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 (craker #23) one step at a time

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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptySam 26 Fév 2022 - 12:24



ROSALIE CRAINE & @WYATT PARKER ☽ Let's get drunk. I'll pour my heart out through my mouth. This year's been hard for us, no doubt. Let's raise a glass to a better one. Let all the things that we've overcome bring hope to us 'cause. Me and you, we can hold this out. Only you understand how I'm feeling now. And I know I can tell you anything. You won't judge, you're just listening. Cause you're the best thing that ever happened to me.


Proposer à Wyatt de se rendre à cette dégustation de vins était un risque à prendre en soi. Tu ne te souviens pas de la dernière fois que vous êtes sortis tous les deux, de manière volontaire, à l’occasion de quelque chose qui s’apparente un peu à un date entre deux adultes volontaires et consentants. Il y a longtemps que vous n’avez pas fait quelque chose d’aussi anodin ensemble, quelque chose qui ressemble d’un peu trop près à une activité de couple, une appellation que vous refusez de vous offrir, même si cette dernière est sûrement ce qui représente le mieux cette nouvelle dynamique qui a pris place entre vous deux dans le dernier mois. Si la priorité reste Gabriel, il n'a plus le monopole de l’attention, quand des gestes d’affections ici et là ont su venir teintés votre quotidien doucement, lentement, avec toute la vigilance du monde, dans l’espoir toujours de ne rien brusquer. Vous savez tous les deux que tout est encore bien trop fragile, l’équilibre extrêmement précaire alors que vous tentez de naviguer ce qui peut être sans jamais oublier ce qui a été par le passé. La proposition de cette dégustation est tombée un soir après une bonne journée avec Gabriel, sans que tu ne te donnes le temps d’y penser trop longtemps parce que tu savais que les risques que tu changes d’idées étaient trop grandes si tu remuais les pour et les contre de cette sortie à deux. Et c’est sans doute avec cette même mentalité qu’il a accepté, le Parker, quand déjà une partie un brin plus complexe s’affichait au tableau. Trouver quelqu’un pour s’occuper de Gabriel. Encore, ça n’avait pas été si compliqué que ça. Vous aviez quelques options et c’est finalement ton frère Rory qui s’est retrouvé en charge de votre fils le temps de quelques heures. Le plus compliqué, ça avait été de laisser Gabriel avec Rory et de résister à la tentation de tout annuler simplement pour pouvoir garder le petit garçon contre toi. C’était la première fois en trois mois, la première fois depuis que vous étiez rentré chez Wyatt que tu passais du temps loin de lui et il était palpable que la séparation t’apportait un gros lot d’anxiété. Tu avais tout de même réussi à prendre sur toi, quand après mille vérifications en tout genre, tu avais fini par passer le cadre de la porte pour suivre Wyatt jusqu’à la voiture et laisser derrière toutes tes inquiétudes.

Du moins, tu essayais vraiment très fort. « Tu penses qu’il est trop tôt pour appeler Rory? » C’est sans grande surprise que vous vous êtes détachés du reste du groupe présent pour la dégustation, n’ayant ni un ni l’autre l’envie de partager le moment avec des gens que vous ne connaissez pas et avec qui il est rapidement que vous n’avez absolument rien en commun. Dans une autre vie, au bras d’un autre homme, tu aurais été obligé de faire du small talk toute la soirée, de sourire chaque fois qu’un regard se posait sur toi et prétendre que tu étais intéressée par tous les sujets de conversations insignifiants qui débutaient entre les autres couples participants à l’activité. Avec Wyatt, il n’a jamais été question de faire semblant avec les autres, oh ça non. Doués pour faire semblant entre vous, c’est là que s’arrêtait les talents de comédie du Parker et de retrouver ce vent de fraîcheur, cette honnêteté d’être te faisait encore plus de bien que tu n’aurais pu te l’imaginer.  Tu te retiens constamment pour regarder l’écran de ton téléphone, juste au cas où ton frère aurait envoyé un message, juste au cas où il aurait une question (malgré la liste très détaillée des choses à faire et à ne pas faire) ou qu’une urgence surviendrait. Il t’est plus difficile que tu ne le pensais que d’être complètement dans le moment présent et même les différents vins qui s’offrent à vous ne semblent pas aider à calmer tes nerfs de maman un peu trop protectrice. « Celui-là goûte absolument rien. » que tu annonces après avoir recraché la gorgée d’un vin blanc dans lequel vous êtes censés retrouvés des saveurs de petits fruits, même si c’est loin d’être le cas selon toi. Ce sont les nerfs qui s’additionnent, quand tu penses constamment à ton fils, quand c’est étrange d’être ici avec Wyatt, quand tout savoir sur les étiquettes qui entourent les rendez-vous semblent avoir déserté ton cerveau vide de toute information pertinente. Tu prends une longue inspiration et laisse ton regard se perdre un instant sur les vignes qui s’étendent partout autour de vous, avant de retrouver le regard de Wyatt et c’est sans trop y penser que tu laisses ta main libre se glisser dans son dos. C’est normal ça, c’est naturel et ça aide à te calmer, à te ramener dans le moment présent pour profiter de l’essentiel : cette envie toute simple de faire ça avec lui.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyDim 6 Mar 2022 - 15:21

Le choix du lieu ne revenait qu’à Rosalie quand j’aurais probablement proposé que l’on s’échappe dans un lieu isolé sans jamais s’imposer le regard des autres. Elle a toujours été à son aise en société, capable de se fondre dans la moindre des situations et d’entretenir le small talk avec un intérêt non feinté de faux-semblants. Tout un art que je n’ai jamais su maîtriser, incapable de prétendre au moindre intérêt dans la vie de parfait inconnu réuni par le hasard des choix dans un même lieu. J’avais accepté de la suivre dans l’unique perspective de passer une soirée loin de l’appartement sans que Gabriel ne se décide à jouer les troubles fêtes. Il maîtrise parfaitement son timing le petit monstre quand il se décide bien trop souvent à pleurer lorsque l’excitation de la journée finis par retomber pour tout le monde et que l’on s’essaye à entretenir une conversation éloignée des couches et heures de biberons. « Tu penses qu’il est trop tôt pour appeler Rory? » Un rire m’échappe quand j’avais déjà deviné par mille fois que l’envie la démange d’attraper son téléphone. Rosalie est à mille lieus de l’instant présent depuis notre départ, perdu dans ses pensées, sûrement à imaginer qu’elle venait de commettre le pire des abandons. « Il nous a pas encore appelés pour nous supplier de rentrer, le monstre doit encore dormir. » que je taquine en venant poser ma main sur la sienne. Pourtant, dès l’instant où la jeune mère se détourne pour observer le paysage, je glisse un coup d’œil à mon propre portable pour m’assurer que Rory n’a réellement pas tenté de nous joindre. Le sentiment est étrange, ce n’est pas la première fois que je m’absente loin de Gabriel contrairement à Rosalie, mais il faut croire que son état anxieux est devenu contagieux.

À l’écart de la majorité du groupe, le regard tourné vers l’extérieur plutôt que sur la présentation, on s’attarde à se créer une bulle loin de tout. Quand l’esprit de Rosalie ne cesse de retourner à notre fils, le mien semble se donner en joie de tenter toutes les directions possibles. À me rappeler que je n’ai jamais réellement eu conscience des codes à suivre lors d’un premier rendez-vous tout en soulignant que l’époque des jeux idiots se doit de cesser. Auparavant, tout paraissait simple lorsque je me pointai dans ce genre d’événement dans le seul objectif de croiser le regard de Rosalie, en espérant la tirer des bras de l’autre. Il n’était pas nécessaire de réfléchir dans ces cas-là, la conversation s’apparentait à une énième dispute qui ne faisait guère sens pour l’un comme pour l’autre avant que le désir charnel prenne le dessus pour régler le conflit dans la manière la plus primaire qui soit. Il s’agit de réapprendre à faire autrement quand je refuse de tout gâcher bêtement, mais que son attention s’éloigne à chaque minute et que la mienne jongle entre les erreurs à ne pas reproduire et tout ce qui me prend la tête depuis des semaines. « Celui-là goûte absolument rien. » C’est le contact de sa main contre le tissu de ma chemise qui me ramène dans l’instant présent, loin des directives à suivre et des conflits de famille passés sous silence. « En même temps, le vin australien… » Je goûte par principe et retiens une grimace quand l’acidité du liquide s’en vient à énerver mes papilles. Non clairement ça s’apparente à la piquette que ma sœur adorait voler à la supérette du quartier. J’avise le papier qui nous a été confié par le tenant du lieu où l’on se doit de laisser nos commentaires. « J’hésite entre "même le vinaigre, c’est meilleur" ou "change de métier"... » Amusé, je relève les yeux vers Rosalie. « Une préférence ? » À faire de l’humour, je tente d’ignorer le fait qu’elle soit aussi proche, en public, et que cela soit parfaitement normale puisque rien ne la retient ailleurs. Il n’est plus question de se cacher et pourtant, c’est tout ce que je souhaiterais faire, que l’on garde cela pour nous, que personne n’es le pouvoir de s’abaisser à un commentaire ou un jugement quelconque.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMar 8 Mar 2022 - 23:09

Tu tires sur les manches de ta blouse. Tu as l’impression qu’elle est serrée, inconfortable. Ou bien est-ce que c’est la nervosité du moment qui te pèse autant sur la poitrine? C’est difficile à dire. Ça fait des mois que tu n’as pas enfilé des vêtements ne s’apparentant pas de près ou de loin à des joggings et les t-shirts les plus confortables (et désormais tâchés) qui soit. Des mois que tu n’as pas pris le temps de prendre le temps, justement. La coiffure, le maquillage, ces apparences parfaites que tu as si longtemps prôné ont rapidement pris un rôle de seconde main quand la moindre parcelle de ton énergie était désormais dédiée à Gabriel. Gabriel qui occupe inévitablement chacune de tes pensées depuis l’instant où vous avez quitté l’appartement de Wyatt, même si tu sais très bien qu’il est entre de bonnes mains avec Rory et que jamais ton frère n’hésiterait à t’envoyer un message ou à t’appeler s’il venait à arriver quelque chose. Ta culpabilité elle, ne semble pas vouloir s’entendre avec ta raison, ni ta logique, quand elle ne cesse de te répéter que c’est bien trop tôt pour être sans lui, que c’est égoïste de ta part d’avoir ce besoin de temps à part, de temps pour toi, de temps pour Wyatt quand bien même on te répète partout et sans arrêt que c’est légitime et tout ce qu’il y a de plus normal et de sain à faire. C’est une éternelle bataille dans ton esprit, que tu ne sembles jamais parvenir à gagner, même si tout ce que tu veux, c’est profiter de ce moment, dans ce lieu qui te semble de plus en plus mal-choisi avec chaque minute qui passe. « Il nous a pas encore appelés pour nous supplier de rentrer, le monstre doit dormir encore. » Un vrai miracle à bien y repenser puisque votre fils ne semble pas être un très grand fan de ce concept ô pourtant si essentiel qu’est le sommeil. C’est d’un signe de tête que tu approuves. Tout va bien. Tu te fais des scénarios catastrophes pour rien, tu en conviens. Ton esprit vagabonde temporairement sur le paysage qui s’offre à vous, mais tu le vois du coin de l’œil qui sort son téléphone seulement pour le remettre dans sa poche la seconde suivante. « J’t’ai vu. » que tu souffles amusée, tournant ton regard vers le Parker. « Papa poule. » que tu le taquines. Jamais tu n’aurais cru un jour dire ces mots, pas à lui, pas comme ça, jamais. Et pourtant, la vie avait trouvé le tour de vous surprendre encore et encore.

Tu aurais dû être complètement à l’aise dans un endroit comme celui-là, mais force était d’admettre que ce n’était pas le cas, quand ce monde te semblait dorénavant à des kilomètres de ce que tu voulais, de ce que tu recherchais. Les vins s’enchaînent mais rien ne retient réellement ton attention, partiellement parce que ces derniers sont sans goût, mais en partie aussi parce que tu penses à tout sauf ce qui se passe dans l’immédiat, trop concentrée à intercepter chaque regard qui se pose sur toi, comme si tu avais peur de tomber sur quelqu’un que tu connais, comme si tu craignais avec chaque nouvelle personne croisée que la comédie doive reprendre alors que le choix final te revient complètement. « En même temps, le vin australien… » Évidemment que monsieur le français n’a jamais été un grand fan des vins australiens, et évidemment qu’il ne se gêne pas pour te rappeler que c’est loin d’être la spécialité de ton pays ce qui ne manque pas de te faire rire. Sa grimace t’arrache un rire supplémentaire, quand déjà tu te doutes que ni lui ni toi ne trouverez votre compte dans ce wine tasting des moins prestigieux. « J’hésite entre “même le vinaigre, c’est meilleur” ou “change de métier”… » Tu en reprends une nouvelle gorgée, seulement pour mieux réaliser que tu n’as pas du tout envie de finir ce qui se trouve dans ton verre. « Une préférence? » « Je pense que la comparaison avec le vinaigre est appropriée, quoi qu’un brin insultante pour le vinaigre. » C’est pour dire. Le groupe se déplace à nouveau et l’envie de ne pas les suivre se fait plus forte que jamais, et tu n’as pas réellement besoin de lire dans les pensées de Wyatt pour deviner qui lui non plus ne se ferait pas prier pour poursuivre la soirée ailleurs. « Sur une échelle de 1 à 10, à quel point est-ce que t’as pas envie d’être ici? » que tu murmures d’une voix qui se veut pleine de complicité. « Parce que moi non plus. » Bon, c’était ton idée, pas ta meilleure, mais ça ne voulait pas dire qu’il était trop tard pour rectifier le tir. « J’propose qu’on se tire d’ici à la première occasion, qu’on arrête acheter des bouteilles de bons vins et peut-être de quoi manger à ce petit bistro français, juste à l’extérieur de Spring Hill? » Ce serait sur le chemin, après tout. « On pourrait aller chez moi, je sais que Wendy est pas là. » Et ça vous éviterait de perdre cette soirée de rendez-vous, surtout que vous ne savez pas du tout quand vous aurez l'occassion de remettre ça. Mais plus tu réalises ce que tu viens de dire, plus tu réalises que ça peut sonner comme une invitation à autre chose complètement. Est-ce que ça en est une? Est-ce que tu veux que ça en soit une? Pourquoi est-ce que tu es complètement en train d’over analyser tout ça? Ça devrait être simple, pourtant ce ne l’est pas. Si l’intimité est la chose qui vous a maintenu l’un à l’autre pendant bien trop longtemps, dans un jeu des plus malsains, réapprendre à faire sans ça s’avère plus compliqué que jamais. Réapprendre à s’apprivoiser est une tâche qui s’apparente à un travail à temps plein, pour laquelle vous n'avez pourtant que bien trop peu de temps à offrir. « J’pourrais ramasser quelques trucs au passage. » Parce que chez toi, ce n’est plus vraiment chez toi, et ton tiroir chez Wyatt semble prendre de l’expansion avec chaque jour qui passe. « C’est comme tu veux. » Tu n’as jamais autant dit ces mots-là que dans les derniers mois, un vrai miracle.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptySam 19 Mar 2022 - 14:06

« Je pense que la comparaison avec le vinaigre est appropriée, quoi qu’un brin insultante pour le vinaigre. » Je hoche la tête, retenant un éclat de rire tandis que Rosalie goûte son verre dans une répétition qui se veut entêtante. À croire qu’elle cherche à se convaincre que si elle persiste, le vin finira par révéler une saveur, n’importe laquelle qui pourrait donner sens à notre présence dans l’établissement. Le lieu est sympathique, mais tout semble s’apparenter à une arnaque qui ne pourrait fonctionner que sur quelques touristes crédules. « Hmmm… Je vais quand même lui conseiller de changer de métier. » De ma plus belle plume, je me lance dans un commentaire bien trop long pour son utilité, rempli de mots en tout genre qui se veut à venir alambiquer l’ensemble de la critique. Juste assez pour prétendre à l’arrivée d’un compliment qui ne viendra jamais, mais se transforme plutôt en une consigne sans détour de fermer boutique sur le champ afin de cesser la perpétuation d’un tel outrage sur l’art du vin. Amusé de ma rédaction, je ne désire désormais que prendre la fuite pour cesser le manège qui semble accorder qu’une soirée à deux se doit d’entrer dans un cadre prédéfini. « Sur une échelle de 1 à 10, à quel point est-ce que t’as pas envie d’être ici? » - « Un million et demi. » Et plus encore lorsque mon regard croise le sien dans une complicité sans faille. « Parce que moi non plus. » Que l’on se casse alors. Autant se tailler avant que l’autre nous impose de goûter à une autre bouteille qui finira de donner aucun sens à l’enseigne qui se balance au-dessus de nos têtes prétendant à un héritage familial massacrer par le vinaigre produit par le fils. « J’propose qu’on se tire d’ici à la première occasion, qu’on arrête acheter des bouteilles de bons vins et peut-être de quoi manger à ce petit bistro français, juste à l’extérieur de Spring Hill? » Je signe avant même qu’elle termine d’exposer son plan pour le reste de la soirée. On aurait pu s’éviter bien des souffrances si on avait débuté par-là, mais Rosalie cherchait tant à bien faire que je préfère conserver le commentaire pour une autre fois. Malgré tout, on s’entête à suivre le groupe, comme si la décision n’était pas réellement prise. « On pourrait aller chez moi, je sais que Wendy est pas là. » L’excuse du public ne prendrait plus, il ne resterait que nous, en tête-à-tête, sans que Gabriel ne nous serve de bouclier. Soudain, elle hésite la Craine, je pourrais entendre le train de ses pensées qui n’a de cesse d’accélérer pour passer toutes les possibilités en revue dans la crainte ultime d’avoir proposer une faille au plan initial. « J’pourrais ramasser quelques trucs au passage. » Et je pourrais m’amuser de la voir galérer ainsi, la laisser ramer pour entendre tout ce qui se trame au-delà de l’inquiétude que je sais lire dans le creux de ses prunelles. « C’est comme tu veux. » - « Arrête de réfléchir. » De penser a tout comme si on allait forcément foncer dans le mur de manière intentionnelle. Les rendez-vous aux cadres fixes et imposés n'ont jamais été un franc succès entre nous, prétendre s’intéresser à quelque chose qui nous ennui ne fera qu’amener des conversations amères. Alors, mes doigts viennent chercher les siens pour la tirer vers la sortie sans jamais se retourner vers tous ceux qui nous observaient, nous tirer en riant.

Le trajet qui nous ramène en ville se déroule entre discussion animée sur l’horreur gustative que l’on vient de vivre et une guerre sans fin sur l’éternelle différence qui existe entre nos choix musicaux. À mesure des kilomètres, Rosalie semble se détendre quelque peu. On ne déroge pas à quelques messages échangés avec son frère, mais rapidement, nos téléphones terminent dans la boîte à gants, comme le dernier de nos soucis. Sur une de ses chansons préférées, la pire de toute, la brune pousse la chansonnette à mesure que mon regard joue un jeu dangereux entre observer son profil et garder la route en visu. Tout semble naturel, rien n’est forcé lorsque ma main glisse sur sa cuisse, quand elle vient voler un baiser à un stop. À croire que l’on est capable, de lâcher prise…

Le carillon de la porte couvre à peine le bruit de l’animation qui semble règne dans l’échoppe du vieux Paul. C’est souvent comme cela dans le coin, le Marseillais d’origine n’a jamais perdu son caractère de Français du Sud et s’entête trop souvent à conseiller ses clients sans que personne ne lui est jamais rien demandé. Habitué des lieux, j’entraîne Rosalie dans les rayons. « Blanc ou rouge ? » Autant faire avant que l'ancien ne rapplique pour tenter de nous vendre sa bouteille la plus chère, qu'importe si je lui ai juré par cent fois que je ne serais pas son idiot du jour. Sans même réfléchir, ma main ce glisse dans le dos de la brune, pour venir se loger dans le bas de ses reins. Le monde extérieur n'existe plus réellement tant l'envie de s'échapper domine tout le reste. « Non pas ça. » Je la voyais tendre la main vers une bouteille et c'est bien le pire choix qu'elle pouvait faire. « Je sais ce que tu vas dire, la bouteille est sympa. » Mon imitation est bien maigre, mais je tente quand même. « Mais tu vas pas aimer. » Parce que le rouge sera bien trop tannique pour qu'elle n'est envie de se servir à nouveau. « Je vais choisir le vin, c'est mieux » que je concède sans jamais ôter la position adopter par ma main gauche. Derrière nous, Paul s'en retourne à sa caisse en nous demandant de nous dépêcher faisant sonner son accent plus fort encore au creux de son agacement. « Tu as faim ? » Et après on pourra filer ailleurs. Loin du brouhaha, loin du regard des autres surtout.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyLun 18 Avr 2022 - 14:18

À trop vouloir bien faire, tu perds de vue le but de cette soirée à deux. Cette envie, ce besoin même de connexion, de vous retrouver tous les deux, loin de vos rôles de parents qui prennent pourtant toute la place depuis la naissance de Gabriel. À trop vouloir que tout se passe le mieux possible, tu en oublies que ce contexte pourri dans un vignoble au vin infecte est loin de tout ce qui vous représente réellement. Il devient rapidement clair qu’il ne veut pas être ici et toi non plus, et c’est un soudain élan de panique et de nervosité qui t’envahit alors que tu regrettes de te retrouver en charge des plans de la soirée. Comme si tu étais soudainement incapable de prendre les choses comme elles viennent, alors que c’est bien dans ces contextes-là que vous réussissez le mieux, tous les deux. C’est compliqué de trouver la balance parfaite entre ce que vous devez être pour Gabriel et ce que vous avez envie d’être l’un pour l’autre, encore plus impossible il semble de composer votre passé commun avec un quelconque avenir et c’est avec tout ça en tête que tu balbuties des idées sans être trop certaine de la direction que devrait prendre les prochaines heures. Tu oses à peine croiser le regard de Wyatt parce que tu sais qu’il te connaît assez pour entendre toute l’hésitation dans ta voix, celle à laquelle tu ne l’as pas du tout habitué dans les dernières années. Il te connaît assez pour entendre chaque doute, chaque peur qui persiste entre chacun de tes silences, ceux qu’il perçoit dans tes gestes nerveux et dans le débit de ta voix trop rapide. Pourtant, ce n’est pas du jugement, ni même des reproches que tu aperçois sur son visage lorsque tu lèves enfin les yeux. Non, c’est qu’il s’amuserait presque de la situation le Parker alors qu’une fois encore, il semble se faire la voix de la raison. « Arrête de réfléchir. » Tu échappes un léger rire avant d’hocher la tête en guise d’approbation. C’est plus simple à dire qu’à faire, mais quand sa main attrape la tienne pour te tirer de cet endroit déprimant, direction quelque chose qui vous ressemble beaucoup plus.

Tu te calmes un peu entre deux chansons pop alors que vous prenez la direction de Spring Hill. Ta voix qui envahit l’habitacle, la main de Wyatt qui se pose naturellement sur ta cuisse, il serait presque facile de croire que les dix dernières années n’ont jamais eu lieu, que vous n’êtes encore que ces gamins avec toute la vie devant eux et pas le moindre souci. Si ce n’était pas de ce siège d’auto à l’arrière, ou de ces messages échangés avec ton frère pour s’assurer que tout se passe bien avec Gabriel. Tu tentes de ne pas te perdre dans tes pensées, d’arrêter de réfléchir comme il te l’a dit si bien dit. Les rayons de la supérette s’étendent devant vous alors que tu regardes les différentes bouteilles de vins qui s’offrent à vous sans vraiment savoir vers quoi te tourner. « Blanc ou rouge? » « Rouge. » Ça au moins, tu le sais, mais ça ne semble pas vraiment réduire le nombre de choix qui se présentent sous vos yeux. Tu ne comprends pas la moitié des choses qui sont écrites sur les différentes étiquettes alors évidemment que ton choix se base sur l’apparence de la bouteille, chose qui ne semble pas satisfaire les goûts du français. « Non pas ça. Je sais ce que tu vas dire, la bouteille est sympa. » Tu fronces légèrement les sourcils, pas tout à fait convaincue par sa piètre imitation de ta voix. « Mais tu vas pas aimer. » L’envie de le contredire simplement pour le plaisir de lui donner tort est forte, mais tu te contentes de hausser les épaules alors qu’il s’attarde déjà sur une autre bouteille. « Je vais choisir le vin, c’est mieux. » Tu sens sa main dans le bas de ton dos, son pouce qui se promène machinalement contre le tissus de ta blouse dans un geste qui se veut à la fois familier et complètement nouveau. Tu tournes la tête légèrement dans sa direction, un léger sourire se loge sur tes lèvres. « Je te fais confiance. » Pour le choix du vin oui, mais pour tellement plus aussi et ce simple commentaire, c’est un peu ta façon à toi de lui faire savoir où tu en es présentement, comment tu te sens en sa présence. Tu sais pertinemment que tu as encore beaucoup de travail à faire pour regagner sa confiance à lui, mais tu espères toujours qu’avec cette transparence nouvelle que tu t’efforces de lui accorder, tu lui prouves un petit plus à chaque jour que vous deux, ce que vous vivez désormais, c’est loin d’être ce jeu que c’était autrefois.

« Tu as faim? » Tu fais signe que oui de la tête et ça ne prend pas plus de temps avant que vous vous retrouviez avec deux bouteilles de vin en direction de ce petit bistro duquel vous commandez pour emporter. La destination finale se retrouve à être ton loft comme tu le lui avais proposé et il y a quelque chose de particulier au fait d’y revenir après tant de temps passer chez lui. La dernière fois que vous vous êtes retrouvés ensemble chez toi, c’est lors de cette nuit où l’ambiguïté a repris toute la place entre vous, juste avant que tu ne découvres ce carnet empli de tous ces doutes qu’il n’aurait probablement jamais osé partager avec toi si tu ne les avais pas découvert par hasard. Tout était complètement différent à ce moment-là, Gabriel n’avait pas encore chamboulé vos univers, plus encore que tout ce que tu aurais pu t’imaginer. Assis autour de la table, les silences se font plus nombreux que les bribes de conversation entre deux bouchées et tu réalises que malgré le vin et les bons conseils de Wyatt, tu te sens comme une adolescente qui vit son premier date. « Je me souviens pas la dernière fois que tu m’as rendu si nerveuse. » C’est dit avec un léger rire, avec le regard qui s’attarde un peu trop sur tes doigts qui pianotent la table avant de venir prendre une nouvelle gorgée de ton verre de vin. « Boyd veut que je recommence à écrire. » que tu annonces comme ça, dans une tentative nouvelle de conversation qui n’a pas comme sujet premier votre fils. « Ou à défaut de travailler sur un nouveau manuscrit, il veut que j’aide une nouvelle auteure qu’il a signé récemment. » Tu appréhendes un peu ce retour, surtout à titre de mentor, même si tu penses que tu as besoin plus que jamais de te retrouver en dehors de ton rôle de mère qui accapare pourtant tout ton temps. « Comment se passe l’écriture de ton nouveau roman? » Les moments passés à l’extérieur de l’appartement se multiplient dernièrement et tu espères sincèrement que c’est un bon signe pour lui.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMer 20 Avr 2022 - 11:49

À quoi bon prétendre à se trouver une place dans un événement qui se veut socialement acceptable, lorsque tout ce que l’on a toujours su faire à la perfection, c’est bel et bien de se cacher du regard des autres. Aucun de nous ne cherche l’approbation de quelques étrangers au regard curieux qui s’empresseront de vouloir deviner l’identité de ceux qui osent venir s’incruster dans leur cercle si étroitement fermé. Tout paraît bien plus aisé dès l’instant où l’on se retrouve à deux, perdu dans les allées d’une minuscule boutique à l’accent français ou à lire la carte d’un restaurant que l’on connaît par cœur, mais qui aurait pu ajouter une nouveauté que l’on regretterait de ne pas avoir relevé. Et à chaque instant, dès lors qu’il ne reste plus qu’elle à mes côtés, j’observe le profil de Rosalie. Son air qui se détend à mesure que l’on se permet quelques libertés non calculées, son rire amusé lorsqu’elle s’accorde de commander une part supplémentaire de son dessert préféré. Auparavant, le simple fait de passer la porte de son appartement aurait entraîné l’enchaînement en cascades des actes manqués. Il y a encore une année de cela, la nourriture aurait eu le temps de refroidir par cent fois sur le comptoir, quand les minutes de son attention étaient comptées et que rien ne semblait exister en dehors de l’affection que l’on se refusait à se donner ailleurs qu’entre les draps d’un lit que l’on ne partageait que furtivement, lorsqu’elle avait le temps. Ce soir, tout paraît différent. Il n’existe aucune urgence quand je sais qu’à la fin du décompte elle sera encore présente à mes côtés. Ce serait mentir que de nier le désir qui persiste au fil des années. Bien sûr que j’ai noté la légère transparence de sa blouse qui laisse entrevoir la courbe de ses seins. Il serait si simple de venir frôler son corps, de laisser mes doigts glisser sur cette courbe pour nous amener vers nos plus sombres travers. Mais ce n’est plus ce que je souhaite pour nous, de se perdre dans un désir charnel qui enterre tout le reste. Des années durant, on a fait primer le sexe sur toute notre relation, incapable de se dire non, drogué à la moindre seconde d’attention offerte dans des baisers qui ne transportait qu’une colère sans nom. L’unique but était de profiter avant de blesser à nouveau pour ne jamais trop s’attacher, pour prétendre à une parfaite maîtrise de l’instant quand nous n’étions que des pantins au sein de notre propre scénario. On avait beau prétendre, on en revenait toujours au même départ, jusqu’à ce que le Destin ne prenne les rennes en main, nous rappelant à l’ordre en faisant entrer dans nos vies un petit garçon, créant un lien indéfectible. C’est peut-être tout ce qui nous manquait réellement, ce lien qui nous ancre dans la vie de l’autre sans que l’on puisse se dérober par une pirouette improvisée.

On oublie l’urgence de devoir profiter de chaque instant comme si c’était le dernier, en s’accordant une dynamique nouvelle. Tels deux adultes responsables, voilà que l’on prend le temps de dîner en cherchant par tous les moyens à rendre la conversation intéressante avec comme consigne de ne pas intégrer Gabriel à chacun de nos échanges. Alors parfois, le silence prime sur les mots, parce que l’on n’a jamais dû faire ainsi, parce qu’avant, on passait notre temps à se battre entre les draps plutôt qu’à prendre le temps de converser comme on avait su le faire dans une vie passée. « Je me souviens pas la dernière fois que tu m’as rendu si nerveuse. » Un rire m’échappe amusé par la situation qui fait de nous deux adolescents bien trop nerveux. « Je t’impressionne ? » Tout est sur le ton de la blague quand j’ai la sensation d’être aussi nerveux qu’elle, mais que cherche à le cacher encore un peu. « Je me souviens pas la dernière fois où on a pris le temps en fait. » Le temps de s’accorder une pause à deux, le temps de dîner ainsi tout en cherchant à avoir une réelle conversation d’adulte qui n’incrimine personne à coup de sentiments déguisés et de vérité inavouée. C’est qu’il faut tout réapprendre.

« Boyd veut que je recommence à écrire. » Ce serait bien, mais j’ai la sensation que ce n’est pas la seule chose qu’elle aimerait dire sur le sujet. Alors, je prends une nouvelle gorgée de mon verre, attendant la suite qui ne tarde à s’étaler sur la table. « Ou à défaut de travailler sur un nouveau manuscrit, il veut que j’aide une nouvelle auteure qu’il a signée récemment. » Elle appréhende tout Rosalie, je ne l’ai jamais vu douter ainsi. « Qu’est-ce qui te ferais le plus envie ? » J’ai la sensation qu’elle s’est trop perdue en chemin pour écrire à nouveau tête baissée. Quelque chose à changer, au travers de son rôle de maman ou ailleurs je n’en sais rien, mais ses objectifs ont pris une tout autre dimension. « Si tu prenais à écrire, tu a la matière ? » Les idées, elles sont toujours là dans le fond, un écrivain vit avec son imagination et un simple plat de nouilles pourrait enclencher une session d’écriture endiablée. Mais a-t-elle la matière qui la ferait vibrer au point d’en écrire 300 pages ? Le sujet qui fera tourner son intrigue ? On retombe à des années en arrière, lorsque l’on s’accordait encore le droit d’échanger au sujet de notre métier. Lorsque je lui faisais confiance de manière aveugle et que l’on passait nos soirées à lire le manuscrit de l’autre pour corriger, pour rediriger vers une piste plus folle encore. Elles m’avaient manqué, ces conversations-là, je m’en rends compte que maintenant. « Comment se passe l’écriture de ton nouveau roman? » Elle voit les carnets qui s’accumulent et les taches d’encre sur mes doigts. Elle doit reconnaître le processus dans lequel je m’enferme depuis des semaines tout en essayant de ne pas les tenir complètement en dehors elle et Gabriel. « J’ai trouvé le ton à donner. » C’est ce qui me manquait cruellement pour faire renaître cette histoire qui m’a hanté des années durant. « J’ai posé les personnages et l’intrigue. » La trame est bien ancrée dans tout ce que j’ai pu écrire, le rythme est donné et les personnages se sont dessinés avec une aisance que je ne pensais plus jamais pouvoir retrouver. « Il faut que je fasse encore quelques recherches pour être sûr de ne pas me tromper dans ce que j’avance. » Je détesterais manquer de cohérence dans mes propos. « Y’a encore beaucoup de boulot, mais j’écris à nouveau. » Comme avant, dans une fluidité addictive qui pousse à toujours en vouloir plus. Il ne reste que cette angoisse que tout s’écroule à nouveau, alors je joue la prudence, je ne propose pas de partager, je ne m’enquiers pas réellement de son avis. Le sujet est encore fragile.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMer 20 Avr 2022 - 13:50

« Je t’impressionne? »
« Ça t’étonne? »

Tu réponds sur le même ton amusé que lui, ton sourire fait reflet au sien alors que vous découvrez ensemble, tranquillement, prudemment cette envie nouvelle de transparence et d’honnêteté, vous qui avez si longtemps été sur vos gardes en la présence de l’autre. C’était la seule manière de fonctionner, la seule raison sans doute pour laquelle votre idylle a su perdurer aussi longtemps alors que tu étais avec un autre, alors que tout de vos vies et de vos univers respectifs auraient dû vous pousser loin l’un de l’autre depuis trop longtemps. C’est une chimie qui ne s’explique pas qui vous ramène ensemble, c’est un déni trop longtemps gardé qui a bien failli avoir raison de vous une bonne fois pour toute. Jamais tu n’aurais cru possible, il y a un an à peine, que vous en seriez là aujourd’hui. Au milieu de ton appartement, à profiter d’un simple repas ensemble, à chercher la meilleure manière de faire, la bonne façon d’être ensemble après trop d’années à faire tout le contraire. « Je me souviens pas la dernière fois où on a pris le temps en fait. » Probablement parce que ce n’était pas quelque chose que vous pouviez vous permettre. Tu ne lui offrais que des bribes de ton temps, des rendez-vous volés avec chacune des heures comptées, du temps emprunté qui n’était jamais sien. Tu n’étais pas certaine de mériter cette nouvelle chance, cette millième chance avec lui, et c’est peut-être pour ça que la nervosité prenait plus de place qu’à l’ordinaire. Quand la peur de retomber dans tes mauvaises habitudes demeurait toujours une possibilité que tu ne voulais pas envisager, mais qui ne disparaissait jamais complètement. Presque aussi terrifiée à l’idée de t’ouvrir complètement qu’à l’idée de te refermer, de ne rien assumer. Terrifiée de faire un faux pas et terrifiée de ne pas avancer du tout. Si dans votre quotidien il est facile de vous oublier au profit de votre fils, ce soir l’absence de distraction pousse à une réflexion qui fait battre ton cœur plus vite à elle seule. « On a beaucoup de rattrapage à faire. » Du rattrapage sur toutes ces années où vous étiez dans la vie l’un de l’autre, mais pas de la bonne manière. Du rattrapage sur du temps de qualité qui n’inclut pas automatiquement une danse entre les draps. Du rattrapage à profiter de sa présence, tout simplement.

« Qu’est-ce qui te ferais le plus envie? » Il est bien là le problème, quand depuis plusieurs mois déjà, tu n’es plus certaine de te retrouver au sein de ta passion. L’écriture comme tu l’as toujours connu ne te fait plus le même effet, et tu ne saurais réellement expliquer le pourquoi du comment. Tu n’arrives plus à te plonger dans ces univers que tu as pourtant créer de toutes pièces, ceux dans lesquels tu as fait évoluer de nombreux personnages, ceux dans lesquels tu pensais te perdre encore pendant plusieurs romans. Partir sur autre chose, un autre genre est une possibilité évidemment, mais tu ne pourrais pas jurer que l’envie y est vraiment. Tu te sens coincée quelque part entre ce besoin de te retrouver à l’extérieur de ton rôle de mère, et cette impression étouffante que tu n’as plus réellement ta place dans cette vision que tu as si longtemps eu de ta carrière. « Si tu prenais à écrire, tu as la matière? » Tu fais signe que oui de la tête, sans grande conviction toutefois. « J’avais déjà fait le plus gros du schéma de mon prochain roman, mais j’arrive pas à m’y mettre. » L’histoire ne te passionne plus comme elle le faisait il y a un an et demi, tu as l’impression que toutes tes idées tombent à plat avant même que tu n’aies eu le temps de les propulser quelque part et tu ne vois que les défauts de tes personnages. « Boyd pense que de me donner un rôle de mentor va m’aider à reprendre doucement. » Même si tu penches plutôt sur la théorie qui veut qu’il te pousse à travailler pour une autre dans l’espoir de faire ressortir ton côté compétitif et ton besoin compulsif de toujours faire mieux que quiconque, ce qui ne t’apparaît pas être ta plus grande qualité dans l’heure. « Je sais juste pas si j’ai envie de reprendre. » Et ça te fait particulièrement étrange de l’admettre à voix haute, encore plus de l’admettre à Wyatt. « Je pensais pas que je douterais de ça, un jour. » Tu n’avais jamais été de ceux qui se remettent constamment en question, avant. Maintenant, tu as l’impression que tout ton temps libre est consacré à ça et tu n’es pas certaine d’apprécier l’exercice.

Dans un retournement de situation complet, Wyatt est celui qui avance avec assurance alors que tu erres sans trop savoir de quoi sera composé la suite. « J’ai trouvé le ton à donner. » Tu écoutes avec attention, le sujet étant toujours abordé avec précaution, même si tu aimais beaucoup voir cet éclat apparaître dans son regard dès qu’il était question de son projet en cours. « J’ai posé les personnages et l’intrigue. » Tu hoches doucement la tête, venant prendre une nouvelle gorgée de ton verre de vin. Tu voudrais qu’il élabore sur la trame, mais tu lui laisses le choix de t’en dire plus ou non. « Il faut que je fasse encore quelques recherches pour être sûr de ne pas me tromper dans ce que j’avance. » « Tu me dis si je peux t’être utile. » que tu proposes comme ça, tout naturellement, comme vous aviez l’habitude de le faire il y a fort longtemps. Tu ne sais pas trop si c’est une bonne idée, si c’est quelque chose qu’il viendrait réellement considérer comme une possibilité compte tenu de votre passif, mais tu te dis qu’à un moment ou un autre, il te faudra regagner sa confiance à ce niveau-là aussi et ce sera tout simplement impossible de le faire si le sujet est complètement tassé, délaissé par peur de commettre des erreurs. « Y’a encore beaucoup de boulot, mais j’écris à nouveau. » « Ton éditeur t’a donné un délai? » Ça devient sérieux quand les attentes sont présentes, ce n’est pas à lui que tu vas apprendre ça. « Ça fait du bien de te voir comme ça. » Engagé, emballé par son écriture. Ça faisait trop longtemps que tu n’avais pas remarqué tous ses petits signes qui te confirment la présence d’un Wyatt inspiré, même si tu ne peux t’empêcher de ressentir un léger pincement de jalousie que tu camoufles aussi bien que possible. « J’ai eu raison de te faire confiance, le vin est excellent. » que tu souffles alors que tu viens déposer ta coupe désormais vide sur la table, ton regard remontant sur le visage de Wyatt. Tu prends vraiment le temps de le regarder, de remarquer les traces de fatigue – gracieuseté de Gabriel – sous ses yeux, mais surtout de te perdre dans ces petits détails que tu as toujours aimé chez lui. Comme ces bouclettes qui apparaissent toujours quand il attend trop longtemps avant de se couper les cheveux, ou cette pommette qui ressort quand il t’offre un vrai sourire, de ceux qui se font de moins en moins rares, de plus en plus spontané dans le cadre de votre quotidien. « Je te sers un autre verre? » que tu lui demandes en te levant pour aller chercher la bouteille sur le comptoir, incapable de résister à l’envie de glisser tes doigts contre son épaule alors que tu passes à côté de lui.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMer 20 Avr 2022 - 19:55

« J’avais déjà fait le plus gros du schéma de mon prochain roman, mais j’arrive pas à m’y mettre. » Je l’avais deviné, qu’elle n’avait plus le goût à se replonger dans son écriture quand tout datait d’avant sa grossesse. Avant que tout ne se chamboule, quand elle était encore persuadée d’avoir choisi le droit chemin, d’avoir fait le choix de la raison qui lui permettrait de conserver son statut d’écrivaine renommé tout en y alliant un nom de famille qui ne lui fera jamais de l’ombre. De l’eau à couler sous les ponts depuis. Rosalie a pris le courage de sauter le pas, elle a mis au monde un petit garçon de la manière la plus rocambolesque qui soit et désormais, elle essaye de trouver sa place dans une maternité qui ne lui offre aucun moment de répit. « Boyd pense que de me donner un rôle de mentor va m’aider à reprendre doucement. » - « Cela pourrait te remettre dans le bain doucement. » Je n’imagine pas réellement Rosalie travailler en binôme avec quelqu’un d’autre. Elle l’avait fait par le passé, auprès d’Ariane, quand tout avait commencé. Mais leur dynamique avait quelque chose de différent, une vibe qu’elles seules pouvaient comprendre et qui avait réussi à créer quelque chose de particulier. « Je sais juste pas si j’ai envie de reprendre. » C’est si étrange de l’entendre douter ainsi, elle qui n’aurait jamais admis l’échec auparavant. Je pose ma fourchette pour venir croiser son regard, celui d’une jeune mère épuisée qui se pose un million de questions à la seconde. « Je pensais pas que je douterais de ça, un jour. » Un ricanement m’échappe alors que je balaye l’espace vide entre nous d’un revers de main. « Il y a bien des choses qui se sont passées que l’on n’aurait jamais pu imaginer un jour, même avec toute la volonté du monde. » Si Gabriel en est l’ultime preuve vivante, le simple fait d’avoir cette conversation aussi calmement prouve que le monde a tourné depuis un temps. « Peut-être que l’écriture ne te fera plus jamais vibrer. » J’ai bien du mal à le concevoir quand j’ai pu être le premier témoin de ses phases d’écritures. Rosalie est une passionnée, accro à l’adrénaline que nous offre notre imagination dès lors qu’il s’agit de créer un monde de toute pièce. « Peut-être que tu a besoin de changer de registre. » Essayer quelque chose de plus personnel comme j’ai pu le faire avec ma dernière parution ? S’orienter vers un monde qui colle plus à sa réalité désormais ? Je n’en sais trop rien, il faut dire que je n’ai jamais été doué pour les conseils. « Tu as pensé à la musique ? » Et ce sujet-là, on ne l’avait encore jamais abordé. Mais je n’oublie pas, cette chanson qui traîne dans mon carnet, la force qu’elle avait su trouver au travers des mots pour transmettre une émotion qui nous représentait. Tout est possible, après tout…

Tout paraît possible quand je suis celui qui a su retrouver son inspiration. J’ai longtemps pensé à abandonner pourtant, parce que je n’aimais plus ce que j’étais capable de produire, parce que les commentaires d’Ariane se faisaient toujours plus saler. Il avait fallu bien des circonstances pour remettre le pied à l’étrier et le succès de mon livre a finis par m’aider à retrouver le goût. Lentement, mais sûrement, la passion est de retour, ancré dans mes veines. Celle que j’ai toujours eue du mal à dompter, mais qui m’amène enfin vers le sujet que j’ai toujours voulu coucher sur le papier. Cette fichue idée prendra vie, quoiqu’il arrive désormais. « Tu me dis si je peux t’être utile. » Avant, je lui disais tout. À l’époque où l’on partageait un tout autre appartement, bien plus petit et tout aussi encombré de livres en tout genre. Aujourd’hui, je stresse encore parfois à l’idée de laisser mes carnets traîner sur la table basse. Il y a des trahisons qui ne s’oublient pas. « Je suis pas sûr que faire des recherches sur comment se décompose un cadavre, ce soit dans la ligne de ce que tu attends d’un quelconque date. » Avant, on aurait ri de tout cela et elle serait revenue le lendemain avec un bouquin sur le sujet. Aujourd’hui, je ne sais pas réellement sur quel pied danser et préfère me concentrer sur la fin de mon assiette. Comme si de rien était. On prétendra d’ailleurs que je n’ai jamais employé le mot ‘date’ au sein de cette conversation. « Ton éditeur t’a donné un délai? » - « Il fait que ça me donner des délais. » Pour trois pages de plus, pour un chapitre supplémentaire. Il en veut toujours plus Conrad et finit toujours par tout reléguer à Jules. « J’ai encore quelques mois pour lui présenter un vrai truc fini. » Avec le bon nombre de chapitres et une conclusion à la trame. Quelque chose d’abouti en sorte. Après, il faudra reprendre le processus que je déteste le plus, vendre mon livre et mes personnages. « Ça fait du bien de te voir comme ça. » Je hausse les épaules, pas réellement persuader d’avoir réellement changé. Je me perds toujours plus dans mes pensées, je passe bien trop de temps à griffonner sur du papier et je me laissais entraîner dans des recherches toujours plus glauques. C’est pour le bien de l’art, pour accoucher de cette histoire. Je ne dirais pas, qu’il manque quelqu’un à mes côtés, que je déteste ne plus recevoir mes copies raturées à coup de stylo rouge. « M’a fallut dix ans pour m’y remettre. » Alors t’as bien tout le temps du monde pour reprendre Rosalie.

« J’ai eu raison de te faire confiance, le vin est excellent. » Je pourrais me lancer sur bien des comparaisons en rapport au domaine viticole douteux du début de soirée, mais c’est le regard de la brune qui m’empêche de sortir bien des âneries. Ses yeux se perdent à détailler mon visage d’une manière que je ne pensais ne plus jamais voir. « Tu comptes mes rides ? » Il doit y en avoir bien des nouvelles depuis la dernière fois où elle a osé laisser ses prunelles me dévisager ainsi. Pourquoi est-ce que l’on en devient nerveux à se tourner autour ainsi ? À laisser juste quelque touchés par-ci, par-là, sans s’aventurer plus loin ? « Je te sers un autre verre? » - « Avec plaisir. » Probablement parce que plus loin a toujours fait plus mal. Et que trop pensé n’a jamais été ma tasse de thé. Sans un mot, je me lève pour aller fouiller la poche de ma veste abandonnée dans l’entrée et en sortir mon fidèle paquet de cigarette. Je fais glisser la baie vitrée et vais m’appuyer contre la rambarde de l’immense balcon. « Je vais diminuer. » On sait aussi bien l’un que l’autre que c’est la dixième fois que j’annonce une telle chose et que je n’ai toujours pas modifié ma consommation. J’allume ma cigarette et récupère le verre qu’elle me tend, le regard fixer sur l’horizon. Cela me détend de fumer. Cela me rend un peu plus bavard aussi. « Tu as parlé à tes parents ? » Il fallait bien qu’on l’aborde un jour, ce sujet-là.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyJeu 21 Avr 2022 - 10:16

« Cela pourrait te remettre dans le bain doucement. » Ça pourrait oui, mais vous savez très bien tous les deux que tu n’as jamais été la meilleure pour travailler en équipe. Ça avait fonctionné à l’époque avec sa sœur, pour des raisons que tu n’es pas certaine de comprendre encore aujourd’hui, mais tu ne cherches pas nécessairement à traduire ce que vous aviez eu autrefois avec quelqu’un d’autre. Tu n’as pas eu le cœur de refuser quand Boyd te l’a demandé – imposé – parce que tu as terriblement besoin de cette distraction hors de la maison, hors de ta vie de maman, mais tu n'es pas certaine que l’expérience sera aussi concluante que ton éditeur ne le veut. Admettre que l’envie n’y est plus est quelque chose que tu ne pensais jamais faire un jour, mais c’est une vérité que tu n’as plus envie de camoufler, que tu n’as pas envie de cacher alors qu’elle prend de plus en plus de place dans tes pensées et dans tes questionnements. « Il y a bien des choses qui se sont passées que l’on n’aurait jamais pu imaginer un jour, même avec toute la volonté du monde. » Un léger sourire se place sur ton visage alors qu’il remplit l’espace entre vous d’un geste de la main, témoignant à nouveau de l’improbabilité qui a si longtemps entouré la simple idée de vivre un moment comme celui-là entre vous. Il n’a pas tort, rien n’est réellement impossible, surtout lorsque l’on s’attarde sur le chemin qui vous a mené juste ici, à ce moment et cet endroit précis. C’est compliqué pour toi de faire le parallèle avec ton écriture toutefois, quand le chemin de ta carrière avait toujours été si droit au but et sans embûche.

« Peut-être que l’écriture ne te fera plus jamais vibrer. » Cette simple idée te donne le vertige, tu n’es pas certaine de ce que tu es censée faire, de ce que tu es censée être si tu n’es plus une écrivaine. « Peut-être que tu as besoin de changer de registre. » Tu hausses légèrement les épaules. Peut-être. C’est difficile de l’entendre, pire encore de l’admettre. « On verra bien comment ça se passe avec la nouvelle. » Même si tu ne pars pas particulièrement optimiste de cette collaboration, tu ne veux pas non plus crier à l’échec. Ce n’est pas ton genre après tout, de refuser un quelconque défi. « Tu as pensé à la musique? » Tu figes pendant quelques secondes, ne t’imaginant pas un jour que cette passion que tu t’étais toujours interdite ferait surface entre vous. Mais tu avais ouvert la porte doucement, il y a plusieurs mois déjà quand tu avais retranscrit les paroles d’une de tes compositions dans son carnet. Et puis il y avait ton clavier qui existait depuis quelques semaines dans un coin de son appartement. Tu ne l’utilisais jamais en sa présence, mais il était là, preuve d’un intérêt qui faisait son bout de chemin dans ta tête. « Je me suis fait approchée par un producteur dans un bar, il y a quelques mois. Mais j’ai pas réellement donné suite à sa proposition, avec la grossesse et tout le reste. » Pas besoin de lui faire un dessin pour qu’il comprenne que le reste est majoritairement composé de lui, évidemment. « Je suis pas certaine d’avoir ce qui faut pour faire cette transition. » De l’écriture à la musique. D’une renommée à une autre. Tu n’es même pas persuadée d’avoir le talent nécessaire, bien honnêtement. Ce n’était à la base qu’un passe-temps. Une manière d’extérioriser tout ce qui prenait trop de place dans ton cœur et dans ta tête, mais ce serait mentir de dire que tu ne l’avais jamais considéré. Une fois encore, tu te retrouvais devant l’inconnu et contrairement à la jeune Rosie d’il y a dix ans, tu n’osais plus plonger tête première. Il y avait trop à considérer, et surtout, tu étais terrifiée à l’idée de te lancer et d’échouer.

S’il y a bien quelqu’un qui comprend l’échec pourtant, la peur de se lancer à nouveau, c’est Wyatt. C’est compliqué toutefois d’aborder le sujet de front quand il se trouve que tu es la raison principale derrière cette peur, derrière cette anxiété qui a perduré des années durant. Tu as attendu bien trop longtemps, mais tu t’es excusée pour ça, même si tu n’es pas naïve au point de croire que de simples mots puissent réparer tout ce que vous avez piétiné pendant la grande majorité de votre relation. Tu souhaites tout de même lui démontrer ta bonne volonté en lui proposant ton aide, dans l’espoir qu’un jour le sujet ne soit plus aussi difficile à aborder, autant pour lui que pour toi. « Je suis pas sûr que faire des recherches sur comment se décompose un cadavre, ce soit dans la ligne de ce que tu attends d’un quelconque date. » Tu échappes un rire, provoqué autant par le sujet de recherche choisi que par la mention d’un date. « C’est pas parce que je n’écris plus que je ne sais plus comment faire de la recherche. » Surtout que le sujet en est un que tu as toi-même du recherché dans le cadre de l’un de tes romans précédents. « Et je te rappelle que c’était nos meilleurs dates, à l’époque. » Ceux que vous tentiez de faire un peu plus formels, mais qui se finissaient inévitablement dans un café, manuscrit sous le nez à commenter continuellement le travail de l’un et de l’autre, à s’inventer des univers qui finissaient immanquablement par se rejoindre. Tu sais que la route est encore longue avant que vous ne puissiez retrouver cette complicité, mais ce n’est pas pour autant que les souvenirs se sont effacés, au contraire. Tu t’y es longtemps raccrochée, à ces souvenirs, à cette version de vous qui a toujours la plus belle à tes yeux. Du moins, avant cette version de vous aujourd’hui, celle qui implique désormais Gabriel. « Il fait que ça me donner des délais. » Ce qui explique les absences qui se font plus longues et plus nombreuses dernièrement. « J’ai encore quelques mois pour lui présenter un vrai truc fini. » « Tu me feras lire, quand tu seras plus avancé? » Ou allais-tu devoir attendre de tomber sur le manuscrit terminé et publié avant d’avoir la chance de plonger dans son univers à nouveau? « M’a fallut dix ans pour m’y remettre. » Ton sourire se dissipe rapidement alors que tu baisses les yeux, honteuse, bien trop consciente du rôle que tu as joué dans cette longue attente. Tu devrais peut-être dire quelque chose, remplir le silence de quelque chose, n’importe quoi, mais incapable de trouver les bons mots, tu laisses plutôt le silence témoigner de ta culpabilité qui se fait plus visible que jamais.

« Tu comptes mes rides? » C’est la voix de Wyatt qui te sort de cette distraction de quelques secondes à peine pendant lesquelles tu te perdais sur tous ces petits morceaux de lui qui ont toujours su attirer ton attention. « Y’en a trop, j’ai perdu le compte. » L’humour semble être la clé pour passer par-dessus ces moments d’hésitation et de nervosité quand les mots deviennent dérisoires et que vos corps semblent appeler à plus, à cette attraction indéniable à laquelle vous n’osez pourtant pas céder par peur de retomber dans vos vieux travers. « Avec plaisir. » Wyatt se lève et se dirige vers le balcon alors que tu remplis vos verres, et tu n’es pas le moins du monde surprise de l’apercevoir, cigarette en main. Tu viens le rejoindre, refermant la baie vitrée derrière toi. La soirée est douce et chaude, les derniers vestiges de l’été se faisant ressentir. « Je vais diminuer. » « Tu sais que tu perds un peu de crédibilité à chaque fois que tu dis ça? » Ça doit bien faire une centaine de fois qu’il te le dit depuis la naissance de votre fils, mais la dépendance prend toujours le dessus sur sa bonne volonté, chose que tu comprends autant que tu la lui reproches. « Tu as parlé à tes parents? » Tu n’avais pas l’intention d’aborder ce sujet, surtout pas ce soir alors que vous passez un bon moment loin de vos pressions quotidiennes, mais tu comprends aussi que de simplement ignorer le sujet ne fait pas disparaître l’impact qu’il a sur toi et sur ton humeur au quotidien. Tu t’appuies sur la rambarde à ses côtés, ton regard tourné vers la ville qui plonge peu à peu dans le noir au fil que les minutes avancent. « Non, et je suis pas certaine d’avoir envie de le faire non plus. » Parce que les mots échangés la dernière fois raisonnent encore trop fort, que tu n’es pas certaine d’un jour pouvoir redevenir, ou simplement être cette version de Rosalie qu’ils attendent de toi. Tu te sens mal toutefois de priver ton fils de ses grands-parents, autant que tu te sens responsable pour l’état mitigé dans laquelle se retrouve ta famille. « Rory m’a dit que ma mère a pris des nouvelles de Gabriel et moi, après l’accouchement. Ils savent que ça été… compliqué, mais je lui ai demandé de ne pas rentrer dans les détails. » Compliqué étant un mot bien faible pour décrire le traumatisme que vous avez vécu tous les trois ce jour-là. C’est toujours aussi difficile d’en parler et dans un mécanisme de défense que tu ne saurais réprimer, te viens refermer tes bras sous ta poitrine, comme si tu te tentais encore et toujours de te protéger de l’impact de ce jour-là. « Il m’a demandé s’il pouvait lui donner ma nouvelle adresse, dans le cas où ma mère déciderait de venir me voir sur un coup de tête. Je lui ai dit que j’avais besoin d’y réfléchir. » En discuter avec Wyatt semblait aussi être une bonne idée avant de prendre le risque de voir le clan Craine débarqué ici sans préavis, ce qui ne serait pas des plus surprenant connaissant ta mère.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMar 3 Mai 2022 - 16:29

Il est étrange de l’entendre douter, de voir la faille qui s’agrandit à mesure que les mois s’écoulent sans que l’écriture n’ait su retrouver pleinement sa place au sein de sa vie. Jamais je n’aurais cru être le témoin d’une Rosalie qui laisse entrevoir pleinement l’étendue des dégâts. Elle qui n’a jamais flanché, préférant tout saboter plutôt que laisser sa carrière prendre du plomb dans l’aile, voilà que les cartes semblent se redistribuer d’une manière bien étrange. Je connais l’angoisse que représente la simple idée de ne plus jamais retrouver cette flamme d’inspiration qui te fait vibrer au point de se couper du monde entier pour s’enfermer dans l’imaginaire d’une histoire qui ne pourra prendre vie qu’au travers des mots coucher sur le papier. Il est aisé d’écrire des histoires, c’est à la portée de tous ceux qui sauront se procurer un stylo et un bout de papier. Il est bien plus complexe de tenir l’intrigue, de faire évoluer les personnages et nourrir l’intérêt du lecteur au point de se démarquer des autres et d’avoir la prétention de pouvoir se faire publier. C’est un exercice particulier qui demande une pleine implication de soi, une confiance presque démesurée en ce que l’on écrit pour toujours porter la moindre étincelle d’idée à son potentiel le plus extrême. La place au doute n’est jamais réellement admise pourtant, ne dit-on pas que les écrivains sont les êtres humains les plus névrosés de ce monde ? Il est souvent bon de douter, mais chez Rosalie la connotation se veut négative, forcément teinter de noir et d’échec. Je peux le déceler à la simple manière dont son corps semble frémir dès que j’évoque la possibilité d’avoir perdu la flamme ou la nécessité d’aller voir ailleurs pour mieux en revenir par la suite. Elle n’accepte pas l’éventualité d’un changement de perspective. « On verra bien comment ça se passe avec la nouvelle. » Je retiens un rire face à chacune de ses réactions, pousser à l’extrême. « Avec un tel enthousiasme, cela risque d’être amusant. » Le travail d’équipe ce n’est pas donner à tous, je serais bien incapable d’écrire avec quelqu’un d’autre. Seule Ginny a eu ce privilège un jour, une fois, sans qu’elle ne prenne jamais le moindre stylo entre ses doigts pour marquer les pages de mes carnets. En rien, je ne souhaite que Rosalie s’enferme dans un mutisme qui finira par engendrer des tensions, mais je me demande si son avenir ne se cache pas ailleurs. Dans un domaine qu’elle n’avait jamais réellement évoqué auparavant, que j’ai découvert au fil des derniers mois comme s’il représentait en réalité une ligne rouge dans son quotidien. Un secret jamais avoué, enfoui dans l’idée que cela ne pouvait être qu’une illusion passagère. « Je me suis fait approchée par un producteur dans un bar, il y a quelques mois. Mais j’ai pas réellement donné suite à sa proposition, avec la grossesse et tout le reste. » Voilà que la conversation m’intrigue quand elle ose enfin sortir de sa coquille, sans jamais laisser l’idée exploser en couleur. « Je suis pas certaine d’avoir ce qui faut pour faire cette transition. » - « Te force pas, ça prends pas ce genre de bullshit avec moi. » Un sourire espiègle se dessine sur mes lèvres tandis que je cherche ses pupilles dans l’espoir de pouvoir apercevoir une légère étincelle, n’importe laquelle. « Tu te souviens du nom de ce producteur ? » S’il faut la bousculer, je serais le premier à venir secouer ses barrières pour lui rappeler qu’il y a toute une vie en dehors du carcan imposé par l’éducation stricte de ses parents et que l’échec n’existe que pour ceux qui n’ont jamais tenté quoi que ce soit.

Sans jamais vouloir m’en vanter, je crois être bien placé pour savoir que l’échec vient remuer chacune de tes convictions au point de parfois te faire perdre l’envie. Et pourtant… Il m’a fallu du temps, bien des heures à me tirer les cheveux sur la tournure d’une phrase, l’importance d’une idée ou la valorisation d’un personnage. Plus d’une fois j’ai jeté l’éponge, convaincu que le vent avait tourner pour moi et que je ne pourrais plus jamais publier quoi que ce soit. Je me suis pris quelques coups de pieds au cul, on m’a claqué des portes au nez et pourtant me voilà à écrire de nouveau, après avoir publié dans un registre que je n’aurais jamais défini comme le mien. Le succès m’attendait ailleurs, dans une moindre mesure, vers un public un peu différent. Il avait fallu ce tremplin pour retrouver mes premiers amours et cette envie réelle d’écrire. « C’est pas parce que je n’écris plus que je ne sais plus comment faire de la recherche. » Elle en connaît probablement un rayon sur mon sujet de recherche et pourtant, il reste cette retenue dont je ne saurais me débarrasser. « Et je te rappelle que c’était nos meilleurs dates, à l’époque. » Son sourire se veut nostalgique d’une époque révolue ou tout nous paraissait encore possible. « À l’époque. » Quand je lui faisais confiance, quand il n’y avait encore eu aucune trahison d’ampleur et que l’on pensait qu’à deux, on serait toujours bien plus meilleur. Les choses ont changé, les discussions ont eu lieu, les aveux sont tombés sur la table et Rosalie a exprimé par cent fois les raisons du pourquoi et du comment. Pourtant, la méfiance me colle à la peau dès qu’il s’agit de lui parler de mon travail. J’ai entendu tout ce qu’elle avait su me dire au travers des années, mais le pardon n’a jamais été acté et ne le sera probablement jamais réellement. « Tu me feras lire, quand tu seras plus avancé? » - « Je sais pas Rosalie. » Autant ne pas tourner autour du pot à la recherche de phrases alambiquées qui finiront par exprimer le même sentiment. Je ne sais toujours pas comment lui faire confiance sur ce domaine, qu’importent les doutes qu’elle vient tout juste d’exprimer et tout ce qu’elle pourra me rappeler comme souvenir d’antan. Il est difficile de croiser son regard quand toute la culpabilité du monde se lit sur son visage. Auparavant, je me serais délecté d’une telle réaction de sa part, à tirer sur les cordes pour l’entendre s’excuser encore et encore. Aujourd’hui, il ne reste que ce sentiment amer d’une confiance brisée que l’on cherche à réparer. « Peut-être… » Ce n’est pas vraiment un oui, sans pour autant fermer complètement la porte. Juste la preuve que le chemin est encore long…

Entre deux plaisanteries, on s’accorde un second verre de vin et parce qu’un sujet en particulier me trotte dans l’esprit depuis le début de la soirée, je nous entraîne sur la terrasse pour cacher mon anxiété dans une énième cigarette que je jure être comme l’une des dernières. « Tu sais que tu perds un peu de crédibilité à chaque fois que tu dis ça? » Un rire m’échappe face à son honnêteté sans faille. « J’en ai besoin. » que j’avoue dans un sourire qui se veut joueur, mais qui laisse malgré tout sous-entendre tout ce que l’on évoquera pas encore. La cigarette a toujours agi comme un calmant, quand je suis nerveux, lorsque j’ai besoin de réfléchir. L’excuse lui fait toujours rouler des yeux, mais je reste ce fumeur invétéré qui trouvera toujours une parade pour aller s’en griller une. Celle de ce soir agit comme la parfaite distraction qui me permet de poser la question qui me taraude depuis un temps. Depuis la naissance de Gabriel, on ne cesse de marcher sur des œufs avec Rosalie. Même si la relation qui nous lie semble s’améliorer, il n’en reste pas moins que le monde extérieur continue à tourner. Ce monde impliquant ma famille autant que la sienne. S’il paraît clair que mon frère et ma sœur ont décider de mettre les voiles et que je refuse clairement d’en parler, les personnes qui constituent la famille de Rosalie, eux, vivent toujours à Brisbane. « Non, et je suis pas certaine d’avoir envie de le faire non plus. » Par respect ou pudeur, je force mon regard à rester coller sur l’horizon quand bien même je sens la brune se tendre à mes côtés. Il demeure une distance de sécurité entre nous que l’on mettra sur le fait qu’elle cherche à échapper à la fumée de ma cigarette quand on sait aussi bien l’un que l’autre que nos esprits se jouent contre nous.

« Rory m’a dit que ma mère a pris des nouvelles de Gabriel et moi, après l’accouchement. Ils savent que ça été… compliqué, mais je lui ai demandé de ne pas rentrer dans les détails. » Les détails de ce jour qui est venu tout chambouler au point où elle se referme à nouveau comme une huître, me laissant échapper un soupir de frustration. Un jour, je m’attaquerais à ce mur qu’elle n’a de cesse d’ériger autour du jour de la naissance de notre fils, mais pas ce soir. Un combat à la fois. Parce que Rosalie sera à jamais têtue, mais j’ai bien noté à quel point sa famille semble lui manquer. « Il m’a demandé s’il pouvait lui donner ma nouvelle adresse, dans le cas où ma mère déciderait de venir me voir sur un coup de tête. Je lui ai dit que j’avais besoin d’y réfléchir. » Une nouvelle fois, la cigarette devient la distraction parfaite pour ne pas me laisser réagir sur le feu de l’instant. Je prends le temps de consumer le tabac, réfléchissant à la meilleure manière de dire les choses, conscient qu’il me fallait ranger mon sarcasme pour cette conversation. On s’est promis de faire les choses bien. J’écrase mon mégot sur la rambarde avant de le déposer dans le cendrier qui a toujours traîné là, uniquement pour moi. Lorsque je me redresse, Rosalie à toujours le regard effrontément ancré sur l’horizon, le dos droit, les bras croisés sur la poitrine, résolue à ne rien laisser transparaître. « Tu sais que je ne veux pas m’en mêler. » Depuis toujours, je refuse d’entrer dans ses histoires de famille, leur conflit futile et la pression qu’ils se jettent sur les épaules à tour de rôle. Je m’approche de la brune, juste assez pour que mon bras vienne s’appuyer contre le sien, pour que lorsque je tourne la tête son visage soit assez proche pour créer cette bulle qui a toujours rendu la conversation plus profonde entre nous. « Mais si ta mère débarque chez nous sans prévenir, je vais être obligé de le faire. » Si la matriarche Craine passe le pas de l’appartement, je vais me retrouver mêlé à leur querelle qu’elle le veut ou non, pour protéger ma famille. « Et j’ai une assez bonne idée du genre de conversation qui pourrait en découler. » Dans le genre que je ne suis pas assez bien pour elle, que je ne pourrais jamais lui offrir l’avenir qu’un autre lui avait promis et au milieu de tout cela sera sûrement jeter l’idée que notre fils n’est qu’un bâtard. Tout ce qu’il faut pour que je montre les crocs de la pire manière qui soit. « Tu veux vraiment pas que je m’en mêle Rosalie. » Les mots dépasseront ma pensée pour les protéger, les rancœurs du passé referont surface d’une manière ou d’une autre et elle n’appréciera pas tout ce que j’aurais à dire à sa famille. Eux qui ont passé leur temps à me rejeter, qui l’ont pousser dans les bras d’un autre. J’en aurais des choses à dire, des choses que Rosalie n’est pas encore prête à affronter et e ne sais pas quel camp elle pourrait encore choisir, mais je sais encore que les paroles de ses parents auront toujours un impact beaucoup trop grand. « J’ai pas à m’opposer à l’idée que tu veuilles la voir ou que tu souhaites lui présenter Gabriel. » Ils restent sa famille à elle, que je les apprécie ou non, malheureusement.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMar 3 Mai 2022 - 22:18

« Avec un tel enthousiasme, cela risque d’être amusant. » Tu te contentes de lui offrir une grimace, préférant ne pas t’épancher plus longuement sur le sujet. C’est encore sensible pour toi, de te retrouver dans cette situation avec l’écriture, de ne pas savoir si ce blocage est temporaire ou plutôt quelque chose de permanent. Tu ne sais même pas ce que tu espères réellement obtenir de cette collaboration avec Gaïa. Pour l’instant, tu angoisses plus qu’autre chose à l’idée de devoir te séparer de Gabriel, ne serait-ce que quelques heures. Certes, cette sortie ce soir, c’est un premier pas. Si tu as envoyé quelques messages de trop à ton frère pour t’assurer que tout se passe bien, tu penses tout de même bien gérer cette première séparation avec ton fils. Mais tu as Wyatt avec toi pour te forcer à décrocher. Tu sais que dans le cadre du travail, ce sera complètement différent. Mais ça, c’est un problème pour un autre jour. Pour la Rosalie du futur. Celle du présent, elle doit encore se concentrer sur la meilleure façon de profiter de cette soirée qui a un goût particulier de déjà-vu et de renouveau à la fois. Celle qui s’ose à s’ouvrir sur un sujet qu’elle n’aurait pourtant jamais cru aborder avec Wyatt un jour. Si tu avais accordé beaucoup de temps à ta musique l’année dernière, c’était plus compliqué depuis la naissance de Gabriel, même si l’envie de glisser tes doigts sur les touches de ton clavier te revenait de plus en plus fréquemment depuis quelques semaines. « Te force pas, ça prends pas ce genre de bullshit avec moi. » Tu t’apprêtes à répliquer quand tu remarques plutôt ce sourire, celui qui a toujours eu le don de t’arrêter, de te faire craquer peu importe la situation, de ceux auxquels tu ne peux que répondre par le même genre de sourires. Ceux qui menaient trop souvent à des impairs, des jeux qui n’avaient pas lieu d’être, ces mêmes jeux que vous aviez laissés loin derrière. Mais ce n’est pas ce dont il est question, quand le Parker ne tarde pas à te ramener sur le sujet de cet homme rencontré quelques mois plus tôt, celui qui t’avait offert une opportunité que tu n’avais pas su saisir à ce moment. « Tu te souviens du nom de ce producteur? » « Fitzgerald. Bailey Fitzgerald. » Tu n’avais pas oublié, bien sûr que non. La rencontre t’avait tant surprise, autant que la proposition qu’il t’avait faite en te laissant sa carte d’affaires qui traînait toujours au travers des différentes partitions appartenant à tes chansons, celles que tu n’avais jamais partagé avec qui que ce soit. Mais tu t’imaginais bien que le producteur lui, avait tout oublié de votre rencontre furtive d’il y a plus de six mois de ça maintenant. Tu t’étais persuadée depuis qu’il avait agi par politesse simplement, même si ça ne faisait pas vraiment de sens puisqu’il était celui qui t’avait abordé ce soir-là. « Ça fait longtemps de ça. L’offre ne tient sûrement plus. » Modeste, toi? Non. Terrifiée plutôt. Complètement tétanisée à l’idée de plonger dans ce monde que tu ne connaissais pas très bien, celui dans lequel tu n’aurais jamais cru vouloir te faire une place par le passé. Et ça, s’il y a bien quelqu’un qui saura le comprendre sans même que tu ne le dises, c’est bien Wyatt.

Tu te doutais que de lui renvoyer la question sur son écriture risquait de créer un malaise, et tu avais beau t’y préparer mentalement à chaque fois que le sujet était abordé, le rappel était constamment douloureux. Tu ne pouvais pas t’imaginer que la confiance reviendrait en un claquement de doigt, ni même qu’il pourrait un jour pardonner ce que tu considérais toujours comme l’une de tes plus grosses erreurs à ce jour, mais tu ne pouvais t’empêcher d’espérer qu’un jour, vous pourriez en parler sans que l’air autour de vous ne s’alourdisse, sans que les sourires sur vos visages ne se dissipent. « À l’époque. » Celle qui est révolue, celle que vous ne pourrez jamais réellement retrouver, malgré toute ta bonne volonté. Tu voudrais lui dire mille fois encore que ça te manque, tout ça. Que jamais plus, tu n’oserais mettre à mal tout ce qu’il avait si durement bâti, mais il était bien inutile de répéter encore et encore ce qu’il savait parfaitement. Tu ne pouvais que laisser au temps la chance de faire son œuvre, et espérer que cela puisse être suffisant, sans jamais le tenir pour acquis pour autant. « Je sais pas Rosalie. » Tu hoches doucement la tête. La réponse ne te surprend pas, mais elle pince malgré tout. Cette impression que tu n’auras jamais plus la chance de le connaître complètement, de le comprendre d’un bout à l’autre quand il y a tant de sa personne qui se joue dans ce processus de création auquel tu n’as plus accès. T’offusquer de ça ne ferait que rendre le tout plus difficile toutefois, alors tu te contentes de mordre l’intérieur de ta joue pour ravaler un commentaire qui pourrait trop facilement faire déraper ce qui reste de bonne ambiance entre vous. « Peut-être… » Ce n’est pas oui, ce n’est pas non. C’est cet éternel entre-deux dans lequel vous êtes peut-être voués à vivre pour le restant de vos jours, que vous aillez envie d’y faire face ou non. « T’es pas obligé. » Tu tentes un sourire, même si tu ne peux t’empêcher d’échapper malgré toi un léger soupir. « Je vais me faire un plaisir de le découvrir quand ce sera le temps. » Quand le travail sera complété, que les risques que tu ne gâches le travail seront écartés et que le monde entier aura la même opportunité de se plonger dans ses mots, sans jamais y voir ce que toi, tu peux y découvrir.

Sur le balcon, tu t’attardes plus sur la nuit qui s’étend sous vos yeux que sur la cigarette qui trouve trop rapidement le chemin des lèvres du Parker, malgré ce qu’il peut bien dire sur sa consommation et cette promesse de diminuer qu’il n’a jamais été en mesure de tenir. « J’en ai besoin. » Et si l’excuse se veut parfaitement trouvée, ce soir, tu n’as pas particulièrement envie de te lancer dans ce débat mille fois répétées dans lequel tu lui exposes toutes les raisons pour lesquelles il devrait faire un véritable effort, et contre lesquelles il t’expose ce dit besoin que tu comprends sans vouloir l’accepter. Tu sais qu’il fait attention auprès de Gabriel, et pour l’instant, c’est bien tout ce que tu peux te permettre de lui imposer. Tout comme Wyatt ne s’ose pas vraiment à t’imposer cette discussion sur ta famille, même si cette dernière se fait sûrement de plus en plus pressante à avoir vu l’impact que cela a constamment sur ton humeur. Il pose la question, mais tu n’es pas certaine de la réponse à lui donner. Pas certaine que tu as envie de t’aventurer sur ce terrain miné, pas certaine que tu as le cœur ni la tête à accorder à tes parents toute cette présence au milieu de cette soirée qui ne devrait être qu’à propos de Wyatt et toi. Tu sais pourtant que c’est utopique de croire que tu peux réellement les séparer de tout le reste, quand leur présence autant que leur absence ont un tel effet sur ta personne, que tu aies envie de l’admettre ou non. Ta gorge se serre dès l’instant où tu mentionnes même brièvement la naissance de votre fils, préférant plutôt te concentrer sur la demande de ton frère, celle à laquelle tu n’as pas réellement su répondre sur le coup. Tu évites de croiser le regard de Wyatt, préférant te concentrer sur l’horizon sans jamais être en mesure de trouver un point fixe pourtant. « Tu sais que je veux pas m’en mêler. » « Ça t’a jamais empêcher d’avoir une opinion sur le sujet. » Non, Wyatt ne s’est jamais empêché de s’exprimer sur quelconque sujet, surtout lorsqu’il s’agit de ta famille. Et depuis ta grossesse, c’est tout simplement impossible de le dissocier des conflits qui régissent entre tes parents et toi, sachant qu’il est au cœur de tout ça. Tu le sens qui se rapproche de toi, quand son bras vient faire pression contre le tien. Tu détournes les yeux quelques secondes à peine, accroches son regard qui se veut aussi calme que possible, mais tu es incapable de le soutenir. C’est donc lâchement que tu admires l’horizon, l’esprit pourtant à des kilomètres de là. « Mais si ta mère débarque chez nous sans prévenir, je vais être obligé de le faire. » Pas une scène que tu as particulièrement envie de voir se jouer sous tes yeux, tu dois l’admettre. « Et j’ai une assez bonne idée du genre de conversation qui pourrait en découler. » Rien qui ne pourrait vraiment apaiser la situation, tu t’en doutes parfaitement. « Tu veux vraiment pas que je m’en mêle Rosalie. » « T’y es mêlé, que tu le veuilles ou non Wyatt. » Oui, il y a certainement mieux à faire que de le jeter dans la gueule du loup en ouvrant la porte à cette probabilité que ta mère débarque chez vous sans prévenir, mais tu sais que peu importe la suite avec ta famille, il sera indéniablement le point clé de toute discussion, pacifiste ou non. « Que tu sois présent ou pas, ça changera pas le discours que mes parents vont tenir si j’ose mettre les pieds là-bas. » Ce discours que tu as entendu par cent fois par le passé, celui contre lequel tu n’avais jamais vraiment eu le courage d’argumenter, jusqu’à ce que tout ne dérape trop fort à l’annonce de ta grossesse.

« J’ai pas à m’opposer à l’idée que tu veuilles la voir ou que tu souhaites lui présenter Gabriel. » Les mots te surprennent autant qu’ils te touchent et c’est un sourire sincère qui vient orner le coin de tes lèvres. Si tu savais ne pas avoir besoin de l’approbation de Wyatt pour retourner vers ta famille, il y avait quelque chose de particulièrement réconfortant à l’idée de l’avoir, même si ce n’était pas le problème le plus pressant à tes yeux. Tu tournes la tête vers lui, oses enfin le regarder pour plus que quelques secondes. D’un geste naturel, ta main vient trouver la sienne, vos doigts s’entremêlant. « Est-ce que tu penses que c’est ce qui me retient de retourner vers eux? Parce que c’est pas le cas. » Non, tu ne voulais surtout pas qu’il porte ce poids-là sur ses épaules, quand le conflit avec tes parents allait bien au-delà de la simple opinion que chacun pouvait avoir de l’autre parti. Tes doigts serrent les siens un peu plus fort alors que ton corps se move graduellement un peu plus près de lui, le besoin de te perdre dans la bulle plus puissant que jamais. « J’ai pas l’envie, ni la force de devoir justifier mes choix, ni de devoir leur expliquer que c’est ici que je veux être et nulle part ailleurs. » Parce que ça ne devrait même pas être une discussion, encore moins quelque chose à débattre et ça, même si ça t’as pris beaucoup trop de temps, tu l’as enfin compris. « Et je veux pas que Gabriel se retrouve au milieu de tout ça. » Pas envie qu’il grandisse en entendant ses grands-parents dire des choses à l’encontre de son père. Peut-être que tu te projettes trop loin dans tout ça, peut-être que tu t’imagines le pire alors que tu devrais prendre une chose à la fois. Peut-être même que tu te fais des peurs avec rien, mais de ça, tu doutes profondément, parce que tu connais tes parents et tu sais trop bien de quoi ils sont capables. « J’ai encore besoin de temps. » De temps pour y voir plus clair, mais surtout de temps pour te sentir plus forte et être capable de finalement l’avoir, cette conversation, cette confrontation que tu ne cesses de repousser. Tes yeux accrochent ceux de Wyatt et sans te retenir cette fois, tu viens poser tes lèvres contre les siennes, dans un baiser qui te fait envie depuis le début de la soirée. « Et toi t’as besoin d’une menthe. » que tu souffles, vos visages encore infiniment près l’un de l’autre alors que tu viens glisser ta main libre contre son visage, laissant tes doigts redécouvrir ses traits que tu connais pourtant par cœur.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyJeu 5 Mai 2022 - 10:40

Sur le balcon, on ne s’attarde plus réellement sur la futilité des conversations autour de son avenir professionnel. Elles ont toute leur importance, les révélations faites entre deux gorgées de vins et un sourire timide, mais pour avancer sur ce point, Rosalie doit déjà mettre à plat ce qui ne cesse de la retenir vers l’arrière. C’est avec prudence que je pose mes questions, conscientes que le terrain est fragile et que le moindre faux pas viendra faire imploser le sentiment de confiance qui commençait lentement à s’installer entre nous. Le sujet de la famille a toujours été sensible entre nous, parce que je n’ai jamais été accepté par le sien, parce qu’elle a toujours plus ou moins jalouser la relation que j’entretien avec mon propre clan. Les équilibres ont été remis en jeu et les conflits n’ont eu de cesse de se déplacer au point où désormais elle préfère fuir le sujet plutôt que d’imposer la vision qui est devenue sienne. À leurs yeux, Rosalie a flanché. « Ça t’a jamais empêché d’avoir une opinion sur le sujet. » Non, jamais, parce que dès le premier instant où elle m’a présenté comme son compagnon chacun d’entre eux, c’est mis en tête de me juger. Je me souviens à l’époque, je voulais bien faire, pour elle. J’aurais pu accepter que l’on me questionne lourdement comme j’ai si souvent pu le faire avec les copains de ma sœur, mais ils ont été les premiers à décider de m’attaquer sur mon statut social qui n’avait aucune valeur à leurs yeux. Je n’étais pas juste le petit ami dont on se méfie un peu, mais le vilain petit canard qui allait ternir l’image si lisse des Craine. « Ils ne sont jamais gênés pour en avoir une à mon sujet non plus. » Tout n’était qu’une question d’équilibre dans un conflit né dès l’instant où elle avait prononcé mon nom de famille. À leurs yeux, je n’étais qu’un illustre inconnu, digne héritier du monde d’en bas. J’étais prêt à faire un effort, mais je ne pouvais pas les laisser m’insulter sans répliquer, elle n’avait pas choisi le bon compagnon pour cela. Pourtant, aujourd’hui, pour Gabriel, et même un peu pour elle, je suis prêt à faire un énième effort, celui de ne pas m’impliquer qu’importe ce qui pourrait en découler. « T’y es mêlé, que tu le veuilles ou non Wyatt. » En tant que père de son fils, rien de plus. Rien ne m’oblige à rencontrer ses parents, à devoir entretenir la moindre relation avec eux. Ce n’est pas ce qui m’intéresse, je me fiche bien de cela tant qu’ils laissent une chance à leur fille qui elle en a désespérément besoin quoiqu’elle en dise. « Que tu sois présent ou pas, ça changera pas le discours que mes parents vont tenir si j’ose mettre les pieds là-bas. » On en a parfaitement conscience, l’un comme l’autre, mais une différence réside malgré tout dans les options qui s’offrent à nous. « Il existe une nuance pourtant. » Elle lui semblera peut-être minime quand cette dernière ne se tient que dans le simple fait de ma présence physique. « Si tu y vas seule, tu pourras me rapporter les faits à ta manière, probablement en diminuant l’effet des mots qu’ils auront trouvé pour t’atteindre ou même en passant le tout sous silence que tu finiras par décharger dans une dispute qui n’aura aucun rapport des semaines après. » Je n’ai pas besoin de la regarder pour savoir qu’elle déteste être aussi transparente à mes yeux et que je n’ai qu’une seconde pour continuer avant qu’elle ne m’interrompe. « Dans cette option, je ne pourrais rien faire si ce n’est pester dans mon coin et ronger mon frein quand tu te mettras à tout remettre en question à cause d’eux. » Ce n’est pas qu’une supposition, cette version des faits, on l’a déjà vécu un bon nombre de fois. « Mais s’ils viennent manquer de respect à MA famille, sous MON toit… Tu ne pourras rien faire pour me retenir. » Aucun mot n’est prononcé dans la menace, le sarcasme est rangé loin dans le placard. Je présente les faits de la manière la plus calme qui soit, dans une version adulte de ce qui aurait toujours dû exister entre nous. « Dans cette version-là, c’est tout ce que j’ai pas pu leur dire pendant des années qui va exploser. » Et elle sait combien je n'en aurais que faire des conséquences et autres retombés lorsque je serais aveuglé par la colère qu’ils auront cherché à provoquer. Mon regard vient croiser le sien dans une sincérité qui se veut aussi nouvelle qu’ancrer dans les racines de ce que l’on a toujours été. « Si tu veux que je sois présent, je serai là. » Sans jamais promettre de retenir quoi que ce soit.

J’ai malgré tout conscience que Rosalie a besoin de ce lien avec sa famille, qu’importe la toxicité de leur rapport. Elle ne se cesse de se laisser ronger par les remords d’avoir rompu avec eux aussi brutalement et que leur mère passe par le biais de Rory semble avoir réveillé une vieille culpabilité dont je déteste être le témoin. « Est-ce que tu penses que c’est ce qui me retient de retourner vers eux? Parce que c’est pas le cas. » - « Non. » Mes doigts viennent serrer les siens quand je sens que tout cela la fait bien plus réfléchir que ce que j’aurais pu l’envisager. « Je sais juste qu’il fallait que je le dise. » Je te connais assez comme ça Rosalie. Et finalement, c’est elle qui se rapproche un peu, refermant toujours un peu plus la bulle autour de nous et les nouveaux liens qui se tissent différemment. « J’ai pas l’envie, ni la force de devoir justifier mes choix, ni de devoir leur expliquer que c’est ici que je veux être et nulle part ailleurs. » Ici et nulle part ailleurs, dans cette situation bancale qui ne regarde que nous, qu’importe si les étapes sont montées à l’envers. « Et je veux pas que Gabriel se retrouve au milieu de tout ça. » - « Il est encore bien trop petit pour comprendre tout ça. » Autrement dit, c’est le moment ou jamais de jouer cartes sur table et de tenter d’améliorer cette relation, après il sera trop tard. Dans le fond, je me fiche bien de me faire accepter par sa famille ou non, je n’ai jamais couru après cela et je m’étais fait une idée, il y a une dizaine d’année déjà, mais pour Gabriel tout est différent. J’aimerais que mon fils connaisse sa famille, qu’il puisse en avoir l’opportunité en tout cas. « J’ai encore besoin de temps. » Alors qu’elle prend son temps. Que l’on prenne notre temps aussi, pour se permettre d’avoir ce genre de conversation dans un calme qui ne nous a jamais été familier. Il nous a rarement été permis de clôturer un sujet dans une étreinte aussi douce quand ses lèvres trouvent les miennes sans jamais s’imposer au travers d’une idée. Ce n’est pas un baiser pour me faire taire, il a un goût bien différent celui-là. Celui d’une acceptation nouvelle. « Et toi t’as besoin d’une menthe. » Je ricane. « Et toi, tu es toujours aussi nulle pour changer de sujet de manière subtile. » Avant que mes lèvres ne viennent à nouveau chercher les siennes. Ce sont mes mains qui viennent alors emprisonner son visage pour sceller son regard au mien. Je pourrais en dire des mots qui perdront de leur sens, qui n’auront qu’un maigre impact, mais nos regards parlent pour tout ce que l’on ne sait toujours pas se dire. Dans le silence, se transmet la promesse d’être bien plus soudé qu’auparavant. « Viens, on va chercher notre fils. »

Ces quelques heures en tête nous ont faits du bien, mais il n’existe pas de sentiment plus apaisant que celui de pouvoir observer Rosalie avec Gabriel. S’il avait entamé sa nuit chez son parrain, notre petit garçon a fini par décider qu’il serait bien plus sympathique de rester éveiller avec les parents une fois rentrés à la maison. Il refuse qu’on le dépose dans son lit et bien sûr, comme les deux parents faibles que nous sommes, nous voilà installées dans le salon, sur un tapis de jeu a essayé de calmer la terreur. Depuis quelques jours, Gabriel est en train de trouver sa voix, ce qui se traduit par des petits cris stridents autant adorable que détestable parfois. « Je crois qu’il se moque de nous. » Et comme s’il avait parfaitement compris ce que je viens de dire, voilà qu’il s’exprime à nouveau le petit bonhomme. « Ah ouais ? Tu te moques de ton père toi ?! » Alors que ma main vient glisser sur son ventre pour le chatouiller légèrement, Gabriel éclate de rire dans un son si nouveau qu’il en vient à me couper le souffle. Mon regard étonné se pose sur le bébé avant de se relever vers Rosalie. « Il a rigolé, on est d’accord ? »
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyJeu 5 Mai 2022 - 16:12

« Ils ne se sont jamais gênés pour en avoir une à mon sujet non plus. » Ce n’est pas un sujet que tu as particulièrement envie de revisiter, même si là se trouve l’élément déclencheur de tout ce qui s’est passé ensuite entre ta famille et toi. Des années durant, tu as joué le rôle qui t’étais imposé, tu as soutenu la façade de la fille qu’il voulait, celle à l’apparence impeccable au bras d’un bon parti qui saurait parfaitement élever son statut dans la société. Et puis du jour au lendemain, tu avais fait un 180, te délaissant subitement des attentes et des pressions sous lesquelles tu te noyais depuis trop longtemps sans que jamais personne ne cherche à t’en sauver. Jamais personne, sauf l’homme à tes côtés ce soir. Celui qui se prend le blâme pour tout, mais surtout celui qui t’a réellement sauvé, celui pour qui tu cherches toujours un peu plus à découvrir la véritable version de toi-même, celle loin des prétentions et des exigences longuement imposées, celle qui cherche simplement à être bien dans sa peau, bien avec elle-même et surtout qui ne veut qu’une chose : être la meilleure mère possible pour son fils, malgré ce début difficile. Si tu peux comprendre que tes parents ont peut-être besoin d’un peu de temps pour se faire à ce changement drastique de réalité, tu ne peux tout simplement pas accepter les commentaires soufflés, les insultes qu’ils ne tentent même plus de dissimulés et les accusations portées à torts et à travers. Et tu sais que ça, tu seras contrainte à y faire face, que Wyatt soit présent ou non lors de ce premier potentiel face à face, qu’il se fasse en compagnie de ta mère seulement, de tes parents ensemble ou même du clan Craine en entier. « Il existe une nuance pourtant. » Tu jettes un coup d’œil furtif à Wyatt qui demeure étrangement calme, te forçant par le fait même à ne pas monter sur tes grands chevaux trop rapidement. « Si tu y vas seule, tu pourras me rapporter les faits à ta manière, probablement en diminuant l’effet des mots qu’ils auront trouvé pour t’atteindre ou même en passant le tout sous silence que tu finiras par décharger dans une dispute qui n’aura aucun rapport des semaines après. » Tu te raidis légèrement, n’appréciant particulièrement le fait qu’il puisse décrire avec une telle justesse un pattern pourtant par cent fois répétés entre vous par le passé. « Dans cette option, je ne pourrais rien faire si ce n’est pester dans mon coin et ronger mon frein quand tu te mettras à tout remettre en question à cause d’eux. » Tu te tournes assez cette fois-ci pour que ton regard trouve le sien, pour qu’il puisse lire dans tes yeux que ce n’est pas une option que tu veux envisager, pas un chemin que tu peux te permettre d’emprunter une fois encore. Non, ces erreurs-là, tu les as déjà trop répétées.

Tu t’apprêtes à répliquer, mais tu te contentes de rester silencieuse, te rappelant la nécessité de le laisser aller au bout de sa pensée plutôt que d’intervenir hâtivement. « Mais s’ils viennent manquer de respect à MA famille, sous MON toit… Tu ne pourras rien faire pour me retenir. » L’emphase sur sa famille et son toit a le don de te faire sourire légèrement, te rappelant encore une fois que ce n’est plus lui contre toi, mais bien vous deux, vous trois même, contre le reste du monde. « Dans cette version-là, c’est tout ce que j’ai pas pu leur dire pendant des années qui va exploser. » Et t’es pas certaine que cette option-là te convienne réellement non plus, tout compte fait. « Donc t’es en train de me dire que mes options consistent à risquer ce qu’on est en train de bâtir ou risquer de déclencher la troisième guerre mondiale entre la famille dans laquelle je suis née et celle que j’ai créé? » Tu prendrais bien une troisième option, là, tout de suite. « Pardonne-moi si je suis pas particulièrement emballée par les choix offerts. » Si la remarque aurait facilement pu être dite sur le ton du reproche par le passé, c’est plutôt une touche d’humour défaitiste qui résonne alors que tu échappes un petit rire vaincu. Vous ne serez peut-être pas en mesure de régler le problème ce soir, mais il y a quelque chose de réconfortant de savoir que le sujet peut être abordé sans que les tons ne montent, sans que la chicane ne prenne automatiquement comme ça a si souvent été le cas. « Si tu veux que je sois présent, je serai là. » « Je sais pas encore ce que je veux. » Ce serait plus simple si tu savais, tu pourrais arrêter de te torturer constamment avec tout ça, tu pourrais faire le premier pas ou tout simplement mettre une croix sur ta famille, mais tu n’arrives pas à faire ni l’un ni l’autre, éternellement coincée entre l’envie de voir ta famille impliquée dans la vie de ton fils et les conflits qui entourent éternellement tes choix lorsqu’il s’agit de Wyatt.

« Non. » Tu souffles, soulagée de l’entendre alors que ses doigts se font plus serrés contre les tiens, que la bulle semble peu à peu se renforcir autour de vous. « Je sais juste qu’il fallait que je le dise. » Tu acquiesces d’un léger mouvement de la tête. C’était complètement nouveau pour vous, de dire les choses aussi calmement, sereinement, sans les laisser prendre de l’ampleur au point de devenir une dispute qui ne pouvait qu’être résolue de deux manières bien distinctes : dans les cris et les portes qui claquent, ou entre les draps. C’est un chemin nouveau qui se dessine et malgré la lourdeur du sujet, tu te sens tout de même un peu plus sereine. Tu voudrais seulement que tout soit plus simple. Avoir cette certitude que comme Rory et Wendy, tes parents, Garrett et même Grace finiraient par entendre raison, par réaliser que tu n’avais jamais été réellement honnête avec eux, ni même avec toi-même pendant des années à trop vouloir lui faire plaisir. Que tes choix n’ont pas pour but d’aller volontairement contre leurs aspirations, qu’il s’agit simplement de ta volonté à être heureuse, dans une vie que tu as pu choisir complètement et librement. Et pouvoir offrir la même chose à ton fils tout en lui donnant l’opportunité de connaître ta famille, sa famille, sans qu’il ne se retrouve coincé entre ses grands-parents d’un côté et son père de l’autre. « Il est encore bien trop petit pour comprendre tout ça. » « J’ai besoin de le protéger, Wyatt. » Et il comprendra Wyatt qu’il s’agit là du peu de contrôle que tu possèdes encore pour protéger ton fils, toi qui gardes cette impression que trop souvent déjà tu n’as pas su être à la hauteur de ton rôle de mère, que trop souvent déjà tu n’as pas su lui offrir tout ce qu’il y a de mieux alors qu’il est âgé de quelques mois seulement. Le protéger de ta famille, des commentaires toxiques de tes parents, ça tu peux le faire, encore un peu du moins, le temps que tu mettes de l’ordre dans tes idées. Le temps que tu fasses le ménage entre tes idées préconçues de la situation et les faits, avant que tu ne te renseignes pleinement sur l’état d’esprit dans lequel se trouve les différents membres de ta famille désormais. Du temps, c’est tout ce que tu lui demandes. Du temps et le réconfort de savoir que tu n’as pas à être toute seule à prendre ces décisions-là. « Et toi, tu es toujours aussi nulle pour changer de sujet de manière subtile. » Tu hausses les épaules et échappes un nouveau rire alors qu’il t’embrasse à nouveau et que pendant quelques secondes à peine, plus rien n’a d’importance, si ce n’est la sensation de ses lèvres contre les tiennes, la manière dont ses mains viennent encadrer ton visage, dont son regard s’ancre dans le tien pour dire ce que des milliers de mots ne sauraient jamais totalement traduire. « Viens, on va chercher notre fils. » Et jamais tu n’as entendu de mots plus doux sortir des lèvres de Wyatt que ceux-là.

Le dos accoté contre le divan, c’est un regard rempli de tendresse que tu poses sur Wyatt et Gabriel. Malgré l’heure tardive, malgré la fatigue qui se fait ressentir, malgré l’envie de plus en plus prononcée de retrouver votre lit, tu ne peux qu’être sous le charme de la scène qui se joue sous tes yeux. De Wyatt qui surplombe votre fils qui a décidé de faire la grève du sommeil depuis l’instant où vous êtes allés le chercher chez son parrain, qui préfère grandement profiter de la présence retrouvée de ses parents. « Je crois qu’il se moque de nous. » « Je me demande qui il tient ça. » que tu souffles sans la moindre subtilité en offrant un large sourire à Wyatt. Tu t’approches légèrement des deux Parker pour mieux pouvoir admirer le visage parfaitement éveillé de Gabriel qui s’amuse un peu trop à faire des vocalises. « Ah ouais? Tu te moques de ton père toi?! » Les doigts de Wyatt viennent chatouiller votre fils et tu allais lui dire qu’il faisait bien de se moquer que tu es soudainement coupée dans ton élan quand le salon se remplit plutôt du son d’un fou rire jamais entendu auparavant. Tes yeux s’élargissent alors que ton cerveau assimile enfin ce qui vient de se passer : il n’y a aucun doute possible, c’est bel et bien Gabriel qui vient de vous offrir son premier rire. « Il a rigolé, on est d’accord? » Tu hoches la tête de haut en bas, tes yeux qui se remplissent d’eau sous l’émotion. « Il y a que les papas qui sont drôles ou les mamans aussi, elles sont rigolotes? » Tu viens chatouiller le ventre de Gabriel, exactement comme Wyatt venait de le faire quelques secondes auparavant, et la réaction est instantanée. Il s’esclaffe à nouveau votre fils, et tu jurerais soudainement être la personne la plus drôle qui existe sur terre. Tu tends les bras légèrement pour attraper Gabriel dont tu viens embrasser la joue, éternellement ébahie par tous les progrès qu’il fait jour après jour. « Maintenant, si tu pouvais apprendre à dormir toute la nuit, ce serait pas de refus. » que tu lui chantonnes avec un rire, ce qui ne manque pas de le faire réagir. « Tu penses que c’est sa façon de me faire comprendre que je rêve en grand là? » que tu demandes à Wyatt de qui tu te rapproches, laissant ton dos se poser contre lui, dans cette envie de faire perdurer le moment aussi longtemps que possible. « Merci, pour ce soir. » que tu murmures doucement, levant légèrement la tête pour croiser son regard. Vous aviez besoin de cette soirée loin de vos nouvelles responsabilités pour vous rappeler qu’il existait encore entre vous deux plus que le simple fait d’être parents ensemble.
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Message(#)(craker #23) one step at a time EmptyMar 10 Mai 2022 - 11:57

« Donc t’es en train de me dire que mes options consistent à risquer ce qu’on est en train de bâtir ou risquer de déclencher la troisième guerre mondiale entre la famille dans laquelle je suis née et celle que j’ai créé? » Ce serait un peu simpliste de résumer les choses ainsi, mais au moins Rosalie ne s’empresse pas de se renfermer dernière une certaine agressivité qui aurait tout fait flancher. Elle ne voit que des options un brin bancales, mais il faut avouer que la situation avec sa famille est bien loin d’être une route droite et facile à emprunter. J’ai conscience qu’elle souhaite renouer avec eux, mais il paraît certain que je ne serais jamais le bienvenu dans leur cercle, qu’importe ce qu’elle pourra bien leur dire à mon sujet. « Si tu penses que tes parents ont encore le pouvoir de risquer ce qu’on est en train de bâtir, ce qu’il ne reste plus rien à bâtir du tout. » Ils ont toujours été contre nous, depuis le tout premier jour, dès la toute première rencontre. Leur opinion ne pourra plus jamais influer quoi que ce soit entre nous et j’espère qu’elle en est parfaitement consciente. En tout cas, ce n’est pas eux qui me pousseront vers la sortie, ce serait bien trop facile après tout ce que l’on a dû traverser pour en arriver là aujourd’hui. « Pardonne-moi si je suis pas particulièrement emballée par les choix offerts. » Je hausse les épaules sans non plus insister plus lourdement, j’ai conscience que pour elle rien n’est simple. Rosalie, c’est toujours retrouver le cul entre deux chaises, à devoir choisir entre le chemin gravé par les convictions de sa famille et celui que je n’ai eu de cesse de lui montrer depuis le tout premier jour de notre rencontre. « Je sais pas encore ce que je veux. » - « Alors prends le temps d’y penser. » Toute notre vie on n’a eu de cesse de se précipiter pour mieux foncer dans le mur de la manière la plus stupide qui soit. Il était temps de faire autrement, de prendre du recul et de peser tous les éléments avant de prendre la moindre des décisions. On s’accorde le droit de faire les choses correctement pour ne plus répéter les erreurs qui ont toujours été les nôtres.

Et si la pause en tête-à-tête, c’est avérer salutaire, il encore meilleur d’ajouter Gabriel à l’addition. Petit garçon en pleine forme qui se refuse à dormir et préfère s’entraîner aux vocalises à une heure bien trop avancée de la soirée. « Je me demande de qui il tient ça. » Je préfère m’abstenir de tout commentaire tant le sous-entendu est bien loin d’être subtile. Toute mon attention se trouve hypnotisée par le petit bonhomme qui s’agite vaillamment sur son tapis, bien décidé à mener la java quand je rêve d’aller m’allonger sur mon lit. À un point où j’en viens à me demander si ce n’est pas la fatigue qui me fait halluciner le son cristallin d’un rire de bébé. Il me faudra la confirmation de Rosalie pour réaliser que je ne suis pas devenu fou et que Gabriel vient de nous offrir son tout premier éclat de rire. « Il y a que les papas qui sont drôles ou les mamans aussi, elles sont rigolotes? » J’étais prêt à affirmer être le plus hilarant des deux, mais dans un esprit pacifiste notre fils semble être un bon public prêt à satisfaire l’ego de ses parents. L’instant est comme suspendu dans le temps, à mille lieux de la parentalité que je m’imaginais le jour où Rosalie est venue m’annoncer sa grossesse. Le chemin paraît comme semer d’embûche, mais les différents instants de plénitude viennent à me rappeler que le combat n’a jamais été inutile. Ce premier rire n’est marqué que par les sourires de deux parents ébahis d’un rien et qui cherchent encore à réparer le lien. « Maintenant, si tu pouvais apprendre à dormir toute la nuit, ce serait pas de refus. » Je retiens un rire, accueillant le corps de Rosalie contre le mien, tandis que Gabriel nous observe de ses yeux ronds et d’un air coquin. « Tu penses que c’est sa façon de me faire comprendre que je rêve en grand là? » - « C’est une manière polie de te faire savoir que ce n’est pas vraiment dans ses plans. » On est loin d’être à plaindre, Gabriel n’est pas du genre à enchaîner les crises interminables, mais s’il pouvait cesser de confondre le jour et la nuit nous en serions tous ravis. « Merci, pour ce soir. » Un échange de regard et la bulle se forment à nouveau de la manière la plus naturelle qui soit. « On refera ça. »

Et pour la première fois depuis des années, je n’ai pas envie de fuir.
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