Un mois plus tôt, Lexie découvrait Cesar, un jeune artiste, via les réseaux sociaux, suite au buzz que le jeune homme avait fait en publiant par inadvertance des photos de lui dénudé. Et si c’est sur son corps qu’elle s’était d’abord attardée, elle avait ensuite fouiné sur son compte et découvert des dessins intéressants, au trait fin, et avec un côté sombre qui avait toujours attiré la brunette. Ou bien peut-être n’était-ce que son interprétation personnelle, liée à sa vision du monde et des gens, et qu’il n’y avait rien de sombre là-dedans. Toujours est-il que Lexie avait apprécié les œuvres publiées, et avait contacté le jeune artiste pour solliciter une rencontre.
Là, dans un café, elle lui avait expliqué son rôle après de la famille Walker, depuis des années : trouver des artistes prêts à donner des œuvres pour des ventes de charité, contre une grosse publicité et une exposition médiatique, en plus d’une démonstration à toutes les plus grandes fortunes de la ville. Elle ferait sans aucun doute appel à Cesar pour un prochain gala, mais d’abord, c’était pour un projet plus personnel qu’elle venait le voir. A Noël, Channing, son frère, lui avait offert sa propre galerie ! Elle pourrait maintenant exposer de manière permanente tous les artistes qui lui plaisaient. Néanmoins, avec le boulot, la grossesse, l’emménagement chez Noah, la brunette n’avait pas pris le temps de se consacrer à ce projet. Il lui fallait cependant penser à un vernissage, et si Cesar était d’accord, elle voulait en profiter pour l’exposer.
Les dessins du jeune homme ne seraient pas les seuls affichés dans la galerie. La brunette avait contacté d’autres talents locaux, tous des dessinateurs, histoire de donner une certaine cohérence. Pourtant, les ressemblances n’allaient pas beaucoup plus loin, certains artistes dessinant en couleur, et certains croquant également des paysages.

Lorsque Cesar pénétra dans la galerie, il put observer les murs blancs, nus. La salle était assez grande, avec des murs sur le milieu de pièce pour permettre d’afficher davantage d’œuvres. Des dizaines de dessins étaient étalés sur un immense bureau, la brunette semblant plongée dans leur contemplation. Elle releva la tête et sourit au jeune artiste lorsqu’il pénétra dans la galerie.

« Bonjour Cesar ! Bienvenue ! »

Elle laissa son regard parcourir l’espace vide.

« Je n’ai pas encore réussi à me décider sur la disposition des œuvres. Je me disais que j’y verrais peut-être plus clair avec les tiennes. Tu en as apporté ? »

Elle plongea son regard bleuté dans celui du jeune homme, un regard empli d’espoir et d’appréhension.

« Tu es toujours d’accord, n’est-ce pas ? Pour exposer pour le vernissage ? »

Il pouvait faire machine arrière, mais elle espérait sincèrement qu’il accepterait de tenter l’expérience.

@Lexie Walker

Cela fait un mois que j’ai rencontré Lexie -et pas Mme Walker puisque ça a l’air de l’irriter- et depuis ma vie a changé. Je suis toujours chez ma mère, coincé dans les mêmes galères mais depuis j’ai de l’espoir. J’ai toujours su qu’un jour ça marcherait et que ma carrière d’artiste décollerait plus loin qu’Instagram mais le temps était long. Je repense aux remarques de ma mère, de Sara, de Rudy qui me disaient que je devais trouver quelque chose d’autre et que je perdais mon temps en faisant ça. Signer un contrat avec Lexie pour être exposé pour la première fois, c’est un beau pied de nez pour ne pas dire un doigt d’honneur à tous ceux qui n’ont pas cru en moi. Je me sens puissant alors que je marche en direction de la galerie. J’ai l’impression que le monde est à mes pieds et qu’aujourd’hui est le début d’une nouvelle période de ma vie. J’arrive devant la galerie et je m’arrête quelques secondes devant pour contempler la devanture et même si l’entrée n’est pas spectaculaire ça suffit à me rendre le sourire.

Je pousse la porte et mon regard est tout de suite attiré par ces murs encore vierges. Je balaie la pièce du regard et je prends conscience de tout l’espace qui est disponible. « Bonjour Cesar ! Bienvenue ! » Je me dirige vers Lexie avec mon plus beau sourire, très sincère puisque je suis ravie d’être là. “Bonjour Lexie, merci beaucoup !” Je la vois jeter quelques coups d’œil autour de nous, elle a l’air un peu dépassée par les préparatifs de l’exposition. Mais je ne peux pas la blâmer, c’est sa première exposition et elle n’est pas du métier d’après ce que j’ai compris. « Je n’ai pas encore réussi à me décider sur la disposition des œuvres. Je me disais que j’y verrais peut-être plus clair avec les tiennes. Tu en as apporté ? » Je sais que je ne suis pas le seul artiste exposé, et même si je suis un peu jaloux de ne pas avoir toute la lumière des projecteurs sur moi je me dis que ce n’est qu’une première étape. Un jour mon nom sera écrit en gros sur une affiche, des photographes seront là pour rapporter le succès du vernissage de ma dernière exposition et tout le monde saura que j’ai du talent. Mais chaque chose en son temps. “Oui j’ai apporté ce que vous m’avez demandé.” Je lui tends une chemise remplie de mes dernières œuvres, celles dans le style plus sombre et abstrait qui avait tant plu à Lexie. « Tu es toujours d’accord, n’est-ce pas ? Pour exposer pour le vernissage ? » Je ne vois pas pour quelle raison je refuserais une opportunité pareille, il est évident que j’ai envie d’être là, je suis plus que jamais d’accord et prêt à franchir ce pas. “Bien sûr, c’est avec grand plaisir. C’est une opportunité incroyable pour moi, merci encore.” J’ai quelques questions à lui poser, des questions pratiques mais j’ai besoin de savoir pour mieux me projeter et pour organiser ma communication sur les réseaux sociaux. “Combien d’autres artistes seront exposés ? Et concernant le vernissage est prévu pour quelle date déjà ? J’aimerais lancer la promotion de l’exposition sur mes réseaux sociaux.” J’espère simplement que parmi ces autres artistes je ne croiserais pas cet enfoiré de Léo, le petit chien d’Auden qui serait capable de chercher à nouveau les problèmes avec moi, même si son nez cassé devrait être une leçon suffisante. Et puis je conclue en me montrant le plus serviable possible. “Vous avez besoin d’aide pour organiser la disposition des œuvres ?”

Lexie tourne en rond dans la galerie, son regard passant des murs vierges aux dessins qui s’entassent sur son bureau. Il y a beaucoup d’espace, largement de quoi faire mais, pour l’instant, elle ne sait pas par où commencer. Alors, l’arrivée de Cesar est un soulagement, parce qu’elle se dit qu’avec la totalité des œuvres sous ses yeux, elle pourra peut-être choisir pour quelle disposition opter. Et avec un peu de chance, le jeune artiste, avec son regard aiguisé, pourra l’aider dans les préparatifs.

« Oui, j’ai apporté ce que vous m’avez demandé. »

Il lui rend une chemise emplie de dessins, et la brunette la pose immédiatement sur le bureau, l’ouvrant pour découvrir des œuvres sublimes, en noir et blanc, sombres, celles qui avaient tant attiré son regard sur les réseaux sociaux. Elle laisse son regard découvrir les dernières créations de l’artiste, un instant muette, alors qu’un petit sourire flotte sur son visage.

« C’est juste … parfait ! »

On sent qu’elle est impressionnée par le talent du jeune homme, et elle pose sur lui un regard admiratif.

« Ho, et j’aimerais que tu me tutoies. J’ai l’impression d’être vieille quand tu me vouvoies ! »

Elle laisse échapper un petit rire.

« Et puis, je pense qu’on va passer plusieurs heures ensemble, à préparer le vernissage, alors autant en profiter pour sympathiser. »

Ok, Lexie n’est pas connue pour être la personne la plus sympathique au monde, celle avec laquelle on se lie d’amitié. C’est même plutôt le contraire, en réalité. Elle ne se confie pas, ne s’ouvre pas, et a un côté supérieur et condescendant. Mais pas avec Cesar, et pas quand il s’agit d’art. Il a sans doute l’impression d’avoir besoin d’elle et de sa galerie pour gagner en visibilité, mais elle a tout autant besoin d’artistes qui acceptent d’exposer entre ses murs.

« Bien sûr, c’est avec grand plaisir. C’est une opportunité incroyable pour moi, merci encore. »

Elle esquisse un sourire triste, alors qu’elle constate qu’elle avait raison.

« Combien d’autres artistes seront exposés ? Et concernant le vernissage est prévu pour quelle date déjà ? J’aimerais lancer la promotion de l’exposition sur mes réseaux sociaux. »

Le visage de la brunette s’illumine.

« Ce serait génial ! C’est vrai que je n’ai pas encore réfléchi à la partie communication … »

Elle pose un doigt sur sa lèvre inférieure, semblant réfléchir à la publicité, et à toutes les tâches qu’elle a encore à effectuer.

« Si tu voulais bien me donner un coup de main pour la promotion, j’en serais ravie ! Pour l’instant, on part sur trois artistes, mais j’aimerais mieux qu’on ne communique pas là-dessus pour l’instant, car ça peut encore évoluer. Tous des dessinateurs, pour garder une certaine cohérence. Et ce sera le 15 avril. »

Et voilà Cesar qui propose encore une fois de l’aider.

« Vous avez besoin d’aide pour organiser la disposition des œuvres ? »

Elle lui sourit, et commence à déambuler dans la galerie, montrant les murs de ses mains.

« Avec plaisir. Je pensais exposer un premier artiste ici, sur le mur de gauche, et sur la partie de mur centrale. Faire de même sur le côté droit avec un deuxième artiste. Et enfin, le troisième sur le mur du fond. »

Elle se retourne vers Cesar pour jauger sa réaction.

« Ca me semble plus cohérent d’exposer chaque artiste … « séparément », ou en tout cas, ne pas mélanger les œuvres. Mais je suis ouverte à toute proposition. »

Parce que son job à elle, c’est de présenter la météo et de montrer des petits soleils sur un fond vert, pas d’organiser un vernissage.

@Lexie Walker

J’arrive à la galerie en avance et j’aperçois Lexie au fond de la salle en train d’observer les murs qui sont toujours vierges. Je la salue et quand elle me demande si j’ai bien amené ce qu’elle m’avait demandé, j’exhibe fièrement la chemise qui contient les œuvres que j’ai décidé d’exposer. Je lui tends la pochette et elle parcourt mes créations. Pendant ce temps là je l’observe, j’essaie de voir sur son visage des réactions particulières. C’est finalement un petit sourire qui vient orner son visage et je me dis bingo j’ai visé juste. « C’est juste … parfait ! » Elle me regarde et je sens qu’elle est sincère et sa réaction me fait plaisir. Quand elle m’a laissé carte blanche sur le choix des peintures que je voulais exposer j’ai eu quelques appréhensions. Bien sûr j’ai confiance dans mes création mais j’étais plutôt inquiet de savoir si cela pouvait correspondre avec ce qu’elle attendait et le reste de l’exposition. Je suis donc ravi de voir qu’elle est satisfaite. « Ho, et j’aimerais que tu me tutoies. J’ai l’impression d’être vieille quand tu me vouvoies ! » Je vais devoir faire un effort pour arrêter de l’appeler madame Walker et pour la tutoyer. Ce qui est assez bizarre puisque j’ai toujours vu le monde de l’art comme quelque chose d’assez formel. « Et puis, je pense qu’on va passer plusieurs heures ensemble, à préparer le vernissage, alors autant en profiter pour sympathiser. » Je lui renvoie son sourire avant de lui répondre. “Pas de soucis, je suis content que ça te plaise alors.” Même si ça me fait bizarre, ses désirs sont des ordres, je ne veux pas la froisser et risquer de manquer une future opportunité. Je lui parle ensuite de la partie communication qui est cruciale pour la réussite du vernissage. « Ce serait génial ! C’est vrai que je n’ai pas encore réfléchi à la partie communication … » C’est dans ces moments-là qu’on sent qu’elle n’est pas professionnelle et que cette galerie est vraiment un cadeau de famille fortunée. Je retiens un petit soupir et je ne lui montre pas que je suis un peu agacé mais je n’apprécie pas que tout ceci soit aussi amateur. Enfin, il va falloir que je compose avec. « Si tu voulais bien me donner un coup de main pour la promotion, j’en serais ravie ! Pour l’instant, on part sur trois artistes, mais j’aimerais mieux qu’on ne communique pas là-dessus pour l’instant, car ça peut encore évoluer. Tous des dessinateurs, pour garder une certaine cohérence. Et ce sera le 15 avril. » Je hoche la tête, les réseaux sociaux c’est mon domaine alors si je peux aider pour organiser cette journée je le ferai avec plaisir. “Avec plaisir, la partie com’ c’est pas simple mais je commence à être rôdé. Je t’enverrai un visuel que tu pourras diffuser.” Je m’inquiète ensuite de savoir si elle a besoin d’aide sur autre chose. « Avec plaisir. Je pensais exposer un premier artiste ici, sur le mur de gauche, et sur la partie de mur centrale. Faire de même sur le côté droit avec un deuxième artiste. Et enfin, le troisième sur le mur du fond. » Nous déambulons dans la galerie et je suis son regard quand elle me montre du doigt les murs en question. “ça me parait bien.” Je n’ai aucune expérience dans l’organisation d’un vernissage mais d’un point de vue esthétique je pense que l’organisation qu’elle me propose pourrait être bonne. « Ca me semble plus cohérent d’exposer chaque artiste … « séparément », ou en tout cas, ne pas mélanger les œuvres. Mais je suis ouverte à toute proposition. » Ne pas mélanger les œuvres, cela semble évident, bien organiser la répartition des oeuvres est un élément essentiel dans la réussite de cette exposition. “Oui je pense qu’il vaut mieux distinguer l’univers de chacun. Ce serait très bizarre de mélanger les styles. On s’y perdrait je pense.” Une autre question me vient, une question dont nous n’avons pas encore parlé. “Est-ce que la presse sera présente pour le vernissage ?”

« Pas de soucis, je suis contente que ça te plaise alors. »

Elle ne peut s’empêcher de sourire en entendant que Cesar insiste sur le tutoiement, comprenant bien que ça le dérange un peu. Ca semble pourtant si logique à Lexie, qui ne constate pas entre eux une si grande différence d’âge, ni un quelconque lien de subordination qui imposerait un vouvoiement. C’est plus ce dernier qui sonnait étrangement à ses oreilles, comme un rappel qu’elle vieillira bientôt et qu’un jour, ce sera elle, Madame Walker, la matriarche de la famille. Elle en frissonnerait presque, tant l’idée lui déplaît, et préfère reporter son attention sur les œuvres que l’artiste a emmené avec lui.
Ce dernier se propose d’ailleurs d’aider pour la partie communication, offrant de réaliser une affiche ou du moins un visuel qui permettrait de diffuser les informations concernant l’événement.

« Avec plaisir, la partie com’ c’est pas simple mais je commence à être rôdé. Je t’enverrai un visuel que tu pourras diffuser. »

Elle hausse les épaules en hochant la tête. Elle a déjà évoqué l’exposition auprès de ses proches, et le fera très bientôt auprès de tout son carnet d’adresses. Avec ces simples démarches, elle sait déjà que la galerie sera pleine. Elle connaît les gens à qui en parlera, sait que ce sont pour beaucoup des amateurs d’art. Néanmoins, le jeune artiste a raison : il ne s’agit pas d’un gala pour lequel les invités sont triés sur le volet. Ici, il faudra ratisser large, et espérer viser un nouveau public. Alors des affiches, des flyers, et de la publicité sur les réseaux sociaux seront sans doute à privilégier.

« Merci, je le ferai. Ne t’inquiète pas, cependant, j’ai déjà eu le retour de pas mal de personnes qui passeront, et je suis certaine qu’on aura déjà pas mal de monde grâce à mon carnet d’adresses. La galerie sera loin d’être vide ce soir-là. »

Elle s’avance vers les murs vierges de l’immense pièce, expliquant à Cesar comment elle envisage d’exposer les artistes qui présenteront leur travail ce soir-là. Il hoche la tête, confirme que la répartition qu’elle imagine semble la plus logique.

« Est-ce que la presse sera présente pour le vernissage ? »

La brunette hoche la tête. Elle avait en effet invité plusieurs collègues, et pas uniquement pour qu’ils admirent le travail des artistes. Elle avait également demandé à ce qu’un article soit rédigé, avant et après l’exposition, dans la partie culturelle du journal. Une interview à la radio était également envisagée. Et, pour ne pas faire les choses à moitié, elle avait envoyé des mots à la concurrence. Elle ne savait donc combien de journalistes se déplaceraient, mais ceux de ABC seraient au moins au rendez-vous.

« Oui, au moins la chaîne pour laquelle je bosse, ABC, voire d’autres journaux ou radios. »

Elle dévisage Cesar pour tenter de lire une réaction sur son visage : de l’appréhension, d’être sous le feu des projecteurs ? De l’envie, au contraire, d’enfin briller ?