stress le garçon a généralement besoin de sa dose de nicotine. « Carl… c’est uniquement ici que tu prends autant les choses à cœur ? Ou c’est tout le temps ? » Ses yeux remontent fébrilement vers Lily qui pose décidément beaucoup de questions aujourd’hui. Ça ne le dérange pas d’y répondre, il craint juste un peu de dévoiler ce qui se joue dans sa tête car il ne veut pas que Lily vienne à penser comme les autres. Ceux qui s’évertuent à le croire fou, et s’amusent de ses réactions démesurées. « Oh, c’est.. partout et tout le temps, je crois. » il souffle en allant chercher dans sa mémoire un élément déclencheur, qui existe bien mais que lui ne voit pas. « J’ai toujours été intense, enfin il parait. J’ai jamais trop su ce que ça voulait dire mais quand mon beau-père le disait ça ressemblait pas à un truc très positif. » Et d’un autre côté rien de ce que faisait ou disait Hector n’était positif, non, jamais. Il ne se souvient pas d’un seul moment où le dentiste n’en avait pas après le monde entier et après lui, plus particulièrement. « De toute façon lui il me trouvait que des défauts. » il complète d’une voix basse, presque inaudible. Les images et les sons lui reviennent, la peur a chez lui toujours prédominé sur la douleur et y repenser plonge le garçon dans de vieux tourments qu’il ne parviendra certainement jamais à soigner. « Je sais que mes réactions sont ridicules, je le vois bien dans le regard des gens. J’arrive juste pas.. à prendre les choses à la légère, tu sais, comme ces personnes qui sont au-dessus de tout. Je les envie franchement, ça doit être tellement reposant de jamais se soucier de rien. » De ne pas avoir la tête en ébullition et le cœur prêt à bondir en permanence, ne serait-ce que ça. Carl adorerait avoir un bouton off pour pouvoir déconnecter de ses pensées bouffantes et être doté d’un bouclier contre les mots qui font mal. Ce n’est parfois pas humain d’être à ce point hypersensible à tout, absolument personne n’aurait envie d’être dans sa peau il en est convaincu. « Et pour toi Lily, pourquoi j’ai l’impression que c’est pas non plus un bon jour ? » il questionne à son tour d’une petite voix hésitante, sans trop savoir dans quoi il s’aventure. Il se trompe peut-être lourdement mais Lily n’a pas tout à fait l’air dans son assiette elle non plus, il ne peut pas présumer de grand-chose mais il y a ce petit truc qu’il ressent et qui lui fait dire qu’elle pourrait le rejoindre dans le club des gens passant une journée pas terrible. Au fond de lui Carl espère avoir tort, s’il apprenait que Lily fait elle aussi face à ses propres tourments il ne pourrait que s’en vouloir de s’être autant apitoyé sur son sort jusque là.

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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptySam 12 Fév 2022 - 18:32

« Il.. il avait peut-être passé une mauvaise journée ? » - “Ce n’est pas une excuse.” Elle rétorque, intransigeante. S’il commence à lui trouver des circonstances atténuantes pour ça, il en trouvera d’autres pour le reste, et c’est un cercle vicieux dans lequel elle ne le laissera pas s’entraîner. Elle-même l’a bien trop accepté pour sa propre personne, au regard de l’attitude de certains de ses proches. « Au moins je sais que j’aurai pas de pourboire. » La jeune femme abandonne rapidement la dureté de son expression pour laisser place à un sourire bien plus doux et empathique. Sur ce point, elle ne peut pas le contredire, quand bien même elle sait qu’il n’est pas réellement le genre d’employé à vivre grâce aux pourboires des clients. Sinon, elle se chargerait elle-même de remplir ses poches.

Et si la jeune femme sait au moins qu’il ne manque pas d’argent, c’est à peu près à ça que se résument toutes les informations en sa possession au sujet de Carl. Elle a son adresse, son nom complet, sa date de naissance et son numéro de compte en banque, certes, mais rien d’exploitable. Elle a retenu le portrait qu’ils avaient fait de lui à la télévision, mais là encore il n’y a rien de réellement intéressant à ses yeux. Lily n’est pas animée par une curiosité maladive, elle est simplement profondément intéressée à l’idée d’apprendre à connaître ce garçon mystérieux et semblable à un oisillon blessé. « En fait c’est pas un bon jour, ni une bonne semaine parce que.. je me suis encore fait rejeter par mon père. » Ces mots ne font donc que confirmer l’intuition qu’elle avait, bien qu’elle aurait été parfaitement incapable d’anticiper le fait que ses problèmes découlaient d’une histoire familiale. Son regard brillant ne le lâche plus, attendant qu’il s’explique de lui-même plutôt qu’elle ait à poser des questions sans doute trop entreprenantes à en juger par le contexte. Après tout, elle n’est personne pour lui demander des explications aussi personnelles, et il aurait tous les droits de refuser - or, elle ne sait guère accepter l’échec. « Il veut pas de moi dans sa vie mais un jour ça changera peut-être.. Je veux pas avoir fait tout ça pour rien. » La gorge serrée, la brune comprend alors sans le moindre mal la raison de sa participation à la télé-réalité: pour se faire un nom, pour exister à la télévision et, surtout, peut-être, avoir l’espoir d’en faire de même dans les yeux de son paternel. “Ça a toujours été compliqué avec lui ?Compliqué étant sans aucun doute un euphémisme, Lily tente de le ménager autant qu’elle le peut. La seconde question qu’elle se pose, c’est de savoir si oui ou non il a grandi avec une figure maternelle, et si oui ou non elle a su être présente pour lui, à défaut que ce soit le cas de son père.

« Qu’il s’en aille oui. J’espère qu’il reviendra pas. » Elle observe cette rage soudaine sans rien dire, prise de court mais surtout étonnée qu’il soit capable de telles pensées. Une part d’elle se veut sans doute fière de le savoir capable de se rebeller un tant soit peu pour défendre ses intérêts ; il ne reste plus qu’à l’encourager dans cette voie, sans doute. Mais puisqu’elle ne peut pas être soudainement sur tous les tableaux à la fois, Lily prend encore le temps de tenter d’en apprendre plus sur la relation qu’il entretient avec son père et l’importance que ce dernier peut tenir dans sa vie.  Elle accuse un regard doux, donnant à Carl tout le temps dont il aurait besoin pour trouver ses mots. « Oh, c’est.. partout et tout le temps, je crois. » Ainsi, il se montre bien plus souvent à fleur de peau qu’elle n’aurait pu le croire et s’en veut aujourd’hui très largement de ne jamais avoir su déceler cette spécificité chez lui. « J’ai toujours été intense, enfin il parait. J’ai jamais trop su ce que ça voulait dire mais quand mon beau-père le disait ça ressemblait pas à un truc très positif. » Son père, son beau-père, autant de figures masculines qui ne semblent pas avoir eu le moindre impact positif dans sa vie. Lily garde pour elle ses commentaires, lesquels se résumeraient à mettre tous les hommes dans le même panier, sans la moindre exception. Celui qu’elle aimait est mort, Ezra n’arrive pas à lui donner un enfant, et Alfie n’a même pas besoin d’explications pour aussitôt l’assimiler à la catégorie ‘sombre connard’. “Et toi, tu le vois comme un truc positif ?” Peu importe l’avis des hommes autour de lui, Lily est bien la première à s’en moquer. Seul Carl l’intéresse, et non les fréquentations que la vie lui a imposées, surtout alors qu’elles semblent être de bien mauvaises influences pour le garçon qu’il est. « De toute façon lui il me trouvait que des défauts. » Le silence est bien trop parfait dans l’arrière-salle pour qu’elle ne puisse pas entendre ses mots, surtout alors qu’elle est occupée à tendre l’oreille au mieux. Ils n’ont jamais eu de discussion dans le genre, et elle espère ne pas lui en imposer de nouvelles avant bien longtemps non plus. “Mon père était aussi un homme dur. Avec moi, avec mon frère. Il était contrarié d’un rien.” Elle annonce sur le ton de la confession, n’en faisant pas trop pour ne pas mettre l’emphase sur le pathos plus que nécessaire. Cyril était un père horrible pour Joseph, mais il n’a jamais rien fait contre Lily. Peu importe, l’histoire est faite pour être réécrite. Ils étaient donc deux, désormais, à souffrir des sévices corporelles et psychologiques de leur patriarche. “C’est difficile de grandir en entendant toujours le même son de cloche réprobateur.” Elle a grandi en entendant son frère subir les coups de ceinture de leur père, alors c’est du pareil au même, non ? Autant d’inconfort, autant de secrets qui ne devaient jamais ô grand jamais passer le pas de la porte, autant de nuits passées à panser ses plaies et à le rassurer, jusqu’à ce que tout recommence dès le lendemain. Au moins, il lui laissait toujours une nuit de repos, pour laisser aux rougeurs le temps de s’en aller et aux cicatrices la possibilité de commencer à se former, pour mieux rapidement réduire à néant le travail de fourmi des cellules humaines. “Mais pas impossible. Ça fait de toi quelqu’un d’infiniment plus fort que tout ce que les autres peuvent penser.” Parce que les autres craignent tout et rien alors que Carl, lui, est déjà habitué au pire ou ce qui s’en rapproche.

« Je sais que mes réactions sont ridicules, je le vois bien dans le regard des gens. J’arrive juste pas.. à prendre les choses à la légère, tu sais, comme ces personnes qui sont au-dessus de tout. Je les envie franchement, ça doit être tellement reposant de jamais se soucier de rien. » Le sourire de Lily est triste, elle ne le surjoue même pas. De la tristesse, c’est bien ce que les mots du garçon font naître en elle. Il ne mérite pas de voir la vie sous un tel angle, pas à son âge. Il devrait être heureux, faire le mur, défier l’autorité parentale, expérimenter, tomber pour mieux se relever. Il devrait profiter, tout simplement, parce qu’il est encore à un âge où la société peut lui pardonner bien de ses frasques, si ce ne sont toutes. “Ce n’est pas ridicule. Ils ne te connaissent pas, ils ne savent pas ce que tu vis.” Ils ne peuvent pas comprendre, eux, le reste du monde. Ils n’ont pas le droit, eux, tous ces inconnus, d’en vouloir à un garçon brun soudainement placé sous l’aile protectrice de la jeune femme, laquelle se veut terriblement mortelle pour quiconque s’en approcherait sans autorisation. “Vivre intensément, ça fait ta force. Tu ne sais pas comment t’en servir pour le moment, c’est la seule nuance.” Et Lily n’a pas le mode d’emploi pour un tel caractère, si opposé au sien et à ceux des proches avec qui elle évolue, mais elle serait la première enjouée à l’idée de l’aider dans cette quête et de le soutenir au gré des différents obstacles. “C’est ce que Matt aimait chez toi.” Finalement, elle souffle ces quelques mots sur le ton d’une énième confession, bien plus difficile à accepter alors qu’elle parle de son mari au temps du passé. « Et pour toi Lily, pourquoi j’ai l’impression que c’est pas non plus un bon jour ? » Si elle ne savait pas par avance qu’un tel geste serait déplacé, elle aurait laissé sa main glisser le long de la joue du garçon et entre ses mèches. Seules les mères peuvent le faire, au plus grand malheur des garçons ne demandant qu’à grandir plus rapidement. “C’est pas vraiment une bonne année, à vrai dire.” Et sur ce point là, elle n’a pas à exagérer quoi que ce soit. Elle a perdu son mari, cela semble être une raison suffisante pour vouloir rayer l’existence de 2021 de sa timeline. “J’essaye d’avoir un enfant mais les résultats reviennent toujours négatifs.” Alors, la brune joue pour une fois la carte de la sincérité la plus pure, ne faisant qu’omettre des détails insignifiants: elle essayait d’avoir un enfant avec Matt jusqu’à ce qu’il décède, et depuis c’est avec son ancien meilleur ami, et surtout l’ex de la jeune femme (et l’homme avec lequel elle avait déjà trompé Matt le temps d’une nuit) qu’elle continue d’essayer de fonder une famille. Il n’a pas besoin des détails, surtout alors qu’elle prend l’initiative de penser qu’il n’osera pas les lui demander: personne ne veut prendre le risque d’entendre une énième histoire triste de la part de la veuve. “J’en ai fait un aujourd’hui encore, c’est pour ça que ça va pas très fort.” Son sourire est triste, parfait reflet de ses pensées. Elle n’arrive pas à avoir un enfant de son propre sang, mais peut-être peut-elle prendre le rôle auprès d’autres ; après tout, si certains ne sont pas capables d’assumer le rôle de parents, Lily l’a de son côté toujours été. “Mais tu n’y peux rien, alors interdiction de me dire que tu es désolé, d’accord ?” Il doit apprendre à se protéger, et c’est ici que commence son entraînement.
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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyDim 20 Fév 2022 - 19:34


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I'll never cry because I know that it'll never change. I'll stay standing and endure it in an unknown place. There will be many times I'll almost fall, but alone, I reach out my hand, alone, I stand back up.
@LILY KEEGAN ☆ CARL FLANAGAN


« Ce n’est pas une excuse. » Lily a raison, il n’a pas fini s’il tente d'excuser chaque type qui se met à lui tomber dessus. Aujourd’hui il a affaire à un client mécontent et demain, qui sait, il aura peut-être droit à l’un de ces détracteurs qui s’en prennent à lui en pleine rue. Ceux-là sont les pires parce qu’ils savent très bien à qui ils s’adressent, dehors Carl est poursuivi par sa vilaine réputation tandis que dans ce café, fort heureusement, tous les clients ne connaissent pas ses casseroles télévisuelles. Se dire que cet homme n’en avait probablement pas après lui pour cette raison le rassure dans un sens, mais considérer qu’avoir passé une mauvaise journée justifie de traiter les gens de cette façon est une preuve de plus que Carl n’a pas tellement plus de respect pour lui-même que ce désagréable client n’en avait tout à l'heure. Le garçon pourrait dire qu’il a l’habitude de se faire pointer du doigt pour tout et n’importe quoi mais est-ce une raison pour excuser celles et ceux qui se défoulent sur lui, sans doute pas. Lily n’a pas l’air décidée à le laisser s’incliner comme ça, la sévérité dans sa voix le surprend même tandis qu’il relève doucement la tête, car ce n’est certainement pas en regardant ses pieds que Carl y trouvera sa dignité - pour le peu qu’il lui en reste. Cette dignité qu’il a encore sacrifiée hier en se présentant chez son père alors que ce dernier lui avait pourtant bien signifié ne pas vouloir de lui dans sa vie pour le moment. Le message n’est jamais passé parce que Carl n’a tout simplement jamais voulu l’entendre, il est le premier à reconnaitre que son père le rejette mais il continue de s’accrocher, dans le vide. Il est même tombé très bas pour tenter d’exister à ses yeux et aujourd’hui l’impression d’avoir ruiné son image et ses jeunes années pour rien demeure, parce que le prix à payer est bien lourd par rapport à ce qu’il y a finalement gagné. Du côté de son père absolument rien, et c’est bien ce qui lui fait dire que participer à cette émission est la pire erreur qu’il ait faite dans sa vie. Son expérience la plus regrettable, dont il récolte toujours les retombées aujourd’hui et sûrement pour encore très longtemps. « Ça a toujours été compliqué avec lui ? » Lily s’intéresse et même si le sujet est particulièrement sensible il ressent le besoin d’en parler, de mettre des mots sur cette nouvelle désillusion et sur cette case douloureuse de son passé. « Le souvenir le plus marquant que j’ai de lui c’est quand il est parti de la maison en nous laissant ma mère, mon frère et moi. Alors oui, je crois. » Et si Carl n’avait pas peur de l’assommer avec des détails d’une tristesse affligeante il pourrait ajouter que sa maman souffrait déjà d’une profonde dépression à l’époque, et que le départ de son père juste après le divorce n’a rien arrangé. Elle lui a très vite trouvé un remplaçant parce qu'elle craignait de finir seule, sans savoir qu’elle faisait entrer un homme ignoble dans la vie de ses fils et le cauchemar a finalement duré de très nombreuses années, bien au-delà de ce que Carl a toujours vécu comme un abandon. « Il a refait sa vie ici, c’est pour ça que j’ai choisi l’Australie moi aussi. Je pensais renouer avec lui, retrouver un père mais.. on peut dire qu'il est pas trop fan de ce que je suis devenu. » Mais comment pourrait-il l’être, d’un autre côté ? Il faut être réaliste deux secondes, aucun père n’aimerait retrouver son fils dans la tourmente après douze ans, surtout pas quand le fils en question trimballe une image aussi fâcheuse. Carl ne s’est pas contenté de revenir dans sa vie, il l’a fait tout en trainant leur nom de famille dans la boue et ça, Neil semble avoir beaucoup de mal à le digérer. « En soi j’le comprends, c’est un peu la honte d’avoir un fils comme moi. » il reprend alors dans un éclair de lucidité. Sa mère n’est pas de cet avis pourtant mais Patsy voit bien ce qui l’arrange le concernant, et ce depuis toujours.

Lily est peut-être un peu perdue ensuite, car après cette parenthèse sur son père c’est un autre homme que Carl se met à évoquer. Ça lui coûte d’en parler comme de son beau-père alors que c’est bien ce qu’il est pourtant - Hector a même épousé sa mère un an seulement après son divorce - car il se plait toujours à dire que ce type n’est personne pour lui. L’autre, la brute, c’est ainsi que Carl le nomme dans sa tête ou lorsqu’il est au téléphone avec son frère mais ça n’est parlant que pour eux, Lily n’aurait de son côté pas compris cette absence de nom et d’étiquette. Hector a en tout cas toujours eu le chic pour l’enfoncer, c’est un fait, et l‘hypersensibilité que Carl a hérité de sa mère n’a jamais sonné comme une bonne chose à la maison, cette intensité dont le garçon parle rendait même la cohabitation avec son beau-père d’autant plus compliquée. « Et toi, tu le vois comme un truc positif ? » Oh, ce n’est pas simple pour lui de se forger son propre avis après avoir entendu le même refrain pendant des années. Hector n’était pas le seul à le juger (trop) intense, c’est une chose qui revient finalement assez souvent à son sujet et Carl a du mal à y voir quoi que ce soit de positif quand il semble évident que ses réactions déplaisent bien plus qu’elles ne plaisent, habituellement. « Bof. J’ai l’impression que ça me fait trop souvent faire n’importe quoi, tiens, comme tout à l’heure quand j’ai pris la fuite. » C’était impulsif de sa part, Carl s’est une fois de plus laissé dominer par ses émotions. Il se trouve ridicule d’être parti sur un coup de tête mais ça valait sans doute mieux pour tout le monde, car le garçon aurait été incapable de reprendre tranquillement son travail après l’accrochage avec le client qui lui avait soulevé le cœur et retourné la tête. « Mon père était aussi un homme dur. Avec moi, avec mon frère. Il était contrarié d’un rien. » Cette confession très inattendue le sort de ses pensées pour le reconnecter à cette discussion qui lui permet d’en apprendre un peu plus sur Lily, alors que celle-ci juge bon de faire le parallèle entre leurs deux vécus. « Au moins t’avais un père toi. » il souffle tandis que son regard s’assombrit un instant. Carl aurait préféré grandir avec son père à ses côtés quitte à ce que celui-ci se montre dur aussi, peut-être même qu’il aurait beaucoup mieux accepté tout ce qu’Hector lui a fait si ces mains avaient été celles de son père, et pas celles d’un homme qui s’est donné le plus grand mal pour prendre sa place sans jamais y parvenir. Il est quand même désolé d’apprendre que l’enfance de Lily n’a pas non plus été facile, ils semblent avoir ça en commun tous les deux et il ne l’aurait pas soupçonné avant aujourd’hui. « C’est difficile de grandir en entendant toujours le même son de cloche réprobateur. » Le garçon hoche lentement la tête car ces mots font douloureusement écho en lui. Il n’ose pas demander des détails à Lily sur la dureté de son père parce qu’il redoute d’entendre qu’ils ont vécu la même chose, mais il sent qu’elle revient de loin elle aussi. Il espère au fond de lui que si elle a connu une forme de violence plus jeune c’était celle des mots et pas celle des gestes parce qu’il n’aimerait pas se découvrir un point commun aussi lourd avec elle, non seulement ça lui ferait bien trop mal au cœur mais il refuse aussi d’imaginer qu'il puisse y avoir des hommes comme Hector un peu partout dans ce monde. C’est pourtant évident, mais cette idée lui est insupportable. « Mais pas impossible. Ça fait de toi quelqu’un d’infiniment plus fort que tout ce que les autres peuvent penser. » Carl ne se considère pas comme quelqu’un de fort lui, mais compte tenu de l’image déplorable que le bonhomme a de lui-même ce n’est guère étonnant. Il ne peut que se sentir faible quand il repense à la façon dont il se laissait faire à l’époque, et encore aujourd’hui Carl serait prêt à tendre la deuxième joue si on venait à lever la main sur lui. Ça a été son quotidien pendant longtemps, subir sans broncher car dans ces moments-là Hector lui faisait bien trop peur. « Toi t’es forte Lily, t’as l’air de pouvoir te relever de tout. » Il pense ce qu’il dit et encore plus avec ce qu’il vient d’apprendre, Lily lui apparaissait déjà comme une femme incroyablement forte avant ça parce qu’il ne l’a jamais vue s’effondrer suite à la mort de Matt. Elle est tellement digne, tellement résistante, il l’admire vraiment pour ça. « Moi c’est comme si j’avançais de travers dans ma vie, si ça se trouve mon beau-père il a cassé un truc dans ma tête à force de.. » Carl se stoppe, la fin de sa réplique se devine peut-être mais il décide de lui-même qu’il n’ira pas au bout. « Bref. » Il en a de toute façon bien assez dit, à quoi bon s’étendre sur le genre de traitements qu’il recevait autrefois, il en ressort profondément abîmé et personne n’y peut plus rien.

Prendre les choses à la légère et ne se soucier de rien, c'est ce que font beaucoup de jeunes de son âge. Ils profitent, ils s'amusent pendant que Carl, lui, semble plutôt subir son existence en permanence. Le garçon n'est pas non plus totalement à plaindre, si sa vie est ce qu'elle est aujourd'hui c'est aussi parce que beaucoup de barrières n'ont pas été mises quand il l'aurait fallu avec lui, rendant finalement sa dérive inévitable. Mais Carl n'aurait peut-être pas collectionné les problèmes et les mauvais choix aussi jeune s'il n'était pas initialement bourré d'insécurités, le simple fait qu'il soit tombé dans des pratiques obsessionnelles il y a quelques années doit résulter d'un certain nombre de carences, notamment affectives, que le bonhomme a tenté de combler de la plus malsaine des façons. Sa déroute était peut-être bien annoncée depuis longtemps, difficile en tout cas de se dire surpris par son évolution quand on sait qu'il a toujours été un garçon dont les réactions étaient extrêmes car petit, déjà, Carl ne donnait pas l'impression d'évoluer dans le même monde que les autres. Chez lui tout a toujours été amplifié, exagéré, dramatisé. « Ce n’est pas ridicule. Ils ne te connaissent pas, ils ne savent pas ce que tu vis. » Tant mieux, pense-t-il alors en songeant au fait que personne ici bas ne mérite de voir la vie comme lui la perçoit car c'est beaucoup trop épuisant d'être dans sa tête. « Vivre intensément, ça fait ta force. Tu ne sais pas comment t’en servir pour le moment, c’est la seule nuance. » Une nuance qui fait naitre une petite lueur d'espoir dans les yeux du garçon parce que Lily semble croire qu'il finira par dompter ce trop-plein en lui, qu'il n'est donc pas destiné à en souffrir toute sa vie. Ça veut peut-être aussi dire que ses épisodes obsessionnels connaitront un jour une fin, jusqu'ici il n'osait pas trop y croire mais il a soudainement besoin de se raccrocher à cette éventualité. « Donc.. tu penses qu’un jour j’arriverai à gérer cette intensité ? » Il aimerait tellement entendre qu'il n'est pas embarqué dans cette galère pour le restant de ses jours, parce qu'il n'est honnêtement pas certain de vouloir vivre éternellement comme ça. Quand il voit combien tout ça le fatigue alors qu'il est encore si jeune, Carl ne veut pas se dire que les prochaines années pourraient être semblables ou même pires que ce qu'il expérimente aujourd'hui. « Parce que moi j’ai surtout peur de devenir fou, en fait. » Cet aveu lui échappe, il n'avait pas forcément en tête de formuler ces mots à voix haute mais c'est dit, et c'est effectivement une peur que Carl a en lui depuis quelques temps. Les gars dans son genre sont peut-être bien voués à le devenir, après tout tant de gens doutent déjà de sa sanité d'esprit. « C’est ce que Matt aimait chez toi. » Lily lui arrache son sourire le plus triste depuis le début de cet échange avec ce rappel, un sourire qu'on pourrait même qualifier de mélancolique et que Carl arbore toujours quand ils sont amenés à parler du défaut mari de la jeune femme. « Tu sais je pense souvent à lui. » Que ce soit au café ou en dehors, Matt s'invite certainement bien plus dans ses pensées que Lily ne peut s'en douter. Son souvenir reste très présent chez le garçon malgré le fait qu'il ne l'ait connu que quelques mois dans sa vie car cette rencontre reste gravée dans le cœur du bonhomme. « J’oublierai jamais qu’il m’a tendu la main quand tout le monde me rejetait. » C'est ce que Matt était et sera toujours pour lui, un ange tombé du ciel où il a finalement été rappelé. Il lui arrive même de penser à lui en observant parfois les nuages, de se dire que Matt les regarde peut-être depuis là-haut, c'est avec ça que Carl se rassure et se console parce que sa brutale disparition l'avait particulièrement secoué. Il devine en tout cas que Lily n'est pas non plus dans un bon jour et elle ne tarde pas à le lui confirmer. « C’est pas vraiment une bonne année, à vrai dire. » Et ça peut se comprendre, cette année a avant tout été marquée par la perte de son mari même s'il semble y avoir autre chose, une préoccupation encore plus actuelle à propos de laquelle Lily finit par se confier. « J’essaye d’avoir un enfant mais les résultats reviennent toujours négatifs. » Carl met ses pensées sur pause le temps d'assimiler l'information. Il y a comme un bug dans le système, le garçon bloque sur cette envie d'enfant à peine confessée. « Mais.. et Matt ? » sont les premiers mots franchissant la barrière de ses lèvres, des mots que Carl regrette aussitôt d'avoir formulé. La vérité c'est qu'il n'arrive pas à se figurer un monde où Lily aurait un enfant avec un autre homme que Matt, dans sa tête le père de ses enfants ne peut pas être quelqu'un d'autre mais il se rend bien compte que les choses sont à présent techniquement infaisables. « Pardon, je.. ça me regarde pas. » il reprend, confus, en remuant la tête. Il n'avait sûrement pas le droit de mentionner Matt dans un moment pareil et il s'en veut, son intention n'a jamais été de la juger, il ne s'attendait simplement pas à entendre que Lily nourrissait de tels projets aujourd'hui. Et pourtant il trouve ça chouette Carl, surtout quand il réalise combien ça semble lui tenir à cœur. « J’en ai fait un aujourd’hui encore, c’est pour ça que ça va pas très fort. » Elle parait dépitée par tous ces tests revenus négatifs et il comprend qu'elle tente certainement tout ce qu'elle peut pour inverser la tendance, avec qui ça par contre il s'interdit de le lui demander parce qu'il a déjà assez gaffé comme ça. « Mais tu n’y peux rien, alors interdiction de me dire que tu es désolé, d’accord ? » Elle le connait bien, on peut même dire qu'elle lui ôte les mots de la bouche. « Je le suis quand même un peu. » Désolé, évidemment que Carl l'est en attendant que le rêve de Lily peine à se réaliser. Elle mérite d'être heureuse après cette année compliquée et le destin semble pourtant s'acharner, il ne trouve vraiment pas ça juste. « Ça me rend triste, je suis sûr que tu ferais une super maman en plus. » Il le pense vraiment, si Lily est autant à l'écoute avec lui il est persuadé qu'elle le serait aussi avec ses propres enfants. Il arrive sans problème à l'imaginer dans un tel rôle, certaines femmes semblent faites pour ça et il veut croire que c'est aussi son cas à elle, et qu'un jour l'univers entendra son souhait. « Mais faut pas désespérer ! C’est peut-être juste pas le bon moment.. les étoiles doivent pas être tout à fait alignées là-haut, c’est tout. » Carl ne doit pas être bien convaincant avec son histoire d'étoiles mais il croit sincèrement que la chance finira par lui sourire, et que sa persévérance finira par payer. La vie ne peut pas être à ce point mal faite il le refuse, si Lily veut vraiment cet enfant alors elle l'aura, il n'est pas du tout prêt à considérer le contraire. « Je t’ai déjà dit que je m’occupais d’enfants ? C’est mon autre job à côté du café, au pair c’est comme ça que ça s’appelle. » Voilà qui tombe un peu comme un cheveu sur la soupe, mais puisqu'il est question d'enfants Carl se dit qu'il peut bien lever ce petit voile sur lui. Ce n'est pas grand-chose mais au moins comme ça Lily sait qu'il a un semblant de vie en dehors du DBD, au cas où elle était amenée à en douter, ainsi que des responsabilités. On lui confie des enfants, c'est donc qu'il ne doit pas être si monstrueux que ça - ou que sa famille d'accueil ne connait pas encore la part sombre de son passé. « Bon les bébés c’est pas trop mon truc mais dans quelques années je pourrai peut-être m’occuper de tes enfants aussi, enfin, si t’as besoin d’un au pair et si je suis encore là, surtout. » Cette dernière précision sonne étrangement quand il y pense, il ne sait pas comment Lily pourrait l'interpréter alors il complète sans attendre. « En Australie je veux dire. » Lui qui n'est pas encore sûr d'y rester très longtemps, sans savoir toutefois où il se verrait vivre si ce n'est pas ici. Un retour en Irlande reste envisageable mais pas tout de suite, pas tant qu'il aura des engagements et des gens comptant sur lui à Brisbane. « Si j’te dis ça c’est parce qu’un jour le test ressortira positif, moi j’y crois. » Et Carl a beaucoup de conviction dans la voix en le disant, il est même prêt à prier tous les jours à compter d'aujourd'hui jusqu'à ce que ça arrive.

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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptySam 5 Mar 2022 - 3:33

Et soudainement, alors qu’elle a tout perdu d’un claquement de doigts, Lily voit en Carl autre chose qu’un employé avec deux mains gauches, bien plus occupé à casser des tasses et pleurer en arrière boutique qu’à servir les clients. Soudainement, il devient tout sauf ça. Il est l’orphelin qu’elle veut défendre, à défaut d’ironiquement trouver une veuve autre qu’elle-même à aussi prendre sous son aile. Le regard qu’elle porte sur le garçon (qu’elle continue de vouloir appeler ainsi alors qu’elle doit relever les yeux pour trouver les siens) est bien différent de celui qu’elle lui dédiait à ses débuts au bar, et ce pour une infinité de raisons différentes. Maintenant qu’elle a tout perdu, il est tout ce qui lui reste, lui qui a pris en importance sans même le savoir et, sûrement, sans même le vouloir non plus. Comme si Lily avait un jour cherché à obtenir son consentement quand rien n’a même été réfléchi et que tout se veut finalement n’être que naturel ; une technique de survie comme une autre, laquelle elle cache à la perfection derrière son regard sincèrement inquiet et empathique pour le jeune employé du café. « Le souvenir le plus marquant que j’ai de lui c’est quand il est parti de la maison en nous laissant ma mère, mon frère et moi. Alors oui, je crois. » Elle pince les lèvres et hoche la tête, écoutant avec attention le moindre détail de son récit. Son père, il a fait la même chose que Joseph en son temps: il les a abandonnés et laissés seuls. “Tu es resté proche de ton frère ?” La question est bien plus pour elle-même que pour lui, mais la brune cherche sincèrement à connaître la réponse à cette question. Maintenant qu’elle sait qu’il ne peut pas compter sur son père et qu’elle doute que sa mère soit quelqu’un ayant les épaules nécessaires à son tour, c’est sur son frère que reposent les derniers espoirs de Lily. C’est pourtant sur son père que la discussion continue de se faire, contribuant ainsi à malmener le coeur d’une femme nouvellement veuve et faisant face aux échecs consécutifs de ses tentatives de fonder une famille. « Il a refait sa vie ici, c’est pour ça que j’ai choisi l’Australie moi aussi. Je pensais renouer avec lui, retrouver un père mais.. on peut dire qu'il est pas trop fan de ce que je suis devenu. » Muette, elle ne comprend qu’en cet instant à quel point elle ne connaissait finalement rien de Carl, et surtout pas son histoire. Lily a toujours pensé qu’il était Australien, lui aussi, parce que cela devait couler de source: il est trop jeune pour avoir déménagé. Gorge serrée, elle avoue ne pas pouvoir comprendre comment un homme pourrait ne pas être heureux de renouer le lien avec la chair de sa chair. Sans doute parce qu’elle idéalise un peu trop l’idée qu’elle se fait d’une famille, autant qu’elle se dit que la sienne devait simplement être l’exception confirmant la règle. Même son père aurait sûrement été heureux de retrouver Joseph, s’il avait daigné un jour revenir à la maison. « En soi j’le comprends, c’est un peu la honte d’avoir un fils comme moi. » La remarque a tout pour lui briser le coeur, parce que de son côté elle serait prête à vendre son âme au Diable pour avoir un fils comme lui. Il n'est pas simplement un bon garçon, il est un fils extraordinaire et un homme au grand coeur, ce qui est une qualité rare qu'elle sait reconnaître à sa juste valeur, surtout alors que Carl lui-même n'arrive pas à se rendre compte de toute sa valeur. Elle lui répétera ce qu'il vaut autant de fois que nécessaire, parce qu'elle n'est pas prête à accepter l'idée qu'il puisse se déprécier aussi simplement que cela: quelqu'un doit lui dire qu'il est incroyable et elle peut être cette personne, sans problème. “Je donnerais tout pour avoir un fils comme toi.” La réponse ne tarde pas avant d’arriver, elle est instinctive, maternelle. Si Lily ne peut rien changer à propos de son histoire familiale, elle peut au moins lui faire comprendre qu’il a de la valeur, et ce peu importe ce que peut dire ou penser son paternel. Simplement, Carl ne peut pas se douter d’à quel point les paroles de la veuve sont véridiques, et d’à quel point elle donnerait justement tout pour être mère. Finalement, elle souffle doucement et tente de se reprendre pour avoir de nouveaux mots, prononcés plus lentement. “Tu rends sûrement beaucoup de personnes heureuses pour avoir choisi l’Australie.” Peut-être pas son père, mais tous les autres. Tous les autres, ils connaissent la valeur du garçon, de son amitié, de sa simple présence. Lily aussi, elle se rend enfin compte de sa valeur, celle que Matt a su déceler à la seconde même où il a posé ses yeux sur lui. Il a toujours été bien plus doué qu’elle pour voir le bon en autrui.

A défaut de vouloir donner davantage de temps d’antenne à son père, c’est plutôt de Carl lui-même qu’elle préfère parler, pour mieux apprendre à le connaître. Pour le bon autant que pour le mauvais, cela ne lui importe peu: c’est toujours de lui dont il est question. Alors, quand elle vient à lui demander s’il voit son émotivité intense comme une bonne ou une mauvaise chose, Lily est sincèrement curieuse de connaître son point de vue sur la question. « Bof. J’ai l’impression que ça me fait trop souvent faire n’importe quoi, tiens, comme tout à l’heure quand j’ai pris la fuite. » Elle hoche donc la tête, comprenant ses mots à défaut d’être d’accord avec eux. Il vaut mieux être intense et impulsif plutôt que de ne rien ressentir du tout, état d’âme qui noircit toujours un peu plus le cœur de l’australienne au fur et à mesure que le temps passe. Parce que Lily ne peut pas se permettre de laisser paraître ses failles ; parce que personne ne pourrait la comprendre dans son entièreté non plus. “Peut-être que ça te permet d’éviter certaines situations plus difficiles encore, d’une certaine manière.” Il ne s’aventure pas dans les problèmes et ne leur donne pas davantage de temps non plus. La fuite est un moyen de défense à part entière, Joseph pourrait le témoigner sans mal. Et si elle ne pardonnera jamais à son propre frère d’avoir voulu sauver sa peau, littéralement, elle n’a aucun mal à trouver toutes les circonstances atténuantes du monde à Carl.

« Toi t’es forte Lily, t’as l’air de pouvoir te relever de tout. » Il annonce donc alors qu’elle vient d’esquisser un maigre discours au sujet de son père et de la longue liste de ses défauts. Oui, Lily Keegan se relève de tout, mais elle ne prend jamais le temps de jeter un regard sur les blessures qui parcourent son corps, lesquelles pourraient s’avérer être mortelles. Elle se relève parce qu’elle est la seule à pouvoir le faire ; elle se relève parce qu’elle ne supporterait pas le regard empathique d’une personne qui lui tendrait la main. Elle a bien trop observé l’impuissance quotidienne de sa mère pour vouloir prendre le même chemin qu’elle et lui ressembler. « Moi c’est comme si j’avançais de travers dans ma vie, si ça se trouve mon beau-père il a cassé un truc dans ma tête à force de.. Bref. » Les yeux de Lily tentent de retrouver les siens, plus brillants que jamais. Touchée par ces quelques mots dont elle ne peut que comprendre le sous-entendu, c’est sa gorge serrée qui la rend muette de chagrin. Elle ne reconnaît que trop sa propre vie dans son histoire, et jamais elle n’aurait voulu qu’ils se trouvent des points communs à ce sujet. “Ce n’est pas les actions des autres qui te définissent.” On pourrait croire qu’elle parle de tout autre chose mais le regard qu’elle lui tend prouve bien qu’elle a compris le sous entendu de ses mots. Elle sait comment agit son beau-père avec lui, désormais, et si cela ne tenait qu’à elle, son nom serait déjà ajouté à la liste des victimes directes et indirectes de Lily. Jamais elle ne comprendra comment un homme peut en venir aux mains, encore moins quand il s’agit d’un enfant. Qu’il soit de son sang ou non n’y change rien. “Ta mère sait ? Quelqu’un sait ?” Que son beau-père casse des trucs dans sa tête. Elle ne lui demandera pas d’en parler à la police, bien consciente qu’ils sont bons à rien. Tout ce qu’elle cherche à savoir, c’est si quelqu’un est apte à lui rendre justice, ou si elle doit commencer à échafauder un plan pour le faire elle-même - ou avec l’aide de certains de ses proches, particulièrement bien placés pour ce genre de combines.

« Donc.. tu penses qu’un jour j’arriverai à gérer cette intensité ? Parce que moi j’ai surtout peur de devenir fou, en fait. » Instinctivement, elle vient porter une main contre sa joue pour le rassurer, avant de rapidement se reprendre. Elle n’a pas le droit d’agir ainsi, elle ne peut pas se permettre de le faire non plus. La main retrouve une place contre son ventre, partie de son corps qu’elle cherche éternellement à protéger, quand bien même elle n’a pas été enceinte depuis un certain temps maintenant. “T’es plus fort que tu le crois. Pense à tout ce que tu as déjà traversé, et regarde à quel point tu tiens encore debout.” Il rechute parfois, mais cela ne fait que prouver un peu plus encore à quel point il est humain, lui. Il ne peut pas être éternellement fort et surpuissant, il ne peut pas rester de marbre face à toutes choses. Il a des failles, des peurs, des doutes, et il n’y a rien de plus normal à tout cela, surtout à son âge. Que Lily n’ait jamais accepté une telle évidence pour sa personne ne la fait que lui donner davantage envie de pardonner Carl. Il ne deviendra pas fou. Il n’est pas fou. Elle le saurait, elle l’aurait vu. Matt l’aurait vu aussi, et Matt ne se trompe jamais sur les gens, encore moins ceux qu’il embauche dans son café. “Je pense qu’un jour t’arriveras non seulement à la gérer, mais surtout à en faire ta force.” Cela n’a pas à être un frein, ni même un défaut. Elle en est persuadée et elle veut croire en ses propres paroles, aujourd’hui plus que jamais. Parce que c’est Carl, et parce qu’elle a décidé qu’il était voué à faire de grandes choses, ce qui ne peut pas aller de pair avec le fait de fondre en larmes à la moindre remarque d’un client mécontent. Et si le prénom de son défunt mari fuite bien malgré elle d’entre ses lèvres, Carl le remarque et le souligne avec une certaine douceur qu’elle apprécie sincèrement. « Tu sais je pense souvent à lui. » Elle ne le sait pas, non, mais elle le croit bien volontiers, parce qu’elle est elle-même bien placée pour savoir à quel point Matt a eu un impact dans la vie des personnes qu’il a connues. Même quelques semaines, quelques mois à peine. Un simple instant suffisait pour que le charme opère, et c’est celle qui est tombée amoureuse de lui devant l’autel qui le dit. « J’oublierai jamais qu’il m’a tendu la main quand tout le monde me rejetait. » - “Je prends le relai, aujourd’hui.” Elle n’a pas su lui tendre la main elle aussi à l’époque, elle le sait et en est désolée, mais ce n’est qu’une raison de plus pour se rattraper à partir de maintenant. Carl n’est pas seul. Il ne sera plus jamais seul. Elle est différente de Matt, elle ne sera jamais lui, mais elle peut l’aimer tout autant et à sa façon.

Prise dans un élan de confession, Lily en vient à parler de l’enfant qu’elle espère désespérément, et de ce même enfant qui n’arrive pas depuis plus de dix ans. Ni de Callum, ni d’Ezra, ni de Matt et ni d’Ezra à nouveau. Peu importe les hommes de sa vie, aucun ne semble pouvoir accéder à son désir le plus cher en ce monde: devenir mère. Et si elle le confesse finalement à Carl, ce n’est pas sans raison. « Mais.. et Matt ? » Lily esquisse un sourire en coin, mi triste mi amusé. « Pardon, je.. ça me regarde pas. » Surtout, ni lui ni elle n’ont envie d’évoquer les détails de cette histoire, et pas seulement parce qu’ils veulent garder intact le souvenir et la mémoire de Matt. Elle passe à autre chose à sa façon, mais elle n’a pas le droit de l’avouer ainsi, alors seul le silence répond à la question de Carl. Matt restera toujours dans son cœur, mais elle n’a pas le temps de pleurer davantage sa mort alors qu’elle continue de prendre en âge et de perdre en chances d’avoir un enfant un peu plus à chaque nouveau jour écoulé. Il n’a simplement pas besoin de savoir qu’elle a retrouvé les draps de l’ancien meilleur ami de Matt et son propre ex-petit-ami. Ezra lui-même ne mérite pas d’être mêlé à la discussion de la sorte. “C’est compliqué.” qu’elle se contente donc d’avouer dans un faible sourire, existant seulement pour lui prouver qu’il n’a rien dit de mal et qu’elle ne lui tient rigueur de rien. Il a eu une réaction et un questionnement naturel. Elle en aurait voulu à n’importe qui d’autre d’avoir tenu de telles paroles mais il est lui et c’est désormais un passe-partout d’une valeur inestimable. « Mais faut pas désespérer ! C’est peut-être juste pas le bon moment.. les étoiles doivent pas être tout à fait alignées là-haut, c’est tout. » La brune rigole doucement, presque poliment. Il a l’air d’un petit garçon à ainsi donner tant d’importance à l’alignement des étoiles, mais elle voudrait sincèrement le croire. Si seulement tout pouvait être aussi simple. “Je sais, je sais. Je ne désespère pas.” Elle répète ses mots dans un sourire. Ils sont pourtant véridiques: elle a vécu bien trop d’épreuves pour penser un seul instant à abandonner. Et ce n’est pas parce qu’elle voit soudainement en lui l’enfant qu’elle n’a jamais eu qu’elle s’en contente: lorsqu’elle aura un jour un enfant qu’elle aura porté pendant neuf mois et qui sera fait de la chair de sa chair et de son propre sang, tout sera ô combien différent.

« Je t’ai déjà dit que je m’occupais d’enfants ? C’est mon autre job à côté du café, au pair c’est comme ça que ça s’appelle. » Ils n’ont jamais discuté de beaucoup de choses, à vrai dire, et tous deux sont plutôt bien placés pour le savoir. Alors, Lily hoche la tête de droite à gauche, avouant ainsi qu’elle n’en savait rien, tout comme elle ignore encore à peu près tout à son sujet. Alors, il s’occupe d’enfants, et cela suffit à réchauffer un peu plus encore le cœur de l’australienne. Il est un bon garçon, c’est indéniable. “Et ça te plaît ?” La fibre paternelle, c’est inné. Ce n’est pas quelque chose qui s’apprend, même avec beaucoup de patience. « Bon les bébés c’est pas trop mon truc mais dans quelques années je pourrai peut-être m’occuper de tes enfants aussi, enfin, si t’as besoin d’un au pair et si je suis encore là, surtout. » Le sourire de Lily est immense, mais il n’a jamais été aussi triste. Le fait est qu’elle n’est pas assurée d’avoir un enfant, même dans plusieurs années. Pourtant, elle aimerait plus que tout le laisser prendre soin de sa progéniture, surtout alors qu’il a déjà toute sa confiance. « En Australie je veux dire. » - “J’avais compris, ne t’en fais pas.” Elle le rassure donc aussitôt, ne voulant pas laisser plus de poids au sous-entendu qui n’était de toute façon pas le sien. Bien sûr qu’il sera toujours là dans un an, deux, dix. C’est ici chez lui, maintenant. Il a des personnes qui l’aiment, ici. Pourquoi voudrait-il retourner ailleurs? Matt est parti, il ne peut pas en faire de même. Il ne peut pas être une nouvelle personne qu’elle perdrait, pas alors qu’elle commence à l’estimer beaucoup trop, ayant sûrement déjà franchi le point de non retour. “Tu penses pas rester, sur le long terme ? Tu voudrais aller où ?” Où est-ce qu’elle doit le persuader de ne pas aller, alors ? Quelles sont les raisons qui le pousseraient à partir et qu’elle devrait donc démonter une à une avec patience ? Elle écoute, Lily. Elle n’a que ça à faire, désormais. « Si j’te dis ça c’est parce qu’un jour le test ressortira positif, moi j’y crois. » Et elle, elle veut y croire à son tour, aujourd’hui plus que jamais, surtout alors que la présence de Carl se veut peut-être éphémère.
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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyDim 20 Mar 2022 - 14:13


☾ all these scars are somehow like a tattoo
I'll never cry because I know that it'll never change. I'll stay standing and endure it in an unknown place. There will be many times I'll almost fall, but alone, I reach out my hand, alone, I stand back up.
@LILY KEEGAN ☆ CARL FLANAGAN

tw: maltraitance infantile

Carl aimerait pouvoir dire qu’il garde quand même quelques bons souvenirs de son père, que la vie à la maison était encore supportable et l’air encore respirable avant le divorce de ses parents, mais il ne se souvient même pas d’une époque où leur vie de famille a vraiment rimé avec bonheur. Les choses étaient déjà compliquées avant le départ de Neil, l’équilibre familial a toujours été fragile et la mélancolie de plus en plus prononcée de Patsy n’a pas non plus aidé leur mariage à rester à flots. Carl ne trouvera jamais d’excuses à son père pour les avoir abandonnés mais il est bien parti de cette maison lui aussi il y a deux ans, pour fuir comme lui une atmosphère pesante qu’il ne supportait plus alors parfois il se demande s’il n’est pas déjà en train de devenir comme lui. Le fait d’avoir laissé sa mère et son petit frère avec Hector est une source d’angoisse au quotidien pour le bonhomme, il n’est certes pas parti comme un lâche puisque sa mère l’avait elle-même aidé à faire sa valise mais il n’avait peut-être pas le droit de quitter ce navire en perdition comme il l’a fait. Carl n’a sans doute pas de raison de s’inquiéter car son beau-père n’en a toujours eu qu’après lui mais il n’aime pas se dire qu’il ne peut désormais plus surveiller ce qu’il fait, ni à qui il s’en prend. Il sait pourtant que tout va mieux à la maison depuis qu’il n’y vit plus, ce qui ne devrait pas l’étonner sachant qu’il a toujours été perçu comme le chat noir de sa propre famille alors peut-être bien que tout ça lui confirme juste qu’il n’est indispensable à personne et qu’il n’est bon qu’à compliquer la vie de tout le monde. Sa mère lui dit souvent qu’il leur manque mais il n’est pas certain qu’elle voudrait le voir rentrer pour autant, après tout le calme revenu doit être reposant pour elle. Alors quand Carl effleure mentalement l’idée de retourner en Irlande pour quelques jours il se rappelle que la situation à la maison s’est considérablement arrangée suite à son départ, et il ne lui en faut pas plus pour se dire que le problème venait de lui et pour y renoncer aussitôt. « Tu es resté proche de ton frère ? » Il n’était même pas sûr que Lily rebondirait sur cette information perdue parmi d’autres mais elle semble s’intéresser à son schéma familial, et parler de Keefe sera toujours beaucoup moins douloureux que parler de leur père, ou de l’homme qui a tenté de le remplacer. Il y a pourtant eu cet accident survenu quand ils étaient enfants qui aurait pu faire perdre à son frère l’usage de ses jambes, un accident dont Carl avait été tenu pour responsable et qui avait d’ailleurs été le déclencheur des violences auxquelles il a par la suite été abonné pendant des années. Leur beau-père voulait un coupable mais Keefe, lui, n’en a jamais tenu rigueur à son ainé. Cet événement n’a jamais affecté leur relation et il a même permis aux deux frères d’être plus proches encore, c’est donc une réponse positive que Carl peut fournir à Lily alors qu’un fin sourire se dessine le long de ses lèvres. « Oui, on s’appelle souvent. Il me donne des nouvelles de la maison et moi je lui envoie toujours un peu d’argent. C’est une façon de me faire pardonner d’être parti et de l’avoir laissé avec.. » Une maman dépressive et un beau-père austère, mais ces mots restent à l’état de pensée. Keefe lui dit souvent qu’il envie sa nouvelle vie en Australie et Carl s’attend à ce qu’il finisse par l’y rejoindre un jour, même s’il entend bien l’en dissuader pour plusieurs raisons. Tant que leur père ne sera pas disposé à les assumer et que Carl trainera sa vilaine réputation il s’efforcera de tenir son petit frère loin de tout ça, pour le protéger d’une part et pour s’éviter aussi plus de soucis qu’il n’en a déjà. « Mais c’est un ado, il voudrait faire de la télé lui aussi parce qu’il trouve ça cool sauf que je veux vraiment, vraiment, vraiment pas qu’il finisse comme moi. » Keefe ne voit pas le côté problématique de sa participation à la fameuse télé-réalité, à ses yeux avoir un frère un peu connu est même plutôt classe alors que Carl l’est initialement pour de très mauvaises raisons. L’adolescent n’est pas bien conscient de tout ça parce que les répercussions en Irlande sont moindres par rapport à ici, alors en tant qu’ainé Carl se doit de veiller à ce qu’il ne suive jamais le même chemin. Son frère ne tournerait certainement pas aussi mal que lui puisqu’il n’a pas le même terrain obsessionnel à l’origine mais peu importe, Carl ne poussera jamais personne à tenter ce genre d’aventure et Keefe encore moins qu’un autre. Les yeux du garçon s’arrondissent alors qu’il vient de se confier sur la déception causée à son père, le mot honte n’étant également pas de trop. Il sait que c’est ce qu’il lui inspire car c’est ce qu’il peut lire dans ses yeux chaque fois que celui-ci le rejette, mais Lily ne porte visiblement pas sur le bonhomme le même regard que son paternel. « Je donnerais tout pour avoir un fils comme toi. » Son coeur parait se stopper pendant une ou deux secondes, juste le temps pour lui de réaliser la signification de ces mots. Lily ne doit pas se rendre compte de la plaie qu’il peut être pour des parents, ou qu’il pense être plutôt. « Tu mériterais pourtant tellement mieux.. » il souffle d’une voix basse, à peine audible et surtout pour lui-même. Ça ne fait à ses yeux aucun doute et il est persuadé que bon nombre de parents dans ce pays espèrent que leur enfant ne deviendra jamais comme lui, vu l’exemple déplorable qu’il a pu donner à la télé. Mais ça lui réchauffe quand même le cœur dans cette journée difficile car Lily est forcément sincère, elle l’est toujours. « Puis je trouve que tu supportes déjà bien assez mes bêtises au café. » Ses bêtises quotidiennes de garçon maladroit et étourdi comme les retombées de son passé télévisuel le poursuivant parfois jusqu’ici, même si de plus en plus rarement, fort heureusement. Ils n’ont pas vu la couleur d’un hater ou d’un fan par ici depuis quelques temps maintenant et c’est une bonne chose, certainement la preuve que petit à petit les choses se tassent. « Tu rends sûrement beaucoup de personnes heureuses pour avoir choisi l’Australie. » Oh, Carl voudrait tellement que ce soit vrai. Qu’à sa façon il puisse apporter un peu de lumière et de couleur dans les vies de Maisie, de Wendy ou encore de Talia, sans oublier Lily qu’il se soucie particulièrement de voir heureuse depuis la disparition de Matt. Le garçon ne prétend pas représenter grand-chose pour chacune d’elles, mais s’il pouvait au moins être la raison de leur sourire de temps en temps ce serait déjà si beau qu’il pourrait presque s’en contenter.

L’intensité avec laquelle il ressent et interprète les choses le fait en quelque sorte partir avec un handicap émotionnel dans la vie, quand on y pense. Le fait de tout prendre beaucoup trop à cœur, de dramatiser des choses insignifiantes aux yeux de beaucoup et de se dire plusieurs fois par jour que le monde entier est forcément contre lui le prédispose sûrement à souffrir, et après il se demande pourquoi il enchaine les migraines et arrive à se faire mal au cœur tout seul. Carl est toujours dans le trop, quand d’autres seront quant à eux dans le pas assez. Chez lui il n’y a pas de juste milieu, les réactions mesurées et sensées le bonhomme ne connait pas alors il faut s’attendre à ce qu’il prenne ses jambes à son cou au moindre conflit comme il l’a montré un peu plus tôt. C’est une négativité qu’il ne peut pas gérer sur le moment, son cœur et sa tête ne le supportent pas alors il fuit, c’est ce qu’il sait faire de mieux quand il ne se sent pas capable de se défendre. Les gens crieront de toute façon toujours plus fort que lui, et ça c’est quand il ne s’attend pas carrément à recevoir un coup - l’habitude, sans doute. « Peut-être que ça te permet d’éviter certaines situations plus difficiles encore, d’une certaine manière. » Dans un sens oui, ça ne doit pas être faux. La fuite comme protection, ça se tient surtout quand on craint comme Carl que chaque situation puisse dégénérer. Il veut toujours éviter ça, que ce soit de perdre complètement le contrôle, de se retrouver à la merci de la personne face à lui ou bien encore de recevoir le mot de trop qui l’achèvera. Alors oui, il doit effectivement chercher à se protéger de tout ça en optant pour ce qu’il pense être la facilité et en refusant d’affronter les choses. « J’ai juste un peu peur que ça fasse de moi un lâche, tu sais, le fait de toujours tout éviter comme ça. » Disons que ça ferait beaucoup sachant que la liste des défauts qu’il s’attribue est déjà longue, et qu’il n’est sûrement pas trop tard pour lui en trouver d’autres. « Mais bon si j’étais pas parti le client de tout à l’heure aurait fini par me voir pleurer ou va savoir quoi d’autre, et j’aurais pas survécu à une telle honte. » Il peut toujours se dire qu’il est resté à peu près professionnel sur ce coup-là pour avoir délibérément choisi de ne pas craquer devant tout le monde, mais Carl aurait largement préféré avoir les épaules pour endosser cette situation et pour tenir tête à un client désagréable, au moins une fois dans sa vie.

« Ce n’est pas les actions des autres qui te définissent. » Carl hoche timidement la tête alors que ce genre de rappel ne fait jamais de mal, mais l'impression d'en avoir peut-être trop dit avant ça commence à l'envahir et le garçon n'a soudainement pas l'esprit tranquille. Quand il était plus jeune il n'était pas question de raconter à qui que ce soit ce que son beau-père pouvait lui faire subir et encore aujourd'hui il a beaucoup de mal à placer des mots dessus, il n'arrive d'ailleurs pas à en parler de façon claire et utilisera trop souvent des images pour contourner la brutalité de l'homme et les blessures qu'il en garde. Hector ne risque pas de venir le chercher ici et pourtant il a encore cette crainte d'en parler, cette peur de briser ce tabou alors que pendant longtemps les actions de son beau-père n'ont existé qu'entre les murs de leur maison. Et encore, ça, c’est quand on se donnait la peine de bien vouloir les voir. « Ta mère sait ? Quelqu’un sait ? » Cette question remue tout un tas de choses en lui et Carl commence à transpirer, il essuie alors ses mains moites sur son jean pendant que son regard, lui, affronte difficilement celui de Lily. Il ne sera jamais à l'aise pour aborder un tel sujet mais il ne lui en veut pas de poser la question car elle s'intéresse et semble même s'inquiéter, et s'il avait eu cette impression beaucoup plus tôt peut-être que le bonhomme n'aurait pas attendu des années pour enfin commencer à évoquer les mauvais traitements dont il a fait l'objet. « Je crois qu’elle sait mais qu’elle a jamais vraiment voulu voir. » C'est ainsi qu'il l'a toujours ressenti, car on ne peut pas dire qu'Hector se cachait beaucoup. Tout était sous ses yeux, pendant des années, il lui suffisait de les ouvrir mais si on pose la question à Patsy il est probable qu'elle réponde que ses fils n'ont manqué de rien pendant leur enfance. Ce n'est pas pour rien que Carl en parle comme d'une mère à côté de la plaque, il l'a toujours connue déphasée et pour lui la faute revient à ces médicaments qu'elle prend et qui contribuent à éteindre le peu de lumière encore présente en elle. « Elle est malade, je lui en veux pas. Et j’ai jamais vraiment osé lui en parler parce que je voulais pas la rendre encore plus triste. » Lui en parler Carl l'a pourtant désiré plus d'une fois mais il comptait surtout sur elle pour se rendre compte des choses, et pour comprendre qu'Hector ne le traitait pas bien avec tous les indices qui étaient autour d’elle. Si Patsy avait bien conscience de l'existence d'un conflit avec son beau-père elle a en revanche toujours estimé que les torts étaient partagés. Carl était un enfant turbulent, il n'a jamais accepté l'arrivée de cet homme dans leur vie et il l'a bien montré, alors dans le fond les trempes qu'il ramassait devaient sembler méritées parfois.. quand Hector se contentait de ça, car soyons clair, ce n'était pas toujours le cas. Et puis sa mère savait se faire pardonner quand elle s'assurait qu'il puisse communiquer avec son père malgré l'interdiction d'Hector, c'était une façon d'acheter son silence mais le bonhomme ne l'a jamais compris. Il la défendra de toute façon toujours, Carl étant persuadé qu'elle est tombée malade à cause de lui puisque sa dépression a coïncidé avec sa naissance et que Patsy n'en est depuis plus jamais sortie. « C’est pas de sa faute, elle y peut rien si son nouveau mari est méchant. Avec elle il est pas comme ça et.. avec mon frère non plus, en fait. » Il baisse les yeux et hausse brièvement les épaules alors qu'il vient d'admettre que la violence à la maison ne s'abattait finalement que sur lui. Et ça le rassure, oui, de savoir que son frère et sa mère ont été épargnés même si ça signifie qu'il a forcément tout pris dans l'histoire. Keefe bénéficiait d'une protection ou d'une « carte d'immunité » comme il aime l'appeler depuis son accident, peut-être que sans ça Hector s'en serait aussi pris à lui mais un seul souffre-douleur s'est avéré au final tout à fait suffisant. La casse a été limitée, si on peut dire.

Mais chez lui la casse existe bel et bien, les dégâts sont probablement irrémédiables et l'adulte qu'il devient ne tient plus tout à fait droit. Tout le monde n'est pas prêt à admettre que ces sévices subis plus jeune ont pu influencer l’évolution un peu bancale du bonhomme, et les déviances qui en ont découlé. Ce serait comme lui trouver des excuses, et un stalker n'en mérite sûrement pas. Carl est-il aujourd'hui ce qu'il est parce que son beau-père ne contrôlait pas sa force ? Ça n'a pas dû aider mais il était un garçon intense aux idées obsessionnelles bien avant ça alors qui sait, peut-être qu'Hector a juste accéléré le processus. C'est la première fois qu'il met des mots sur sa peur de devenir fou car en parler le fait déjà craindre que la chose se concrétise, mais ce geste de Lily et cette main qu'elle pose furtivement sur sa joue lui fait réaliser qu'il aurait peut-être dû, cette fois encore, garder ses pensées pour lui. Il ne veut pas qu'elle puisse se dire qu'il passe sa vie à se lamenter sur son pauvre sort, tout comme il ne veut pas lui inspirer des sentiments se rapprochant de la tristesse ou de la pitié. Et pourtant Carl a de la chance, car Lily s'abstient de le juger là où d'autres n'hésiteraient pas une seule seconde à le faire. Ses insécurités se dressent parfois entre les gens et lui, certains n'hésitent pas à les sous-estimer à grands coups de « ça ira mieux demain » tandis que d'autres ne savent tout simplement pas comment y réagir, et à côté de tout ça Lily lui offre finalement une écoute à laquelle le bonhomme est très peu habitué. Alors il s'ouvre, s'épanche sans tellement s'en rendre compte pour mieux le regretter ensuite. Carl se sent minable après coup parce qu'il a l'impression d'avoir inévitablement cassé l'ambiance, mais pour sa défense ici personne ne se fendait la poire avant que cet échange ait lieu. « T’es plus fort que tu le crois. Pense à tout ce que tu as déjà traversé, et regarde à quel point tu tiens encore debout. » Il tient encore sur ses deux jambes c'est vrai, même si c'est un peu difficilement parfois. Carl avance, pas forcément dans la bonne direction mais il avance, sa vie ne s'est certainement pas arrêtée le jour où cette intensité a pris le dessus sur lui et heureusement, oui, qu'il y a tout de même une place dans ce monde pour les gens comme lui même si cette place Carl estime ne l'avoir jamais trouvée nulle part. « Je pense qu’un jour t’arriveras non seulement à la gérer, mais surtout à en faire ta force. » Lily est sacrément optimiste, il ne risque pas de l'être autant de son côté mais savoir qu'elle croit en lui fait quand même du bien à son petit cœur. Elle l'invite à croire en son futur, à se dire qu'il connaitra forcément du mieux un jour et ce n'est vraiment pas donné à tout le monde de fonder de tels espoirs en lui. Pour certains Carl est un cas désespéré dont on ne peut plus rien tirer, beaucoup s'imaginent qu'il ne sortira jamais du cercle vicieux de ses obsessions et qu'il ne trouvera aussi jamais le moindre équilibre dans sa vie, mais ces mêmes personnes ne devaient pas croire qu'il trouverait un boulot et que des gens lui confieraient leur confiance ainsi que leurs enfants. C'est un petit chemin qu'il peut se targuer d'avoir parcouru ces deux dernières années même si le plus gros est incontestablement devant lui avec encore pas mal d'obstacles en vue, c'est au moins ça d'accompli. Alors Carl sourit tout en ayant hâte qu'un jour, peut-être, ce soit enfin un peu moins fatiguant d'être lui. Un sourire devenant un peu triste à l'évocation de Matt, auquel le bonhomme avoue penser assez souvent. « Je prends le relai, aujourd’hui. » Aux yeux du garçon c'est un peu comme si un ange en avait remplacé un autre et pourtant au départ il pensait vraiment qu'il n'arriverait jamais à trouver grâce aux yeux de Lily sans Matt pour le soutenir et appuyer son choix de l'avoir embauché. Sa disparition a été un choc aussi pour cette raison, parce que Carl s'imaginait déjà finir seul contre tous, mais Lily lui a depuis prouvé que le relai était bel et bien assuré comme elle le dit. « Ça non plus je l'oublierai jamais. » Il porte même une main à son cœur pour symboliser tout ça, car ce soutien est aujourd'hui l'un des plus précieux accordés au bonhomme. Carl trouve même qu'il bénéficie d'une chance insolente entre sa patronne qui le prend sous son aile et sa famille d'accueil qui l'a tout de suite considéré comme l'un des leurs, tout en se demandant où était cette chance deux ans plus tôt en Angleterre. Là-bas ce n'était pas du tout la même histoire et pourtant il n'avait pas encore fait parler de lui à l'époque, comme quoi il faut parfois accepter de voir beaucoup plus loin que la porte à côté de chez soi.

Et finalement Lily se confie elle aussi, si intimement que Carl en est d'abord tout déboussolé. Sa maladresse le rattrape bien vite et le nom de Matt s'invite à nouveau dans la conversation comme un réflexe, alors que Lily n'a sans doute pas besoin d'entendre qu'elle ne pourra pas concrétiser son envie de fonder une famille avec son défunt époux. C'est tristement évident, et le bonhomme n'avait pas le droit de le lui rappeler. Le silence qui s'installe pèse lourd après ça, Carl a le sentiment d'avoir remué le couteau dans la plaie et son intention n'était évidemment pas celle-là. Si Lily s'accroche au projet d'avoir un enfant c'est qu'elle a peut-être retrouvé quelqu'un, voire même remplacé Matt même si cette idée déplairait beaucoup à Carl. Une chose est sûre elle ne lui doit aucun compte sur sa vie sentimentale et intime et ça, le bonhomme en a quand même conscience. « C’est compliqué. » « Je comprends. » Il essaie plutôt, car beaucoup de choses lui échappent encore. Carl peut tenter d'imaginer la déception qui doit s'emparer d'elle à chaque test revenant négatif, ses illusions brisées et le fait de se dire que ce ne sera pas encore pour cette fois. Lui aussi a déjà profondément désiré des choses hors d'atteinte et dans le cas de Lily c'est d'autant plus triste qu'elle semble y tenir par-dessus tout. Alors si l'univers peut les entendre Carl l'en conjure intérieurement : il faut à tout prix que Lily puisse voir son souhait exaucé dans l'année, sinon il n'est pas sûr qu'il pourra encore croire en quoi que ce soit. En entendant combien la situation est compliquée il s’apprête encore à se dire désolé mais il se souvient qu'il en a l'interdiction, et il refuse de toute façon d'aborder les choses avec pessimisme quand il s'agit des autres. Il a de l'espoir à revendre pour Lily, bien plus que pour lui-même, alors c'est limite s'il ne lui promet pas qu'elle aura bien cet enfant qu'elle désire comme s'il pouvait personnellement s'en assurer. S'il était magicien Lily serait déjà enceinte à vrai dire, mais à défaut de l'être il fait confiance au ciel pour opérer cette magie à sa place. « Je sais, je sais. Je ne désespère pas. » Il peut entendre la conviction dans sa voix et c'est aussi pour ça qu'il admire autant Lily. Elle ne se laisse pas décourager par ses précédents échecs, non, elle s'accroche à son rêve et c'est une leçon de vie qui servirait à beaucoup. Ne jamais abandonner, toujours persévérer, à l'arrivée c'est ce qui donnera cet enfant à Lily puisqu'elle le dit elle-même, elle n'y renoncera pas.

« Et ça te plaît ? » Il n'est pas peu fier de pouvoir répondre positivement à cette question, car sans être une vocation pour lui il faut admettre qu'au pair lui réussit plutôt bien. Si Carl a décidé de reprendre ce qu'il avait débuté en Angleterre ce n'est pas juste parce que ce boulot lui était accessible, et son agence très peu regardante sur son passé. Il s'agit aussi d'un travail enrichissant lui offrant des responsabilités qu'il ne pensait jamais avoir un jour dans sa vie et dont il parvient même à s'accommoder, sans prendre peur ni manquer de paniquer chaque fois qu'on lui demande quelque chose. Ce n'était pas gagné au départ surtout pour quelqu'un de si peu indépendant mais il grandit tous les jours de cette façon en apprenant à se débrouiller par lui-même, que ce soit dans l'entretien d'une maison ou dans la garde d'enfants le bonhomme est de plus en plus autonome et aussi de plus en plus adulte, même s’il refuse catégoriquement d’en être un. « Oui ! J’ai un bon feeling avec les enfants et ça se passe bien avec ma famille d’accueil, ils sont gentils avec moi. » Bien sûr que ça joue, ses précédentes familles ne lui ayant pas toutes laissé un bon souvenir et certaines l'ayant même traité comme leur larbin Carl voit vraiment la différence avec Talia dont il ne mérite d'ailleurs pas toujours la patience. « Et puis je fais de l’aide aux devoirs dans une autre famille aussi, c’était tellement inespéré que tant de gens me fassent confiance. » Ses yeux pétillent en le soulignant car vraiment, il n'aurait jamais cru ça possible avant son arrivée à Brisbane. Bon, ce que Carl ne précise pas c'est qu'il cache quand même quelques petites choses à tous ces gens comptant sur lui mais il ne veut pas se dire que tout pourrait changer le jour où la vérité éclatera. Si Lily peut l'accepter en connaissant son passé alors peut-être qu'eux aussi le pourront, il se raccroche fermement à cette idée parce qu'il s'en voudrait d'avoir autant progressé pour que tout tombe finalement à l'eau. « Tu penses pas rester, sur le long terme ? Tu voudrais aller où ? » Il ne sait pas si Lily a soudainement très envie de le voir rester à Brisbane parce qu'il a proposé ses services d'au pair pour son futur enfant ou si elle est juste intriguée d'entendre qu'il pourrait tenter sa chance ailleurs, mais cette question fait en tout cas écho à une réflexion que le garçon mène assez souvent avec lui-même. Car oui, il n'oublie pas d'où il vient et il garde aussi en tête que le monde est grand, et qu'il est encore un peu jeune pour affirmer qu’il fera sa vie à un endroit plutôt qu'un autre. « Le plus probable c’est que je retourne un jour en Irlande, pour ma famille et parce que.. bah c’est chez moi, quoi. » Basiquement si demain on lui demandait de déguerpir c'est à Carrick-on-Shannon que le bonhomme retournerait, là où bon nombre de ses repères se trouvent encore même si son pire cauchemar l'y attend, aussi. « Mais c’est pas prévu pour tout de suite, ça. J’ai encore des choses à faire ici même si je pourrai peut-être jamais avoir une vie totalement normale dans cette ville. » Et l'une de ces choses est bien évidemment de parvenir à renouer avec son père puisque c'est le projet qui l'avait convaincu de tout quitter pour partir en Australie il y a deux ans. Il y croit toujours sinon ce n'est pas sûr qu'il serait encore là, à se présenter à sa porte régulièrement malgré les nombreux rejets qui lui ont déjà été signifiés. Quant à cette vie normale à laquelle il aspire Carl finira certainement par voir le bout du tunnel, le phénomène qui l'entoure ne devrait pas être éternel contrairement à ce qu'il pense car tôt ou tard les gens se ficheront bien de savoir ce qu'il devient. Il finira par être oublié et il n'attend à vrai dire que ça, lui qui donnerait tout pour retrouver son anonymat et pour exister autrement qu'à travers un maudit jeu. « Désolé si je suis trop curieux mais.. » Avec tout ça Carl n'oublie pas les confessions de Lily, il préfère même recentrer leur discussion dessus car si cet échange devait bientôt toucher à sa fin il aimerait que la dernière note soit optimiste et axée sur elle plutôt que sur lui. « Tu préférerais avoir un garçon ou une fille, t’y as déjà réfléchi ? » Sa voix se fait hésitante pendant que son regard cherche à savoir s'il ne prend pas encore le risque de mettre les pieds dans le plat mais il tente, cette question le démangeant depuis l'instant où Lily s'est ouverte à lui sur son désir d'enfant. Est-ce que le fait d'avoir laissé entendre un peu plus tôt qu'elle donnerait tout pour avoir un fils comme lui signifie qu'elle se projette idéalement avec un garçon ? Il ne sait pas même si ça a une quelconque importance pour elle car ce que Lily veut c'est un enfant, avant tout. « Je me rends compte que j’aurais peut-être aimé avoir une petite sœur. » C'est posé là sans qu'on ne sache pourquoi, cette réflexion lui échappe et quitte à être parfaitement honnête il pourrait même dire qu'il aurait préféré, s'il ne risquait pas de passer pour un très mauvais grand frère.

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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyMer 30 Mar 2022 - 8:09

Elle est comme une mère qui demande à son enfant comment s’est passée sa journée à l’école, à la seule différence qu’elle n’essaye pas de rattraper huit heures de sa vie mais bien vingt ans. A ses yeux, il n’y a rien qui nécessite de souligner cette différence, sans doute trop habituée à vivre dans le mensonge pour se rendre pleinement compte de ce qui n’est pas une vérité. Qu’importe. Son avis sur le garçon a changé du tout au tout, aujourd’hui, et c’est tout ce qui importe à noter. Elle peut l’écouter parler de son frère sans feindre l’intérêt, en ayant réellement quelque chose à faire des relations qu’il entretient au sein de sa famille et avec son propre sang. Bien placée pour savoir qu’elles peuvent changer du tout au tout en un claquement de doigt, Lily tente de lui faire comprendre par des mots doux et avenants qu’il fait bien de rester proche de lui, que c’est la meilleure chose à faire puisqu’une fratrie devrait toujours rester unie malgré les problèmes. “Tu te reproches sûrement plus de choses qu’il ne t’en tient rigueur, tu sais. T’es un bon grand frère.” Elle esquisse un sourire plein d’espoir. Joseph n’a jamais pris la peine de prendre de ses nouvelles, quand il est parti de la maison en la laissant seule avec une mère déjà malade et un père qui l’était tout autant, à un autre niveau. Joseph n’a jamais été un bon frère, il ne ressemble en rien à Carl. “Nos rêves d’ado ne vont souvent jamais plus loin. Tu pourras toujours avoir une conversation avec lui à ce sujet plus tard.” Si elle ne comprend pas exactement ce que Carl veut dire lorsqu’il parle de finir comme lui, elle ne peut pourtant que comprendre toute l’inquiétude qui se veut être celle d’un grand frère. Il est un bon garçon et son petit frère l’est sûrement tout autant, raison pour laquelle elle ne doute pas un seul instant qu’ils sauront s’entendre sur ce point, projetant ses propres rêves d’une vie passée sur eux. Ils se doivent de réussir là où elle a échoué.

Elle l’a dit et elle le répétera, Lily: elle donnerait tout pour avoir un fils comme lui. Peu importe ce que cela peut réellement signifier, peu importe tout ce qui pourrait justement lui en coûter pour parvenir à ce but: elle donnerait tout. Elle ferait tout, aussi, et ce sont des paroles sans nul doute terrifiantes qu’elle cache derrière un énième sourire empathique, usant et abusant de ses traits bienveillants pour parvenir à ses fins. « J’ai juste un peu peur que ça fasse de moi un lâche, tu sais, le fait de toujours tout éviter comme ça. » C’est Joseph, le lâche. C’est Joseph, qui a tout abandonné et qui n’a jamais été le grand frère dont elle pouvait rêver au travers des histoires entendues partout. C’est Joseph, qui ne s’en est jamais voulu de rien et qui a toujours rejeté toutes fautes sur elle, sa cadette. Et lui, il ne lui ressemble en rien, Dieu soit loué. “Je peux te dire que tu es tout sauf un lâche, Carl. Tu as déjà affronté bien plus de choses que beaucoup d’adultes.” Non pas qu’elle le prenne pour un enfant, au contraire, mais personne ne pourrait avancer le contraire: il est encore un tout jeune adulte, Carl, et elle estime que la vie a déjà été bien assez dure avec elle pour qu’elle en rajoute encore une couche dorénavant. « Mais bon si j’étais pas parti le client de tout à l’heure aurait fini par me voir pleurer ou va savoir quoi d’autre, et j’aurais pas survécu à une telle honte. » Sans doute qu’il aurait été transi de honte, c’est certain, mais il n’y a rien dans une telle scène qui l’aurait réellement tué. Elle se contente d’un nouveau sourire ému, attrapant du bout des doigts le poignet du garçon pour l’entourer d’un geste tendre, essayant par la même occasion d’éloigner assez ses deux mains pour qu’il cesse de se triturer nerveusement les doigts. Sans un mot, sans un commentaire, elle laisse son pouce glisser contre les veines de son poignet, lentement, avec toute l’attention du monde.

Lorsqu’ils en viennent à aborder le sujet des sévices subies, elle n’a pourtant d’autre choix que de lui laisser à nouveau le contrôle de ses mains alors qu’il les essuie frénétiquement contre son jean. Le sujet est difficile ; elle sait de quoi elle parle, une fois de plus. « Je crois qu’elle sait mais qu’elle a jamais vraiment voulu voir. Elle est malade, je lui en veux pas. Et j’ai jamais vraiment osé lui en parler parce que je voulais pas la rendre encore plus triste. » Lily n’a jamais cherché à obtenir le soutien d’une personne ayant vécu la même histoire qu’elle ; même à ses pires ennemis, elle ne leur a jamais souhaité une telle chose. Autant dire qu’elle est bien plus attristée qu’autre chose de retrouver des pans de sa propre histoire dans celle de Carl, ce garçon qui n’hésite pas une seule seconde à s’ouvrir à elle comme si elle le méritait moindrement. Elle sait au moins une chose: jamais elle ne retournera ces informations contre le garçon, pas alors qu’il fait désormais partie de sa team, peu importe ce que cela signifie réellement. Lily hoche la tête, voyant finalement en sa mère les traits de la sienne, ne reconnaissant que trop bien cette attitude. “Je pense qu’on réagit tous différemment dans ce genre de situation. On y est jamais préparé.” Mais si elle avait été à sa place, elle le jure, elle aurait défendu la chair de sa chair et ce peu importe ce qu’il lui en aurait coûté. Les autres, c’est une chose, mais jamais elle ne pourrait tolérer qu’il arrive malheur à son propre enfant. “Tu lui trouves des excuses parce que c’est ta maman, mais je continue de penser qu’on ne peut pas rester sans rien faire face à une telle situation, tu sais…” Qu’il ne s’en prenne qu’à Carl ne peut pas constituer une excuse d’aucune sorte, et si les choses ne changent pas d’elle-même ou grâce à l’implication d’une tierce personne, alors Lily se promet d’y mettre son grain de sel et de faire tout ce qui est en son possible pour que plus jamais Carl ne puisse craindre les sévices de qui que ce soit. Ce n’est pas le genre de peur dont devrait être animé un enfant.

D’un sujet à un autre, elle est pourtant heureuse et soulagée d’entendre que son travail en tant qu’au pair lui plaise et qu’il ait effectivement quelques bonheurs dans la vie auxquels se raccrocher. Son sourire n’a plus rien d'emphatique, maintenant, et ses yeux brillent d’une lueur nouvelle alors qu’ils trouvent exemple dans ceux du garçon, plus heureux que jamais alors qu’il lui raconte cette partie de sa vie. « Oui ! J’ai un bon feeling avec les enfants et ça se passe bien avec ma famille d’accueil, ils sont gentils avec moi. » Et s’ils sont gentils avec lui, puisque cela signifie ce que cela signifie, elle est heureuse et soulagée de l’entendre. Il semble goûter à une bien meilleure vie ici, à Brisbane, et tout ce qu’elle peut espérer c’est que tout continuera d’aller en ce sens. « Et puis je fais de l’aide aux devoirs dans une autre famille aussi, c’était tellement inespéré que tant de gens me fassent confiance. » - “Je suis vraiment heureuse pour toi, tu sais.” Aussi heureuse que lui l’est en retour à la simple idée de raconter ce qu’il fait de ses journées lorsque le DBD ne l’occupe pas. Carl est sans nul doute un excellent grand frère, attentionné et dévoué, et il n’y a rien d’étonnant à ce que Lily ne soit pas la seule à le voir. Il est bien plus à sa place ici qu’il ne l’a jamais été en Irlande, maintenant elle sait qu’elle ne peut pas être la seule à le penser et qu’elle aurait possiblement des alliers, si jamais venait un jour le besoin de le convaincre de rester. Si elle lui demande où est-ce qu’il voudrait aller, ce n’est finalement que pour anticiper ses arguments contre cette idée. « Le plus probable c’est que je retourne un jour en Irlande, pour ma famille et parce que.. bah c’est chez moi, quoi. » C’était chez lui, qu’elle voudrait rectifier, tout en sachant pourtant que de telles paroles seraient malvenues et bien trop anticipées. Il a encore besoin de temps. « Mais c’est pas prévu pour tout de suite, ça. J’ai encore des choses à faire ici même si je pourrai peut-être jamais avoir une vie totalement normale dans cette ville. » - “Donne une chance à Brisbane. On serait beaucoup à être tristes que tu rentres en Irlande.S’il te plaît. Elle ne veut pas l’ajouter à la longue liste de tous les hommes qui l’ont un jour abandonnée.

Finalement, et de façon plutôt inattendue, c’est de la vie bien plus personnelle et intime de Lily qu’ils en viennent à parler, et notamment de son envie d’avoir un enfant et une famille à elle. « Désolé si je suis trop curieux mais… Tu préférerais avoir un garçon ou une fille, t’y as déjà réfléchi ? » Elle aurait sans doute reproché à qui que ce soit d’avoir une telle question, effectivement ô combien déplacée, mais Carl a une fois de plus droit à un traitement à part alors qu’elle lui esquisse un tendre sourire. Il ne lui demande pas si elle préfère un garçon ou une fille, mais bien ce qu’elle préférera, une fois le moment venu. “Je crois que j’ai toujours eu envie d’avoir une fille en premier, mais pas d’avoir un seul enfant.” Elle voudrait un garçon et une fille, Lily, c’est évident parce que c’est ainsi qu’est composée la parfaite petite famille: un papa, une maman, une fille, un garçon ; et selon ce pattern, ils ne peuvent qu’être heureux tous les quatre, avec sûrement un chien pour accompagner le parfait schéma de la parfaite famille. Elle n’aime pas l’idée d’un animal capable de salir toute la maison rien qu’en y mettant les pattes mais saurait accepter l’idée, pour le bien d’un plan final. Quoi qu’il en soit, elle se prête au jeu des questions réponses sans s’offusquer de rien. « Je me rends compte que j’aurais peut-être aimé avoir une petite sœur. » - “C’est peut-être ce que tu auras.” Les mots sont prononcés dans un même élan, tout aussi bas qu’avaient pu être ceux du garçon avant elle. Elle n’a pas le droit de les statuer d’une telle façon, encore moins de s’inventer un lien de parenté avec un gamin qu’elle ne connaît que depuis six mois à peine. “Je dois y retourner, Deklan risque d’inventer des tournées gratuites sinon.” Il vaut surtout mieux pour tout le monde qu’il ne pose pas davantage de questions à partir de cet instant, et surtout sur ce sujet en particulier. “Prends le temps dont t’as besoin.” D’un hochement de tête rassurant, elle finit donc par statuer ces quelques mots, soucieuse de ne pas briser l’équilibre qu’ils viennent de trouver dans une situation aussi difficile.
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Message(#)(cary) all these scars are somehow like a tattoo	 EmptyLun 11 Avr 2022 - 20:51


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I'll never cry because I know that it'll never change. I'll stay standing and endure it in an unknown place. There will be many times I'll almost fall, but alone, I reach out my hand, alone, I stand back up.
@LILY KEEGAN ☆ CARL FLANAGAN


Un bon grand frère, lui. Les mots de Lily résonnent comme une mélodie douce, mais sonnant un peu faux. Rien de surprenant à ça étant donné que Carl pourrait lister un grand nombre de raisons attestant selon lui qu’il n’a pas correctement tenu son rôle d’aîné auprès de Keefe, mais si on l’écoute de toute façon il n’est ni un bon frère, ni un bon fils. C’est ainsi que l’on se sent quand on estime avoir traîné toute sa famille dans la boue après ses dérives télévisuelles, même si sa culpabilité vis-à-vis de Keefe est plus ancienne que ça. Lily a peut-être raison, il doit se reprocher un peu trop de choses sachant que le principal concerné ne lui en veut ni pour son départ de la maison, ni pour l’accident, ni même pour cette image déplorable donnée de lui à la télévision. Keefe n’a pas grand-chose à voir avec son aîné et Carl en tire une étrange fierté, lui qui ne s’est jamais rêvé en modèle pour son petit frère. Au même âge Carl montrait déjà des signes de dérives futures évidentes alors Keefe semble bien parti pour ne pas emprunter le même chemin, ça lui donne l’espoir qu’il ne partira pas de travers comme il a pu le faire et qu’il aura aussi de vraies perspectives d’avenir. Mais le mauvais exemple donné par Carl plane non loin de là, faire de la télé était une erreur que le plus jeune des Flanagan ne doit surtout pas reproduire sachant que l’adolescent n’en perçoit pas vraiment les mauvais côtés - et est-ce une chance, au final, qu’il ne soit pas aussi branché réseaux sociaux que l’est Carl et soit un peu passé à côté du phénomène l’entourant ? Pas sûr, si ça doit le rendre inconscient des risques. Keefe est un garçon intelligent, ça le tuerait de le voir gâcher son potentiel dans un jeu à la noix même si son côté réfléchi lui permettrait sans doute de s’y démarquer comme Faust, les candidats capables d’utiliser leur cerveau marquant généralement les programmes du genre pour leur rareté. « Nos rêves d’ado ne vont souvent jamais plus loin. Tu pourras toujours avoir une conversation avec lui à ce sujet plus tard. » Lily se dresse une fois de plus comme la voix de la raison et face à elle Carl s’empresse d’acquiescer. En parler avec son frère est certainement la meilleure chose qu’il puisse faire et Keefe étant encore mineur il lui reste un peu de temps pour ça. Un temps censé lui permettre de peaufiner ses arguments pour être crédible le jour où il s'efforcera de lui prouver par A + B  que la télé est un monde diabolique où il ne doit jamais mettre les pieds. Bien sûr Carl n’est absolument pas objectif quand il en parle comme de la pire expérience à faire, son avis est fortement biaisé à partir du moment où les choses ont mal tourné pour lui, mais il n’est pas près d’être silencieux sur le sujet. Dans cinquante ans on l’entendra encore décrier ces programmes ainsi que les gens qui les pilotent car c’est une amertume qu’il ne pourra sans doute jamais dépasser.

Et puis il a beau retourner la situation dans tous les sens, Carl ne voit pas ce qui peut donner envie à Lily d’avoir un fils comme lui. Ce sont bien ses mots pourtant, ils semblent même sortir tout droit de son cœur alors peut-être qu’elle ne le voit pas avec les mêmes yeux que la plupart des gens, peut-être même qu’elle perçoit chez lui des couleurs là où d’autres ne voient que du noir. Lily n’a jamais hésité à lui donner sa chance, y compris lorsque les répercussions de son passé affectaient grandement son travail, mais c’est une chose de lui tendre la main et c’en est une autre de voir en lui un fils potentiel. Est-ce une façon de lui dire qu’elle ne cessera jamais de le prendre sous son aile, ou ressent-elle réellement un attachement quasi maternel pour lui, il n’est pas dans sa tête pour le savoir mais l’idée que Lily puisse devenir une sorte de deuxième maman pour lui est loin de le déranger. Carl reste juste fidèle à lui-même en se voyant automatiquement comme un boulet pour elle, s’il l’a été pour sa propre famille alors il suppose que Lily finirait par le subir elle aussi en tant que fils - comme s’il n’était pas déjà assez difficile à gérer et à suivre en tant qu’employé avec des réactions toujours plus imprévisibles. « Je peux te dire que tu es tout sauf un lâche, Carl. Tu as déjà affronté bien plus de choses que beaucoup d’adultes. » Le regard du garçon s’illumine alors qu’elle le différencie des adultes, car adulte Carl n’a jamais voulu l’être. Il refuse de grandir et d’affronter des problématiques plus grosses que lui, le fait de devoir se gérer seul lui a toujours fait peur parce qu’il aurait l’impression d’aller droit dans le mur s’il devait compter principalement sur lui-même. Il ne fait pas assez confiance aux raisonnements qu’il peut mener et aux décisions qu’il peut prendre, tout parait toujours incroyablement bancal quand ça vient de lui alors oui, Carl resterait volontiers à l’écart du monde des adultes et des responsabilités allant avec encore longtemps s’il le pouvait. « Et c’est sûrement pas fini. » il ajoute d’une petite voix soupirante, plus pour lui que pour Lily. Elle n’était pas forcément censée l’entendre, Carl a juste raté l’occasion de garder de telles pensées pour lui. La vie ne lui a pas vraiment fait de cadeau jusqu’ici et il s’attend à en voir encore de toutes les couleurs, car difficile de se projeter vers un avenir optimiste quand le présent et le passé comportent déjà leur lot d’épisodes à oublier. Il est peut-être bien parti juste à temps finalement il y a quelques minutes, entre prendre la fuite et craquer devant tout le monde Carl a fait son choix et avec un peu de recul il préfère croire que c’était le bon, ça l’aide à se sentir un peu moins piteux après coup. En guise de réponse Lily se saisit délicatement de son poignet et il profite de cet élan de douceur, appréciable car si rare. Ce geste aurait pourtant pu l’amener à se braquer si Lily ne s’y était pas bien prise, car ce poignet n’a pas toujours fait l’objet d’autant de prévenance. Celui qui s’en saisissait autrefois le faisait avec une toute autre force, et ces pensées reviennent peu à peu s’ancrer en lui à mesure que les plaies du passé ressurgissent.

En vouloir à sa mère Carl s’en sent incapable, et ce n’est pourtant pas faute d’avoir attendu qu’elle prenne sa défense pendant des années quand son beau-père avait la fâcheuse manie de se défouler sur lui. Elle ne pouvait pas rater ce qui se passait sous son toit mais elle pouvait choisir de l’ignorer, de fermer les yeux sur les agissements d’un homme qu’elle aimait et contre lequel elle ne voulait pas se dresser. On pourrait dire que Patsy a fait un choix entre son mari et son fils, qu’en refusant de s’interposer dans ces scènes presque quotidiennes elle a laissé la violence triompher au sein de leur foyer, mais Carl a encore du mal à voir les choses sous cet angle. Sa mère n’est pas et ne sera jamais une mauvaise personne, il refuse de la condamner alors qu’il sait qu’elle n’a pas toujours toute sa tête et que les médicaments qu’elle prend la coupent parfois du monde qui l’entoure. Peut-être qu’il légitime l’inaction d’une mère face à la détresse de son enfant avec de tels mots mais c’est à Hector, et à lui seul qu’il en voudra toujours. Ce sont ses mains à lui qui lui ont fait du mal, le seul vrai tort de Patsy à ses yeux est d’avoir laissé cette brute s’installer chez eux. Tout a changé le jour où il s’est fait une place dans leur quotidien, la vie à la maison n’a plus jamais été la même à partir de là et Carl non plus, par extension. « Je pense qu’on réagit tous différemment dans ce genre de situation. On y est jamais préparé. » C’est aussi ce qu’il pense, ça l’arrange en tout cas de croire que sa mère n’a pas forcément su comment réagir mais que, dans le fond, elle ne tolérait pas ce qui se passait chez eux. Ça ne veut pas dire qu’elle n’aime pas son fils, elle devait avoir surtout peur de se retrouver seule, plus qu’elle ne devait avoir peur d’Hector car il n’a jamais été menaçant envers quelqu’un d’autre que Carl. « Tu lui trouves des excuses parce que c’est ta maman, mais je continue de penser qu’on ne peut pas rester sans rien faire face à une telle situation, tu sais… » Ce n’est sans doute pas normal de rester sans réaction quand son enfant devient le souffre-douleur d’un adulte mais c’est la normalité que Carl a connu, pendant longtemps. Au point où une certaine routine s’était même installée, il y avait des jours à claques et d’autres à coups, Carl n’avait qu’à se fier à la fois précédente pour prédire ce qui l’attendait. « Elle avait ses propres problèmes à gérer, et ça n’aurait pas été aussi loin si j’avais su me défendre. » Il dirait presque que c’était honteux de sa part car c’est bien de la honte que le bonhomme ressent d’avoir été le plus faible, et d’avoir laissé Hector gagner à chaque fois. En tant qu’enfant il ne risquait pas de faire le poids face à la force d’un homme mais en grandissant il a fini par accepter tristement son sort, jamais Carl n’a rendu le moindre coup ni envisagé la moindre riposte, il tenait sûrement trop à sa vie pour ça. « Mais j’te jure que je me laisserais plus faire s’il recommençait aujourd’hui. » Façon de parler car Hector n’est pas censé pouvoir encore l’approcher, cette éventualité bien que faible suffit d’ailleurs à lui retourner le bide. Alors, est-ce que tout est vraiment différent à présent ? Il tente de s’en convaincre parce qu’il n’est plus disposé à tendre la joue face à qui que ce soit, mais Carl est toujours ce garçon chétif qu’un coup de vent pourrait terrasser. Il faut se rendre à l’évidence, n’importe quel individu déterminé à lui faire mal le réduirait en charpie sans trop d’efforts mais c’est beau de croire que le temps l’a rendu plus résistant.

Son ton et son regard changent radicalement en évoquant les bonnes choses illuminant sa vie depuis quelques temps, prouvant bien que le bonhomme n’est pas non plus persona non grata dans cette ville et que ce monde n’est pas uniquement peuplé de gens allergiques à lui comme il l’a longtemps cru. Ses différents petits jobs lui plaisent et il semble aussi faire du bon travail, il y a donc des moyens de rebondir même quand on trimballe une réputation aussi vilaine que la sienne. À côté de tout ça son père le rejette toujours et ses obsessions lui mènent encore la vie dure, ce n’est pas glorieux mais le ciel nuageux de son existence comporte quand même quelques éclaircies lui permettant d’espérer qu’un jour, même lointain, il pourra retrouver une vie normale. « Je suis vraiment heureuse pour toi, tu sais. » Il le sait oui, il lui suffit d’observer Lily pour s’en rendre compte car son sourire à ce moment-là ne trompe personne. Carl est lui-même heureux de pouvoir parler de lui d’une façon positive pour une fois, il paraitrait presque optimiste alors qu’on sait que ça n’est pas son fort mais ce sont des gens comme Lily qui l’encouragent à voir plus loin que ses soucis du moment. Ce n’est pas une très bonne journée pour tout un tas de raisons mais elle peut encore connaitre une jolie fin, cette discussion a déjà considérablement apaisé son cœur alors il n’est pas encore trop tard pour que la tendance s’inverse. Carl admet que son Irlande natale serait une destination toute trouvée s’il décrétait un jour que l’Australie ne lui réussit finalement pas, mais il ne condamnera pas ce pays sur un coup de tête comme il avait pu le faire avec l’Angleterre, où il s’était avoué vaincu bien trop facilement. Il a des choses à vivre ici, des projets à concrétiser et des promesses à tenir alors Carl n’est pas encore près de se mettre sur le départ, il n’en a pour le moment ni le besoin ni l’envie. « Donne une chance à Brisbane. On serait beaucoup à être tristes que tu rentres en Irlande. » Beaucoup sans doute pas, mais ses bêtises manqueraient peut-être à quelques personnes et ce serait suffisant pour le retenir. « C’est des gens comme toi qui me donnent envie de rester ici. » il déclare dans un sourire en mettant tout son cœur dans ces paroles. Il ne veut pas abandonner Lily, Matt et les autres repères trouvés dans cette ville, qu’ils soient sur terre ou dans le ciel, le bonhomme se raccroche à tout ce qu’il peut. « Ce serait tellement pas pareil sans vous. » Non c’est certain et c’est la première fois de sa vie qu’il se sent appartenir un minimum à un endroit dans ce monde. Il n’avait même pas cette impression chez lui en Irlande où Carl s’est toujours senti en dehors de tout et même en dehors de lui-même, alors il ne dirait pas aujourd’hui qu’il a enfin trouvé sa place mais il en prend peut-être bien le chemin, à pas de fourmi. C’est aussi la première fois de sa vie qu’autant de gens comptent sur lui alors il ne prendra certainement pas le risque de gâcher ça.

Curieux Carl l’est toujours un peu trop, ça l’a d’ailleurs perdu plus d’une fois. Il s’intéresse sincèrement à ce désir d’enfant confié par Lily, maintenant qu’il sait ça le bonhomme a même du mal à ne pas en faire une affaire personnelle parce qu’il donnerait tout pour la voir devenir maman. Oui, déjà. Il n’aura pas fallu plus de quelques secondes pour que ça lui tienne automatiquement à cœur, à partir de là ses questions Carl les retient difficilement et le voilà qui s’engouffre dans cette brèche à peine ouverte. « Je crois que j’ai toujours eu envie d’avoir une fille en premier, mais pas d’avoir un seul enfant. » Elle veut plusieurs enfants et ça ne l’étonne pas, les familles nombreuses ont longtemps été présentées comme un idéal à atteindre et il suffit de côtoyer un peu Lily pour comprendre qu’elle est attachée aux traditions. Mais ce que Carl retient c’est qu’elle voudrait d’abord une fille, cette information ne tombe évidemment pas dans l’oreille d’un sourd car c’est tout ce qu’il voulait savoir. « Oh oui, une mini Lily. » Ses yeux pétillent en le disant pendant que son imaginaire s’emballe, le bonhomme visualise déjà une fillette aux traits de poupée déambuler dans ce café avec des couettes et un regard semblable à celui de sa maman. Carl n’aurait pas été contre avoir une petite sœur lui, quand ses parents se sont décidés à ne pas le laisser fils unique il était prêt à accueillir n’importe quel bébé pour sortir de sa solitude d’enfant mais avec le recul il ose l’avouer, une petite sœur lui a probablement manqué. « C’est peut-être ce que tu auras. » Il ne sait pas s’il attribue le bon sens à ces mots dans sa tête mais Lily ferait bien de se méfier car le garçon croit facilement tout ce qu’on lui présente, de là à ce qu’il s’imagine détenir un lien fraternel avec un enfant qui n’est ni né, ni conçu, ni du même sang que lui il n’y a potentiellement qu’un pas. Il s’est déjà raconté des histoires bien plus folles auxquelles il a réussi à croire, avec lui tout est possible et ce ne serait pas la première fois que son cerveau créerait les connexions qui l’arrangent. « Je dois y retourner, Deklan risque d’inventer des tournées gratuites sinon. » Carl serait bien incapable d’estimer combien de minutes se sont écoulées depuis que Lily l’a rejoint dans ces cuisines car il a clairement perdu la notion du temps, mais il comprend bien sûr que cette discussion ne puisse pas éternellement se poursuivre. En tant que patronne Lily est déjà bien gentille de lui avoir accordé cette pause et d’avoir en plus pris le temps de discuter avec lui alors il n’en demandera pas plus, loin de lui l’envie d’abuser. « Je ferais bien d’en faire autant, les commandes vont pas se servir toutes seules. » Et le fameux client doit être loin à présent, du moins il l’espère parce qu’il voudrait pouvoir reprendre son poste sans sentir son regard peser sur lui. « Prends le temps dont t’as besoin. » Du temps Carl en a eu assez pour se remettre de ses émotions, il ne veut pas que Lily quitte cette cuisine en se disant que cet échange n’a peut-être pas servi à grand-chose alors il se redresse, et la gratifie d'un grand sourire. « T’en fais pas, ça va déjà beaucoup mieux. » Il n’a même pas à mentir pour une fois, le bonhomme se sent réellement plus léger et c’est en grande partie grâce à elle et à cette discussion qui lui a notamment permis de mettre des mots sur ses maux. Elle l’a écouté, elle l’a rassuré et elle s’est aussi abstenue de le juger, pas étonnant qu’après tout ça son regard semble lui dire merci. Carl la regarde s’éloigner tout en se disant qu’il suivra juste après, mais mentalement il tient toujours la main de Lily qu’il se jure de ne plus jamais lâcher.


~ sujet terminé :l:

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