The Suicide King
Raelyn Blackwell & @Otto Lazzari

Quand je demande ”qui t’a fait ça ?” ce n’est pas par politesse. Ce n’est pas non plus pour ne pas écouter la réponse ou pour plaindre qui que ce soit, et ne c’est pas par sollicitude. Quand je pose ce genre de question, on me répond et Spencer a bien fini par me répondre. Sauf que des abrutis de rital du nom de Otto, il n’y en a pas des dizaines à Brisbane. Encore moins si on rajoute le paramètre infréquentable et du genre à cogner des gamines. Je suis sûre que nous parlons du même, et quelle surprise d’apprendre de la bouche de ma demie-soeur qu’elle doit son joli coquard à l’un de mes hommes.

Je ne suis pas surprise parce que je l’en imagine incapable. Je ne suis pas non plus surprise parce que j’imagine qu’il n’oserait pas lever la main sur quelqu’un de mon sang - l’origine de Spencer n’est connue, ou plutôt supposée, que par le petit nombre qui connaît son nom de famille. Non, si je suis surprise, c’est parce que le cambrioleur avait disparu de la circulation depuis la fin du mois de novembre. Deux mois d’un silence complet, deux mois pendant lesquels j’ai mis mon nez dans ses affaires pour comprendre ce qu’il se passait. Deux mois pendant lesquels j’ai découvert qu’il s’était introduit au mariage d’un garçon d’une famille influente de la ville avec une autre gamine, et qu’il avait tiré sur un des invités.

Otto n’a jamais brillé par son intelligence. Je ne lui fais pas confiance parce qu’il est un génie mais parce que, habituellement, avec lui, le travail est fait. Il est efficace, ne pose pas de questions, et n’a pas de tendance à l’insubordination. L’italien ne m’a jamais éblouie de par son quotient intellectuel donc, mais je ne le pensais pas assez idiot pour attirer l’attention sur lui et, par la même occasion, sur son employeur, à savoir l’Octopus.

L’homme est de retour en ville donc, et après deux mois d’un silence parfait, j’entends parler de lui pour savoir qu’il a cogné une gamine qui est sous ma protection. C’est assez pour pour demander à Callum de me conduire à l’adresse officielle du couple Lazzari plutôt que d’attendre qu’il trouve le courage venir lui même traîner sa carcasse d’idiot au Casino et dans ses sous-sols. Le garde du corps m’accompagne jusqu’à la porte - même en étant plus enceinte, je suis considérée comme une poupée fragile et j’enrage - et, lorsque j’appuie sur l’interrupteur, je me demande ce que je dirai à son épouse si c’est elle qui m’ouvre. Sauf que c’est le visage d’Otto qui apparaît derrière la porte - peut-être parce qu’il m’a aperçue depuis l’une des fenêtres de la maison. « Alors t’es vivant. C’était pas des conneries. » Non pas que je m’inquiétais. « T’as prévu de me refaire le portrait… » à moi aussi. « Ou je peux demander à Callum d’attendre dans la voiture ? » Vu l’air à la fois surprise et terrifié qui s’affiche sur le visage de l’Italien, je présume que je peux partir du principe qu’il ne me fera pas de mal. Je me retourne vers mon homme de main et, d’un hochement de la tête, je lui fais signe qu’il peut reculer et m’attendre dehors. Je n’ai besoin de personne pour me protéger de mes propres ressources. « Tu vas m’inviter à entrer et à boire un café ou on attend que Serena rentre ? » Tu vas m’expliquer à quel moment tu t’es dit que c’était une bonne idée de monter ce plan seul et de ne pas m’en parler ? Me dire pourquoi, quand je lui ai demandé ce qui le reliait à Saül Williams, il m’a menti ou en tout cas caché des informations ? Me dire pourquoi je le retrouve à Brisbane, en train de cogner ma petite demi-sœur ? A lui de voir. Moi, je n'ai aucun souci à parler de ça devant sa tendre épouse qui doit être à des kilomètres de se douter de la vraie nature des activités professionnelles de son époux.  

Il avait entendu les pas dans le couloir de la résidence. Il les avait entendu bien avant de même les reconnaître, mais la façon dont ses poils s’étaient hérissé sur ses bras indiquait que son corps avait anticipé bien avant lui ce qui allait se passer. Il n’avait eu qu’un instant, peut-être deux tout au plus, pour se préparer à la rencontre qui allait s’en suivre - de celles qu’il évitait à tout pris depuis qu’il était revenu à Brisbane. En temps normal, ce n’était déjà pas bon signe que de savoir Raelyn en chemin pourvu venir vous rencontrer. Aujourd’hui, cela ressembler à arrêt de mort pour Otto.

Il était venu se poster derrière la porte de bois, son cœur battant un brin trop vite. Quelques semaines plus tôt, il en était à venir mettre à mal un homme et à l’abattre sans cligner une seule fois de trop des cils, et aujourd’hui il se trouvait à faire de la tachycardie alors qu’il ne s’agissait que d’une visite de la Blackwell. Il ne devrait pas avoir autant d’appréhension à la savoir de l’autre côté de la porte, à la savoir sur le seuil de sa demeure. Cependant, l’aisance avec laquelle elle s’approchait de chez lui ne laissait rien parfaire de bon; autant parce-qu’il ne se souvenait pas lui avoir donné son adresse exacte que parce-que, bien plus simplement, elle ne savait pas qu’il était parti ni qu’il était, d’une pierre deux coups, de retour. Elle avait beau être sa patronne, l’italien s’était bien gardé de lui donner le moindre détail sur ce qu’il comptait faire de son temps libre et même de celui qu’il ne l’était pas, et ce depuis des semaines.

Cependant, le cœur tapant avec hargne dans sa poitrine, il ne mît qu’un instant avant de venir ouvrir la porte, lorsqu’elle vint sonner à cette dernière. « Alors t’es vivant. C’était pas des conneries. » Les mâchoires d’Otto vinrent se contracter, et ses yeux étaient paradoxalement autant fuyants qu’à la recherche du moindre indice quant à la raison de la présence de la Blackwell ici. « Qu’est-ce que tu fous là. » Ce n’était même pas une vraie question, mais plus des mots lancés à la volée, alors qu’il n’était en rien serein en cet instant. Avec Raelyn, elle pourrait venir lui expliquer le meilleur plan de l’année comme elle pourrait lui coller une balle entre les deux yeux d’ici l’instant suivant. Il n’avait aucun moyen de savoir la raison de sa présence ici - et non, à ses yeux, venir lui demander des comptes n’en était pas une. «  T’as prévu de me refaire le portrait… Ou je peux demander à Callum d’attendre dans la voiture ? » Les yeux bleus d’Otto vinrent effectuer quelques allers-retours entre derrière la blonde et cette dernière. Il ne comptait pas venir toucher le moindre cheveux de Raelyn, et même si ça avait été le cas, ce n’était pas pour cette partie là qu’il venait s’inquiéter. « Je me disais bien ça sentait le chien. » Si la Blackwell venait discuter, grader Callum présent à ses côtés n’était pas bon signe: lui n’hésiterait pas à venir lui briser une mâchoire ou une côte, mieux valait le voir bien plus loin. Alors, il vint secouer la tête, les mâchoires toujours contactées, pour venir indiquer à Raelyn qu’il pouvait retourner d’où il venait - ce qu’il ne tarda pas à faire.

« Tu vas m’inviter à entrer et à boire un café ou on attend que Serena rentre ? » Finalement, peut être que Callum aurait du rester, parce-qu’à entendre ces mots, finalement Otto ne serait pas contre l’idée de venir refaire le portrait de Raelyn en cet instant. « Tu prononces son prénom encore une fois… » Les doigts de l’italien se mirent à serrer le bois de la porte un brin trop for - pas assez pour laisser des marques dessus, mais on en était pas loin. Raelyn avait presque tous les droits sur lui, mais en branche il ne tolèrerait pas qu’elle vienne ajouter sa femme dans la balance. La dernière fois, il était resté calme et poli. Cette époque là était désormais révolue. « Je te fais rentrer et c’est un whisky qu’on va boire, pas un café. » Les yeux de l’italien vinrent se détacher de ceux de Raelyn, pour faire un aller-retour jusque son ventre avant de revenir à leur point initial. « T’auras pas à faire semblant cette fois. » Et il vint ouvrir la porte en grand, laissant le soin à la blonde de venir refermer derrière elle, s’en allant déjà vers le salon.

« Tu me veux quoi, Raelyn ? » Déjà, une cigarette était allumée entre ses lèvres et sa main, un brin tremblante, étant en train de remplir deux verres de liquide ambré. « Pour que tu viennes jusqu’ici. Comment t’as eu l’adresse, d’ailleurs ? » Qui allait devoir recevoir une leçon de sa part pour avoir faire fuiter une telle information ? Parce-qu’il avait beau tenter de faire des efforts pour se maîtriser, certaines choses ne changeraient pas d’avant et comprendre sa discrétion, ce n’était pas quelque-chose de tolérable.

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Raelyn Blackwell & @Otto Lazzari

« Qu’est-ce que tu fous là. » Qu’est ce que je fous là ? Dans quel monde vit-il, mon lieutenant ? A-t-il oublié que, jusqu’à preuve du contraire, il a des comptes à me rendre, que c’est à moi qu’il répond ? Le jeu de pouvoir est lancé, puisqu’il est hors de question qu’il se foute de ma gueule impunément. Il aurait pu causer du tort au Club en faisant cavalier seul à ce mariage. Il a de la chance de ne pas avoir attiré l’attention sur nous, sans quoi je ne me serais pas présentée à sa porte avec un sourire - qui respire le sarcasme, certes - et il l’aurait instantanément regretté. « Qu’est ce que je fous là ? » Réfléchis bien Otto, je te laisse une seconde chance d’aborder la situation de la bonne façon. « Je me disais bien ça sentait le chien. » Oh, il ne sait pas dans quoi il s’embarque, l’italien. Callum grogne, Callum ne réagit pas parce qu’il sait qu’il doit respecter les forces en place et qu’il ne peut pas faire preuve d’insubordination, mais Callum n’est pas le plus dangereux des trois personnes en présence. Je pensais qu’Otto était plus intelligent que ça. Je pensais qu’il savait qu’il n’est guère judicieux de jouer avcec mes nerfs. Ma mâchoire se contracte, mon sourire s’efface petit à petit, mais je reste de marbre. Contrairement à la plupart des pseudo mâles alpha du Club, je suis trop intelligente pour me laisser guider par mes émotions. « Tu prononces son prénom encore une fois… » - « Si j’étais toi Otto, j’éviterais de terminer cette phrase. » Mon ton est ferme, froid, tranchant. « T’as pas envie d’émettre des menaces à mon encontre. » Pas parce que le gronderait. Mais parce qu’il y a des choses que je ne peux tolérer, pas alors qu’il y a une hiérarchie faite pour être respectée. Parce que si l’envie me prend, je peux m’arranger pour qu’il perde l’usage de sa langue ou de ma mâchoire.

« Je te fais rentrer et c’est un whisky qu’on va boire, pas un café. » Le regard qu’il jette à mon ventre me paraît presque teinté de dédain et si je ne relève pas, je note, j’ajoute à sa liste de fautes. Je ne me formalise pas parce que je me suis préparée à l’éventualité que ma grossesse et mon nouveau statut de mère rappelle aux plus mysogine du Club que je suis une femme. Que j’ai prévu de monter à quiconque me pensant faible que je ne me suis pas attendrie. « T’auras pas à faire semblant cette fois. » - « Si t’as autre chose que du scotch premier prix à me proposer. Tu empestes l’alcool bon marché. » Un signe du regard, et mon garde du corps recule de quelques pas. Moi, j’entre à l’intérieur de l’appartement sans crainte pour ma sécurité. Otto est peut-être suicidaire, mais pas au point de s’en prendre à moi. Pas alors qu’il sait que les représailles seront mortelles aussi bien pour lui que pour ce qu’il reste de sa famille. « Tu me veux quoi, Raelyn ? » Je laisse échapper un rire bref et sarcastique, avant de faire quelques pas à l’intérieur. « Pour que tu viennes jusqu’ici. Comment t’as eu l’adresse, d’ailleurs ? » - « Y’a pas grand chose que j’ignore. » Ou plutôt, pas beaucoup d’informations que je ne peux me débrouiller pour trouver. « T’as du culot, pour un type qui s’est évaporé dans la nature sans préavis. » Autrement dit, un type qu’il pense qu’il peut s’éloigner du Club et me tourner le dos sans explication ou autorisation. « T’as essayé de tuer un type. Tu t’es manqué. T’as pris la fuite parce que tu t’es pissé dessus à l’idée que les flics te traquent. Je te facilites le boulot là, comme ça t’as pas à me répéter des choses que je sais déjà. » J’énumère les prouesses du blond comme on récite une liste de courses. « Comme ça on peut passer directement à la partie ou je te demande ce qui s’est passé dans ton esprit de dégénéré pour que tu mette sur pied un plan aussi débile. Et surtout à la partie où je te demande dans quel monde tu vis pour penser que tu avais le droit de me cacher tout ça. » Le plan débile en question. A quel moment a-t-il oublié qu’il me doit de répondre de ses actes ? Que je suis sa boss ?

« Qu’est ce que je fous là ? » La question était pourtant simple, non ? Fallait-il qu’il vienne répéter ses mots ou allait-elle réussir à les comprendre seule ? La maternité l’avait-elle ramolli au point de ne plus savoir parler un anglais pourtant simple ? Il n’était pas à l’aise avec la présence de Raelyn chez lui aujourd’hui, Otto, et il ne ferait rien pour venir prétendre le contraire. Il savait qu’en agissant de la sorte, il jouait avec le feu mais il ne saurait faire autrement présentement. Ce n’était pas par manque de respect de la hiérarchie ou quelconque connerie que Raelyn pourrait venir mettre en avant en cet instant - son chien de garde, lui, grognant à peine une seconde après été vexé par les paroles de l’italien -, c’était simplement qu’il ne connaissait pas meilleure défense que l’attaque. Et que, dans son monde, mordre en premier était gage de mieux s’en sortir par la suite. Il avait définitivement besoin de mieux s’en sortir, Otto. Il avait définitivement besoin de Raelyn pour que cette envie de réalisé mais pour le moment, alors qu’elle venait menacer sa femme sous son propre toit, Otto ne pouvait pas s’apercevoir à quel point il avait besoin d’elle, à quel point il allait devoir apprendre de nouveau à serrer les mâchoires et à se faire petit. En cet instant, il avait beau s’agir de sa patronne, il avait envie de lui exploser le crâne contre l’encadrement de la porte - Callum à peine le dos tourné ou non. « Si j’étais toi Otto, j’éviterais de terminer cette phrase. » Oh, il ne la terminerait pas; il n’avait pas besoin d'agir de la sorte pour qu’ils soient parfaitement au courant de quoi l’autre parlait exactement. Si la moindre chose se mettait à aller se travers, aucun des deux ne reverrait la lumière du jour. « T’as pas envie d’émettre des menaces à mon encontre. » Toi non plus que son regard venait crier à la blonde, alors que ses mâchoires serrées ne lui permettaient pas de sortir le moindre son.

Alors, il vint contre son envie plier l’échine. Il acceptait de la faire entrer chez lui, au plus proche de ce qu’on pourrait appeler son intimité, là où il n’aurait jamais pensé la voir ne serait-ce qu’une seule fois pointer son nez en ces lieux. « Si t’as autre chose que du scotch premier prix à me proposer. Tu empestes l’alcool bon marché. » Va te faire foutre vint se déguiser en une porte ouverte et un Otto qui tournait les talons en direction du salon. Il empestait l’alcool bon marche parce-que lorsque vous vidiez plusieurs bouteilles à la semaine, voire même à la journée selon les moments traversés, vous n’aviez plus besoin d’avoir la qualité du breuvage - seulement l’ivresse. « Je garde les bonnes bouteilles pour les invités. » Qu’ils le soient ou non, d’ailleurs, invités; Otto n’avait jamais tenu à ce que la Blackwell se retrouve chez lui et pourtant, il s’en allait lui servir un verre comme si de rien n’était. « Les clopes sont sur la table basse. » La sienne était déjà coincée entre ses lèvres, alors que ses mains tremblantes trahissaient le manque d’une demi-douzaine de substances tout autant qu’un trop plein de stress et d’amertume en lui. « Y’a pas grand chose que j’ignore. » Pourquoi avait-il, à entendre ces mots, ce mauvais pressentiment qui filait dans ses veines ? Pourquoi n’aimait-il pas, avant même qu’elle ne vienne continuer son histoire, la façon dont le ton de Raelyn ne venait rien annoncer de bon ? Pas seulement au sujet de l’adresse de l’italien - il n’était pas ravi qu’elle la connaisse, mais il s’en remettrait. Non, cela allait bien au delà de ça.

« T’as du culot, pour un type qui s’est évaporé dans la nature sans préavis. » Le goulot de la bouteille vint entrer en contact un peu trop rapidement avec le verre en dessous, à deux doigts de briser ce dernier. Il dut venir fermer les yeux un instant pour tenter de calmer les tremblements - il n’était pas faible, et il ne voulait pas que Raelyn vienne penser quelque chose de cet ordre là en voyant son physique défaillir de la sorte. Il n’était pas faible, et il n’avait aucune raison de venir courber l’échine plus que de raison face à elle. Alors, pourquoi avait-il envie de sortir les crocs avant même qu’elle ait annoncé ce qu’elle avait derrière la tête ? « J’étais pressé. » Et il n’aurait de toutes façons pas pris le temps de venir faire le tour de son répertoire; il avait d’autres chats à fouetter que de savoir si Raelyn était contente ou non d’avoir été prévenue de son échappée dans la nature. Il fallait qu’il vienne palier au goût de sang et de rouille qui se répandait dans sa bouche, que même la cigarette n’arrivait pas à faire passer en cet instant. « T’as essayé de tuer un type. Tu t’es manqué. T’as pris la fuite parce que tu t’es pissé dessus à l’idée que les flics te traquent. Je te facilites le boulot là, comme ça t’as pas à me répéter des choses que je sais déjà. Comme ça on peut passer directement à la partie ou je te demande ce qui s’est passé dans ton esprit de dégénéré pour que tu mette sur pied un plan aussi débile. Et surtout à la partie où je te demande dans quel monde tu vis pour penser que tu avais le droit de me cacher tout ça. » - « Je me suis pas manqué. » Aussi étonnant que cela puisse paraître, ses mains avaient arrêté de trembler à l’instant où Raelyn était venue prononcer ce mensonge. « Tes informations sont pas bonnes. » Parce-qu’il n’avait aucune raison de venir croire la blonde, Otto, voyons. Orso lui-même, rien que par son regard, lui avait confirmé que Auden avait rendu son dernier souffle. Pas vrai ?

Pas vrai, hein ? Orso ne serait pas venu lui mentir, voyons. Il n’avait aucune raison de le faire, il était venu le libérer et lui offrir une vie meilleure, il ne pourrait lui mentir en retour. « D’où tu tiens tes informations ? » La voix d’Otto était différente, désormais. Toujours teintée de cette colère qui ne le quittait jamais vraiment, mais d’une hésitation supplémentaire qu’il viendrait nier si on lui pointait du doigt. Les informations de Raelyn étaient forcément fausses, il n’y avait pas d’autre version de cette histoire. Le regard qu’il portait désormais sur la jeune femme, alors qu’il se retournait tenant dans ses mains leurs deux verres plein, était lui également différent. De ceux qu’il portait trop souvent, désormais, quand cela venait toucher à Ordo de trop près. « Pourquoi ça t’intéresse ? » Il avait déjà oublié toute la parité à propos du Club qu’elle était déjà venue lui exposer, car pour lui là se trouvaient deux choses distinctes: il n’aurait jamais été assez négligeant pour que la moindre trace remonte jusque l’organisation que gérait Raelyn.

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Otto ne termine pas sa phrase et c’est tout à son honneur : cet idiot sait au moins quand il est préférable de se taire après avoir failli dépasser la ligne. Sa femme ne court pas le moindre danger, la seule chose dont je le menaçais, c’est de déballer la vérité devant elle. En revanche, s’il me provoquait ou se permettait de me menacer ouvertement, il aurait du souci à se faire aussi bien pour lui que pour Serena. En plus de répondre directement à moi, Otto a besoin de mon aide, s’il espère s’en tirer. Les forces de l’ordre ne sont peut-être plus à sa recherche - pas activement en tout cas - mais s’il a la moindre chance de se tirer du mauvais pas dans lequel il s’est mis comme un grand, c’est grâce à mes connexions et mon influence. Au moins, il le réalise avant de dépasser les bornes. « Je garde les bonnes bouteilles pour les invités. » - « Une bonne bouteille alors ce sera. » Parce que je ne boirais rien de moins que ça. « Les clopes sont sur la table basse. » Je hoche la tête, avant d’attraper le paquet en question, de sortir mon propre briquet de ma poche et d’allumer une cigarette, avant de m’installer sur le canapé du salon, en plein milieu. Dans ma propre histoire, je n’ai jamais considéré être autre chose que le personnage principal.

« J’étais pressé. » - « T’avais surtout la frousse. » Tirer une balle ou vider un chargeur sur un type désarmé ne demande aucune forme de courage : que de la bêtise. Assumer ses conneries en revanche, ça demande d’en avoir dans le pantalon. « Je me suis pas manqué. Tes informations sont pas bonnes. » Se pourrait-il qu’il l’ignore ? Un sourire amusé se dessine sur mes lèvres puisque je me trouve dans le genre de situation que j’aime tout particulièrement : celles où je détiens en ma possession des informations que l’autre n’a pas. Celles où, par définition, je possède donc l’ascendant. Je porte ma cigarette à mes lèvres, avant de recracher ma fumée et de croiser mon bras droit sous le gauche, le dos confortablement appuyé contre le dossier du sofa. « T’es prêt à miser combien là-dessus ? » Intérieurement, je jubile. « D’où tu tiens tes informations ? » - « Je te répondrais bien que j’ai graissé la patte d’un homme politique influent et haut placé mais… Tous les journaux ont parlé de ta tentative de meutre. » Et surtout, du miracle de la survie de sa cible. « Williams se porte comme un charme, de ce que j’ai pu lire. Les médecins sont confiants, il se remettra complètement. » Je cite mot pour mot l’article qu’on a déposé sur mon bureau, il y une semaine ou deux. « Putain me dit pas que tu t’es même pas assuré d’avoir terminé correctement le travail.  » Quitte à se prendre pour un putain de tueur à gage, il aurait au moins pu faire preuve de professionnalisme.

« Pourquoi ça t’intéresse ? » - « Pourquoi ça m’intéresse ? » Ma cigarette presque terminée, je l’écrase dans le cendrier avant d’attraper le verre qu’il m’a servi dans ma main, et d’appuyer à nouveau mon dos contre le dossier de mon assise. « Parce que jusqu’à preuve du contraire, tu bosses pour moi, Otto. » Et qu’il ne lui revient pas de décider de rompre cet engagement. « Et que j’aime pas trop ça, les déserteurs. » Je ne suis pas paranoïaque comme l’était Mitchell, mais je ne suis pas idiote non plus : je n’ai pas l’intention d’envoyer à quiconque le message que l’on entre et sort du Club comme dans un moulin. « Et je suis pas une grande fan des flics. Et je les aimerai encore moins lorsqu'ils viendront à l’Octopus poser des question sur une de nos employés. » Puisque, officiellement, Otto est un salarié du casino. « Alors je vais te reposer la question que je t’ai posée en octobre. Et cette fois, tu vas pas te foutre de ma gueule. » Je ne le tolèrerai pas. « Saül Williams, tu le connais ? » Et s’il me fait encore un remake de j’aime bien sa collaboratrice et je cherche à l’impressionner, je jure que je lui refais le portrait comme il l’a fait avec Spencer.

Ce n’était pas comme ça qu’il aurait voulu venir réagir - ce n’était jamais de la sorte qu’il aurait préféré avoir à agir face à Raelyn. Mais même en étant le roi des abrutis, il finissait toujours par se rappeler de quelque-chose Otto: qu’importe ce qu’il pourrait faire, pourrait dire et penser, la blonde avait le dessus sur lui; et pour bien des raisons différentes dont aucune ne lui plaisait réellement. S’il était devenu celui qu’il était désormais, c’était en grande partie grâce à - et à cause de - Raelyn Blackwell, même s’il ne l’avouerait jamais à haute voix. Alors, quand elle lui intimait de venir courber l’échine, même si ce n’était en rien son comportement naturel à l’italien et qu’il aurait préféré l’envoyer voir ailleurs s’il s’y trouvait, il vint lui obéir. En serrant les mâchoires, en restant sur la défensive, mais il finit par lui indiquer d’entrer dans l’appartement. « Une bonne bouteille alors ce sera. » Qu’elle en profite - ce n’était pas tous les jours qu’il allait lui offrir quelque-chose de qualité de sa propre réserve, car c’était surement la dernière fois que la Blackwell mettait les pieds chez lui. Il n’aimait pas sa présence en ces lieux, et ne comptait pas venir faire en sorte que l’expérience puisse se reproduire. Qu’elle profite de pouvoir se mettre à l’aise, de fumer ses clopes et de boire son whisky: cela ne se reproduirait pas de si tôt.

« T’avais surtout la frousse. » Alors qu’il se dirigeait vers le buffet du salon, Otto vint secouer la tête. Il n’avait pas eu la frousse, pas à un seul moment, alors qu’il se tenait face à cet putain d’enculé de Modesto. Il n’avait pas eu un seul moment d’hésitation, de regret ou quoi que ce soit: ce qu’il avait fait n’était que justesse et remise en ordre du naturel des choses de la vie. Le monde se portait mieux sans la présence de cet imposteur et il n’était pas possible que les paroles de la jeune femme sur son canapé soient tirées d’une quelconque vérité. Car, si ce soir là, quelques semaines plus tôt, il n’avait eu aucune once de regret ou d’hésitation, aujourd’hui la donne était différente. « T’es prêt à miser combien là-dessus ? » Ses mâchoires vinrent se contracter davantage, ses yeux vinrent se parer d’un voile qu’il ne pouvait voir mais qu’il n’aimait guère. Elle ne pouvait avoir raison, elle venait transformer la réalité afin de le remettre dans sa poche, afin de le faire obtempérer. Il avait agi comme ça pendant des années, parce-que cela lui importait réellement peu que de venir faire le sale boulot - du moment qu’il pouvait garder la tête hors de l’eau et se procurer les produits illicites qui lui permettaient de rester en vie selon ses dires. Aujourd’hui, c’était bien différent: elle venait apporter une version des faits qui ne lui plaisait en rien et qu’il ne pouvait faire autrement que contester. « Je te répondrais bien que j’ai graissé la patte d’un homme politique influent et haut placé mais… Tous les journaux ont parlé de ta tentative de meutre. » - « Impossible. » - « Williams se porte comme un charme, de ce que j’ai pu lire. Les médecins sont confiants, il se remettra complètement. » Otto vint secouer la tête, déposant les verres sur la table du salon, venant attraper son paquet de cigarettes. « Impossible. » Qu’il vint répéter. Il avait suivi l’actualité, jamais son nom n’était ressorti car Orso n’aurait pu dénoncer son frère, son sang; ce n’était pas à l’ordre du jour. Il pouvait venir faire bien des choses, mais le jeter sous les roues du train, il ne ferait pas ça a sa famille tout de même. « Impossible. » Venait-il parler à lui-même ou adressait-il toujours la parole à Raelyn ? « Putain me dit pas que tu t’es même pas assuré d’avoir terminé correctement le travail. » Les yeux de l’italien vinrent se plonger dans ceux de la blonde, avec une détermination qu’il était pourtant sur le point de perdre. « Je suis pas un demeuré. » Il était persuadé que l’autre avait rendu son dernier souffle lorsqu’il avait dû le laisser sur la terre à vignes. Auden n’était plus, ce n’était pas possible qu’il ait miraculeusement survécu. Il avait pas d’assez bons anges gardiens pour que cela arrive, et le karma n’était pas de son côté non plus.

Otto était persuadé qu’elle mentait, qu’elle tentait de lui retourner le cerveau, de lui embrouiller l’esprit. Il ne saisissait pas dans quel but Raelyn venait agir de la sorte - n’avait-il pas été, à l’instar de Callum qui attendait en bas de l’immeuble, obéissant aux dires - ordres - de la jeune femme, et ce pendant des années ? « Pourquoi ça m’intéresse ? » Que pouvait-elle bien avoir à faire des activités extra-scolaires d’Otto, après tout ? « Parce que jusqu’à preuve du contraire, tu bosses pour moi, Otto. Et que j’aime pas trop ça, les déserteurs. » Il vint grogner - réellement. Il n’était pas déserteur, il était venu protéger ses arrières pendant un temps pour des raisons qui, si elle était réellement au courant de la situation, devaient désormais paraître évidentes aux yeux de la Blackwell. « Et je suis pas une grande fan des flics. Surtout s’ils viennent à l’Octopus poser des questions sur une de nos employés. » - « Ils viendront pas. » Ils n’avaient pas son nom et ne l’auraient pas, car Orso ne laisserait pas une telle chose arriver; il était confiant au moins sur ce point là, Otto - ils étaient du même sang, après tout; et puis il avait longtemps observé son frère agir pour les gens de sa soi-disant famille: il ne le trahirait pas. « Alors je vais te reposer la question que je t’ai posée en octobre. Et cette fois, tu vas pas te foutre de ma gueule.  Saül Williams, tu le connais ? » Un instant, et puis un second par la suite, Otto vint rester silencieux. Il vint même se contenter de regarder Raelyn d’un regard de plomb, devant réellement se retenir de ne pas lui faire physiquement comprendre que ce n’étaient pas ses affaires.

Cependant, une partie d’elle avait raison - et c’était ce qui énervait le plus l’italien en cet instant: il bossait pour elle et s’il avait pu assouvir cette vengeance, c’était en partie grâce à elle et au geste de bonté qu’elle avait eu de le garder sous ses ordres. Otto avait malheureusement, en parallèle, compris que Saül Williams - comme il se faisait rappeler, reniant ses origines - était un proche du couple Blackwell-Taylor et que ce n’était pas à son avantage de venir cracher sur son frère devant elle. Avait-il le choix, désormais ? Il n’était pas idiot à ce point là: la menace portée vers Serena n’était peut-être pas à effective en direct, mais pourrait le devenir sans réellement de soucis. C’était pour elle qu’il s’inquiétait en cet instant - Raelyn tenait parole, et venir s’en prendre à une autre femme si cela lui permettait de maintenir les rangs soudés faisait partie de son répertoire. Alors, après de longues minutes de silence qu’il aurait préféré ne pas prendre, Otto vint soupirer - signe qu’il baissait sa garde, qu’il venait au minimum courber l’échine devant la jeune femme. Une fois n’était pas coutume, elle avait gagné. Le verre de whisky qu’il tenait en main vint se retrouver propulsé contre le sol avec une violence qui était au répertoire de l’italien également. « C’est mon frère. » Que dire de plus, en réalité ? Là était la vérité, aussi simple qu’elle pouvait être exprimée. « Et l’autre putain de raclure même pas capable de crever correctement… il est rien pour lui. Rien. » Parce-que même s’il ne voulait pas céder, s’il ne voulait pas laisser le doute s’infiltrer, c’était désormais chose faite: Otto doutait de sa propre réalité et se demandait désormais si celle exposée par Raelyn n’était pas celle à croire à partir de maintenant. Si c’était le cas, il y avait quelqu’un avec qui une petite discussion allait de nouveau rapidement s’imposer. « Je vais pas laisser mon frère continuer d’être aux côtés d’un connard de son espèce. » Disait-il, alors qu’il était celui ayant appuyé sur la gâchette.

The Suicide King
Raelyn Blackwell & @Otto Lazzari

Il est rare que je m’entoure d’imbéciles et ce n’est pas ce qu’il était, Otto, lorsqu’il a rejoint les rangs du Club. Certes, il m’a toujours semblé appartenir à un monde qui lui est propre, mais il avait la tête sur les épaules, de l’assurance et une volonté de fer. Qu’est-ce qui a changé ? Qu’est-ce qui l’a poussé à perdre les pédales de la sorte ? Parce que c’est ce qu’il fait, c’est indéniable, je le constate sans l’ombre d’un doute alors qu’il répète déjà pour la troisième fois. « Impossible. » Assise sur son sofa, j’esquisse un sourire suffisant, avant de porter ma cigarette à mes lèvres et de recracher ma fumée sans me soucier de donner une odeur dégueulasse à son appartement. « Tu te planquais où ? Sur une autre planète ? Non parce qu’il suffisait vraiment que tu lises un journal. » Et il aurait su. Galvanisée par sa détresse - j’ai toujours apprécié être à l’origine de ce genre de sentiment, je glisse mes doigts sur mon téléphone taper le nom du peintre. Les articles relatant l’histoire sont nombreux : le public adore se repaître de ce genre de drame digne d’une telenovela. Lorsque je tombe sur le passage qui m’intéresse, celui qui précise que sa victime est à l’hôpital mais que ses jours ne sont plus comptés, je tends mon portable à l’italien. « Tiens. C’est écrit là, si tu ne me crois pas. » Je lui laisse le temps de lire, en silence, et en trempant mes lèvres dans le verre qu’il m’a servi. « Je suis pas un demeuré. » - « T’es pas non plus Al Capone, les faits parlent d’eux même. » Otto est tout sauf un génie du crime, et je me demande s’il a agi sur un coup de tête ou s’il a vraiment préparé le plan le plus foireux du monde. « Ils viendront pas. » Ils n’ont pas de piste pour l’instant, certes. Mais je n’ai jamais été une grande optimiste. « Le risque, quand la victime survit, c’est qu’elle finisse par parler. Mais je t’apprends rien. » Il risque moins pour tentative de meurtre que pour meutre au premier degré, mais les chances de se faire passer ont augmenté de façon exponentielle le jour où Auden Williams s’est réveillé dans son lit d’hôpital.

Et là, de la façon la plus théâtrale possible, le cambrioleur trouve enfin le courage de me dire la vérité, et le peu que l’on puisse dire c’est que je ne m’y attendais pas, à celle-là. « C’est mon frère. » Je fronce les sourcils, sans trop savoir si je dois rire, me foutre de sa gueule, ou demander où est la caméra. « Et l’autre putain de raclure même pas capable de crever correctement… il est rien pour lui. Rien. » Il a tenté d’assassiner un homme parce qu’il considère quoi, qu’il a pris sa place ? La vérité, c’est que je me fous bien de leurs affaires de famille, ce que je veux comprendre, c’est si cette merde va devenir un problème pour moi. « Je vais pas laisser mon frère continuer d’être aux côtés d’un connard de son espèce. » - « Si c’est ça, t’aurais mieux fait de mieux viser. Paraît que ça rapproche, une tentative de meutre. » Je n’y connaîs rien après tout, mais lorsqu’on survit à une balle dans la poitrine, ça doit remettre tout un tas de choses en perspective. Avoir peur de perdre son frère aussi, soit dit en passant. « Les flics ont pas de piste, pour l’instant. » L’homme d’affaires sait-il qui a fait ça à son frère ? « C’est parce que ton frère sait pas que c’est toi, ou parce qu’il a décidé de venir te régler ton compte lui-même ? » Pourquoi prendre un abonnement Netflix avec un type comme Otto dans les parages ?

« C’est drôle tu sais, toute cette histoire, très drôle. » Et surtout, ça me permet de faire le lien avec la seconde raison derrière cette petite visite surprise. « Ces histoires de famille, je veux dire. Tu ébranles la tienne, je retrouve la mienne. » Sous la forme d’une petite blonde, d’une petite junkie qui vient traîner des mes pattes. « Tu te souviens de cette gamine que t’as impliquée dans ton enquête de débutant, et à qui t’as refait le portrait ? » Il l’a bien amochée, elle était terrorisée et elle était incapable de le cacher. « Tu l’as bien amochée. » Je porte ma cigarette à mes lèvres pour aspirer de l’air, et le recracher en entrouvrant à peine mes lèvres. « ”Qu’est ce que ça peut bien te foutre ?”, tu vas me dire. Et dans la plupart des cas, la question serait légitime. » Parce que je ne suis pas une justicière. « Mais là, dans le cas présent, j’en ai quelque chose à foutre. Parce que cette gamine, c’est ma petite sœur. » Si d’aventure son visage devait se décomposer, je m’en délecterais. « Tu comprends un peu mieux à quel point t’es dans la merde ? »

« Tu te planquais où ? Sur une autre planète ? Non parce qu’il suffisait vraiment que tu lises un journal. » Pourtant, des journaux, Otto en avait ouvert plus d’un pendant qu’il évitait soigneusement de revenir en ville - mais son regard venait plutôt tenter d’attirer les titres qui viendraient parler de lui, était-ce donc possible qu’il volontairement évité ceux qui mentionnaient qu’Auden était toujours en vie ? Il n’avait même pas pensé l’espace d’un instant, en réalité, que les choses pouvaient se passer de la sorte. Dans son esprit, il avait réduit Modesto au silence et l’histoire s’arrêtait là - et c’était là la raison pour laquelle il cachait son visage au reste du monde, car la disparition du peintre était clairement sa faute. Mais s’il avait su plus tôt que rien ne s’était déroulé comme dans le plan original, il aurait sûrement agi autrement. Il l’avait vu pousser son dernier souffle, Auden ne devait sa présence aujourd'hui dans le royaume des vivants qu’à un miracle. Il n’était pas idiot de la sorte, Otto, il s’était assuré que tout était en ordre avant de déserté la scène de crime. Et pourtant… « Tiens. C’est écrit là, si tu ne me crois pas. T’es pas non plus Al Capone, les faits parlent d’eux même. » Raelyn vint lui glisser son téléphone entre les mains, l’article déjà ouvert et prêt à être lu sur l’écran. Et effectivement, il devait l’avouer - à défaut de le faire à haute voix, au moins constater - que la blonde avait raison: les articles relataient bien le fait que le Williams s’en était sorti de justesse et qu’il était extrêmement chanceux. Et si ce n’était pas le téléphone de la jeune femme qu’il tenait dans la main, et qu’il n’avait pas peur des représailles que cela pourrait avoir, il serait venu exploser l’appareil de colère contre le premier mur à sa disposition. Putain de fils de pute.

« Le risque, quand la victime survit, c’est qu’elle finisse par parler. Mais je t’apprends rien. » - « Ils viendront pas je te dis. » Les flics. S’ils en étaient venus à chercher Otto, ils ne seraient tout de même pas remonté jusque Raelyn et surtout jusqu’au Club - il n’aurait jamais vendu la mèche de la sorte. Et puis de toutes façons, ce n’était même pas une question qui se posait. Si les flics avaient été mis au courant de qui était derrière le coup, Otto aurait déjà entendu parler d’eux. Conclusion: ni Auden, ni Saül n’en étaient venus à parler de lui aux forces de l’ordre. Concernant le second, cela vint quelque peu soulager l’italien. Lui qui était venu agir de la sorte pour son frère se serait senti trahi de savoir qu’il aurait responsable de son enfermement. Concernant Auden, en revanche… Otto devait avouer être étonné. Il n’avait, de son côté, aucune excuse pour ne pas le pousser derrière les barreaux. Ils les avaient toutes même, et bien plus encore - alors pourquoi personne n’était à sa recherche ? Les doutes qui l’animaient envers Modesto - encore, toujours le même, il ne le lâcherait donc jamais -, Raelyn n’avait pas besoin de les connaître; il venait de lui assurer d’une voix ferme qu’il n’y avait aucune raison de penser que la police viendrait jusque lui, jusque elle. En revanche, cette fois-ci il ne pouvait se défiler quant au réel rôle de Saül dans sa vie. L’italien ne savait d’ailleurs pas si cela était agréable ou cela lui faisait mal de venir expliquer cela à sa patronne. Que pouvait-elle en avoir à faire, en réalité, de qui se trouait être les deux hommes, l’un par rapport à l’autre ? « Si c’est ça, t’aurais mieux fait de mieux viser. Paraît que ça rapproche, une tentative de meutre. » Otto vint grogner - littéralement - un instant. Ce n’était pas là le type de paroles qu’il avait réellement envie d’entendre. « Les flics ont pas de piste, pour l’instant. C’est parce que ton frère sait pas que c’est toi, ou parce qu’il a décidé de venir te régler ton compte lui-même ? » - « Il sait que c’est moi. Et il a pas décidé de me régler mon compte. » Ou plutôt, il n’en avait pas réellement eu l’occasion, Otto étant venu le voir après l’incident alors qu’il avait Abel dans les bras, qu’il était sûrement encore sous le choc, le sang imbibé d’alcool et d’autres substances à ne pas en douter. Et puis, l’instant d’après, le plus jeune des deux Lazzari avait disparu des radars - ça ne laissait pas une très grande fenêtre de tir, pas tant façon de parler.

« C’est drôle tu sais, toute cette histoire, très drôle. » Il n’y avait qu’à voir l’expression sur le visage d’Otto: effectivement, il s’amusait comme un petit fou. Était-ce sa deuxième, ou sa troisième cigarette depuis que Raelyn était arrivée chez lui ? Personne ne saurait jamais. C’était son deuxième verre en revanche - il n’avait plus l’habitude de boire de l’alcool de bonne qualité, pourtant cela était agréable. « Ces histoires de famille, je veux dire. Tu ébranles la tienne, je retrouve la mienne. » Il vint froncer les sourcils. « Je dois faire semblant d’être ému et d’en avoir quelque-chose à foutre ? » Surtout qu’il n’avait pas ébranlé la sienne, il avait tenté de la réparer - c’était la présence d’Auden qui venait ébranler un équilibre qui se voyait pourtant naturel d’origine. « Tu te souviens de cette gamine que t’as impliquée dans ton enquête de débutant, et à qui t’as refait le portrait ? Tu l’as bien amochée. » Oh, pas que la mémoire de l’italien lui faisait défaut - bien au contraire, il voyait très bien de qui Raelyn voulait parler. Cependant, il ne voulait pas faire de conclusions trop hâtives, de connexions si elles n’étaient pas nécessaires, et préférait laisser la blonde lui apporter les éléments qu’il pouvait mettre en avant sur un plateau. Si bien qu’il vint se contenter, pour une fois, de se la fermer et de tirer de nouveau sur sa cigarette, de venir boire une énième gorgée de liquide ambré. « "Qu’est ce que ça peut bien te foutre ?”, tu vas me dire. Et dans la plupart des cas, la question serait légitime. » D’avance, il savait qu’il aimerait pas là où la conversion s’en allait. « Mais là, dans le cas présent, j’en ai quelque chose à foutre. Parce que cette gamine, c’est ma petite sœur. Tu comprends un peu mieux à quel point t’es dans la merde ? »

Et alors, Otto le premier en vint à être surpris, ce fut un rire sorti du tréfonds des enfers qui vint se faire entendre du côté Lazzari. S’il y avait bien une situation qu’il n’avait pas vu venir et dont il se serait également bien passé, c’était celle là. Mais c’était tout de même cocasse il fallait l’avouer: quelles étaient les chances qu’une vermine dans le genre de JJ soit en réalité une Blackwell ? S’il avait su observer les détails, peut-être que cela aurait moins été une surprise: elles étaient insupportables toutes les deux, ça aurait du lui mettre la puce à l’oreille. « C’est marrant, tu trouves pas ? Mes affaires de famille viennent te casser les couilles, et les tiennes les miennes. » Elle allait le faire exécuter a peine sorti de l’appartement, mais tant pis. « Ta sœur, hein ? Et tu viens ici pour la défendre du coup ? » En même temps, il lui fallait un coup de main à l’autre salope, elle n’était pas capable d’agir seule sans se prendre des coups mérités. « Tu sais pourquoi elle s’est pris des coups comme ça ? Parce-qu’elle me doit trente mille, Raelyn. Elle me doit des putains de thunes et en plus elle me prend pour un con. Je supporte pas les gens de son espèce. » La faute à l’alcool, la drogue et la colère toutes les trois mélangées - s’il n’était pas sous l’emprise des trois en même temps, peut-être qu’Otto aurai réfléchi à deux fois avant de venir répondre à Raelyn.

The Suicide King
Raelyn Blackwell & @Otto Lazzari

« Ils viendront pas je te dis. » - « Que ce soit clair : je te tiendrai pour responsable s’ils le font. » Et il sait ce que cela signifie : nous aurons dans ce cas des comptes à régler, lui et moi. Peut-être a-t-il raison, peut-être s’en sortira-t-il sans être inquiété (par chance, pas grâce à son talent ou sa préparation) mais, le cas contraire et si le scandale devait éclabousser l’Octopus ou, pire, révéler le lien entre ce dernier et le Club, je serai intransigeante. « Et devenir mère m’a pas adoucie, au cas où tu serais en train de te poser la question. » J’ai toujours compartimenté et, concernant mon bébé, j’ai déjà commencé. Elle n’a rien à voir avec le Club et la mère que je suis avec elle n’a rien à voir avec la chef de file de l’organisation criminelle. Je peux lui régler son compte dans la soirée et rentrer chez moi câliner mon poupon quelques heures plus tard : ce n’est pas incompatible. « Il sait que c’est moi. Et il a pas décidé de me régler mon compte. » - « Et t’es certain qu’il le fera jamais ? Qu’il te balancera pas ? » Si j’étais lui, j’en douterais. Les liens du sang ne sont pas grand chose par rapport à quelqu’un avec lequel vous avez partagé toute votre vie et, si je connaîs pas le rapport qui entre Saül Williams et son frère, il y a fort à parier qu’entre Otto et le peintre, le choix soit vite fait.

Je n’aime pas interférer dans les affaires personnelles de mes troupes. Je considère que, pour apparaître comme un bon leadeur, je me dois de rester objective et de punir ce qui doit être puni, qui que soit le coupable. Sauf que j’ai du mal à croire que tabasser Spencer était la solution à ses problèmes. Au contraire, je sais que cela n’a rien résolu puisqu’elle n’a pas un sous, ma cadette. « Je dois faire semblant d’être ému et d’en avoir quelque-chose à foutre ? » - « Tu dois m’écouter jusqu’au bout. J’aime pas qu’on m’interrompe. » Surtout pas quand je prépare le terrain pour une telle révélation. Ce que je veux, c’est voir son visage se décomposer quand il comprendra qu’il a merdé : ça m’amusera, sans l’ombre d’un doute. « C’est marrant, tu trouves pas ? Mes affaires de famille viennent te casser les couilles, et les tiennes les miennes. » - « Je suis pliée en deux. » Ou plutôt, complètement stoïque. La différence, c’est que dans les deux cas, c’est lui le fautif. Il a été assez idiot pour prêter de l’argent à une gamine sans le sous et assez con pour l’impliquer dans sa vendette. « Ta sœur, hein ? Et tu viens ici pour la défendre du coup ? » Pas tout à fait. Mais puisqu’il semble vouloir poursuivre, je l’obserce en silence, impassible. « Tu sais pourquoi elle s’est pris des coups comme ça ? Parce-qu’elle me doit trente mille, Raelyn. Elle me doit des putains de thunes et en plus elle me prend pour un con. Je supporte pas les gens de son espèce. » - « Fais attention à ce que tu dis Otto. Tu sais rien des gens de son espèce. » Ce qu’il ignore surtout, c’est que j’ai moi-même appartenu à cette espèce. « Elle te prend pour un con ? Mais parce que tu l’es. T’as prêté trente mille dollars à une gamine toxicomane en espérant qu’elle ait de quoi te rembourser ? » Avec ou sans bonne volonté, Spencer ne peut pas réunir une telle somme. « T’aurais pu la cogner jusqu’à ce qu’elle se vide de son sang sur le trottoir que ça aurait rien changé, elle a pas cet argent. » Et moi, je déteste la sienne d’espèce. Les gorilles qui pensent que quelques coups bien placés peuvent tout résoudre. « Et non, je suis pas là pour plaider sa cause. » J’ai déjà dit à la gamine ce que je pensais de la façon dont elle s’est conduite. « Je suis là pour régler sa dette. » De mon sac, je sors une épaisse enveloppe qui contient la somme en grosse coupure. Il n’osera pas me faire l’affront de recompter, je crois. « A partir de maintenant, tu fous la paix à la gamine. Je veux même pas un regard dans sa direction. » Puisqu’il découvrira assez tôt qu’elle bosse à présent à l’Octopus depuis décembre. « Et puisque t’es persuadé que les flics te cherchent pas, tu te remets au boulot. Je pense que tu seras d’accord pour dire que t’as grillé ton stock de congés sabbatiques pour les trois prochaines années. » J’écrase ma cigarette dans le cendrier, avant de relever mon regard dans sa direction. « T’as compris ? Plus un regard. »

« Que ce soit clair : je te tiendrai pour responsable s’ils le font. »  Elle pouvait venir le tenir pour responsable si cela lui chantait, il n’en avait que faire en réalité: il savait que les forces de l’ordre ne viendraient pas déranger la jeune femme - et ce même s’il ne pouvait fournir aucune preuve comme quoi une telle chose n’allait en rien arriver, il en était persuadé d’une façon inexplicable. Peut-être était-ce grâce à l’idée que son frère ne viendrait pas le dénoncer, qu’il arrivait à penser que personne ne pourrait le retrouver et faire le lien, venir pointer du doigt le fait qu’il était le responsable du massacre qui avait eu lieu pendant cette soirée de novembre. Ou peut-être était-ce le fait qu’il soit simplement trop satisfait de son acte pour se rendre compte que ce dernier pouvait avoir des conséquences aussi importante que le reste d’une vie passée derrière les barreaux d’une prison. « Et devenir mère m’a pas adoucie, au cas où tu serais en train de te poser la question. » Otto vint légèrement hausser les épaules. Bien sur que de devenir mère l’avait doucie - même si elle ne saurait s’en rendre compte. Ce n’était même pas de sa faute, à Raelyn, c’était une façon naturelle du corps de venir réagir. Il la croyait sur paroles lorsqu’elle disait qu’elle n’oublierait pas qui était le vrai responsable le moment venu, mais il ne saurait y mettre toute sa foi lorsqu’elle assurait haut et fort de la sorte que devenir mère ne changeait rien au tableau final. Cela changeait forcément quelque-chose. « Et t’es certain qu’il le fera jamais ? Qu’il te balancera pas ? » Là, le regarde l’italien vint se plonger, grave, dans celui de la blonde face à lui. Ses mâchoires s’étaient quelque peu resserrées, alors qu’ils parlaient désormais de Massimo en ôtant tous les voiles de pseudo-mystère qu’il s’était pourtant usé à mettre en place. « Il dira rien. » Comme il était persuadé que les flics ne pourraient le retrouver, il savait d’avance que Saül ne dirait rien. Appelez ça un instinct quelconque ou qu’importe, mais il ne saurait imaginer une situation où il en venait à être jeté en prison à cause de son propre frère. Pour lui, cela n’était pas chose envisageable. Alors, bien sur que non, il ne viendrait pas dévoiler le moindre détail gênant sur les circonstances de cet accident. Qu’importe ce que Raelyn pourrait venir lui pointer du doigt, il camperait sur ses positions.

« Tu dois m’écouter jusqu’au bout. J’aime pas qu’on m’interrompe. » Si cela n’avait pas été Blackwell face à lui, il serait venu en ajouter une couche en ajoutant un petit oui madame d’une voix fausse et faussée. Cependant, il n’était pas idiot au point de ne pas comprendre qu’il était déjà en train de marcher, tel un funambule, sur une corde raide et que s’il tentait de jouer de trop, il pourrait mal terminer ce soir - très mal terminer. Il se contenterait donc d’un commentaire ou deux, presque trois fois rien - jusqu’à temps que le sujet dont Raelyn voulait vraiment parler en mettant les pieds ici soit désormais face découverte. Otto s’attendait à tout, mais en rien à ce qu’elle vienne lui exposer une vérité qu’il aurait préféré éviter: la gamine n’était apparemment personne d’autre que sa soeur à elle. Le comble, dans tout ça ? C’était que cela donnait encore plus envie à l’italien de venir lui régler ses comptes davantage, en bonne et due forme, simplement pour montrer à Raelyn qu’il n’avait pas totalement viré arriéré et qu’il ne courberait pas l’échine au point de venir lécher le sol. Il savait quand il se devait être bon petit toutou bien élevé, mais les affaires qu’il devait régler entre JJ et lui ne regardaient pas Raelyn et il serait bon qu’elle reste en retrait de tout ça. « Fais attention à ce que tu dis Otto. Tu sais rien des gens de son espèce. » Ce fut un sourcil surpris qu’il vint hausser. S’il ne savait rien des gens de son espèce ? Oh, il parlait en connaissances de bien de causes, Otto, malheureusement pour Raelyn. « Elle te prend pour un con ? Mais parce que tu l’es. T’as prêté trente mille dollars à une gamine toxicomane en espérant qu’elle ait de quoi te rembourser ? T’aurais pu la cogner jusqu’à ce qu’elle se vide de son sang sur le trottoir que ça aurait rien changé, elle a pas cet argent. » - « C’était à elle de réfléchir aux conséquences de ses actes. » Parce-que dans cette situation, il n’y avait aucune issue où Otto était celui adoptant une attitude et un comportement qui n’était en rien adapté. « T’empruntes pas si tu sais pas comment rembourser. » Et il osait venir dire cela en regardant Raelyn dans les yeux. Car si leurs chemins étaient venus à se croiser, c’était parce-qu’il avait agi exactement de la même façon que la gamine - mais il était venu se plier à une solution alternative afin de rembourser ses dettes auprès de Blackwell; la gamine, en revanche, ne semblait pas décidée à venir arranger quoi que ce soit dans l’histoire car elle attendait simplement que quelqu’un de plus fort qu’Otto vienne lui faire la peau pour ne plus avoir à croiser sa route. Pathétique.

« Et non, je suis pas là pour plaider sa cause. » Cette conversation ne cesserait donc jamais de venir surprendre Lazzari, qui pour la seconde fois, vint autant froncer les sourcils que les hausser sur son visage, ne sachant dans quelle direction Raelyn avait décidé de mener cette conversation. « Je suis là pour régler sa dette. » - « Toi, venir faire le sale boulot ? Tu m’as habitué à mieux que ça. » Elle n’était, d’ordinaire, pas celle venant se salir les mains - mais elle savait pertinemment qui venir voir pour le faire à sa place, moyennement rémunération ou autre récompense à la clef bien sur. Otto, présentement, était réellement surpris de la voir régler un soucis d’elle-même alors qu’elle aurait aussi pu filer l’enveloppe qu’elle lui tendait désormais à la gamine pour qu’elle répare ses erreurs seule. « A partir de maintenant, tu fous la paix à la gamine. Je veux même pas un regard dans sa direction. » Un petit sourire en coin vint se glisser sur les lèvres de l’italien. « T’as peur que j’en finisse réellement avec elle alors tu la laisses même pas venir me faire ses adieux ? » Ou à quel point JJ était-elle venue pleurer dans les jupons de sa grande soeur pour réussir à la convaincre d’agir de la sorte ? L’enveloppe que la blonde venait lui mettre sous le nez était bien épaisse, et Otto n’avait pas à venir vérifier pour savoir qu’elle contenait exactement la somme que la gamine lui devait encore quelques minutes plus tôt. Dans le fond, même s’il ne viendrait jamais l’avouer à haute voix car de toutes façons incapable de s’en apercevoir, il en pinçait pour la façon dont Raelyn venait agir avec sa soeur: il espérait qu’il serait possible de voir les choses se dérouler de cette sorte également lorsque Orso et lui aurait appris à se connaitre réellement. « Et puisque t’es persuadé que les flics te cherchent pas, tu te remets au boulot. Je pense que tu seras d’accord pour dire que t’as grillé ton stock de congés sabbatiques pour les trois prochaines années. » Les yeux d’Otto vinrent suivre les mouvements de la blonde, et lorsqu’elle vint planter son regard dans le siens, un sourire presque amusé se tenait toujours sur le visage de l’italien. « T’as compris ? Plus un regard. » Il vint en faire de même, ainsi deux nuages de fumée s’élevaient désormais du cendrier posé sur la table basse du salon. « C’est pas moi qui suis venu chercher les problèmes, tu sais. Elle l’a fait toute seule comme une grande et je sais d’avance que je vais la recroiser sans le vouloir. Elle a ça dans le sang, et on peut pas fuir toute sa vie. » Il ne pouvait pas fuir toute sa vie également; qui il était autant que la réalité dans laquelle il semblait être obligé, de gré ou de force, de venir se plonger de nouveau. « J’essayerai de pas trop jouer avec elle quand elle viendrait me supplier de l’aider de nouveau. » Une fois qu’on avait franchi la ligne, de toutes façons, il était impossible de revenir du côté clair de l’affaire. Désormais, Otto avait parcouru sans réellement s’en apercevoir les quelques mètres le séparant de la blonde et devait se retenir en se rappelant qui le bout de femme le menant à la baguette était pour ne pas venir de nouveau vriller, trop loin. « Je te montre pas la sortie, tu sais où c’est. Par contre, Raelyn… » Il était on ne pouvait plus sérieux. « Ca marche dans les deux sens: tu mentionnes une nouvelle fois Serena… » Et elle avait beau être celle qui avait fait en sorte que son navire à lui ne sombre pas totalement, il avait beau lui être redevable de mille et une choses; face à Serena sa patronne ne faisait pas le poids. Il ne vint cependant faire aucune remarque sur le fait qu’il allait effectivement devoir se remettre au travail: venir sortir l’excuse qu’il n’était pas tout à fait prêt et remis psychologiquement de toute cette affaire pour affronter la dure réalité quotidienne de son travail ne fonctionnerait jamais, dans son cas à lui. Pourtant, Dieu que c’était le cas.

The Suicide King
Raelyn Blackwell & @Otto Lazzari

« Il dira rien. » Otto, sous ses airs de gros dur, n’est qu’un enfant plein d’un espoir et d’une foi en son frère que j’estime mal placée. Il rêve si j’en crois ses réactions à une réunion familiale qui n’arrivera pas maintenant qu’il s’en est pris au frère de l’Italien : je connaîs plus sa femme que Saül lui même, mais je le sais sans pitié et sans empathie en ce qui concerne son prochain. Toutefois, je me contente de laisser échapper un rire bref et sarcastique pour partager ce que j’en pense. Si les actions d’Otto venaient à impacter le Club ou le Casino, il répondra de ses actes. D’ici là, je me moque bien de l’aider à préparer son petit cœur pour pallier aux impacts d’une potentielle - elle est certaine selon moi - déception.

« C’était à elle de réfléchir aux conséquences de ses actes. » Que croit-il ? Que quelqu’un sous l’emprise de la drogue est réellement capable de réfléchir aux conséquences de ses actes ? Dans quelle réalité vit-il ? « T’empruntes pas si tu sais pas comment rembourser. » - « Quand t’es sous l’emprise de cette merde, le bon sens disparaît. » Le modèle économique du Club repose en partie sur ça : la stupidité des toxicomanes. « Et t’es censé le savoir. » Depuis combien de temps est-il l’un des nôtres ? « Si t’avais jeté tes billets aux feu, t’aurais eu le même résultat. » Alors qu’il n’utilise pas cette excuse pour justifier d’avoir passé à tabac une jeune fille incapable de parer les coups. Il a perdu une partie de mon estime, ce faisant. « Toi, venir faire le sale boulot ? Tu m’as habitué à mieux que ça. » - « J’ai fait le sale boulot de Mitch pendant des années. » Alors chaque membre du Club devrait être parfaitement au courant que je n’ai pas peur de me salir les mains. Si un jour il faudra te régler ton compte Otto, je n’aurais pas peur de m’en occuper moi-même. « T’as peur que j’en finisse réellement avec elle alors tu la laisses même pas venir me faire ses adieux ? » Ma mâchoire se contracte, mais je ne réponds rien à ce qui a tout l’air d’une provocation. S’il en finit avec elle, j’en finirais avec lui et je n’ai pas besoin de proférer cette menace à voix haute pour que ce soit parfaitement clair. Je ne gaspille pas ma salive pour pointer l’évidence.

« C’est pas moi qui suis venu chercher les problèmes, tu sais. Elle l’a fait toute seule comme une grande et je sais d’avance que je vais la recroiser sans le vouloir. Elle a ça dans le sang, et on peut pas fuir toute sa vie. » - « Dans le sang ? » Le sourire qui étire mes lèvres a quelque chose de brutal, un tantinet carnassier. Son sang, elle le partage en partie avec moi et j’ignore s’il se rend compte de la provocation. « J’essayerai de pas trop jouer avec elle quand elle viendra me supplier de l’aider de nouveau. » Mon sourire s’évanouit complètement et, le visage fermé, je me lève du canapé et fait quelques pas dans sa direction. Je m’arrête à quelques centimètres de lui, sans baisser les yeux, pour lui rappeler deux choses. La première, que je ne suis pas impressionnable. Je me moque de devoir lever les yeux pour les planter dans les siens. La seconde, que de nous deux, je suis en charge et pas l’inverse. « Peut-être qu’elle le fera. Sauf que c’est toi que j’ai décidé de rendre responsable. Si elle le fait, tu l’ignore. » Même si la gamine a reçu le même ordre : c’est à lui que je m’en prendrai en cas d’écart, et je ne reviendrai pas sur ma décision. « T’auras qu’à prétendre que t’es un adulte responsable. » Un dernier regard, et je recule de quelques pas pour ramasser mon sac à main sur mon épaule. Je considère que le message est transmis, maintenant, seul l’avenir me dire si Otto a décidé de la jouer rebelle ou s’il rentrera dans le rang. « T’es un bon élément Otto. Me fais pas regretter ma confiance en toi. » Je déteste être déçue, mais je ne le suis jamais deux fois.  

« Je te montre pas la sortie, tu sais où c’est. Par contre, Raelyn… Ça marche dans les deux sens: tu mentionnes une nouvelle fois Serena… » Mes yeux toujours droits dans les siens, je soutiens le regard de l’Italien. « Touche pas à ma famille et je ferai de même pour la tienne. » C’est aussi simple que ça. Et s'il y a une chose qui n'est pas un secret au sein du Club, c'est que je n'ai qu'une parole.

RP terminé