here's to the crazy ones
Megan Williams & @Charlie Ivywreath

Damon et moi nous apprêtons à partie en lune de miel, tandis que le mariage de Charlie traverse une passe difficile. Ça paraît injuste, puisqu’elle est réellement amoureuse de son abruti de mari tandis que mon union n’est qu’une mascarade. Ça paraît injuste, mais il n’y a rien que je puisse faire pour améliorer la situation : Léo s’est installé chez Auden, le texto qu’elle m’a envoyé ne comportait que ces quelques petits mots et si j’ai eu envie d’aller brûler l’atelier du peintre, j’ai décidé de tenter de réfréner mes ardeurs. C’est de l’oncle de Damon qu’il est question, l’oncle qui a réchappé de peu à une tentative d’assassinat le jour de mon mariage, l’oncle qui n’est pas vraiment son oncle si j’en crois les révélations que le jeune italien m’a faites à l’hôpital. Sur le coup, je suis restée muette, stupéfaite une fois de plus de réaliser à quel point les Williams sont tordus. Après coup, j’ai compris à quel point la perspective de perdre son géniteur a bouleversé Damon, et il m’a fallu me rendre à l’évidence : brûler l’atelier ne fait donc plus partie de mon champ des possibles. Le cœur de Damon se briserait définitivement et je ne peux pas tirer un trait sur mes promesses alors que nous ne sommes même pas encore en 2022. J’ai promis de le mériter, ce qui revient à dire que j’ai promis d’être quelqu’un de meilleur alors je m’y emploie à mon rythme.

La preuve en est : plutôt que d’arriver chez la blonde l’esprit plein de potentiel plans de vengeance pour faire regretter à l’infidèle sa tromperie, je débarque les bras chargés de provision : des bières à la cerise et tout un tas de biscuits apéritifs plus gras et salés les uns que les autres. Il paraît que c’est comme ça, qu’on doit soutenir ceux à qui l’on tient. Pas en crevant les pneus de la bagnole de ceux qui leur ont fait du mal. Dans quel monde vit-on ? J’apprends la mesure mais la délicatesse, en revanche, n’est pas mon point fort. Je suis un bulldozer capable de foncer tête baissée vers le danger et tout obstacle, mais lorsqu’il s’agit d’être là et de soutenir quelqu’un dans sa détresse, je suis mal à l’aise. Empathe, j’ai du mal à ne pas me laisser submerger et déstabiliser par les émotions des autres et si je sais gérer la colère et la rage, je gère mal la tristesse. Lorsque Charlie m’ouvre la porte avec un sourire bien fade en comparaison de ceux que j’ai connus avant l’incident, je fais pourtant tous les efforts du monde. « T’as bonne mine. » Je mens très mal, pourquoi même essayer ? « Non, t’as une mine affreuse, je le sais, tu le sais, mais fake it until your make it, non ? Alors t’as bonne mine. » Je réitère mon mensonge éhonté avant de déposer une bise sur sa joue et d’entrer pour déposer mes victuailles sur la table basse. « Mais c’est pas grave, j’ai ce qu’il faut. T’as un décapsuleur ? » Déjà, je sors les boissons alcoolisées de mon sac de course avant de l’observer, mal à l’aise et sans oser me laisser tomber sur le canapé. L’atmosphère de l’appartement me semble en suspens. Il y a des jouets d’enfants ici et là mais aucun gosse à l’horizon - je n’ai pas les détails mais sais que c’est compliqué avec le père (qui n’est pas Léo, décidément la vie sentimentale de Charlie est bien chaotique) - et il y a des affaires qui appartiennent à Léo mais pas de mari en vue. Juste Charlie, toute seule, et mon cœur se serre alors que les confessions n’ont même pas encore commencées. « J’avais peur que tes gamins soient là. Je les adore, mais j’ai pas apporté grand-chose pour eux. » Puisque la bière n’appartient définitivement pas à la catégorie de nourriture adaptée pour des nourrissons. « Je sais pas faire dans la dentelle alors je vais juste te poser la question. Tu veux qu’on en parle ou tu préfères qu’on fasse comme si il existait pas ? » Il, Léo, l’ennemi en ces lieux (ou en tout cas, pour le moment.) Elle était seule au mariage, Charlie, ça aussi je l’ai remarqué même si je n’ai pas eu le temps d’aller discuter avec elle. J’aurais aimé, mais j’ai eu toute une flopée d’oncles et tantes italiens à gérer.

L’appartement est devenu une véritable ferme, entre le chien qui répondait déjà présent et désormais les deux chats - de Léo - qui s’y sont ajoutés. Au moins, cela rend les jumeaux ravis, lorsqu’ils viennent de temps à autres dans le loft - le reste du temps, ils rendent Charlie folle et s’occuper d’eux lui demande tout son temps. Sans doute aurait-elle dû faire passer les chats par la fenêtre en même temps qu’elle a balancé le sac d’affaires de son mari mais elle n’a pas su s’y résoudre: ils sont fidèles, eux. Depuis, elle fait avec, ayant au moins pour mérite de ne jamais s’ennuyer, ce à quoi Megan participe grandement en prenant souvent des nouvelles de son amie. Elle est l’une des rares personnes avec laquelle elle peut parler sans langue de bois au sujet de son couple et quand bien même elle ne veut pas ressembler à un disque rayé, la jeune femme se doit d’avouer que pouvoir se confier lui fait du bien. Elle n’a jamais été du genre à retenir pour elle ses pensées, de toute façon, qu’elles soient bonnes ou mauvaises ; alors autant lui dire ce que fait son mari de ses nuits: il les passe avec un italien qui n’est, de toute évidence, pas Charlie.

Elle connaît déjà la raison de la visite de Megan avant même qu’elle n’ouvre la bouche mais force est d’avouer que sa présence lui fait du bien ; elle lui rappelle que c’est la nouvelle mariée qui a en premier lieu eu l’idée de lui présenter Jo. Finalement, c’est à une blonde aux bras chargés que son acolyte ouvre la porte, tentant au mieux de cacher la tristesse prépondérante de ces derniers jours derrière un sourire d’apparat. « T’as bonne mine. » Charlie hausse un sourcil, peu convaincue par ses paroles. « Non, t’as une mine affreuse, je le sais, tu le sais, mais fake it until your make it, non ? Alors t’as bonne mine. » Voilà qui est mieux, elle n’a pas besoin d’être rassurée comme elle pourrait le faire envers ses enfants: elle a passé l’âge de ça. Elle sait que ce n’est pas en passant tout son temps libre à se morfondre sur son sort qu’elle pourrait afficher une mine qualifiable autrement que de ‘horrible’. “Alors j’ai bonne mine.” qu’elle répète donc dans un sourire, pourtant peu convaincue par la démonstration de son amie. Peu importe, de toute façon personne n’en a rien à faire de savoir la mine que peut ou non avoir la mère de famille.

Une bise déposée contre sa joue plus tard, Megan fait son chemin dans l’appartement alors que Charlie en profite pour refermer la porte derrière elle, déjà heureuse de pouvoir compter sur la présence de son amie. « Mais c’est pas grave, j’ai ce qu’il faut. T’as un décapsuleur ? » Dans un rire, elle ouvre le premier placard venu pour lui tendre le précieux objet. “Tu me prends pour qui au juste ?” Bien sûr qu’elle a chez elle tout l’attirail nécessaire pour ouvrir des bouteilles, elle ne serait pas Charlie sinon, et c’est justement à cette question qu’elle se rend compte que Megan ne la connaît que depuis peu de temps. Plus précisément, qu’elle ne la connaît que depuis la naissance des jumeaux et l’ère d’apaisement qui s’en est suivie. Pourtant, une part de la blonde se dit qu’elles auraient pu arpenter les soirées ensemble jusqu’à ne plus être capables discerner le jour de la nuit.

« J’avais peur que tes gamins soient là. Je les adore, mais j’ai pas apporté grand-chose pour eux. » L’aveu sincère de son amie la laisse souriante. Après tout, elle peut parfaitement comprendre qu’elle ne soit pas à l’aise avec des enfants, elle ne se serait pas imaginée être cette amie ayant des enfants avec tout le reste de son groupe. “Ils ont deux ans tu sais, ils ne t’en auraient pas voulu. Mais je comprends.” Elle ne l’accusera jamais d’une telle chose, ayant elle-même parcouru un long chemin avant d’accepter la présence de ces deux têtes blondes dans sa vie. C’est par un sourire chaleureux qu’elle vient ponctuer sa réponse. De toute façon, les jumeaux ne sont pas bien longtemps un sujet de discussion: Megan met les pieds dans le plat. « Je sais pas faire dans la dentelle alors je vais juste te poser la question. Tu veux qu’on en parle ou tu préfères qu’on fasse comme si il existait pas ? » Avant de répondre, elle ressent le besoin irrépressible de décapsuler sa propre bière, pour gagner du temps autant que pour se donner contenance. “Ça ne changerait rien d’en parler.” Ça ne le ramènera certainement pas et Charlie n’est pas désespérée au point de faire des courbettes, pas même le moindre pas en avant. “J’ai pas envie que tu le détestes à cause de ce qu’il se passe entre nous. Il a d’autres qualités.” Il chante faux mais connaît les paroles des chansons préférées de Charlie, est-ce que ce n’est pas une qualité suffisante pour l’apprécier ? Il est un mari horrible mais pas si mauvais dans le rôle d’ami. “Et honnêtement, j’ai pas envie de te mettre un poids de plus sur les épaules alors que tu vas partir en lune de miel. Je veux dire, je sais pas si Damon est au courant pour… les détails.” Les détails faisant de son ami l’amant de son oncle ; si ça c’est pas tordu, quand même.

Velvet revolution
Megan Monroe & @Charlie Ivywreath

« Alors j’ai bonne mine. » Voilà l’esprit. Le sourire que j’adresse à la blonde est radieux, mais compatissant. Dénué de pitié, mais avec ce qu’il faut de douceur pour ne pas avoir l’air de puer le bonheur - il paraît que je suis une jeune mariée après tout. Elle n’a pas besoin de ça Charlie, quelqu’un pour lui rappeler qu’une union heureuse et sereine est possible. Si elle connaissait l’envers du décor, elle se sentirait peut-être plus à l’aise et moi aussi, puisqu’elle a ce quelque chose qui donne envie de se confier à elle et de lui partager ses galères du quotidien, mais ce n’est pas au programme. Qui plus est, elle est une amie de Damon, je ne dois pas l’oublier, le parti qu’elle prendrait serait le sien, qu’elle m’apprécie n’y changerait rien.

En attendant, les masques sont toujours de mise alors que je viens paradoxalement armée des meilleures intentions du monde - je l’apprécie sincèrement - et surtout de victuailles destinées à lui faire oublier, au moins le temps d’une soirée, les problèmes qui lui font des nœuds au ventre. Je ne bois que rarement jusqu’à l’ivresse. J’ai trop souffert de voir ma mère se détruire à cause de l’alcool et de la drogue pour être le genre de fille qui se retourne la tête à chaque occasion. Pourtant, je ne nie pas que l’alcool a ce don de vous rendre un peu plus léger et joyeux, et c’est ce dont la policière a besoin ce soir. « Tu me prends pour qui au juste ? » - « Toutes mes excuses. » Je lui adresse un clin d'œil amusé, avant d’attraper l’ustensile qu’elle me tend. Je fais sauter une première capsule et je lui tends la bouteille en verre, avant de réitérer l’opération pour me servir à mon tour. Toutefois, je ne trempe pas les lèvres dans ma boisson avant d’avoir pris la température de la soirée. « Ils ont deux ans tu sais. » - « Deux ans. Chaque jour tu me rappelles que j’ai déjà du retard sur toi. » Je ne connais pas l’âge exact de Charlie, mais il doit être proche du mien. Les enfants de sont de toute façon pas au programme et je ne sais pas pourquoi je ressens une sorte de tristesse, à chaque fois que je le réalise. Une tristesse dont j’aurais aimé parler à la blonde mais, encore une fois, c’est proscrit. « Ils vivent chez leur père, d’ailleurs ? » Je réalise que c’est le genre de sujet que la blonde aborde peu mais, une fois n’est pas coutume, j’ai parlé avant de réfléchir et je compte sur une grosse gorgée de bière pour noyer ma question si toutefois elle la met mal à l’aise.

« Ça ne changerait rien d’en parler. » Évidemment que ça ne changera rien. Mais je sais être une oreille attentive et, parfois, pouvoir vider son sac fait du bien. Alors je me tais et j’écoute, je la laisse venir à moi puisque, contrairement à ce qu’elle affirme dans un premier temps, elle continue sur le sujet. « J’ai pas envie que tu le détestes à cause de ce qu’il se passe entre nous. Il a d’autres qualités. » - « Dis pas de bêtise.  La solidarité féminine j’ai tendance à penser que c’est une vaste excuse pour cracher gratuitement sur les hommes mais là, en l'occurrence, il a tort. » Et puisqu’il a tort, j’ai naturellement choisi mon camp : au diable la neutralité. Je n’ai rien contre Léo en tant que personne, mais j’ai quelque chose contre lui en tant qu’homme qui a brisé le cœur de Charlie. « Et honnêtement, j’ai pas envie de te mettre un poids de plus sur les épaules alors que tu vas partir en lune de miel. Je veux dire, je sais pas si Damon est au courant pour… les détails. » Je grimace, avant d’arracher le pansement : elle sera au courant un jour ou un autre, de toute façon. « Il est au courant… » Et globalement traumatisée, je pense. Je le comprends d’autant plus maintenant que je sais que le peintre est son père biologique. « Je lui ai rien dit mais… Il est tombé sur eux. J’ai pas caché que j’étais déjà au courant. » Je n’ai pas non plus précisé que j’avais aidé la blonde à prendre sa vengeance sur son époux. « Je crois qu’il préfère faire comme s’il était pas au courant, ou en tout cas s’il connaissait pas l’identité de son… » De son amant. La phrase manque de sensibilité et serait dure à encaisser pour Charlie. « De l’autre gars. » Voilà, c’est mieux. « Tu l’as mis à la porte, du coup ? » Son nom a été retiré de la sonnette, je l’ai vu. « Vous essayez de recoller les morceaux ? Ou tu veux fermer le livre et passer à autre chose ? »

« Toutes mes excuses. » Une Megan pas vraiment désolée, une Charlie pas vraiment outrée non plus, et un mensonge de plus: j’ai bonne mine. Les voilà qui s’avancent dans un mensonge attrayant dont elles n’auront aucun mal à se substituer une fois cette visite terminée et leur discussion close une bonne fois pour toutes, ce qui n’arrivera aussi que lorsqu’elles auront terminé la moindre de ces bières. Elles auraient été choisies au rayon girly, si jamais il y en avait vraiment un. Cerise Megan, vraiment ? L’idée est amusante, mais elle manque sans doute d’un peu de vodka pure aux yeux de Charlie, la mère de famille tout sauf rangée. Pour autant, elle apprécie sincèrement le geste autant que l’idée et ne pense pas un seul instant à tenir de véritables reproches à sa nouvelle amie, déjà proche à son cœur.

C’est donc avec joie qu’elle attrape la première bouteille tendue par une Megan à la dextérité insoupçonnée. Elle a des airs bien trop angéliques pour réellement correspondre parfaitement à ce rôle mais cela n’empêche pas Charlie de ne pas avoir cerné sa personne pour le moment encore ; sans doute n’a-t-elle pas essayé non plus, se contentant volontiers de savoir qu’elle est la bonne personne pour être avec Damon et le rendre heureux. « Deux ans. Chaque jour tu me rappelles que j’ai déjà du retard sur toi. » La policière esquisse un sourire empathique, elle qui ne s’attendait pas à une telle remarque de la part de la jeune mariée. Jeune et tout juste mariée, elle a la vie devant elle et encore vingt ans pour faire des enfants, il n’y a rien qui presse et elle peine à croire que Megan vit avec une telle pression sur les épaules et le cœur. “Je ne regretterai jamais leur existence mais sache que tu as le temps avant de t’extasier au rayon poussettes et de voir les prises électriques d’un tout autre œil.” Alors elle préfère encore prendre le problème dans un autre sens et l’aborder avec humour plutôt qu’un trop plein de sérieux qui serait plus que malvenu dans un tel contexte. Elle n’est personne pour lui donner des conseils parentaux, surtout pas alors qu’elle n’avait pas elle-même prévu de devenir mère aussi jeune. “Tu penses déjà aux enfants ?” Elle interroge dans un sourire amusé, curieuse d’en savoir plus sur les projets d’avenir de ses deux amis. « Ils vivent chez leur père, d’ailleurs ? » Les deux questions se chevauchent et Megan a sans doute raison de vouloir lever le voile sur une situation que personne n’a sans doute jugé bon de lui expliquer, Charlie la première - ou la dernière, dans le cas présent. “Oui, c’est lui qui en a la garde.” Elle avoue donc sans aucune fierté, sachant déjà que Megan est assez au courant des choses pour savoir qu’il est rare que ce soit le père qui ait la garde des enfants. Très rare. “Mais je les vois le week-end.” qu’elle rajoute pourtant rapidement, cherchant sans doute à se justifier auprès de son amie. Elle n’est pas une mère absente parce qu’elle ne veut pas s’impliquer dans la vie de ses enfants, cela n’a même rien à voir avec ça. Elle a simplement tout merdé du début à la fin, ce qui n’arrivera jamais à un couple tel que celui formé par les deux blonds.

La gorge nouée par ce premier sujet évoqué, en venir à parler de Léo n’arrange définitivement pas la situation. Il a d’autres qualités mais certainement pas celle d’être fidèle. « Dis pas de bêtise. La solidarité féminine j’ai tendance à penser que c’est une vaste excuse pour cracher gratuitement sur les hommes mais là, en l'occurrence, il a tort. » Alors elles n’appelleront pas ça ‘solidarité féminine’ mais elles cracheront tout de même sur le dos de Léo, voilà le plan de la soirée amené par la jeune femme. Elle arrache un sourire amusé à Charlie: bien sûr qu’il a tort, mais il reste toujours son mari, et elle l’aime bien trop pour laisser place à qui que ce soit d’autre de l’épouser à son tour. Tout ce qu’elle souhaite éviter à Megan, finalement, c’est d’être tiraillée entre plusieurs personnes, surtout alors que toute cette histoire implique Damon bien malgré lui. Elle ne veut pas être un cailloux dans sa chaussure, même si tout le problème vient de Léo: il est le seul à coucher avec l’oncle de Damon, après tout, et c’est quand même sacrément dégueulasse, dans tous les sens du terme. « Il est au courant… » - “Oh.” qu’elle répond donc instinctivement, oubliant ainsi tout ce qu’Anwar lui a appris à propos de rester neutre et impassible en toutes circonstances. Ses conseils ne s’appliquent pas face à Megan, elle n’est pas une suspecte et elle est encore moins interrogée. Alors oui: oh. Charlie ne pensait sincèrement pas que cette histoire était arrivée avec ses détails aux oreilles de Damon, mais la jeune femme semble plutôt lui expliquer que c’est sa vue qui a malheureusement été titillée. « Je lui ai rien dit mais… Il est tombé sur eux. J’ai pas caché que j’étais déjà au courant. » Au tour de Charlie de laisser l’expression de son visage parler au lieu de ses mots. Le dégoût se lit sans mal sur ses traits froncés. « Je crois qu’il préfère faire comme s’il était pas au courant, ou en tout cas s’il connaissait pas l’identité de son… De l’autre gars. » - “Ca doit être difficile pour lui aussi. Il n’aurait jamais pu s’attendre à une telle situation.” Elle est peut-être celle qu’on trompe, mais cela ne l’empêche pas de penser à son ami et à ce qu’il peut ressentir. Largement empathique, facilement émotive, elle se retient encore de vouloir directement parler à Damon de toute cette histoire - sans retenir le nom de l’autre connard - pour tenter de lui remonter le moral ou au contraire lui faire penser à autre chose. Peu importe ce dont il aurait besoin. « Tu l’as mis à la porte, du coup ? » Question qu’elle ne posera jamais en retour à Megan un jour. “J’ai jeté son sac d’affaires par le balcon, ça lui a pas vraiment laissé le choix. Charlie avoue sans grande fierté, faisant finalement quelques pas jusqu’au canapé pour ne pas qu’elles restent plantées au milieu du salon avec leurs bières à la main. Rapidement, pourtant, Megan en vient à lui poser une question dont la réponse n’est pas déjà pré-formée dans son esprit. « Vous essayez de recoller les morceaux ? Ou tu veux fermer le livre et passer à autre chose ? » Pour gagner de précieuses secondes, Charlie boit une gorgée. “J’ai pas envie de le voir ni de lui parler pour le moment. Il m’envoie des peintures de moi avec des excuses par message et même là j’ai juste envie de tout brûler.” Il est trop tard pour les excuses tout comme il est trop tard pour la peindre alors qu’il préfère encore se taper une personne qui n’est pas sa femme. “Mais ça signifie pas que je veux passer à autre chose non plus. Je… j’ai jamais eu aucune envie de me marier, j’ai refusé la demande du père de mes enfants, et je pense encore que si avec Léo tout m’a semblé naturel alors ça veut bien dire quelque chose. Qu’on est faits pour être ensemble.” Pour une personne qui ne voulait pas parler de son mari, elle est bien bavarde et fort peu avare en détails que Megan ne peut encore qu’amasser par ci par là dans l’espoir de pouvoir reconstituer le tableau final. “C’est même pas qu’il couche avec, le problème. J’aurais pu l’accepter. Le véritable problème c’est qu’il l’aime et c’est pas quelque chose qu’on peut faire disparaître d’un claquement de doigts.” Le problème, c’est qu’elle n’est même plus certaine qu’il l’aime vraiment elle alors qu’il semble fou amoureux d’un homme qui ne lui correspond en aucun point, notamment parce que Charlie voulait bien de Léo quand l’autre connard ne répondait plus à ses appels, à ses sms, et se voulait la cause de plusieurs mois passés sous sa couette à broyer du noir. Elle accepte mal que ce soit un homme qu’elle ne connaît pas qu’il puisse décider de la pluie et du beau temps dans son mariage. “Sois honnête, t’aurais réagi comment à ma place ?” Même si, de toute façon, elle ne sera jamais à sa place parce que Damon est un bon mari, lui.

Velvet revolution
Megan Monroe & @Charlie Ivywreath

« Je ne regretterai jamais leur existence mais sache que tu as le temps avant de t’extasier au rayon poussettes et de voir les prises électriques d’un tout autre œil. » J’ai certainement encore plus de temps qu’elle ne l’imagine, du genre, trouver un homme qui m’aime vraiment au point de passer outre mon statut marital, mes gênes de merde (il suffit de voir ma mère et ma jumelle) pour avoir envie de faire des enfants avec moi. Autant dire, ce qui n’arrivera jamais. Bien sûr, si on demandait à Saül, je suis certaine qu’il aurait un avis différent, je n’ai certainement pas la moindre idée de ce dans quoi je me suis engagée ou alors, nous ne nous sommes pas bien compris tous les deux. « Tu penses déjà aux enfants ? » Malgré tout ce que Charlie ignore, je fais de mon mieux pour lui répondre. « Je viens d’une famille dysfonctionnelle. » C’est le cas de le dire. « Alors d’une certaine façon, j’ai toujours pensé aux enfants. Ce que je ferais si je devenais mère, ce que je reproduirais pas, ce que je considère comme des valeurs importantes à transmettre. » A savoir rester éloigné de toute substance capable de vous empoisonner et de changer qui vous êtes. « Mais je sais que j’ai le temps. » J’esquisse un sourire radieux et rentre à nouveau dans mon personnage de jeune mariée comblée. « Tout est allé si vite avec Damon. En un clin d'œil on était fiancés et ses parents entraient dans notre vie pour planifier chaque instant de nôtre mariage. » Je réalise que mon discours peut certainement porter à confusion. « Et je le regrette pas ! Je suis toujours aussi sûre de vouloir passer ma vie avec lui, mais maintenant on a besoin de profiter l’un de l’autre, juste tous les deux. Tu vois ce que je veux dire ? » Je lui adresse un grand sourire avant de porter ma bière à mes lèvres et de lui adresser un clin d'œil. « Les enfants, ce sera dans un second temps ! »

« Oui, c’est lui qui en a la garde. Mais je les vois le week-end. » L’histoire a l’air bien compliquée et je ne pose pas plus de question : ce serait une curiosité mal placée et je n’ai pas envie de braquer la blonde. Ce n’est pas commun, en tant que mère, de perdre la garde de ses enfants. « Tu dois être d’autant plus heureuse de passer du temps avec eux quand tu les as. » Et ma vie aurait certainement été bien plus simple si ma mère n’avait eu le droit de me voir que deux week-end par mois.

« Oh. Ça doit être difficile pour lui aussi. Il n’aurait jamais pu s’attendre à une telle situation. » C’est d’autant plus compliqué que l’amant est son père, pas son oncle, et qu’il a passé plusieurs jours entre la vie et la mort suite à notre mariage. Pour peu, on se croirait dans une série dramatique. « J’ai jeté son sac d’affaires par le balcon, ça lui a pas vraiment laissé le choix. » Je ris de bon cœur face à l’aveu de Charlie. Elle paraît si douce que c’est difficile à croire, mais je suis heureuse qu’elle ne se soit pas laissée faire. « Je vois pas comment quiconque pourrait le plaindre : il le méritait. » Mais qu’est ce que ça veut dire ? Que c’est définitif ? Qu’elle veut tourner la page et se considère désormais comme célibataire ? Envisage-t-elle le divorce ? « J’ai pas envie de le voir ni de lui parler pour le moment. Il m’envoie des peintures de moi avec des excuses par message et même là j’ai juste envie de tout brûler. » Avec des peintures… Comment Léo ne réalise-t-il pas tout seul sa maladresse ? Il l’a trompé avec un artiste, un peintre qui plus est, des chocolats auraient envoyé un meilleur message. Ou des fleurs. N’importe quoi qui ne lui rappelle pas sa liaison. « Mais ça signifie pas que je veux passer à autre chose non plus. Je… j’ai jamais eu aucune envie de me marier, j’ai refusé la demande du père de mes enfants, et je pense encore que si avec Léo tout m’a semblé naturel alors ça veut bien dire quelque chose. Qu’on est faits pour être ensemble. » Je lui dirais bien que si on est fait pour être ensemble on ne va pas voir ailleurs mais ce serait hypocrite : je lui ai avoué avoir eu une liaison avec quelqu’un de pris. Je ne crois pas au mythe des âmes soeurs. Je crois que l’amour existe certes, mais qu’il est rare qu’il dure et ne s’érode jamais. Je crois que quand tout est fini, ceux qui ont trop donné finissent toujours par le regretter. « C’est même pas qu’il couche avec, le problème. J’aurais pu l’accepter. Le véritable problème c’est qu’il l’aime et c’est pas quelque chose qu’on peut faire disparaître d’un claquement de doigts. Sois honnête, t’aurais réagi comment à ma place ? » Je pousse un long soupir. Charlie me met dans une situation difficile : si je lui dit de se remettre avec lui, je lui ment et si, au contraire, je lui dit qu’elle devrait l’oublier, un malaise s'installera entre nous quand elle sera retombée dans ses bras. « Je crois pas qu’on puisse aimer sincèrement et purement deux personnes à la foi. » Tout est dans le purement. « Donc je pense que tu fais bien, de ne pas le laisser revenir tant qu’il aura pas réglé le bordel dans son esprit. » Et il mérite de se battre pour la récupérer. « Tu mérites quelqu’un qui ne t’aime que toi. Et tu mérites quelqu’un qui soit sûr de son choix, qui ne le vive pas comme un sacrifice. Léo, il a peut-être du travail à faire sur lui-même à faire avant de te mériter. Avant de pouvoir être avec toi. » C’est honnête, mais aussi la version la plus soft de ce que je pense. Quant à comment j’aurais réagi… « Après, si tu me demandes comment j’aurais réagi… Je suis pas vraiment le bon exemple. » Je suis volcanique et sanguine. « J’aurais brûlé ses affaires, empoisonné ses chats et j’aurais fait en sorte de le discréditer en l’affichant sur les réseaux sociaux. Après, j’aurais probablement engagé quelqu’un pour le tuer. » La dernière affirmation est dite sur le ton de l’humour et je laisse échapper un rire retenu, par correction. « Mais tu dois réfléchir à ce dont tu as besoin toi. Pas te fier à ce que les autres te disent. »

A la question de savoir si Megan pense à avoir des enfants, la réponse attendue n’aurait jamais pu anticiper les mots de la jeune mariée. « Je viens d’une famille dysfonctionnelle. » Prise de court, Charlie l’écoute pourtant de ses grands yeux attentifs, hochant la tête de temps à autre pour lui assurer qu’elle n’a pas perdu le fil de ses explications. Si elle affiche une mine neutre lorsqu’elle aborde la question de son enfance, la jeune policière le change rapidement pour un sourire radieux lorsqu’il est à nouveau question de Damon, leur amour et leur mariage. Ils sont faits pour être ensemble, à n’en pas douter, et elle est infiniment heureuse qu’ils aient pu et su se trouver au bon moment. Peu importe que tout aille aussi vite s’ils sont faits pour vivre ensemble de toute façon, non ? “Je vois ce que tu veux dire. Tu as raison de vouloir profiter.” Parfois, elle aurait aimé avoir cette chance elle aussi. D’autres, elle est bien trop comblée par la présence des jumeaux et leur existence pour avoir de telles pensées. Mais puisqu’ils ont la vie devant eux, ils ont bien raison de vouloir profiter de leur jeunesse et du balbutiement de leur amour pour faire tout ce dont ils ont envie: preuve en est, leur lune de miel à venir a tout de paradisiaque.

Rapidement et comme elle s’y attendait pourtant, le sujet de conversation dérive des enfants à Léo (ce qui est aussi un synonyme de ‘enfant’, à bien y repenser), laissant la blonde lui avouer avoir jeté ses affaires par le balcon sans plus de cérémonie. Au moins, ce geste a le mérite de faire rire Megan, là où Charlie se contente encore sûrement de forcer le trait. Finalement, ce que la jeune mère demande, c’est l’avis de son amie. Elle ne l’écoutera sans doute pas, c’est un fait, mais c’est au moins une chance pour elle de se targuer d’un ‘je te l’avais dit’ à l’avenir. De toute façon, elle l’a bien compris: Megan ne porte pas Léo dans son cœur, et sûrement que Charlie devrait se résoudre à avoir la même attitude à son égard. Un long soupire plus tard, la jeune femme semble avoir trouvé ses mots autant que son angle d’attaque. « Je crois pas qu’on puisse aimer sincèrement et purement deux personnes à la foi. » Et si ce n’est là que le seul problème, Charlie pourrait la rassurer et lui dire que Léo n’a rien de pure, malgré sa peau de porcelaine et son sourire enfantin - oh qu’elle l’aime, sa femme. « Donc je pense que tu fais bien, de ne pas le laisser revenir tant qu’il aura pas réglé le bordel dans son esprit. » Le problème étant qu’elle n’a justement aucune certitude qu’il arrive à régler le bordel un jour ou l’autre, surtout alors qu’on sait que toute cette comédie dure depuis longtemps déjà. Il la perd un peu plus à chaque jour écoulé mais ne semble pas s’en inquiéter le moins du monde, comme si finalement cela n’avait aucune importance. « Tu mérites quelqu’un qui ne t’aime que toi. Et tu mérites quelqu’un qui soit sûr de son choix, qui ne le vive pas comme un sacrifice. Léo, il a peut-être du travail à faire sur lui-même à faire avant de te mériter. Avant de pouvoir être avec toi. » A l’entente du terme de sacrifice, elle sent son sang se glacer. Elle mérite peut-être tout ça, oui, mais cela ne signifie en rien qu’il est celui qui pourra le lui offrir. Pour autant, elle n’aspire pas à mieux, seulement à lui. Sa gorge serrée est libérée par le rire qui s’en échappe lorsque Megan lui définit son plan d’action en cas d’adultère et tout ce qu’elle aurait fait à sa place. “Damon n’a pas intérêt à faire d’écarts.” Mais Damon n’en fera pas, parce qu’en plus de ressembler à monsieur parfait, il est Monsieur Parfait. Léo devrait prendre exemple sur ses amis plutôt que de se réfugier dans les bras d’hommes de deux fois son âge.

Pathétiquement, tout ce qui lui vient à l’esprit après les mots de son amie se résume à ‘c’est de lui dont j’ai besoin’. Pour autant, même Charlie se rend compte de l’absurdité de ces paroles, raison pour laquelle elle préfère encore les garder pour elle. Megan l’a sûrement déjà deviné, de toute façon. “J’ai revu Jo au mariage.” Les deux jeunes femmes ont l’air proches, elles en ont peut-être déjà parlé, mais elle souhaite aussi le lui dire de vive voix, comme si elle était une quelconque transition digne de ce nom. Plutôt que de faire face au problème nommé ‘Léo’ une fois de plus, Charlie préfère passer à autre chose, sans même faire semble de travailler ses transitions. “Elle est célibataire, pas vrai ?” Peut-être que Megan pourra lui répondre là où Jo s’est amusée à garder lèvres scellées - sauf lorsqu’est venu le moment d’embrasser Charlie, bien sûr. “Je sais pas comment vous avez pu vous trouver mais je l’aime bien. Elle fait uniquement ce qu’elle veut.” Et elle est belle, Jo, elle est envoûtante, Jo. Au moins, si c’est de elle dont elle était tombée amoureuse, elle aurait su dans quoi elle s’aventurait: de gros problèmes. “Je crois que sa passion première est devenue d’insulter Léo. Mais ça l’arrange bien.” Ça l’arrange bien, parce qu’ainsi au moins la blonde est plus que ouverte à l’idée de l’embrasser, même sans appareil photo braqué sur elles. De toute façon, cela ne signifie rien et elle n’est pas en train de faire pire que Léo ; alors au Diable l’avarice.

here's to the crazy ones
Megan Williams & @Charlie Ivywreath

Je me demande comment Charlie réagira si la vérité sur mon union avec Damon éclate un jour. Je me demande si elle se dira que tout ce que je lui ai dit et confié n’était qu’un rôle que je jouais ou si elle me laissera le bénéfice du doute. Elle aime beaucoup Damon, ça saute aux yeux, mais j’aime à croire que je construis peu à peu quelque chose avec elle qui ne pourra pas être balayé d’un revers de la main. J’aime croire que, si ce jour arrive, elle viendra me trouver et me laissera l’occasion de m’expliquer. Mais je n’en suis pas sûre. Pourtant, dans ce que je lui partage, il y a un peu des deux : il y a une part de masque, celui de madame Williams, et il y a moi, Megan, ce que je pense et comment je ressens réellement les choses. Je viens vraiment d’une famille dysfonctionnelle. Je m’en suis déjà posée des tas, des questions, sur ma volonté de donner la vie, ce que ça implique à mes yeux et comment ne pas reproduire les erreurs de ma mère. Tout ce que je lui confie, dès que je sors de mon rôle de jeune mariée comblée, c’est la vérité. « Je vois ce que tu veux dire. Tu as raison de vouloir profiter. » - « Il y a encore un an, je connaissais même pas Damon. Ca me semble dingue dit comme ça. » Et je le connaîs même depuis moins longtemps encore que ce qu’elle croît. Ce qui est dingue, ce n’est pas tant de partager un amour fou qui n’existe que pour les apparences, mais c’est de penser que, quelles que soient les circonstances, nos destins n’en sont pas moins liés pour autant. Est-ce qu’il en voulait, des enfants, Damon ? Est-ce qu’il compte toujours trouver un moyen d’en avoir malgré les circonstances ? Est-ce qu’il a réfléchi à tout ça ? Est-ce que ça lui fait peur ? Est-ce qu’il m’implique à un quelconque niveau dans tout ça ?

« Damon n’a pas intérêt à faire d’écarts. » - « C’est Damon. » Si seulement elle savait. « Je crois pas qu’ils soit capable de faire autre chose que se préoccuper des autres. » La seule différence entre la réalité et ce que Charlie pense comme étant vrai, c’est la notion d’écart dans mon mariage. A mes yeux, convier son ex amant à notre mariage sans me prévenir au préalable, c’était humiliant et c’est la définition que je me fais d’une preuve d’irrespect. Sauf qu’aucun de nous deux ne sait vraiment s’il y a des limites et où elles se situent. « Hey… » Je penche la tête, et lui renvoie un sourire triste. « Si, comme toi, Léo pense aussi que vous êtes faits pour être ensemble, il se souviendra comment faire marcher ce qui lui sert de cerveau et vous vous retrouverez. » Quant à moi, je ne sais pas si je suis réellement optimiste à ce sujet, mais elle a l’air d’y croire.

« J’ai revu Jo au mariage. » Intéressée, curieuse, je relève la tête en fronçant les sourcils, un sourire amusé sur les lèvres. La transition est cocasse, quand on y pense. « Elle est célibataire, pas vrai ? » - « Elle l’est. Enfin je crois, je l’ai jamais connue dans une histoire sérieuse. » Jo est plus secrète que je ne le suis mais elle m’a tout l’air d’un électron libre. « Je crois qu’elle papillonne. » Les gens ne disent jamais rien par pur hasard et sans arrière pensée et je me demande quelles sont celles de Charlie. « Je sais pas comment vous avez pu vous trouver mais je l’aime bien. Elle fait uniquement ce qu’elle veut. » - « C’est une assez bonne façon de la décrire, oui. » J’éclate de rire en me disant que Joséphine ragera, quand je lui dirai qu’on a parlé d’elle sans lui préciser la teneur de la conversation. « Je crois que sa passion première est devenue d’insulter Léo. Mais ça l’arrange bien. » - « Elle est bien plus manichéenne qu’elle en a l’air, au fond. Les valeurs traditionnelles, le mariage, ce genre de chose, ça a de la valeur à ses yeux, contrairement à l’impression qu’elle peut donner. » La preuve, elle s’est offusquée du rôle de trainée - ses mots, pas les miens - que je lui avais donné dans toute cette histoire sans qu’elle ne soit au courant de tous les tenants et les aboutissants. « Elle était un chouilla énervée contre moi. Mais c’est une bonne amie, c’était évident qu’elle serait là. J’espère que t’as pas été trop surprise. » Et qu’elle n’aurait pas préféré que je la prévienne. « Elle l’a pas exactement dit, mais je crois qu’elle t’as trouvée cool, elle aussi. » En me donnant l’air d’une jeune fille timide et innocente (ce que je ne suis pas), j’ajoute. « Vous avez prévu de vous revoir ? »

« C’est Damon. Je crois pas qu’ils soit capable de faire autre chose que se préoccuper des autres. » C’est vrai, Megan a tiré le gros lot avec un mari tel que lui. Le pire qui puisse leur arriver, c’est qu’il rate un plat de pâtes - et encore, ce seront des pâtes ratées par un italien, alors ce sera à remettre en perspective. Pourquoi Charlie n’a pas rencontré le petit (grand) blond en premier ? Tout aurait été bien plus simple: quelques années d’amitié, un basculement soudain, et un mariage dans la foulée pour officialiser leur amour sans pareil. Le même schéma, mais avec une personne qui ne l’aurait pas trompée avec le premier connard venu. Elle aurait même trouvé un petit ami digne de ce nom à Megan pour s’excuser du dérangement, parce qu’elle n’est pas une amie aussi horrible qu’il n’y paraît, pas alors qu’elle sourit tendrement face à la réponse de la jeune mariée. « Si, comme toi, Léo pense aussi que vous êtes faits pour être ensemble, il se souviendra comment faire marcher ce qui lui sert de cerveau et vous vous retrouverez. » Il n’y a pas vraiment de doute pour savoir dans quel camp se range Megan, mais tous les efforts qu’elle fait pour rassurer Charlie ont au moins le mérite de faire naître un sourire sur le visage de cette dernière. Qui plus est, elle a réellement envie de croire en ces paroles ; ce qui est bien plus facile que de directement croire en la capacité de Léo à voir le problème en face et arranger la situation de lui-même.

Il est plus facile de redevenir elle-même et vouloir le beurre, l’argent du beurre, ainsi que (et surtout) le cul de la crémière. Non pas qu’elle y pense réellement, loin de là, mais garder cette idée présente telle une utopie a tout pour lui donner une raison de se battre au quotidien. Le raisonnement est paradoxal mais ô combien une habitude pour Charlie. « Elle l’est. Enfin je crois, je l’ai jamais connue dans une histoire sérieuse. » Charlie hoche la tête, intéressée par la moindre information qu’elle pourrait lui rapporter sur Jo bien plus que rassurée par le fait qu’elle puisse être célibataire. Si tel n’avait pas été le cas, elle ne se serait pas retenue pour autant, incapable de répondre à l’adage voulant qu’on ne devrait pas faire à autrui ce qu’on ne voudrait pas qu’il nous arrive non plus. Blah, blah, blah, ennuyant. « Je crois qu’elle papillonne. » Ça par exemple, c’est pourtant une information qui arrange la blonde. Elle s’y connait, elle aussi, en papillonnage, et c’est sûrement ce à quoi elle aurait toujours dû s’en tenir: pas d’enfants, pas de mariage non plus. Tout aurait été bien plus simple avec une telle configuration. « Elle est bien plus manichéenne qu’elle en a l’air, au fond. Les valeurs traditionnelles, le mariage, ce genre de chose, ça a de la valeur à ses yeux, contrairement à l’impression qu’elle peut donner. » - “Elle t’en a parlé ?” L’étonnement se lit sur les traits de la jeune policière. Jamais elle n’aurait imaginé Jo en avoir quoi que ce soit à faire du mariage, et encore moins des valeurs traditionnelles au sens large du terme. Elle va où le vent la porte, elle fait ce qui lui chante et, surtout, elle vit sans attaches. Dans un sens, elle représente une version idéalisée de la vie que Charlie aurait voulu mener, si jamais elle n’aimait finalement pas autant ses enfants et son mari. « Elle était un chouilla énervée contre moi. Mais c’est une bonne amie, c’était évident qu’elle serait là. J’espère que t’as pas été trop surprise. » Surprise, elle l’a effectivement été. De là à dire qu’elle ne s’en est pas réjouie, ce serait un immense mensonge qu’elle ne veut pas imposer à son amie - qui plus est alors qu’il y ait de forts risques que des invités les aient vues ensemble. “Dans le bon sens uniquement. On a un peu parlé.” Parlé, voilà ce qu’elles ont fait. Peut-être qu’elle n’a pas à donner autant de détails à Megan ; son avis sur la question n’est pas encore tranché. « Elle l’a pas exactement dit, mais je crois qu’elle t’as trouvée cool, elle aussi. » Le sourire de la jeune mère s’agrandit d’une façon bien différente, désormais, mais tout aussi sincère. “Je l’ai trouvée cool aussi.” Même si, en retour, elle ne lui a pas exactement dit de la sorte et qu’elle a plutôt papillonné de ses grands yeux clairs et de ses lèvres contre les siennes. « Vous avez prévu de vous revoir ? » - “Non, pas vraiment. Mais j’ai son numéro et elle a le mien. Je pense que ça arrivera sur un coup de tête, tu sais.” Parce que ça finira forcément arriver, au moins parce que c’est ce que Charlie veut, indépendamment du fait que Jo semble bien plus occupée à repousser la blonde dès qu’il ne s’agit déjà plus de l’embrasser autour d’un verre. “Tu ne m’as jamais dit comment vous vous êtes rencontrées. Et sans vouloir te vexer, mis à part dire qu’elle veut te tuer pour avoir eu l’idée des photos, elle n’est pas bien loquace à son sujet non plus.” Mais finalement, tant qu’il n’est pas question de son imbécile de mari, Charlie veut bien parler de tout le reste sans retenue.

Velvet revolution
Megan Monroe & @Charlie Ivywreath

« Je sais ce que tu te dis. Que mon mari à moi est génial, mais t’as pas intérêt à essayer de me le voler. » Je ne me sens nullement menacée par Charlie et je le prouve en appuyant ma blague d’un sourire amusé. Damon et moi ne sommes pas un vrai couple et, de toute façon, je n’imagine pas la blonde capable de faire ça. D’une part parce que j’aime penser que nous sommes réellement en train de devenir amies et d’autre part parce que je doute qu’elle soit capable d’aimer quelqu’un d’autre que son infidèle d’âme-soeur. Est-ce que j’y crois, à ce concept ? Pas des masses, mais elle semble persuadée qu’elle est Léo sont faits pour se retrouver alors, pour elle, j’ai envie de faire l’effort de prétendre que ça peut exister.

« Elle t’en a parlé ? » Je hoche la tête en plissant le nez. « Oui et non. Entre deux reproches, elle m’a glissé qu’elle était pas une traînée, et je pense que ça l’a blessée que je la mette dans ce genre de situation. » Mais au-delà de la situation, j’ai compris entre les lignes que la brune ne trouve pas que des défauts à Charlie. « L’adultère, je crois que ça dépasse sa limite morale. Enfin, j’en sais rien, mais c’est ce qu’elle chante alors. » Je hausse les épaules, avant de porter mes lèvres à ma bière fruitée, avide de détails concernant la seconde rencontre entre mes deux amies. Je sais l’une d’elle piquante, je découvre à l’autre un tempérament bien plus épicé que je ne l’aurais soupçonné. « Dans le bon sens uniquement. On a un peu parlé. » - « Elle était venue avec un type non ? Elle t’as dit qui c’était ? » Contrairement à ce que pourrait penser Charlie - nous sommes des amies proches, Joséphine et moi - nous ne sommes pas le genre à tout partager, fréquentations  et connaissances. Le brun qui l’accompagnait, je ne le connaissais pas puisque nos vies ne se mélangent que rarement. Pour être honnête, je pense que c’est ce qui fait le charme de cette amitié atypique à mes yeux. Jo est un vent de fraîcheur sur un quotidien qui ne l’est pas toujours. « Je l’ai trouvée cool aussi. » Evidemment. Jo représente la liberté et l’indépendance. Certes, ces deux choses sont accompagnées d’une certaine dose d’incertitude et de non maîtrise de la situation, mais vu le chaos qu’est la vie de la blonde en ce moment, je me doute que la compagnie de la brune lui a semblé attrayante. Cool à quel point ? Qu’envisage-t-elle avec elle, puisqu’elle est toujours folle de son époux ? « Non, pas vraiment. Mais j’ai son numéro et elle a le mien. Je pense que ça arrivera sur un coup de tête, tu sais. » - « Qu’est ce qui arrivera sur un coup de tête exactement ? » Je ne suis pas là pour jouer au flic. Jo est assez forte et indépendante pour que je ne sorte pas à Charlie le traditionnel ”si tu lui brises le cœur je te brise les genoux” : ça n’arrivera pas. Cependant, j’ai du mal à cerner ce que la blonde attend et cherche réellement, avec Joséphine et j’ai du mal à voir comment tout ça pourrait bien se terminer. « Tu ne m’as jamais dit comment vous vous êtes rencontrées. Et sans vouloir te vexer, mis à part dire qu’elle veut te tuer pour avoir eu l’idée des photos, elle n’est pas bien loquace à son sujet non plus. » J’explose de rire, avant de secoue la tête, le mensonge - ou plutôt la réalité arrangée - déjà tout prêt dans ma tête. « Je l’ai vue dans un bar. Je la trouvais belle, intéressante et j’ai sorti mon appareil photo pour prendre quelques clichés d’elle au naturel. » C’est quelque chose qui aurait pu arriver. « Elle a cru que j’étais paparazzi et m’a sauté à la gorge. Comme si ses frasques intéressaient encore qui que ce soit. » Les grands jours de Joséphine Carter sont loin derrière elle, et je ne me suis pas faite prier de le lui rappeler. « Je lui ai payé un coup et ça a commencé comme ça. » Je ne précise pas que la brune m’a sorti son numéro de drague lourde, avant de comprendre que je n’étais pas intéressée. « J’aime bien l’avoir dans ma vie. Tu peux presque tout lui raconter sans qu’elle émette de jugement. » Et parmi un océan de mensonge, cette affirmation est une goutte de vérité.

« Je sais ce que tu te dis. Que mon mari à moi est génial, mais t’as pas intérêt à essayer de me le voler. » - “Touchée.” qu’elle rigole donc volontiers, pas sérieuse le moins du monde (non pas qu’elle pense réellement à lui voler Damon, mais justement parce que cela ne lui viendrait jamais à l’idée).

Rapidement, et sans que cela ne dérange Charlie le moins du monde (bien au contraire), la discussion en vient à tourner autour de la personne de Jo. Pour le moment encore, elle se contente d’amasser le plus d’informations à son sujet, en apprenant sans doute bien plus grâce à Megan que la première concernée elle-même. Peu importe, ce n’est en rien un problème pour Charlie dont la morale sait s’adapter à toutes les situations. « L’adultère, je crois que ça dépasse sa limite morale. Enfin, j’en sais rien, mais c’est ce qu’elle chante alors. » La blonde hausse les épaules, feignant la désinvolture alors qu’en réalité, elle ne sait surtout pas quoi faire d’une telle information. Jo et elle n’ont jamais pris le temps d’avoir des débats philosophiques, et surtout pas de chacune donner leur avis sur leur vision d’un couple. Tout ce qu’elle a compris, c’est que la brune tenait à son indépendance et qu’elle serait sûrement prête à payer le prix nécessaire pour l’obtenir, et la conserver le cas échéant. Elle n’en demande pas plus et sans doute ne veut-elle pas en apprendre davantage non plus, se complaisant parfaitement de l’image qu’elle a de Jo et des rêves inatteignables qu’elle s’imagine brièvement, avant de toujours retourner sur Terre. « Elle était venue avec un type non ? Elle t’as dit qui c’était ? » Et Charlie de répondre sans la moindre hésitation, ne voyant pas en l’homme en question le moindre secret à garder. “Il s’appelle Nicholas. Ils sont amis, apparemment. Elle m’a dit qu’elle se fichait pas mal de lui et je pense que y’a du vrai.” Y’a du vrai, mais il n’y a pas que ça non plus, parce que comme la blonde lui avait déjà dit, elle reste persuadée qu’on invite pas le premier venu au mariage d’une de ses meilleures amies. Mais peu importe. Ils peuvent bien coucher ensemble les soirs de pleine lune ; cela ne la regarde pas.

Mais peu importe. Il n’est pas le vif du sujet. Il était intéressant le soir du mariage, mais aujourd’hui Charlie s’est déjà lassée. Elle a autant de patience que ses jumeaux de deux ans et se doit d’être toujours occupée par un sujet ou un autre, lesquels doivent se renouveler. « Qu’est ce qui arrivera sur un coup de tête exactement ? » La blonde laisse ses yeux remonter dans ceux de sa comparse après avoir bu quelques gorgées, amusée par la curiosité de Megan. Elle n’en manque pas une miette. “Qu’on se revoit.” Elle rétorque donc sans le moindre détail, elle-même incapable de prévoir de quoi pourrait être fait une nouvelle rencontre avec Joséphine. Conditionnel: la brune est imprévisible, rien n’est jamais assuré avec elle. S’il est vrai qu’elle aimerait beaucoup la revoir, surtout si elles perpétuent cette tradition des baisers volés, elle sait pourtant qu’elle ne doit pas compter dessus. Et de toute façon, elle est une femme mariée. Peu importe ce que cela signifie réellement. Curieuse, Charlie a déjà l’esprit ailleurs, prenant enfin le temps de demander à Megan comment elle a pu croiser la route d’un spécimen tel que Josephine et surtout accrocher son wagon au sien. « Je l’ai vue dans un bar. Je la trouvais belle, intéressante et j’ai sorti mon appareil photo pour prendre quelques clichés d’elle au naturel. » Alors la policière rigole à son tour, comprenant finalement la réaction qu’avait eu Megan quelques secondes avant. “Simple, efficace.” Et voilà pourquoi Charlie aurait dû faire une carrière dans la photographie: elle aurait eu l’excuse parfaite pour approcher toutes les jolies filles des bars ; parce que cette technique fonctionne bien mieux avec elles que la gente masculine, il faut bien l’avouer. « Elle a cru que j’étais paparazzi et m’a sauté à la gorge. Comme si ses frasques intéressaient encore qui que ce soit. » Du Josephine tout craché qu’elle aurait répondu, si elle avait moindrement le droit d’agir ainsi, comme si elle connaissait réellement la jeune femme en question au-delà de sa manière d’embrasser. « Je lui ai payé un coup et ça a commencé comme ça. J’aime bien l’avoir dans ma vie. Tu peux presque tout lui raconter sans qu’elle émette de jugement. » La blonde esquisse un sourire en coin, heureuse d’avoir pu entendre l’histoire des balbutiements de leur amitié. C’est haut en couleur et inattendu, à l’image des deux jeunes femmes. Comme elle est heureuse que Damon ait croisé la route de Megan, elle l’est tout autant qu’il en ait été de même pour Josephine. “Elle doit détester Damon, pas vrai ?” Qu’elle demande donc, profitant du fait qu’elle pense une fois de plus au blond pour l’inclure dans la discussion bien malgré lui. Il est parfait, lisse, gentil, beau, intelligent, riche ; il est ennuyant pour tous ceux qui veulent du mordant, alors Joséphine doit le détester, elle n’y voit que ça et, loin de l’agacer, c’est une idée qui a de quoi l’amuser. “J’ai rencontré Léo dans un bar à l’époque, aussi. Comme quoi, ça permet de faire de belles rencontres, parfois.” Elle termine donc, sincère. Pour une fois, ses mots ne sont pas destinés à blesser son mari ou à ternir son image. Peu importe où en est leur relation aujourd’hui, elle est heureuse d’avoir croisé sa route.

Velvet revolution
Megan Monroe & @Charlie Ivywreath

« Il s’appelle Nicholas. Ils sont amis, apparemment. Elle m’a dit qu’elle se fichait pas mal de lui et je pense que y’a du vrai. » Jo se fiche de tout le monde si on l’écoute, de moi notamment, pourtant, elle était présente à mon mariage et ce malgré la crasse que je lui ai prétendument faite. « C’est Jo tout craché ça. Dire qu’elle aime quelqu’un d’autre que sa nana ça lui écorche la bouche. » Et ce type là, si elle l’a ramené à mon mariage, c’est qu’il n’est pas personne. « Mais si elle le fréquentait… » Et surtout si c’était sérieux. « Je crois que je serai au courant. » J’ose espérer : il n’y a pas un seul détail croustillant de ma vie privée que je cache à la brune. Elle est la gardienne de mes secrets et si je suis consciente d’être plus bavarde qu’elle, elle me confierait quelque chose d’aussi important (ou alors je la tuerais de mes propres mains.) « Qu’on se revoit. » - « Hum hum… » Dit m’en plus. Elle ne nourrit malheureusement pas ma curiosité, à faire de ses intentions un secret, mais peut-être ne sait-elle simplement pas à quoi s’en tenir avec la sulfureuse brune : cela ne surprendrait personne après tout. Joséphine sait être un vrai mystère, quand elle a décidé de n’en faire qu’à sa tête.

Cependant, je ne comprends pas Charlie. Elle estime que Léo et son âme sœur et souhaite de tout son cœur qu’ils retrouvent leur chemin l’un vers l’autre, mais son visage s’illumine un peu quand je parle de Jo. A quel jeu joue-t-elle ? Comme son mari, ne sait-elle pas tempérer ses pulsions ? Est-elle de nature infidèle, elle aussi ? Je ne comprends pas, mais je ne juge pas pour autant, et je ne pose pas la moindre question, non pas parce que cela ne me regarde pas - je suis d’une curiosité maladive - mais parce que j’ai peur de la braquer. « Simple, efficace. » - « T’as dû remarquer qu’elle a cette légère tendance à croire qu’elle est le centre du monde. » Elle n’aurait pas participé à un télé-crochet, le cas contraire. « Je savais même pas qui elle était ou qu’elle avait participé à cette foutue émission. » Foutue émission qui l’a rendue muette, puisque je ne l’ai jamais entendue chanter en public.

« Elle doit détester Damon, pas vrai ? » Je fais la grimace, penchant la tête à gauche, puis légèrement à droite, comme cherchant la bonne réponse à cette question. « Je crois pas qu’elle déteste vraiment Damon. Elle a jamais pris le temps de discuter avec lui, de toute façon. » Elle se base sur les apparences et surtout sur le contexte. « Je crois que c’est l’idée de l’existence d’un Damon, qu’elle déteste. » Et avant que Charlie ne pense que je sous entend que Jo est jalouse, ou que je suis en train de lui avouer que la brune est mon ex ou quelque chose du genre, je précise le fond de ma pensée. « Elle pense que c’est une connerie, de se marier si jeune et sur un coup de tête. Ses mots, pas les miens. » Parce que, évidemment, je ne suis pas censée sous-entendre que cette union est autre chose que le résultat d’un coup de foudre suivi d’une décision mûrement réfléchie. « Elle comprend pas, elle se dit qu’on a toute la vie devant nous et que rien ne pressait. Elle pense que je fais la plus grosse bêtise de ma vie. » Oui, ça elle le pense, mais pas tout à fait à cause des raisons que j’avance. « Je pense que Damon, elle le trouve juste un peu lisse. Et je crois qu’elle fait partie de ces gens qui détestent l’étalage de richesse, juste par principe. » Mais malgré tout, Joséphine est mon roc, dans toute cette histoire. La seule à connaître la vérité dans toute sa laideur et à me soutenir malgré tout. « J’ai rencontré Léo dans un bar à l’époque, aussi. Comme quoi, ça permet de faire de belles rencontres, parfois. » - « C’était quand ? » Je réalise que je ne lui ai jamais demandé comment elle et le brun s’étaient rencontrés. Pour moi, Charlie vient avec Léo, et je n’ai jamais trop creusé leur histoire, ou celle des jumeaux. « Et le père des jumeaux, il s’intercale comment dans toute cette histoire ? » L’a-t-elle rencontré après Léo ? Est-il le point de départ d’une longue relation destructrice ou bien un coup d’un soir ?

« C’est Jo tout craché ça. Dire qu’elle aime quelqu’un d’autre que sa nana ça lui écorche la bouche. » Et Charlie, elle, elle prend des notes sur ce qu’est ‘Jo tout craché’, parce qu’elle ignore justement tout de ce qui semble être une évidence pour Megan. « Mais si elle le fréquentait… Je crois que je serai au courant. » Autant dire que c’est une information qui réjouit la jeune femme, qui ne cache pas son sourire en coin. De toute façon, il n’a pas l’air d’avoir les épaules pour supporter une jeune femme tel que Jo, alors tout est bien mieux ainsi, n’est-ce pas ? Oui. Et oui, bien sûr que Charlie s’occupe seule de faire les questions et les réponses: ainsi au moins, personne ne peut la contredire. « T’as dû remarquer qu’elle a cette légère tendance à croire qu’elle est le centre du monde. » Justement, c’est plutôt une chose que la jeune femme apprécie chez la chanteuse. Elle sait ce qu’elle vaut, elle sait ce qu’elle veut, et cela ne l’exaspère que lorsque Charlie ne correspond pas à ses recherches. « Je savais même pas qui elle était ou qu’elle avait participé à cette foutue émission. » - “Je la connaissais pas non plus, si ça peut te rassurer.” Parce que Charlie n’est de toute façon pas du genre à s’intéresser aux émissions de télé-réalité, sauf peut-être lorsqu’il est question du mariage de son meilleur ami (et finalement mari). Ses mots n’ont pas vocation à créer la moindre réaction chez Megan, raison pour laquelle elle passe volontiers à autre chose, n’ayant pas de raison de déblatérer davantage autour du caractère de Joséphine.

En demandant ce qu’elle pense de Damon, la jeune mère espère sans doute recueillir assez d’informations pour savoir le genre de personne que Jo peut ou non aimer. Ce ne sont que des informations qu’elle récolte, bien sûr, rien de sérieux. « Je crois pas qu’elle déteste vraiment Damon. Elle a jamais pris le temps de discuter avec lui, de toute façon. » Mais Damon est la personne qu’il laisse paraître, alors Charlie doute sincèrement que l’avis de la brune puisse changer à son sujet s’ils venaient à avoir une discussion. L’italien peut avoir du mordant, parfois, mais il est souvent animé par des sentiments bien trop bons pour oser le faire. C’est en tout cas l’image qu’elle garde de lui, et celle qu’elle ne veut pas voir modifiée. « Je crois que c’est l’idée de l’existence d’un Damon, qu’elle déteste. » - “Elle est jalouse ?” Est la première idée qui vient à l’esprit de l’inspectrice, soudainement troublée par la formulation de cette précision. « Elle pense que c’est une connerie, de se marier si jeune et sur un coup de tête. Ses mots, pas les miens. » Oh. Pas de jalousie à l’horizon, alors (tant mieux). “J’ai eu le droit au même discours pour les enfants.” Avec la délicatesse digne de Jo ; c’est à dire sans aucune délicatesse. La confession de Charlie se fait avec un sourire, elle qui n’a aucune envie de voir la discussion virer au pathos. Elle sait encaisser les reproches pour avoir eu deux enfants aussi tôt dans sa vie, Jo n’est pas la première à lui tenir de telles paroles.

Les dernières explications de Megan, elle les écoute avec attention en hochant la tête pour prouver sa concentration. Damon n’a rien de véritablement lisse pour tous ceux qui le connaissent un minimum, mais leur mariage n’a pas besoin d’être accepté par tous les proches des deux mariés pour qu’il soit réussi. “Votre mariage était magnifique.” Elle assure alors, balayant d’un revers de la main le possible étalage de richesse. Puisqu’ils en ont, ils n’ont aucune raison de s’en priver. L’argent de Charlie lui sert uniquement à profiter de la vie, puisque tonton se charge de tout le reste, alors elle est à son tour plutôt bien à l’abri du besoin, même en ayant deux enfants à charge.
Par nostalgie et puisque le sujet s’y porte, elle en revient à parler de Léo et de leur rencontre, plus brièvement que jamais. De toute façon, elle a bien trop bu pour se souvenir du moindre détail de cette soirée. « C’était quand ? » - “Début 2017, quand il est arrivé en Australie. Il y a donc cinq ans déjà. Le temps passe décidément bien trop vite, elle ne se souvient même pas de l’époque à laquelle Léo n’était pas omniprésent et nécessaire à son quotidien. « Et le père des jumeaux, il s’intercale comment dans toute cette histoire ? » La jeune mère sourit, prise au dépourvue par la question. “On a toujours été amis, avec Léo. Chacun a vécu ses histoires.” Il a eu Clément, elle a eu John, Trent, Kane, Ariel, [...]. Oh oui, certes, d’accord, les deux listes de conquêtes sont plutôt déséquilibrées. “Trent. Le père des enfants s’appelle Trent.” L’histoire est plus simple à comprendre si elle peut au moins poser un prénom sur une personne. Pour savoir à quoi il ressemble, elle peut au moins se référer aux gènes qu’il a transmis aux jumeaux. “On a été ensemble quelques mois et je suis tombée enceinte. C’était pas vraiment prévu.” Doux euphémisme pour dire que Charlie a pensé aux moyens à sa disposition pour ne pas mener cette grossesse à terme. “On s’est séparés au début de ma grossesse mais il a toujours demandé à être présent pour ses enfants.” Chose que Charlie n’a jamais pu lui refuser (même si elle a essayé pendant un temps, certes, passons). Elle hausse les épaules, comme si elle racontait une histoire anodine. “On est en bons termes maintenant. On fait au mieux pour les jumeaux.” L’histoire est brève, condensée, dénuée de tout détail possiblement croustillant. “C’est pas une histoire enviable mais on s’en sort pas si mal, à en juger par les circonstances.” Megan sait tout ce qu’il y a à savoir, désormais, et elle peut sans doute mieux aborder les choses désormais.

Velvet revolution
Megan Monroe & @"Charlie Ivywreath"

« Elle est jalouse ? » En entendant la supposition de Charlie, je ne peux m’éclater de rire. Certes, j’ai eu le droit au numéro de drague (plutôt lourd) de Jo. Cependant, nous sommes à présent amies sans qu’il n’y ai le moindre doute là-dessus pour l’une ou pour l’autre. Je voudrais expliquer que ce n’est pas de la jalousie : que Jo s’inquiète pour moi au fond, qu’elle s’inquiète de retrouver mon corps dans une décharge parce que je ne serais plus d’aucune utilité à Saül Williams, mais je me contente de lui donner une version édulcorée des faits. « J’ai eu le droit au même discours pour les enfants. » - « Je suis pas étonnée. Elle a environ quatre vingt dix frères mais je crois pas qu’elle ait l’intention de suivre l’exemple de sa mère. » J’exagère à peine et, dans le cas présent, c’est moi qui jalouse Jo. Sa famille n’est pas parfaite mais, à mes yeux de gamine seule au monde, elle a tout ce que je rêvais d’avoir en grandissant.

« Votre mariage était magnifique. » J’esquisse un doux sourire, si seulement Charlie savait. « Merci. Disons que la fin a un peu tout gâché. » Même si je n’ai pas l’intention de m’étendre sur le sujet : le peintre, père/oncle de Damon, est un sujet tabou avec la blonde sans que quiconque ne puisse le lui reprocher. Si je ne savais pas Charlie incapable de faire du mal à une mouche, j’aurais pu croire que c’est elle qui a embauché un tueur à gage pour se débarasser de l’amant de son mari. « Début 2017, quand il est arrivé en Australie. » Leur histoire remonte, donc. Mais, si je ne m’y connaîs pas vraiment en petite enfance, je peux affirmer sans avoir peur de me tromper que les jumeaux sont loin d’avoir cet âge alors je m'interroge : Charlie et Léo ont-ils toujours eu une relation ambigüe ? Étaient-ils de simples amis ? Les enfants de Charlie sont-ils le résultat d’une aventure extra-conjugale ? Cela remettrait pas mal de choses en perspective. « On a toujours été amis, avec Léo. Chacun a vécu ses histoires. » - « Et vous vous êtes rendu compte du jour au lendemain que vous ressentiez plus que de l’amitié l’un envers l’autre ? » Ou bien était-ce là depuis le début ?

« Trent. Le père des enfants s’appelle Trent. » Trent. Trent, ce n’est pas le prénom d’un type que j’imagine auprès de Charlie. Trent, dans mon esprit, c’est le prénom de l’australien cliché qui surfe le matin, va à la salle de sport le midi soulever de la fonte, et montre ses biceps à chaque moment de la journée. « On a été ensemble quelques mois et je suis tombée enceinte. C’était pas vraiment prévu. » - « Mais tu les as gardés. » Ce n’est pas vraiment une question et j’espère que cela n’a rien d’indélicat. Après tout, son choix est surprenant : Charlie devait avoir à peu près mon âge à l’époque et aucune situation stable. Elle a eu du courage, à l’époque. « On s’est séparés au début de ma grossesse mais il a toujours demandé à être présent pour ses enfants. On est en bons termes maintenant. On fait au mieux pour les jumeaux. » - « Qu’est ce qui allait pas entre vous ? Qu’est ce qui fait que c’était pas lui, l’homme de ta vie ? » Je m’aventure peut-être sur une pente glissante, mais j’aime croire que Charlie et moi nous rapprochons petit à petit, assez pour qu’elle ne se vexe pas de ma curiosité et mon envie de comprendre un peu mieux ses choix de vie. « C’est pas une histoire enviable mais on s’en sort pas si mal, à en juger par les circonstances. » - « De toute façon, y’a que vous qui pouvez dire si vous vous en sortez bien ou pas. » Les autres n’ont pas à juger leurs choix de vie. « Je peux te poser une question indiscrète ? T’es pas obligée de me répondre si ça l’est trop. » Les doigts autour de ma bière - je l’ai à peine touchée - je cherche à comprendre ce qu’il se passe dans le cerveau de la blonde. « Avec tout ce qu’il se passe en ce moment, y’a pas des moments où tu te dis que tu aurais préféré faire des choix différents ? » Puisque qu’avec Léo, tout semble si compliqué. « Où tu te dis que tu aurais dû rester avec Trent, vivre en famille, avec un chien et une maison pavillonnaire, et tout le reste de la panoplie de la petite famille heureuse ? »

« Je suis pas étonnée. Elle a environ quatre vingt dix frères mais je crois pas qu’elle ait l’intention de suivre l’exemple de sa mère. » Charlie garde pour elle sa surprise, ayant plutôt toujours imaginé Jo fille unique. De façon évidente, il y a bien des choses qu’elle ignore encore au sujet du rossignol, et ce n’est finalement en rien pour lui plaire. Le mystère n’est attirant qu’un temps ; arrive bien rapidement le moment où Charlie désire des réponses à toutes ses questions, même celles qu’elle ne pose pas, parce qu’il est bien connu qui quiconque devrait être capable de lire dans ses pensées. Ce n’est pas comme si l’amie de Megan semblait de toute façon vouloir faire le moindre effort pour créer une relation sur laquelle poser une étiquette: elle est trop occupée à éternellement rejeter Charlie au loin pour pouvoir penser à une telle chose. Ça aussi, c’est évident, même pour la blonde qui n’accepte pas l’échec.

Alors sans doute vaut-il mieux changer de sujet, et parler du mariage récent de Megan et Damon semble être une évidence aussi facile que nécessaire. « Merci. Disons que la fin a un peu tout gâché. » Et sur ce point, personne ne pourrait sûrement la contredire. Charlie esquisse un sourire peiné, n’ayant aucun mal à comprendre ce dont elle parle: un coup de fusil, ça ne reste pas secret bien longtemps. Au final, elle est sûrement déçue de ne pas avoir eu l’idée elle-même: non seulement elle se serait assurée que personne ne rate son coup, mais aussi et surtout elle aurait évité que toute cette pagaille arrive au mariage de ses amis. “Vous vous souviendrez du meilleur.” qu’elle ment alors éhontément, bien consciente qu’on ne peut pas rayer de son esprit le fait qu’un homme se soit fait tirer dessus le soir de son propre mariage. Si cela venait à arriver à Charlie, pourtant, nul doute qu’elle saurait faire l’effort d’une immense amnésie pour y arriver. « Et vous vous êtes rendu compte du jour au lendemain que vous ressentiez plus que de l’amitié l’un envers l’autre ? » Elle est amusante, Megan, à tenir un interrogatoire sur une histoire qui n’a sûrement plus aucune intérêt de connaître, désormais. “On peut dire ça comme ça, oui.” Non, elle ne lui précisera pas qu’ils avaient déjà passé de nombreuses nuits ensemble tout comme non, elle ne veut pas avoir à lui dire combien de fois ils s’étaient embrassés et souris l’instant d’après, comme si les sentiments avaient toujours été présents. Léo ne mérite pas qu’elle continue d’expliquer à quel point elle l’aime depuis des années et a toujours mimé le contraire pour ne pas engager leur relation sur un chemin dangereux, où ils pouvaient tout perdre après avoir tout gagné. C’est ce qui semble se passer, pourtant.

Finalement, c’est l’histoire de Trent qu’elle en vient à quémander et Charlie de lui offrir, sûrement parce qu’elle n’a désormais plus rien à perdre. Elle avait jusque-là gardé pour elle de nombreux détails de son existence mais ne le juge plus aussi nécessaire désormais. Si Megan doit faire partie de son cercle proche, il y a certaines choses qu’elle doit comprendre sur le passé de la blonde. « Mais tu les as gardés. » Ce qu’elle n’avait pas initialement prévu de faire, mais passons. Le résultat est bien là, sous leurs yeux ou presque: Charlie est mère. Mère de jumeaux, depuis deux ans déjà. « Qu’est ce qui allait pas entre vous ? Qu’est ce qui fait que c’était pas lui, l’homme de ta vie ? » L’inspectrice arrache un rire faux. Ce serait sans doute plus court que de répondre ce qui allait entre eux, parce que la réponse se résumerait à ‘pas grand chose’. Trent est un homme bien, c’est indéniable, mais il n’est tout simplement pas fait pour elle ; ni elle pour lui, malgré qu’il essaye encore de lui prouver le contraire. “Tu comprendrais si tu le connaissais.” qu’elle avance alors, sans chercher à laisser la faute reposer sur Trent. Ce n’est pas ça. Simplement, il est lui. Il est trop parfait, trop lisse, trop gentil, trop compréhensif. Il est parfait sur tous rapports, Trent, le genre d’homme que les gamines rêvent d’épouser dans leurs rêves. Charlie avait les mêmes ambitions, jusqu’à ce qu’elle se rende abruptement compte que ce n’est pas une vie faite pour elle. Megan comprendrait d’autant plus pourquoi rien n’a fonctionné avec Trent maintenant que la jeune femme s’intéresse à Jo, son opposée sur tous les niveaux - même le sexe, c’est dire. Finalement, la blonde n’est pas sûre de chercher l’homme de sa vie, et le problème ne réside absolument pas dans le terme homme. Avec un H majuscule, tout reste identique: elle a trop la bougeotte pour se poser avec une seule et unique personne. La seule exception à tout ceci aurait pu être Léo, mais Léo ne semble déjà plus estimer qu’elle lui suffit. « Je peux te poser une question indiscrète ? T’es pas obligée de me répondre si ça l’est trop. » - “Depuis quand tu tournes autour du pot, Megan Williams ?” Elle peut parler sans craintes: si Charlie ne veut pas lui répondre, elle ne le fera tout simplement pas. Elle est une grande fille, assez pour savoir imposer son avis lorsque le besoin s’en fait ressentir. « Avec tout ce qu’il se passe en ce moment, y’a pas des moments où tu te dis que tu aurais préféré faire des choix différents ? » Charlie relève en sa direction deux billes bleues intriguées, ne la lâchant pas des yeux même lorsqu’elle porte le goulot de la bière à ses lèvres. La question est comprise sans mal, mais ce qu’elle ne comprend pas, c’est où elle veut en venir et en quoi cela pourrait l’intéresser. « Où tu te dis que tu aurais dû rester avec Trent, vivre en famille, avec un chien et une maison pavillonnaire, et tout le reste de la panoplie de la petite famille heureuse ? » Oh, ça. Second rire de Charlie, sans doute un peu plus amusé désormais. “C’est pas ce dont j’ai envie, honnêtement. Le chien, c’était celui d’un ex. Je l’ai gardé, pas le gars. Les enfants, c’était pas prévu. La maison, pourquoi pas, mais les voisins qui demandent le silence complet à 22h c’est hors de question.” Les chats n’ont pas été cités mais nul besoin de préciser qu’elle ne les a pas demandés non plus, puisqu’ils sont ceux de Léo. “Il est pompier, je serai bientôt officiellement inspectrice. Ça voudrait dire qu’on aurait deux métiers clichés, des animaux, deux enfants, et tout ça à trente et vingt cinq ans.” Et ça, justement, c’est la vie à laquelle tout le monde pourrait aspirer: parfaite, absolument parfaite. Sans obstacles, sans difficultés, sans déconvenues. Un amour simple, linéaire. “On serait mariés si ça n’avait tenu qu’à lui, d’ailleurs.” Oh oui, cette demande en mariage qu’elle a refusée. Un détail, sans doute. “Mais pour moi ça ressemble à une prison dorée. C’est pas la vie que je veux, mais c’est celle qu’il espère toujours.” Elle dirait ‘j’espère qu’il trouvera quelqu’un avec qui la vivre’ si elle voulait faire bonne figure, mais Megan mérite bien mieux que ses mensonges de bas étage. “Sûrement pas la réponse que t’attendais, hein ? C’est peut-être pas facile tous les jours avec Léo, mais il en vaut la peine.” Un nouveau sourire de sa part, rassurant. Léo en vaut la peine, Léo mérite qu’elle continue de l’aimer et de le choisir malgré tous les mauvais choix qu’il enchaîne les uns à la suite des autres. Léo est sa personne, Trent est sûrement celle d’une autre.

Velvet revolution
Megan Monroe & @"Charlie Ivywreath"

« Tu comprendrais si tu le connaissais. » Peut-être que oui, mais j’ai tout de même du mal à concevoir qu’elle ait dans ce cas pu se menotter avec lui en gardant les jumeaux. Ils sont parents et, pour le meilleur et surtout pour le pire, ils n’ont pas un mais deux enfants à élever main dans la main, à présent. Je pourrais croire que Charlie fait partie de ces folles qui militent contre l’avortement, mais cela ne colle pas au personnage que je connais. Je pourrais aussi penser qu’elle fait partie de celles qui voient le fait d’avoir un enfant comme l’aboutissement de toute une vie mais, à nouveau, le portrait est bourré d’incohérences. « Depuis quand tu tournes autour du pot, Megan Williams ? » - « Touché. » J’esquisse un sourire, consciente que je n’ai pas pu tout à fait me glisser dans la peau de la belle fille calme et réservée dont rêvait certainement Saül Williams. « C’est pas ce dont j’ai envie, honnêtement. Le chien, c’était celui d’un ex. Je l’ai gardé, pas le gars. Les enfants, c’était pas prévu. La maison, pourquoi pas, mais les voisins qui demandent le silence complet à 22h c’est hors de question. » Je pousse un grognement puisqu’à mes yeux, son discours ne va pas avec ses actes et la façon dont elle mène sa vie. « Pour quelqu’un qui voulait rien de tout ça, tu fais beaucoup de sacrifices. Bien plus que je serais jamais capable d’en faire. » Je n’ai jamais eu honte d’avouer mon égocentrisme. Si je ne m’occupe et ne me préoccupe pas de moi, qui le fera ?

« Il est pompier, je serai bientôt officiellement inspectrice. Ça voudrait dire qu’on aurait deux métiers clichés, des animaux, deux enfants, et tout ça à trente et vingt cinq ans. » - « Poutant, t’es entrée dans la police. Damon m’a dit que tu étudiais en sciences politiques, avant. » Et je n’ai pas besoin de préciser le fond de ma pensée. Là aussi, a-t-elle fait un sacrifice pour s’assurer des revenus réguliers ? Pour pouvoir élever ces deux enfants dont elle ne voulait pas ? « On serait mariés si ça n’avait tenu qu’à lui, d’ailleurs. » - « Je te jure que c’est pas si horrible que ça. » Un immense sourire découvre toutes mes dents. Là, c’est le rôle que l’on m’a donné que je joue. Avant toute cette histoire - cet arrangement, j’avais bien trop peur d’être abandonnée pour m’autoriser à m’attacher à qui que ce soit. J’avais trop peur d’être laissée derrière pour m’engager dans quoi que ce soit. Si je ne ressens rien, personne ne pourra me faire du mal, non ? « Mais pour moi ça ressemble à une prison dorée. C’est pas la vie que je veux, mais c’est celle qu’il espère toujours. » - « Il l’espère toujours avec toi ? » Lui court-il toujours après, ce mari qu’elle décrit comme un gentil labrador qui manque de saveur ? Le laisse-t-elle espérer ? S’accroche-t-il au contraire malgré une situation pourtant claire ? Elle est dans les bras d’un autre, elle a laissé un autre briser son cœur. La vie de Charlie serait certainement plus facile si elle était tombée amoureuse de ce Trent plutôt que d’un homme - un garçon, à mes yeux - compliqué comme Léo ? Comme faisant écho à mes pensées, elle précise. « Sûrement pas la réponse que t’attendais, hein ? C’est peut-être pas facile tous les jours avec Léo, mais il en vaut la peine. » - « J’espère que t’as raison. » Je grimace, avant d’avaler une gorgée de plus de bière pour me donner le courage de dire à la blonde ce que je pense et qui lui fera peut-être du mal. « Il m’a pas l’air du genre à s’accrocher quand ça devient difficile. Il me fait l’impression de ces types qui s’échappent la queue entre les jambes, quand ils ont fait une connerie plus grosse qu’eux. » Ceux qui fuient les responsabilités. Hey, dad.