All the things we could have been - Chapter #6
Raelyn Blackwell & @Amos Taylor - Univers alternatif - 2007, 20 ans

« On pourrait remettre ça non, tu ne crois pas ? » Perchée sur une barrière en bois, juste à la sortie des box, je discute avec Zach ou, plutôt, Zach essaye d’attirer mon attention alors que je lutte pour ne pas jeter de coups d’oeil à la dérobé à son aîné qui travaille plus loin dans l’un des prés du ranch. « T’as dis que t’avais passé un bonne soirée. » - « C’est ce que j’ai dit, ouais. » Je n’y mets pas du mien, mais je reporte tout de même mon attention sur le jeune homme qui me fait face et qui, encouragé par je ne sais quoi - puisque je ne suis pas entreprenante - dépose ses mains sur la barrière, de part et d’autre de moi. « Et du coup quoi, ça veut dire que je suis obligée d’accepter de sortir à nouveau avec toi ? » Je provoque le jeune homme dans le simple but de le voir se dégonfler mais, malheureusement pour moi, il semble prendre la chose comme un encouragement plutôt qu’autre chose. « T’en as envie, non ? » Ce dont j’ai envie, le but de tout ça, c’était de rendre ton frère jaloux. Ce serait plus simple, si je pouvais exprimer les choses telles quelles, sans prendre de pincettes et mentir. Sauf que si je ne me résout pas à dire la vérité, c’est parce que ça a marché, mais beaucoup trop bien. L’ambiance est électrique depuis deux semaines entre Amos et moi. Lors des repas avec Sarah et Sofia, il évite mon regard et ne s’adresse presque plus jamais à moi directement, lorsque nous travaillons au ranch, il évite de se retrouver dans le même périmètre que moi. Si je lui en veut à cause de ce qu’il m’a dit l’autre soir, je suis surtout blessée par cette défection. Puisqu’il ne me pense plus disposée à lui courir après, cela ne l’intéresse plus de passer du temps en ma compagnie ou, en tout cas, c’est comme ça que je l’interprète et j’enrage. « Et qu’est ce qui te fais dire ça ? » Je lève un sourcil mais, sans se décourager, le jeune homme m’attrape par la boucle de ma ceinture pour me faire descendre de la barrière sur laquelle je suis perchée. « L’instinct. Viens-là. » Ses lèvres approchent dangereusement proche de miennes et je n’en ai pas envie, pas même pour rendre le militaire jaloux. Il ne manquera rien de ce qui se trame, mais je n’ai pas envie de me donner en spectacle ou de me forcer à faire ce que je n’ai pas envie de faire.

Pourtant, la décharge, ce n’est pas un baiser qui me la procure - il ne vient pas - mais les mains baladeuses du cadet de la famille Taylor qui abandonnent ma ceinture au profit de mes fesses. Surprise par son audace autant que choquée, je repousse fermement avant de le dévisager. « Mais ça va pas ? Qu’est ce qu’il te prend ? » Je ne laisse pas au cadet le temps de répondre, et je tourne les talons. Foutus frères Taylor. Furieuse, j’abandonne Zach en plan, j’attrape ma veste en jean et je prends la poudre d’escampette. Ma direction ? Le chemin de terre qui me ramène à la maison d’Amos et Sarah, puisque je n’ai qu’une envie, m’enfermer dans ma chambre et ne plus parler à personne avant le dîner. Le geste du plus jeune des Taylor, quoi que relativement innocent, m’a replongée dans la période sombre de ma vie où je n’étais pas maître de mon corps, et de qui était autorisé à poser ses mains dessus.

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@Raelyn Blackwell  & Amos Taylor  - Univers alternatif - 2007, 29 ans

Je parle peu. Je longe les murs de ma propre maison comme un rat. Je mange sans lever la tête en direction de Raelyn et si je lui adresse quelques mots, c’est pour lui réclamer du sel ou du poivre. A la ferme, je m’arrange pour maintenir entre nous une distance assez grande pour avorter toute conversation. De toute façon, que pourrions-nous nous dire ? Que pourrait-on ajouter aux horreurs que nous nous sommes lancées à cause de mon frère, ce frère qui se pavane comme un coq dans sa basse-cour et qui a le don certain de m’agacer. J’eus envie de lui coller mon point dans la figure lorsqu’il est venu me raconter sa soirée avec Raelyn, omettant le principal - ils ont couché ensemble - et qu’il m’a demandé conseil pour leur prochain rencard. Une vague de jalousie m’a transpercé le coeur, a emporté ma vertu et mes meilleures intentions. Elle a noyé ma bonhomie et ma mansuétude. Ma possessivité, transformée en colère, a serré le manche du seau de pain noir réservé aux chevaux. J’ai grincé des dents et, la mâchoire contractée par ce sentiment irrésistible de lui coller mon poing dans la figure. Au lieu de ça, je me suis comporté comme les derniers des cons. J’ai sous-entendu le passé de Raelyn. Je l’ai parfois évoqué plus clairement lorsque la curiosité de Zach l’a chatouillé. Mon but, évidemment, n’était pas de causer du tort à ma protégée, de salir son image. J’aspirais à éloigner mon frère. Or, je l’ai remarquée cette étincelle dans son regard. Elle m’a semblé aussi malsaine que mon attitude. En retrouvant mon lopin de terre, j’ai baissé les yeux pour ne pas croiser celui de Rae jusqu’à ce que Zach sorte enfin de sa discrétion. Je l’ai observé avec une attention particulière, mon cadet. Je me suis crispé quand je l’ai vu approcher de la brunette, l’entourer de ses bras en s’appuyant contre la barrière, lui chuchoter quelques mots à l’oreille. J’ai détaillé ce manège qu’il lui sert et un horrible pressentiment m’a pris à la gorge, à cause de son angle d’attaque, sans doute aussi parce que j’ai réalisé mon erreur. J’ai saisi l’ampleur de ma bêtise quand il lui a manqué de respect en l’embrassant, en glissant ses mains jusqu’à ses fesses pour les empoigner. J’ai compris mon erreur alors qu’elle s’est offusquée et qu’elle s’est enfuie par le petit chemin de terre qui la ramène jusqu’à chez “nous”. J’ai lâché mon matériel au milieu de tout. J’ai marché d’un pas alerte, on as après la jeune femme, mais en direction de mon frère. Je liu ai décoché un coup de poing dont il me tiendra rigueur, mais je m’en fou. « Pas un mot, ça voulait aussi dire la respecter. Espece de pauvre type.» ai-je craché, furieux mais pas uniquement après lui. Il a répliqué, certainement, mais je ne l’ai pas écouté. Je suis percuté de plein fouet par une vérité : j’ai été con. J’en prends conscience tandis que j’emprunte le même sentier que Raelyn. J’ai déployé de l’énergie pour la rattraper. Elle avait cependant une longueur d’avance et c’est sur le palier de l’étage de mon foyer vide - ma fille est à l’école, Sarah anime un de ses ateliers au sein de son Eglise - que je l’ai interceptée. «Je suis désolé.» l’ai-je hélé sans la toucher. Je n’ose me figurer tous les mauvaises souvenirs ravivé ce geste inconvenant. Zach a disposé d’elle, sans elle, et moi, je me suis approprié son histoire. Je l’ai rapportée sans son autorisation et je suis tétanisé à présent. J’ai le souffle court, mais pas à cause de l’effort, mais parce que je suis mort de trouille par l’éventualité qu’elle ne me pardonne pas, qu’elle choisisse de partir, qu’elle refuse même de m’écouter. Je dois pourtant assumer. Je n’ai pas le choix. Je ne peux pas non plus reculer en lui proposant un peu de mon réconfort puisque l’ambiance entre nous aura été glaciale durant des jours. Aussi, me suis-je lancé sans trop réfléchir. «Ce n’est pas ma faute. Je n’ai pas cru qu’il réagirait comme ça. Il m’a dit qu’il voulait te revoir, qu’il… que… tu lui plaisais beaucoup et moi, je n’ai pas supporté. J’ai pas pu l’entendre et j’ai fait une bourde.  C’était idiot, mais ça m’a dépassé. ça a été plus fort que moi…. » Que tout… malheureusement.

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Raelyn Blackwell & @Amos Taylor - Univers alternatif - 2007, 20 ans

Le geste de Zach, son attitude, tout ça fait remonter de vieux et mauvais souvenirs mais, surtout, je me sens humiliée. Je me dis que, quelque chose en moi, quelque chose que j’ai dit ou quelque chose dans ma façon de me conduire lui a laissé penser qu’il était normal de me traiter comme ça, que c’est peut-être ce que j’attendais de lui. Sur le chemin du retour, je me pose des milliers de questions. Peut-être n’aurais-je pas dû le laisser m’embrasser ? Peut-être que, dans l’esprit des gens simples et sans histoire, un baiser le premier soir est synonyme de petite vertue ? Ai-je fait une erreur sans le savoir, parce que j’ai trop longtemps vécu dans un monde de désaxés ? Suis-je folle d’avoir réagi de la sorte. Aurais-je dû rire et le repousser gentiment, en lui disant ”bien essayé mon grand, peut-être la prochaine fois ? Je remets tout en question, je remets en question ce que je suis et ce que je dégage et mes joues me brûlent lorsque j’arrive enfin à la main, avec la ferme intention de m’enfermer dans ma chambre.

Sauf qu’Amos me rattrape et que, l’esprit encore agité, je n’ai même pas réalisé qu’il avait suivi la scène de loin et qu’il m’avait rattrapée. Il m’interpelle sur le palier, avant que je n’ouvre la porte de ma chambre et je me retourne, surprise et morte de honte. « Je suis désolé. » - « Y’a rien qui justifie que tu sois désolé. C’est bon, je vais m’en remettre. » Son frère n’est pas le premier à tenter de me coller une main aux fesses sans ou avec peu de raisons. Je survivrai, je finirai peut-être pas intégrer qu’aux yeux des hommes je ne suis qu’un jouet, au même titre que mon corps, et qu’ils pensent avoir tous les droits dessus, mais je survivrai. « Ce n’est pas ma faute. Je n’ai pas cru qu’il réagirait comme ça. Il m’a dit qu’il voulait te revoir, qu’il… que… Tu lui plaisais beaucoup et moi, je n’ai pas supporté. J’ai pas pu l’entendre et j’ai fait une bourde. C’était idiot, mais ça m’a dépassé. ça a été plus fort que moi… » Les sourcils froncés, je l’écoute et, au fil de sa tirade, je me décompose. Je me décompose puisqu’il avoue avoir fait une bourde, une assez grosse pour qu’il se sente responsable du comportement de son cadet et je suis horrifiée par toutes les hypothèses qui me viennent à l’esprit. Seule l’une d’elle justifie autant le comportement de son frère que son agitation et sa culpabilité à lui, et je m’effondre en le comprenant. Je ne veux pas y croire. « Qu’est ce que tu lui as dit ? » Une larme roule sur ma joue, et je l’essuie avant qu’elle n’atteigne mon menton. « Amos, qu’est ce que tu lui as dit ? » Je le sais. Mais je veux croire à une autre alternative. Je veux y croire pas tant parce que je serais mortifiée que Zachary Taylor sache que j’ai vendu mon corps pour gagner ma vie, mais parce que cela me prouverait que c’est ce que je suis restée aux yeux d’Amos : une pute. Il faut le croire pour l’affirmer face à son cadet. Il faut le croire pour le jeter au visage de son frère.

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@Raelyn Blackwell  & Amos Taylor  - Univers alternatif - 2007, 29 ans

 “Je suis désolé”. Premiers mots qui sortent de ma bouche, dans un souffle, comme si ça pouvait tout arranger, comme si cette formule si usitée qu’elle perd toute valeur aux yeux de tout un chacun, agirait telle une baguette magique qui permettrait à Raelyn de tout comprendre, qui me dispenserait alors de formuler des explications, de dicter cette vérité dont j’ai honte, terriblement, tellement que le sang me monte aux joues pour d’autres raisons que ma course sur le sentier vers la maison tandis que je poursuivais la victime de mon erreur et de la goujaterie de Zachary Taylor. A quoi je pensais en présentant d’emblée des excuses ? Que Raelyn comprenait ma responsabilité dans cette sale histoire ? Qu’elle me remerciait d’une tape dans le dos pour mon honnêteté et qu’elle ajouterait ensuite, magnanime : “Dors tranquille ? Je ne t’en veux pas.” ? A-t-on seulement idée d’être et d’avoir été aussi con deux fois sur la même journée ? J’en viens sérieusement à me demander si je tourne encore rond. Évidemment que la petite brune n’est concentrée que sur l’attitude inconvenante et insultante de Zach, celle que j’ai provoquée malgré moi. Jamais je ne me suis figuré mon cadet dans le rôle du malotru, et ce, même si son amour des femmes est évident. Je lui pensais des limites liées à notre éducation commune. Je n’ai pas davantage souhaité qu’il blesse ma protégée. Mon seul but était que le vin nouveau de leur relation tourne au vinaigre avant d’avoir été goûté et consommé une fois de plus. La visualiser dans son lit si souvent m’empêche de dormir durant des heures. Je suis fatigué d’ailleurs. Je cherchais à me protéger… et peut-être gardé au plus près de moi celle qui accélère les battements de mon coeur depuis cette nuit parsemée de baisers qu’elle a passé dans mes bras. Est-ce pendable ? Pardonnable ? Alors que j’entame un semblant de justification et qu’il roule une larme sur les traits de la jeune femme, je doute que l’issue de cette conversation me soit favorable. Mon coeur se serre aussitôt. Dans mon estomac enfle une angoisse de la taille d’une balle de tennis. J’envisage un instant de reculer, d’^tre pleutre et lâche à la fois, mais ça ne me ressemblerait pas plu que ma crasse - n’ayons pas peur des mots - de ce matin, celle qui m’effraie et me désole autant pour elle que pour moi : je ne peux plus me voiler la face désormais. J’ai trahi son secret par jalousie. Puis-je seulement l’avouer ? Je ne sais pas, je ne sais plus grand chose malheureusement. Mon regard devient fuyant. Je cherche à gauche et à droite de quoi trouver du courage ou une autre raison qui serait plus acceptable. Il n’en existe aucune cependant. Alors, je me jette au feu. Je me lance dans le foyer d’un bûcher que la poix de ma stupidité a embrasé. «Rien que je ne pensais vraiment ou en tout cas, rien qui ne corresponde à la façon dont je te vois quand je pose les yeux sur toi. Je lui ai expliqué comment on s’était rencontrés et comment tu as atterri ici et c’est pour ça, que je suis désolé. Je voulais le décourager, pas qu’il se croie tout permis. Je voulais qu’il s’éloigne de toi parce que je déteste qu’on te tourne autour. C’était vrai pour le type sur Brisbane et ça l’est encore plus pour mon frère… pas parce qu’il est mon frère, mais parce que je ne supporterais pas de vous voir heureux sous mon nez.» Je ne supporterais pas qu’il prenne une place dont il m’arrive de rêver malgré mon mariage… Sans ce dernier, j’aurais été moins scrupuleux dans cette chambre d’hôtel. Je nous aurais lancé dans un véritable jeu de séduction entre nous. J’aurais pris le temps de la rassurer sur mes intentions, ces impossibles d’aujourd’hui. «Mais, je vais trouver une solution. Je vais me conditionner pour accepter que tu as le droit de vivre ta vie, que je ne peux pas intervenir comme ça, comme une crapule. Je n’en suis pas une.» J’ai avancé d’un pas en direction de la jeune fille renversée par mes aveux. Je lui ai tendu la main avec l’espoir qu’elle s’en saisisse parce que je donnerais tout pour essuyer ses larmes de mon pouce ou du bout des lèvres. Je donnerais ce que j’ai pour empêcher que son corps tremble sous l’assaut d’un sanglot incontrôlable et qu’elle me fuit par fierté en s’enfermant dans la chambre et, c’est triste à admettre - triste ou effrayant ? - mais ça n’a rien à voir avec ma culpabilité.

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Raelyn Blackwell & @Amos Taylor - Univers alternatif - 2007, 20 ans

J’ai beau espérer une autre explication, son visage qui se décompose répond à ma question. Ce qu’il lui a dit, c’est mon secret, c’est ce qui me fait le plus honte et ce que je pensais pouvoir oublier, cacher, mettre derrière moi en recommençant une vie ici, loin du Club et loin de ces types qui profitaient de ma faiblesse. J’ai le coeur brisé avant même qu’Amos ne confirme, et lorsqu’il passe à table, je n’écoute qu’à moitié et les larmes me montent aux yeux. « Rien que je ne pensais vraiment ou en tout cas, rien qui ne corresponde à la façon dont je te vois quand je pose les yeux sur toi. Je lui ai expliqué comment on s’était rencontrés et comment tu as atterri ici et c’est pour ça, que je suis désolé. Je voulais le décourager, pas qu’il se croie tout permis. Je voulais qu’il s’éloigne de toi parce que je déteste qu’on te tourne autour. C’était vrai pour le type sur Brisbane et ça l’est encore plus pour mon frère… pas parce qu’il est mon frère, mais parce que je ne supporterais pas de vous voir heureux sous mon nez. » Les larmes coulent le long de mes joues sans que je ne puisse les arrêter, et ça m’insupporte. Je me mords la lèvre, je me maudis de pleurer comme une petite fille et je maudis surtout le pourquoi. Je ne pleure pas parce que Zach connaît mes secrets. Cela explique peut-être son comportement, mais je n’avais de toute façon ni l’intention ni l’envie que les choses aillent vraiment plus loin entre nous.

Non, je pleure parce que je ne retiens même pas ce qu’Amos a dit, lorsqu’il a affirmé que ce qu’il a dit ne conditionnait pas la façon dont il me voyait. Je pleure parce qu’il a dit à son frère que j’étais une prostituée, et que j’imagine donc logiquement que c’est ainsi qu’il me voit. Je pleure parce que je pensais qu’il était différent, qu’il ne me jugeait pas et qu’il comprenait que ce que j’avais fait, je l’avais fait parce que j’étais au pied du mur, addict, et plus moi-même. « Mais, je vais trouver une solution. Je vais me conditionner pour accepter que tu as le droit de vivre ta vie, que je ne peux pas intervenir comme ça, comme une crapule. Je n’en suis pas une. » J’essuie les larmes sous mes yeux et, incapable de soutenir son regard plus longtemps. Je tourne mon visage et et essuie ma joue sur mon épaule. Le regard dans le vide, je répète, abasourdie. « Tu lui a dit ce que j’étais. » Cela ne rime à rien, de jouer au perroquet. « Tu lui as dit que j’étais une pute. » Je suis mortifiée. Tous les Taylor vont-ils être mis au courant ? Je ne vois pas pourquoi Zach, qui a la langue bien pendu, n’en parlerait pas à ses frères et ses parents. Mon visage disparaît dans mes mains, à présent. « Au moins je sais ce que tu penses. » Je relève mes yeux, blessée, meurtrie par ses aveux. « T’as pas le droit de me juger. T’as pas le droit de me dépeindre comme une prédatrice et toi comme le chic type de l’histoire alors que tu racontes ce genre de chose. » Je crie à présent. Je suis en colère, mais j’ai surtout le cœur brisé. « T’avais pas le droit de lui raconter. C’est pas ton histoire. » C’était intime. « Pourquoi tu m’as fait ça ? Parce que tu crois que j’ai couché avec lui ? Tu voulais le dégoûter ? C’est ça que tu penses de moi ? Que je suis dégoûtante ? » J’ai des larmes dans la gorge. Ma voix se brise. Il me l’a peut-être déjà dit, mais j’ai tout oublié. De honte, de rage et de tristesse, je tourne les talons, je pousse la porte de ma chambre avec violence et j’attrape mon sac à dos, dans lequel je commence à ranger tout ce qui m’appartient et me tombe sous la main.
 

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@Raelyn Blackwell  & Amos Taylor  - Univers alternatif - 2007, 29 ans

 Elle  a compris. Ses yeux se délavent, ils deviennent humides et j’ai mal pour nous deux. Je suis lucide sur ce que quelques mots ne suffiront pas à nous rabibocher, à favoriser un autre rapprochement sur lequel il m’arrive de fantasmer. J’essaie tout de m’armer de la vérité en précisant que son secret, il ne la définit pas pour moi. Je précise que je ne l’ai utilisé que par égoïsme sous prétexte qu’il en aurait pour Zach, mais que j’avais pas prédit qu’il en profiterait aussi vulgairement. J’ai fait plus que sous-entendre que j’ai agi à cause de la possessivité, par la faute de cette idée que ce couple convole sous mes yeux chagrinés ou fulminant de la rage de la jalousie. J’ai commencé à déshabiller mon coeur, mais il me semblerait que Rae n’entende rien. Elle pleure à chaudes larmes et je le comprends. J’accepte également qu’elles obstruent le passage de mots dans son canal auditif. Elle tourne en partie en roue libre. Mes excuses et mes promesses, elle ne l’atteignent pas et, sur l’instant, j’ai considéré que c’était grave. Je l’ai envisagé plus encore lorsqu’elle a tourné les talons pour se réfugier dans sa chambre - elle n’a pas songé fermer la porte à clé cependant - tiré un sac de son armoire et l’a rempli à la hâte, sans réfléchir, sans prendre le temps de plier chaque vêtement pour éviter qu’ils ne se froissent. Elle fait tes tas. Les tissus sont rangés en boule et moi, assommé par l’acte, je ne sais pas quoi dire. Je suis paralysé par la peur d’aller trop loin. Un vent de panique souffle sur moi un vent gelé : je suis tétanisé et ankylosé. Sans toutes ces questions auxquelles j’ai déjà répondu, m’aurait-on touché que je me serait brisé comme de la chair congelée.   «Arrête, arrête ça, s’il te plait.» Mon ton est suppliant et mes doigts enroulés autour de son poignet n’ont qu’un seul dessein : attirer son attention. «Tu n’as rien écouté de ce que j’ai dit et je comprends, tu es dans l’émotionnel, mais raconter comment je t’ai trouvée ne fait pas de toi une pute. C’est pas comme ça que je te vois, MOI. Personne ne devrait le faire d’ailleurs, parce que tu es bien plus que tout. Tu représentes beaucoup plus» Quoi ? C’est encore un peu flou pour moi, mais qu’importe : elle crie. Elle hurle et d’un signe de la tête, je l’invite à cracher tout son venin, à tourner vers moi sa colère puisque je la mérite bien. «Crie encore plus fort, ça ne peut pas te faire de mal.Gifle-moi si tu peux en avoir besoin.» Vide-toi de toute pensée négative. Après, peut-être pourras-tu accorder du crédit à mes confessions. «Je t’ai fait ça parce que je veux pas qu’un autre puisse te rendre heureuse, parce que je veux pas que quelqu'un d’autres voient tout ce que tu es, tout ce que tu caches en toi en qualité et qui me galvanise un peu trop. A ton avis, pourquoi j’ai arrêté de venir te voir du jour au lendemain à Brisbane ? Tu crois que je n’ai pas  pensé à toi pendant mon absence ?  Que je ne me suis pas fait du souci quand ton ancien proprio m’a dit que tu étais partie ? Tu n’as pas idée de comment j’ai eu peur pour toi. Je me suis forcé à croire que tu allais bien. Le jour où tu m’as appelé, j’ai ressenti une sorte de soulagement de savoir où tu étais et de colère pour ce qui t’arrivait. A mes yeux, tu as toujours été la victime, mais une battante aussi. Dans tous ces sentiments-là, il n’y en a un qui va dans le sens de ce dont tu m’accuses. Tu es brillante, tu as de l’humour et tu as un énorme stock de résilience. » Elle force le respect et c’est une qualité que j’aime chez les femmes. D’après moi, ces dernières ne dépendent pas de leur choix de vie, mais de la façon dont elles traitent l’information quand elles ont commis une erreur et de leur capacité, en cas de nécessité, d'appeler à l’aide quand elles sont en danger de la folie des hommes ou de leur espoir déchu. La “gamine” que j’ai rencontrée, elle craignait que mon aide coûte cher à son intégrité. Comment pourrais-je la regarder en étant dégoûté d’elle parce qu’elle a été abusée par son addiction et par des gens assez pervers qui en ont joué ? «J’ai compris grâce à lui que tu n’avais pas couché avec lui… mais il l’envisageait et j’ai pas supporté. Je n’ai pas voulu le dégoûter de toi, j’ai voulu suggérer que tu étais trop jeune et que tu avais trop vécu pour avoir envie d’autre chose que d’une histoire sérieuse, que s’il n’était sur de ce qu’il voulait, il fallait qu’il te laisse tranquille. Il le fallait… pour moi, même si c’est pas juste…» ai-je répété en d’autres mots tandis que j’approche mes poignets de mes lèvres pour les embrasser. «Ne pleure pas, s’il te pas. Et, ne t’en va pas non plus. Je vais réparer tout ça. Je vais régler ce problème, même si je suis sûr qu’il n’en dira rien, à personne d’autres. Reste avec moi, Raelyn. Je n’ai pas envie que tu ne sois plus là. Je n’ai plus envie qu’on se tire la tête parce que tu as voulu vivre ta vie. Ce qui me plairait, je peux pas l’avoir, mais je te préfère ici avec moi, même si c’est pour te voir convoler avec un autre que moi. J’apprendrai, je te le promets. Je n’interviendrai plus, plus jamais. Je vais ravaler ma jalousie et…» C’est impossible, mais je réprime cette vérité de peur d’asseoir l’autorité de son désir : prendre la fuite. «Reste avec moi.» J’ai tenté une approche pour la serrer dans mes bras, lentement, doucement, sans brusquerie, commençant par essuyer une larme roulant sur sa joue. «Si tu pleures parce que tu as peur que tout le monde te voit comme ça, je te jure que ça n’arrivera pas. Si c’est pour moi que tu pleures, alors tu peux arrêter. Tu n’es ni une pute ni dégoûtante à mes yeux. » Ce qui, pourtant, rendrait la situation plus facile. Je ne me surprendrais pas à ramasser d’un baiser sur sa joue une autre larme tandis que je prie, maintenant que je la tiens dans mes bras plus franchement, qu’elle ne me repousse pas avec force et brusquerie.

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Raelyn Blackwell & @Amos Taylor - Univers alternatif - 2007, 20 ans

« Arrête, arrête ça, s’il te plait. » Ses doigts qui s’enroulent doucement autour de mes poignets sont la seule chose qui m’arrête, puisque dans l’état dans lequel je suis je ne me serai pas interrompue. Fourrer dans mon sac à dos - une frusque qui lui a autrefois appartenu puisque je ne suis arrivée qu’avec un sac poubelle pour transporter mes affaires - tout ce qui me tombe sous la main a quelque chose de thérapeutique, au moins, j’étais concentrée sur la tâche et pas sur toutes ces émotions que je ne veux pas avoir à gérer. Je ne me débats pas, je suis bien trop bouleversée pour ça, bien trop occupée à tenter d’empêcher les larmes de rouler sur mes joues, sans grande réussite. « Tu n’as rien écouté de ce que j’ai dit et je comprends, tu es dans l’émotionnel, mais raconter comment je t’ai trouvée ne fait pas de toi une pute. C’est pas comme ça que je te vois, moi. Personne ne devrait le faire d’ailleurs, parce que tu es bien plus que ça. Tu représentes beaucoup plus. » J’ai toujours honte, je suis toujours meurtrie par le fait qu’il m’ait résumée comme telle face à son frère, mais je remonte mon regard dans le sien. « Et je suis quoi Amos ? » J’ai le menton qui tremble, j’élève le ton, signe annonciateur d’une tempête. La phrase suivante, je hurle. « Parce que je suis pas ta sœur, ou ta fille. Je suis pas ta femme ou ta copine et on est pas de vieux amis. » Je me débats mollement, sans succès. « Alors qu’est ce que je fous encore là ? » Pourquoi tient-il tant à ce que je reste ? « Pour que tu puisses contrôler qui je fréquente ? Tu vas lui dévoiler quoi au prochain type qui s’intéressera à moi ? Mes tarifs ? La quantité de cocaïne que je m’envoyais ? Tu vas lui dire que je suis pathétique parce que je me mettais à genoux pour un peu de poudre ? » C’est raté, de pas pleurer en même temps que je crie. « Crie encore plus fort, ça ne peut pas te faire de mal. Gifle-moi si tu peux en avoir besoin. » Par insolence, par esprit de contradiction, parce que j’ai trop mal au coeur et parce que je me sens trop trahie pour abonder dans son sens, je me tais, je garde juste pour regard noir et douloureux fiché dans le sien.

« Je t’ai fait ça parce que je veux pas qu’un autre puisse te rendre heureuse, parce que je veux pas que quelqu'un d’autres voient tout ce que tu es, tout ce que tu caches en toi en qualité et qui me galvanise un peu trop. A ton avis, pourquoi j’ai arrêté de venir te voir du jour au lendemain à Brisbane ? Tu crois que je n’ai pas pensé à toi pendant mon absence ? Que je ne me suis pas fait du souci quand ton ancien proprio m’a dit que tu étais partie ? Tu n’as pas idée de comment j’ai eu peur pour toi. Je me suis forcé à croire que tu allais bien. Le jour où tu m’as appelé, j’ai ressenti une sorte de soulagement de savoir où tu étais et de colère pour ce qui t’arrivait. A mes yeux, tu as toujours été la victime, mais une battante aussi. Dans tous ces sentiments-là, il n’y en a pas un qui va dans le sens de ce dont tu m’accuses. Tu es brillante, tu as de l’humour et tu as un énorme stock de résilience. » - « Tu m’as laissée me démerder seule parce que tu te faisais pas confiance ? » On s’était rien promis, mais je réalise - une part de moi l’a toujours su - que je lui en ai voulu, à l’époque. Que je me suis dit qu’il m’avait donné l’impression de pas être seule, qu’il m’avait presque forcée au début à accepter sa protection, qu’il avait fait tout ça pour tout me reprendre sans préavis. Qu’il avait fait tout ça et que, lorsqu’il avait juste arrêté de venir, je m’étais sentie plus seule encore qu’avant de faire sa connaissance. « Est-ce que t’as conscience d’à quel point je me suis sentie seule ? » Tous les compliments qu’il me fait, je les entends, mais ils sont étouffés par le poids de ma détresse et de la trahison. J’ai l’impression d’avoir les joues brûlantes, à présent que je réalise que mon secret n’est plus gardé et que certains seront certainement bientôt au courant.

« J’ai compris grâce à lui que tu n’avais pas couché avec lui… Mais il l’envisageait et j’ai pas supporté. Je n’ai pas voulu le dégoûter de toi, j’ai voulu suggérer que tu étais trop jeune et que tu avais trop vécu pour avoir envie d’autre chose que d’une histoire sérieuse, que s’il n’était sûr de ce qu’il voulait, il fallait qu’il te laisse tranquille. Il le fallait… Pour moi, même si c’est pas juste… » - « Tu l’as cru. » Il a toujours mon poignet dans sa main et mon cœur qui se brise à ses pieds. « Je suis sortie quelques heures, je suis allée dîner avec lui et tu t’es imaginé qu’on avait couché ensemble. Qu’est ce que t’as cru ? Que je m’étais faite sauter à l’arrière de sa voiture ou dans les toilettes du restaurant ? Mais c’est quoi cette image que t’as de moi ! » Et comment, à cause de cette conclusion qu’il a tirée bien trop rapidement, je peux le croire lorsqu’il affirme ne pas me voir comme une femme à la vertue légère ? « C’est le premier truc que t’as cru. Pour un stupide dîner et un baiser parce que je voulais te rendre jaloux. » Pour un stupide baiser bien sage et innocent, qui plus est. Dans un certain sens, j’ai atteint mon but. J’ai touché ma cible mais je n’avais pas anticipé les conséquences. Comment veut-il que je le crois, lorsqu’il dit qu’il me voit comme une fille brillante, pleine d’humour et de répartie alors qu’il a envisagé le pire ?

« Ne pleure pas, s’il te plaît. Et, ne t’en va pas non plus. Je vais réparer tout ça. Je vais régler ce problème, même si je suis sûr qu’il n’en dira rien, à personne d’autre. Reste avec moi, Raelyn. Je n’ai pas envie que tu ne sois plus là. Je n’ai plus envie qu’on se tire la tête parce que tu as voulu vivre ta vie. Ce qui me plairait, je peux pas l’avoir, mais je te préfère ici avec moi, même si c’est pour te voir convoler avec un autre que moi. J’apprendrai, je te le promets. Je n’interviendrai plus, plus jamais. Je vais ravaler ma jalousie et… » - « C’est pas juste. » J’ai le regard presque suppliant, cette fois. « C’est pas juste pour moi. » Moi, je le regarde tous les jours agir avec Sarah comme un homme amoureux, moi, je les vois tous les soirs regagner leur chambre. Je me mords l’intérieur de la joue pour retenir quelques larmes de frustration. Je n’ai pas plus envie qu’Amos d’être loin de lui, au fond. « Reste avec moi. » Doucement, il tente de m’attirer contre lui. Ma fierté se débat, mon cerveau aussi, mais mon coeur le laisse essuyer une larme sur ma joue et entourer ses bras autour de mes épaules. « Si tu pleures parce que tu as peur que tout le monde te voit comme ça, je te jure que ça n’arrivera pas. Si c’est pour moi que tu pleures, alors tu peux arrêter. Tu n’es ni une pute ni dégoûtante à mes yeux. » - « C’est mon histoire. » Je ne partirai pas, pas aujourd’hui et sur le coup de la colère. Je n’ai nulle part où aller, de toute façon. « Je te jure que si tu la racontes à quelqu’un d’autre, je te tue de mes propres mains. » C’est la colère qui parle, je la brandis en guise de protection.

All the things we could have been - Chapter #6
@Raelyn Blackwell  & Amos Taylor  - Univers alternatif - 2007, 29 ans

 Évidemment qu’au regard de l’attitude de mon frère et des souvenirs qui ont dû resurgir, j’ai peur de la toucher, Raelyn. J’ai peur de l’approcher, mais je combats mon sentiment. Je ne peux pas la regarder remplir un sac de ses vêtements sans réagir. Je refuse qu’elle me fugue, non pas que je ne reconnaisse mon erreur, mais parce que je ne supporte pas l’idée qu’elle s’éloigne de moi. C’est le fond du problème, d’ailleurs. C’est d’être incapable de l’observer en train de convoler avec un autre ou d’être la proie de l’intéret d’un gars qui me rend malade. C’est à cause de cette faiblesse que j’ai commis l’irréparable bêtise de trahir l’un de ses secrets, d’être l’homme que je ne suis normalement pas. Alors, je lui explique. Je répète ce que sa peine a refusé d’entendre en espérant que, cette fois, j’arrive à faire mouche. J’aimerais la toucher autrement qu’en faisant couler ses larmes ou en récoltant des cris. Ils me font mal au cœur. Même si je l’encourage à se débarrasser de sa rage avec honnêteté, à chaque fois qu’elle manifeste et qu’elle exprime sa déception, je suis écrasé par ma propre honte. Mais, est-ce mal ? N’est-ce pas le moteur idéal pour lui confesser des vérités que j’aurais préféré conserver jalousement, mais qu’elle mérite ? «Je ne sais pas ce que tu es exactement.» Je sais, en revanche, ce que j’aimerais qu’elle devienne si tant est que ça soit possible. Or, ça ne l’est pas. «Mais, effectivement, tu n’es ni ma sœur ni rien de tout ça, et c’est pour ça que je ne ferai plus jamais ce que j’ai fait aujourd’hui, à part te demander de rester. Je ne suis pas prêt à ce que tu t’en ailles. Je ne veux pas que tu t’en ailles.» Je tomberais à ses genoux pour la dissuader de remballer ses effets. «Je te jure sur ce que j’ai de plus cher que plus jamais je ne ferai un truc pareil, parce que c’est ton histoire. Je te l’ai dit une fois et je le pensais. J’ai eu peur… J’ai paniqué et j’ai oublié de réfléchir.» Je ne pourrais être plus sincère tandis que j’avance d’un nouveau pas dans sa direction sur plusieurs niveaux. Je le fais physiquement, mais aussi plus émotionnellement. Je déshabille mon cœur sans effroi cette fois : c’est presque un soulagement, même si la question qui s’ensuit m'embarrasse. «Je n’ai pas eu l’impression que je te laissais te démerder. Tu avais l’air de gérer ta situation. J’avais parfois l’impression d’être ton pigeon alors que tu étais plus que ça pour moi.» A l’époque, je la considérais comme une amie, jusqu’à ce qu’une envie de l’embrasser si oppressante m’a poursuivi durant des jours, y compris après mon éloignement.   «Non. Je n’en ai pas conscience. Pas plus que tu ne dois avoir conscience de comment moi je me suis senti, en tant qu’homme marié et père de famille, alors que je réalisais que tu m’attirais comme un aimant, que j’ai envie de t’embrasser dans le couloir de chez le médecin et pas parce que j’avais pitié de toi, mais parce que je tiens à toi un peu trop pour mon propre bien.» Je ne calcule pas le discours qui m’échappe. Il n’est que l’expression de mon authenticité et, tant pis, si plus tard, je regrette ses aveux. Sur l’heure, ils sont nécessaires et, a fortiori, ils me font du bien. Je suis rassuré de pouvoir lui expliquer que non. «Non, je ne l’ai pas cru parce que je me suis imaginé que tu n’étais bonne qu’à ça. Je l’ai cru parce que j’avais tellement peur que ça arrive, que c’était plus facile pour moi de me dire que j’avais raison que de me rassurer et tomber de haut si tu décidais de le revoir, surtout que ça, c’était bien parti. C’est ce que ça veut dire un baiser..» Qu’importe qu’il soit innocent, ça signifie : “à bientôt.” «Que tu as passé une super soirée et que tu remettras ça bien volontiers.
Et moi, ça m’a rendu dingue. Mais, ce n’est pas toi le problème ni même l’image que tu renvoies. C’est moi… juste moi et ce ma possessivité qui n’est pas normale. Je le sais bien.» ai-je confessé, approchant plus encore pour essuyer une larme sur sa joue et, plus audacieux encore, enrouler un bras autour de ses épaules. Je promets de me soigner de ce mal qui me ronge, pour ma fille, pour Rae, pour moi, pour nous et pour Sarah qui, je m’en désole, arrive en queue de peloton. J’en suis chagriné autant que je suis frustré que mes mots amènent des remarques que je ne comprends pas bien. «Quoi ? Qu’est-ce qui n’est pas juste ? » ai-je demandé, doucement, d’une voix faiblarde et, somme toute, proche du murmure. «Dis-moi.», “Vide ton coeur.”, l’aurais-je bien encouragée autrement qu’à demi-mots. « Je te jure que plus jamais je ne ferai l’étalage de tout ça, je vais me résonner, Rae. C’est une promesse que je te fais. Plus jamais je ne nous mettrai dans une situation ambigüe non plus. tu as le droit de vivre ta vie.» ai-je admis tandis que je tire mes propres conclusions : c’est cette injustice qu’elle pointe du doigt. Je vis mon histoire, en disposant de la sienne, sans l’autoriser à s’envoler.

All the things we could have been - Chapter #6
Raelyn Blackwell & @Amos Taylor - Univers alternatif - 2007, 20 ans

Lui ne veut pas que je m’en aille, moi, je veux juste qu’il me voit moi, pas comme la junkie qu’il a ramassée à Brisbane en train de brader son intégrité physique et qui, peut-être une fois, lorsqu’il était loin de sa femme, l’a tenté. « Je te jure sur ce que j’ai de plus cher que plus jamais je ne ferai un truc pareil, parce que c’est ton histoire. Je te l’ai dit une fois et je le pensais. J’ai eu peur… J’ai paniqué et j’ai oublié de réfléchir. » - « T’as oublié de me respecter. » Aussi et surtout. Je suis toujours en colère, mais elle a déjà laissé place à plus de tristesse qu’à de rage. « Je n’ai pas eu l’impression que je te laissais te démerder. Tu avais l’air de gérer ta situation. J’avais parfois l’impression d’être ton pigeon alors que tu étais plus que ça pour moi. » Le rire que je laisse échapper est bref, jaune, et mauvais. Je ne sais pas de quoi j’avais l’air exactement, mais je sais ce que j’étais et dans quel état j’étais. Je ne gérais pas la situation. Jamais je ne prétendrai que c’est sa défection qui m’a entraînée plus loin dans l’horreur, c’était l'œuvre de mon addiction, mais ça m’a fait mal, de me sentir abandonnée. Lorsqu’il a fait irruption dans ma vie, il m’a donné l’impression qu’il restait quelqu’un qui n’en avait pas rien à foutre de moi, qui ne se moquait pas de savoir comment j’allais. Cette impression, il me l’a arrachée en ne revenant plus : j’ai cru et ressenti les choses comme si je n’avais été qu’un passe-temps, une bonne œuvre ou une distraction. « Non. Je n’en ai pas conscience. Pas plus que tu ne dois avoir conscience de comment moi je me suis senti, en tant qu’homme marié et père de famille, alors que je réalisais que tu m’attirais comme un aimant, que j’ai envie de t’embrasser dans le couloir de chez le médecin et pas parce que j’avais pitié de toi, mais parce que je tiens à toi un peu trop pour mon propre bien. » J’ai l’impression qu’il cherche à échanger les rôles, qu’il me demande d’enfiler sa paire de lunettes et je fronce les yeux, révoltée par ce que je crois comprendre. « Et je dois te plaindre ? Je dois pleurer sur ton sort parce que t’as eu l’impression que malgré ta vie parfaite je te faisais de l’effet ? » J’ai conscience qu’elle ne l’est pas, parfaite, sa vie. Pour autant, à chaque fois que je suis en colère, je mélange tout et je nous réduit aux chances et choses qu’il a et que je n’ai pas ou perdues il y a bien longtemps. Un foyer. La sécurité. Un toit à lui au-dessus de la tête. Sa fierté, son intégrité et sa santé. Sa famille, que ce soit celle dans laquelle il est né ou celle qu’il a construite avec Sarah. Des gens qui se demanderaient ce qu’il lui est arrivé s’il disparaissait du jour au lendemain. Je suis injuste, mais trop en colère, déçue et triste pour le réaliser.

« Non, je ne l’ai pas cru parce que je me suis imaginé que tu n’étais bonne qu’à ça. Je l’ai cru parce que j’avais tellement peur que ça arrive, que c’était plus facile pour moi de me dire que j’avais raison que de me rassurer et tomber de haut si tu décidais de le revoir, surtout que ça, c’était bien parti. C’est ce que ça veut dire un baiser. Que tu as passé une super soirée et que tu remettras ça bien volontiers. Et moi, ça m’a rendu dingue. Mais, ce n’est pas toi le problème ni même l’image que tu renvoies. C’est moi… juste moi et ma possessivité qui n’est pas normale. Je le sais bien. » - « J’ai jamais eu envie de le revoir. » Je n’avais même pas envie de l’embrasser. Gênée, je détourne les yeux. Une part de moi sait que c’est hypocrite de la lui reprocher, cette possessivité. Ca l’est parce que je l’ai voulue, je l’ai cherchée en acceptant de sortir avec Zach alors qu’il ne m’a jamais intéressée. J’ai même avoué l’avoir fait pour le rendre jaloux, à demi-mots, mais il ne m’entends pas plus que je ne l’entends moi-même. Nous sommes deux sourds bien trop malheureux pour réaliser que nous déposons l’un comme l’autre des indices de notre attachement, un peu partout. « Quoi ? Qu’est-ce qui n’est pas juste ? Dis-moi. » - « Non, laisse moi. » La gorge nouée et sèche, je me débats mollement entre ses bras. Je n’ai pas envie qu’il brise ma carapace, j’y suis bien, derrière. « Je te jure que plus jamais je ne ferai l’étalage de tout ça, je vais me résonner, Rae. C’est une promesse que je te fais. Plus jamais je ne nous mettrai dans une situation ambigüe non plus. Tu as le droit de vivre ta vie. » - « J’ai pas envie de partir. Mais j’en peux plus. » Ou en tout cas, sur l’instant, je me sens submergée. « J’en peux plus de vous voir jouer au couple parfait avec Sarah alors que vous vous insupportez l’un l’autre. » Ils se sont peut-être aimés un jour, je n’en sais rien, mais aujourd’hui je ne vois pas grand chose de beau et d’harmonieux, chez eux. Je ne vois que de l’ennui. « Tu veux pas que je parte, mais tu veux pas de moi. Et moi, je vis sous le même toi que toi et ta connasse de femme. » Peut-être que dans d’autre circonstances, elle m’aurait laissée indifférente, mais j’ai appris à la détester. « J’en peux plus de faire semblant de pas avoir envie d’être avec toi. Et j’en peux plus de te voir semblant de pas avoir envie d’être avec moi. » Et pourtant, lorsque j’ai rassemblé mes affaires, je pleurais autant à cause de sa trahison qu’à cause de ma décision précipitée de partir. « C’est égoïste. De me garder là parce que ça te fait te sentir mieux, sans avoir l’intention de rien me donner. » Toujours aussi mollement mais cette fois-ci avec succès, je m’extirpe d’entre ses bras et je m’éloigne. « Laisse-moi. Je voudrais être seule. » Parce que je n’ose même plus le regarder dans les yeux.

All the things we could have been - Chapter #6
@Raelyn Blackwell  & Amos Taylor  - Univers alternatif - 2007, 29 ans

La détromper me vient à l’esprit puisque je ne manque pas de respect à son égard. Je ne la vois ni comme une prostituée ni comme une junkie. A mes yeux, elle est une femme qui se montre plus forte qu’elle ne l’est réellement. Je jurerais que je suis capable de percevoir dans le fond de son âme et dans ses attitudes toute la fragilité qu’elle entreprend de cacher aux yeux du monde. C’est toutefois de l’ordre de l’inavouable, comme l’éventail d’émotions qui me traversent en sa présence, que ce soit à la table du petit déjeuner, dans le salon, dans un hôtel ou dans cette chambre où des larmes perlent sur ses joues. Elles me déchirent le coeur si bien que je réprime l’audace que serait d’invoquer un argument pour lui prouver qu’elle a tort quand ce n’est pas tout à fait le cas. J’ai bien piétiné sa fierté au détriment de ma considération pour elle. «C’est vrai, mais ça ne veut pas dire que je n’ai pas de respect pour toi. J’ai été égoïste.» ai-je ajouté, non pas pour m’auto-flageller, mais parce que mon authenticité dicte mes mots et mes comportements, sur l’instant ou précédemment si j’en crois ce rire jaune qui échappe de sa bouche amincie par sa colère et sa peine. Ma version de l’histoire concernant ma désertion, elle ne lui plaît pas. Pourtant, elle est vraie. J’ai eu peur de moi, d’elle, de la tension qui régnait de plus en plus souvent entre nous et qui grandissait à chacune de nos rencontres. Dois-je être plaint pour autant. Non ! «Ce n’est pas ce que je te demande.» ai-je avancé en cherchant à la garder contre moi. «Je t’explique. Je me justifie en te donnant les explications que tu méritais à l’époque et que tu mérites maintenant pour que tu comprennes pourquoi j’ai été aussi con. Je ne dis pas que c’est légitime et que c’était correct de ma part.» Disparaître de sa vie sans l’en avertir était maladroit et l’adjectif doit être faible. Néanmoins, jamais je n’ai nourri de mauvaises intentions. Je n’ai pas imaginé - à moins que je m’en sois convaincu à la faveur de la facilité - que je lui causerais tort d’une quelconque manière. « Et je ne pense pas t’avoir laissé sous-entendre que ma vie était parfaite.» Je me souviens parfaitement lui avoir confié à mi-mots mes doutes, mes désillusions et, qui plus est, mon sentiment de solitude et celui de n’être qu’un raté de plus à Kilcoy. Dois-je le lui rappeler ? A quoi bon ? Raelyn est fermée à la conversation. Elle a mal. Moi aussi. Notre douleur commune doit certainement définir les raisons qui nous conduisent à demeurer l’un contre l’autre. Bien sûr, la brunette se débat, mais si faiblement que je peine à envisager de ce que mon contact la dérange. Je ne jurerais pas non plus que ma question m’indispose malgré mon indiscrétion. Elle a évoqué, je réclame des précisions et là où elle aurait été en droit de refuser de s’exprimer, elle se lance. Elle se jette à l’eau et elle m’horrifie, Rae. Elle me tétanise parce qu’une partie de ses aveux me plait et qu’une autre ne suggère qu’une chose : je vais la rendre malheureuse. Si elle reste là, chez moi, elle souffrira plus que je ne le souhaite, plus que je ne pourrai le supporter parce que mon penchant pour elle ne se borne pas à la tocade. «Je suis désolé.» me suis-je excusé en essuyant l’eau de ses yeux avec délicatesse. Je ne suis bon qu’à ça : jouer au couple parfait. «Sofia, elle…» J’hésite. Je suis terrifié par ce que je ressens, paralysé par ce que j’aimerais, ankylosé parce que rien de ce dont elle rêve n’est possible. Je ne peux pas blesser ma gamine parce que je suis, non seulement touché par Raelyn, mais aussi épris de sa personnalité. C’est interdit ! «Et c’est trop compliqué pour être résumé à un : je ne veux pas de toi.» Cette fois, c’est au creux d’un baiser que je ramasse une de ses larmes, mais j’ai regretté aussitôt : c’était déplacé. C’est à nouveau envoyer de mauvais signaux. «C’est vrai, c’est égoïste de te demander de rester.» S’il existe une solution, j’implore le ciel - vide pour moi, habité pour d’autres - de me la souffler à l’oreille maintenant qu’elle m’échappe, que Rae échappe au confort de mes bras. «Et, je ne peux pas te demander ça.» Je me recule, les jambes et les mains tremblant un peu, ce que je m’efforce de cacher. « Je vais te laisser.» Elle me le demande et je ne peux pas insister pour qu’elle demeure auprès de moi. «Mais, ne prends pas de décisions trop vite, d’accord ? » ma voix n’est pas aussi blanche que je ne l’espérais. Elle est plaintive et, paniqué par ce qu’elle pourrait choisir de me fuir, c’est moi qui le fais. Je quitte la chambre…