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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

Tout se passait trop bien depuis quelques semaines. Et elle y a vite pris goût, Spencer. Si sa situation est toujours plutôt compliquée, ça fait longtemps qu’elle n’a pas eu un quotidien aussi stable, et merde, qu’est-ce que ça fait du bien. Elle a retrouvé Mac et ça se passe pas trop mal, les choses semblent un peu s’arranger avec Kieran, elle essaye de se faire une place pas trop loin de Raelyn, bref. A force, elle va finir par peut-être réussir à faire quelque chose de sa carcasse. Elle est vraiment passée à ça de prendre plusieurs bonnes décisions à la suite. Et puis y a eu cette soirée où elle est tombée sur l’autre. Enfin plutôt, c’est lui qui lui est tombé dessus. Littéralement. Tout s’est passé trop vite, c’est flou et elle en chie encore carrément trop pour pouvoir réfléchir clairement à tout ce que ça implique. C’était peut-être hier soir, peut-être il y a deux jours ou il y a une semaine, merde. Elle sait plus. La notion du temps est vachement complexe à prendre en compte quand on prend la décision débile de se saouler au whisky et qu’on tente d’inhiber la douleur à coups de cachets mal dosés de fentanyl. Tout est trop vague. Elle se souvient des coups, trop sonnée pour réagir et après c’était trop tard. Il voulait récupérer sa thune, elle avait rien à lui rendre alors il a sûrement pensé que c’était une correction méritée. Aucune idée de comment elle a réussi à rentrer, ou combien de temps ça lui a pris. Elle se rappelle vite fait de son téléphone qui arrêtait pas de sonner à un moment donné et qu’elle a envoyé valdinguer dans le premier mur de l'appart parce que même en mode vibreur, ça la rendait dingue d’entendre le moindre bruit persistant. Et ça fait depuis qu’elle est rentrée que le pauvre téléphone gît là, brisé et inutile.
Spencer a pris l’excellente décision d’ignorer le reste du monde. Ses vieilles habitudes de vouloir gérer ses problèmes seules ont la vie dure et la peau trop épaisse pour pouvoir s’en défaire. (Et puis se bourrer le gueule et se défoncer, ça a toujours si bien fonctionné.) Rideaux fermés depuis l’incident, elle refuse l’idée de sortir ou de parler à qui que ce soit, préférant rester dans la pénombre et attendre. Après quoi ? Aucune idée. La mort, sûrement. Ou alors l’ultime solution à ses problèmes, celle qui tombera du ciel et réglera tout d’un claquement de doigts. Alors elle flippe toute seule, elle se perd dans sa peur et préfère essayer la noyer dans le fond d’une bouteille ou deux. A l’instant où elle refera surface, elle n’aura plus que ses regrets comme seule compagnie. Si l'autre lui remet la main dessus, il va la tuer cette fois, c'est sûr. Le jour, la nuit, elle sait pas tellement où ça en est, tout ça. Si ça se trouve quand elle se décidera à ressortir, cent ans se seront écoulés et le monde ne sera plus le même que celui qu’elle a connu. Spencer pense à elle, bien sûr. Toujours. Et quand elle envisage d’envoyer un simple message, elle se heurte au cadavre de son téléphone et ça la frustre. Alors elle dit qu’elle verra ça plus tard, que ça doit pouvoir attendre que les bleus sur sa gueule ne disparaissent. Combien de temps ça prend, d’ailleurs ? On les remarque toujours quand ils sont là, et dès qu’ils commencent à s’estomper, ils sont bien vite oubliés. Un peu comme toutes les promesses qu’elle a pu faire depuis le début de l’année. Entre deux phases de sommeil tantôt agité, tantôt comateux et de gueule de bois, elle est assez lucide pour se sentir coupable de tout foutre en l’air une fois de plus.
Peut-être la fois de trop.
Aucune idée de l’heure qu’il est quand ça vient tambouriner à la porte. Elle a peur de savoir de qui il s’agit et, dans un premier temps, elle préfère ne pas aller ouvrir en se disant que l’importun finira par partir. Mais ça continue et ça ne fait rien pour apaiser son mal de crâne. En conjurant toutes ses forces, elle traîne sa carcasse jusqu’à l’entrée et entrouvre. La lumière du soleil lui agresse la rétine et elle a presque du mal à faire le point sur Raelyn qui n’a pas l’air tout à fait ravie. Elle est sans doute pas là pour venir parler du beau temps ou de Micah, cette fois. Spencer baisse les yeux, évite de croiser son regard et s’écarte sans un mot pour aller boire de l’eau. Si elle veut rentrer qu’elle fasse comme chez elle, puisque c’est le cas, après tout. « T’as l’air en forme. » qu’elle croasse, sachant pas trop quoi dire. Parce qu'entre ses cernes de trois kilomètres de long et la moitié de sa gueule qui ressemble à une peinture en cinquante nuances de jaune et violet, c’est pas tellement son cas. Soudain, elle réalise que peut-être, elle a oublié deux ou trois trucs importants en décidant de se reclure ici. Genre son boulot par exemple. « Merde, pardon. J’ai complètement oublié d’appeler pour dire que heu- J’avais mal à la tête. » c’était qu’une question de temps avant qu’elle ne gâche la chance qui lui a été offerte, après tout.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell - janvier 2022

Je ne m’occupe pas de la gestion du personnel et, fondamentalement, je n’ai pas à interférer sous prétexte que la personne avec laquelle il y a un problème possède le même patrimoine génétique que le mien ou, en tout cas, en partie. Problème est même un bien grand mot : une absence, même si elle dure depuis plusieurs jours, ne fais pas partie des urgences qui prennent une telle ampleur qu’elles finissent fatalement par remonter jusqu’à mes oreilles. Mais j’en sais plus que quiconque au casino sur la jeune femme. Je sais que, contrairement à l’employé lambda, elle a plus de chance d’être en train de s’etouffer dans son vomi plutôt que de souffrir d’une mauvaise grippe ou d’avoir un peu de fièvre. Je  sais aussi que, parfois, planer vous faire perdre la notion du temps. Ne me suis-je pas moi-même et par le passé absenté plusieurs jours de mon boulot parce que j’errais quelque part entre le conscient et l’inconscient ? Parce que j’avais pris une dose trop forte ou une drogue de qualité douteuse et que la descente était compliqué et avait l’apparât d’une descente aux enfers ? Et si elle n’avait pas suivi mon conseil et s’était procuré de la marchandise d’une qualité inférieure voir franchement dangereuse ?

Je ne dirais pas que je suis inquiète, pour ça, il me faudrait être capable de développer une forme sincère d’attachement envers quelqu’un d’autre que Amos et notre fille, mais je ne peux nier que je suis préoccupée. Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas exactement quel mot mettre dessus, mais je me demande s’il est arrivé quelque chose à la gamine et je me maudis de ne pas réussir à me raisonner. Alors, en quittant le casino et avant de retrouver mon futur époux et ma fille, j’ai demandé à Callum de faire un crochet par l’ancien studio d’Amos, celui là même qui abrite ma demie soeur. J’ai frappé à la porte en m’efforçant de ne laisser paraître aucun trouble ou aucune inquiétude. J’ai patiemment attendu un signe de vie, un bruit provenant de l’intérieur pour me signifier qu’elle est là, qu’elle est consciente ou en tout cas partiellement. Et je n’ai pas été déçue. A travers la porte en bois, je capte le bruit de quelqu’un qui se cogne, qui jure, qui maudis le meuble qui s’est dressé sur son trajet : le bruit de quelqu’un qui est en vie. Je laisse un soupir à moitié inaudible me filer entre les lèvres, sous le regard amusé d’un Callum que je dispense déjà d’assister à cet échange d’un geste de la main l’autorisant à m’attendre près de l’ascenceur. En un instant, la gamine est là et elle se permet même de me détailler. « T’as l’air en forme. » - « Toi non. »

Elle a l’air d’avoir pris un bus en pleine figure, si je suis tout à fait honnête : dire qu’elle n’a pas l’air en forme, c’est un euphémisme. Je fronce les sourcils en l’apercevant, je cherche à l’intérieur un indice sur ce qui l’a mise dans cet état alors qu’elle ressent déjà le besoin de se justifier pour son absence, puisqu’elle pense que je suis là pour ça. C’est le cas, en partie, je suis là parce que ne pas la voir au Casino a attiré mon attention, mais je ne suis pas là pour lui remonter les bretelles. « Merde, pardon. J’ai complètement oublié d’appeler pour dire que heu- J’avais mal à la tête. » - « Je suis pas responsable ressources humaines. Je suis pas là pour demander des comptes. » Elle a un cerveau qui fonctionne relativement normalement non ? Elle pourra faire le calcul toute seule et comprendre que, par conséquent, si je suis là, c’est qu’une partie de moi se faisait du souci. « Je m’attendais à te trouver noyée dans ton vomi, si tu veux tout savoir. » Et je lui ai bien ordonné de pas crever ici. Elle ne m’invite pas à entrer mais je le fais : je suis plus chez moi ici qu’elle ne l’est elle-même. Délicatement, j’attrape son menton entre mes doigts pour observer se blessures aussi bien que ses pupilles. Elles sont dilatées. Bon, jusque là, pas de surprise. « Qu’est ce qui est arrivé à ton visage ? » Il est tuméfié, elle a un oeil gonflé et des zones qui prennent déjà une couleur violette sombre. « Me prends pas pour une conne. » Je déteste ça.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

Est-ce que c’est le moment où elle doit paniquer, Spencer ? Celui où Raelyn vient la flanquer à la porte et que par conséquent, elle retourne à la case départ ? Celui où elle vient mettre un terme à cet espèce d’accord tacite qui a été passé à l’instant où l’aînée a accepté de lui filer son numéro personnel en cas d’urgence et tout le bordel ? Elle ressasse trop de choses dans son esprit, Spencer. Toujours un doute sur un truc, constamment méfiante sur tout et tout le monde et pourtant pas foutue de s’empêcher de se laisser entraîner dans les pires combines. Un jour ça la perdra. Jusqu’ici, elle a eu relativement de la chance, toutes choses considérées. Une jeune femme seule dans sa situation, c’est rarement un bon plan, c’est rarement fait pour pouvoir durer. L’idée de se retrouver de nouveau à la rue lui fait peur et elle n’a aucune envie de s’y risquer. Techniquement, elle sait pouvoir compter sur Mac si ça dégénère, mais sera-t-elle seulement capable de tenir sa promesse d’aller vers elle en cas de coup dur ? Elle se connaît trop pour savoir qu’il y a probablement une chance sur dix pour que la réponse soit “oui”. En attendant elle est là, penaude sous le regard sévère de Raelyn, ne sachant pas où se foutre si ce n’est dans un trou. Elle y va de son petit commentaire un peu trop léger compte tenu de la situation et n’ose même pas croiser le regard de sa soeur. « Toi non. » forcément, ça lui arrache un rictus et elle n’a rien à y redire, rien à contester. Le teint pâle, les yeux vitreux, la gueule de travers et le dos courbé, y a vraiment rien qui va dans son apparence actuelle.

Dans la précipitation, elle s’excuse vaguement, ayant plus l’air de rechercher l’esquive que la confrontation directe. Elle flippe, pas tranquille pour un sous, et elle a aucune idée de ce qu’elle est supposée faire de sa personne. Est-ce qu’elle doit se confondre en excuses et implorer le pardon ou une nouvelle chance ? Est-ce qu’elle doit inventer une histoire rocambolesque d’un cambrioleur qu’elle a chassé au péril de sa vie ? Est-ce qu’elle doit tout balancer ? Jusqu’à maintenant la dernière solution s’est montrée plutôt efficace avec Raelyn. La femme semble apprécier la franchise, mais jusqu’où est-ce qu’elle est prête à aller ? Concrètement, Spencer lui doit déjà presque tout. Elle qui n’avait plus rien et passait juste ses journées à creuser encore un peu plus sa tombe, elle se retrouve aujourd’hui logée et payée, elle a même eu la chance de voir sa vie prendre un tournant assez inattendu avec sa meilleure amie et merde, tout est tellement confus dans son esprit qu’elle a du mal à se concentrer sur un seul truc. « Je suis pas responsable ressources humaines. Je suis pas là pour demander des comptes. » ce qui veut dire qu’elle devra sûrement en rendre à Amos et, en toute honnêteté, il lui fait au moins aussi peur que Raelyn. Tantôt sympathique, tantôt patibulaire, elle a beaucoup de mal à le cerner complètement. Sa demi-soeur également. Y a un truc avec ces deux là qu’elle ne s’explique pas. Ni l’un ni l’autre ne semble porté sur la charité et les bonnes oeuvres. Du genre très secrets, ils ne font pas assez confiance aux gens pour se passer d’un garde du corps qui est sans cesses sur leurs talons. Il est où lui, d’ailleurs ? « Je m’attendais à te trouver noyée dans ton vomi, si tu veux tout savoir. » bien malgré elle, un ricanement lui échappe. La situation n’a rien de drôle et elle ne rit pas vraiment, c’est plutôt sa nervosité habituelle qui refait surface. « Ah non, pas cette fois. » si elle a bu comme un trou et qu’elle s’est gavée de cachets, elle n’a pas encore réussi à se foutre en l’air totalement. C’est sûrement pas passé loin, elle a plusieurs trous noirs de ces derniers jours mais elle est assez certaine de ne pas avoir quitté l’appartement une seule fois depuis qu’elle a fait connaissance avec les poings de l’autre. Spencer grogne lorsque Raelyn lui prend le menton pour regarder l’état peu glorieux de son visage et elle essaie de tourner la tête en grimaçant. « Qu’est ce qui est arrivé à ton visage ? » elle fronce les sourcils et même ce simple geste lui fait mal, c’est assez terrible comme sensation. « Me prends pas pour une conne. » la jeune femme s’écarte et s’occupe les mains avec son verre d’eau, son regard se posant sur les tubes vides de fentanyl qui jonchent le fond de l’évier et elle crève d’envie d’en reprendre quelques uns. « J’me suis battue avec un sale rital de merde et il tapait plus fort que moi. » elle grommelle avant de boire. Battue c’est un bien grand mot, elle est même pas certaine d’avoir envoyé le moindre coup. Elle s’est juste fait latter la tronche oui. « C’est un gars que je connais d’avant et que je pensais jamais revoir. » elle continue sans mentionner qu’elle lui doit ne serait-ce qu’un seul centime. « Tu sais comment c’est, tu penses être tranquille et d’un coup tu te retrouves la tête dans le mur parce que t’as pas fait gaffe. » sale histoire tout ça, sale histoire. « C’est rien de grave. » tu marmonnes ensuite en pinçant les lèvres. Evidemment, que c’est rien de grave. Ca arrive tous les jours ce genre de truc quand on traîne dans les mauvais endroits.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell - janvier 2022

« Ah non, pas cette fois.  » Je laisse échapper un rire bref, amusé, avant de hausser les épaules. « La prochaine ? » Elle si j’en crois la sereine et la poudre écrasée qui trainent toutes deux sur la table basse du salon. Je n’ai jamais mis les pieds ici à l’époque où Amos y habitait, mais je suppose que la décoration était radicalement différente.

En balayant la pièce du regard, j’essaye de trouver un indice, quelque chose qui explique à la fois son visage tuméfié et donc par extension son absence au casino, puisque je soupçonne que c’est pour ne pas se montrer comme ça qu’elle est aux abonnées absentes depuis plusieurs jours. Mes doigts, serres auxquelles elle ne peut échapper, se posent sur son menton et j’incline son visage sous la lumière artificielle du studio pour mieux apercevoir l’étendu des dégâts. C’est moche, ça prend déjà une multitudes de couleurs différentes et c’est encore bien loin du jaune de la cicatrisation. La personne qui lui a fait ça ne l’a pas loupée, c’est le moins que l’on puisse dire. Il ne s’agit pas d’un accident, elle a visiblement reçu pas mal de coups avant de peut-être perdre connaissance. Celui ou celle qui a fait ça voulait lui refaire le portrait pour lui donner une bonne leçon, pas lui faire peur ou l’impressionner. Pour ça, on ne frappe que quelques coups. « J’me suis battue avec un sale rital de merde et il tapait plus fort que moi. » - « De toute évidence. » Parce qu’elle me donne pas l’impression de savoir porter un coup, Spencer. Et elle est certainement bien souvent trop défoncée pour viser droit. « Un rital de merde qui t’aime pas beaucoup, de toute évidence. » Là, juste là, c’est le signal que j’envoie pour qu’elle me donne plus d’informations. Je veux savoir son nom, et je veux savoir s’il avait une bonne raison de la frapper, l’inconnu. « C’est un gars que je connais d’avant et que je pensais jamais revoir. » - « Me dit pas que t’as fait les poches à un mort. » Ou à un prétendu mort, le cas présent. J’en ai rencontré, des rapaces de la pire espèce, lorsque je trainais dans les rues. Ceux qui attendent que vous tombiez inconscient pour vous détrousser de vos maigres possessions. « Tu sais comment c’est, tu penses être tranquille et d’un coup tu te retrouves la tête dans le mur parce que t’as pas fait gaffe. » - « Hum… » Je lui répondrais bien que c’est la raison pour laquelle Callum n’est jamais loin excepté lorsque je suis avec Amos, mais je m’abstiens puisque non : je ne sais pas. Nous avons des points communs mais également des différences; je suis assez maligne pour me tenir éloignée de ce genre d’emmerdes, la plupart du temps. J’ai assez construit mon histoire, ma légende, pour que beaucoup n’osent pas m’approcher ou encore moins me porter un coup. « C’est rien de grave. » - « Ça ressemble pas à rien de grave. » Personne ne m’entendra dire que je m’inquiète, c’est le genre de chose que je ne fais pas.

« Ça ressemble même plutôt à des coups portés pour te laisser aucune chance de te relever. » Elle devait faire peur à voir, tout de suite après l’agression. « Qu’est ce que tu lui as fait à ce type ? » Il est à présent clair qu’il ne s’agissait pas d’une agression au hasard et que, dans le référentiel du type au moins, elle le méritait. « Tu connaîs son nom ? » C’est cette information là qui m’intéresse, je connaîs assez bien la vermine Brisbanienne pour qu’il y ait une chance que je le connaisse, celui qui lui a fait ça. Le cas contraire, je m’arrangerai pour organiser une petite rencontre amicale entre lui et moi.


« Qu’est ce que c’est que ça ? » Proche de la table basse - difficile d’en être loin vu la taille du studio - la lumière du jour éclaire une des pilules égarée dans un coin. La forme n’est pas celle de la marchandise du Club, mais elle m’est familière. Je l’attrape entre les doigts pour l’observer, avant de pester en apercevant la petite abeille estampillée sur le cachet. « Putain me dit pas que tu consommes cette merde. » Cette merde bien plus dangereuse que notre marchandise qui reste clean, même si elle peut donner la merde. « Je croyais t’avoir dit de plus te fournir auprès de tes anciens dealeurs. Je t’ai pas donné un contact pour qu’il fasse joli dans ton téléphone. » Je l’ai fait pour lui éviter de se foutre en l’air plus vite que nécessaire.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« La prochaine ? »
« Tu m’en veux pas si j’prends pas rendez-vous. »

Spencer s’explique à moitié, elle se contente de pointer des évidences et évite de raconter des trucs du genre “jsuis tombée dans les escaliers” parce que même un enfant n’y croirait pas. « De toute évidence. Un rital de merde qui t’aime pas beaucoup, de toute évidence. » la blonde grimace et hausse les épaules d’un air désinvolte au possible. « Y a pas grand monde qui m’aime bien, j’le prends pas trop personnellement. » difficile de savoir combien de personnes elle a volé ou arnaqué d’une manière ou d’une autre. Les gens qui veulent lui refaire le portrait, y en a plus d’un et jusqu’à maintenant elle a toujours plus ou moins réussi à s’en sortir sans trop de casse. Fallait bien que le vent finisse par tourner au bout d’un moment. « Me dit pas que t’as fait les poches à un mort. » « Ew non. Il s’est barré du jour au lendemain sans donner de nouvelles. Moi ça m’arrangeait de plus le voir. » qu’elle s’offusque en ricanant, secouant la tête au passage. Ca l’aurait arrangée qu’il soit mort pour de vrai, aussi. Parce que le gros avantage qu’ils ont, les gens n’étant plus de ce monde, c’est qu’on n’a pas besoin de leur rembourser quoi que ce soit. Sauf si éventuellement on croit à l’occulte et toutes ces conneries là. « Ça ressemble pas à rien de grave. » Spencer pince les lèvres. Non, effectivement, c’est bien plus grave que ce qu’elle laisse paraître mais elle ne tient pas à ce que qui que ce soit se mêle de cette histoire là. Surtout pas une mère de famille qui passe son temps à se balader avec un garde du corps sur les talons. D’ailleurs elle a peur de quoi, pour avoir tout le temps ce gars là collé aux basques ? Ça doit être si pénible de toujours avoir quelqu’un qui surveille tout ce qu’on fait en permanence.

« Ça ressemble même plutôt à des coups portés pour te laisser aucune chance de te relever. » la jeune femme baisse de nouveau les yeux, ne contredit pas mais ne confirme pas non plus. Elle a cru qu’elle allait crever, ce soir là. « Qu’est ce que tu lui as fait à ce type ? » « J’lui ai rien fait ! » elle est même restée polie et n’a pas insulté sa mère, c’est un bon début. Bon, elle a peut-être essayer de lui coller une droite mais c’était après qu’il lui soit tombé dessus, donc ça relève de la légitime défense. « ‘fin genre… J’lui dois de la thune mais- J’vais trouver un truc. » elle a l’air bien partie dans son délire de cambriolages avec Murphy, avec un peu de chance elles vont finir par récupérer suffisamment de marchandise pour potentiellement éponger sa dette. Peut-être. En tout cas dans son état actuel, elle évite de se mettre dans des situations qui peuvent s’avérer risquées. Il est largement préférable d’attendre de plus avoir mal et d’avoir l’esprit un peu plus clair pour retourner faire ses coups en douce. « Tu connaîs son nom ? » Spencer dévisage Raelyn un instant, ne pouvant empêcher un espèce de ricanement de lui échapper. Elle est pas sérieuse là, si ? Elle a beau ne pas connaître Raelyn plus que ça, l’air qu’elle arbore prouve bel et bien que non, elle ne plaisante pas. « J’lui ai pas tellement demandé sa carte d’identité pour vérifier tu vois. A tous les coups c’est un faux nom de toute façon. » elle s’agace en secouant la tête. Et puis, personne de sensé n'a un prénom pareil. Et si ça se trouve, il est même pas vraiment italien en plus de ça. Il se la joue caïd mafieux mais c’est probablement qu’un connard d’australien moyen qui veut se donner un genre et impressionner la galerie. Il bombe le torse et tape sur tout ce qui est plus petit que lui et qui aura du mal à se défendre. Des gars comme ça, y en a déjà plein dans les cours de récré, c’est rien de nouveau. « Ça change quoi qu’tu saches qu’il s’appelle Kyle ou Otto, tu vas retourner Brisbane et envoyer Callum lui mettre une baffe ? » elle suinte l’ironie, n’ayant pas tellement envie qu’on vienne lui faire la morale sur ses fréquentations douteuses. Elle sait, elle a pas besoin qu’on lui répète de pas traîner avec des individus louches ou qu’importe.

Du coup de l’oeil, elle observe Raelyn se déplacer et ramasser un truc. « Qu’est ce que c’est que ça ? » Spencer relève les yeux vers le cacheton que sa soeur lui montre mais de là où elle est, elle fait pas tellement la différence entre lui ou un autre alors elle hausse les épaules de nouveau. « Putain me dit pas que tu consommes cette merde. » elle roule des yeux en buvant son verre d’eau. En quoi ça la regarde, ce qu’elle prend. « Je croyais t’avoir dit de plus te fournir auprès de tes anciens dealeurs. Je t’ai pas donné un contact pour qu’il fasse joli dans ton téléphone. » « Ca ou autre chose, on s'en fout. » elle grommelle en reposant son verre. « Ton gars j’l’ai vu p’t-être la semaine dernière. » elle se défend en fronçant les sourcils. Que ça soit des trucs avec la petite abeille ou ce que lui a refilé l’autre type, quelle importance ? Probablement aucune, du moment qu’elle peut juste se défoncer et ne plus avoir mal partout. « C’était des restes, j’sais plus, j’allais pas gâcher. » vu le prix que ça coûte faut pas déconner quand même. D’ailleurs elle ne sait même plus s’il s’agit véritablement de restes ou de trucs qu’elle a piqué plus tôt dans le mois. Toute cette situation est grotesque, vraiment.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell - janvier 2022

« Y’a pas grand monde qui m’aime bien, j’le prends pas trop personnellement. » Je laisse échapper un rire amusé. Elle me fait rire Spencer, et je veux peut-être me répéter mais elle le fait parce qu’elle me ressemble. Parce que le rôle de la gamine insolente, je l’ai campé un moment avant de devenir une femme. J’étais plus jeune qu’elle, bien plus jeune qu’elle, mais j’avais le même genre de culot teinté d’une nonchalance qui me servait avant tout de carapace. Est-ce que c’est son cas, à elle aussi ? « Ew non. Il s’est barré du jour au lendemain sans donner de nouvelles. Moi ça m’arrangeait de plus le voir. » Je fronce les sourcils, intriguée par cette histoire. A moins que le type en question soit un malade aux pulsions violentes, elle a dû sacrément l’énerver, pour qu’il lui fasse passer l’envie de se foutre de sa gueule de la sorte. Moi, ce que je cherche à estimer, c’est si j’ai les moyens de rattraper les dégâts causés par la blonde, quels qu’ils soient. « J’lui ai rien fait ! » A d’autres Spencer. « Spencer… Je suis pas ta mère ok ? Je suis pas là pour t’engueuler, juste comprendre. » Habituellement patiente mais fatiguée - Micah est encore loin de faire ses nuits - je masse mes tempes en poussant un soupir. « ‘fin genre… J’lui dois de la thune mais- J’vais trouver un truc. » Ok, donc c’est une question d’argent. Je ne connaîs pas la gamine depuis bien longtemps et je la connaîs encore mal, mais je connaîs les junkies : cette dette, elle ne peut être que liée à la drogue. « Ok. Tu lui dois combien ? » Je cherche à évaluer les dégâts et, au fond, à éviter qu’elle se fasse refaire le portrait à nouveau. Je suis une bien meilleure créancière que cet inconnu, si j’en crois les bleus sur son visage. Et l’argent n’est pas un problème pour moi.

« J’lui ai pas tellement demandé sa carte d’identité pour vérifier tu vois. A tous les coups c’est un faux nom de toute façon. Ça change quoi qu’tu saches qu’il s’appelle Kyle ou Otto, tu vas retourner Brisbane et envoyer Callum lui mettre une baffe ? » Des Otto qui disparaissent dans la nature, je doute qu’il y en ait des tas à Brisbane. Quelle était la probabilité qu’il s’agisse du même imbécile que le cambrioleur supposé travailler sous mes ordres. « Ok. » Je ne laisse rien paraître, mais l’information que l’italien est de retour en ville ne tombe pas dans l’oreille d’une sourde. « Tu lui devais de l’argent pour quoi exactement, à cet Otto ? Il t’es tombé dessus comment ? Il connaît l’adresse du studio ? » Ou bien sait-elle dans quel genre d’endroit il traîne maintenant qu’il est de retour ?


Si le cachet oublié sur la table basse attire mon œil, ce n’est que parce qu’il porte une marque que je connaîs bien. J’étouffe un juron avant de l’attraper entre mes doigts et de demander des comptes à la blonde. « Ça ou autre chose, on s'en fout. » Cette gamine me fatigue. Est-elle donc parfaitement incapable de suivre une consigne pourtant simple et à sa portée ? « Ton gars j’l’ai vu p’t-être la semaine dernière. C’était des restes, j’sais plus, j’allais pas gâcher. » Je me dirige vers le lavabo et je laisse tomber la pilule dans l’évier, avant de croiser mon bras droit sous le gauche et de lui tendre ma paume ouverte. « T’en as d’autres, des restes comme ça ? » Parce qu’ils connaîtront le même sort que cette pilule-là. « Ça ou autre chose, on s’en fout pas, non. » Foutue junkie. « Tu sais à quoi sont coupées ces merdes ? » Du fentanyl. Jusqu’à cent fois plus puissant - et donc dangereux - que les autres opioïdes. Plus addictif, aussi. « Non, bien sûr que tu sais pas. » La plupart des gosses qui en avalent n’en savent rien, ils pensent consommer de la cocaïne ou de l’héroïne et tombent dans le piège de dealeurs peu scrupuleux. « Ces merdes, c’est des usines à overdose. » Comment justifier ce que je sais sans me trahir, sans prouver que j’en sais bien plus sur le marché des stupéfiants à Brisbane que ce que je suis supposée savoir ? « Alors s’il t’en reste, file les moi. » Je répète, d’un ton ferme et sévère.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« Spencer… Je suis pas ta mère ok ? Je suis pas là pour t’engueuler, juste comprendre. » encore heureux. Maureen aurait été du genre à demander son numéro pour le remercier, elle. Spencer balance les raisons de son altercation et ça devrait s’arrêter là sans doute. Y a pas grand chose à dire de plus, y a juste à constater qu’elle est dans la merde financièrement et qu’elle pourra jamais le rembourser. « Ok. Tu lui dois combien ? » « Je- » elle hésite à mentir, à minimiser la chose ou à dire qu’elle a trouvé une combine, qu’importe. Elle pourrait parler d’une petite centaine de dollars, mais vu sa tronche ça paraît peu crédible de se faire tabasser comme ça pour si peu. « Il a réclamé 30k mais j’suis à peu près certaine de pas avoir emprunté autant. » ou peut-être que si ? C’est que les notes montent vite l’air de rien. Il a sans doute un peu gonflé le chiffre pour avoir un retour sur investissement (très mauvais investissement, soit dit en passant.) Et elle se rend surtout compte en le disant à voix haute à quel point elle ne pourra jamais rembourser une telle somme.

Elle fait de son mieux pour s’en sortir, pour éviter le sujet elle sait pas trop. Sauf que Raelyn insiste pour en savoir plus. « Ok. Tu lui devais de l’argent pour quoi exactement, à cet Otto ? Il t’es tombé dessus comment ? Il connaît l’adresse du studio ? » Spencer ne peut s’empêcher de tiquer sur l’emploi du prénom. Elle a ironisé en inventant un des deux et pourtant Raelyn a choisi de retenir le correct. La jeune femme fronce les sourcils et la dévisage un instant, cherchant à déterminer si c’est un simple hasard ou s’il y a réellement quelque chose qui cloche. Ou alors c’est juste son côté un peu trop paranoïaque qui refait surface et qu’elle s’imagine des trucs. Après tout, elle a mentionné qu’il était rital alors ça veut pas dire grand chose en vérité. Quel mal de crâne ça lui file, bordel. « On s’est… Croisés dans un bar un peu craignos. » et elle a noté bien soigneusement le Drifter comme étant un endroit à éviter désormais. Elle aurait pas dû y retourner de base, mais bon, lui n’étant plus dans les parages elle n’avait aucune raison de penser le croiser sur place. Sauf que si. « Je pense pas qu’il sache pour ici. » si la façon dont elle est rentrée est encore un peu floue, elle est à peu près sûre de ne pas avoir été suivie. Sinon elle aurait probablement retrouvé l’endroit complètement retourné ou qu’il serait venue l’achever dans son sommeil, au choix. « Au début il a accepté de me filer de l’argent et en échange j’devais lui ramener des info sur des gens. » et la façon dont ça a été dépensé, c’est plutôt évident.

Raelyn s’agite autour de la table basse, semble s’inquiéter ou s’énerver pour un cachet en particulier. « T’en as d’autres, des restes comme ça ? » Spencer arque un sourcil, ne comprenant pas tellement l’intérêt de la manœuvre ou de la question. « Ça ou autre chose, on s’en fout pas, non. Tu sais à quoi sont coupées ces merdes ? Non, bien sûr que tu sais pas. » la jeune femme se tend, croise les bras et secoue la tête. Elle s’en fout de savoir à quoi c’est coupé tant que ça fait le travail. C’est bien le dernier de ses soucis. (Enfin non, mais c’est pas un soucis qui se voit, alors elle se permet de l’ignorer.) « Ces merdes, c’est des usines à overdose. » et là, Spencer ne peut retenir un rire. C’est quoi ça, une pub pour une meilleure came qui ne fait pas faire d’overdose ? Genre pareil que les shampoings pour enfant qui piquent pas les yeux ? C’est une grande première ça, on lui avait encore jamais faite. « Oh parce que ton dealer il vend des trucs bios et sans danger, peut-être ? » elle raille en imaginant plutôt facilement que c’est le genre de slogan qui pourrait passer crème sur un prospectus distribué à la sortie des lycée. “Consommez bien, consommez bio.”. Peut-être que ça vaudrait le coup de tenter, elle sait pas. « Il va pouvoir sauver tous les junkies avec ses produits, faut l’dire au monde. » elle continue dans l’ironie et c’est très certainement une mauvaise idée. Raelyn est visiblement le genre de femme qui apprécie le sarcasme, mais elle doit avoir ses limites et peut-être que Spencer est en train de la franchir. « Alors s’il t’en reste, file les moi » « Putain, non, j’ai tout terminé. » qu’elle raille en grimaçant. Ou peut-être pas ? Elle en sait rien en vrai. S’il en reste ça sera certainement en vrac mélangé dans les autres tubes de médocs qu’elle garde bien précieusement. Mais hors de question qu’elle file ce qui lui reste de produit, elle a pas tellement envie de se retrouver en rade. « T’as l’air d’en connaître un sacré rayon dans tout ce merdier. » elle constate finalement. Entre ça, le numéro du dealos de l’autre coup et le nom d’Otto qu’elle semble avoir retenu sans même hésiter, ça commence à faire beaucoup. « Pourquoi les produits de ce dealer plutôt qu’un autre, d’ailleurs ? » c’est pas comme si elle touchait un pourcentage sur la marchandise, alors pourquoi autant d’insistance ? « J’imagine que c’est pas pour son côté commercial, alors c’est quoi ? » c’est sans doute pas le genre de question qu’elle devrait poser à une mère de famille, mais elle est pas tranquille.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell - janvier 2022

« Il a réclamé 30k mais j’suis à peu près certaine de pas avoir emprunté autant. » Elle hésite, elle met un peu de temps à accoucher de la somme, et lorsqu’elle avoue, je lève un sourcil, seul signe extérieur de ma surprise. C’est une sacrée somme, et je me demande comment elle l’a dilapidée, et en combien de temps. « Trente mille dollars ? Et ils sont passés où ? » Je lève les yeux au ciel, avant de l’arrêter d’un signe de la main. « T’as même pas besoin de répondre à cette question. » Parce qu’il n’est pas bien compliqué de deviner ce qu’elle en a fait. Ce que je devine en revanche, c’est que sa consommation est plus importante encore que ce que je soupçonnais, que ce que sont allure physique laisse penser. « Je m’en occupe. » Comme ça. Sans l’ombre d’une hésitation ou un ”mais voyons Spencer je n’ai pas cette somme”. Elle n’a rien demandé après tout et, pour moi, cela ne représente pas grand chose. Je me porterai garante de la dette de la gamine auprès de cette enfoiré d’italien, mais je ne lui fais pas de cadeau pour autant. « C’est pas un cadeau. C’est un transfert de dette. C’est à moi que tu les dois maintenant, c’est clair ? » Si je n’ajoute pas que je connaîs la malfrat qui lui a refait le portrait, c’est à présent une évidence. La seule chose dont j’ai besoin, c’est d’un indice sur l’endroit où le trouver, puisqu’il se cache depuis sa pitoyable tentative de meurtre. « On s’est… Croisés dans un bar un peu craignos. Je pense pas qu’il sache pour ici. » Je hoche la tête doucement. « Bien, bien. » Parce que je ne veux pas le voir débarquer au studio. « Au début il a accepté de me filer de l’argent et en échange j’devais lui ramener des info sur des gens. » Je fronce les sourcils, réalisant que ma demie-soeur est peut-être capable d’assembler quelques pièces du puzzle que je tente de réaliser depuis que le cambrioleur a pris la fuite. « Quel type d’information ? Sur qui ? » Je prie pour que que Spencer fasse taire son insolence et que dise ce que je veux savoir sans que nous n’ayons à entrer en confrontation, elle et moi.

« Oh parce que ton dealer il vend des trucs bios et sans danger, peut-être ? » Ma respiration est calme, mon regard fiché dans le sien, mais mon ton intraitable, seul indice de mon irritation. « Il va pouvoir sauver tous les junkies avec ses produits, faut l’dire au monde. » - « Joue pas à ça avec moi Spencer. » Je lui ai dit que j’aimais son honnêteté, qu’elle ne me le fasse pas regretter avec une sacrée dose de connerie. « Je t’ai pas emmerdée. J’ai pas tenté de d’enrôler dans une putain de cure de désintox pour te sauver. Je t’ai donné une consigne. » Parce que je ne demande pas de faveur ou ne donne pas de conseil. Je donne des consignes. « T’es pas capable de respecter une foutue consigne ? » Donnée pour son bien en plus, pas parce que j’étais agacée qu’elle aille se fournir à la concurrence. « Tu veux prendre cette merde ? Prends cette merde. C’est pas moi qui le regretterai. » Mais que ce soit clair : plus de main tendue et plus de faveurs, si elle le fait.

« Putain, non, j’ai tout terminé. » C’est de notoriété publique et je le sais d’expérience, les junkies mentent. Et lorsqu’il est question de drogue, ils mentent plus que tout. Ne jamais croire un junkie qui prétend ne plus avoir de réserve. « Me force pas à retourner l’appartement Spencer, parce que je le ferai pas. Le but c’est pas de t’emmerder. » Le but, c’est de sauver sa misérable vie. « T’as l’air d’en connaître un sacré rayon dans tout ce merdier. » C’est une évidence, mais elle n’obtiendra aucune confession de ma part. « Pourquoi les produits de ce dealer plutôt qu’un autre, d’ailleurs ? J’imagine que c’est pas pour son côté commercial, alors c’est quoi ? » Moins patiente depuis que je vis avec un nouveau-né, je masse mes tempes pour garder mon calme. « J’en connais un rayon dans ce merdier. » Elle est longue à la détente. « Et j’ai pas de compte à te rendre sur le comment ou le pourquoi. » Et si elle a un minimum appris à me cerner, elle sait que ce n’est pas la peine d’essayer de me soutirer la moindre confession. « T’es une junkie Spencer, me dis pas que tu t’attendais à des bonbons au sucre pétillant. » En référence à son trait d’esprit concernant les produits du Club. « Mais ce que te vend mon type, je sais ce qu’il y a dedans. Je connaîs la composition. C’est pas de la merde. C’est pas coupé au fentanyl ou je ne sais quelle autre merde. » Merde qui accroît autant le potentiel addictif que la dangerosité du produit.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« Trente mille dollars ? Et ils sont passés où ? » de nouveau entendre le chiffre ne sert qu’à renforcer l’angoisse déjà montante depuis l’entrevue malheureuse avec l’italien. Merde merde merde. Elle a à peine le temps de déglutir et de songer à utiliser la franchise ou l’ironie que déjà, Raelyn l’interrompt d’un geste de main. « T’as même pas besoin de répondre à cette question. » Spencer se passe une main sur le visage, évitant bien soigneusement les zones abimées. Mâchoire serrée, épaules tendues, elle est sur les nerfs comme jamais. Tout lui fait peur. Absolument tout. Comment elle explique qu’elle doit autant de pognon à un gars qu’elle ne connaît au final pas tant que ça ? Comment elle explique qu’elle n’a pas les moyens de rembourser le moindre centime, qu’elle n’a jamais eu les moyens de le faire et qu’elle était tellement désespérée de pouvoir s’acheter sa merde qu’elle emprunté au premier pourri qu’elle a croisé et qui a bien voulu lui filer un billet ou deux. Elle savait que c’était une idée de merde dès le début et pourtant elle y est revenue encore et encore, repoussant chaque fois l’échéance, s’achetant un espèce de sursis pourtant pas bien long. Alors ouais, quand l’autre a disparu, ça l’a vraiment vraiment arrangée. Plus d’Otto, plus de dette à rembourser. Un problème en moins dont il lui fallait se soucier. Sauf que voilà, rien n’est jamais aussi facile. « Je m’en occupe. » elle se stoppe nette, lance un regard interloqué à Raelyn. « Quoi ? » c’est tout ce qu’elle arrive à sortir. Non, elle a sûrement mal entendu. « C’est pas un cadeau. C’est un transfert de dette. C’est à moi que tu les dois maintenant, c’est clair ? » sauf que non, elle a visiblement très bien entendu. En revanche, la blonde n’aime pas tellement la tournure que ça prend. De nouveau, elle se tend, tout son être se fout sur la défensive parce qu’elle sait pas quoi faire d’autre. « Pourquoi tu- Attends tu veux dire quoi ? » elle bégaye à moitié. C’est pas dans son intérêt de faire ça, à Raelyn. C’est pas son rôle non plus. « C’est pas parce que c’est à toi que j’dois de la thune que je vais sortir sortir autant d’argent de mes poches. » non, elle n’aime vraiment pas ce qui se passe. C’est sans doute préférable de devoir l’argent à Raelyn, certes, mais à quel moment ça a l’air d’être une bonne idée ? « Quel type d’information ? Sur qui ? » encore à moitié sous le choc de ce que sa demi-soeur vient de dire, Spencer se contente d’entrouvrir la bouche sans rien dire dans un premier temps, puis secoue la tête, ses doigts tapotant nerveusement sur le bord de l’évier. « Heu je- La dernière fois que je l’ai vu il avait l’air vachement intéressé par un mariage qui devait avoir lieu, et par la famille qui organisait tout ça. J’sais pas pourquoi, sans doute parce que c’est des gens plein aux as. » Spencer ferme les yeux et se masse les paupières. « Ca s’trouve il les extorquait ou j’en sais rien. J’lui ai pas tellement demandé ses motivations. » elle avait son argent, c’était plus que suffisant pour éviter les questions qui fâchent.

Elle s’énerve, Spencer. C’est pas tellement qu’elle veut le faire, c’est plus fort qu’elle. Entre la fatigue, la douleur, l’anxiété et le fait qu’elle est encore à moitié défoncée, elle contrôle pas grand-chose et ça va finir par lui retomber dessus pire que les baffes de l’autre. « Joue pas à ça avec moi Spencer. » elle fronce les sourcils et pince les lèvres, détournant le regard. « Je t’ai pas emmerdée. J’ai pas tenté de t’enrôler dans une putain de cure de désintox pour te sauver. Je t’ai donné une consigne. » encore heureux parce qu’au moindre forcing elle est à peu près sûre qu’elle aurait pris ses jambes à son cou, Spencer. Non pas que ça soit tellement le problème de Raelyn en vérité. « T’es pas capable de respecter une foutue consigne ? » « J’suis allée le voir l’autre. » elle répète en bougonnant. La consigne c’était de changer de dealer, pas de balancer tout son stock déjà existant. Donc techniquement, elle a fait ce qu’on lui a demandé. Le reste, ça relève du détail. « Tu veux prendre cette merde ? Prends cette merde. C’est pas moi qui le regretterai. » oh mais elle regrette déjà. Tout fout le camp depuis trop longtemps, elle a perdu toute trace de contrôle et il ne lui reste plus rien si ce n’est ces quelques cachets, anciens ou nouveaux, ça n’a pas d’importance à ses yeux. « J’t’avoue que vu le mal de crâne que j’avais après ça, j’me suis pas tellement amusée à faire le tri dans ce que j’ai pris en rentrant. » et ça a été suffisant pour assommer la douleur un temps. Maintenant, elle ne sait pas trop dire si c’est pire ou mieux.

« Me force pas à retourner l’appartement Spencer, parce que je le ferai pas. Le but c’est pas de t’emmerder. » l’aînée s’agace à son tour et le ton qu’elle emploie a quelque chose de froid, le genre qui montre qu’elle est pas là pour plaisanter. « J’ai plus rien j’t’ai dit, tout est là. L’reste c’est la came de ton gars. » elle tend une main agacée vers la table basse et les quelques tubes vides ou pleins éparpillés dessus avant de recommencer à se masser la tempe. Okay dans le lot il reste sûrement quelques anciens cachets, mais quelle importance. Quand son corps réclame, elle fait pas tellement la fine bouche et prend ce qui passe.  « J’en connais un rayon dans ce merdier. Et j’ai pas de compte à te rendre sur le comment ou le pourquoi. » bien évidemment, mais ça l’empêchera pas de penser que c’est plus que louche, tout ça. Si elle était en pleine possession de ses capacités cognitives, elle arriverait peut-être à assembler les morceaux et à comprendre. Là, elle a trop mal au crâne pour ne serait-ce que s’entendre penser. « T’es une junkie Spencer, me dis pas que tu t’attendais à des bonbons au sucre pétillant. » « Je sais ! » elle lâche dans un ricanement amer, l’insolente. Bien sûr que non, elle ne s’attendait pas à des trucs inoffensifs. Merde, elle déteste ce terme là, junkie. Ça la définit bien, pourtant. « Mais ce que te vend mon type, je sais ce qu’il y a dedans. Je connaîs la composition. C’est pas de la merde. C’est pas coupé au fentanyl ou je ne sais quelle autre merde. » « Je sais à quoi m’attendre- » non, du tout. « J’compte pas retourner voir là où j’achetais avant. » ça serait un coup à se faire encore casser la gueule, ça. Et une fois ça lui a suffit. « Tu veux quoi, pour les trente mille ? » qu’elle demande alors, essayant de noyer le poisson en revenant sur le sujet de l’argent qui, dans l’immédiat, la tracasse bien plus que de savoir pourquoi et comment Raelyn en sait autant sur l’industrie pharmacologique des bas-fonds de Brisbane.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell - janvier 2022

« Pourquoi tu- Attends tu veux dire quoi ? » Qu’est ce qui est si compliqué que ça, dans ce que je viens de dire ? Elle a pas l’argent, je l’ai, elle aura pas ce qu’il faut dans le ventre pour supporter les répercussions d’une dette non honorée, et j’ai pas particulièrement envie de la retrouver baignant dans son sang un jour dans cet appartement. Otto bosse pour moi, Spencer et moi partageons certains gènes, ça ferait tâche, comme situation. « C’est pas parce que c’est à toi que j’dois de la thune que je vais sortir sortir autant d’argent de mes poches. » - « Oh mais je sais. » Je ne suis pas idiote au point de lui faire confiance pour ça. L’argent, ça représente de la poudre, aux yeux d’une droguée. « L’argent rentrera pas dans tes poches. C’est comme ça que je me rembourserai. » Le casino la paye, et si je ne me suis pas encore entretenue avec Amos et notre comptable, il doit bien y avoir un moyen d’aller chercher l’argent à la source. « Rentre plus en contact avec ce type. Je m’en occupe. » A quel moment Otto s’est-il pris pour un mécène ou un créancier ? Tout dans l’attitude de la gamine laisse penser qu’elle n’a pas les moyens de rembourser ce type de montant. « Heu je- La dernière fois que je l’ai vu il avait l’air vachement intéressé par un mariage qui devait avoir lieu, et par la famille qui organisait tout ça. J’sais pas pourquoi, sans doute parce que c’est des gens plein aux as. » - « Quel abruti. » Non content d’être allé descendre un homme lors d’un événement comptant plusieurs centaines de témoins potentiels, il a semé des traces et des indices partout. En plus de ça, il a impliqué une gamine tout sauf fiable. Un génie. « Ça s’trouve il les extorquait ou j’en sais rien. J’lui ai pas tellement demandé ses motivations. » - « T’as pas envie de savoir ce qu’il a fait de ces informations… » Fatiguée par cet étalage de manque de bon sens, je masse mes tempes, en poussant un soupir. « Mais si t’avais ouvert un journal, t’aurais vu qu’il a tenté de descendre un type, à ce putain de mariage. Félicitations, petite soeur. »

« J’suis allée le voir l’autre. »- « Bien. » Après tout, elle a pas besoin de connaître le pourquoi ou le comment, tout ce que je lui demande, c’est de s’empoisonner ailleurs. « J’t’avoue que vu le mal de crâne que j’avais après ça, j’me suis pas tellement amusée à faire le tri dans ce que j’ai pris en rentrant. » Je suppose. Je m’en moque, en fait. Tout ce qui m’intéresse, c’est d’être certaine que y’a plus la moindre marchandise provenant de l’auto déclarée reine des abeilles. « J’ai plus rien j’t’ai dit, tout est là. L’reste c’est la came de ton gars. » - « Parfait. » On parle de came comme on parle d’une marque de spaghettis, et je m’en moque, si c’est suspect. Je me fiche que Spencer se dise que j’en sais bien trop sur un sujet avec lequel une mère de famille respectable est pas supposée être familière. Elle pourra jamais approcher la vérité et même si elle le faisait, elle n’est personne, la gamine. Personne qui ne peut menacer mon statut. « Je sais ! » - « Si tu sais, arrête de poser des questions stupides. » Et arrête de jouer à la plus maligne. « Je sais à quoi m’attendre. J’compte pas retourner voir là où j’achetais avant. » - « Tu sais pas à quoi t’attendre, gamine. Tu t’injectes des merdes dont tu connaîs pas les effets de bords. Ça donne pas envie de te faire confiance. » Et ça donne pas envie de lui confier la moindre tâche de grande ampleur. Il avait quoi dans la tête, Otto ? « Tu veux quoi, pour les trente mille ? » Je fronce les sourcils. « Je veux rien. » Qu’a-t-elle à m’offrir, exactement ? « J’attends rien de toi, Spencer. Je le fais pas pour que tu me doives une faveur ou pour m’acheter ta reconnaissance éternelle. » Qu’est ce que j’en ferais ? « Je le fais parce que la prochaine fois il te laissera pas t’en tirer avec des hématomes, une pommette certainement fracturée et peut-être une côte fêlée. » Si j’en crois le sifflement bizarre quand elle respire.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« Oh mais je sais. L’argent rentrera pas dans tes poches. C’est comme ça que je me rembourserai. » elle se contente d’hocher la tête, ouais, c’est sans doute un truc qu’elle peut faire vu là où elle bosse. Ce qui signifie aussi que techniquement elle est coincée d’une certaine manière. Ou alors c’est sa parano qui refait des siennes, comme d’habitude. Quel bordel, quel bordel. « Rentre plus en contact avec ce type. Je m’en occupe. » « Je comptais pas tellement le revoir. » du moins pas volontairement. Remarque c’était déjà le cas la première fois et ça a pas super bien fonctionné. « Quel abruti. » cette fois c’est sûr, elle le connaît et Spencer n’est pas certaine d’avoir envie de savoir comment ou pourquoi. Avoir pris le bon prénom parmi les deux proposés, c’était pas qu’un simple coup de chance, y a vraiment un truc qui dépasse la blonde qui est en train de se jouer et ça fait trop de données à prendre en compte, surtout vu l’état de ses capacités cognitives. « T’as pas envie de savoir ce qu’il a fait de ces informations… » techniquement ouais, elle s’en fout. Ça a vite fait piqué sa curiosité mais ça a pas tellement travaillé sa conscience de savoir comment ces renseignements seraient mis à profit. Elle avait son argent, lui ce qu’il voulait et ils pouvaient chacun repartir dans leur coin sans se soucier des affaires de l’autre. « Mais si t’avais ouvert un journal, t’aurais vu qu’il a tenté de descendre un type, à ce putain de mariage. Félicitations, petite soeur. » il lui faut quelques instants pour procéder l’information et rassembler tous les morceaux. C’est pas tant qu’elle a pas compris ce que Raelyn vient de dire, c’est surtout qu’elle réalise seulement l’endroit où ça a eu lieu et qu’elle a jamais fait le rapprochement avant. Égoïstement, elle se fiche bien de savoir qui a été visé, non, ce qui l’inquiète c’est que le vignoble est le lieu de travail de Mac. A l’époque où elle a partagé les informations, elle n’en savait rien, bien sûr. « Quoi ? » c’est tout ce qu’elle réussit à sortir tant elle se sent nauséeuse. Et d’un coup d’un seul, elle s’en fout vachement moins. Et c’est tout, plus rien si ce n’est le regard bas et une sensation familière qui lui tord les entrailles. « Comment tu le connais ? » elle se doute bien qu’elle n’aura aucune réponse, mais elle ne peut s’empêcher de quand même poser la question.

Elle essaie de se défendre sur ses réserves et cette fois Raelyn la croit. Ou au moins elle fait semblant de le faire, sans doute pas plus intéressée que ça pour se battre contre une tête de mule ou devoir retourner un appart complet pour trois pilules restantes. « Si tu sais, arrête de poser des questions stupides. » c’est à peine si elle réprime un soupir, Spencer. Comme d’habitude elle fait la grande, elle fait celle qui sait et qui a toutes les cartes en main pour s’en sortir et garder la tête haute. Sauf que vu l’état de sa tronche et de sa vie actuellement, c’est tout sauf un un fait avéré. Elle est en chute libre et à chaque fois qu’elle tente de se remettre sur le droit chemin elle dérape d’une manière ou d’une autre. Arrivera bien un moment où elle aura épuisé son capital chance pour de vrai et où les choses ne seront plus rattrapables du tout. « Tu sais pas à quoi t’attendre, gamine. Tu t’injectes des merdes dont tu connaîs pas les effets de bords. Ça donne pas envie de te faire confiance. » revoilà le surnom de gamine qu’elle déteste tant, Spencer. Pourtant c’est tout ce qu’elle est, à agir comme elle le fait. Aucune réflexion, rien du tout. Elle agit, foire et se bouffe les conséquences derrière sans pour autant rien assumer. Ça a toujours été comme ça sans que ça la fasse jamais réagir. Et ça lui a tellement bien réussi jusque là. « Je veux rien. J’attends rien de toi, Spencer. Je le fais pas pour que tu me doives une faveur ou pour m’acheter ta reconnaissance éternelle. Je le fais parce que la prochaine fois il te laissera pas t’en tirer avec des hématomes, une pommette certainement fracturée et peut-être une côte fêlée. » un peu inconsciemment, elle redresse un peu les épaules, juste histoire de dire “je vais bien”. Et forcément, ça lui fait mal. « Y aura pas d’prochaine fois parce que c’le seul con à qui je dois de l’argent. » enfin à qui elle doit autant d’argent en tout cas. Les autres sont assez insignifiants pour qu’elle ait pas peur d’eux ou qu’elle puisse se démerder. « Putain j’sais vraiment pas comment j’en suis arrivée là. » qu’elle souffle en se massant le front. « J’te les rendrai. J’sais pas comment ou quand mais- » ah bah voilà, c’est sans doute exactement comme ça qu’elle s’est retrouvée dans ce genre de situation au départ. « J’essaye d’faire mieux j’te jure. » un pas en avant, cinq en arrière, ça devient compliqué à la longue.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell - janvier 2022

« Je comptais pas tellement le revoir. » Et ça, c’est peut-être la chose la plus censée qu’elle ait dit depuis le début de la conversation, ma petite soeur. Passons sur le fait que, sans moi, il aurait continué de la chercher pour lui filer autant de raclée qu’il en aurait fallu pour qu’elle lui rende son argent ou, plus probablement, qu’elle finisse par crever à cause d’un coup trop fort : jamais Spencer n’aurait été capable de rembourser ce genre de somme d’argent. Et Otto n’est pas un tendre : il ne l’a jamais été et ses actes parlent d’eux-même. « Quoi ? » J’aurais pu me taire : mais je considère que pour grandir, il faut ouvrir les yeux sur les conséquences de ses actes. Et ceux de Spencer auraient pu contribuer à la mort d’un type, si l’italien était un meilleur tireur. Je doute que ce soit anodin pour la petite blonde. « C’est ce qu’on gagne à faire confiance à un inconnu et à faire ce qu’il vous demande sans poser de question. » Parce que c’est facile, de fermer les yeux et de se répéter qu’on a rien fait de mal. « Comment tu le connais ? » Je réfléchis à la réponse à apporter à cette question, et je me décide finalement pour la vérité. Une vérité qui manque de détails certes, mais qui n’en reste pas moins une. « Il bossait pour moi, autrefois. » Officiellement, il bosse toujours pour moi puisque le Club n’accepte pas une simple lettre de démission ou bien une désertion. Mais Otto, il est officiellement employé par le casino. Peut-être l’a-t-elle rencontré alors qu’elle traînait autour du bâtiment ? « A l’Octopus. Il bossait à l’Octopus avant toute cette histoire. Pas vraiment notre meilleure recrue. » Puisqu’il a été assez con pour monter seul ce genre de plan, tout ça pour rater son coup.

« Y aura pas d’prochaine fois parce que c’le seul con à qui je dois de l’argent. » J’ai du mal à y croire parce que je sais ce que c’est que de d’avoir une addiction compliquée à financer. « Vaudrait mieux pour toi. Ce genre de types te laisse rarement t’en sortir avec des excuses, même sincères. » Surtout pour ce genre de montant. Ma curiosité est piquée : pourquoi Otto aurait-il fait appel à une gamine dans le genre de ma demie-soeur pour se renseigner sur le mariage du fils de Saül Williams ? « Putain j’sais vraiment pas comment j’en suis arrivée là. » Je laisse échapper un rire sarcastique, et je me laisse tomber sur l’un des fauteuils. « Je peux t’éclairer, si y’a que ça. » Je frotte mes yeux, en repensant au nombre de fois ou je me suis procurée de quoi m’acheter ma dose de façon non conventionnelle. « J’te les rendrai. J’sais pas comment ou quand mais- » - « J’y compte bien. C’est pas un cadeau. » Il serait empoisonné et il ne lui apprendrait rien. Je serai une créancière aussi implacable que Otto, en moins violente. « J’essaye d’faire mieux j’te jure. » Je sors une cigarette de mon sac, ainsi que mon briquet, et je l’allume avant d’expirer tout l’air dans mes poumons, en l’observant avec gravité. « Je te crois. » Mais je suis pas certaine qu’elle en soit capable. Pas pour l’instant et pas sans aide. Ma cigarette terminée, je l’écrase dans le cendrier - qui contient seringues et restes de poudre - avant de me relever. « Commence par traîner ton cul au boulot demain. Je veux pas qu’on vienne encore me demander où t’es et ce que tu fous. » Les gens ont vite compris que nous avions un lien de parenté et, elle, elle a de l’argent à gagner pour honorer ses dettes. « Et apprends la leçon : emprunte pas plus d’argent que tu peux en rembourser, surtout pas à ce genre de type. Enfin, si tu veux rester en vie. » Prête à quitter, l’appartement, je m’arrête au dernier moment pour lui prodiguer un dernier conseil, un que je ne pensais jamais donner à quelqu’un, autrefois. « Et trouve quelqu’un. Une personne qui viendra frapper à ta foutue porte à n’importe quelle heure parce qu’elle s’inquiète pour toi. » Elle et moi, on a jamais vraiment pu compter sur notre cellule familiale. Moi, je me suis donc fabriquéé la mienne.