If you think you'll get away, I will prove you wrong. I'll take you all the way, stay another song. I'll blow you all away, it's murder on the dancefloor but you better not kill the groove  @Sergio Gutiérrez

Maze avait peur de la foule et avait tendance à s’effrayer au moindre bruissement d’ailes. Elle avait un million de problèmes à gérer et d’angoisses à calmer. Elle avait des fantômes qui la hantaient au quotidien et une tendance à se laisser de plus en plus sombrer. Alors aller dans une boîte huppée ? Quelle idée de génie pour elle, n’est-ce pas ? Mais elle avait plus que jamais besoin de se changer les idées et de retrouver un peu de celle qu’elle avait été. Où était passée la jeune femme qui travaillait dans l’événementiel ? Qui organisait des concerts ? Qui côtoyait des musiciens et des chanteurs à l’ego surdimensionnés et des agents insolents ? Qui ne refusait jamais un after ? Elle semblait avoir complètement disparu pour se faire remplacer par une pâle copie encore traumatisée par des événements dont elle n’arrivait pas à se relever. Mais rien que l’alcool ne puisse pas effacer non ? C’était de cette manière qu’elle avait décidé de raisonner ce soir en tout cas. Et c’était pour cette raison qu’elle avait déjà bu quelques verres de vin afin de se donner suffisamment de courage pour passer les portes de cette boîte de nuit. Pas le genre de boîtes où il était difficile d’avancer sans toucher un parfait inconnu en train de se déhancher sur la piste. Pas de celles où toutes les personnes présentes étaient ivres mortes (bien qu’elle aurait pu assez facilement se fondre dans le paysage si elle continuait sur sa lancée). Non. Maze avait décidé de faire un effort mais elle n’était pas non plus en mission suicide pour autant. Elle était parvenue à trouver une boîte suffisamment huppée pour parvenir à conserver un minimum son espace vital si elle en avait besoin. Les gens dansaient sur la piste mais ne se frottaient pas de manière indécente au premier venu (ils prenaient le temps de s’adresser deux trois mots avant cela, c’était toujours ça de pris). Elle pouvait se faufiler jusqu’au bar sans risquer de se faire renverser par quelqu’un, tout comme elle pouvait s’y installer sans être collée aux personnes directement à côté d’elle. Elle avait même fait un effort pour l’occasion en enfilant une robe de soirée qui lui faisait de l’œil depuis son placard depuis des mois mais dont elle avait jusqu’à présent ignoré les suppliques silencieuses. Ses cheveux lâchés et allant jusqu’à oser une légère touche de maquillage, elle s’était saisie de son verre de whisky avant de pivoter sur son tabouret pour observer les gens présents ce soir. Son ancien passe-temps favori : observer les personnes qui l’entouraient et tenter de leur inventer une histoire, de deviner qui elles pouvaient être et ce qui les avaient amenées là ce soir. Elle n’avait jamais de confirmation quant aux hypothèses qu’elle émettait, mais elle se plaisait à croire qu’il lui était déjà arrivé de ne pas trop taper à côté. Curieuse, son regard scanna la salle avant de se poser sur un homme attablé seul à quelques mètres d’elle. Ténébreux, ayant clairement quelques années de plus qu’elle au compteur qui jouaient pourtant en faveur d’un charme déjà naturel, et dégageant une certaine assurance à la fois intrigante et quelque part magnétique. Quelle pouvait-être son histoire ? Attendait-il quelqu’un ? Elle n’en avait pas l’impression. Etait-il là suite à une peine de cœur à faire passer ? Elle aurait plutôt parié sur le fait qu’il était la cause des cœurs brisés et non du côté des victimes. Est-ce qu’il était là pour…des affaires ? Avec son apparence et le charisme qu’il dégageait sans même prononcer un seul mot, il aurait parfaitement pu être le gérant de cet endroit. Alors qu’elle était perdue au milieu de plusieurs hypothèses toutes plus crédibles les unes que les autres, le regard de l’inconnu était venu accrocher le sien. Oups. Trop tard pour se montrer discrète à présent, n’est-ce pas ? Et avant-même de vraiment réaliser ce qu’elle était en train de faire, Maze avait commandé un deuxième verre de whisky et, s’emparant de son propre verre et de sa nouvelle commande, elle s’était levée pour se diriger vers la table de l’homme. A croire que les verres de vin qu’elle avait bus avant de se rendre là ce soir avaient suffi à lui faire prendre la décision de mener cette fois-ci son enquête jusqu’au bout et de pouvoir enfin vérifier ses suppositions. Ou bien venait-elle simplement de se faire avoir par le fameux magnétisme qu’elle avait pourtant immédiatement identifié en l’observant ? Toujours est-il qu’elle déposa un verre en face de lui avant de prendre tout naturellement place à sa table. Buvant une gorgée de sa boisson, elle avait reposé son verre avant de poser son regard dans le sien. Elle respirait l’assurance pour la première fois depuis bien longtemps et c’est sans une once d’hésitation qu’elle déclara: « C’est pas très conventionnel qu’une femme vienne aborder un homme pour lui payer un verre mais…on est au vingt-et-unième siècle après tout…J’imagine qu’il est acceptable de faire bouger les lignes ? » Et puis elle avait encore le droit de faire ce qu’elle voulait. Tout comme cet homme aurait également été dans son bon droit s’il avait choisi de l’ignorer et de lui demander de quitter sa table. « Je m’appelle Maze. » Et toi John Doe ? Qui étais-tu et quels étaient tes secrets les mieux cachés ?

Qu’était-elle en train de faire exactement ? A quoi jouait-elle ? Elle n’en avait strictement aucune idée et cela lui faisait le plus grand bien. Elle avait l’impression de s’autoriser à lâcher prise pour la première fois depuis presque deux ans. Sans se préoccuper de ce qui pourrait arriver, des répercussions que ses actions pourraient avoir, de potentiels futurs regrets. Elle se contentait de se laisser guider par ses envies et de rester bien ancrée dans le présent et nulle par ailleurs. Et pour l’instant, ses envies lui dictaient d’en apprendre plus sur cet homme qui était parvenu à l’intriguer sans même prononcer le moindre mot. Ravie de constater qu’il l’acceptait apparemment bien volontiers à sa table, c’était avec un sourire entendu qu’elle était venue faire tinter son verre contre le sien avant d’y tremper ses lèvres. « Sergio. Enchanté, Maze. » Enchantée, elle l’était tout autant. Au même titre qu’elle se sentait à la fois d’humeur charmeuse, mais aussi convaincue qu’elle ne tarderait pas à être charmée. Tout était plus facile avec de l’alcool dans le sang. Pour quelle raison ne pouvait-elle pas prendre les décisions du quotidien en laissant une pointe d’ivresse s’inviter ? Cela lui réussissait plutôt bien jusqu’à présent. Bien plus que toutes les fois où elle avait fini par s’éclipser complètement tétanisée de bars et autres lieux trop fréquentés pour sa peur parfois panique de la foule. Mais ce soir, c’était différent. Elle ne savait pas si l’alcool avait déjà fait rétrécir son champ de vision de façon à effacer les personnes autour d’eux, ou bien si Sergio parvenait tout simplement à capturer toute son attention en lui faisant occulter tout le reste, mais quelle que soit la raison, Maze s’en satisfaisait. « Alors, de quoi il s’agit ? Une soirée à tuer ? Un rencard qui ne s’est pas pointé ? » Elle reporta un instant son regard sur son verre alors que cette dernière question étira mystérieusement le coin de ses lèvres. S’il savait. Cela faisait un moment que Maze n’avait pas été portée sur de quelconques rencards, trop occupée qu’elle était à se satisfaire d’une solitude rassurante. Mais ça n’était résolument pas l’image qu’elle donnait ce soir-là. Elle respirait l’assurance et la confiance en elle. « Une peine de cœur à essuyer ? Généralement, c’est mieux d’attendre le deuxième ou troisième rencard pour parler de son ex. » Elle posa son regard à nouveau dans le sien. Ca n’était pas un regard anodin et innocent. Non. Le regard qu’elle avait posé sur lui était insistant et intense. Celui de la chasseresse qui n’avait pas vraiment l’intention de repartir sans sa proie maintenant qu’elle avait jeté son dévolu sur cette dernière. Et elle n’avait aucunement l’intention de s’en cacher. « L’ex est mort et enterré depuis un certain temps, on ne craint rien de ce côté-là. » En revanche il n’en était pas vraiment de même avec l’Italien qui avait un peu trop tendance à s’immiscer dans ses pensées ces derniers temps. Mais ce dernier était en couple alors il n’avait pas voix au chapitre. Elle chassa bien vite son image pour s’ancrer un peu plus encore dans cette soirée à laquelle personne d’autre que les deux protagonistes principaux n’était invité. Elle n’avait pas de peine de cœur à essuyer, et personne ne lui avait posé de lapin. « Première proposition : une soirée à tuer. Et je pense justement avoir trouvé la meilleure façon de m’occuper. » Un sourire charmeur vint s’afficher sur ses lèvres avant qu’elle ne prenne une nouvelle gorgée de sa boisson. Elle avait l’air sûre d’elle, mais est-ce que Sergio pouvait seulement entendre son cœur qui battait à tout rompre dans sa poitrine alors qu’elle s’essayait à un jeu de séduction qu’elle n’avait pas pratiqué depuis bien longtemps ? Maze reposa son verre sur la table, ses doigts accrochés au contenant alors qu’elle profitait d’avoir les avant-bras appuyés sur la table pour se pencher et ainsi réduire quelque peu la distance qui les séparait. « Et toi, quelle est ton excuse ? Je vais pas suggérer la peine de cœur à essuyer, je n’en croirais pas un traitre mot. » Parce qu’il n’avait pas l’air d’être du genre à se laisser abattre par une quelconque histoire d’amour. Et parce qu’elle ne voyait pour l’instant pas quelle personne saine d’esprit pourrait songer à rendre sa liberté à quelqu’un comme lui. Ce qui était certain, c’était qu’elle avait bien envie de l’en priver de cette liberté. Occasionnellement. Certains soirs. Ce soir ? « Je voudrais pas interrompre le cours de ta soirée et un quelconque programme important à venir. » Bien sûr que si. Elle ne se gênerait absolument pas pour interrompre tout cela et l’empêcher de laisser son attention dériver vers qui que ce soit d’autre qu’elle.

« Tant qu’il n’y a pas une histoire d’enquête irrésolue sur cet ex, je suppose que c’est un feu vert. » L’air à la fois sérieux et mystérieux, elle fit tourner le liquide dans son verre tout en l’observant silencieusement. Si elle devait reconnaître que faire durer le suspens l’amusait, elle était aussi bien consciente du fait que cette histoire d’enquête restait somme toute peu crédible. Cela ne l’empêcha pas pour autant de reprendre la parole pour confirmer : « C’est un feu vert. » Un feu vert mais aussi un véritable boulevard qui s’ouvrait devant lui. Maze ne connaissait pas encore l’issue de cette rencontre et elle n’était pas la seule à pouvoir en décider, mais elle comptait bien passer une bonne soirée. « Je serais flatté de servir de distraction. » Un sourire entendu vint étirer le coin de ses lèvres. Heureusement pour elle, Sergio semblait donc lui aussi tout à fait enclin à passer une bonne soirée en sa compagnie. Restait encore à déterminer s’il attendait quelqu’un et, le cas échéant, combien de temps il avait à lui accorder. Ou plutôt, de combien de temps elle aurait besoin pour parvenir à lui faire oublier son hypothétique rendez-vous. « Tu as l’air d’avoir déjà ton analyse toute faite à mon sujet. » Oui. Elle avait tendance à se prendre pour une profiler du dimanche après quelques verres. S’était-elle trompée dans son analyse ? Elle se mordit légèrement la lèvre inférieure en le voyant réduire à son tour la distance qui les séparait. Son langage non verbal s’exprimait pour elle, bien que son verbal ne soit pas en reste non plus. Le piège était en train de se refermer sur eux deux…pas seulement sur sa proie. « Et est-ce que je me trompe ? » Sa tête se pencha légèrement sur le côté pour accompagner sa question. Elle en profita pour laisser son regard parcourir son visage : prenant son temps pour passer de ses yeux à sa mâchoire ciselée, en faisant un arrêt prolongé du côté de ses lèvres qui laissaient transparaître une pointe d’insolente assurance dans son sourire. « Pour te répondre, on m’a posé un lapin. » Cette information la sortit de ses pensées et de sa contemplation. C’est un air légèrement surpris qui s’afficha sur son visage quand elle reposa son regard dans le sien. Un lapin ? Vraiment ? « J’en suis ravie. » Elle avait du mal à croire qu’une femme ait pu laisser filer une occasion de passer un moment en sa compagnie, mais elle était parfaitement satisfaite de ce dénouement et de pouvoir ainsi profiter du fait que son programme initial était tombé à l’eau. « Je pense que j’ai trouvé mon programme important de la soirée. » Voilà une affirmation qui l’enchantait davantage encore et qui venait lui confirmer, des fois qu’un doutait ait pu subsister, qu’ils avaient les mêmes plans pour la suite de la soirée. Elle était toujours bien incapable de dire quelle serait l’issue de cette dernière, mais ils allaient au moins dans la même direction et il ne lui en fallait pas plus pour se montrer un peu plus désinhibée encore. « Je dois dire que tu as toute ma curiosité. Qu’est-ce que je devrais savoir de toi, Maze ? » « Mh. Bonne question. » Ou bien la bonne question n’était-elle pas plutôt "Qu’est-ce que tu ne dois pas savoir de moi ?" Son regard s’égara un instant du côté de son verre alors que les doigts de sa main libre vinrent distraitement pianoter sur la table. Il y avait des pans entiers de sa vie dont elle éviterait de faire mention ce soir. Mais lesquels pouvait-elle révéler ? Lesquels importaient ? Aucun si l’on considérait le fait qu’ils n’étaient pas vraiment là pour faire ample connaissance. Pas comme ça tout du moins. Elle reporta finalement son attention sur lui avant de déclarer : « Je suis britannique. » Mais ça s’entendait. « Et wedding planner. » Ça, en revanche, ça n’était pas écrit sur son front. Mais ces informations avaient-elles une quelconque importance ? Absolument aucune si ce n’était pour lui permettre à son tour de tenter une analyse très approximative à son sujet. « Et j’adore danser. » Là voilà la seule information qui avait un tant soit peu d’importance ce soir. L’appel du pied était-il suffisamment marqué ou bien avait-il besoin qu’elle lui fasse littéralement du pied pour qu’il l’invite sur la piste de danse ? Le cas échéant, elle ne manquerait pas d’avoir recours à ce stratagème si nécessaire. C’était bien beau de se montrer entreprenant dans les mots. Mais c’était encore mieux d’avoir l’occasion de se montrer tactile. Et elle en mourrait justement d’envie. Pour l’heure, elle s’était contentée d’appuyer un peu plus son regard dans le sien avant de lui retourner la question : « Et hormis le fait que des gens osent te poser des lapins…est-ce qu’il y a d’autres choses que je devrais savoir à ton sujet ? » Parce qu’elle n’était pour l’instant qu’en possession de son prénom et d’une analyse personnelle et potentiellement bancale à son sujet. Mais finalement, c’était amplement suffisant pour ce qu’ils avaient en tête.

La tête brûlée qui ne réfléchissait pas avant d’agir et qui se laissait simplement guider par ses envies ne ressemblait en rien à la Maze qu’elle avait été ces derniers temps. Ces derniers mois. Mais l’alcool aidant, elle avait l’impression de pouvoir retrouver -au moins superficiellement- un peu du caractère qui lui avait toujours été propre. Faire preuve d’un quelconque filtre n’avait jamais fait partie de sa personnalité, et il semblait qu’elle s’autorisait enfin à laisser cette caractéristique ressurgir alors qu’elle accordait le droit à toutes les pensées qui lui passaient par la tête de se concrétiser en venant franchir la barrière de ses lèvres. « Je pense qu’on pourrait s’entendre, si c’est tout ce que j’ai besoin de savoir. » Et puisqu’elle venait justement de décider qu’il n’avait pas besoin de savoir quoi que ce soit d’autre de sa vie, ils allaient donc effectivement pouvoir s’entendre. « Je suis mexicain. Agent artistique depuis un paquet d’années. Et je préfère de loin les endroits plus intimes quand il s’agit de faire connaissance, mais j’ai tendance à vouloir faire plaisir à la personne en face de moi, alors… » Un agent artistique ? Elle avait eu affaire à nombre d’entre eux par le passé lors des différents événements qu’elle avait organisés. Mais jamais aucun n’avait dégagé le quart de l’assurance et du charme qu’elle reconnaissait bien volontiers à Sergio. Bien que la sobriété était à présent un souvenir lointain pour elle, sa curiosité était piquée par cette information qu’il venait de lui communiquer. Ceci étant dit…une wedding planner britannique et un agent artistique mexicain rentrent dans un bar…était-ce le début d’une blague ? Ça n’était en tout cas pas comme telle que Maze imaginait la suite de la soirée. « L’un n'empêche pas l’autre. On a encore toute la soirée devant nous après tout. » Elle ne parvenait pas à déterminer s’il était enchanté ou non de sa proposition -très peu subtile- d’aller danser mais quoi qu’il en soit, elle se satisfaisait du fait qu’il soit prêt à la suivre. « Quelques danses contre un tête à tête plus intime…ça me semble être un bon compromis ? Qu’en pense un agent artistique qui doit maîtriser les négociations comme personne ? » Quelle générosité et quelle abnégation dans sa proposition. Comme si son sourire en coin laissait planer un quelconque doute quant au fait que l’idée de se retrouver seule avec lui ne représentait en rien un sacrifice. « J’imagine que nous ferions mieux de terminer ces verres avant d’aller danser. » Elle hocha simplement la tête avant que ses doigts ne viennent se refermer autour de son verre. Sans le quitter des yeux, elle le porta à ses lèvres pour en finir son contenu. Ça n’était pas le genre de comportement qui allait l’aider à se montrer moins désinhibée, mais ça n’était de toutes manières pas au programme de sa soirée. Elle n’était pas venue pour se laisser contrôler par ses angoisses, mais bien au contraire pour les oublier et faire tomber toutes les barrières qu’elle s’efforçait d’ériger au quotidien. L’alcool qui coulait dans son sang avait envoyé balader sa tendance à craindre le pire et à imaginer les scénarios les plus catastrophes. Elle ne savait pas ce que le reste de la soirée leur réservait, mais elle avait une idée très précise d’où elle voulait aller. D’un même geste, elle reposa son verre sur la table avant de se lever. Féline, toujours parfaitement dans la thématique du prédateur chassant sa proie, elle était venue se glisser derrière Sergio. Plaçant dans un savant mélange d’assurance et de délicatesse ses mains sur ses épaules, la brune s’était penchée pour approcher son visage du sien, jusqu’à avoir ses lèvres suffisamment proche de son oreille pour qu’il puisse l’entendre chuchoter malgré le bruit ambiant : « J’aimerais beaucoup que ce ne soit pas l’alcool qui me fasse tourner la tête ce soir. » Sa main droite avait quitté son épaule pour glisser lentement le long de son bras, jusqu’à ce que ses doigts se mêlent aux siens. Se relevant pour se mettre cette fois-ci à côté de lui, elle avait resserré son étreinte pour l’inviter à se lever à son tour et la suivre sur la piste de danse.

La méfiance habituelle de Maze n’opposait étrangement aucune résistance ce soir-là. Il était intéressant de constater qu’avec une pointe de détermination et une certaine (importante) dose d’alcool, elle était en mesure de ne plus se laisser régir par ce sentiment d’angoisse à la limite de la paranoïa qui lui collait pourtant à la peau depuis de longs mois. Et il lui semblait avoir trouvé la meilleure des excuses pour donner des vacances à ses craintes, car même si Sergio l’ignorait, il faisait bel et bien partie de ce cocktail détonnant qui lui permettait de se laisser véritablement aller le temps d’une soirée. Il en était même l’ingrédient le plus important. Car il ne la connaissait pas. Et elle ne le connaissait pas. Pourquoi donc s’inquiéter de ce qu’un parfait inconnu pouvait penser d’elle ? Si sa tentative de séduction avait échoué, son égo en aurait pris un coup mais elle s’en serait remise sans mal. Elle n’avait rien à perdre dans l’histoire, alors autant aller au bout des choses. Et fort heureusement pour elle et l’obsédante attraction qu’elle ressentait, il semblait suffisamment réceptif pour lui permettre d’aller au bout desdites choses. La soirée devenait intéressante.
Ravie qu’il accepte de la suivre sur la piste de danse, elle s’était élancée sans aucune hésitation. Les yeux fermés, sa tête et son corps ondulant au rythme de la musique. Elle était un parfait cliché de personne alcoolisée prise dans une soudaine bulle musicale. Mais un cliché en rythme. Et un cliché qui n’oubliait pas son objectif premier. La brune rouvrit les yeux et posa son regard sur Sergio. Même au beau milieu d’une foule de corps dansants et tous plus attirants les uns que les autres, il continuait de dégager ce petit quelque chose qui le faisait immédiatement sortir du lot. Et ce petit quelque chose n’était rien qu’à elle pour ce soir. Il lui suffit d’un sourire en coin entendu pour l’inviter à se joindre à elle. Ayant craint un instant de passer pour une empotée, elle avait constaté avec soulagement que certaines choses refaisaient surface assez vite : à croire que tous ses visionnages de Dirty dancing avait fini par payer. « Et dire que j’ai hésité à te suivre. » Elle était dos à lui et s’il ne pouvait pas voir le sourire qu’elle avait aux lèvres, il avait une chance d’avoir perçu l’agréable frisson qui l’avait parcourue en sentant son souffle contre sa nuque. « Mais je comprends que tu apprécies danser. C’est vrai qu’il y a des aspects agréables… » Sa main droite vint chercher la sienne et la guida à la naissance de sa poitrine avant de la faire glisser doucement le long de son corps jusqu’à ses hanches. « N’est-ce pas ? Plus qu’agréables même. Il suffit simplement d’être bien accompagné. Es-tu en suffisamment bonne compagnie Sergio ? » Question rhétorique à ce stade-là. Ou tout du moins elle l’espérait car cela ne faisait plus vraiment aucun doute de son côté. « Ce n’est pas l’alcool qui me fait tourner la tête à moi non plus. » Le visage légèrement tourné vers lui, il pouvait certainement le voir ce sourire satisfait de l’entendre lui faire à son tour cette confession. Et si elle semblait parfaitement maître d’elle-même et entreprenant chacune de ses actions avec une précision chirurgicale depuis qu’elle l’avait accosté, il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour laisser tomber ses dernières barrières et cesser de réfléchir. Parce qu’il était venu la cueillir à l’aide d’une zone ô combien érogène. Parce que le contact de ses lèvres contre sa nuque avait suffi pour la titiller une fois de trop. Maze avait effectué un demi-tour entre ses bras pour se retrouver à nouveau face à lui. Leurs corps toujours collés l’un à l’autre, ses mains avaient glissé naturellement derrière sa nuque alors que son regard s’était posé sans aucune pointe de gêne ni de doute dans le sien. Elle savait très bien ce qu’elle voulait et elle n’avait vraisemblablement plus l’intention de tergiverser à ce sujet. « Maintenant qu’on s’est mis d’accord sur le fait que danser était agréable… » Elle ne parlait pas fort la britannique, mais elle était suffisamment proche du visage de son interlocuteur pour s’assurer qu’il comprenne bien ce qu’elle était en train de dire. Loud and clear. « …est-ce qu’il n’y aurait pas d’autres activités qui pourraient l’être encore plus ? » Des secondes qui lui parurent interminables s’écoulèrent. Mais des secondes qu’elle mit à profit pour rapprocher son visage du sien jusqu’à pouvoir venir frôler ses lèvres. Et si elle avait pour habitude de tenter ses adversaires jusqu’à ce qu’ils capitulent, elle concéda bien volontiers cette bataille-là en venant l’embrasser fiévreusement.