février 2022 w/ @Regan Kelly She'll drink anything, Port, Pernod or tequila, Rum, scotch, vodka on the rocks, As long as all his troubles disappeared.
Le taxi venait de me poser au bout de la rue. Incapable de lui donner une adresse précise, j’avais vaguement balbutié le nom de ma rue. Des paroles que le chauffeur avait eu peine à déchiffrer. S’il était habitué à ramasser la jeunesse de Brisbane ivre, sortant de boite de nuit, il n’avait néanmoins pas encore développé la faculté de déchiffrer des baragouinements inaudibles prononcés d’une voix avinée du fond de sa banquette arrière. Le type avait néanmoins réussi à localiser mon quartier et m’avait approché au maximum de ce qu’il pensait être mon chez moi. — Ca va allez, mademoiselle ? me demande-t-il en me jetant des coups d'œils inquiets. La portière arrière grand ouverte, les deux pieds dans le vide, toujours assise sur la banquette mais prête à sortir du véhicule, je hoche la tête. Ce mouvement me donne envie de vomir. — Ca irait mieux si je pouvais me faire une trace je dis sans réflechir. — Je vais faire comme si vous n’aviez rien dit, ok ? me confie-t-il d’une voix douce, tolérant. Je m’extirpe donc tant bien que mal du véhicule et tente de faire quelques pas. Tout tourne autour de moi. La lumière des lampadaires crée des cercles lumineux éblouissants, me faisant perdre l’équilibre. J’essaye de fixer un point, mais impossible. Rien ne me semble droit dans cette rue. Les maisons se gondolent, les trottoirs serpentent. Je ne sais plus vraiment où mettre les pieds. Je m’en veux d’avoir bu autant. Je tenais plutôt bien l’alcool. Enfin, quand j’étais aidée par la cocaïne. Mais ce soir, mon stock s’était retrouvé limité et les dealeurs semblaient tous être partis en congés. J’avais bu plus que de raison sans avoir à sniffer de quoi contrebalancer les effets des boissons a plus de quinze degrés. Si d’ordinaire je traversais cette rue en quelques minutes, cette fois mon chemin me semble durer des heures. Pas étonnant lorsqu’on zigzague comme je le fais. Je manque de me casser la gueule en trébuchant sur un trottoir mais je me rattrape de justesse à une boîte aux lettres. Fatiguée, bourrée et dépitée, je finis par poser mon cul sur le bitume, ignorant que je ruine royalement ma petite robe en soie qui m’a coûté une fortune chez Valentino. — Putain de merde ! j’hurle alors pour soulager ma frustration. Ou par simple envie d’hurler, je ne sais pas vraiment. Mon esprit divague alors que ma vision se trouble. Je repense à ce petit papier, que j’ai trouvé dans un débile biscuit de la fortune de le resto chinois où j’ai dîner juste avant de me la coller. "Un tout petit caillou peut briser une grande jarre." — Un tout petit caillou peut briser une grande mare… je répète à voix haute, écorchant le proverbe. Mes couilles, ouais ! je hurle à qui veut l’entendre ; les voisins, leurs chiens ou même le ciel. Et un petit rail de coke peut briser une grande carrière. Enfin, ça c'est ce qui m'arrivera si je continues à me défoncer dans tous les clubs de Brisbane. Quelle conne. Incapable de se tenir ne serait-ce qu'un soir. Evidemment qu'une seule soirée pourrait tout gâcher. Il suffirait d'une photo, d'un client ou d'un collègue se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment pour que je fasse ma valise. CIAO HURLEY ! CIAO LA RÉUSSITE ! Un seul petit caillou dans les rouages et tout pète. Mais tu sais quoi ? J'y crois pas à ton karma de merde, je crois pas que parce que je trouve un con de bout de papier dans un biscuit dégueulasse, ma vie va changer ! Ma jarre à moi, elle est solide ! Bordel. Qu'ils aillent tous se faire foutre avec le karma et leur proverbe débile. Je suis au dessus de cette merde. Je m'en branle de leur prédiction à la con de ces diseurs de bonnes aventures. Voilà que je me mets à parler toute seule. Je suis là, ivre morte, assise par terre comme une clocharde, incapable de me reveler, à gueuler des trucs débiles en m’adressant à… À qui putain ? A moi ? Je me prends la tête entre les mains, l’envie de dégueuler me prend d’un coup, mais je lutte, les yeux mis clos, fixant mes chaussures qui vacillent comme tout le reste.
Je suis toute joyeuse au volant de ma caisse. Ce soir, j’ai plumé le casino. Enfin plumé, je l’ai délesté de cinq mille dollars. Je pense qu’il va s’en remettre. Surtout vu les milliers que je lui ai filé depuis le temps que je le fréquente. L’établissement est toujours gagnant. Sinon il ferait faillite et fermerait. J’en ai conscience. C’est pas tant le gain qui m’intéresse, c’est le jeu. Je suis fan de la roulette, de l’excitation de savoir où va s’arrêter cette foutue bille, de l’insulter copieusement quand elle sort noir les fois où j’ai misé sur rouge ou encore lorsqu’elle se loge dans la case adjacente à celle de mon numéro. Est-ce que la croupière est aussi un argument en faveur de ce divertissement ? J’avoue que ses charmes me laissent pas indifférente. Je lui ai donné cinq cents billets en remerciement de ma victoire. J’ai décroché un sourire en retour et c’est tout. C’est pas ce soir qu’elle finira dans mon lit. C’est pas grave. Avec mon pactole, j’ai de quoi me dégoter une compagnie nocturne. Sauf qu’en fait je suis crevée là. Je vais simplement rentrer me pieuter. Je me rattraperai demain. Je suis certaine que Lora aura envie de fêter dignement ma réussite. J’arrive dans mon quartier. Spring hill dort profondément à cette heure avancée. Y a pas un chat dans les rues. Ah si, y a un chat noir là ! Le con vient de traverser devant moi ! Je me suis levée sur mes freins. Il a du bol que je roulais doucement. Un peu plus et il se transformait en crêpe. Je me gare devant ma baraque. Je récupère mon sac à main rempli de billets. J’ai plus qu’à me rentrer, me boire un voire deux cafés et aller pioncer. Sauf que le destin en décide autrement. J’ai comme un souci sur le palier de ma baraque. Enfin, un souci. J’ai connu pire souci qu’une brune assise par terre dans une jolie robe. C’est le genre de souci que je prends tous les jours avec plaisir. Oh mais je la reconnais ! C’est une de mes voisines ! Par contre, je sais rien de plus à son sujet. Hormis qu’elle a un beau cul. A en voir sa posture, elle est pas fraîche. Ça explique sans doute sa tirade incompréhensible. Je pourrai l’esquiver et l’ignorer. Mon côté joueuse a envie de s’amuser un peu. « C’est pas gentil de te moquer de mon métier. » Un sourire étire mes lèvres. Elle le verra probablement à la lueur de ce lampadaire. Je me suis mise dans son halo. Je suis toute en lumière, à la manière d’un ange descendu du ciel. « En que voyante d’exception, je vais te prédire ton avenir pour te montrer à quel point tu as tort. » Je me retiens de rire. Je crois en rien à tous ces trucs. De mon point de vue, la vie est pas écrite à l’avance. Elle s’écrit au jour le jour. Je ferme mes yeux pour faire mine de me concentrer. « Je te vois demain… avec un horrible mal de crâne… la bouche pâteuse… Tu iras prendre une douche chaude pour essayer de te réveiller… Je te vois te servir un café… non un thé… Et tu te demanderas qui est la bonne samaritaine qui t’as bordé la nuit dernière… » Je rouvre mes paupières. Je me rapproche de sa position. Dans ma jupe courte, mon débardeur et mes bottines hautes, j’ai pas vraiment le look de la voyante ordinaire. Peu importe. Dans son état, je suis pas convaincue qu’elle puisse distinguer les formes. « J’ai presque aperçu son prénom dans ton ombre… Si tu te relèves, je devrai être capable de te le dire… » Je lui tends ma main pour l’aider à se redresser. Seule, je doute qu’elle en soit capable.
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Je lutte. Pourquoi ? Je ne sais pas trop. Je lutte pour ne pas rendre l’intégralité de ce que j’ai ingurgité ce soir sur le trottoir. Je lutte pour ne pas m’endormir sur le pavé. Je lutte contre mes démons. Mais ça, j’y suis habituée. J’ai besoin d’extérioriser. De gueuler un bon coup. Et je m’y donne à coeur joie. Je ne vois pas la blonde qui s’approche au loin, et avant qu’elle n’arrive à ma hauteur, je replonge ma tête entre mes bras, les yeux fixés sur mes chaussures à talon et une boule sous le menton, me donnant une gerbe pas possible. — C’est pas gentil de te moquer de mon métier. Une voix féminine me fait lever la tête d’un seul coup. D’un revers de la main, j’essuie le filet de bave qui s’est logé dans la commissure de mes lèvres. Je faisais vraiment pitié, putain. — En que voyante d’exception, je vais te prédire ton avenir pour te montrer à quel point tu as tort. me dit-elle en fermant les yeux, comme si elle se concentrait. Je fronce les miens. Mais qu’est ce qu’elle me raconte ? Je tente d’articuler trois mots, mais rien ne sort hormis des gargarismes étranges. — Je te vois demain… avec un horrible mal de crâne… la bouche pâteuse… Tu iras prendre une douche chaude pour essayer de te réveiller… Je te vois te servir un café… non un thé… Et tu te demanderas qui est la bonne samaritaine qui t’as bordé la nuit dernière… plaisante-t-elle. Je ris. Un rire un peu gras, un rire de débile, mais je ris franchement. La blonde se fout simplement de ma gueule, elle n’est en aucun cas voyante. Tant mieux, j’étais justement en train de les maudire. Je la regarde mais je peine à distinguer nettement les traits de son visage. Ma vision est toujours brouillée et je la vois presque en double. Bordel, l’alcool c’est vraiment de la merde. — J’ai presque aperçu son prénom dans ton ombre… Si tu te relèves, je devrai être capable de te le dire… elle m’invite en me tendant une main. Ma tête me semble peser une tonne. Je lève mollement le bras pour poser ma main sur la sienne. Elle a la peau douce, c’est agréable. — Je m’appe… Alba je murmure péniblement. Et je suis un putain de déchet. Mais j’étais incapable d’articuler autant de mots en un laps de temps si court. La blonde saisit mon poignet et, d’une force qui me paraît herculéenne, m’aide à me relever. Enfin, aider n’est pas vraiment le mot. Elle me relève, totalement. — Merchi je marmonne encore. De nouveau sur mes deux jambes, tout vacille à nouveau autour de moi. Les talons de seize centimètres deviendraient presque dangereux dans ces conditions. Je me rattrape aux épaules de la blonde et ma tête vient se poser à côté de la sienne. Les yeux levés vers le ciel, je dit sans réfléchir en désignant le toit de la maison face à nous : — Jolie corniche ! C’est ta maison ? Non seulement ma bouche ne fonctionne pas correctement mais mon cerveau semble également avoir lâché l’affaire. Je suis néanmoins dans un état tellement pitoyable que l’idée d’avoir honte ne m'effleure pas. Je continue de bredouiller des mots sans aucun lien, construisant des phrases qui n’ont pas de sens. Rien de ce que je dit n’a d’importance et ma sauveuse semble très bien le comprendre.
Mes prédictions ont rien d’extraordinaires. Je fais que lui énoncer les symptômes post cuite. Je les connais bien. Je suis pas la dernière à forcer sur la bouteille en soirée. D’ailleurs, Lora aurait été dispo, je serai sûrement dans un état proche de celui de la brune à l’heure actuelle. On aurait été fêtées ma victoire au casino autour de quelques verres. Et on aurait terminé la fête chez l’une ou l’autre à s’envoyer en l’air comme des bêtes. Et voilà que je retrouve devant ma baraque, seule, en train de porter assistance à ma poivraute de voisine. J’ai perdu au change dans l’histoire. Après, elle est plutôt bien gaulée la brune. « Enchantée Alba, moi c’est Regan. » J’ignore pourquoi je me présente. Je pressens que l’information est rentrée par une oreille pour ressortir par l’autre. Si elle est rentrée. C’est loin d’être sûr. Ce qui est sûr c’est qu’elle est plus lourde que ma bff. Je grimace pour la relever. J’ai pourtant des biceps. Suffisamment pour porter mes amantes quand je la joue seigneur et les considère un instant telles des princesses pour vous donner une idée de ma force. Je réussis à la hisser sur ses pattes. La stabilité est pas au top. A tout moment, je me prépare à la rattraper pour pas qu’elle se ramasse sur le bitume. Au final, j’en ai pas besoin. Elle se casse bel et bien la gueule mais elle tombe dans mes bras. Rarement je me suis sentie autant troublée d’avoir une charmante femme collée contre moi. Il faut dire que bien que très charmante, son haleine pue l’alcool. C’est pas vraiment agréable. Ça motive pas à l’embrasser. « Je sais pas à quoi t’as tourné ce soir mais c’était de la bonne ! » Elle y pas été par le dos de la cuillère. Ou elle encaisse mal l’alcool. C’est une possibilité. Dans tous les cas, son état est lamentable. Elle a du bol que je sois pas un mec. A tous les coups, il aurait profité de son ivresse pour se la faire. Bandes de branleurs qui pensent qu'avec leur entrejambe. Je pivote ma tête en prenant soin de pas la lâcher afin de voir ce à quoi elle fait référence. « Bien vu l’aveugle ! » Un sourire étire mes lèvres. Elle est encore capable de réfléchir. Ou c’est juste un coup de chance. Quand même, les gens se garent devant leur domicile. Sauf s’ils manquent de place. C’est pas le cas ici, la rue est déserte. Les bobos du quartier mettent leur voiture de luxe à l’abri dans un garage la nuit. Ma caisse dort dehors. Qui irait me voler ma citadine âgée de quasiment dix ans ? « Et toi, elle est où ta maison ? Il serait grand temps que tu rejoignes ton lit. » Ou son canapé ou peu importe le meuble qui leur servira de couchage. Je vais pas la laisser sur le trottoir. Dormir dans mes bras est pas une option viable non plus. L’emmener chez moi l’est déjà plus. On est à côté. J’ai des chambres d’amis de disponible. Le mieux reste de la raccompagner chez elle. J’aurai pas le temps demain matin de lui faire un résumé sur les raisons de sa présence chez moi. Sous réserve qu’elle sache où est son adresse. Je suis gentille mais pas au point de vérifier toutes les boites aux lettres du quartier jusqu’à trouver une dénommée Alba inscrit dessus. Moi aussi j’ai envie de me pieuter.
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Je ne tiens plus sur mes deux jambes, mon cerveau semble danser le boogie dans mon crâne et ma bouche est pâteuse. Les lumières tournent toujours autour de moi. Heureusement que l’inconnue est, elle, bien stable car je repose de tout mon poids sur elle. — Enchantée Alba, moi c’est Regan. Je ne sais pas si j’arriverais à me souvenir de son prénom demain. Je n’étais pas une grande habituée des cuites de ce type. Je connaissais bien les maux de crâne mais souvent ils étaient accompagnés d’une descente plus ou moins douloureuse, en fonction des jours. Ce soir, je n’avais pas ma copine la cocaïne pour m’aider à contrer les effets de l'alcool. La drogue contrait les effets de lâcher prise de la boisson, me faisant toujours garder le contrôle. Me laisser aller de la sorte ne m’était pas commun. — Je sais pas à quoi t’as tourné ce soir mais c’était de la bonne ! s’exclame Regan. — Si seulement j’avais tourné à autre chose, je dis sans réfléchir, arrivant enfin à formuler une phrase. Je m’extasie sur la toiture de sa maison, comme si j’étais une putain d’architecte ou une fan de moulure. Elle devait surement me prendre pour une tarée. — Et toi, elle est où ta maison ? Il serait grand temps que tu rejoignes ton lit. me fait-elle remarquer. Elle n’a pas tort. Je suis dans un sale état. Je suis luisante, mon maquillage à probablement coulé, ma robe est déguelasse de m’être assise par terre et je sens un mélange de vodka et de transpiration. Dégueu. — Je vis au… je balbutie. Putain mais secoues-toi Alba ! — Au 12, il me semble. J’ai envie de me tirer une gifle. Voir deux. Tant bien que mal, ma sauveuse m’entraine en direction de mon appartement, qui se situait dans un immeuble plus loin. Arrivée devant, je reconnu la grande entrée moderne faite de deux immenses baie vitrée. Un regain d’énergie me transporte. — C’est ici ! Je vis au dernier étage. je lui indique. Tu peux me laisser ici, si tu veux, je bredouille d’une voix alcoolisée. Je la remercie et enjambe, tant bien que mal, les quatres marches qui mènent à l’entrée. Je calcule mentalement ce qu’il me reste à parcourir : traverser le hall, saluer le gardien, prendre l'ascenseur jusqu’au dernier et je serais enfin chez moi. Je tâche néanmoins de ne pas penser à l’épreuve de la clé dans la serrure qui, je le savais, avait tout du casse-tête chinois vu mon état. Absorbée par mes pensées, je ne fais plus attention à comment lever les pieds. Mon talon se prend dans la dernière marche, m’entrainant alors dans un vol plané spectaculaire. Honteuse, je me retourne vers Regan. — Quoi que… Si t’as encore cinq minutes devant toi… je lui dit en reposant ma tête sur le sol. J’aurais presque envie de rester là. Mes paupières sont lourdes et l’alcool commence à légèrement se dissiper, me donnant fortement envie de dormir.
L’alcool c’est moche ! Ça rend surtout moche. La brune en témoigne. C’est con parce de base elle est plutôt mignonne. Mes yeux se sont souvent arrêtés sur son visage quand je la croise. Ok, j’avoue qu’ils se sont davantage poser sur son sa poitrine voire ses fesses lorsque j’en ai eu l’occasion. Si en temps normal, elle serait une cible éventuelle, ce soir c’est niet. Son haleine et son état me coupent toute envie. Puis je me refuse d’exploiter son ivresse. Je fais partie du club du consentement éclairé avant mes rapports. Et bien que là, le consentement soit pas forcément compliqué à obtenir, l’éclairage est pas au rendez-vous. A mon avis, c’est très sombre dans sa tête. Quoi que potentiellement remplis d’étoiles tant elle est dans la lune. « Allons vérifier ça ! » Je passe un de ses bras autour de mon cou et la tient par la taille pour marcher. C’est pas gagné cette affaire. J’aurai dû la porter telle une princesse. On arrive tant bien que mal devant un immeuble. Son enthousiasme m’indique être au bon endroit. Je suis pas tirée d’affaire pour autant. Les galères sont pas terminées. Il lui faut rentrer désormais. Et sans mon soutien, ça parait compromis. Je tente quand même. A peine lâchée, elle monte quatre marches et se ramasse royalement. J’ai à la fois envie de rire et je crains qu’elle se soit blessée. J’accours à ses côtés. Elle est apte à parler. Elle a donc rien de cassé. C’est déjà ça. « Le sol est pas top comme lit. Puis je t’ai prédit qu’une bonne samaritaine aller te border cette nuit. Et comme y a pas de couverture ici, je vais devoir te ramener chez toi. » Je ris légèrement. C’est une connerie à la base mais bon. Je tiens pas à l’abandonner à son sort. J’ai une conscience. Je glisse une main sous son aisselle pour l’aider à se relever. Je me sers d’un mur pour la caler. Je fouille dans son sac à main pour trouver les clés. Quel bazar il y a là-dedans ! Je suis tentée de tout renverser par terre ! Avant de définitivement perdre patience, je tombe sur le trousseau. Je déverrouille la porte. Je récupère la poivraute brune titubante. Je nous avance jusqu’à l’ascenseur. Je l’appelle. Lorsque les portes s’ouvrent nous pénétrons à l’intérieur. Dernier étage elle a dit. Je suis contente d’avoir retenue l’info. Je suis pas certaine qu’elle aurait su la répéter une seconde fois. J’appuie sur le bouton. Les battants se referment et nous amorçons notre montée. La sonnette nous préviens être arrivées. Je suis plus très loin du but. Sauf que j’ai deux options en sortant de la cage d’ascenseur. Droite ou gauche. Et j’ai aucun indice pour me guider. J’ai pas le choix que de solliciter Alba qui est proche de dormir contre moi j’ai l’impression. « Droite ou gauche, ma belle ? » J’espère qu’elle va pas se planter. Son voisinage appréciera sûrement pas de se faire réveiller à cette heure-là. On a une chance sur deux. Comme à la roulette, mon jeu favori au casino. J’ai gagné ce soir. Peut-être que je suis assez en veine pour tenter ma chance ? Je mise sur gauche dans ma tête. Et si la brune me répond pas dans les cinq secondes, j’y fonce.
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S'il ne tenait qu’à mon ressenti, je dirais que ma chute est spectaculaire. Elle est surtout pathétique. La joue contre le bitume, je sens les petits granulés du sol s’incruster dans ma peau et ma position est des plus inconfortables. Je n’ai toutefois pas la force de me relever. A cet instant, je me fais la promesse de stopper l’alcool. Ou du moins, de ne plus en consommer autant lorsque je n’ai pas ma meilleure alliée pour me sauver de l’ivresse. Je bredouille un dernier appel à l’aide à ma sauveuse. Pathétique. Néanmoins, elle en a déjà vu bien trop pour que la honte ne m’envahisse, maintenant. — Le sol est pas top comme lit. Puis je t’ai prédit qu’une bonne samaritaine allait te border cette nuit. Et comme y' a pas de couverture ici, je vais devoir te ramener chez toi. Je soulève ma tête, bien trop lourde à mon goût, pour tenter de croiser son regard. — Hmhm, oui… je marmonne. Je sens sa main passer sous mon bras et avec la même force que la première fois, elle me soulève pour me caler délicatement contre le mur. Les yeux mi-clos, j’esquisse un sourire débile. — Mer..ci… je soupire en laissant aller ma tête contre la cloison en grès. J’entends qu’elle remue mon sac, farfouille à la recherche de mes clés, sûrement. Je tente de tendre une main, mais mon geste me déséquilibre. Je l’arrête aussitôt pour m’éviter une nouvelle chute ridicule. La suite se passe très vite. Elle trouve mon trousseau, ouvre la porte, me traîne jusqu’à l'ascenseur et je sens mon ventre se soulever en même temps que la machine. Pitié que je ne vomisse pas ici. Pas maintenant. — Droite ou gauche, ma belle ? me demande-t-elle lorsque les portes s’ouvrent sur mon palier. Un signe de tête lui indique que la porte de mon appartement est bien celle de gauche. Dieu merci, elle m’épargne la galère de devoir enfoncer les clés dans la serrure. La porte déverrouillée, je lui fait signe en direction de l’étage. Ma chambre se trouve en haut et je regrette amèrement d’avoir choisi un duplex ultra moderne en cet instant. Une maison de plain-pied aurait été bien plus judicieux. — Je vais dormir sur le canapé ce soir, je bredouille en secouant la tête. D’un geste de la jambe, je fais sauter mon talon à l’autre bout du séjour. Pareil pour le deuxième. Toujours soutenue par Regan - bon sang je me rappelle de son prénom ! - je me déplace jusqu’à mon grand canapé d’angle. Ni une, ni deux, je m’enfonce dans ses coussins moelleux. Je dois avouer que je ne m’étais jamais sentie aussi bien chez moi. Le parfum d’intérieur, au note de figue, de feuille de violette et de santal, m’enveloppe dans un cocon boisé et me détend immédiatement. Je ne sais pas si c’est le fait de ne plus errer dans la rue, mais j’ai l’impression de retrouver mes esprits. Je lève un sourcil et croise le regard de Regan. — Merci… je murmure à nouveau. Tu n’étais pas obligée de jouer les sauveuses, mais j’apprécie. C’est cool. Un sourire un peu béat s’étire sur mes lèvres. J’ai beau me sentir mieux, l’alcool fait toujours son effet et me plonge maintenant dans un brouillard assez doux. — Je m’en souviendrais, je précise dans un murmure.
Plutôt fine d’apparence, elle pèse son pesant la brune. Heureusement que je suis pas taillée comme une crevette. Et elle m’aide pas vraiment à me soulager de son poids. Enfin, j’ai connu pire. Lora est plus lourde que cette meuf. Et elle est apte à marcher même ses pas sont hésitants et menacent de la faire tomber à chaque instant. Je suis pas obligée de la porter dans mes bras. J’avoue que ça m’arrange. Et ce qui m’arrange surtout c’est qu’elle sache m’indiquer le chemin de son appart. Je fais de mon mieux pour fouiller son sac tout en la tenant. L’exercice est ardu. Le mieux serait de la poser contre un mur pour avoir mes deux mains de libres. Mais le risque qu’elle se casse la casse est trop grand. Je tiens ni à réveiller le voisinage ni à la ramasser. Je fais le moins de bruit possible. En tous cas j’essaye. J’admets que ça commence à me gonfler. Je suis à deux doigts de renverser le contenu de son sac par terre quand je trouve, enfin, ses clés. Je déverrouille sa porte. Une fois à l’intérieur, je tâtonne ma droite en quête d’un interrupteur. La lumière est. Je prends pas le temps d’inspecter la déco. De un, je m’en bats les ovaires, et de deux, la propriétaire accapare toute mon attention. Une seconde d’inattention et elle mange le sol. Et même s’il semble joli, je doute fortement qu’il soit agréable. « Sage décision ! » Clairement, si je suis altruiste ce soir, je l’aurai pas montée à l’étage. Je veux bien l’aider mais faut pas abuser. Dans son état, c’est un coup à se fracasser toutes les deux dans les escaliers. Ses talons virés avec énergie, je l’accompagne jusqu’à son canapé. La brunette s’écroule dessus comme une masse. Elle se retrouve à faire un câlin à ses coussins. J’aurai apprécié me faire serrer dans ses bras de la sorte. Comment ça je m’égare ? « T’inquiète. Ça te coûtera un café la prochaine fois qu’on se croisera et c’est tout. » Je lui lance un clin d’œil et ris légèrement. J’ai pas agi par intérêt. De toute façon, je suis pas sûre qu’elle retienne cette info. Je suis pas sûre qu’elle retienne quoi que ce soit de cette fin de soirée. Je me demande s’il a déjà retenu mon prénom. Je le saurai lors de notre future rencontre. Dans l’idée, maintenant qu’elle est en sécurité, j’ai plus qu’à partir rejoindre mon lit. Mais je suis d’humeur généreuse. Je tiens pas à ce qu’elle ait froid. Je balaye la pièce des yeux. A part des meubles et du chichi de bobos, je repère rien d’intéressant. « Je vais chercher de quoi te couvrir, reste tranquille en attendant. » Elle semble pas disposée à bouger mais je préfère prévenir. J’ai pas envie qu’elle tombe sur le sol et de devoir la relever. J’ai eu ma dose d’exercice physique pour la soirée. Je fonce à l’étage. Je monte les marches deux par deux. Sur place, j’attrape la couette de son lit. Je la roule grossièrement en boule et je redescends. Je reviens vers Alba. Je redresse ses jambes à moitié dans le vide pour l’allonger convenablement sur son sofa. Je la recouvre de la tête aux pieds par la suite. Je prends soin de rabattre les côtés sous son corps. Et non, j’en profite pas pour la toucher. « Bonne nuit ! » Je dépose un baiser sur sa joue. J’ai l’impression qu’elle ronronne et dort déjà. Je m’éloigne en direction de l’entrée de son domicile. J’éteins la lumière et je ferme doucement la porte. J’ai plus qu’à me rentrer et l’imiter. Et j’ai hâte. Je suis naze comme en témoigne l’énorme bâillement qui déforme ma bouche en rentrant dans l’ascenseur.