Par trois fois, je m’assure que les toilettes sont vides de toute présence avant de verrouiller la porte. De l’autre côté, au bout du couloir, dans une ambiance guindée, faites de ronds de jambe et autre politesse forcée pour l’image, la fête bat son plein. Tout s’apparente à une réussite lorsque les plus grosses fortunes des environs ont décidé de se pointer de concert, probablement curieux de découvrir le visage de celui qui est venu mettre un véritable coup de pied dans leur fourmilière si bien installée. C’est que je me laisse prendre au jeu, avide de vouloir être le meilleur, dans le désir toujours plus nécessaire de prouver que je suis capable et qu’il serait bien idiot de me considérer comme un arriviste. Pourtant, comme toujours, l’exercice social m’emmerde. Il est difficile de feindre la moindre attention pour les cancans mondains ou bien le directeur de la compagnie dont j’ai déjà oublié le nom cent fois. Trop fier pour réclamer un brin de compagnie auprès de Murphy, je préfère m’enfermer un instant pour laisser couler sur le comptoir de marbre, un peu de poudre. Rien d’extravagant, pas vraiment un produit de qualité, mais suffisant pour donner l’illusion, pour feindre l’amusement. Les gestes sont parfaitement apprivoisés, prélever juste ce qu’il faut de poudre pour finir par en rajouter une couche. La came est mauvaise, mais c’est toujours mieux que le manque.

Elle met son temps à faire effet la poudre, pas vraiment de celle qui vous fera planer en un instant. Ou bien, c’est mon corps qui ne sait plus se contenter d’une si faible quantité. Je suis tenté de retourner m’enfermer dans un endroit, pour une deuxième ration ou une troisième, mais le champagne pourrait faire l’affaire. Avec un sourire impeccable coller aux lèvres, je déambule entre les groupes, force la présentation auprès de tout ceux qui me paraissait inconnue. Je veux qu’ils sachent qui je suis, qu’ils impriment les traits de mon visage pour les associés à un nom qu’ils n’auront plus de cesse d’entendre. Tout se déroule comme prévu, les conversations m’emmerdent, mais elles sont nécessaires. Les femmes se rapprochent de plus en plus quand leurs maris eux m’aborde avec une distance appréciée. Mais c’est toujours la même rengaine à vouloir connaître les dernières rumeurs sur un tel tout en toisant du regard le groupe opposé. Pour la énième fois, je tente une échappée, mais on me retient avec une nouvelle question, puis une autre. Jusqu’à ce que je me dérobe pour de bons, rencontrant sur mon chemin, le plateau d’un serveur visiblement empoté. Les coupes de champagne se déversent sur ma chemise tandis qu’en relevant la tête, je croise un regard si familier. « Toujours aussi con toi ! » Seth tient son plateau du bout des doigts et si je ne sentais pas tous les regards se poser sur nous, je m’en serais emparé pour lui refaire le portrait, à nouveau. « Tu comptes rester planter là longtemps ?! » Ramasse l’esclave et plus vite que ça.

@seth moriarty

Elle fait chier Leo à négocier tout ce qu'elle veut pour que tu puisses gratter quelques nuits de plus dans son appart. Au vue de l'étendue de toute ta merde dans son appart, t'as envie de dire que c'est le votre, mais elle apprécie pas trop. Elle préfère faire semblant qu'elle te file un coup de main, mais ouais, c'est le vôtre qu'elle arrête de faire genre. Que ce soit le vôtre ou pas, c'est quand même elle qui décide quand est-ce qu'elle va mettre tes affaires sur le bord du chemin la même journée ou le camion à ordure fait sa tournée. Du coup, ouais, faut pas trop la contrarier quand même. Et elle te le fait payer cher le petit cambriolage de rien du tout qui a eu lieu dans son appartement. C'est pas faux qu'elle a perdu plus d'affaires que toi là dedans. Facile, toi, t'as presque rien. T'as dû aller te rechercher un chargeur de téléphone, mais c'est tout. T'as quand même pris le peu d'argent que tu avais sur toi pour aller rechercher son ordi - le seul truc avec un minimum de valeur si on demande ton avis - mais elle est chiante et ça ne semble pas assez pour elle. C'est pour ça que t'es là, dans cette soirée de riche à la con, à servir des coupes de champagne à tous les cons de la ville. Madame peut pas y aller. Madame VEUT pas y aller plutôt, quelle connasse. Mais si elle y va pas, ils l'a reprendront jamais. Et c'est que ces soirées là sont payante quand tu fais semblant que t'es gentille et que tu as une pair de seins. Autrement dit, elle ne sera pas payante pour toi, parce que tu feras pas vraiment d'effort et que tu as aucun atout qui intéresse les vieux pervers de cette soirée.

Qui ne vois-tu pas là au loin ? Arthur Coventry. Évidemment qu'il fait partie de l'élite de la ville. Évidemment qu'il est là. L'idée de juste t'enfuir de cette soirée te prend pendant une seconde. C'est que t'as l'impression que toutes tes douleurs reviennent te rappeler qu'il vaut mieux te tenir loin de ce débile. Puis, il y a aussi cette voix qui te dit que bah il va rien pouvoir faire ici. Il oserait jamais défaire ses petites apparences de fils à papa. C'est ça la différence entre lui et toi, tu t'en aies jamais soucier, même du temps où tu occupais le même train de vie que. C'est sûrement pour ça qu'il est encore là et que toi tu n'y es plus. Et puis, comme tu ne tiens visiblement pas à ta vie, tu fonces directement dans ton ancien ami et toutes les coupes de champagne qui se trouvaient sur ton plateau se retrouvent dorénavant sur sa chemise. Oups. Oh qu'il semble ravie de tomber sur toi et ton sourire qui s'étire au fil des secondes que son visage se crispe en colère. Va te faire foutre Coventry. « Toujours aussi con toi ! » - Mon deuxième prénom, ouais. » Ouais, toujours aussi con. Au point d'aller te jeter directement dans la gueule du loup. Mais bon, tu trouveras bien le moyen de te sauver d'ici sans que Arthur ne puisse vraiment te mettre la main dessus. « Tu comptes rester planter là longtemps ?! » Ouais ? Ton regard suit le sien vers le magnifique dégât qui se trouve toujours à tes pieds. Quoi il veut que tu te penches à ses pieds pour ramasser ? Très drôle. « J'fais pas ça gratuitement. » que tu relances en attendant sagement devant lui. Peut-être bien que pour quelques billets d'extra tu feras un semblant d'effort. Ça mettrais Leo de bonne humeur. Ça prendra quand même une bonne somme qu'il joue pas les cons avec un minable cinq dollars. « T'as peut-être envie de m'payer pour que je m'agenouille devant toi ? » Et c'est sûrement là que tu perds toutes tes chances d'avoir quelques billets de l'Anglais ou c'est peut-être avec ta prochaine phrase; « Je sais que pour ta mère c'était gratuit, mais c'est que t'es moins de mon genre tu vois ? » Quel con qui ne tient pas à la vie.

Il aura suffi d’un quart de seconde. Un demi-tour que je pensais contrôler et la présence d’un empoté de service sur mon chemin. Oh, pas n’importe lequel. Le roi des emmerdeurs, prince des enfoirés de service : Seth. À croire qu’il tombe toujours sur mon chemin ces derniers temps, jamais dans la bonne situation, jamais quand il ne le faut. Dans un fracas assourdissant les coupes de champagnes posés en équilibre sur son plateau viennent s’éclater sur le sol en marbre, créant une mare de bout de verre à nos pieds. Ma chemise se retrouvait trempée de champagne et mon humeur s’envole vers une colère que je ne saurais contrôler longtemps. « Mon deuxième prénom, ouais. » Son arrogance ne m’étonne plus, mais soulève un vent d’indignation auprès de la foule la plus proche. Chacun a cessé ses conversations pour mieux s’intéresser à l’échange qui s’en vient. « J'fais pas ça gratuitement. » Forcément, tout est bon pour gratter de l’argent à ceux qui bosse réellement. « T’en fais pas, y’en a bien un qui voudra de tes services en fin de soirée. » Certains rires féminins s’élèvent dans mon dos tandis que d’autre s’offusque face à une vulgarité qui n’a pas sa place dans un tel établissement. Il ne faudrait pas trop brusquer les anciens. Mais je le vois l’air de défi dans le fond de ses yeux, il n’a pas envie de s’écraser Seth. « T'as peut-être envie de m'payer pour que je m'agenouille devant toi ? » Je m’en passerais volontiers, surtout lorsque je sais d’avance qu’il a plutôt l’habitude de faire ce genre de chose gratuitement. J’allais répondre, la prochaine punchline prête à franchir la barrière de mes lèvres, avant qu’il ne décide de vouloir jouer au malin. « Je sais que pour ta mère c'était gratuit, mais c'est que t'es moins de mon genre, tu vois ? » C’est une pulsion inexplicable qui me traverse le corps, à m’en faire serrer le poing avec force, plantant mes ongles dans la paume de ma main. Il suffirait d’une fraction de seconde pour que son visage se retrouve écrasé au milieu des bouts de verre. Sa tête est si proche, je n'aurais qu’à tendre le bras pour l’attraper par les cheveux et l’amener au sol. L’envie pulse au travers de mes veines quand j’entends le train à rumeur qui se met en marche dans mon dos. Ils ont entendu, ils attendent. Un faux pas et je serais bon pour le renvoi, reléguer dans la case des hommes violents, incapables de régler des affaires avec un minimum de bienséance. Mon sang bouillonne du simple désir de le défigurer pour avoir osé une telle remarque, mais tout se déroule dans un coin de mon esprit sans que jamais je ne fasse quoi que ce soit, conscient des gens qui nous observe. « Vous allez me ramasser ce désordre de suite. » C’est l’employeur qui cause, celui qui a préparé la soirée, qui est responsable du bon dérouler des choses. Seth n’a plus le choix que d’obéir, je le vois se pencher pour récupérer son bordel. L’instinct parle en premier, lorsque sa main se retrouve assez proche des bouts de verres pour qu’un simple pas en avant ne vienne glisser ma chaussure au-dessus de ses doigts. La pression est simple, discrète. Suffisamment nécessaire, pour que sa peau ne puisse échapper à la coupure des éclats de verre. « Je te conseille de disparaître. » Pour toujours.

Le geste est passé inaperçu, remarquer par un homme ou deux, pas assez pour provoquer un scandale, juste savamment souligner pour rappeler qui possède l’ascendant. Ils vont jaser désormais, sur la famille Coventry et le sang-froid déguisé du fils qui a atterris ici sans que personne ne sache réellement pourquoi. Mon nom est sur toutes les lèvres, les regards se tournent sur mon passage sans que jamais la colère provoquée par les paroles du Moriarty ne s’apaise. Tout se mélange. Je ne peux quitter la soirée tout de suite, cela ne ferait qu’alimenter le scandale. Il faut garder la tête haute, balancer quelques plaisanteries, prétendre à ce que cela n’est jamais perturbé le cours de ma soirée. L’exercice s’avère difficile tant, mes mains n’ont de cesse de trembler et que mon esprit se voue à une lente torture de l’enfoiré. « Mesdames, si vous voulez bien m’excuser. » Un sourire de circonstances et je m’éclipse vers les toilettes. L’endroit est vide, je peux souffler, laisser la rage prendre le dessus et ne plus chercher à contrôler le tremblement qui me force à plonger la main dans le fond de ma poche à la recherche d’une dose. La dernière, que j’étale sur le marbre du lavabo sans même prendre le temps de verrouiller la porte de la salle de bain. Il n’existe plus que le désir de se shooter pour expier la colère. Mais la porte s’ouvre, avant que je n’aie le temps d’inhaler quoi que ce soit. Le visage de Seth apparaît dans le miroir, la main amochée, l’air suffisamment énerver. « Dégage Moriarty. » Il s’agira de l’unique avertissement, je ne promets plus rien passé cette seconde de salut pour sa personne. Il est le seul à détenir l’argument qui me fera vriller, quand je l’imagine avec ma mère, à se vanter de ses prouesses auprès de nos amis d’antan. Je pourrais lui éclater la gueule juste pour m’avoir implanté cette image dans un coin de mon esprit. Mais dans cette salle de bain, il ne reste que notre conflit et la coke étaler sur la faïence. « Ferme ta gueule. » Dégage Seth…

« T’en fais pas, y’en a bien un qui voudra de tes services en fin de soirée. » Un rire s'échappe d'entre tes lèvres alors qu'un petit silence semble s'être installé dans la salle, comme si tout le monde avait arrêté leur discussion pour voir la scène entre les deux hommes. Comme s'il croyait que quelque chose de piquant allait se dérouler. Ici, t'es personne. Personne ne sait à quel point tu es un aimant à problèmes. Personne ne sait que tu pourrais lui sauter à la gorge sans te soucier de tout ce qui se passe autour de vous. Personne ne connait Seth Moriarty ici. Alors, ça veut dire que tout le monde observe Arthur. Tout le monde attend patiemment le premier faux pas du jeune prodige. Tout le monde sait qu'il va se casser la gueule, mais personne ne sait quand. Et si c'était ce soir ? « Vous allez me ramasser ce désordre de suite. » Le silence est brisé par le superviseur. Le bruit et les cancans autour de vous semble reprendre de plus belle. Ils sont presque crédibles ces connards de riche à faire semblant qu'il ne matait pas le conflit entre vous deux. Le mec repart de son côté et t'as pas trop le choix de te pencher pour ramasser les éclats de verre. T'as plus peur que Leo t'éclates la gueule pour lui avoir fait perdre son boulot que ce que pourrait te faire le Coventry. De toute façon, il a prouvé qu'il n'avait pas de couilles et qu'il ne ferait rien devant son public chéri. Alors que tu tends la main pour ramasser un morceau de verre, ta main se retrouve rapidement coincé sous la semelle de Arthur. Le verre comprime sous ta peau, la déchire. Ton visage grimace légèrement sous la douleur. Connard. Pas besoin d'une nouvelle fracture. Ce serait chiant d'avoir les mêmes blessures du même agresseur. « Je te conseille de disparaître. » Je demande que ça. Mais t'es coincé ici jusqu'à minuit. Ton regard mauvais se lève vers lui qui se sauve au travers de la foule. Ta main pisse le sang. Bravo ! Avec un peu de chances, ça te permettra au moins de te casser d'ici plus rapidement.

Et non, ces connards de débrouillard te font un bandage à la con. T'as plus droit de tenir de plateau. Pas parce que t'as mal à la main, ils s'en foutent de toi, mais ils tiennent à leur coupe en cristal et ne veulent pas que tu les brises à nouveau. Finalement, tu restes assis sur ton cul à bouffer des hors d'œuvre hors de prix même pas bon. Tu regardes l'heure aux deux minutes en attendant désespéré que minuit sonne - une vraie Cendrillon. Tu zieutes la salle sans réel intérêt jusqu'à ce que tu remarques Arthur qui file en direction des toilettes. Tu devrais aller voler un couteau et le poignarder dans les toilettes. Ça mettrait un peu de piquant dans cette soirée. T'aurais plus peur de le croiser à chaque fois que tu tournes un coin de rue. C'est trop risqué que l'arme se retourne contre toi. Et puis, bof, pas envie de passer tes vieux jours en prison pour cet idiot. Tu sais pas trop ce qui te pousse à aller dans sa direction. Probablement l'envie qu'il explose de colère et que sa carrière lui explose en pleine gueule. Il pourra voir ce que ça fait d'être au fond du trou lui aussi. Quand tu passes la porte de la salle de bain sans aucune délicatesse, c'est sur un Arthur tremblant devant sa ligne de coke que tu tombes. Ah ouais ? Il est en manque ce connard ? « Dégage Moriarty. » Elle est bonne celle-là. Tellement bonne que tu éclates de rire très fort. « Ferme ta gueule. » Ferme ta gueule toi-même, j'ai rien dit. C'est sans plus attendre que tu attrapes ton téléphone, et hop, une première photo de cet idiot de coké. « Les journaux à potins vont se battre pour celle-là. » Tu ricanes comme un con sachant déjà que tu mettrais pas tes menaces à exécution, mais ça, il a pas besoin de le savoir. « Oh, vas-y mon pote, te gêne pas pour moi. J'parie qu'une photo en pleine action vaudra encore plus cher. Ou peut-être qu'une vidéo serait mieux ? » que tu songes à voix haute. Tutoriel de comment sniffer une ligne de coke sans trop trembler par Arthur Coventry, ça fera un malheur.

Ce ne devait être qu’une soirée guindée parmi les autres. Une simple apparition, voguer entre les invités pour se faire voir, serrer quelques mains pour planter une idée dans l’esprit de certains, sourire à quelques femmes esseulées et partir sans me faire voir pour entretenir le mystère. Ça ne devait être que cela, rien de plus. Une routine ancrée sous ma peau depuis toujours au point où je ne réfléchis plus réellement, je fais, dans un mécanisme brut qui me force à enfiler un masque. La voix se veut professionnelle, le sourire éclatant et le tout s’englobe dans un comportement si parfait que le faux pas en deviens inacceptable. Jusqu’à ce que le passé se confronte au présent, que Seth s’impose à nouveau dans ma bulle de la pire des manières qui soit, lui et son affront insupportable. J’ai la sensation qu’il s’est trouvée une nouvelle passion à me suivre qu’importe où je vais et ce soir n’échappe pas à la règle. Il n’est qu’un larbin parmi tant d’autres, habiller tel un pingouin, forcer à faire le service. Il devrait fermer sa gueule, se rendre invisible et surtout, surtout, il faudrait qu’il cesse de faire le malin. Je lui ai laissé la vie sauve lors de notre dernière rencontre, ce soir, je voudrais juste le frapper jusqu’à ce qu’il cesse de respirer. Mais ce n’est pas le genre de choses que l’on fait dans le milieu, on préfère utiliser l’humiliation subtile, balancer quelques mots savamment sélectionnés dans l’attirail des phrases qui flirt avec le politiquement correcte sans jamais dépasser les limites. Ma colère jongle avec le regard des autres, ce que l’on attend de moi. Je gère sans être capable d’y voir clair quand mon esprit tout entier se dévoue à l’élaboration d’une fin douloureuse pour le Moriarty. Soudainement, je ne sais plus faire semblant, méprisant la moindre personne qui s’amuse à murmurer mon prénom, souhaitant leur hurler à la tronche a quel point leur vie sont minable et insignifiante pour ne jamais avoir à revivre l’humiliation que Seth a su amener sur ma famille.

J’ai beau me répéter que personne n’est au courant de cette histoire de ce côté du monde, l’obsession en viens à réveiller les tremblants dans ma main. Un tour aux toilettes et je m’en vais. C’est le plan. Une ligne blanche, juste une, et je me tire d’ici. « Les journaux à potins vont se battre pour celle-là. » Il est fier de lui le serveur de bas étage, agitant son téléphone entre ses mains, un sourire éclatant sur les lèvres. Mon instinct premier me hurle de se jeter sur lui, la raison l’emporte à faire disparaître la moindre trace de cocaïne avant tout. La poudre blanche disparaît sous le filet d’eau clair du robinet, le sachet déjà abandonné au fond de la poubelle depuis plusieurs minutes. « Oh, vas-y mon pote, te gêne pas pour moi. J'parie qu'une photo en pleine action vaudra encore plus cher. Ou peut-être qu'une vidéo serait mieux ? » Il a conscience d’avoir gagné l’ascendant. Est-ce qu’il est au courant ? Il manquerait plus que le connard qui est venu foutre le bordel dans ma famille soit également celui qui apprend ma rechute à mon paternel. La coïncidence me fait ricaner nerveusement quand Seth ne cesse de s’auto congratuler sans jamais trop s’approcher. « Qu’est-ce que tu veux à la fin ?! » La question lancée suffit à la distraire assez longtemps pour que je renferme la distance entre nous et vienne m’imposer dans son espace. À défaut d’empoigner sa gorge, j’aimerais qu’il parle encore, je viens enserrer mes doigts autour de son poignet, celui qui renferme son précieux téléphone. « Ca t’a pas suffi de baiser ma mère ?! » Évoquer ce moment me provoque un frisson dont je n’ai jamais su me débarrasser qu’importe les années. « Je vais te faire disparaître Moriarty. » Et le sarcasme n’est plus de mise.

« Qu’est-ce que tu veux à la fin ?! » En voilà une excellente question à laquelle tu n'es même pas capable de répondre toi-même. Ce que tu veux ? Pas mourir est sûrement une bonne réponse. Dommage que tes actes ne suivent pas tes envies. « Moi ? » Bah oui toi. Qui d'autre ? Tu n'as même pas le temps de répondre qu'il franchit les dernières centimètres qui vous séparent pour venir serrer ton poignet entre ses doigts. La vieille fracture est encore un peu douloureuse sous la pression. Une information que tu ne comptes pas partager avec lui. Ils sont encore nombreux les dommages collatéraux causés par Arthur sur ton corps à ne pas être complètement remis de votre altercation. C'est ce qui se passe quand t'es pas foutu d'écouter ton corps et de savoir quand t'arrêter. « J'essaie juste que ma petite-amie perdre pas ton taf tu vois ? » Ah bah oui hen. Après tout, c'est la faute à Leo si tu te retrouves ici. C'était ça où elle t'éclatait la gueule. Faut surtout pas sous-estimer cette connasse. Comme tu tiens à tes couilles, bah t'es là. « Leo, très sexy, mais trop pauvre pour toi. Perds pas ton temps. » Ou peut-être qu'il pourrait s'abaisser à se taper une paumée juste pour t'emmerder ? Ouais sûrement. Dommage que ça ne t'emmerderait absolument pas qu'il le fasse. Avec de la chance, Leo viderait son appart de luxe et c'est toi qui gagnerait. Finalement, t'es presque prêt à lui refiler son numéro pour qu'il applique sa vengeance - ou sa perte. « Ca t’a pas suffi de baiser ma mère ?! » Vraiment rancunier cet abruti. Tu lèves les yeux au ciel. Tu voudrais bien tirer sur ton bras pour te libérer de sa prise, mais tu sais déjà que c'est peine perdu. « J'ai baisé ta mère. Tu m'as cassé la gueule. On est quitte non ? » À voir le sang qui semble bouillir dans son cerveau, la réponse est non. Vous n'êtes pas quitte. Dommage que Arthur ne comprenne pas que ça n'a jamais été contre lui. Ça a toujours été contre son paternel - même s'il ne le méritait pas vraiment plus que lui. Ta vie de p'tit mec rangé t'emmerdait pour mourir. Flirter avec le danger de se taper la femme du patron était bien trop excitant. Est-ce que tu le referais maintenant que tu connais la fin de cette histoire là ? Non, absolument pas. « Je vais te faire disparaître Moriarty. » C'est à ce moment-là que tu éclates de rire. Sa petite poudre blanche lui affecte vraiment le cerveau hen. « Mais te gêne surtout pas mon pote. Il va penser quoi de tout ça Papa quand il va apprendre que t'as défoncé la gueule de quelqu'un pendant ta p'tite soirée de merdeux hen ? » Oh, il serait sûrement ravie d'apprendre que l'ex amant de son ex femme est mort (ou presque), mais sa putain de réputation est plus importante que son règlement de compte. Ils n'ont pas de couilles les bourgeois. Ils n'assument pas leur vraie nature. « Tu vas rien faire du tout. » Foutu trouillard. Un bon coup vers toi suffit à ce qu'il te lâche le poignet. « C'est moi qui gagne ce soir. » que tu ajoutes avec un sourire victorieux sur le visage. La guerre n'est toutefois pas encore terminée. Elle ne fait que commencer.