why storms are named after people.

@MURPHY ROWE & RORY

Il fallut plusieurs secondes à Rory pour qu'il consente finalement à refermer la porte sur la silhouette de Swann, non sans un énorme pincement au cœur à l'idée de voir son petit-ami quitter le loft. Ce n'était que pour une nuit, tel qu'ils se l'étaient promis, mais quelque chose dans le regard de l'anglais avait inspiré les pires craintes à Rory. Et si ce nez cassé cachait plus que la série d'accidents que son petit-ami n'avait consenti à évoquer qu'à demi-mots ? Et s'il était parti à cause de ça ? Et s'il s'il ne revenait finalement jamais ? Trop d'interrogations se mélangeaient à l'intérieur de son esprit alors que Swann n'avait sûrement même pas encore quitté le hall de la résidence et si les circonstances avaient été différentes, Rory n'aurait eu qu'une seule idée en tête : courir jusqu'à l'autre bout du loft pour tenter de l'apercevoir depuis le balcon, celui-là même où ils avaient toujours eu l'habitude de s'installer ensemble pour contempler la vue. Dans d'autres circonstances, oui, Rory aurait cherché par n'importe quel moyen à le garder le plus longtemps possible dans son champ de vision, avant de se précipiter sur son téléphone pour lui rappeler combien il l'aimait. Combien tout ça n'y changerait jamais rien. Seulement il avait encore plus urgent à l'esprit et savait que son petit-ami ne pourrait pas lui en vouloir un seul instant, pas alors qu'il était celui qui l'avait averti. Pour Murphy, pour sa coupure, pour tous ces éléments que Rory n'intégrait pas encore pleinement mais qui réveillaient ses instincts les plus protecteurs. S'il veillerait à maintenir le contact avec son petit-ami plus tard dans la soirée, c'est à Murphy et à son bien-être qu'il pensait pour l'instant. Il serait toujours là pour elle, voilà ce qu'il s'était promis même après leur rupture. Et il tiendrait promesse.

« Murphy ? » C'est le nom de la jeune femme qu'il prononça si tôt la porte refermée et vers sa chambre qu'il se dirigea. Qu'elle s'y soit enfermée n'avait sans doute rien de surprenant lorsqu'on connaissait leur passif et la symbolique qu'avait sans doute gardé cet endroit aux yeux de la brune. Et Rory n'aurait pas dans l'idée de le lui reprocher une seule seconde. Quoi qu'il se soit passé dans ce salon, il n'avait pas l'intention de lui servir le moindre reproche, incapable d'imaginer que Murphy puisse être à l'origine de ce désastre et encore moins qu'elle puisse avoir volontairement blessé son petit-ami. Il était si loin de s'en douter. « Murphy je sais que t'es là. Ouvre-moi. » Il toqua à la porte. Une fois, deux fois. Mais aucune réponse de sa part : elle ne semblait pas décidée à se montrer. « Swann m'a dit que t'étais blessée, j'aimerais examiner ton bras. J'ai apporté le nécessaire. » Il avait pensé à prendre tout ce que lui avait énuméré son petit-ami, faisant confiance à ses aptitudes en médecine autant qu'à sa bonté naturelle qui faisait de Swann la dernière personne susceptible d'abandonner quelqu'un à son sort. Murphy avait précisément besoin d'aide et ne pas encore savoir à quel point ne tendait pas à rassurer Rory. Alors il lui fallait trouver un moyen d'entrer, coûte que coûte. Son idée fut de récupérer une clef identique à celle dont la jeune femme s'était servie pour s'enfermer dans la chambre et de l’insérer dans la serrure jusqu'à entendre l'autre clef céder de l'autre coté de la porte, au bout de quelques efforts. Il n'eut finalement plus qu'à la déverrouiller. « J'entre, ok ? » Et s'il avait su ce qu'il trouverait à peine la porte entrouverte, Rory aurait trouvé le moyen d'être dix fois plus rapide. « MURPHY ! » Sous ses yeux affolés se trouvait le corps inerte de la brune, étendue à même le sol. C'est sans y réfléchir que Rory s'agenouilla près d'elle, s'assurant d'abord de sentir son pouls – par chance, elle respirait – avant de dégager plusieurs mèches de cheveux de son visage plus pâle encore que d'habitude, la gorge serrée. « S'il te plaît, ouvre les yeux. » Il intima en exerçant une pression sur ses doigts qu'il saisit doucement entre les siens. La coupure à son bras était plus profonde qu'il ne l'avait prévu et elle saignait abondamment. C'était sans doute la douleur qui lui avait fait perdre connaissance et sa priorité était de s'assurer qu'elle ne perde pas plus de sang.

***

Le désinfectant, les strips et les bandages trônaient sur la table basse près du lit. C'est là qu'il avait allongé Murphy, là qu'il avait minutieusement traité son bras et fait en sorte d'arrêter le saignement. Rory n'était pas médecin, mais il avait vu Swann soigner des blessures plus impressionnantes encore et retenu grâce à ça quelques gestes utiles. Ses mains tremblantes de nervosité et sa peur de mal faire ne lui avaient pas rendu service, loin de là, mais Rory n'avait rien lâché. Il ne l'avait pas lâchée, elle, qui comptait toujours beaucoup pour lui et dont il comptait bien prendre soin. Murphy ne reprit connaissance qu'après de longues minutes, et c'est un immense soulagement qui s'empara à cet instant de l'acteur. « Hey. » Son visage n'était peut être pas celui qu'elle s'attendait à trouver, qui sait même si elle se rappelait être venue les voir ce soir. « Comment tu te sens ? Tu m'as fait une sacrée peur. » Rory tenta tant bien que mal de cacher ses émotions à fleur de peau derrière un sourire bienveillant. Cette soirée avait fait faire mille tours à son cœur et la nuit pourrait être encore plus compliquée. « On est dans ma chambre. » Dans la chambre qu'il partageait avec l'anglais, en réalité, mais ça n'était peut être pas le meilleur moment pour le lui rappeler. « Je t'ai trouvé inanimée par terre quand je suis entré. T'avais perdu pas mal de sang, mais j'ai réussi à stopper le saignement. Il faudra sûrement que tu vois un médecin. » Et ça lui ferait probablement mal pendant encore plusieurs jours, mais elle avait évité tout danger et c'était bien là le principal. Malgré tout, Rory s'assurerait que sa plaie soit contrôlée par un professionnel, surtout après son évanouissement.

« C'est Swann qui m'a dit que t'étais là. Il m'a dit quoi prendre pour te soigner, aussi. » Rory confia plus faiblement, une profonde tristesse dans le regard. Sans Swann, qui sait s'il n'aurait pas perdu ses moyens avant de mettre la main sur le désinfectant. Sans lui, il n'aurait sûrement même rien remarqué avant de longues minutes et perdu un temps précieux avant de pouvoir venir en aide à Murphy. Swann était comme un ange gardien dans sa vie depuis de longues années et par certains égards, il l'avait aussi été pour elle ce soir. « Il a parlé d'un accident avec un couteau. » Rory marqua une pause, son regard sondant celui de Murphy durant quelques secondes. S'il ne lui demandait pas encore clairement ce qui s'était passé ni comment elle avait pu s'entailler le bras aussi profondément par accident, l'inquiétude dans ses yeux se faisait le miroir des questions qu'il n'osait pas encore poser. « Il est parti, il... s'est dit que ce serait plus simple si on restait seuls. » Et il tenta tant bien que mal de cacher combien avoir du dire au revoir à son petit-ami lui avait brisé le cœur, bien que ses yeux parlent encore pour lui. Swann n'avait aucune raison de partir mais il avait pensé préférable que Rory s'occupe seul de Murphy et l'australien n'avait pas voulu risquer de compliquer les choses en tentant de le retenir. Il le regrettait mais savait aussi que la jeune femme serait plus à l'aise s'il n'y avait qu'eux. Ils avaient vécu dans cet endroit durant des mois et avaient appris à se connaître par cœur, ou presque. Rory savait qu'il avait une chance de la convaincre de se reposer un peu.

Le cœur est un organe drôlement perturbable. Facilement oublié. Murphy gît au sol, étalée contre la porte de la chambre de Rory. Il y a longtemps qu'elle a oublié de prendre soin de son cœur. Elle ne sait plus vraiment le faire. Doucement, elle s'est laissée glisser contre cette porte avant de perdre connaissance, le bras en sang. Tout ça, c'est de la faute de Swann. S'il n'avait pas été là, le bras de la brune ne se viderait actuellement pas de son sang. C'est fou ce qu'il y a de sang dans le corps humain. Alors elle respire, doucement. Sa peau est pâle, verdâtre. La panique a fait céder son cœur, et tout son corps a suivi la cadence. Elle tourne maintenant au ralenti, Murphy; en attendant que quelqu'un vienne la sortir de là.

*

C'est Rory qui, le premier, la trouve. C'est évident, ils sont chez lui. C'est drôle parce que cet évènement leur rappelle sûrement un autre. Là aussi, Murphy était étalée au sol contre la porte de la chambre de Rory. Il l'a trouvée écume au bord des lèvres en train de s'étouffer dans son vomi. Rien de très glorieux. Les overdoses ne sont jamais très glorieuses. « Hey. » La voix douce de Rory la tire de son état léthargique. Doucement, elle reprend pied, clignant des paupières et jetant des regards autour d'elle. Murphy a encore le cœur au bord des lèvres. Rien que de penser à tout ce sang, elle se sent de nouveau fébrile. Heureusement, Rory l'a installée dans son lit. Elle y est bien, là. Cette chambre lui a toujours paru confortable. Comme une petite maison. Avec lenteur, Murphy se redresse. Elle porte à son front, qui a cogné le sol, une main prudente. « Comment tu te sens ? Tu m'as fait une sacrée peur. » Ses yeux cherchent honteusement ceux de Rory. Elle lui expliquera tout dans les moindres détails. Comment elle a menacé Swann du couteau, comment elle l'a blessé, comment son nez s'est brisé. Comment, aussi, elle s'est entaillée elle-même la peau.

« On est dans ma chambre. » « Je vais bien. » qu'elle répond, en retard d'une réplique. Elle s'humecte les lèvres et se laisse glisser dans les draps, sans oser jeter un coup d'oeil à son bras qui lui fait un mal de chien. Rory s'est certainement occupé de tout avec une minutie qui ne connaît généralement aucune limite. « Je t'ai trouvé inanimée par terre quand je suis entré. T'avais perdu pas mal de sang, mais j'ai réussi à stopper le saignement. Il faudra sûrement que tu vois un médecin. » Les paumes de Murphy frottent ses yeux alors qu'elle soupire. Elle n'a pas envie de voir un médecin. Les médecins posent toujours des tas de questions auxquelles Murphy n'a pas envie de répondre. « Non je suis sûre que t'as fait un travail d'orfèvre. » Et oui, elle en connaît des mots intelligents, Murphy.

Mais la suite ne rassure pas beaucoup la jeune femme. « C'est Swann qui m'a dit que t'étais là. Il m'a dit quoi prendre pour te soigner, aussi. » Qu'a-t-il dit d'autre ? La brune décolle les paumes de ses yeux et plante ses prunelles dans celles de Rory. « Ha oui ? » Ce n'est pas elle qui aurait fait une chose pareille. Elle aurait probablement laissé Swann dans la merde, à la hauteur de ce qu'il lui avait fait subir. Mais Swann n'est pas le méchant de l'histoire. « Il a parlé d'un accident avec un couteau. » A ces mots, le sang de Murphy se glace. Elle est prise d'un frisson et s'enfonce un peu plus dans les draps, pâlissant à nouveau. Son bras pulse doucement, sous le bandage. « Il est parti, il... s'est dit que ce serait plus simple si on restait seuls. » C'est plus simple, en effet. Mais au regard de Rory, Murphy devine que la décision n'a pas été simple à prendre. Oui, elle dira toute la vérité à Rory. « C'était pas un accident, avec le couteau. » Mais pas tout de suite. « J'ai pas très envie de te raconter maintenant. Et si on allait... faire autre chose ? » Des larmes de panique lui montent aux yeux. Elles sont sincères, mais la panique n'est pas vraiment déclenchée à l'idée de se remémorer l'incident. Plutôt à l'idée de devoir à nouveau mentir à Rory et de le faire bien. « Je peux avoir un câlin ? Et je te raconterai tout. » Rien qu'à l'idée de se remémorer la blessure, la jeune femme a envie de vomir.

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C'est d'une main encore légèrement tremblante que Rory raccrocha après avoir assuré une dernière fois à Swann qu'il l'aimait – et l'avoir probablement remercié à quelques dizaines de reprises pour son aide précieuse. Sans lui, l'acteur n'aurait jamais pu apporter des soins précis et efficaces à une Murphy évanouie. Sans lui, le bras de la jeune femme aurait continué à se vider de son sang et dieu seul sait ce qui se serait passé. Rory n'avait pas voulu y penser, concentré à faire en sorte qu'elle aille bien tout en suivant à la lettre chaque conseil donné par son petit-ami. Son cœur s'était serré à plusieurs reprises de la voir dans cet état, mais aussi de repenser au jour où il avait déjà redouté le pire en trouvant la brune inerte sur le sol. Ils n'avaient jamais vraiment reparlé de son overdose, tous les deux, parce que Rory n'avait jamais voulu qu'elle se sente mal ou pense que le regard qu'il posait sur elle avait pu changer. Ce n'était pas le cas, peu importe ce qui s'était passé ensuite. C'est à une amie qu'il avait porté assistance aujourd'hui et sur une personne chère à son cœur qu'il avait veillé durant les minutes qui avaient suivi. Voir Murphy ouvrir les yeux était un véritable soulagement, à tous les niveaux. « Je vais bien. » Elle reprenait doucement ses esprits et semblait prendre conscience de l'endroit où elle se trouvait. Endroit qu'elle connaissait bien puisqu'elle y avait habité durant quelques mois. « T'as encore besoin d'un peu de repos. Tu peux rester aussi longtemps que tu voudras. » C'était déjà vrai avant que la soirée ne prenne une tournure aussi catastrophique, mais à présent Rory était aussi inquiet pour elle et préférait qu'elle reste le temps de se remettre. Il ne pouvait pas la laisser seule.

Il le pouvait d'autant moins qu'elle était tombée dans les pommes et lui avait aussi fait part de ses difficultés avec son logement. Elle serait bien mieux ici pour récupérer. « Non je suis sûre que t'as fait un travail d'orfèvre. » Rory étira un maigre sourire, posant un regard encore troublé sur le bras de la jeune femme. « Si ça peut te rassurer, j'avais Swann au téléphone tout du long. » Il précisa en retrouvant cette fois son regard. « Il est formé à soigner les gens, t'étais entre de bonnes mains avec lui... enfin moi. Enfin t'as compris. » Et il aurait été bien plus rassuré d'avoir Swann près de lui pour soigner en personne le bras de la brune, mais ils avaient paré au plus urgent et tout s'était finalement passé sans difficulté. Si on oubliait qu'il avait redouté jusqu'au dernier instant que Murphy ne reprenne pas conscience, cette fois encore. Ce n'était pas un traumatisme qu'il aurait voulu revivre, n'osant imaginer ce qui pourrait lui arriver la prochaine fois si personne ne la trouvait à temps. Elle faisait encore aujourd'hui partie de ces personnes à qui il ne souhaitait pas voir arriver le moindre mal, se sachant incapable de le supporter. C'est donc Swann qui l'avait guidé pendant qu'il s'occupait d'elle, Swann également qui avant son départ lui avait brièvement dépeint le drame survenu pendant qu'il était dans la salle de bain. « Ha oui ? » Rory n'avait pas vraiment demandé de détails, sachant qu'il les lui donnerait tôt ou tard parce que tous les deux ne s'étaient jamais rien cachés et qu'il n'en serait sans doute pas autrement cette fois-ci. Swann avait parlé d'un accident, terme que Rory n'avait à aucun moment pensé à remettre en question. « C'était pas un accident, avec le couteau. » Alors les paroles de Murphy avaient à ses oreilles le plus troublant des échos, Rory n'étant pas certain de comprendre où elle voulait en venir. Il n'était pas certain de le vouloir non plus, à dire vrai. « C'était quoi, alors ? » Déjà soucieux il y a quelques minutes, Rory n'était cette fois même pas certain de savoir quels scénarios redouter. Il n'avait jamais présumé qu'il ait pu s'agir d'autre chose que d'une coupure accidentelle, peu importe qu'il faille probablement une grande dose de malchance pour se couper aussi profondément avec un couteau. Tout paraissait à ses yeux plus logique que... que quoi, d'ailleurs ? « J'ai pas très envie de te raconter maintenant. Et si on allait... faire autre chose ? » « Eh, eh, Murphy. » Doucement, c'est sa main qu'il déposa sur la sienne lorsqu'il lut la panique dans les yeux de Murphy. Ces derniers brillaient d'un éclat qui ne savait que lui briser le cœur, loin d'être aussi joyeux et insouciant que le jour où il l'avait rencontrée. « Je suis pas venu pour te soumettre à un interrogatoire, d'accord ? Tout ce que je veux c'est que tu te sentes assez en confiance pour me le dire si y'a eu un problème. » Un problème avec qui, au juste ? Swann ? Rien ne lui paraissait plus improbable et jamais Rory n'irait imaginer que la présence de l'anglais ait pu provoquer cette situation. C'était forcément autre chose. Quoi qu'il se soit passé, il y avait une explication qui ne pouvait que dédouaner les deux personnes présentes à ce moment-là : Swann et Murphy.

« Je peux avoir un câlin ? Et je te raconterai tout. » Rory n'avait déjà jamais eu le cœur à lui refuser quoi que ce soit avant ça, il le pourrait d'autant moins dans ces circonstances. « Bien sûr. » Il souffla dans un sourire qu'il espérait rassurant, prenant bien soin de ne pas lui faire mal au moment de s'asseoir à coté d'elle sur le lit et de l'entourer délicatement de ses bras. Il l'étreignit avec douceur, espérant que ce contact aiderait à alléger l'atmosphère après une soirée riche de beaucoup d'émotions. « Je suis content que tu sois venue me trouver ce soir, tu sais. Malgré tout ça. » Malgré la tournure qu'avaient prises les choses et qui lui laissait un terrible sentiment d'impuissance. Malgré ça, oui, il se réjouissait que Murphy ait frappé à sa porte. Il s'était promis de ne jamais lui tourner le dos et la voir en chair et en os lui avait fait plaisir. «  Ma porte te sera toujours ouverte. » Si tant est qu'il ait besoin de le lui rappeler, il n'hésitait pas une seconde. Se redressant légèrement, Rory croisa son regard au moment de demander. « Tu veux que je t'apporte quelque chose ? T'as besoin de reprendre des forces. » Après son malaise et tout le sang qu'elle avait perdu, ce serait une bonne chose qu'elle se remplisse l'estomac ou boive au moins un verre d'eau. « Tu pourras tout me raconter en mangeant. » Parce qu'il avait besoin d'y voir plus clair sur le déroulé de cette soirée et qu'il savait que Murphy ne voudrait pas le laisser en plein fou. Elle pouvait lui apporter des réponses et c'était une nécessité d'autant plus grande depuis qu'elle avait remis en cause la thèse de l'accident. Il ne faisait qu'y penser, depuis. « J'ai nettoyé la cuisine pendant que tu dormais. » Et une partie du séjour et du couloir, ainsi que chaque endroit qui s'était retrouvé maculé du sang de Murphy et Swann. « Je voulais pas... que t'aies à supporter cette vision à ton réveil. » Il avait préféré s'imposer cette vision à lui-même, quand bien même elle lui avait serré le cœur. Parce qu'il ne pouvait s'empêcher de se tenir responsable de ce qui était arrivé, lui qui n'était pas là au moment des faits. Il aurait du être présent pour réagir, pour éviter que les choses ne dégénèrent.

Et ça ne la rassure pas, qu'il ait eu Swann au téléphone tout du long. Ca la fait bouillir, si bien que la panique la gagne à nouveau, assez pour sentir le bout de ses pieds frissonner. S'évanouira-t-elle dramatiquement de nouveau pour montrer son mécontentement ? Peut-être. « Il est formé à soigner les gens, t'étais entre de bonnes mains avec lui... enfin moi. Enfin t'as compris. » « J'ai compris. » qu'elle acquiesce, un peu mordante sur les bords. Swann est partout, voilà ce qu'elle comprend. Et Swann est difficile à déloger. Ce qui rassure Murphy, en revanche, c'est l'offre de Rory. Rester tant qu'elle voudra. Il ne faut pas le lui dire deux fois. La jeune femme avait de toute façon prévu de s'étaler et de squatter un peu pour la soirée. Après cette aventure rocambolesque avec Megan, autant prendre son temps. Rory en revient au fâcheux accident avec le couteau, un sujet que la jeune femme préférerait éviter de peur de dire une bêtise. Surtout, ne pas se précipiter. Laisser faire le temps. Murphy porte ses doigts au bandage, qu'elle triture non sans mal, désireuse d'en arracher l'étoffe. « C'était quoi, alors ? » Ses doigts s'arrêtent et les larmes remontent. Pour Rory, elles passeront certainement pour des larmes de tristesse, elles ne sont en fait que des larmes de panique. Que dire ? elle est ici fautive. C'est elle qui a attaqué Swann. Elle qui a répandu leur sang sur le sol de la cuisine. Elle et personne d'autre. Oui, elle doit tout dire à Rory. Il ne dira rien, ne sera pas fâché. Et s'il voulait la virer d'ici? S'il se ravisait, revenait sur son idée ? Où irait Murphy ? « Eh, eh, Murphy. Je suis pas venu pour te soumettre à un interrogatoire, d'accord ? Tout ce que je veux c'est que tu te sentes assez en confiance pour me le dire si y'a eu un problème. » Cette dernière opine du chef, cessant de tortiller ses mains au contact de son comparse. Décidément, il n'y a que lui qui lui fasse cet effet, rassurant sans en faire trop. La vérité, elle la gardera pour elle, c'est décidé. Pour ne pas le décevoir. Pas pour lui cacher les choses, pas volontairement - c'est promis.

Les bras de Rory sont le safe place dont avait besoin de la jeune femme. Soupirant doucement contre le torse du premier, Murphy échafaude ses allégations, monte son petit plan. C'est très facile, au fond. Comme tisser une toile et attendre que les proie s'y jettent. Dans ses idées, Swann devient le grand coupable. Elle n'était que là au mauvais endroit, au mauvais moment. « Je suis content que tu sois venue me trouver ce soir, tu sais. Malgré tout ça. » Un frisson mauvais gagne l'échine de Murphy, qui opine du chef avec un léger décalage. Elle aussi, elle est contente d'être ici, même si l'idée de mentir à Rory lui donne envie de vomir. Tout serait plus facile s'il n'était pas lui, simplement le plus gentil, être humain qui foule le sol de cette maudite planète. « Ma porte te sera toujours ouverte. » « Toujours ? » Sauf si elle commet des fautes trop graves, elle le sait autant que lui. Blesser Swann en est une et Rory ne sait pas encore que c'est cette faute qui le poussera peut-être à revoir sa promesse. « Je t'aurais bien promis la même chose mais... » Mais elle n'a pas vraiment de chez elle. « Tu veux que je t'apporte quelque chose ? T'as besoin de reprendre des forces. » « Je mangerais bien un petit truc. Les chips qu'on avait prévu de manger avec Swann. » Sans Swann. Tant mieux.

« Tu pourras tout me raconter en mangeant. » Elle préférerait ne pas raconter, surtout pas en mangeant, au risque de tout rendre sur les pieds de l'acteur. « J'ai nettoyé la cuisine pendant que tu dormais. » « Oh. » Quelle horreur. Murphy n'a pas spécialement peur du sang, ou peut-être qu'elle redoute un peu le sien. Elle ne le saura jamais, trop prompte à s'évanouir dès que les émotions deviennent un peu trop fortes. « Je voulais pas... que t'aies à supporter cette vision à ton réveil. » « Je suis désolée d'avoir tout sali. » C'est un lapsus qu'on ne peut pas saisir si on ne sait pas que la brune est responsable d'absolument tout le sang qui a été versé aujourd'hui. Doucement, Murphy glisse au bord du lit et pose ses pieds à terre. « On peut y aller ensemble. Je suis prête à me lever. »

C'est non sans aide qu'elle est parvenue à la cuisine, jusqu'à une chaise épargnée du carnage. D'un petit merci, Murphy se défait de la prise de Rory et s'installe, en soupirant un grand coup. Les chips sont sur la table, elle ne se gêne pas pour en attraper timidement une poignée. « Je sais pas trop comment les choses se sont passées. » Quelle version est à dire. La version qui est à taire, en revanche, Murphy la connaît. Elle a pensé à plaider l'accident, la chute. Mais ça n'aurait pas expliqué le départ précipité de cette drama queen de Swann, qui donne définitivement du fil à retordre à Murphy. « Mais je... Je crois que j'ai parlé de nous, d'avant, et que ça ne lui a pas plu. Peut-être que je m'imagine des trucs, tu sais. » Parce qu'elle en ressent vraiment l'irrépressible envie, Murphy gratte le bandage qui cache la plaie qu'elle porte au bras, fermée au steristrip. « Il n'a pas fait exprès. J'ai eu peur quand il a haussé la voix, alors j'ai attrapé un couteau. » Le regard perdu dans le vague, Murphy mime l'action de grands gestes. « Je croyais qu'il allait arrêter. » Et soudain, de la plus dramatique des manières, Murphy attrape son visage entre ses mains. Des larmes jaillissent de ses yeux bleus et elle se recroqueville, visiblement épuisée par le début de son récit. « Je me souviens pas, je suis désolée. J'ai eu si peur... » Peur de Swann ? Sans rire. Swann est un ourson qui ne ferait pas de mal à une mouche. Et faire croire l'inverse à Rory sera probablement chose impossible.

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Murphy n'irait nulle part. En tout cas pas tant qu'elle n'aurait pas pleinement repris des forces. Son arrivée au loft ne s'était peut être passée comme Rory l'avait espéré, mais elle restait la bienvenue en ces lieux et cette soirée n'y changerait rien. Son seul regret, c'était que la rencontre entre la brune et Swann ait connu un déroulé aussi chaotique, l'acteur profondément affecté par la tournure qu'avaient prises les choses sans pour autant savoir comment les arranger. « Toujours ? » « Bien sûr. » Il lui assura sans même avoir besoin de retourner la question dans son esprit, simplement parce que la réponse ne faisait pas le moindre doute et qu'il savait que Swann lui donnerait raison même s'il n'était malheureusement pas là pour le faire. Si tôt qu'il aurait retrouvé ses bras et leur chaleur, cette soirée désastreuse serait définitivement de l'histoire ancienne. Et ces heures-ci n'arriveraient jamais assez tôt, à ses yeux. « Je sais qu'on s'est quittés dans des circonstances un peu particulières mais... je trouve qu'on s'en sort pas si mal, non ? » Leur relation avait pris fin et certains constats avaient été difficiles à faire, mais Rory avait été incapable de lui en tenir rigueur. Et si quoi que ce soit pouvait être sauvé de tout ça, c'était bien cette amitié qu'ils tentaient de construire. Parce qu'ils étaient amis, n'est-ce pas ? C'est parce qu'il tenait toujours à elle, en tout cas, qu'il n'avait pas hésité à lui ouvrir sa porte. « Je t'aurais bien promis la même chose mais... » Rory étira une légère grimace, concerné par la situation de Murphy. « Je sais oui, tes problèmes d'appart'... J'espère que ça s'arrangera vite et que c'était juste un malentendu. » Il avait bien compris qu'on l'avait expulsée de l'endroit où elle vivait et il ne pouvait qu'espérer que les choses rentreraient dans l'ordre, que dans le cas contraire elle n'hésiterait pas à demander son aide.

« Je mangerais bien un petit truc. Les chips qu'on avait prévu de manger avec Swann. » Rory baissa les yeux une seconde, songeant à ce que cette soirée aurait pu être si tout s'était passé comme prévu. S'il était simplement sorti de la douche pour les rejoindre, et partager un agréable moment autour d'un bon repas. Des regrets au sujet des dernières heures, il en avait beaucoup. Beaucoup trop pour ne pas se torturer avec des et si. « C'est une bonne idée. J'ai touché à rien, elles t'attendent dans la cuisine. » Il va de soi qu'il lui aurait proposé n'importe quoi si elle en avait eu envie, mais que Murphy s'oriente vers des chips tendait au moins à prouver qu'elle restait fidèle à elle-même, y compris dans ces circonstances. Une idée qui le temps d'une seconde tira un léger sourire à Rory, parce que ça le rassurait bien plus qu'elle ne l'imaginait sans doute. « Oh. Je suis désolée d'avoir tout sali. » Il secoua doucement la tête, désirant moins que n'importe quoi d'autre ajouter la moindre culpabilité au cocktail d'émotions que supportait déjà Murphy ce soir. « C'est rien, n'y pense plus. » Cette vision d'horreur et ce sang déversé en grande quantité sur le sol resteraient ancrés un bon moment dans sa mémoire, mais c'était son problème et Rory ne voulait pas remuer trop de choses pénibles pour la brune. « On peut y aller ensemble. Je suis prête à me lever. » Et bien que Murphy reste faible si peu de temps après s'être évanouie, qu'elle veuille tenter de rejoindre la cuisine était une excellente nouvelle, source de soulagement pour l'acteur. « D'accord, je vais t'aider. Repose-toi sur moi si tu as besoin. »

Ils gagnèrent la cuisine au bout de quelques minutes, le temps pour la jeune femme de se laisser guider et pour Rory d'appréhender la discussion qui s'annonçait. Une discussion qu'ils auraient sans Swann, ce qui ne ferait que rendre les choses un peu moins évidentes encore. « Je sais pas trop comment les choses se sont passées. » Rory ne l'interrompit pas, désireux de la laisser prendre son temps et rassembler ses esprits pour lui raconter ce dont elle se souvenait. Ses souvenirs étaient sûrement confus, raison pour laquelle il la presserait d'autant moins. « Mais je... Je crois que j'ai parlé de nous, d'avant, et que ça ne lui a pas plu. Peut-être que je m'imagine des trucs, tu sais. » « Oh. » Rory savait qu'il y avait un risque pour que Swann et Murphy abordent le sujet une fois seuls, mais il n'avait pas même redouté un seul instant que la discussion puisse mal se passer. Avait-ce été le cas ? La simple idée que Swann puisse se mettre en colère lui était déjà impensable pour le connaître par cœur, mais il imaginait encore moins son petit-ami capable de s'emporter face à quelqu'un qu'il rencontrait pour la première fois. Qui plus est, il avait accueilli Murphy chaleureusement. « Il n'a pas fait exprès. J'ai eu peur quand il a haussé la voix, alors j'ai attrapé un couteau. » Le récit de Murphy lui serra le cœur, Rory comprenant que la situation avait dégénéré à partir d'un rien et que ce couteau était simplement venu empirer les choses. Si seulement ils s'étaient trouvés à l'extérieur, là où rien de mal n'aurait pu leur arriver à l'un comme à l'autre. « Je croyais qu'il allait arrêter. » « Murphy... » Lorsque les yeux clairs de Murphy se bordèrent de larmes, c'est le visage de Rory qui se teinta à son tour d'une profonde tristesse. La voir pleurer lui coûtait énormément, il s'était lui-même toujours interdit de la rendre triste y compris lors de leur rupture. « Je me souviens pas, je suis désolée. J'ai eu si peur... » Doucement, ses mains se saisirent des siennes dans un contact qu'il espérait rassurant, au moins pour qu'elle se raccroche à l'instant et se rappelle qu'elle ne craignait rien, ici. Tout comme il était au fond de lui convaincu qu'elle n'avait couru aucun danger auprès de Swann, que tout avait simplement dérapé sans que ni l'un ni l'autre ne soit plus capable de rattraper la situation. « C'est rien, on peut arrêter si tu veux. » Plus de questions, il ne voulait pas l'obliger à ressasser tout ça et moins encore dans son état. « Je crois que tout est simplement allé trop vite, hier soir. Avec ce qui se passe avec ton appart', tu avais peut être les nerds à fleur de peau et la situation est devenue angoissante si le ton est un peu monté. » Il n'était pas là, il ne savait même pas ce que Swann et elle s'étaient dit mais il était convaincu qu'il y avait une bonne explication à l'issue dramatique de cette soirée. Un mot un peu plus haut que l'autre, un geste accidentel, une tension un peu trop forte. Il pourrait imaginer des dizaines de scénarios dans lesquels ni son petit-ami ni Murphy n'avaient quoi que ce soit à se reprocher.

« Je sais que personne ne voulait blesser personne. » Il souffla doucement, éternellement incapable de voir autre chose que le bon en chacun, plus encore chez les personnes qu'il aimait. « Swann est l'être le plus doux et inoffensif que je connaisse, s'il t'a effrayé sans le vouloir je suis persuadé qu'il le regrette. » Que Swann ait pu dire ou faire quoi que ce soit pour faire paniquer Murphy lui paraissait peu probable, alors peut être que Murphy n'était plus très sûre de ce qui s'était passé ou que les intentions de l'anglais avaient été mal-interprétées ? Ce dont Rory était sûr, c'est que Swann devait se sentir affreusement coupable et son propre cœur se brisait à l'idée qu'il ne puisse même pas le rassurer comme il le voudrait. « On peut ne plus en reparler. C'était une soirée éprouvante pour tout le monde, mais tout va s'arranger. Il faut juste que tu te ménages pour que ton bras guérisse. » Sa convalescence, voilà le plus important à ses yeux. Murphy avait été sévèrement blessée et si Swann avait permis d'éviter le pire, l'inquiétude de l'acteur n'en était pas entièrement dissipée. « Tu devrais quand même voir un médecin, d'ici quelques jours. Juste pour vérifier que la plaie cicatrise. » Rory se pinça les lèvres, son regard rivé vers le sien. « Tu crois que tu pourrais faire ça ? Ça me rassurerait. » Il ne serait déjà pas tranquille tant que Murphy n'aurait pas un toit permanent au dessus de la tête, il avait besoin de s'assurer qu'elle prendrait sa blessure assez au sérieux pour recueillir un avis médical, à défaut de sûrement accepter que Swann l’ausculte en chair et en os cette fois.

Peut-être qu'elle pourrait lui dire. Lui raconter depuis le début. Les premiers mensonges, les premières cachoteries. Lui raconter comment elle s'est mise dans son chemin. Comment elle y est restée. Faire un grand bon en avant dans le temps, parler de l'expulsion dramatique de l'appartement de Megan. La fuite jusqu'à chez lui. Comment elle se sent sous ce toit, qui est le plus safe des safe places dont elle ait la connaissance. Elle pourrait aussi lui dire, pour Swann. Elle pourrait lui raconter combien elle le trouve génial. Combien elle trouve que Rory et Swann seraient deux noms très jolis à ajouter à des faire-parts. Elle pourrait dire tant de choses - si seulement elle les pensait vraiment.

Murphy s'est perchée sur un siège depuis lequel elle pioche dans les chips avec une retenue étonnante. Rien ne la retient pourtant de dévorer tout ce qui se trouve sous ses yeux. Son estomac crie famine et Rory ne pourra que l'encourager à manger après l'incident. Dans la tête de Murphy, c'est la cacophonie. Deux camps bataillent férocement l'un contre l'autre. La déchirante vérité, ou le délirant mensonge ? La jeune femme opte finalement pour l'horrible péché du mensonge, péché qui semble être le socle de sa relation avec Rory. La maison est branlante et les murs sont pourris. Combien de temps faudra-t-il a la bâtisse pour s'effondrer sur les épaules de Murphy ? « Murphy... » Murphy, Murphy, Murphy... Swann lui a demandé gentiment d'arrêter ses délires. Il a essayé de la raisonner. Elle aurait pu poser le couteau. Ils auraient pu s'asseoir ensemble pour manger des chips. Ils se seraient certainement bien entendus. Rory aurait été là, dans un coin, à les observer en silence, fier comme un paon à l'idée que son chez-lui soit synonyme de paix et d'amour et gnagnagna. Malheureusement, rien de cette jolie vision n'existe dans le monde réel. Elle appartient à un doux rêve, brisé par le cauchemar ambulant qu'est Murphy Rowe.

Les mains de Rory sont chaudes. Douces. Le contact apaise la jeune femme plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Elle crèverait pour un câlin. Elle donnerait tout pour dix minutes de contact en silence. « C'est rien, on peut arrêter si tu veux. » Les fausses larmes qui ravagent son visage déjà marqué par la fatigue n'arrangent rien à son apparence. Elle a l'air misérable, voilà tout. Son costume de paumée est drôlement réussi. « Je crois que tout est simplement allé trop vite, hier soir. Avec ce qui se passe avec ton appart', tu avais peut être les nerfs à fleur de peau et la situation est devenue angoissante si le ton est un peu monté. » Oh, cette version est si belle. Si rassurante. Elle ne met la faute sur personne. Murphy se laisse presque convaincre, mais n'acquiesce pas. C'est à cet instant que la blonde se rend compte que convaincre Rory de la culpabilité de Swann est tout simplement mission impossible. Elle aura au mieux réussi à créer une sorte de malaise entre eux... peut-être. En réalité, elle n'en a aucune idée. Elle était trop occupée à... se vider dramatiquement de son sang dans la chambre de l'hôte de cette horrible soirée. « Je sais que personne ne voulait blesser personne. » Murphy voudrait rétorquer qu'elle, elle a voulu blesser Swann. Toutes ces choses affreuses qu'elle a dite n'avaient qu'un but : se planter dans le cœur de Swann avec autant de force que les balles d'un fusil d'assaut. « Swann est l'être le plus doux et inoffensif que je connaisse, s'il t'a effrayé sans le vouloir je suis persuadé qu'il le regrette. » « J'ai eu super peur. Il est... Il m'a l'air un peu susceptible. » qu'elle marmonne en s'essuyant les joues. Ce n'est pas un adjectif qu'elle aurait aimé employer. Il n'est pas assez fort. Il ne convaincra pas Rory. En revanche, la petite blonde veut bien croire en la faiblesse de Swann. Elle n'a pas connu beaucoup d'hommes aussi... mous. Enfin, si, peut-être, mais pas dans ce contex- « On peut ne plus en reparler. C'était une soirée éprouvante pour tout le monde, mais tout va s'arranger. Il faut juste que tu te ménages pour que ton bras guérisse. » « T'en fais pas. Je suis pas en sucre. » La jeune femme offre à Rory un vrai sourire.

Toute cette histoire n'a qu'une triste conclusion : c'est auprès de Rory que Murphy voudrait pouvoir être. Ferait-il attention à elle, entouré d'un nuage de bonté tel que Swann ? Elle ne s'aime que dans les yeux des autres, voilà la réalité. Et Rory a le plus doux des regards la concernant. Il n'a toujours su faire que ça, le trentenaire. La regarder sans pitié, mais avec beaucoup de compassion et un peu trop de naïveté. « Tu devrais quand même voir un médecin, d'ici quelques jours. Juste pour vérifier que la plaie cicatrise. » « T'as jamais joué un rôle de médecin ? Tu peux me rajouter sur ton C.V. Je te mets un dix sur dix en... sauvetage. » Rory pouvait déjà ajouter cette mention la première fois qu'il l'a trouvée inconsciente derrière la porte de sa chambre. Rien de nouveau sous le soleil. Il n'y a que lorsqu'on s'occupe d'elle que Murphy se sent vivre, même si cela demande parfois d'être aux portes de la mort - bon, d'accord, pas toujours. Parfois, cela demande juste de bons talents d'actrice et un peu de créativité. Et des couteaux laissés sans surveillance, aussi.

« Tu crois que tu pourrais faire ça ? Ça me rassurerait. » Sans autre forme de procès, Murphy descend de sa chaise pour aller attraper Rory dans ses bras. Qu'importe la douleur dans son bras. Pour cinq secondes, elle ne ment plus. « Je suis désolée d'être comme ça. » Elle sait que Rory lui opposera un mort gentil. Une parole rassurante. Quelque chose pour l'apaiser, encore. Pour une fois, ce n'est pas ce qu'elle cherche. « Je me réconcilierai avec Swann. On fera un gâteau ensemble pour se faire pardonner d'avoir mis du sang dans ta cuisine. » Elle voudrait ne jamais quitter l'étreinte qu'elle a initiée. « On fera ça sans couteaux. » Peut-être qu'elle pourrait. Peut-être que Swann pourrait oublier ce qu'il s'est passé. Elle ne lui pardonnera jamais d'avoir pris une place qu'elle juge comme sienne, en revanche. Cela, elle ne le dira pas à Rory. De toute façon, elle desserre déjà ses bras, mettant fin à la bulle de vérité dans laquelle elle s'était enfermée. « Je dormirai sur le canapé, je serai une hôte exemplaire. » Et s'il acceptait qu'elle reste pour l'éternité, elle le ferait avec joie.