Ce soir, Lexie sort. Elle est incapable de rester chez elle un soir de plus, incapable de supporter le silence, le vide, la solitude qui l’entourent. Elle a besoin de voir du monde, de danser, de boire, voire de prendre un peu de cocaïne pour oublier sa vie et son quotidien, et pour chasser ses démons. Et peu importe si demain elle arrivera au boulot en retard, ou avec la gueule de bois. Peu importe si demain, elle risque de perdre le job qu’elle a trouvé il y a seulement quelques semaines. Elle a été engagée en qualité de pigiste dans un petit journal qui couvre des événements du Queensland mais, pour l’instant, on la sollicite seulement pour aller faire du café. Depuis qu’elle a décidé de préparer le pire jus de chaussettes qu’ils aient pu déguster, ils se contentent de l’appeler pour faire des photocopies … et Lexie ne compte pas ce changement de responsabilités comme une promotion. Elle enfile une minuscule robe bleu électrique qui dévoile ses longues jambes, laisse ses cheveux ondulés tomber en cascade sur ses épaules, puis saute dans un taxi. Après quelques échanges de SMS avec des potes de soirée – non, ce ne sont pas des amis, juste des gens avec qui elle tue le temps, le soir, à boire, rigoler et danser, sans jamais rien aborder de profond ou de personnel -, Lexie se dirige vers un bar branché du centre-ville. Les jeunes qu’elle fréquent sont installés dans le carré VIP, et elle les rejoint, les saluant d’un signe de la main et d’un sourire. Lexie n’est pas du genre à faire la bise ou à apprécier toute sorte de contact ou d’effusion, à moins qu’elle ne cherche à draguer quelqu’un. Elle voit les habitués, Josh, le farceur, Leila, la déjantée, Jack, celui qui ne danse jamais … Il y a aussi Alba, une brunette venue de Londres, si elle se souvient bien – pas que ça l’intéresse le moins du monde -, et qui semble vouloir rejoindre leur petite bande depuis quelques temps. Les nouveaux venus indiffèrent Lexie. Si la brunette aime être entourée pour tromper la solitude, elle n’est pas très sociable, et se fiche de se faire des amis. Elle ne parle pas d’elle, de sa vie privée, de son job, et attend des gens qui lui tiennent compagnie qu’ils fassent de même. Lors de la dernière soirée, Alba avait tenté de se rapprocher de Lexie et cette dernière avait simplement montré de l’agacement et du dédain. Ce soir ne ferait pas exception au comportement indifférent de la brunette.
Après s’être réchauffée le corps et l’esprit avec deux verres de vodka, Lexie rejoint la piste de danse, se déhanchant au rythme de la musique. Elle ne rejoint à nouveau leur table que lorsqu’elle voit arriver Pete, un jeune dealer qui la fournit régulièrement en cocaïne. L’échange est discret, il ne dure que quelques secondes, et pourtant, il ne fait aucun doute pour ceux installés autour de la table que Lexie a acheté quelques grammes de coke à Pete. La jeune femme se fait discrètement un rail qu’elle consomme immédiatement, puis range le petit sachet contenant encore de la poudre dans son sac. Lorsqu’elle relève la tête, son regard bleuté croise celui d’Alba qui la fixe, et elle hausse un sourcil, comme pour lui rendre son air interrogatif.
J’en avais clairement plein le cul des cours et des révisions. J’avais passé la semaine à bûcher le droit immobilier, le code monétaire et financier et les droits des successions. Mon cerveau semblait prêt à dégueler cet amas de jurisprudence et de loi. Il fallait que je prenne un break. Et quel meilleur break qu’une soirée entre potes ? Ce n’était clairement pas la meilleure des idées : j’allais probablement finir dans un état pitoyable, me coucher tard et me réveiller avec une gueule de bois carabinée. Je n’avais qu’à faire l’impasse sur mon cours magistral de demain matin. Après tout, je le méritais bien, non ? Je reçus un texto d’un des membres de l’équipe, précisant qu’ils seraient ce soir dans une boîte huppée des beaux quartiers. C’était parfait. Je n’était pas regardante sur les lieux où je passais mes soirées - notamment lorsque j’étais bien attaquée - mais il était toujours plus plaisant de se retrouver dans des endroits avec un peu de classe. J’entrepris de me préparer. Je soignais mon maquillage, relevais mes cheveux en une queue de cheval haute et plaquée et enfilai mon ensemble tailleur-pantalon de chez Gucci, mon dernier craquage en date. Beaucoup se posaient des questions sur le fait qu’une étudiante porte des fringues de couturier, possède des sacs de luxe, se déplace en taxi et vive dans un loft avec une vue imprenable sur Spring Hill. C’était le seul avantage qu’il me restait d’être une Coalman. S’il m’avait chassé sans ménagement, mon père n’aurait pas supporté l’idée de me faire vivre dans la misère, il continuait donc à subvenir à mes besoins - et au-delà d’ailleurs. Et tant pis si cela faisait parfois courir la rumeur que j’étais une poule de luxe ou une de ces vulgaires sugar baby. Je retrouvais donc Josh, Leila et Jack au milieu du carré VIP, plusieurs bouteilles étaient déjà posées sur notre table. Je me servis une coupe de champagne, que je descendis d’un trait après avoir trinqué avec tout le monde. Je me balançais nonchalamment d’un pied sur l’autre, au rythme de la musique tout en tentant de déchiffrer les paroles des uns et des autres au milieu du vacarme de la musique. Une autre fille arriva. Lexie. L'oiseau sauvage. Nous nous étions déjà croisées, mais la brune n’avait daigné m’adresser la parole malgré mes tentatives - un peu lourdes, certes après plusieurs verres. Je n’étais pas d’humeur à me prendre un vent à nouveau, j’avais d'autres chats à fouetter, mais je la saluai quand même poliment. Elle ne semblait pas méchante mais assez solitaire. Elle ne fit absolument pas attention à moi, descendant ses verres de vodka et dansant sur la piste, comme si elle n’était pas vraiment avec nous. Je la regardais du coin de l'œil, de temps à autre. J’avais un peu de mal avec ses filles qui ne semblaient avoir aucun esprit de sororité mais je ne m’en offusquais pas pour autant. Je continuai de l’observer, un peu sans le vouloir, quand Pete arriva. Pete était connu comme le loup blanc, dans la bande. Il fournissait allègrement ceux qu’ils le voulaient en ce qu’ils voulaient : cocaïne, ecsta, MD. Le bonheur se trouvait dans les poches de Pete. Je remarquai que Lexie lui achetait de la conso, sans la juger pour autant. J’aurais été une langue de vipère si tel était le cas : je faisais exactement la même chose. Je ne tarda d’ailleurs pas à lui acheter de la cocaïne à mon tour. Je la déposai précieusement au fond de mon sac lorsque je vis Lexie s’enfiler un rail discrètement. Nos yeux se croisèrent à cet instant. — A ta santé ! criai-je en me touchant discrètement le bout de la narine du bout du doigt. Je m'approchai d’elle et lui glissa dans l’oreille : — On s’en fait un ensemble si tu veux ? Je n’attendis pas sa réponse et me levai pour me diriger vers les toilettes, dans l’espoir qu’elle m’emboite le pas. Je n’aimais pas faire cela en public, au risque de me faire voir par un copain de classe ou un, qui sait, par un prof. Il valait mieux ne pas tout mélanger.
Laueee
Dernière édition par Alba Coalman le Lun 14 Fév 2022 - 10:55, édité 2 fois
Lexie ne prête plus attention au monde qui l’entoure, elle est dans sa bulle, sur la piste de danse. Elle laisse les pulsations des basses envahir son corps, la vodka se répandre doucement dans ses veines, et se déhanche au rythme de la musique. Son regard croise celui d’Alba à deux reprises. A chaque fois, elle hausse un sourcil, intriguée, et bouge un peu plus sensuellement, curieuse de voir la réaction de la nouvelle. Si Lexie n’en a que faire de son amitié, elle n’est pas insensible à ses charmes et, l’alcool aidant, se dit qu’elle finirait peut-être bien la soirée dans son lit. L’arrivée de Pete la tire de ses pensées, et Lexie quitte la piste de danse pour aller acheter au fournisseur des jeunes des beaux quartiers de quoi égayer un peu plus cette soirée. Elle se fait discrètement un rail sur la table basse, entre deux verres, puis croise à nouveau le regard d’Alba.
« A ta santé ! »
Lexie fronce les sourcils, suspicieuse. Elle se doute qu’Alba ne va pas se lever pour crier à toute la boîte qu’une nana vient de sniffer un peu de cocaïne. Elle se doute qu’elle ne va pas aller tout balancer chez les flics. Mais la brunette est d’un naturel méfiant, et pour l’instant, elle a du mal à cerner cette nouvelle venue, surtout qu’elle ne l’a vu consommer. Mais Alba se rapproche d’elle et lui glisse à l’oreille.
« On s’en fait un ensemble si tu veux ? »
Et sans attendre la réponse de Lexie, elle se lève et se dirige vers les toilettes de la boîte de nuit. Un petit sourire vient illuminer le visage de la brunette : voilà qui promet d’être agréable et qui l’intrigue au plus haut point. Alors elle se lève à son tour et rejoint Alba quelques minutes plus tard. Elle s’approche à son tour, la frôle et lui murmure à l’oreille.
« Alors ? Tu penses à quoi ? »
Parce qu’elle a envie de jouer, et qu’elle a envie de la tester. Elle ne sait ce que la petite nouvelle a dans le ventre, ni ce qu’elle aime. Mais après tout, pourquoi pas lui laisser le bénéfice du doute ? C’est beaucoup plus simple à faire pour Lexie, maintenant que le premier rail de cocaïne commence à faire effet, à lui donner un sentiment de toute puissance, et lui fait croire que rien ne lui résistera. Elle est belle, elle est charmante, elle peut avoir ce qu’elle veut. Ses grands yeux bleus pétillent alors qu’ils plongent dans ceux d’Alba, tels un océan agité par une tempête intérieure. Ses longs cheveux bruns lui arrivent jusqu’à la poitrine. Les ondulations, qui captent la lumière des lieux à chaque mouvement de la brunette, donnent à sa chevelure des reflets dorés. Les pointes brunes viennent caresser ses épaules et lui chatouiller le dos. Ses longues jambes, fines, sont délicieusement mises en avant par la minuscule robe pour laquelle elle a opté. Son mètre 70 est réhaussé par les hauts talons, qui lui font encore gagner quelques centimètres. Le tissu moule ses hanches parfaitement dessinées. Le décolleté en dévoile quant à lui juste assez d’une petite poitrine, qui promet cependant bien de l’amusement. Alors qu’elle tourne autour d’Alba, le petit nez pointu de Lexie hume le parfum de la brunette. Sa bouche, fine et grande, s’entrouve légèrement pour laisser passer un petit soupire. Et sa peau laiteuse, réhaussée par quelques paillettes qui la font briller par endroit et qui attirent le regard sur ses courbes délicieuses, se met à frissonner alors qu’elle frôle Alba. Lexie est belle, ce soir plus que jamais, alors que la cocaïne coule dans ses veines. Et elle est prête à s’amuser.
La musique est assourdissante. L’alcool, fort. Et j'espérais que la cocaïne le soit tout autant. Je ne me faisais néanmoins pas de soucis, Pete était du genre à fournir des produits de qualité. Il ne nous avait jamais déçu jusqu’à présent. Je le remerciais en glissant le petit pochon de poudre blanche au fond de mon sac. Nous étions plusieurs à consommer différentes substances illicites dans la bande, mais la plupart préféraient le pouvoir euphorisant et libérateur des ecsta, alors que j’aimais le sentiment de puissance et de contrôle que me procurait la cocaïne. Tout comme Lexie apparemment. Je remarquais immédiatement lorsqu’elle prit discrètement un rail, en plein de la boîte. Cette nana n’avait pas froid aux yeux. Ça me plaisait. Même si je n’aurais jamais osé faire de même, c’était bien trop risqué. Je l’invitais donc à me suivre, histoire de prendre un rail ensemble. Je ne savais pas trop pourquoi je tenais tant à passer du temps avec cette fille. Elle ne paraissait pas des plus amicales et semblait assez froide. Mais depuis la première fois que je l’avais vue, quelque chose en moi me faisait dire qu’il fallait creuser un peu plus. Un sentiment étrange, un feeling. Je jetais un coup d’oeil discret derrière moi lorsque je pris le chemin des toilettes. Un sourire de satisfaction s’étira sur mes lèvres lorsque je remarquais qu’elle me suivait. Elle s’approcha de moi et souffla au creux de mon oreille. — Alors, tu penses à quoi ? Je sursautai légèrement. J’haussai les sourcils mais, derrière moi, elle ne pouvait pas le voir. Je me repris et affichais à nouveau un sourire sur mes lèvres. — Juste à s’amuser un peu. On prend un rail, on danse, on boit. On en reprend un et ainsi de suite. Ça te va ? je lui demandai sur un ton taquin. Tout dans sa manière d’agir trahissait son envie de plaire. De me plaire ? Peut-être. Elle était jolie, c’était indéniable. Mais je n’étais pas encore assez ivre ou défoncée pour envisager de rentrer dans un jeu de séduction avec elle. Il m’était arrivée plus d’une fois de jouer de la sorte avec une femme, mais jamais quand j’avais les idées claires. Je n’aimais pas réellement les femmes. Ou du moins, je me persuadais de ne pas les aimer. Arrivée aux toilettes, je nous enfermait toutes les deux à l’intérieur et entrepris mon petit rituel. Je sortis le petit pochon du fond de mon sac et en vidait un peu de son contenu sur un petit cahier que je trimballai partout mais dans lequel je ne notais jamais rien. Je traçais deux lignes, une pour moi, une pour Lexie, de même longueur. Je roulais ensuite un billet de dix dollars et le tendit à Lexie. — A toi l’honneur, lui dis-je. Je la regardais faire et une fois mon tour venue, j’insérais ma paille de fortune à l’entrée de ma narine et penchais la tête en avant. Au moment où j’inspirais, j’entendis des coups tapés fortement à la porte. Je relevai la tête d’un coup. — Dégages ! criai-je à la personne de l’autre côté de la porte, probablement impatiente. — Je sais pas ce que vous foutez là dedans, mais les flics viennent de faire une descente dans la boîte. nous pressa la voix. Mes yeux s’écarquillèrent en rond. Je regardai Lexie, un peu paniquée. Si jamais les flics me trouvaient là, le nez plein de coke, j’allais avoir de sérieux ennuis. — Qu’est ce qu’on fait ? je demandai, autant à elle qu’à moi. Il fallait que je me sépare de la came, je le savais, mais je n’en eu pas le réflexe. J’aurais voulu en profiter un peu plus longtemps. Je venais tout juste de l’acheter, après tout. Je commençai sérieusement à paniquer
Elle la fait rire, Alba, finalement. Peut-être est-ce la drogue qui commence à faire effet et à faire tourner la tête de Lexie ? Ou peut-être est-ce le charme de la petite brune ? Ou encore le fait qu’elle sursaute lorsque la Walker s’approche d’elle, sans doute beaucoup près pour que son comportement soit innocent.
« Juste s’amuser un peu. On prend un rail, on danse, on boit. On en reprend un et ainsi de suite. Ca te va ? »
Lexie ne peut s’empêcher de rire. Elle est mignonne, cette petite, à proposer une soirée classique, alors que la brune rêve de tellement plus. Finalement, elle ne sait pas trop ce que les autres du groupe lui trouvent. Elle semble quelconque. Elle est mignonne, certes. Mais elle ne va pas au bout des choses, et c’est dommage. Car Lexie en attendait beaucoup plus. Pourtant, puisqu’elle est là, et qu’elle se fait ouvrir de la cocaïne, elle ne va pas refuser.
« Allons-y. »
Alba trace deux lignes et tend une paille de fortune à Lexie.
« A toi l’honneur. »
La brunette ne se fait pas prier, puis tend la paille à Alba pour qu’elle puisse sniffer la cocaïne à son tour. Au moment où cette dernière relève la tête, des coups résonnent contre la porte.
« Dégages ! » « Je sais pas ce que vous foutez là dedans, mais les flics viennent de faire une descente dans la boîte. »
Lexie déglutit difficilement. Putain de merde. Elle avait un sachet de cocaïne dans son sac à mains : elle était foutue. Il fallait qu’elle aille le récupérer et qu’elle s’en débarrasse avant qu’on ne fouille son sac. La cocaïne commençait heureusement déjà à faire effet, et elle se sentait toute puissante, et ultra intelligente. Elle allait se sortir de cette mauvaise passe, elle en était convaincue. Alba, elle, ne semblait pas sur la même planète. Les yeux écarquillés, elle semblait complètement paniquée.
« Qu’est-ce qu’on fait ? »
Lexie pinça les lèvres et pencha la tête sur le côté, l’air de dire « sérieux ? ». Elle lui aurait bien collé deux baffes pour lui remettre les idées en place, mais se dit que le mieux à faire était de laisser le temps à la cocaïne de faire son effet pour Alba. De son pouce, elle lui essuya le léger surplus de cocaïne autour de son nez, puis plongea son regard azur dans celui de la petite brune.
« Ecoute moi bien. Tu vas jeter ça, immédiatement. »
Elle désigna d’un signe de tête la drogue qui restait dans la cabine.
« Ensuite, on va retourner dans la pièce principale. J’ai de la drogue dans mon sac. Tu dois m’aider à m’en débarrasser. Tu penses que tu peux y arriver ? »
Elle attendit qu’Alba reprenne ses esprits, exécute les premiers ordres, puis sortit pour rejoindre le carré VIP. Des policiers avaient en effet envahi tout l’établissement. Lexie se rapprocha de son sac mais fut incapable de l’atteindre avant qu’un flic ne lui barre le passage. Elle n’était qu’à quelques centimètres. Tout ce dont elle avait besoin, c’était d’une diversion pour attraper son sac et jeter le sachet plus loin sur le sol. Là, il y aurait certes de la cocaïne sur le sol, mais on ne pourrait en attribuer la provenance. Lexie regarda le policier qui venait de s’interposer entre elle et son sac et lui sortit son plus beau sourire, ainsi que son meilleur air innocent.
« La police ? Monsieur, je vous admire, sincèrement. Faire un tel métier, si dangereux, et si capital pour notre société ! Je suis ravie que vous soyez ici pour assurer notre sécurité, vraiment. J’aime la police ! »
Elle résista à l’envie d’éclater de rire, espérant avoir réussi à jouer la comédie convenablement.
La panique m’avait gagné. Je me sentais minable, mon billet roulé dans une main, de la poudre encore plein le nez, droite comme un piquet à côté du toilette. Sur mon visage figurait l’expression d’un petit lapin apeuré. On aurait dit une gamine. Les seuls mots qui sortaient de ma bouche étaient pour demander ce qu’on allait faire. Quelle conne. Comment pouvais-je être à la fois si sûre de moi en temps normal et me comporter comme une trouillarde face à cet évènement ? Je sondais le visage de Lexie, qui semblait beaucoup plus déterminée que moi en cet instant. De son pouce, elle m’essuya la narine, pour enlever toute trace du rail que je venais de me faire. Ce geste, un peu maternel, m’emplit d’une étonnante chaleur. — Ecoute moi bien. Tu vas jeter ça, immédiatement. m’ordonna t-elle. Je hochai la tête, sans un mot. A contre-coeur, je pris le petit sachet, encore bien rempli, pour le jeter au fond de la cuvette. Je tirai la chasse d’eau avec une pointe de regret. — Ensuite, on va retourner dans la pièce principale. J’ai de la drogue dans mon sac. Tu dois m’aider à m’en débarrasser. Tu penses que tu peux y arriver ? me demanda-t-elle, visiblement peu confiante en moi, vu la tronche que je tirais. — Ouais… soufflai-je. Ouais, ouais. C’est juste que je suis pas super à l’aise quand il s’agit de faire face aux flics. marmonnai-je. Je me gardai bien de lui donner l’explication à tout ça. La dernière fois que j’avais eu à faire à la police, j’avais failli prendre pour dix ans, si ce n’est plus… Nous finîmes par sortir de notre tanière, si on pouvait l’appeler de la sorte. Lexie ouvrit la marche d’un pas assuré. Sur ses talons, je tachais de me donner un peu plus de contenance. La salle était pleine de flics, la musique s’était arrêtée et je voyais plusieurs personnes tendre leur papiers aux pervenches. Absorbée dans ma contemplation, la brune m’avait devancé de quelques pas. Je relevais les yeux et je la vis nez à nez avec l’un d’eux. Je l’entendis faire un petit speech témoignant son amour pour les uniformes bleus marine. Je compris rapidement que c’était à mon tour de jouer. Alors qu’elle distrayait le policier qui voulait nous contrôler, je zigzaguai discrètement vers le carré VIP, où nous nous trouvions quelques minutes plus tôt. Je repérai facilement le sac de Lexie, l’ayant vue cacher la drogue dedans. En tâchant toujours de rester discrète, je récupèrai le pochon, non sans mal, et le balancai sous la banquette en faisant mine de réajuster ma chaussure. La cocaïne semblait faire son effet, d’un coup je me sentais en confiance et prête à écraser tout, et tout le monde. Je m’approchai à nouveau de Lexie et du policier, visiblement prêts à se lancer dans une joute verbale. — Lex ! T’étais où, je te cherchais ? Ca fait vingt minutes que je fais le tour avec ton sac sur les bras ! mentis-je en lui tendant. Le policier me jeta un regard douteux. Ses yeux allaient du sac à mon visage, en passant par celui de ma compagne d’infortune. — Un problème, Monsieur l’agent ? roucoulai-je en battant des cils. Nous allions justement partir, y voyez-vous un inconvénient ? Je jouais là à un jeu dangereux. Ou je passais pour la gentille petite bourgeoise qui ne voulait pas se mêler à cette misérable scène, ou je passais pour une coupable tentant de masquer son crime. Je tentais de déchiffrer l’expression du flic qui resta muet un moment, nous laissant toutes deux dans l’immobilité la plus totale. — Je vais fouiller vos sacs, Mesdemoiselles. indiqua-t-il d’un ton autoritaire. — Est ce vraiment nécéssaire ? soupira-je. Non, mais, je veux dire, regarder nous ! Nous sommes juste deux copines venues prendre un verre dans un endroit sympa. J’en faisais clairement trop, mais je savais qu’il n’aurait pas matière à nous embarquer. Je fis tout de même un petit signe de tête discret à Lexie, pour lui signaler que tout était sous contrôle. D’un air résigné, je tendis la première mon sac hors de prix au flic. Je croisai les bras, faisant mine de m’impatienter.
Alba semble perdue, et nul doute que la drogue n’a pas encore fait effet pour elle. Elle reste figée, et Lexie soupire en prenant les choses en mains, donnant une succession d’ordres simples à la jeune femme, qui finit par s’exécuter.
« Ouais … Ouais, ouais. C’est juste que je suis pas super à l’aise quand il s’agit de faire face aux flics. »
La brunette hausse un sourcil, observe Alba avec curiosité, mais n’a pas le temps de l’interroger. En réalité, elle non plus n’est pas très à l’aise avec les policiers, vu le nombre de fois où elle enfreint la loi, soit plusieurs fois par semaine. Elle se demande si le malaise de l’anglaise est plus profond, ou si c’est juste dû à ce métier que trop peu reconnaissent à sa juste valeur. Cette conversation devra cependant attendre, Lexie quittant les toilettes pour rejoindre la salle principale, Alba sur ses talons. Elle voudrait rejoindre son sac, mais un policier l’arrête. Elle le complimente sur les missions qu’il exerce, en faisant sans doute trop, espérant qu’Alba profite de la distraction pour vider son sac. Elle sursaute presque lorsque la petite brune se matérialise à ses côtés.
« Lex ! T’étais où, je te cherchais ? Ca fait vingt minutes que je fais le tour avec ton sac sur les bras ! »
Lexie réprime un sourire, comprenant que la cocaïne a enfin pris possession du corps d’Alba, qui semble avoir repris confiance en elle. Elle aimerait être rassurée, qu’elle lui confirme avoir débarrassé son sac de la marchandise, mais se contentera de lui faire confiance. Alors elle rentre dans son jeu, joue la comédie, comme elle sait si bien le faire –des années de pratique à mentir aux convives et à feindre l’intérêt lors de galas ou autres soirées mondaines.
« Je t’ai dit que j’allais aux toilettes, et tu sais qu’il y a toujours une file d’attente ! »
Son ton est faussement agacé, alors qu’elle reporte son attention sur le policier qui les dévisage.
« Un problème, Monsieur l’agent ? Nous allions justement partir, y voyez-vous un inconvénient ? »
Elle bat des cils, et Lexie se retient d’exploser de rire. Finalement, cette brunette a beaucoup de piquant, et lui plait bien. Mais le policier n’en est pas à coup d’essai et il ne se laissera pas berner si facilement.
« Je vais fouiller vos sacs, Mesdemoiselles. » « Est-ce vraiment nécessaire ? Non, mais, je veux dire, regarder nous ! Nous sommes juste deux copines venues prendre un verre dans un endroit sympa. »
Pourtant, elle lui tend son sac et rassure Lexie : ils sont bien vides, et le policier ne trouvera rien. Il effectue une fouille minutieuse, puis se tourne vers la jeune Walker, tendant la main vers elle.
« Votre sac, Mademoiselle. » « Non. »
Elle a tort, elle le sait. Elle ne devrait pas jouer avec le feu, va finir par être embarquée par l’équipage qui a fait cette descente. Et pourtant, c’est plus fort qu’elle, elle a envie de les défier, de montrer sa supériorité.
« Non ? Vous voulez que je vous embarque ? » « Et pour quel motif, Monsieur l’agent ? »
Elle pousse le bouchon trop loin, elle le sait, et pourtant, elle ne peut s’en empêcher.
« Vous ne pouvez fouiller mon sac qu’avec mon accord, ou en cas de flagrant délit. Je refuse de vous donner mon accord, et vous n’avez rien pour motiver un flagrant délit de ma part. Alors je crois qu’on va simplement faire ce que suggérait mon amie et s’en aller. »
Elle lui adresse un sourire victorieux, consciente d’avoir tort sur toute la ligne de pousser à bout ce policier, mais c’est plus fort qu’elle. Elle passe son bras sous celui d’Alba et commence à diriger vers la sortie, espérant que les flics ne les retiennent pas.
Notre petit manège semblait bien marcher. Alors qu’elle distrayait le flic en lui racontant des bobards, j’avais eu le temps de balancer la came sans me faire voir. Je reviens alors près d’elle, en faisant semblant de l’avoir cherché pendant un moment. — Je t’ai dit que j’allais aux toilettes, et tu sais qu’il y a toujours une file d’attente ! s’exclama-t-elle, faisant mine d’être agacée. Je haussai alors les épaules, un faux air désabusé sur mon visage. Je me retournai ensuite vers le flic, lui demandant innocemment ce qu’il voulait. Sans surprise, il voulait fouiller dans nos sacs. Docile, je lui tendis le mien avec un sourire. Mais je ne pu m’empêcher de m’étonner lorsque Lexie refusa. Bordel, à quoi jouait elle ? Le but était pourtant de ne pas faire de vagues. J’avais peut-être peu souvent eu affaire à la police mais je savais très bien que jouer aux cons avec les agents n'attirait en général rien de bon. — Vous ne pouvez fouiller mon sac qu’avec mon accord, ou en cas de flagrant délit. Je refuse de vous donner mon accord, et vous n’avez rien pour motiver un flagrant délit de ma part. Alors je crois qu’on va simplement faire ce que suggérait mon amie et s’en aller. J’ouvris grand les yeux en entendant ses paroles et je ne pu me retenir de sourire. Cette meuf avait une sacrée paire de couilles, je devais l’avouer. Le flic ne semblait toutefois pas de mon avis. Il fronçait les sourcils. — J’ai fait des études de droit, j'ajoutai rapidement avant qu’il ne puisse l’ouvrir. Et mon amie a raison. Avez vous donc quelque chose à nous reprocher, Monsieur l’agent ? Il balbutia, pris de cours. Dans un soupir, il nous fit un signe de la main nous indiquant qu’il en avait fini avec nous. Lexie me pris alors par le bras, m’entrainant à l’extérieur. Une fois hors de la vue des policiers, j’éclatai de rire. — Alors toi, t’es un sacré personnage ! je m’exclamai. Je dois avouer que t’as géré sur toute la ligne, merci. Sans toi, je pense que je faisais embarquer. Je la pris dans mes bras et la remerciai une fois de plus. Alors que je relachai mon étreinte, je lui tendis mon portable. — Donnes moi ton numéro, si tu veux. On se refera une soirée à l’occasion ! Elle accepta et enregistra son numéro dans une fiche de contact. Je la saluai une dernière fois et commandai un taxi, ravie que la soirée n’ait pas tournée au vinaigre.