Se rendre à ses séances de kiné était devenu une routine de plus dans la longue liste de ses petites habitudes à l'hôpital. Depuis plus d'un an, Jackson cumulait sans le vouloir les raisons de squatter les couloirs du St Vincent. Il avait d'abord occupé un lit en réanimation, assommé par le coma et la morphine. A son réveil, il avait commencé par des consultations hebdomadaires avec le neurologue afin de suivre l'avancée de sa cicatrisation ainsi que l'état de son amnésie. Parallèlement, il avait du réapprendre à être autonome sur les gestes simples de la vie tel que porter la fourchette à sa bouche sans trembler, se brosser correctement les dents, faire ses lacets, écrire en attaché ... Puis il avait fallu qu'il ajoute à tout cela des séances de suivi psychologique imposées par le gouvernement sous peine de ne jamais pouvoir réintégrer son équipe et reprendre son job d'agent fédéral.
Dans la foulée, Jax avait fait preuve d'insubordination afin de retrouver le responsable de son accident et de le lui faire payer. Le procès était d'ailleurs en approche. Ses pensées, déchirées entre le désire de vengeance et celui de guérir plus vite que ne le lui permettaient ses progrès pourtant fulgurants, s'étaient montrées beaucoup trop anarchiques pour lui laisser l'occasion de focusser sur quoique ce soit d'autre. Si ses vacances en Norvège avec Louisa lui avaient offert un peu de recule sur tout cela, seules les pauses repas qu'il prenait régulièrement à la cafétéria de l'hôpital lui accordaient un peu de légèreté dans tout ce contexte médico-judiciaire et, cela, il le devait en grande partie à Judy. Judy, une ado " à problèmes ", abonnée aux services psy et pédiatrique, enfermée dans cette boîte aseptisée pleine de nurses et de médecins en blouses blanches. Un passif plus lourd qu'un semi-remorque, des monstres incestueux cachés sous son lit et des fantômes plein les regards de chien battu qu'elle lui adressait, parfois, par dessus son plat de frites. Judy, une gamine qu'il avait pris le temps de connaître et d'entraîner avec Joy mais à propos de laquelle il ressentait un immense sentiment d'échec.
Elle avait tenté de se suicider. Froide, glaciale, inhumaine, l'information l'avait frappé de plein fouet 10 jours plus tôt, relativisant dans son sillage l'entorse ridicule pour laquelle il avait fait tout un drame sur la patinoire. Au moment de sa chute, Jax était convaincu qu'il ne survivrait pas à 2 ou 3 mois de rééducation sans pouvoir courir, alors que la course était devenu, au fil du temps, l'un des rares moyens de canaliser la colère terrible qu'il refoulait envers tout ce qui faisait que sa vie partait en vrille depuis plus de 15 mois. Mais comment continuer à se poser en victime de la fatalité sournoise quand une enfant tentait de mettre fin à ses jours en accusant la solitude de la pousser dans le fond du trou ? Il n'en avait tout simplement pas le droit ...
Judy à laquelle Jackson pense au moment de pousser la porte de la salle de kinésithérapie, des cernes sous les yeux de n'encore une fois pas avoir su fermer l'œil de la nuit. A ses cauchemars de l'accident s'ajoutent désormais des images de la gamine les poignés en sang après avoir écris cette lettre qu'il avait lu comme on lit un testament : les larmes aux yeux, l'estomac au bord des lèvres. 10 jours depuis le drame. Assez pour que Jackson se ressaisisse et commence à établir un plan d'action afin d'éviter que cela ne se reproduise. Il a son idée sur les mesures à mettre en place pour arranger la situation et compte bien se mettre en mouvement mais, pour cela, Mills a besoin de retrouver l'usage de sa cheville. Raison pour laquelle il enlève chaussettes et pantalon avant de s'asseoir sur la table de manipulation.
Il est 9h10, Sofia, sa tortionnaire, ne devrait pas tarder à arriver. Comme lui, elle est rarement en retard.
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Dernière édition par Jackson Mills le Dim 29 Mai 2022 - 1:17, édité 3 fois
La porte s'ouvre, le bourreau entre. « Comment ça va ce matin ? En forme prêt à souffrir ? » Haute comme trois pommes et pas plus épaisse qu'une brindille, Sofia est une tortionnaire insoupçonnable. Avec ses grands yeux de chat et son petit sourire mutin, sûr qu'on lui donnerait le bon Dieu sans confession mais Mills, lui, sait ! Il sait à quel point ces petites mains de poupée peuvent faire un mal de chien lorsqu'elles s'appliquent à lui tourner le pied dans tous les sens. « Pour l'honneur et la gloire ! » Répond-il en souriant, la suivant du regard tandis qu'elle enfile sa blouse et s'adossant au dossier de la table de consultation pour plus de confort.
Lorsque la kiné s'approche et l'interroge sur sa cheville, Jax fait la moue. En temps normal, il mentirait et prétendrait que tout va bien mais il a compris, au fil des séances, que mentir à Sofia s'avérait aussi inutile que de mentir à la psy. L'une comme l'autre, expertes dans leur domaine, savaient voir au delà des apparences et ne pas se laisser duper par ses affirmations. L'une parce qu'elle avait la capacité de lire entre les lignes des réponses volontairement évasives de l'agent, l'autre parce que le toucher ne mentait pas et que, le toucher, c'était précisément ce qu'elle faisait à longueur de séance.
Le contact des mains fraîches de la jeune femme contre la peau de sa cheville fait légèrement frémir Jackson. Il se laisse cependant manipuler sans broncher et constate avec satisfaction que la mobilité est bien meilleure qu'elle ne l'était au début de leur collaboration. La douleur a quasi disparue. Faut dire qu'il ne lésine pas sur les exercices de rééducation. Personne plus que Mills ne souhaite venir à bout de cette blessure contraignante pour sa mobilité. S'il a depuis longtemps abandonné ses béquilles et ne boite presque plus, cela ne l'empêche pas de ressentir des décharges chaque fois qu'il tente de sautiller. Les records de sprint sont encore loin, il lui faudra plus de temps et d'étirements pour retrouver toutes ses capacités ...
« Tu devrais bientôt pouvoir refaire du patinage artistique. » Jackson lève les sourcils et gratifie Sofia d'un regard faussement outré. Il apprécie qu'elle le taquine, cela dédramatise la situation dans laquelle il se trouve et désamorce l'impression désagréable qu'il a de se sentir inefficace depuis sa chute : « Je vois qu'on se moque de sa patientèle ! » Jouant son rôle d'artiste vexé, il croise les bras sur son torse volumineux et lève le nez dédaigneusement. « Tu serais surprise de ma grâce insoupçonnée Shaw ! »
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Dernière édition par Jackson Mills le Sam 12 Mar 2022 - 3:03, édité 2 fois
Tenue moulante et pirouettes. Jackson peine à garder son air contrarié. Cette image de lui-même en moule-bite à paillettes lui arrache un sourire amusé. Sofia marque un point : c'est le contexte le plus improbable qui soit pour s'imaginer Mills sur des patins. En Hockeyeur, à la rigueur, avec un casque et un bâton, prêt à jouer de ses poings pour un regard de travers ou un coup en traître donné dans l'angle mort de l'arbitre, mais décidément pas en star montante de Holiday on Ice ... « Je paierai cher pour voir ce spectacle. Même si en tant que ta kiné, je devrais être invitée gratuitement pour service rendue. » « J'te signerai un autographe si t'es sage. » Qu'il lui répond sur le même ton narquois avant de déchanter lorsque Sofia approfondit la manipulation de sa cheville. Il décroise les bras et s'applique à déverrouiller son articulation mais la tâche devient plus ardue lorsqu'il est question du reste de sa jambe. En observant la brune palper son mollet puis son genou, l'agent se sent comme un bout de bois particulièrement sec. Il entendrait presque la fibre craquer sous les doigts de la kiné et se mord la lèvre lorsqu'elle lui ordonne de se détendre. Il aimerait bien, Jax, être capable de se détendre sur commande. Ca lui ferait des vacances et lui assurerait certainement de biens meilleures nuits, mais ce genre de choses sont plus faciles à dire qu'à faire et c'est avec une moue dépitée qu'il accueille le constat de Sofia concernant son incapacité à l'aider s'il ne parvient pas à lâcher prise physiquement. Ses sourcils froncés parlent à sa place : Jackson a beau faire de son mieux, son corps somatise ce que son esprit peine à digérer.
« Tu veux en parler ou tu vas réussir à te détendre tout seul et me laisser travailler ? » Durant quelques secondes lourdes de jugement, Mills accorde à Sofia ce que Sparrow à l'habitude d'appeler '' son regard inquisiteur ''. Ce coup d'œil appuyé et direct, caractéristique de Jackson, qui affiche clairement la couleur : derrière la façade de son air insondable, l'agent jauge si oui ou non il peut se fier à son interlocuteur. Cela l'énerve prodigieusement lorsque sa collègue le souligne avec suffisance, mais c'est un fait : Mills est incapable de cacher ses suspicions. Plutôt que de travailler là-dessus comme le lui a si souvent conseillé Bond, Jax s'applique à cultiver cet air défiant car il a remarqué que les coupables et autres imposteurs ont pour réflexe de s'en offusquer, comme s'ils avaient des choses à cacher, qu'ils refusaient d'être analysés par une personne à même de les percer à jour. Le constat, c'est que Shaw ne s'offusque ni ne se dérobe. Elle reste là, souriante et douce, visiblement désireuse de bien faire et surtout de les faire avancer dans sa rééducation. Jackson accepte de baisser sa garde. Il a bien mérité une pause ...
« C'est compliqué en ce moment ... » Admet-il enfin, ses épaules de centaure s'affaissant quelque peu. « Judy Chapman, ça te dit quelque chose ? » Jax sait que Sofia est bénévole au service pédiatrique mais Judy n'est pas ce genre de gamine à occuper le devant de la scène et que tous le personnel de l'hôpital connait. Raser les murs, s'habiller en noir, parler à voix basse, la gamine à toujours tout fait pour qu'on la laisse tranquille. Il avait fallu à Jackson un nombre incalculable de provocations et de blagues savamment distillées pour la faire sortir de sa coquille et accepter de se confier à lui, le gars au cerveau amoché qui bouffait toutes les compotes à la cafet'. « J'encaisse mal sa TS. » Avoue-t-il après avoir longuement soupiré, preuve s'il en faut que cela s'avère affreusement difficile pour lui d'admettre cette faiblesse. Rien que le choix des mots est révélateur : '' TS '', ça sonne moins sinistre que '' Tentative de Suicide '',ça râpe moins sur la langue. Flagrante, la culpabilité refait surface. Sofia doit certainement le sentir sous ses doigts : le quadriceps de Jax se tend sans lui demander son avis. Constatant le phénomène, Mills en vient au fait : « J'voudrais lever des fonds pour organiser des activités à l'hôpital. Tu sais, les ados et les brancards ça matche pas bien, c'est trop d'isolement pour des jeunes qui se cherchent ... » Il se touche pensivement le genou, le regard tourné en direction sa rotule et de sa cheville, en perspective. « J'vais ouvrir un club de course. » Ses yeux viennent accrocher ceux de la kiné. « Répare-moi. »
S'il ne s'agit pas d'une supplique, on ne peut pas non plus parler d'un ordre. A cet instant précis, Jax accepte de se montrer vulnérable et il le sait. Son corps, c'est ce qu'il a de plus précieux, ses capacités physiques sont des trésors qu'il entretient consciencieusement. Grand, fort, rapide, puissant, il serait capable de soulever des montagnes mais se sent parfaitement inutil s'il ne peut même pas courir pour mener à bien son projet.
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Dernière édition par Jackson Mills le Sam 27 Aoû 2022 - 7:07, édité 2 fois
« Un an. » Il s'en souvient comme si c'était hier :
Ce jour là, Jax mangeait pour la première fois à la cafétéria de l'hôpital. Cela faisait deux mois à peine qu'il était sorti du coma. Péniblement, il avait mis prés d'une demi heure pour se rendre dans la salle à manger. Pour quelqu'un de valide, passer de sa chambre au rez de chaussée ne prenait pas plus de deux minutes mais, pour le convalescent qu'il était, aligner un pas après l'autre en trainant derrière lui sa perfusion avait été une première grosse victoire sur les séquelles de l'accident. Il s'était alors assis dans un coin et avait entreprit de boire sa soupe sans en foutre partout malgré les tremblements de sa cuillère. Son système nerveux récalcitrant et encore sous le choc du passage de la balle dans son cerveau lui donnaient des airs d'attardé moteur. Judy était apparue, terne, blafarde, cernée mais avec une paille à la main qu'elle était venue planter sans rien dire dans son bol, pour lui faciliter la vie. " J'suis pas un bébé ! " Lui avait répondu l'adulte, vexé. " Dommage, j'aurai pu changer ta couche. " Avait rétorqué la gamine, le prenant au dépourvu avant qu'un éclat de rire caustique ne lui échappe. Dés lors, Judy était devenue sa complice préférée au jeu du " on se pose à la cafet' et on fait la voix off des conversations des autres ". Ils avaient passé des heures entières, jour après jour, à mettre dans la bouche des mangeurs assis autour d'eux des dialogues sans queue ni tête uniquement destinés à se changer les idées entre deux séances de psy, de neurologue, de rééducation et de toutes ces consultations éprouvantes qu'elle comme lui avaient du endurer.
« Tu devrais bientôt pouvoir retrouver ta mobilité, c'est qu'une question de temps et de patience désormais. » Jackson acquiesce. On peut lire l'inquiétude autant que la frustration dans le creux qui se forme entre ses sourcils froncés. « Tu vas pouvoir recourir très vite et si tu te fais doubler par un jeune de 12 ans, ça ne sera pas à cause de ta cheville. » A ces mots, Mills pousse un soupire amusé et roule des yeux au ciel. Il ne l'admettra jamais, mais se faire doubler par un gamin de douze ans écorcherait son égo bien plus que de raison. Compétiteur dans l'âme, l'agent n'aime tout simplement pas perdre, qui que soit l'adversaire. « Ton projet ça fait longtemps que tu y penses ? » « Quelques nuits ... » Répond-il en toute sincérité, donnant au passage une explication aux cernes soulignant son regard. Quitte à être insomniaque, Jackson a appris à rentabiliser ses nuits. Il n'a jamais été aussi productif que depuis qu'il est en arrêt de travail forcé.
Au moment où Sofia donne son avis sur l'idée du sport adapté, les muscles de Jax commencent à se détendre. L'engouement de la kiné et son attitude enjouée parviennent à chasser de l'esprit du patient les tourments ravivés à l'évocation de Judy. En quelques phrases, elle rayonne de suffisamment d'entrain pour contaminer Mills et le conforter dans l'idée qu'agir est le meilleur remède au choc.
« A court terme, j'pense me charger bénévolement de la mise en pratique. Mais c'est sûr que l'appui d'une titulaire du service de rééducation ne pourra qu'accélérer la validation du projet. » S'il est plein de bonne volonté, Jax sait aussi que l'aspect juridique et administratif des hôpitaux peut donner des sueurs froides aux gars qui, comme lui, sont fâchés avec la paperasse. La direction, par exemple, plane à tellement de kilomètres au dessus des réalités de terrain qu'il peut sembler difficile de les convaincre du bien fondé d'un projet aussi farfelu. Le coup de pouce d'une kiné infiltrée ne pourra qu'être bénéfique, d'autant plus qu'il ne compte pas se spécialiser dans l'animation hospitalière. Bien au contraire, Jax a de l'ambition : son but est de rallier un maximum d'experts comme Sofia pour faire bouger les jeunes et de donner à ces professionnels les moyens de le faire sans avoir à gratter les fonds de tiroirs. Pour ça, il a déjà quelques idées en tête : A plus long terme, j'voudrais organiser un marathon. Rien que ça. Pas avec les enfants de l'hôpital, mais avec les citoyens de Brisbane.
Passer par une implantation dans la population civile pour reverser les fonds des inscriptions et des sponsors à l'hôpital lui demandera sûrement de créer une association en parallèle du club de course réservé aux gamins. De quoi occuper ses nuits sans sommeils et son esprit tandis que le procès de Hoover est sur le point de commencer ...
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Dernière édition par Jackson Mills le Ven 15 Avr 2022 - 19:23, édité 1 fois
Sofia partage son point de vue et le lui fait savoir. Tout comme Jackson, elle pense aux difficultés que cela représentera de mettre en pratique et de rendre accessible le club de course au plus grand nombre mais chez elles aussi les convictions semblent plus présentes que les doutes. Mills se ravit de le constater et se dit qu'il a bien fait de vider son sac en acceptant de s'ouvrir à la brune. Un fin sourire détend les traits de son visage tandis qu'il la regarde lui tripoter la cheville. Penchée sur sa jambe Minikin fait preuve d'une force et d'une fermeté qu'on ne lui soupçonnerait pas, de prime abord, avec son petit gabarit.
« C'est un club de sport ou un camp d’entraînement militaire que tu veux ouvrir ? » Le rire de Jax accompagne celui de la jeune femme. Il est habitué à ce que ses grandes ambitions interpellent ses interlocuteurs et sait faire preuve d'autodérision lorsque la conversation s'y prête. « Watch me te botter les fesses Miss Shaw, tu vas te découvrir des talents au sprint que tu n'aurais jamais soupçonné ! » Répond-il, accentuant sans mal le trait. Son expérience en tant que formateur au MOSC a développé sa capacité à répondre aux recrues de manière à exclure l'échec de leurs perspectives de choix.
En réalité, Jax ne compte pas utiliser la manière forte au sein du club de course. Il pense instaurer des niveaux et des créneaux, voire même à segmenter les trajets afin de permettre à chacun de faire à la portée de ses capacités physiques. Après avoir si sévèrement expérimenté l'impossibilité de se souvenir des mois ayant précédé son accident, l'agent sait à quel point la frustration peut être grande face à l'ampleur d'une tâche dont on se sait incapable de venir à bout. A choisir, il favorisera toujours les petites victoires aux grands échecs, surtout concernant ce projet lui tenant particulièrement à cœur.
« Et si je réussis à te remettre sur pied, peut-être qu'en remerciement pour que je puisse finir le marathon tu me feras le cadeau de me porter les 40 premiers kilomètres ? » Mills s'esclaffe de nouveau. Spontané, il bouscule gentiment Sofia. Ses gestes de camaraderie sont à son image, brusques, mais sa sympathie, elle, à quelque chose de tendre, digne du regard d'un labrador : « Téma la princesse ! » Jax se l'imagine saluant la foule, assise sur ses épaules tandis qu'il court, tel un âne, et rigole de plus bel. Le poids plume que représente la kiné ne serait pas un gros obstacle à son avancée, mais il a d'autres projets pour la remercier de prendre soin de sa blessure. « En fait, j'comptais plutôt t'inviter à sortir pour te remercier, mais si tu préfères faire du poney ... » Le petit haussement de sourcils dont il accompagne ses mots se veut taquin. Mills assume de flirter avec elle et ne la quitte pas du regard, bien décidé à lui faire monter le rouge aux joues.
« Le poney c’est pas mal comme sortie. » Le sourire de Jackson s’élargit. Non pas parce que Sofia abonde dans son sens – il la soupçonne d’être passée à côté du sous-entendu sexuel qu’induisait son haussement de sourcil tendancieux – mais bien parce que sa gêne est palpable. Ce sale gosse a réussi son coup et la laisse ramer tout en l’observant silencieusement tandis que la kiné lui parle des dommages que ses muscles pourraient faire à un animal innocent. Est-elle vraiment en train de lui conseiller de porter un cheval ? « Mais tu n’es pas obligé de me remercier je ne fais que mon travail. » Se reprend-elle finalement, sortant la carte du professionnalisme pour se redonner contenance. Jax se retient d’insister. La faire rougir l’amuse, mais il ne souhaite pas non plus la mettre mal à l’aise. Après tout, Shaw fait tout ce qu’elle peut depuis le début de leur collaboration pour que lui se sente au mieux ; ça ne serait pas fair-play de sa part de ne pas rendre la pareille.
« Mais si jamais je veux faire un marathon je vais avoir besoin d’un coach. »« C’est certain … » Mills entre dans son jeu, intrigué de voir Sofia se cacher derrière son statut de professionnelle de santé pour mieux revenir à la charge la minute d'après. À quoi joue-t-elle ? Doucement mais sûrement, l’idée d’avoir mis le doigt sur un point sensible insoupçonné commence à faire son chemin dans l’esprit du patient. Et si Minikin avait un béguin pour lui ? Enfermé dans ses tracas personnels et son acharnement à vouloir réparer sa cheville au plus vite, Jax n’a jamais pris le temps de tâter ce terrain-là. Force est de constater que, s’il s’y était attardé plus tôt, l’évidence lui aurait sauté aux yeux. « Tu connais peut-être quelqu’un pour me coacher ou une salle pour me remettre en forme ? »
Il hésite un instant, pesant le pour et le contre, avant de se laisser séduire par l’idée de la voir débarquer en leggings et petit haut de sport. « Le Dojo Riley, à Toowong. » Répond-il, sans pour autant préciser qu’il s’y entraîne et qu’elle a toutes les chances de tomber sur lui si elle s’y rend. « Si Danika n’est pas là pour te recevoir, demande Mike, y’a pas meilleur pour le cardio. » Jax parle d’expérience pour avoir failli plus d’une fois y perdre un poumon.
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Dernière édition par Jackson Mills le Dim 29 Mai 2022 - 1:12, édité 1 fois
« Oh j'habite tout prêt ce serait l'endroit parfait. » Le hasard fait bien les choses. Convaincu que l'information pourrait s'avérer utile, Jackson la note mentalement dans un coin de sa tête tandis qu'un « tsss » sceptique lui échappe. Minikin courir plus vite que lui ? Il fait un pas = Elle en fait deux ! « Allez j'ai fais le plus dur, c'est à ton tour de bosser là. Mets toi debout et voyons voir si tu retrouves ton équilibre. »
Mills s'exécute. Prudemment, il pose les pieds au sol et se lève de la table de manipulation pour grimper sur ce maudit coussin à moitié rempli d'air. Si sa cheville valide n'a aucun mal à le garder droit et fier, l'autre, en revanche, tremble et requière de lui qu'il se concentre pour tenir la posture. Sa proprioception, faussée par la blessure, a pris un coup dans l'aile. Finies les parties de basket ball dans le parc urbain du coin de la rue avec ses voisins amateurs de NBA. Tant qu'il n'aura pas consolidé l'articulation, l'agent sait qu'il serait déraisonnable de sauter dessus et de mettre à mal ses appuis. Appliqué, il reproduit les exercices que Sofia lui a montré et compense ses pertes d'équilibre par des efforts de gainage tout en regardant droit devant lui, fixant un point imaginaire.
« Il y a des chances que je te croise au Dojo Riley ? » La question le fait sourire et perdre un peu de sa concentration. Mills vacille puis se reprend en serrant d'avantage les fesses. « Enfin, je me demandais juste combien d'heure de musculation tu dois faire par semaine pour arriver à de tels muscles. » Un rire lui échappe, cassant son gainage et l'obligeant à poser le pied par terre. « Viens voir par toi-même. On adore les p'tites nouvelles. » Répond-il, s'incluant dans ce '' on '' qui, par la même occasion, confirme son appartenance au dojo. Il faut dire qu'à défaut de pouvoir sautiller face à son sac de frappe, Jackson pousse de la fonte tous les jours depuis son retour de vacances. Cet exercice l'aide à se vider la tête en plus de lui occuper l'esprit. Son corps, à l'image de son mental, est devenu plus dur qu'un caillou. « Maintenant cesse de me déconcentrer, j'veux réussir à toucher le sol ! » Son ton est taquin, pourtant la volonté de s'améliorer est bien là : le voilà qui se penche dans l'optique de toucher du bout des doigts le sol du cabinet tout en gardant pour seul appui son pied sur le coussin. Des perles de sueurs commencent à se dessiner sur son front ...
La séance se poursuit ainsi entre assiduité et conversations légères. Lorsque les exercices prennent fin et qu'il est temps pour lui de se rhabiller, Mills ne peut résister à l'envie de tester son hypothèse selon laquelle Shaw s'intéresse à plus qu'à sa cheville. Dos tourné à la kiné, il jette un coup d'œil discret par dessus son épaule afin de mieux situer la jeune femme dans la pièce. Cette dernière, plongée dans l'un de ses rapports, ne semble pas regarder dans sa direction. Attrapant son pantalon, il se penche, enfile une jambe puis l'autre et s'assure qu'elle lève les yeux vers lui en articulant un « J't'attends (...) » Ses mains accrochées aux rebords du pantalon attendent que l'attention de la brune se braque sur lui pour remonter le vêtement et fermer les boutons de sa braguette. Jax est sexy, il a conscience de flirter avec la limite de ce qui peut se dire à une femme lorsqu'on a les mains si proche de son entrejambe , c'est pourquoi il ajoute : « ... au dojo. Passe me voir. » Comment éviter la confusion tout en la créant volontairement.
Contre toute attente, l'agent sort du cabinet de bien meilleure humeur qu'il n'y était entré et, même s'il sent la fatigue engourdir sa cheville lourdement sollicitée durant la séance, il sait que c'est pour mieux récupérer ses capacités motrices à plus long terme. Jax ne boîte plus au moment de quitter les lieux. Aimable, il décoche un sourire et salue le gang de femmes en blouses blanches agglutinées dans le couloir sans s'imaginer un instant que, dans son dos, plusieurs paires d'yeux sont en train de refaire le portrait de son fessier de sprinteur.