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Megan Monroe & @Murphy Rowe

Je considère que, malgré mes failles et mes erreurs, j’ai été une bonne personne avec Murphy. Je lui ai ouvert ma porte et je l’ai laissé rester chez moi - chez Damon et moi des semaines, deux mois, alors qu’elle n’était censée rester que quelques jours uniquement. J’ai partagé ma chambre avec mon fiancé alors que notre arrangement prévoyait initialement que chacun puisse profiter de son espace, et je n’ai jamais cherché à la mettre dehors. Juste avant mes noces, une dispute a éclaté entre elle et moi et je la considère comme fautive et, pourtant, je ne l’ai pas mise à la porte. La guerre froide a été de rigueur après les mots durs que nous avons échangés, mais je n’ai pas envisagé de faire de ma jumelle une sans domicile fixe.

Mais aujourd’hui, elle a dépassé les bornes et mes mains tremblent de rage. Certains sont peut-être tolérants lorsqu’il s’agit de consommation de stupéfiant, mais j’ai trop souffert d’être le dommage collatéral de la consommation de ma mère pour ne pas avoir le cœur qui se brise en découvrant la vérité sur la brune. Voilà pourquoi elle tenait tant à devenir sa fille, qui se ressemble s’assemble. Voilà pourquoi elle se moque de l’air hagard de Billie, à ma soirée de fiançaille et tout le reste du temps. Elles sont pareilles. Peut-être qu’ils se sont trompés, nos géniteurs, lorsqu'ils ont tiré à la courte paille qui prendrait quel nourrisson. Elles auraient fait la paire, la mère et la fille et moi, je me serais peut-être bien entendue avec ce père que Murphy qualifie de mythomane. Après tout, ne suis-je pas en train de m’inventer une nouvelle vie, à ma façon ? Elle dit qu’elle ne pouvait pas compter sur lui mais réalise-t-elle ce que c’est que de ne jamais savoir où l’on va dormir, si les agent des services sociaux vont venir vous emmener ou dans quel état on va trouver sa mère en rentrant ?

Lorsque mes doigts se sont refermés sur le petit sachet de poudre trouvé dans ses affaires alors que je cherchais le blender stocké dans l’armoire de Damon, je me suis effondrée. Trop de traumatismes sont remontés à la surface et la gorge nouée, j’ai d’abord fondu en larmes. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps sans être réellement capable d’expliquer pourquoi, avant que la détresse ne laisse place à la colère. De rage, j’ai pris la décision de mettre la jeune femme au pied du mur dès qu’elle rentrerait de ses courses. Elle n’a pas tardé. Elle est rentrée avec son grand sourire de junkie de merde, sa jupe trop courte et son t-shirt trop criad. Est-ce que j’exagère, faute à ma rancœur ? Peut-être, mais je m’en fous puisque, sur l’heure, c’est ma mère que je vois. Ma mère et son bord de nez plein de poudre, ses gestes peu assurés à cause de l’alcool et son regard absent. Assise sur le canapé, occupée à me répéter toutes les raisons pour lesquelles elle doit partir, je me relève d’un bond dès qu’elle passe la porte. Mes yeux brillants, rougis, mais pleins de rage lancent des éclairs. « Tu te fous de ma gueule ? » Je l’agresse, et elle ne comprendra certainement pas pourquoi. « Tu crois que tu peux faire de mon appart ton abri pour la défonce ? » Le pochon en plastique est serré dans mon poing. Je l’écrase sur le bar, avant de le lâcher pour qu’elle comprenne ce qui m’a mise dans cet état. « Tu crois que tu peux ramener cette merde chez les gens comme du savon où du dentifrice ? » Même pour ça, elle emprunte ce qui m’appartient puisqu’elle n’est pas arrivée avec grand chose, Murphy. « T’as déjà consommé ça sous mon toit ? » Je lui demande des comptes, je m’y prends certainement mal : le fait est que je ne suis plus capable de calme et de diplomatie.

« Je suis lààààà ! » que lance Murphy à travers l'appartement. Habillée de sa jupe rose favorite et d'un top au col bateau, elle s'avance dans le logement qu'elle a appris à appeler "la maison". C'est ici qu'elle se sent le plus chez elle, désormais. Ici aussi qu'elle apprend à connaître Megan et Damon. Malgré leurs difficultés, les deux jeunes femmes apprennent à cohabiter, non sans franchir des obstacles qu'elles s'inventent elles-mêmes. Trois sacs pendus aux bras, Murphy détache ses cheveux et retire ses lunettes de soleil. L'été a eu raison de son portefeuille et si elle n'aura déjà plus rien à manger à la fin du mois, elle n'en reste pas heureuse d'avoir, cette fois-ci, pu s'acheter de quoi d'habiller. Son sac déborde déjà, mais elle a commencé à stocker ses affaires dans l'un des placards de Megan, tout en entreposant discrètement certaines de ses pièces favorites chez son père. Megan la croit à la rue, encore un mensonge duquel Murphy ne peut plus se défaire.

S'avançant dans l'appartement, Murphy lâche un a un ses sacs. Elle en profité pour acheter à Megan un collier kitsch au possible : c'est un cœur brisé en deux parties égales qu'elles pourront porter toutes les deux. Kitsch, mais mignon - du moins, l'intention est mignonne. Murphy a déjà enfilé l'une des moitié sur laquelle elle a fait gravé un -m majuscule. Cet argent avec lequel elle fait des dépenses, Murphy l'a récupéré chez Seth. C'est fou tout ce qu'on peut avoir en revendant un ordinateur... comme quelques robes et un collier kitsch acheté trois dollars dans une boutique crade et malfamée de la ville. « Tu te fous de ma gueule ? » « J'ai acheté des tas de trucs, mais y'a un cadeau pour toi aussi ! » Probablement Megan lui en veut-elle de la savoir en train de dépenser son argent alors qu'elle devrait être en train d'économiser pour se trouver un chez elle. Mais c'est promis, Murphy met toutes les semaines un peu de côté pour rembourser à Megan ce qu'elle lui doit, même si sa soeur lui offre surtout l'hospitalité. Du moins, c'est ce qu'elle lui a dit.

Mais visiblement, Megan n'est pas là pour sermonner Murphy au sujet de ses dépenses. Non, le sujet est bien plus dur que cela. « Tu crois que tu peux faire de mon appart ton abri pour la défonce ? Tu crois que tu peux ramener cette merde chez les gens comme du savon où du dentifrice ? » « Hein ? » La brune retire ses lunettes de sa tête et dévisage Megan. Ses yeux se posent alors sur le petit sachet de poudre qu'elle tient entre les doigts et son sang ne fait qu'un tour. Dents serrées, Murphy s'avance. « Où t'as trouvé ça ? » C'est à elle, et Megan a fouillé dans ses affaires pour le trouver. Murphy n'en croit pas ses yeux. « T’as déjà consommé ça sous mon toit ? » La première réaction de la brune est de tirer une chaise pour s'asseoir, en profitant au passage pour tourner sept fois sa langue dans sa bouche. « Ici, non. » C'est que, étrangement, la jeune femme est plus calme qu'elle ne le devrait. C'est vrai, ici, elle n'a jamais pris aucune ligne. Elle y a pensé, en a eu envie a plusieurs reprises, mais n'a jamais sauté le pas. Fort heureusement, visiblement. « T'as fouillé dans mes affaires, j'en reviens pas. » Elle n'essaie pas de reprendre le pochon, certaine que Megan le lui en empêchera. Doigts entrelacés, Murphy a posé son regard dans celui de Megan. Elle a l'air très bouleversée, pour quelqu'un qui a fourré son nez là où il n'avait rien à y faire. « Elle t'a jamais dit de pas faire ça, Billie ? Mon père est un mythomane, mais il m'a au moins appris à ne pas fouiller dans les affaires des gens. »

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Megan Monroe & @Murphy Rowe

« J’ai acheté des tas de trucs, mais y’a un cadeau pour toi aussi ! » Sur l’heure, j’en ai rien à foutre, qu’elle m’ait ramené un porte clé ou un poney ne changera plus rien. Je suis trop en colère pour que le retour en arrière soit encore possible. Trop incapable de lui faire confiance aussi. On avait pas grand chose : pas de souvenirs créés ensemble, pas d'anecdotes communes à raconter ou à garder comme un trésor pour nous sentir plus proches l’une de l’autre. La confiance, la transparence, c’est tout ce que nous avions à nous offrir et Murphy semble n’en avoir que faire de trahir la mienne, de ramener sous mon toit la même merde qui m’a pourri la vie. Bien sûr, elle n’en sait rien, mais je suis incapable de garder les idées claires. N’a-t-elle pas deviné, en voyant Billie, que j’ai souffert d’être élevée par une junkie ? Pense-t-elle au contraire que j’avais une maman pour me préparer mon bol de céréales le matin et me conduire jusqu’à l’école, ne me lâchant la main qu’au dernier moment pour qu’il ne m’arrive rien sur le trajet ? « Hein ? » Comme seule réponse, je lâche le pochon en plastique et je le fais tomber sur le bar. C’est plus clair, toxico ? « Où t’as trouvé ça ? » - « Chez moi. Dans mon appartement. » La pièce n’a pas la moindre importance puisque comme je le lui rappelle : je l’héberge. Elle vit dans mes murs, dans un endroit qui m’appartient à moi et pas à elle. Je ne fouillais même pas, je cherchais quelque chose dans le dressing de mon fiancé mais le lui dire, c’est lui avouer qu’avant son arrivée nous faisions chambre à part et il en est hors de question. « Ici, non. » J’éclate d’un rire jaune et nerveux. Ici non. Et je suis censée m’en contenter ? Accepter qu’elle revienne ici potentiellement défoncée ? En colère et blessée, j’oublie que je n’ai pas le droit de tenter de contrôler les autres.

« T’as fouillé dans mes affaires, j’en reviens pas. » - « Dans toute cette histoire, ce que tu retiens c’est que j’ai fouillé dans tes affaires ? » Le sourire qui étire mes lèvres n’a rien de gai. Il est triste, ironique, douloureux, il fait tout sauf réchauffer le cœur et donner envie de l’imiter. « Elle t’a jamais dit de pas faire ça, Billie ? Mon père est un mythomane, mais il m’a au moins appris à ne pas fouiller dans les affaires des gens. » - « Elle m’a rien appris du tout Billie. » Au moins, elle ne l’a pas appelée maman. Elle ne m’a pas fait l’affront de me rappeler qu’elle a plus de point commun que moi avec la femme qui m’a élevée et dont j’ai cherché l’attention et l’affection toute ma vie. « Billie, elle était trop occupée à se défoncer la gueule avec ce genre de merde et à rajouter deux ou trois couches d’alcool dessus pour m’apprendre quoi que ce soit. » On peut jouer à qui a eu la vie la plus merdique, mais je suis persuadée que c’est moi qui gagnerai. « Billie ça l’intéressait pas de jouer à la maman. Précisément à cause de ça. » Ce pochon en plastique. C’est également à cause de lui que j’ai grandi dans plusieurs maisons sans jamais en considérer une comme la mienne. Avec pleins d’adultes sans jamais avoir l’impression d’avoir des parents. Et c’est à cause de mon histoire déchirante avec la poudre blanche que je dévorée par la colère et le sentiment d’avoir été trahie, aujourd’hui face à ma jumelle. « Quand je t’ai accueillie chez moi tu t’es pas dit que c’était quelque chose que je méritais de savoir, que tu te droguais ? » Pourquoi je mérite que tu me mentes sans cesse, Murphy ? Me fais-tu encore payer de ne pas t’avoir cherchée ? Tout ne tourne pas autour de mon nombril, quand je suis plein de rage et de tristesse, j’ai tendance à l’oublier.

« Chez moi. Dans mon appartement. » « L'appartement de Damon. C'est lui qui ramène l'argent. » Parce que Murphy ne voit pas beaucoup sa sœur sur les devantures des magasins. Pour quelqu'un qui se dit modèle, elle a visiblement un peu de mal à se trouver des job. A moins qu'elle ne mente sur sa côte de popularité. « Dans toute cette histoire, ce que tu retiens c’est que j’ai fouillé dans tes affaires ? » « Ouais. T'avais pas à toucher à mes trucs. » Ses trucs. Son sac de misère avec lequel elle est entrée chez Damon et Megan. Depuis, elle n'est pas beaucoup retournée chez son père. De rares occasions seulement, pour lui dire qu'elle était en vie et qu'il ne fallait pas s'inquiéter.

Et voilà qu'elles se lancent sur une pente dangereusement glissante. Un sujet que Murphy ne maîtrise guerre. « Elle m’a rien appris du tout Billie. » Murphy croise les bras et fait la moue. Lentement, elle commence à comprendre que les choses étaient définitivement un peu plus compliquées qu'elle ne veut bien l'admettre. « Billie, elle était trop occupée à se défoncer la gueule avec ce genre de merde et à rajouter deux ou trois couches d’alcool dessus pour m’apprendre quoi que ce soit. » Là, elle essaie de reprendre le sachet des mains de Megan, sans grand succès. « Billie ça l’intéressait pas de jouer à la maman. Précisément à cause de ça. » Un regard jeté au couteau dans la cuisine donne de drôles d'idées à Murphy. Quand le ton sera monté un peu trop haut, Murphy ira se saisir d'une lame. Elle n'aura pas grand chose à faire. Menacer Megan devrait suffire à se tirer de là. Oui, la solution de facilité est celle qu'elle prendra quand les choses viendront à se corser. « Quand je t’ai accueillie chez moi tu t’es pas dit que c’était quelque chose que je méritais de savoir, que tu te droguais ? » « Oh t'as raison c'est trop un truc qu'on dit à un premier rendez-vous. Salut, je suis ta sœur et je prends de la cocaïne ! »

Cette fois-ci, c'est grâce à la surprise qu'elle réussit à reprendre le sachet des mains de Megan. Ni une ni deux, elle trottine ensuite vers la cuisine, où elle attrape un couteau qu'elle pointe vers sa sœur jumelle. « T'approches pas. Je le garde. C'est à moi, je l'ai acheté. » Lunettes sur le haut de la tête, dans cette tenue, Murphy ne fait qu'accentuer le ridicule de la scène. Oui, Billie n'est qu'une junkie, mais une junkie qui leur sert de mère. Et on ne parle pas mal des mères, dans la tête de la brune. Surtout pas de celle qu'elle vient de retrouver.

« Tu sais pas comment c'était de vivre avec papa. Moi je le sais. Tu sais comment j'ai appris à me battre avec un couteau ? » Pas parce qu'il la battait, non. Mais parce que plusieurs fois, des types sont venus à la maison pour régler son compte à Hal Rowe, le salaud qui avait embobiné les femmes de tout le quartier. Pour ne pas se faire sauter à son tour, Murphy la gamine a dû en user, de couteaux. On n'emmerde pas Murphy Rowe. « T'aimes pas Billie, ok, je l'aimerai à ta place. Les junkies aussi méritent qu'on s'occupe d'eux mais t'es trop égoïste pour le comprendre. » Non, c'est sûr que dans sa tour dorée, Megan ne peut pas voir ce genre de choses. « Si t'aimes pas la difficulté c'est pas grave, j'ai grandi dedans. Je vis toujours dedans. » Et couteau en main, Murphy file dans la chambre qu'elle occupe alors, résolue à rassembler toutes ses affaires. C'est derrière la porte qu'elle s'enferme pour faire de ses vêtements un tas qu'elle balance dans son sac. Au passage, elle chourre quelques affaires à Megan. Elles ne lui manqueront pas.

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Megan Monroe & @Murphy Rowe

« L'appartement de Damon. C'est lui qui ramène l'argent. » - « Fais pas comme si tu t’intéressais aux finances de mon ménage. Tout ce qui t’intéresse, c’est de bouffer des céréales en culotte et à nos frais. » Parce que Murphy est restée bien plus que quelques jours, même plus que quelques semaines. Je ne lui ai jamais demandé un centime parce qu’elle est arrivée comme une gamine paumée, mais elle n’a jamais proposé de participer à quoi que ce soit. Il est peut-être temps qu’elle se réveille. Qu’elle trouve un job. Elle a vingt-trois ans, bientôt vingt-quatre, bordel. « Ouais. T'avais pas à toucher à mes trucs. » - « Je fouillais même pas tes trucs. Je cherchais mon putain de blender qu’on avait rangé dans la chambre d’amis en emménageant. » Mais Murphy s’en fiche, Murphy ne pense qu’à sa petite personne - Oh, et Billie, parce que Billie a l’air tellement importante pour elle. Notre mère qui n’a pas cherché à la retrouver non plus, alors qu’elle sait qu’elle existe depuis toujours a toutes les faveurs de la brune de toute façon. Moi, je suis une égoïste et une connasse, simplement parce que j’essaye de me tirer de ce merdier dans lequel ma mère m’a foutue dès ma naissance.

« Oh t'as raison c'est trop un truc qu'on dit à un premier rendez-vous. Salut, je suis ta sœur et je prends de la cocaïne ! » - « Ah oui pardon, j'oubliais que t’étais arrivée hier. » Des moments pour m’en parler, elle en a eu des tas depuis notre rencontre. Des moments pour me parler à coeur ouvert aussi, sauf qu’elle n’a rien fait d’autre que profiter et tenter de ruiner ma vie, à mes yeux.  


Ses mains se referment autour du sachet plastique qu’elle arrache des miennes avant de reculer de quelques mètres. En quelques secondes, elle attrape le couteau de boucher dans la cuisine, couteau qu’elle pointe dans ma direction et mes yeux s’écarquillent en grand. « T'approches pas. Je le garde. C'est à moi, je l'ai acheté. » Ma jumelle me menace d’un couteau. Dans mon appartement. J’ai l’impression d’halluciner et je suis sous le choc. « Mais t’es complètement timbrée ma pauvre. » Hautaine, le visage déformé par une grimace faite de douleur et de désillusion, je l’observe de bas en haut. Pourtant, je recule de quelques pas. Parce qu’elle est folle, justement. Parce que je ne la connais pas assez pour savoir ce qu’elle est capable de faire ou pas, qui elle est capable de saigner ou non. Elle est certainement défoncée de toute façon. « Tu sais pas comment c'était de vivre avec papa. Moi je le sais. Tu sais comment j'ai appris à me battre avec un couteau ? » Moi, tout ce que j’ai appris avec “maman”, c’est à nettoyer le vomi, appeler les secours et faire à manger pour une adulte et pour moi, l’enfant. Je me suis endurcie seule et par la force des choses mais il est hors de question que j’avoue à Murphy que, toute gamine, j’ai été retirée à cette mère qu’elle adule tellement pour être placée en famille d’accueil. « Parfait. On a eu une vie de merde toutes les deux. Tu veux une médaille ? » Mais elle se trompe Murphy, si elle pense que Billie est la solution à tous ses problèmes. Sauf que maintenant, ce n’est plus le bien, la brune n’est plus mon putain de problème. « T'aimes pas Billie, ok, je l'aimerai à ta place. Les junkies aussi méritent qu'on s'occupe d'eux mais t'es trop égoïste pour le comprendre. » Mes yeux se remplissent de larmes et mes lèvres tremblent alors qu’elle prend déjà la route de la chambre. Notre mère, je n’ai fait que ça, de m’en occuper. « Si t'aimes pas la difficulté c'est pas grave, j'ai grandi dedans. Je vis toujours dedans. » Et voilà qu’elle claque la porte. Elle la verrouille, puisque lorsque j’essaye de l’ouvrir, la poignée me résiste. Je tape dessus, d’abord violemment, ensuite violemment. Je sors de mes gonds parce que je suis révoltée par les accusations de la brune. Tout le reste, ce ne sont plus que des cris et des larmes de colère. « J’espère que tu rassembles tes affaires parce que tu dégages de chez moi ! » Dans l’heure, dans la minute même, je ne peux plus la tolérer. « Je me suis occupée d’elle toute ma putain de vie ! T’étais où toi Murphy quand elle faisait une overdose dans le salon ? Est-ce que les services sociaux sont venus te chercher chez Hal ? » Je ne réfléchis même plus à ce que je dis. Elle était où Murphy, quand ma mère m’attrapait par les épaules et me secouait comme un prunier parce qu’elle pensait que, du haut de mes dix ans, j’avais caché ses cachetons ? Quand la paranoïa la rendait brusque et méchante ? « Je te la laisse ! Prends là ! Vous êtes pareilles toutes les deux, vous êtes des pauvres folles. » Si elles veulent se tirer vers le bas, qu’elles le fassent. Qu'elles crèvent toutes les deux main dans la main. Je ne le pense pas. Je m’en veux à l’instant même où ça me traverse l’esprit. La porte s’ouvre, et Murphy apparaît, sac à dos jeté sur une épaule et couteau toujours bien en main. Je recule de plusieurs pas en la voyant. « T’as pas intérêt à venir pleurnicher chez moi quand elle t'aura abandonnée et déçue. Parce que c’est la seule chose qu’elle sait faire. »

« Ah oui pardon, j'oubliais que t’étais arrivée hier. » C'est vrai qu'elle squatte, Murphy. Mais elle est utile, pas vrai? Elle se fait petite - elle essaie, du moins - et évite de manger toutes les céréales. Elle range après elle, fait le ménage quand elle est là dans la journée. Elle essaie même de ne pas laisser traîner ses affaires... et elle achète des trucs à sa sœur, parfois. Cette fois-ci, c'était un collier. La prochaine fois ? Il n'y aura pas de prochaine fois. « T'es conne de penser que c'est une discussion à avoir, surtout avec une personne en qui on peut pas avoir confiance. » Elle est trop parfaite, Megan. Et d'après Murphy, ce n'est pas le mensonge ou la divulgation qui la blesse mais bien la cocaïne en elle-même. Elle n'aurait jamais pu comprendre ce que ça fait, de se sentir brillante juste l'espace d'un instant. Elle ne pourrait pas comprendre justement parce qu'elle est brillante tout le temps. Alors, pour se défendre d'un retour de force de Megan, Murphy attrape un couteau. « Mais t’es complètement timbrée ma pauvre. » « Mieux vaut être timbrée que de manquer d'empathie comme toi. » Elle n'a pas demander à en discuter, Megan. Elle n'a pas dit à sa sœur qu'elle pouvait se confier à elle. Elle n'a fait qu'accuser sans se demander pourquoi. Décidément, cette famille que Murphy voulait réunie va de déception en déception. « Parfait. On a eu une vie de merde toutes les deux. Tu veux une médaille ? » « Oh, la ferme. » qu'elle soupire, yeux levés aux cieux. Non, elle ne veut pas de médaille. Elle veut que Megan admette qu'elle n'a pas le monopole de la galère, c'est tout.

Et l'instant d'après, la voilà partie pour la chambre dans laquelle elle s'enferme, la brune. Couteau entre les dents au cas où Megan arriverait à entrer dans la chambre, Murphy rassemble le plus d'affaires possible. « J’espère que tu rassembles tes affaires parce que tu dégages de chez moi ! » Elle frappe, Megan. Elle frappe mais ne parviendra pas à rentrer, parce que Murphy a coincé une chaise sous la poignée. On n'est jamais trop prudent, quand on a l'habitude de se faire bananer. « Je me suis occupée d’elle toute ma putain de vie ! T’étais où toi Murphy quand elle faisait une overdose dans le salon ? Est-ce que les services sociaux sont venus te chercher chez Hal ? » « T'étais où toi quand j'ai fait une overdose, moi ? J'étais à l'hôpital toute seule, y'a personne de notre famille qu'est venu, alors ferme ta gueule quand t'as rien vécu. » Si, elle a vécu, mais Murphy ne peut pas l'entendre. Ce n'est pas pareil quand ce sont les autres, même les proches. Ils ne sont que des dommages collatéraux des bombes que font exploser les premiers concernés.

« Je te la laisse ! Prends là ! Vous êtes pareilles toutes les deux, vous êtes des pauvres folles. » « La ferme ! FERME TA GUEULE ! » qu'elle hurle, jetant le couteau contre la porte. La prochaine fois, elle s'y jettera peut-être pour en traverser le bois. Ce sera toujours moins douloureux que de se prendre en pleine figure les mots de Megan. « T’as pas intérêt à venir pleurnicher chez moi quand elle t'aura abandonnée et déçue. Parce que c’est la seule chose qu’elle sait faire. » Enfin, elle ouvre la porte. Ses yeux se plantent dans ceux de Megan alors qu'elle réhausse le sac qu'elle porte sur les épaules. « Je risque pas de venir pleurnicher chez une petite conne d'égoïste. J'ai des amis. C'est pas grave si tu veux pas renouer, j'irai chez ma vraie famille. » Celle qu'on choisit. Celle qu'elle s'est faite au fur et à mesure, même s'ils ne veulent parfois pas d'elle. Ils sont tout ce qu'a Murphy. D'un mouvement, la brune repousse Megan pour se frayer un chemin vers l'entrée. Dans la poche de sa robe, elle attrape le collier acheté pour sa sœur, l'autre moitié du cœur qu'elle porte au cou. « Tiens, pétasse. »

Sortie. Rideau. L'instant d'après, elle court dans les escaliers, les larmes au bord des yeux.

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Megan Monroe & @Murphy Rowe

« T’es conne de penser que c’est une discussion à avoir, surtout avec une personne en qui on peut pas avoir confiance. » - « T’es conne de croire que mentir c’est la solution. » Et qu’elle ne commence même pas à tenter de distinguer le mensonge par omission d’un mensonge délibéré, pour moi c’est exactement la même chose et j'abhorre l’un comme l’autre - lorsqu’il s’agit des autres, à moi-même, je n’applique pas toujours les même règles. Je manipule la vérité lorsqu’elle m’arrange moins qu’une version altérée, mais je me répète que je ne suis pas pour autant une mauvaise personne. « Mieux vaut être timbrée que de manquer d’empathie comme toi. » Elle brandit son couteau dans ma direction comme une hystérique et même si je voudrais lui sauter à la gorge à cause de cette accusation - je ne manque pas d’empathie, je passe tout mon temps à me demander comment se sentiront les autres à tel point que ça en devient épuisant - je garde mes distances puisque suis obligée de me rendre à l’évidence : je ne la connais pas. Je ne sais pas de quoi elle est capable et je réalise que j’ai hébergé une parfaite inconnue. C’est ce qu’elle est, sang commun ou pas, et pas une seule seconde je me suis demandée de quoi elle est capable. « Tu sais ce que j’aurais fait si je manquais d’empathie ? Je t’aurais laissé te démerder le jour où t’as débarquer sans t’annoncer. » Mais qui fait ça, d’ailleurs ? « On en serait pas là au moins. » Je ne serai pas en train d’évaluer les chances que ma jumelle soit réellement capable de m’enfoncer un couteau dans le ventre. Je ne serais pas tenue à distance par une junkie dans mon propre appartement. « Oh la ferme. » Et sur ce, elle court, elle s’enferme et je frappe de toutes mes forces sur la porte qui me résiste.

J’espère sincèrement qu’elle est en train de faire ses valises et, pourtant, j’espérais tout aussi sincèrement pouvoir construire quelque chose avec elle. Bien sûr, j’ai certainement ma part de responsabilité. Est-ce que, si je l’avais dit à voix haute, ça aurait changé quelque chose ? Est-ce que si j’avais avoué avoir toujours souffert du sentiment de n’avoir aucune famille, ça nous aurait rapprochées toutes les deux ? Certainement pas. Elle me voit comme une princesse pourrie gâtée et à mes yeux elle a pris les traits de ma junkie de mère. Je cherche à m’élever alors qu’elle plonge sans toucher le fond. Nous sommes peut-être juste trop différentes. « T’étais où toi quand j’ai fait une overdose, moi ? J’étais à l’hôpital toute seule, y’a personne de notre famille qu’est venu, alors ferme ta gueule quand t’as rien vécu. » Pour l’instant, je ne suis plus capable de réfléchir convenablement. A mes yeux c’est différent puisque Murphy ne peut s’en prendre qu’à elle même quand, de mon côté, j’ai subi les choix de quelqu’un d’autre, de notre mère. Bien sûr, je n’ai pas d’addiction : je ne peux pas savoir à quel point la drogue vous empoisonne l’esprit, je ne parviens qu’à en vouloir à ceux qui y succombent. « Personne t’as obligée à t’enfoncer une seringue dans le bras ou à snifer ta poudre de merde. » Je ne sais même pas ce qu’elle fait. Je l’imagine déjà dans des squats miteux avec des aiguilles souillées. En larme, en colère, je continue à frapper à la porte en regrettant de l’avoir rencontrée. Bien sûr, dans une heure je m’en voudrais déjà de ne l’avoir ne serait-ce que pensé. « La ferme ! FERME TA GUEULE ! Je risque pas de venir pleurnicher chez une petite conne d’égoïste. J’ai des amis. C’est pas grave si tu veux pas renouer, j’irai chez ma vraie famille. » - « Par pitié dis à personne que t’as une sœur, j’ai pas envie d’avoir à te gérer quand faudra te placer en désintox ou te commander un cercueil sur mesure. » C’est cruel, c’est petit, je ne le pense pas mais c’est le reflet de mes désillusions et de mes peines. Elle me brise le cœur Murphy, alors que nous venons à peine de nous rencontrer et que j’espérais trouver en cette sœur une épaule sur laquelle m’appuyer pour affronter toutes les merdes que la vie - comprendre nos parents - jettent en travers de notre route. « Tiens, pétasse. » Elle sort en trombe et me jette un bijoux que je laisse tomber par terre au visage. « CASSE-TOI. » Elle est déjà partie.

Pourtant, lorsqu’elle est loin et que je ramasse le collier avant de comprendre de quoi il s’agit, je me laisse tomber sur le canapé et je laisse mes larmes couler sans chercher à les retenir.

 

rp terminé