Il y a des jours où il ne fait pas bon se réveiller, des jours qu'il ne vaudrait mieux pas vivre. Je pose mon téléphone, les yeux embués de larmes. Il manque de tomber du haut de l'ilot en marbre de ma cuisine, faute d'une visibilité adéquate. « Et puis, t'es jamais là quand j'ai besoin de toi! » Il continue de hurler, ses cheveux sont ébouriffés, son teint est d'un rouge écarlate. J'arrive même à apercevoir dans la lagune de mes yeux tristes une veine qui est sur le point d'éclater. Je respire un grand coup. Cela fait maintenant une bonne demi-heure qu'Alex et moi nous disputons. Cela fait maintenant une demi-heure que j'amasse toutes ces vérités, et Dieu ce qu'elles ne sont pas bonnes à entendre. J'ai abandonné dès le début, je n'ai pas la force de lutter. Je ne pense qu'à une chose: m'enfuir. Partir loin de lui, de tout le monde. Puisque personne ne tient à moi, pourquoi devrais-je tenir aux autres? Je repense à Lilith, à son départ inattendu, à ce vide intersidéral qu'elle a laissé dans mon cœur quand j'étais au plus mal. Je suis arrivée au croisement des chemins, là où je dois prendre une décision, savoir ce que je veux faire de ma vie, même si j'ai l'impression qu'il est déjà trop tard. Et je l'écoute vociférer ses innombrables reproches, sans avoir même la force de le regarder. J'essuie mes larmes, profitant d'une légère pause. Notre chienne, Diana, nous regarde à travers la fenêtre de la terrasse, ne sachant que faire. Et puis, ce n'est qu'un maudit chien après tout. Encore une idée d'Alex. Ce dernier est à présent assis sur l'un des fauteuils du salon, la tête entre les mains. Je suis à quelques mètres de lui, je l'entends marmonner. « Tu ne me réponds même plus. Tu n'es pas la fille que j'ai épousée. T'es l'ombre de toi-même, t'es fade et insipide… » Les larmes s'emparent à nouveau de mes yeux boursouflés. Qu'est-ce que ça fait mal. Et pourtant, je le comprends. Il a raison. Depuis que Lilith est partie il y a de cela une semaine, j'erre sans but, j'ai d'ailleurs pris quelques jours de congé, ne pouvant affronter la pression d'un travail d'autorité. Alex a malheureusement assisté à la dégringolade de ma bonne humeur. Je suis devenue un fantôme, je ne m'occupe même plus de notre chien, de notre maison. Je me laisse aller dans un tourbillon de tristesse. Et puis il y a Duncan. Je pense à lui sans arrêt, il est dans ma tête, dans mon cœur, dans tous les pores de ma peau. Les récents événements de ma vie m'ont éloigné de lui depuis déjà trois semaines. Nous nous sommes envoyés quelques messages, mais ça s'est arrêté là. Je ne suis plus personne, je suis complètement perdue. Je m'approche d'Alex, mes pieds me guidant dans un geste automatique auprès de lui. « Je…je vais prendre l'air… » Je l'entends marmonner de plus belle. « Ouais c'est ça, fuis, c'est tout ce que tu sais faire maintenant » J'attrape mon téléphone, mon sac et je quitte les lieux, n'arrivant même plus à considérer cette vaste demeure comme la mienne. J'aimerais tellement fuir comme il le dit si bien. Avant, je serais allée chez Lilith. J'aurais pleuré dans ses bras, elle m'aurait réconforté et nous aurions rigolé jusqu'à nous en briser les côtes en nous remémorant nos souvenirs les plus fous, tout cela en se descendant quelques verres arrosés. Mais elle n'est plus là. Mes pieds arrêtent soudainement leur mouvement. Je ne me suis même pas rendue compte que je marchais sur le trottoir de ma rue si familière. Je lève les yeux. Numéro quarante-quatre. Machinalement, je me dirige vers la lourde porte d'entrée, en priant pour qu'il soit là. Pour qu'il n'ait pas bougé depuis la dernière fois, trois semaines en arrière, quand nos corps ont dansé sur le rythme de nos cœurs battants. J'entends la clé dans la serrure, c'est vrai qu'il se fait tard, il est presque déjà vingt-trois heures. La porte s'ouvre et je découvre son visage, véritable île de paix dans mon quotidien tourmenté. Je plonge dans ses bras et il referme la porte de son pied, n'oubliant jamais que personne ne doit nous voir. Et là, je me laisse complètement aller, je fonds littéralement en larmes sur son épaule solide. Je comprends alors que c'est de lui dont j'ai besoin le plus en ce moment.
Le chirurgien du quarante quatre Logan City avait beaucoup travaillé ces dernières semaines. La première raison évidente était le départ de sa meilleure amie et de son frère dans un autre pays. Autant dire qu’après avoir découvert avoir un frère, il avait été très heureux et finalement il l’avait perdu tout aussi vite. De plus, depuis la dernière nuit qu’il avait passé avec Chloë, il n’avait pas eu l’occasion de la revoir. Ils échangeaient quelques messages mais rien de très poussé puisque si son mari tombait sur son téléphone, il ne fallait que rien laisse penser qu’ils se connaissaient plus que ça. Finalement, il s’était accommodé de la situation même si elle lui manquait terriblement. Elle n’était décidément pas comme les autres femmes, elle n’était pas simplement une voisine très jolie qui lui avait tapé dans l’œil. C’était bien plus… Bien plus qu’il ne voulait l’admettre. Et donc, pour ne pas y penser, il s’était concentré sur son travail. Il avait d’ailleurs commencé à monté un dossier très sérieux pour faire venir des enfants d’Afrique. Deux autres chirurgiens ayant partagés la même expérience que lui l’aidaient d’ailleurs également. Quand il avait fini ses gardes, il se mettait à bossé sur ça et ainsi de suite. Il n’avait aucunement le temps de penser à autre chose et en réalité ça lui aller très bien.
D’ailleurs c’est sur ça qu’il travaillait ce soir chez lui. Il avait tout éparpillé sur son bureau et il se demandait bien comment il allait trouver l’argent. Rien qu’envoyer un hélicoptère lui couterait beaucoup d’argents. Il fallait viser plus haut que l’hôpital, peut-être le gouvernement ? Il marquait tout sur des post-it qu’il accrochait au mur face à lui. Il ne s’était même pas rendu compte que la nuit était tombée et qu’il approchait de minuit. Demain, il ne travaillait pas alors cela avait peu d’importance. Il entend du bruit derrière sa porte, fronçant légèrement les yeux il se leva pour aller ouvrir. En ouvrant la porte, son cœur s’accéléra immédiatement en voyant Chloë lui tombait littéralement dans les bras. Il jeta un rapide coup d’œil dehors et referma la porte de son pied avant de la serrer contre lui. C’était tellement bon d’avoir son corps contre le sien, de pouvoir de nouveau sentir son parfum… Duncan se doutait bien que quelque chose n’allait pas mais il n’avait pas osé cependant demander qu’est ce que c’était. Mais la semaine dernière le peu de messages qu’il avait pu lui envoyé, n’avait eu que pour réponse des « oui » ou « non ». Il attendit peut-être une minute avant de se mettre à parler d’une voix douce et rassurante.
- Qu’est ce qui te met dans un état pareil ?
Décollant légèrement son corps du sien, il la regarda dans les yeux. Son beau visage était un peu rougi sûrement à cause des larmes et de la tristesse qu’elle éprouvait. Il passa sa main sur sa joue balayant une larme qui coulait avec son pouce. Il lui fit un petit sourire se voulant gentil mais aussi rassurant. C’est à ce moment précis qu’il se rendit compte qu’il avait de réels sentiments pour Chloë, ce n’était plus une banale attirante.
Je n'avais pas envoyé tellement de messages à Duncan. C'était bien évidemment délibéré. Après tout, je ne souhaite pas monopoliser son temps, sa tête, ses pensées alors que je suis une femme prise. Je ne suis pas encore assez égoïste que pour emprisonner un homme qui ne sera probablement jamais mien. Et puis, je n'avais pas envie d'attirer les soupçons d'Alex, lui qui pense déjà que je suis l'origine de tous ses maux. Je réalise alors que j'ai eu tort. Il agit comme une bouffée d'oxygène, la simple vue de son sourire me remonte le moral. J'aurais du continuer à lui parler, continuer à le voir, car il égaye mes journées tristes. Je comprends alors pourquoi mes pas m'ont conduit jusqu'à lui, presque malgré moi. Inconsciemment, il est le seul qui puisse me sauver de cette impasse, le seul qui puisse afficher un sourire sur mon visage. Je me laisse alors aller contre son épaule durant quelques secondes, trouvant un véritable refuge dans la puissance de ses bras. Je dois avoir une mine épouvantable, avec mes yeux gonflés de chagrin et mes joues rouges. Mais je m'en fous, il fallait que je sois là, avec lui, que je lui explique ma détresse, parce qu'il est le seul qui m'écoutera vraiment et qui essayera de comprendre ma situation. Il finit par me demander après une bonne minute: « Qu’est ce qui te met dans un état pareil ? » Je mets quelques secondes avant de me détacher de son épaule si réconfortante et j'essaye ensuite de reprendre mes esprits. Il me regarde avec tendresse, balayant l'une de mes larmes d'un revers de la main. Je respire un grand coup. « J-j-je suis malheureuse, Duncan » Mes yeux s'embuent à nouveau. Sans un mot, il me prend la main et m'invite dans le salon. Je m'assois sur son fauteuil agréablement familier et me love dans ses bras encore une fois. Je me laisse alors aller à quelques confessions. « Ça ne va plus avec Alex…m-m-on mari… Et ma meilleure amie vient de me quitter, elle s'installe à l'étranger avec son copain…Et elle est enceinte… » Je pleure à chaudes larmes en marmonnant. J'imagine que ça ne doit pas être facile pour le jeune homme de comprendre tout ce flot d'informations. Ma vie est un bordel indescriptible, le pauvre, il n'aurait jamais du me rencontrer.
Comprenant tout à fait que Chloë puisse mettre de la distance entre eux, il n’avait pas cherché plus loin. Le simple fait qu’elle soit entrée un jour dans sa vie avait suffit à le combler. Bien qu’il était seul, il était sûrement tout aussi perdu qu’elle. C’est pour ça qu’il n’avait pas insisté pour la revoir. Duncan se disait qu’avec le temps, leur histoire se classerait dans les souvenirs dont on pouvait rire ensuite. Le problème c’est que même sans la voir, il ressentait des choses pour elle et ça, jamais ce n’était arrivé. Le fait qu’elle soit en ce moment dans ses bras entrains de pleurer n’avait fait que renforcer ce sentiment. Quand elle redressa son visage, il posa son regard dans le sien. Il était recouvert de larmes et il passa délicatement son pouce sur sa joue pour en essuyer quelques traces. Il aurait voulu pouvoir lui sourire mais le fait de voir qu’elle était aussi triste, le rendait un peu malade lui-même. Chloë se mit à parler et cela ne fit que confirmer ce qu’il savait déjà.
- Aller viens par là…
Duncan attrapa avec douceur la main de Chloë, entrelaçant leurs doigts, il l’attira avec lui jusque dans le salon. Il prit place sur le fauteuil avant de venir la basculer contre lui pour la retrouver de nouveau dans ses bras. Le jeune homme ne pu s’empêcher de se sentir coupable quand elle fit la remarque que ça n’allait pas avec Alex. Après tout, il faisait sûrement parti du problème. Pour ce qui était de sa meilleure amie, elle lui en avait déjà parlé comme ça à plusieurs reprises au cours de leurs échanges sur leurs vies respectives. Il prit une voix douce pour lui répondre tout en caressant le dessus de sa main avec son pouce.
- Je suis désolé pour ta meilleure amie… Je peux un peu comprendre. Je venais de retrouver son frère ainé et il est parti dans un autre pays avec sa femme qui est enceinte de jumeaux. Elle était ma meilleure amie à l’internat de nos années de médecine… Les gens partent voir si la vie est meilleure ailleurs… Pour ce qui est d’Alex, je crois que je ne pourrais pas vraiment te donner de conseils, je crois que je ne l’aime pas vraiment puisqu’il est marié avec la plus belle femme de cette ville. Je suis un peu jaloux, je suppose.
Son cœur s’était clairement accéléré quand il avait parlé d’Alex. C’était peut-être égoïste de sa part mais il n’avait aucune idée de la conseiller sur la manière de faire pour que tout aille mieux dans son couple. Bon, il aurait pu éventuellement lui mettre un coup de pied, juste pour lui montrer qu’elle femme il avait là et qu’il était un parfait crétin de se comporter ainsi avec elle. Un fin sourire se dessina ensuite sur ses lèvres et son regard croisa de nouveau le sien.
- Tu voudrais que je te prépare quelque chose à boire pour t’aider à sécher tes larmes ? Un café ou même un chocolat chaud avec pleins de petites guimauves…
Je ne sais pas pourquoi mais je sens que j’aurai plus de facilité à me confier à Duncan qu’à quiconque d’autre. Il a ce petit truc, cette petite fibre rassurante, ce côté médecin humanitaire rempli d’empathie et d’amour qui me réconforte. Il aurait été le mari parfait dans une autre vie, une vie où je n’aurais pas rencontré Alex, où il n’aurait pas été celui que j’ai choisi. Oui, Duncan aurait vraiment pu être quelqu’un de très important pour moi, le plus important même. Mais il est voué à rester mon voisin, du moins c’est ce que je pense, même si tout n’est pas tout rose en ce moment avec mon cher mari. Parce qu’il y a le poids des souvenirs, des sentiments, de ses parents que j’adore, de nos biens communs, de tous ces voyages, de ce mariage si fabuleux… Je ne sais pas, j’ai longuement réfléchi à la question après en avoir parlé à Lilith, puis à Roxy. Je me suis demandé si je pouvais tout plaquer, tout quitter pour cette passion dévorante qui a pris possession de mon corps depuis quelques temps déjà. Et j’en ai conclu que je n’en étais tout simplement pas capable. Pas capable de laisser tomber tout ça, pas capable d’affronter le regard d’Alex, de sa famille, puis celui de toutes mes amies, des collègues au bureau, ou bien même des gens dans la rue. Car mon mariage a été très médiatisé, la rédactrice en chef de Vogue qui se marie avec le futur PDG de Century 21, ce n’est pas rien. Assez pour faire les choux gras de la presse people locale. Alors devoir tout abandonner et faire face au raz-de-marée qui s’en suivrait…non, ce n’est tout bonnement pas possible pour moi. Du moins, pas pour le moment. Parce que si les choses s’enveniment avec Alex, je doute que je puisse rester ne serait-ce qu’une minute de plus à devoir le supporter. Enfin, on verra comme on dit. Je me laisse un peu plus aller dans les bras de mon bel amant, ses bras si chaleureux, si réconfortants. En voilà un qui ne me juge pas et qui pourrait comprendre ma peine. Je lui explique le pourquoi de celle-ci et il prend ensuite ma main dans un geste minutieux, il ne veut pas me brusquer et cela me touche. J’enroule mes doigts frêles autour des siens et esquisse un léger sourire. Il prend ensuite la parole pour m’expliquer que lui aussi a vécu le même type de situation, que ça fait mal mais que ça fait partie de la vie après tout. J’hoche la tête timidement et finis par sourire après la dernière phrase du jeune homme. « Oh, ne dis pas de bêtises. Puis, je crois qu’il n’est pas au courant que je suis la plus belle femme de cette ville, tu sais… » J’ai envie de rire mais je me rappelle entre-temps de ce qui m’attend à la maison, et ça me chagrine. Je pose mon regard dans le sien, pour lutter contre toutes ces larmes qui aimeraient couler le long de mes joues. Ses yeux d’un bleu profond me font l’effet d’un baume. « Tu voudrais que je te prépare quelque chose à boire pour t’aider à sécher tes larmes ? Un café ou même un chocolat chaud avec plein de petites guimauves… » Là, il a réussi à me décrocher un vrai sourire. Il me fait retomber en enfance, il est doué dis donc. « Oh oui, un chocolat chaud avec des petites guimauves… J’adore ça! » Il me regarde avec amusement et me déplace avec toute la précaution du monde afin de se lever. Je le suis, ne pouvant supporter me trouver seule sur ce canapé, ou loin de lui en général. Je le suis jusque dans sa cuisine afin de suivre la préparation de ma petite friandise. J’en profite au passage pour faire un rapide état des lieux et je remarque quelques factures impayées sur le frigo. Je m’approche de lui et lui indique ces dernières d’un geste de la main. « Si tu as besoin d’aide pour tenir tes comptes, je veux bien être ta comptable personnelle... » Il me regarde, visiblement amusé par mon ton coquin. J’essaye de détendre l’atmosphère du mieux que je peux et de me changer les idées. Et ça a l’air de me réussir, à en juger par mes joues devenues soudainement rouges.
Si Alex n’était pas au courant qu’il était marié avec la plus belle femme de cette ville alors c’était un crétin. Chloë en plus d’être jolie était adorable. Duncan était presque sûr qu’il pourrait passer tout son temps avec elle sans jamais se lasser de sa présence principalement parce qu’elle était différente de toutes les femmes qu’il avait connu avant elle. Si seulement il avait pu la rencontrer avant qu’elle ne se marie… Peut-être que tout aurait été différent mais peut-être qu’il ne serait alors jamais allé en Afrique et ça c’était impensable. Il savait très bien qu’il ne collait pas avec la personne qu’elle était. Il n’était pas dans le monde de la mode et on ne pouvait pas dire qu’il roulait sur l’or même s’il s’en sortait aisément avec son salaire de chirurgien.
- Il lui faut peut-être une paire de lunettes…
Continuant de la regarder dans les yeux, il voulait à tout prix la faire sourire une nouvelle fois. Lui changer les idées et qu’elle pense tout simplement à autre chose sans que cela ne dérape pour autant. Il se leva alors ravi de voir un vrai et beau sourire sur les lèvres de Chloë. Il fit attention à elle la laissant assise sur le fauteuil avant de rejoindre la cuisine pour préparer deux chocolats chauds et trouver des petites guimauves. C’était le genre de truc tout petit, très bon et qui se manger facilement.
- J’ai touché juste. Génial. Je commence à te connaitre.
Dans la cuisine ouverte au salon, il remarqua Chloë se levait et le rejoindre. C’était plutôt cool puisqu’ils pourraient parler ainsi et non préparer ces deux chocolats tout seul dans son coin. Il sortit tout ce dont il avait besoin et se mit à la préparation. Il fronça légèrement le nez quand elle mentionna les factures impayés de Duncan accrochait au frigo. C’était le genre de chose auquel il ne pensait pas vraiment. Il n’avait plus payé de facture depuis très longtemps et en plus de ça c’était une perte de temps. Remplir les papiers, remplir les chèques tout envoyé… Alors qu’il avait d’autres choses à faire. Il se mit cependant à rire doucement.
- J’avoue que je ne serais pas contre… Pas que je ne sache pas faire, je trouve ça un poil ennuyeux mais je suppose que si tu es là pour me donner un cours de comptabilité, le temps passera plus vite ?
D’un sourire en coin, il ajouta les petites guimauves au dessus des deux tasses puis il en laissa une glisser devant Chloë qui s’était maintenant assise face à lui sur l’un des tabourets. Cela faisait quatre mois qu’ils se connaissaient. Quatre mois que son cœur battait à tout rompre lorsqu’elle franchissait la porte de chez lui. D’ailleurs, ça le rendait un peu dingue de ne pas pouvoir la voir en dehors de ces murs. Il y avait bien eu cette fois sur la plage mais ça paraissait tellement loin.
- Ca va un peu mieux ? Tu sais tu peux rester ici autant de temps que tu veux.
Des factures impayées, ça peut arriver à tout le monde. À vrai dire, je suis tellement bosseuse et organisée que j’ai du mal à l’envisager. Mais grâce à Alex, j’ai pu ouvrir les yeux sur le sujet. Il est la nonchalance incarnée, la négligence, c’est son point fort. Tellement que je me retrouve à devoir tenir les comptes de notre couple. Il s’occupe d’engranger de l’argent et à ensuite le verser afin de payer les charges de notre foyer. Enfin, c’est à moitié-moitié bien entendu. Mais qui s’occupe, tous les dimanches, de payer toutes les factures, de s’occuper de vérifier les comptes bancaires et surtout de gérer nos actions? C’est bibi, c’est toujours bibi. J’en viens à me demander ce qu’il fait, lui, pour notre couple. La réponse est simple, absolument rien. À part nous dénicher la maison, il n’a rien fait. Et ça me rend d’autant plus triste. Je reporte mon attention sur Duncan en lui souriant. Même s’il n’a pas l’air d’être plus concerné que ça par les factures, il sait quand même bien tenir sa petite maison. Tout est propre, il sait faire la cuisine, son frigo a l’air plein. Et en plus de ça il a des petits marshmallow. Tout pour me plaire. « J’avoue que je ne serais pas contre… Pas que je ne sache pas faire, je trouve ça un poil ennuyeux mais je suppose que si tu es là pour me donner un cours de comptabilité, le temps passera plus vite ? » Je souris, visiblement satisfaite de sa réponse. « J’ai l’habitude de faire ça, tu sais. Le bonhomme à la maison ne fout rien, alors bon... » Je m’assois ensuite en face de lui et il me glisse la tasse, garnie de petits marshmallows. Je souffle dessus et en bois une première gorgée. « Ça va un peu mieux ? Tu sais tu peux rester ici autant de temps que tu veux. » Je lui jette un regard rempli d’affection et attrape un marshmallow que j’enfourne dans un geste précipité. « Comment me remonter le moral en une leçon! Merci Duncan. » Qu’est-ce que c’est délicieux. Je sens ensuite un courant d’air me souffler dans le dos. La nuit tombe et elle se fait de plus en plus froide. Je grelotte légèrement. Je ne porte qu’une blouse légère et ma crise de larmes n’a rien arrangé à la température externe de mon corps. Duncan remarque ma gêne et me demande si tout va bien. « J’ai juste un peu froid… Tu peux me prêter un gilet? » Je le regarde avec mes yeux de chien battu et il m’invite à le suivre dans cette pièce si familière, sa chambre, afin de choisir un pull qui me réchaufferait radicalement.
Duncan était partagé entre deux sentiments. Il était triste pour Chloë. Triste d’apprendre que ca n’allait pas du tout chez elle et qu’elle en était visiblement malade. Si Duncan avait mit une barrière vis-à-vis de ses engagements auprès des femmes et l’éventualité concrète de construire quelque chose avec l’une d’elle c’était principalement parce que tout lui rappeler son enfance et ce que son père avait détruit auprès de sa mère. Elle n’avait plus jamais été la même après son départ bien qu’il avait tout essayé pour lui rendre le sourire. Aujourd’hui elle allait mieux sûrement parce que son unique fils était de retour à Brisbane en un seul morceau. Dans un autre sens, le fait qu’elle trouve du réconfort auprès de lui, le réconforter également. Même s’il ne l’avait pas voulu dans un premier temps, il était clairement attiré par Chloë. Il était peut-être amoureux mais c’était difficile à définir ce sentiment pour lui. Il y avait pourtant bel et bien quelque chose avec Chloë qui ne laissait pas le cœur de Duncan indifférent. Il fit une légère moue avant de lui répondre.
- Alors inutile que tu fasses ça ici aussi. Je n’ai pas envie de te rappeler les choses qui ne vont pas dans ta maison…
Reportant son attention sur sa propre tasse, il attrapa un peu de chocolat avec un petit marshmallow flottant à la surface dans une petite cuillère, il adorait le mélange des deux. Il ne pu s’empêcher un petit bruit avec sa bouche quand le mélange opéra dans sa bouche puis il se mit à sourire doucement. S’il pouvait lui remonté un peu le moral alors c’était le plus important.
- A vos services M’dame.
Il bu une autre gorgée de son chocolat puis il remarqua ce frisson la parcourir. Il ne s’en était pas rendu compte mais c’est vrai qu’elle devait sûrement avoir un peu froid. Un léger sourire en coin sur les lèvres, il lui proposa de monter à l’étage pour qu’elle choisisse elle-même quel genre de gilet ou pull elle aimerait. N’étais-ce pas une façon élégante et innocente de la faire monter dans sa chambre ? En tous les cas, il ne se passerait rien du moins ce n’est pas ce qu’il avait en tête. Il se demanda si ce n’était pas le moment de passer aux aveux en lui disant qu’il commençait à avoir des sentiments pour elle. Il ne demandait pas à ce que se soit réciproque mais le fait d’être honnête lui paraissait la meilleure solution. Une fois qu’ils furent arrivés en haut, Duncan ouvrit sa penderie la laissant passer devant pour qu’elle choisisse.
- Tu sais… Je crois qu’on devrait parler tous les deux.
Duncan, comme à son habitude si compatissant et si doux me remonte le moral. Le simple fait d’être près de lui suffit à me rebooster. Il possède cette aura, ce petit truc en plus qui me réchauffe le coeur. Mais apparemment pas le corps, vu que je me mets soudainement à grelotter. Il le remarque et un air inquiet s’empare de son si beau visage. Il me propose de monter dans sa chambre afin que je choisisse moi-même quoi enfiler pour avoir un peu plus chaud. Il sait que je suis influente dans le domaine de la mode, il a surement peur que je ne le juge s’il me ramène un pull-over qui ne correspond pas aux standards des dernières tendances. Enfin, il n’a pas si peur que ça en me laissant carrément inspecter son armoire. N’empêche, c’est une activité qui pourrait bien me défouler en ces temps de crise. Je le suis alors dans les escaliers bien trop familiers, que j’ai foulé plusieurs fois depuis notre rencontre. Arrivée à l’étage, je me remets à observer les murs, avec une décoration assez neutre et me surprends à me faire les même réflexions que la première fois que j’ai pénétré ces murs. Rien a changé, ou presque. Je me rappelle également de la pièce à photographies de Duncan. Une pièce où il entrepose toutes les photos de moments qui ont rythmé sa vie. Je me demande alors s’il y a accroché la photo que j’ai prise de moi lorsque j’étais d’humeur coquine l’autre fois… À vérifier. Nous arrivons dans sa chambre, qui elle non plus n’a pas changé. Sauf les draps, mais ça je peux en être reconnaissante envers Duncan qui se montre d’une propreté irréprochable. Il se rapproche de sa penderie et ouvre la porte afin de me laisser choisir ce que j’aimerais porter. Bien que ce ne soit pas un choix primordial à faire, j’aime qu’il me laisse le libre-arbitre. Puis, je suis tellement difficile. Je n’aime pas les pulls qui grattent, je suis sensible à la matière de ceux-ci, je préfère largement les gilet rembourrés que les pull-over difficiles à passer, bref, je suis une vraie fille. Je laisse mes doigts glisser le long des vêtements pendus à la barre de fer afin de dénicher la texture qui me plairait à première vue. Duncan est légèrement en retrait, peut-être mal à l’aise de me voir ainsi inspecter ses goûts vestimentaires. Peut-être même se rend-il compte de son courage à laisser la papesse de la mode Australienne fouiller dans son dressing. Je souris malgré moi et pousse toute une rangée de vêtements afin d’observer dans un premier temps un gilet qui a retenu mon attention. Un sweatshirt Abercrombie, doublé d’une matière assez douce à l’intérieur, avec une fermeture éclair assez simple. Je m’apprête à sortir le sésame de son endroit quand Duncan prend la parole. « Tu sais… Je crois qu’on devrait parler tous les deux. » Je ravale ma salive, mon bras toujours en direction du gilet. Je me dis alors qu’il faudrait que j’accélère les choses, pour faire passer le moment. Pour que je sache ce qu’il doit me dire, puisque apparemment nous devrions avoir une discussion. J’attrape le gilet et l’enfile. Il est bien trop grand pour mes épaules frêles, mais je m’en fiche. Je referme la fermeture éclair et retrousse légèrement les manches trop longues, le tout en quelques secondes. Je referme ensuite l’armoire et me poste devant mon bel amant en le regardant avec des yeux inquiets. Je crois que le moment est arrivé. Il fallait bien que l’on joue cartes sur table à un moment donné. Je ne peux pas me pointer chez lui à l’improviste comme ça, une fois tous les mois, à la fréquence dont j’ai envie. C’est vrai que j’ai été très égoïste. Mais qu’est-ce que je suis paumée, c’est plutôt ça le sentiment qui prédomine chez moi. « De…de quoi tu voudrais parler? » Je bégaye un peu, je suis mal à l’aise mais en même temps c’est pour mon bien, pour notre bien. Même si je cherchais au premier abord un peu de réconfort, il est vrai qu’une discussion sensée et sérieuse pourrait m’aider à me remettre les idées en place. Duncan m’invite à m’asseoir sur le lit, où il s’assoit à son tour à mes côtés.
Même si Duncan avait souvent les mots justes il savait que là tout de suite il aurait du mal à trouver ceux à dire pour exprimer ce qu’il avait au fond de lui ne sachant pas très bien lui-même de quoi il s’agissait. Du coup, les secondes qui commençaient à s’écoulées faisaient rapidement mine d’être de très longues minutes. Elle prit un gilet dans son armoire, il posa brièvement son regard dessus. Il n’avait guère le sens de la mode ou non, ce gilet était simplement chaud pour lui mais Chloë était toujours belle dedans. Duncan lui proposa d’aller s’asseoir sur le lit, juste pour être mieux installé et pas debout au cas où la conversation finirait en débat même s’il en doutait. Il imaginait juste qu’elle prendrait ses jambes à son cou et qu’il ne la reverrait plus jamais mais au moins, il lui aurait parlé. Redressant la tête pour la regarder dans les yeux, il prit une profonde inspiration pour parler.
- J’y ai longtemps pensé, avant de prendre la décision de te parler. Je voulais juste être sur de ce que je ressentais. Je ne suis jamais tombé amoureux… Je suis sorti avec plusieurs femmes bien sur mais rien de sérieux, rien qui me donne envie de continuer ou d’avancer avec cette même personne et je suis parti en Afrique pendant six ans. Quand je suis rentré, je t’ai rencontré et pour la première fois j’ai cru sentir mon cœur vraiment battre et tu sais… Je suis cardiologue. C'est un peu le comble. Tu m’as manqué toutes les fois où tu es parti de chez moi.
Duncan marqua une pause regardant Chloë dans les yeux. Il sentait bien que la révélation qu’il était entrains de lui faire la prenait de court mais maintenant qu’il avait commencé, il ne pouvait plus retourner en arrière, quitte à ne plus la revoir, il saurait au moins une fois dans sa vie ce que c’était d’aimer quelqu’un. Là, tout de suite, il aurait tellement aimé arrêter de parler pour pouvoir tout simplement l’embrasser. Mais désormais, il devra sûrement essayer de se rappeler de l’effet que lui avait procuré leur dernier baisé. Il en eu un frisson puis il se remit à parler.
- Je ne te demande en aucun cas de changer ta vie pour moi… Je crois que je me suis trop attaché à toi alors que je n’aurais pas du. Je suis désolé mais je crois bien que pour la première fois de ma vie j'aime quelqu'un et c'est toi.
Sa bouche se ferma et un silence pesant s’installa l’espace de quelques instants. Il n’ajouta rien d’autre, la laissant simplement digéré l’information. Après tout, ces quelques mois auprès d’elle l’avait rendu très heureux et même si un jour il n’y aurait plus rien entre eux, il serait content de la connaitre, de pouvoir lui parler ou simplement la croiser dans la rue. Duncan savait très bien que cette pseudo relation ne pourrait pas durée bien longtemps, ce n’était pas bien pour lui mais surtout pour elle qui était mariée et si elle n’était pas venu ce soir, il aurait sûrement encore attendu pour lui en parler mais il ne pouvait plus être la personne qui mettait à mal son couple.
Je m’accroche. Je m’accroche au lit, les mains froissant malgré moi le drap recouvrant le si familier meuble de Duncan. J’ai peur de ce qu’il va me dire, de ce qu’il va m’annoncer. Car j’ai compris à son ton de voix que nous allions avoir une discussion sérieuse. Je me demande s’il va me parler d’Alex, s’il va m’avouer qu’il aimerait lui refaire le portrait de me rendre aussi malheureuse, ou s’il va me dire qu’il a rencontré une fille qui a un avantage incontournable par-rapport à moi, c’est qu’elle est célibataire. Je ne sais pas, à vrai dire, je suis partagée entre deux sentiments. En premier lieu, l’appréhension de ce qu’il va oser me confier. Et en second lieu, le soulagement que cela pourrait me procurer. Car je sais que nous devons avoir une discussion, une vraie, sans tabou et sans filtre. J’ai appris à mes dépens que nous ne vivons pas dans le monde des bisounours malheureusement, alors une discussion entre adultes s’impose. Mais j’ai peur. Très peur. Je respire un grand coup en regardant ses lèvres s’entrouvrir puis dépose mes yeux encore humides dans les siens, qui sont soudainement remplis d’une certaine mélancolie. « J’y ai longtemps pensé, avant de prendre la décision de te parler. Je voulais juste être sur de ce que je ressentais. Je ne suis jamais tombé amoureux… Je suis sorti avec plusieurs femmes bien sur mais rien de sérieux, rien qui me donne envie de continuer ou d’avancer avec cette même personne et je suis parti en Afrique pendant six ans. Quand je suis rentré, je t’ai rencontré et pour la première fois j’ai cru sentir mon cœur vraiment battre et tu sais… Je suis cardiologue. C'est un peu le comble. Tu m’as manqué toutes les fois où tu es parti de chez moi. » Waouh. Je me prends le flot de ses phrases dans la figure à une vitesse fulgurante, même s’il prend le temps de choisir ses mots pour exprimer de la meilleure façon ce qu’il ressent. Mon Dieu. Est-ce qu’il est en train de me dire qu’il est amoureux? Mes yeux affichent une expression de détresse intense. Est-ce que je dois être heureuse de cela? Surement pas. Il est en train de perdre son temps, du temps précieux sensé être consacré à la construction d’une vie de famille. Il perd son temps à avoir des sentiments pour une femme mariée, une femme qu’il n’aura en principe jamais. Et là, je me sens absolument désarmée, totalement perdue et en même temps terriblement coupable. Coupable de le laisser espérer, de m’attacher à lui alors que je devrais pas et surtout coupable de ne pas avoir stoppé ça plus tôt. « Je ne te demande en aucun cas de changer ta vie pour moi… Je crois que je me suis trop attaché à toi alors que je n’aurais pas du. Je suis désolé mais je crois bien que pour la première fois de ma vie j'aime quelqu'un et c'est toi. » Là, je manque de m’effondrer. Il l’a dit, en me regardant dans les yeux. J’ai d’ailleurs directement tourné le regard. Mes yeux se posent sur un point dans le vide, surement sur une maille de son jean et se remplissent petit à petit de larmes. Je ne sais dire si je suis heureuse ou triste qu’il m’ait fait une telle révélation. Je finis par relever le regard dans sa direction et il remarque alors ma tristesse absolue, mes yeux remplis de larmes. Une expression de malaise intense se dessine sur son visage et je m’efforce alors de lui expliquer ce que je ressens. « Je…je suis complètement perdue, Duncan. Tu ne peux pas m’aimer, c’est pas possible. Tu dois te trouver quelqu’un de mieux, quelqu’un de fidèle et de célibataire surtout… » Ma voix tremble mais j’essaye tant bien que mal de terminer ma phrase. « Je ne suis pas quelqu’un pour toi…Regarde-moi, je suis dans un sale état… Ma vie est un bordel en plus de ça… » Mes yeux se baissent à nouveau. Je ne sais pas si cette discussion me fait du bien, finalement. Je commence à en douter à vrai dire…
Duncan comprit immédiatement à la réaction de Chloë que la révélation qu'il venait de lui faire était loin de lui faire plaisir, ce qu'il pouvait comprendre. Elle détourna le regard et cela le toucha au plus profond de lui-même. Peut-être qu'après tout, elle ne ressentait rien pour lui, elle ne serait pas la première femme mariée à s’octroyer un amant juste pour se distraire un peu de son quotidien mais Duncan avait vraiment du mal à imaginer une chose pareille maintenant qu'il commençait à apprendre à la connaître. Le fait était qu'il ne la connaissait sûrement pas assez même au bout de quelques mois. Quand elle se mit à parler, le coeur de Duncan manqua un battement et à en voir la tristesse sur le visage de Chloë, il regretta immédiatement de lui avoir parler de tout ça. Il posa délicatement ses deux mains sur les joues humides de la jeune femme, relevant doucement son visage pour l'obliger à le regarder de nouveau de face. Il commençait à ressentir lui-même une légère tristesse mais à part ses yeux rien de trahissait le fait qu'il avait en théorie le parfait contrôle de la situation et de ses émotions.
- J'aurais préféré que les valeurs que j'avais depuis l'enfance demeure intact. J'aurais dû simplement accepté ces gâteaux que tu avais emmené le premier jour où tu es venu frapper à ma porte. Mais franchement, je ne peux pas dire que je regrette ce qui c'est passé.
Laissant filé un temps de pause, Duncan regarda Chloë dans les yeux. Il ne voulait certainement pas la perdre mais si c'était le prix à payer pour qu'elle soit heureuse alors il le paierait. En réalité elle était bien la première personne pour qui il pourrait faire autant d'effort. Sans arrières pensées, Duncan passa les bras autours d'elle afin de l'attiré contre lui pour tout simplement lui faire un câlin. Il posa doucement sa tête contre la sienne et reprit d'une voix très douce et calme.
- Je voulais simplement être honnête avec toi pas que tu quittes tout pour moi. Je serais toujours là au quarante quatre si tu as besoin ou si tu veux simplement rigoler de tout et de rien. Peut-être que tu devrais prendre des vacances… Simplement avec ton mari et voir comment ça se passe…
Ça lui déchirait le coeur de dire un truc pareil mais la réalité avait toujours été là, il y avait un mari que Duncan ne pouvait pas ignorer. Il se demandait comment se serait passé les choses s'il avait pu rencontrer Chloë juste après son internat. Peut-être qu'ils auraient pu s'aimer mais ils ne rentraient pas dans la même catégorie sociale et le petit appartement qu'avait Duncan à l'époque n'était pas bien terrible. Au final, elle aurait sûrement rencontrer Alex et Duncan serait finalement parti en Afrique avec quelques mois de retard. Boum, c'était ainsi que devait donc se finir l'histoire même si elle n'avait jamais vraiment commencer.
- Tu es mon rayon de soleil et je n'aime décidément pas te voir pleurer...
Je suis bouleversée par la situation. Je sais qu’il fallait que nous nous disions ces mots, que nous mettions des mots sur ce que nous ressentions. Mais jamais je n’aurais pensé que cela puisse me faire aussi mal. Je suis tiraillée entre cette nouvelle passion et mon amour incommensurable pour mon mari qui dure depuis six ans déjà. Mon coeur est sur le point d’exploser. Je suis en lambeaux. Mon âme est torturée, mon cerveau est perdu. Je suis perdue. Je crois même que je suis arrivée à un point de non-retour. C’est trop dur pour moi de savoir comment agir. Je n’aurais pas du le laisser s’avancer vers moi lors de notre première rencontre. Nos mains n’auraient jamais du se frôler. Je n’aurais jamais du lui rendre ce premier baiser, ce véritable coup fatal. Mais la machine est lancée et il est trop tard pour faire marche-arrière, paraît-il… « J'aurais préféré que les valeurs que j'avais depuis l'enfance demeure intact. J'aurais dû simplement accepté ces gâteaux que tu avais emmené le premier jour où tu es venu frapper à ma porte. Mais franchement, je ne peux pas dire que je regrette ce qui c'est passé. » Évidemment, lui ne regrette rien. Il ne regrette rien parce qu’il n’a aucune attache, personne ne l’attend de l’autre côté d’une porte. Personne ne porte une alliance qui le lie à lui pour l’éternité. C’est facile, trop facile de me dire ça. Et moi, que dois-je faire? Est-ce que je regrette ce qui s’est passé? Il me regarde avec intensité et je ne peux m’empêcher de baisser les yeux. Cette situation me met dans un embarras immense, moi qui était venue chercher un peu de réconfort à la base. Il me prend dans ses bras et complète sa déclaration. « Je voulais simplement être honnête avec toi pas que tu quittes tout pour moi. Je serais toujours là au quarante quatre si tu as besoin ou si tu veux simplement rigoler de tout et de rien. Peut-être que tu devrais prendre des vacances… Simplement avec ton mari et voir comment ça se passe… » Mes yeux s’emplissent à nouveau de larmes, mais pas pour les mêmes raisons que celles de tout à l’heure. J’ai mal. J’ai mal parce que je ne peux pas me couper en deux pour satisfaire les deux hommes. J’ai mal parce que dans tous les cas, je perds quelqu’un de cher. Je finis par me redresser après quelques secondes pour faire face à Duncan. C’est vrai que l’idée d’un weekend peut être exploitable. Après tout, loin de Brisbane, il n’y aurait aucun échappatoire pour moi. Je ne pourrais pas traverser la rue pour aller voir Duncan et pleurer dans ses bras. Je ne pourrais pas aller me plaindre auprès de mes meilleures amies. Être seule avec mon mari, cela me semble être la seule solution pour vraiment me recentrer. « Je…je crois que tu as raison. Je vais proposer un weekend à Alex. J’ai besoin de réfléchir Duncan. C’est très… délicat comme situation » Je soupire et une larme coule sur ma joue. « Tu es mon rayon de soleil et je n'aime décidément pas te voir pleurer... » Je ne peux m’empêcher de sourire, parce qu’il a le don de me réchauffer le coeur quand rien ne va, par ses petites phrases ou ses petites attentions. Je dépose ma main dans la sienne et lui lance un regard rempli d’affection. « Merci… Merci d’être là. » J’approche ensuite mon visage du sien pour déposer un long baiser sur sa joue, gage de toute la tendresse que j’éprouve pour lui. Je regarde ensuite ma montre et remarque que le temps se fait tard. Alex doit surement se demander ce que je fais. « Je crois que je ne vais pas tarder à rentrer… » Je lui fais une moue triste.
Duncan n'était pas dupe. La personne en trop, c'était lui. Il avait trente deux maintenant et il n'était plus un adolescent ou un jeune adulte qui cherchait qui il était. Il savait très bien qui il était. Duncan Wilde, spécialiste en cardiologie, le Mali était sa seconde famille et il n'avait aimer jamais personne en dehors de ça et cela devait perduré. Il prit alors une profonde inspiration essayant de cacher la tristesse que les mots de Chloë venaient de provoquer chez lui. Son coeur se brisait alors pour la seconde fois. La première fois étant quand son père avait quitté la maison sans un regard pour lui. Son regard se posa sur cette larme qui coulait le long de sa joue, il passa son pouce dessus pour l'essuyer et ajouta.
- Tout va s'arranger.
Un léger sourire se dessina sur ses lèvres et il pensa sérieusement à devenir qu'un simple voisin lambda à qui elle ferait signe de la main pour dire bonjour quand elle passerait devant chez lui. C'était mieux ainsi non ? La vie était parfois faite pleine de choix et celui-ci n'était pas le plus facile qu'il avait eu à faire mais c'était mieux pour tout le monde. Il fut quand même content de voir un sourire prendre place sur la bouche de Chloë, d'ici quelque temps elle oublierait sûrement cette histoire et tout rentrerait dans l'ordre.
- C'est normal.
Duncan ferma les yeux juste le temps de ce baisé pour mémoriser chaque instant, il n'aurait plus que ça désormais, des souvenirs. Il se leva de son lit, l'invitant à faire de même. Le temps oui était sûrement passé très vite sans qu'il ne s'en rende compte. La raccompagnant jusqu'à la porte, ils s'échangèrent un dernier regard puis elle quitta son allé. Il lui fit en retour un dernier sourire accompagnait d'un signe de la main puis elle disparue dans la pénombre. Duncan referma la porte et posa son front face contre la porte en fermant les yeux. Il murmurait.