| (Anwar & Caelan) Freedom is nothing but a chance to be better |
| | (#)Mer 13 Avr 2022 - 22:22 | |
| Freedom is nothing but a chance to be better. -- @Anwar Zehri Si passer les derniers mois en prison avait appris quelque chose à Caelan, c’était de ne plus rien prendre pour acquis, surtout pas sa liberté. Il avait beau être de retour dans ses choses depuis quelques jours maintenant, il réalisait encore difficilement qu’il avait le droit de faire ce qu’il désirait quand il le voulait et il allait avoir besoin de temps pour retrouver ses repères, surtout maintenant qu’il n’y avait plus rien qui le motivait à sortir de son lit le matin parce qu’il devait repartir de zéro à presque quarante ans. Établi depuis longtemps, jamais il n’aurait cru qu’il se retrouverait un jour à devoir choisir un nouveau domaine professionnel et s’il avait eu le temps de réfléchir à ce qu’il souhaitait faire de sa vie professionnelle maintenant qu’il ne pouvait plus pratiquer son métier d’ingénieur, il n’avait toujours pas trouvé la réponse à cette question. Parce que son métier n’était pas qu’un gagne-pain à ses yeux, c’était aussi une passion et il ne voyait pas du tout dans quel autre domaine il pourrait s’épanouir autant, d’autant plus que son casier judiciaire le limitait maintenant dans sa recherche d’emploi qu’il n’avait pas encore eu le courage d’entreprendre. Pour le moment, Caelan passait la majeure partie de ses journées à dormir. Son expérience en prison avait été épuisante autant physiquement que mentalement et il avait besoin de prendre du temps pour lui pour se permettre de décompresser. Ce n’était pas qu’il n’était pas content de retrouver ses proches, au contraire, il avait d’ailleurs profité de ses premières journées de liberté pour renouer avec les membres de sa famille, mais il ne se sentait pas prêt à revoir tout le monde, à devoir faire semblant d’aller bien et de faire des blagues alors que le cœur n’y était pas. C’était pour cette raison qu’il n’avait pas répondu à bon nombre de messages qu’on lui avait envoyés, à l’exception de quelques-uns dont ceux d’Anwar qu’il rejoignait aujourd’hui à la marina. L’inspecteur était l’un de ceux avec qui il avait gardé contact tout le long de son incarcération et même s’il avait essayé de minimiser tout ce qu’il vivait à l’intérieur des murs de la prison chaque fois qu’ils s’étaient parlés au téléphone, il savait que son ami pouvait comprendre sa réalité étant donné le métier qu’il pratiquait.
Lorsque la voiture s’arrêta dans le stationnement du Manly Boat Harbour, Caelan tendit quelques billets au chauffeur de taxi. « Vous pouvez garder la monnaie. Merci. » dit-il en sortant du véhicule pour se diriger vers le petit trottoir à proximité sur lequel il s’arrêta quelques secondes pour humer l’air salin en fermant les yeux. Il reprit ensuite sa route et, cette fois-ci, c’est devant la porte grillagée qui donnait accès au quai de la marina qu’il s’arrêta brusquement en fixant la clôture de métal qui lui rappelait un peu trop celle qu’il avait longée ces derniers mois lors de ses sorties à l’extérieur. Sans doute surpris qu’il s’arrête en plein milieu du trottoir, un grand baraqué passa à côté de lui en percutant son épaule avec la sienne. Le cœur battant la chamade, Caelan instaura une distance sécuritaire entre l’inconnu qui le dévisageait et lui. « T’arrête pas en plein milieu, idiot, tu bloques le chemin. » Les épaules crispées, le brun bredouilla des excuses et il laissa l’homme s’éloigner avant de franchir à son tour la barrière en se massant la nuque d’une main. Comme ce n'était pas la première fois qu’il mettait les pieds ici, il n’eut aucune difficulté à localiser le voilier de son ami et il se dépêcha d’aller le rejoindre. « Hey Captain. » Il lui fit un petit signe de la main avant de le rejoindre sur le pont du bateau avec un sac contenant un tricorne. « J’espère que c’est dans tes goûts, depuis le temps que je t’ai dit que je t’en apporterais un. » Il s’agissait davantage d’une blague à l’époque, mais il espérait que son cadeau attirerait davantage l’attention du Zehri que les quelques marques toujours présentes sur son visage qu’il tentait de camoufler en gardant sa barbe plus longue qu’à son habitude. « Alma? » demanda-t-il en désignant d’un mouvement de tête la petite qui était installée près de son ami. « Il y a un petit quelque chose pour elle aussi dans le sac. » Un deuxième tricorne qui s’agençait à celui de son père. « Elle est tellement grande déjà. » constata-t-il en haussant les sourcils, les mains dans ses poches. Étant donné leur relation tendue des dernières années, Caelan ne l’avait encore jamais rencontrée et il était content aujourd’hui d’enfin pouvoir voir la petite autrement qu’en photo, même s’il aurait préféré être dans un meilleur état d’esprit pour leur rencontre. « Tu balades toujours des touristes? »
Dernière édition par Caelan Leckie le Dim 30 Juil 2023 - 17:23, édité 2 fois |
| | | | (#)Mer 3 Aoû 2022 - 7:57 | |
| I'm starting with the man in the mirror, I'm asking him to change his ways and no message could've been any clearer, if they wanna make the world a better place, take a look at yourself and then make a change. ☆☆ « Je suis pas cinglé. Et pas suicidaire non plus. »« Personne n’a dit que vous l’étiez. »« J’ai pas besoin de passer par le psy. »« Dans ce cas, ce ne sera qu’une formalité. [...] C’est la procédure, Zehri. »Puisqu’il le faut, semblait crier le soupir résigné poussé par Anwar en guise de réponse. « Et Zehri ? » Quoi encore ?« Un petit passage chez le coiffeur avant de reprendre ne serait pas de trop. Hm ? »« Moi qui me faisait une joie d’être assorti à ma nouvelle équipière. »T’es libre un soir de cette semaine ? J’vais avoir besoin d’un coach. Tel était le contenu du message que l’inspecteur en (re)devenir avait pianoté à l’intention d’Alexa quelques minutes seulement après avoir quitté le bureau du Grand Manitou, et signé les papiers relatifs à sa réintégration au service. Il n’était ni cinglé ni suicidaire – soit, mais il avait déjà eu affaire aux psys avec lesquels travaillait la police, et il ne pouvait pas se permettre le moindre mot qui serait compris de travers. L’examen de tir serait quant à lui une formalité, quand bien même le (futur-ex)-blond n’excluait pas d’aller tirer quelques cartouches avant pour se refaire la main, et s’assurer que les presque sept mois passés loin de son Glock 22 n’avaient pas drastiquement fait dégringoler son niveau. Mais le tir c’était un peu comme le vélo, pas vrai ? Pour quelqu’un qui n’avait (officiellement) plus de boulot depuis des mois, Anwar avait pourtant l’air diablement pressé ce midi-là, et avait autant que possible rasé les murs jusqu’au parking du commissariat afin de s’éviter d’avoir à échanger des politesses avec qui que ce soit ; Il aurait bien le temps de le faire à son retour officiel. À un quart d’heure de là, Lene attendait à la terrasse d’un café que le policier vienne récupérer leur fille pour aller prendre son service à la caserne de pompiers – s’il était en retard il aurait le droit à une scène, et il n’avait ni le temps ni l’énergie pour cela aujourd’hui. Mais Lene était de bonne humeur, chose qu’Anwar avait mieux compris à la seconde où elle lui avait indiqué qu’Alma s’était réveillée après six heures et demi du matin et n’avait (presque) pas rechigné au moment d’avaler sa purée de légumes du midi. Elle était de si bonne humeur qu’elle s’était même permis un « Est-ce que t’as déjà entendu parler du shampoing bleu ? » narquois en désignant sa tignasse, il est vrai, un peu sèche et jaunâtre, obtenant du concerné un grommellement à peine compréhensible et l’assurance de lui faire remettre sa casquette la seconde suivante. Une casquette qui, si elle aurait eu l’air aux yeux de n’importe qui d’avoir été piochée au hasard dans l’immense collection que possédait l’inspecteur lorsqu’il avait quitté son appartement ce matin-là, avait en réalité été soigneusement choisie : Arkham Asylum, pour accueillir un vieil ami sorti de taule ? Il n’y avait probablement que lui que cela ferait rire, mais on touchait là à l’essence de l’humour du policier. Car plus encore que son entrevue avec le Commissioner, c’était bien le fait de revoir Caelan qui occupait l’esprit d’Anwar au point qu’il ait eu du mal à trouver le sommeil – tant par hâte que par appréhension. Conscient que l’ordre des priorités de son ami aient été ailleurs à sa sortie la semaine précédente, il s’était contenté d’envoyer un message et de lui laisser l’espace dont il avait sans doute besoin, gageant que le Leckie reviendrait vers lui lorsqu’il se sentirait prêt. Il avait eu Norah au téléphone entre temps, et pris un verre avec Chris l’avant-veille, obtenant de chacun leur retour et leur ressenti sur ces retrouvailles familiales tant attendues, mais lorsqu’enfin il avait reçu un message de Caelan l’inspecteur s’était senti pris d’une vague d’appréhension qu’il n’était jusqu’à présent pas parvenue à éteindre complètement. L’un et l’autre savaient pourquoi Anwar s’était abstenu de toute visite à la prison, et au fond de lui le policier continuait de penser que cette décision était la meilleure, mais à n’avoir pas été présent là où tout le reste de l’entourage du blond s’était efforcé de l’être, il craignait que ne se soit creusé un fossé que plus rien ne permettrait de combler. Il y pensait encore, tandis qu’entourée entre les banquettes et la caisse de gilets de sauvetage, Alma jouait à l’ombre avec ses cubes et le xylophone offert par Talia en gazouillant, son petit gilet orange sur le dos. Sa fille avait le pied marin, c’était ce qu’Anwar se plaisait à répéter tant le clapotis des vagues semblait la bercer lorsque venait l’heure de la sieste, et bien qu’occupé à briquer le bastingage pour que ni le sel ni le calcaire ne l’empêchent plus de briller le brun gardait toujours un oeil attentif sur son petit bout de matelot. « Hey Captain. » lui que l’arrivée de Caelan avait gardé éveillé tard dans la nuit n’avait même pas entendu le Leckie arriver, et relevant la tête avec un brin de surprise il n’avait pas su choisir entre le sourire et l’étonnement, donnant à son visage un air difficile à décrypter. « J’espère que c’est dans tes goûts, depuis le temps que je t’ai dit que je t’en apporterais un. » Grimpant à bord, le vrai blond avait dégainé un tricorne qu’il avait tendu au faux blond, y arrachant une exclamation amusée avant qu’il ne s’en saisisse et troque aussitôt sa casquette pour ce nouveau couvre-chef. « T’as bien trouvé comment soudoyer un capitaine, grande perche. » L’hésitation n’avait duré qu’une seconde, peut-être deux, et finalement bien trop soulagé pour se contenir de revoir son ami en un seul morceau, Anwar avait bondi pour éliminer le dernier mètre qui les séparait et serré son ami dans ses bras – et si ses yeux brillaient un peu derrière le verre de ses lunettes de soleil, cela n'avait rien à voir, bien sûr. Mais le policier rattrapait là ce qu'il n'avait pas su – pas voulu – faire deux ans plus tôt, lorsque leurs premières retrouvailles teintées de rancœur s'étaient faites au chevet d'une Norah dont personne ne savait encore si elle se réveillerait. Deux années de perdues, à l'image d'une Alma qui, lasse de ne plus être le centre de l'attention de son père, avait jeté l'un de ses cubes dans leur sa direction pour l'obtenir à nouveau. « Alma ? » Surprise d'entendre ton prénom sortir de la bouche d'un inconnu, la fillette avait froncé les sourcils et observé Caelan en silence, Anwar enjambant la caisse lui empêchant d'aller gambader à sa guise sur le pont pour aller la hisser dans ses bras « Tu dis bonjour à tonton Caelan ? » Intimidée, elle avait préféré enfouir son visage contre la nuque de son père sans rien répondre, et secouant vaguement la tête le marin s'en était excusé « Elle a un peu de mal avec les inconnus. Mais je lui donne pas une demi-heure pour se retransformer en moulin à paroles, hm ? » Toujours silencieuse, Alma n'en avait pas moins suivi des yeux tandis que Caelan fouillait à nouveau dans son sac pour en ressortir un tricorne – le même, mais en plus petit. « Il y a un petit quelque chose pour elle aussi dans le sac. » Le père probablement plus émerveillé que la fille à l'idée qu'ils soient ainsi assortis, il avait ajusté le couvre-chef sur sa tête de (plus si) bébé et commenté d'un ton satisfait « Le capitaine et son matelot. » avant de reporter son regard sur Caelan. « Merci. T'étais pas obligé tu sais. » Comme tous les chapeaux, celui-ci avait quitté la tête d'Alma pour trouver sa bouche environ une seconde et demi plus tard, mais la poussant d'un « Tu dis merci ? Mer-ci. » encourageant il était parvenu à arracher un « Maci. » timide mais y ressemblant vaguement. « Elle est tellement grande déjà. » Déjà, oui. Si grande qu'Anwar en venait déjà à regretter l'époque où elle s'endormait sur son ventre dans le canapé en suçant le bout de son auriculaire. Fascinant comme la mémoire savait se montrer sélective, et conserver cela bien plus que les nuits entrecoupées de pleurs toutes les demi-heures donnant à ses parents l'impression de subir une privation de sommeil digne de détenus. Et en parlant de détenus : « Tu balades toujours des touristes ? » Reposant Alma dans l'espace clos où il la laissait gazouiller avec ses jouets, Anwar avait rétorqué d'un ton narquois « Je balade même des repris de justice, tu en as de la chance. » Faisant signe à son ami de surveiller un instant qu'Alma ne cherchait pas à s'échapper de sa forteresse improvisée, l'inspecteur avait disparu dans la cabine du bateau et en était remonté avec deux bières fraîches qu'il s'était empressé de décapsuler contre le bastingage avec habitude, avant d'en tendre une à Caelan. « Il est encore un peu tôt pour le rhum. » Ils joueraient aux vrais pirates une autre fois. Pour l'heure, et après avoir fait tinter sa bouteille contre celle de son ami, Anwar avait pris le temps de détailler un peu mieux ce dernier du regard : il avait maigri, et "oublier" de se raser ne suffisait pas à cacher entièrement la misère qui colorait sa peau à certains endroits. À ce sujet Anwar estimait ne pas avoir dit son dernier mot, mais ils verraient cela plus tard. « T'as clairement l'air d'avoir besoin de soleil. » avait-il préféré commenter avec une pointe de taquinerie, façon polie de faire remarquer qu'il n'avait pas l'air d'avoir beaucoup mis le nez dehors depuis sa sortie – aussi paradoxal cela puisse-t-il être. « Comment est-ce que tu vas ? Vraiment. » Enjambant l'une des banquettes pour s'y installer, il avait invité son ami à en faire autant, tandis qu'à leurs pieds Alma semblait décidée à empiler son tricorne par-dessus ses trois cubes ; Une entreprise réclamant toute sa concentration.
Dernière édition par Anwar Zehri le Mar 3 Jan 2023 - 18:40, édité 1 fois |
| | | | (#)Sam 3 Sep 2022 - 20:17 | |
| Freedom is nothing but a chance to be better. -- @Anwar Zehri « T’as bien trouvé comment soudoyer un capitaine, grande perche. » Il fallait bien qu’il ait appris quelque chose durant ses cinq mois de prison, même s’il était visiblement plus doué pour soudoyer Anwar que ses codétenus à en voir l’état actuel de sa figure et de ses côtes quelques semaines plus tôt. Pour être dans les bonnes grâces de ceux qui lui rendaient la vie dure à l’intérieur des murs, il aurait fallu qu’il fasse entre autres entrer de la drogue et il avait refusé. Caelan était conscient qu’ils n’allaient pas le laisser tranquille ainsi, mais il était hors de question qu’il reste ici plus longtemps que prévu s’il venait à se faire prendre la main dans le sac. « Je connais tes points faibles depuis le temps. » Il haussa les épaules en souriant légèrement à son tour. Malgré que sa vie n’eût rien de simple actuellement, il était content de retrouver son ami. Il fallait dire que le sourire de l’enquêteur lui avait bien manqué ces dernières années au milieu de leurs concours de celui qui replaçait le plus sa casquette pour cacher le malaise bien présent entre eux. « Je suis content de te voir. » dit-il en serrant le brun dans ses bras, ou en tout cas en entourant au moins sa tête étant donné les vingt-neuf centimètres qui les séparaient.
Au grand bonheur d’Anwar, ce n’était pas lui le plus petit aujourd’hui. Il avait intérêt à en profiter avant qu’elle ne le dépasse comme le faisait son frère. « Tu dis bonjour à tonton Caelan ? » Pour ne pas l’intimider, Caelan se contenta de lui faire un petit signe de la main en lui souriant timidement, mais il n’eut pas le succès escompté auprès de la fillette qui cacha son visage dans la nuque de son père. « Elle a un peu de mal avec les inconnus. Mais je lui donne pas une demi-heure pour se retransformer en moulin à paroles, hm ? » Caelan n’avait peut-être pas d’enfants à lui aujourd’hui, ce n’était pas du tout parce qu’il ne les aimait pas, au contraire. Il avait toujours eu cette certitude que Iris et lui en auraient, mais il avait repoussé le projet à cause de son travail, jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Aujourd’hui il regrettait d’avoir mal fixé ses priorités et il ne pouvait que se contenter des enfants des autres. D’ailleurs, il aurait dû être présent dans la vie d’Anwar et Alma et encore là, ses choix l’avaient amené ailleurs. Il ne pouvait que s’en vouloir d’avoir seulement le rôle d’inconnu auprès de la fillette alors qu’elle allait bientôt avoir deux ans. La crainte que sa simple présence engendrait n’était qu’un rappel de tout ce qu’il avait manqué ces dernières années. « Je comprends, c’est la première fois qu’elle me voit après tout. Je suis pas mal plus imposant que son père aussi. » Il ne savait même pas ce qu’elle aimait, à vrai dire, il ne savait rien d’elle. Il espérait que le cadeau qu’il avait aussi apporté pour Alma lui ferait gagner quelques points et qu’il réussissait à lui décrocher un sourire ou deux d’ici son départ. « Le capitaine et son matelot. Merci. T'étais pas obligé tu sais. » Il ne l’était effectivement pas, mais l’éloignement de ses proches ainsi que la prison lui avaient fait réaliser à quel point la vie ne tient qu’à un fil et que, du jour au lendemain, tout pouvait basculer. Même s’il était distant depuis sa sortie de prison parce qu’il devait retrouver ses marques, le désir de reprendre le temps perdu avec ses proches ne se faisait pas moins sentir. « Je sais, mais ça me fait vraiment plaisir et ce n’est pas grand-chose. » Ce n’était pas grand-chose à côté du soutien que lui avait offert Anwar ces derniers mois. « Tu dis merci ? Mer-ci. » « Maci. » Caelan sourit une fois de plus, satisfait que la fillette ait prononcé son premier mot depuis son arrivé. Il y avait encore du progrès à faire, mais c’était un début et il était conscient qu’il n’était pas à son meilleur actuellement et que ça ne devait pas aider la jeune femme à sortir de sa coquille.
Histoire de ne pas l’intimider en la fixant sans arrêt, il préféra prendre des nouvelles d’Anwar. « Je balade même des repris de justice, tu en as de la chance. » Il ricana un coup en détournant le regard pour surveiller Alma comme on lui avait demandé. Entre le livre, la casquette et maintenant le commentaire, Caelan pouvait compter sur Anwar pour lui rappeler où il avait passé les derniers mois s’il ne s’en souvenait plus. Ces rappels en faisaient au moins rire un d’eux et ce n’était pas le Leckie. « Ce n’est pas avec ça que tu dois faire beaucoup d’argent. » dit-il en haussant les sourcils, les mains dans ses poches. De son côté, il avait quand même un bon montant de côté puisqu’il était diplômé depuis un bon moment déjà et que la vente de la maison lui avait rapporté un montant d’argent, mais il était conscient que ce n’était pas la réalité de tous et que beaucoup d’entre eux avaient du mal à se trouver du travail en sortant de prison. C’était d’ailleurs son cas même s’il tentait de ne pas perdre espoir considérant qu’il était à peine sorti depuis une semaine. « Il est encore un peu tôt pour le rhum. » Il prit la bière que lui tendait le brun en le remerciant. « Tu connais mon faible pour la bière de toute manière, tu ne pouvais pas être plus dans le mille. » Il analysa l’étiquette de sa bouteille avant de la porter à ses lèvres pour en prendre une gorgée. « T'as clairement l'air d'avoir besoin de soleil. » Il était vrai qu’il n’avait pas beaucoup mis le nez dehors depuis sa libération et il mettait ça sur le dos du manque de sommeil en prison. « On n’a pas tous la chance d’avoir la peau basanée en permanence. » se défendit-il en lui adressant un petit clin d’œil. « Comment est-ce que tu vas ? Vraiment. » Ah cette fameuse question qu’on ne cessait de lui poser depuis sa sortie. Il pouvait difficilement mentir à ses proches qui voyaient bien à sa mine qu’il ne pétait pas le feu, mais il détestait se montrer vulnérable. Tout ce qu’il voulait, c’était aller mieux et mettre derrière lui cette épreuve difficile, mais il avait bien compris que ce ne serait pas aussi simple que ça. Caelan soupira bruyamment en faisant tourner le liquide dans sa bouteille. « Je ne pensais pas que ce serait si difficile de me trouver du travail… » Il revoyait Norah tentant de le rationaliser en lui disant qu’il venait à peine de sortir, mais c’était difficile à accepter alors que, auparavant, il pouvait dénicher du travail en claquant des doigts avec son assurance et ses compétences. « Je ne suis même pas assez bon pour faire la vaisselle au resto du coin. Après ils s’étonnent que les gars retournent dans la rue. » Et ça ce n’était que pour sa vie professionnelle. Il n’avait clairement pas la tête à la drague présentement, mais il avait fait une croix sur une vie amoureuse épanouie depuis sa sortie de prison. « C’est pas non plus en allant dans un bar en me présentant comme étant un ex-détenu que je vais rencontrer quelqu’un d’assez bien à présenter à mes parents. » De toute façon, ce n’était clairement pas une bonne idée de rencontrer quelqu’un alors qu’il avait des sentiments pour l’ex de son meilleur ami et que son ex-femme à lui n’était pas non plus bien loin dans ses pensées. « Presque quarante ans, célibataire, sans enfants et sans emploi, qu’est-ce que je pourrais demander de plus? Je mérite ce qui m’arrive. » Les lèvres pincées, il se tourna de dos à Anwar pour observer l’horizon. « T’as recommencé à travailler toi? Il s’est passé quoi? » Il n’avait jamais su pourquoi l’enquêteur s’était retrouvé en arrêt maladie et chaque raison pour ne pas parler de lui était bonne.
Dernière édition par Caelan Leckie le Sam 11 Fév 2023 - 17:49, édité 2 fois |
| | | | (#)Mar 3 Jan 2023 - 23:31 | |
| I'm starting with the man in the mirror, I'm asking him to change his ways and no message could've been any clearer, if they wanna make the world a better place, take a look at yourself and then make a change. ☆☆Toujours un peu avare en démonstrations d’affection lorsqu’il était question de quelqu’un d’autre que de ses enfants, Anwar ne s’était cependant pas fait prier pour attraper Caelan et le serrer dans ses bras comme s’il ne l’avait pas vu depuis des lustres – justement parce qu’il ne l’avait pas vu depuis des lustres. De quoi convaincre le principal intéressé que lui aussi était content de le revoir. Content et soulagé, comme l’avaient probablement été tous les Leckie depuis que le jumeau manquant avait été libéré de sa prison (au propre comme au figuré). Tant de mauvaises décisions avaient été prises de parts et d’autres, de la fuite de l’ingénieur sur cette route sinueuse à son exil canadien, au milieu duquel l’ego d’Anwar avait lui aussi joué des coudes, amenant à ce que ce jour-là l’un semble porter le poids du monde sur ses épaules, tandis qu’il posait pour la première fois les yeux sur le bébé de l’autre. Un bébé, Alma n’en était pourtant plus vraiment un, ou du moins avait-elle depuis longtemps déjà quitté l’état de nourrisson où Caelan aurait normalement dû la rencontrer ; Si les choses s’étaient passées autrement, si les circonstances avaient été différentes. Pour l’heure le bambin jouait les timides, et son père renvoyait un peu maladroitement au Leckie sa qualité d’inconnu aux yeux de sa progéniture. Beau joueur, ou tout simplement résigné, le principal intéressé avait secoué la tête et assuré « Je comprends, c’est la première fois qu’elle me voit après tout. Je suis pas mal plus imposant que son père aussi. » d’un ton prudent, et la vague pique lancée au sujet de sa taille arrachant néanmoins à Anwar un sourire amusé, ce dernier avait répondu « Merci de reconnaître le fait que j’ai maigri, Maze prétend que je vis dans le déni. » sur le ton de la plaisanterie. Et pour cause, la balance était du même avis que Maze : il était probablement temps qu’Anwar reprenne le boulot et retrouve le chemin de la salle de sport du commissariat, les litres de bière qu’il s’enfilait dès que son bateau retrouvait la Marina commençant à laisser des traces. Le cadeau apporté par Caelan avait en tout cas fait son effet, au moins auprès d’Anwar à qui il ne manquait désormais plus que la jambe de bois, pour aller avec le tricorne et le perroquet insolent. Alma quant à elle se contentait de traiter le couvre-chef de la même manière que les casquettes que collectionnait son père : avec curiosité, et probablement dix secondes et demie avant qu’il ne termine dans sa bouche et couvert de bave. « Je sais, mais ça me fait vraiment plaisir et ce n’est pas grand-chose. » avait de son côté assuré le Leckie, pas obligé mais au moins désireux de ne pas arriver les mains vides, et arrachant comme une minuscule première victoire un « Maci. » timide au bébé. Ceci étant dit, la petite fille avait retrouvé sa place dans le puit formé par les banquettes pour libérer les bras de son géniteur, et ce dernier n’obtenant pas le sourire escompté en tentant de dédramatiser la situation actuelle de Caelan, le « Ce n’est pas avec ça que tu dois faire beaucoup d’argent. » obtenu en échange lui paraissant au mieux circonspect, il avait proposé à boire en bénissant le frigo de sa cabine de n’être jamais vide. « Tu connais mon faible pour la bière de toute manière, tu ne pouvais pas être plus dans le mille. » Là-dessus au moins, Anwar ne commettait pas d’impair. « Cheers. » Et malgré cela, il ne lui avait pas fallu longtemps pour faire remarquer à son ami qu’il n’avait pas bonne mine ; Il était à deux doigts de lui proposer une virée en mer juste pour que la réverbération de l’eau ne colore un peu son teint grisâtre. « On n’a pas tous la chance d’avoir la peau basanée en permanence. » Souriant d’un air narquois en avalant sa gorgée de bière, le brun avait haussé les épaules en faisant mine de prendre un air détaché « Faut bien que j’ai quelque chose qui compense ma taille de jockey. » Ou disons plutôt de pilote de chasse – il aurait fait un trop grand jockey. Toutes les plaisanteries du monde n’auraient néanmoins pas pu éloigner indéfiniment l’éléphant au milieu de la pièce, et quand bien même le brun n’avait que peu d’espoir d’obtenir une réponse sincère, il avait tout de même posé sa question. Il n’avait pas besoin de demander à Caelan s’il allait bien, il avait envie de savoir comment il allait : un choix de mot qui n’avait rien de hasardeux. « Je ne pensais pas que ce serait si difficile de me trouver du travail … » avait fini par admettre le Leckie après quelques secondes d’hésitation, et sans laisser à son ami le temps du moindre commentaire il avait enchaîné : « Je ne suis même pas assez bon pour faire la vaisselle au resto du coin. Après ils s’étonnent que les gars retournent dans la rue. » Douloureux, mais réel. « C’est pas non plus en allant dans un bar en me présentant comme étant un ex-détenu que je vais rencontrer quelqu’un d’assez bien à présenter à mes parents. » Pointant le bout de sa canette dans la direction de l’ingénieur d’un geste résolu, Anwar avait aussitôt fait remarquer « C’est sûr que si tu te présentes de cette façon … T’as jamais été très doué pour draguer, mais là va vraiment falloir reprendre les bases mon vieux. » S’il avait voulu tester sa chance, le brun se serait même risqué à demander d’un ton narquois comment il était parvenu à faire chavirer Iris – mais mentionner l’ex-femme de son ami n’était assurément pas une idée judicieuse. « T’es pas juste un ex-détenu. T’as toujours un diplôme, t’as toujours des qualités et ta gueule d’ange … T’as seulement besoin de remettre la machine en route. » Un conseil qui, aux yeux d’Anwar, valait autant pour sa recherche de travail que pour rencontrer quelqu’un “d’assez bien pour présenter à ses parents”. « Et pour ce qui est du boulot, j’peux filer ton nom à une amie. Elle est conseillère d’insertion, elle pourra peut-être t’aider. » Il y avait pensé bien avant cette conversation en réalité, mais n’avait pas souhaité couper l’herbe sous le pied de Caelan. Il en devrait une à Yara mais enfin, ce serait pour tous les services qu’il avait lui-même rendu. Maussade, Caelan semblait malgré tout avoir du mal à se montrer optimiste, et tournant le dos au marin pour observer la baie et l’horizon, il avait marmonné en soupirant « Presque quarante ans, célibataire, sans enfants et sans emploi, qu’est-ce que je pourrais demander de plus? Je mérite ce qui m’arrive. » laissant son ami bras ballants et un peu démuni. Maintenant était l’un de ces nombreux moments où il aurait aimé que Frank soit encore là : il aurait su trouver les mots justes, et même probablement une solution. Au lieu de cela, le brun s’était contenté de murmurer « Dis pas n’importe quoi. » et après quelques secondes d’hésitation, il s’était rapproché de Caelan et avait posé ses coudes contre le bastingage en fixant à son tour la ligne d’horizon, une oreille néanmoins toujours attentive aux babillages de sa progéniture. « T’as recommencé à travailler toi ? Il s’est passé quoi ? » Retour à l’envoyeur de la question qui fâchait : c’était de bonne guerre. Secouant la tête à la négative, il avait répondu « Pas encore. À la fin du mois, j’dois repasser certains tests d’aptitudes, le taulier fait du zèle. » d’un ton évasif, mais pourtant menti avec aplomb au moment d’ajouter « Et rien, j’avais juste besoin de faire une pause … Vois ça comme une crise de la quarantaine. Tu verras quand t’auras mon âge. » en ponctuant sa réponse d’une énième plaisanterie comme pour mieux faire passer la pilule. Après quelques secondes, cependant, il avait adopté un air plus pensif et ajouté dans un souffle « Ce boulot me rend cynique. Parfois je sais pas si c’est une bonne chose. » Ce n’était assurément pas l’adjectif par lequel il espérait que ses enfants le qualifieraient plus tard, lorsqu’ils parleraient de lui à leurs propres enfants.
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| | | | (#)Sam 11 Fév 2023 - 19:35 | |
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« Merci de reconnaître le fait que j’ai maigri, Maze prétend que je vis dans le déni. » Si Anwar était dans le déni de son tour de taille qui augmentait presque à vue d’œil, il l’était aussi toujours autant à propos de la différence de taille qu’il y avait entre le Leckie et lui. Si l’un avait la forme d’une asperge, l’autre se rapprochait de plus en plus de celle d’un chou de Bruxelles, le goût amer en bouche en moins maintenant que le premier avait pris ses responsabilités en allant se dénoncer. Un petit sourire en coin, l’ex-ingénieur tendit un bras en direction de son ami pour lui pincer gentiment la taille. « Il y a peut-être un peu de déni quand même. » Pas qu’il était dans ses habitudes de calculer la masse graisseuse de son ami, mais il suffisait de le regarder pour voir qu’il avait moins de masse musculaire que la dernière fois qu’il l’avait vu. Malgré ses taquineries, Caelan ne le jugeait pas réellement, conscient que l’inspecteur traversait peut-être une période difficile lui aussi pour qu’il soit en arrêt de travail. Il pouvait comprendre qu’il n’ait pas autant la tête à surveiller son tour de taille si tel était le cas et il pourrait certainement se reprendre lorsque ça irait mieux. « Tu te magasines une promotion? » Il ne connaissait pas grand-chose de leur réalité, d’autant plus qu’il était loin d’être un grand cinéphile, mais dans les films, les haut-gradés étaient rarement les plus en forme. « Si tu continues, tu vas faire compétition à Marcus, on voit le début d’une petite brioche juste là. » Une fois de plus, il pinça gentiment le ventre de son ami en souriant. Après toutes ces années, il espérait sincèrement que son ainé réussirait à mettre de côté le ressentiment qu’il pouvait ressentir à l’égard d’Anwar qui n’avait absolument rien à se reprocher. En attendant, il ne pouvait que se contenter de les taquiner en parlant de l’un à l’autre pour les faire grogner volontairement. « Cheers. » Si Caelan n’avait pas spécialement le cœur à la rigolade en prenant la direction du port, il se surprit à sourire en levant sa bière à l’attention du brun. « Cheers. » Les deux avaient visiblement besoin d’encouragements et d’un peu de positif dans leur vie, ce qu’il leur souhaitait même s’il voyait son verre à moitié vide et non à moitié plein. « Faut bien que j’ai quelque chose qui compense ma taille de jockey. » Alors qu’il s’apprêtait à prendre une gorgée de sa bière, Caelan arrêta son mouvement et il désigna son interlocuteur avec le goulot de sa bière. « C’est bien, on commence à voir un peu d’acceptation plutôt que du déni. » le taquina-t-il une fois de plus avant qu’ils troquent les plaisanteries pour les sujets qui fâchaient.
Il gardait assurément certains détails sur son état psychologique pour lui, détestant depuis toujours montrer sa vulnérabilité aux autres, mais il décida tout de même de s’ouvrir à l’inspecteur en lui faisant part des difficultés qu’il rencontrait depuis sa sortie de prison une semaine plus tôt. Il acceptait encore difficilement tout ce qu’il avait perdu et qu’il ne retrouverait certainement jamais maintenant qu’un casier judiciaire le suivait partout où il allait. Il devait faire avec ses mauvais choix et se rebâtir une nouvelle vie en acceptant qu’elle ne serait plus jamais comme celle qu’il avait avant. « C’est sûr que si tu te présentes de cette façon … T’as jamais été très doué pour draguer, mais là va vraiment falloir reprendre les bases mon vieux. » Il leva les yeux au ciel, pas du tout d’accord avec lui. Cette fois-ci, c’était peut-être lui qui faisait preuve de déni car il était vrai qu’il avait toujours fait preuve d’un peu de maladresse avec les femmes. Ça ne lui avait apparemment pas trop nuit, cependant, considérant qu’il n’avait jamais été célibataire très longtemps avec sa séparation avec Iris. Il n’y avait eu que quelques mois tout au plus entre sa relation entre Sofiya et Elizabeth, puis Elizabeth et Iris. Depuis son adolescence, c’était la première fois qu’il était seul depuis aussi longtemps et ce n’était pas facile pour l’homme qui fuyait la solitude comme la peste. Enfin… jusqu’à aujourd’hui. « Et c’est toi qui vas me les enseigner c’est ça? » demanda-t-il sans l’ombre d’un sourire malgré la pique derrière sa question. Disons simplement que Zehri ne semblait pas être un exemple à suivre dans le domaine non plus. « T’es pas juste un ex-détenu. T’as toujours un diplôme, t’as toujours des qualités et ta gueule d’ange … T’as seulement besoin de remettre la machine en route. » Il ricana un coup en détournant le regard. « Un diplôme qui ne me sert plus à rien, soyons honnêtes. » Ce bout de papier en poche n’impressionnerait personne s’il passait ses journées à faire cuire des frites chez McDonald. Ça ne ferait que piquer la curiosité des gens à savoir pourquoi il avait fait un 190 degrés au niveau professionnel et il pouvait sans difficulté imaginer la réaction de son interlocutrice lorsqu’elle apprendrait qu’il était loin d’être ce qu’elle s’était imaginée. « Peut-être que je devrais me prendre un chat. Ce n’est pas ce que les gens font maintenant? » Une version masculine de la crazy cat lady. « Et pour ce qui est du boulot, j’peux filer ton nom à une amie. Elle est conseillère d’insertion, elle pourra peut-être t’aider. » L’air pensif, il finit par hausser une épaule. « Je vais y penser. Je te ferai signe si jamais j’en ai besoin. » Ça ne faisait qu’une semaine qu’il était libre, il ressentait pour le moment le besoin de se débrouiller seul, de se sortir de cette situation par lui-même comme un grand garçon.
Sa vie professionnelle n’était pas le seul pan de sa vie dans lequel il rencontrait des obstacles. Jusqu’à ce qu’il commette un délit de fuite, il était fier d’où il était rendu, de ce qu’il avait accompli, mais maintenant il se rendait compte que ses priorités n’avaient peut-être pas été à la bonne place et qu’il lui manquait plusieurs choses importantes pour qu’il soit heureux. Il ne rajeunissait pas et il réalisait à quel point le temps allait commencer à lui manquer s’il ne se dépêchait pas, un stress dont il se serait passé. « Dis pas n’importe quoi. » Ce n’était pas n’importe quoi, c’était ce qu’il pensait sérieusement, comme si la vie le punissait à sa façon pour ce qu’il avait fait (ou pas fait). « Désolé de plomber l’ambiance… » Il rit, mal à l’aise, avant de changer rapidement de sujet pour changer le mal de place. « Pas encore. À la fin du mois, j’dois repasser certains tests d’aptitudes, le taulier fait du zèle. » Ce n’était visiblement pas en entretenant ses poignées d’amour qu’il allait être en forme pour ces tests. « Des tests physiques? Ou genre… d’arme à feu? » Qu’est-ce qu’il y connaissait? La mention de ces tests piquait sa curiosité, cependant, puisqu’il n’avait pas l’impression que tous les employés du poste devaient repasser ces fameux tests en ce moment. Il devait y avoir une raison pour que Zehri doive les repasser, mais il sentait qu’il s’agissait peut-être d’un terrain glissant. « Et rien, j’avais juste besoin de faire une pause … Vois ça comme une crise de la quarantaine. Tu verras quand t’auras mon âge. » Malheureusement, il le voyait déjà, mais malgré lui. Il avait encore quelques années devant lui avant d’atteindre la quarantaine, mais sa vie n’avait déjà plus rien à voir avec ce qu’elle était un an plus tôt. Cette pause, il s’en serait bien passé. « Et… tous les employés qui prennent une pause doivent repasser des tests avant de pouvoir retourner au travail? » demanda-t-il en fronçant les sourcils sans trop se faire d’attentes à ce que son ami lui explique les réelles raisons de son arrêt de travail. Ou peut-être s’en faisait-il pour rien, devenu suspicieux sur tout depuis son incarcération… « Ce boulot me rend cynique. Parfois je sais pas si c’est une bonne chose. » « Ton boulot a le dos large, t’as toujours été comme ça. T’es encore dans le déni. » Caelan se dépêcha de s’éloigner pour se protéger d’un éventuel coup que pourrait lui donner l’homme à côté de lui. « T’as déjà pensé faire autre chose? »
Dernière édition par Caelan Leckie le Sam 8 Avr 2023 - 17:40, édité 1 fois |
| | | | (#)Jeu 23 Fév 2023 - 19:20 | |
| I'm starting with the man in the mirror, I'm asking him to change his ways and no message could've been any clearer, if they wanna make the world a better place, take a look at yourself and then make a change. ☆☆La taquinerie ne venait plus avec la même facilité qu’avant pour les deux amis, mais l’un et l’autre essayaient sincèrement d’y mettre du leur pour tenter de redonner un peu de la fluidité qu’avait un temps eu leur relation. C’était un peu comme remonter sur un vélo après vingt ans sans avoir tenu un guidon : on se rappelait tout de suite comment pédaler, mais il fallait retrouver un peu d’assurance et de confiance avant d’avancer sans les mains ou de tenter de nouveau une roue arrière en frimant. Ils en étaient là, tous les deux, tendant des perches un peu maladroitement, mais avec la satisfaction de voir l’autre s’en saisir avec une maladresse équivalente, et la même dose de bonne volonté. Il fallait au moins cela pour qu’Anwar ne se soit pas mis à couiner comme un putois lorsque son ami était venu pincer la couche de gras qui revenait s’accrocher à ses hanches dès qu’il osait déséquilibrer la balance entre le sport et la bière « Il y a peut-être un peu de déni quand même. » Oh, si peu. « Tu te magasines une promotion ? Si tu continues, tu vas faire compétition à Marcus, on voit le début d’une petite brioche juste là. » Plus offusqué par la comparaison avec l’aîné des Leckie que par la mention de la brioche bel et bien existante, il avait marmonné un « C’est pas ça qui peut m’empêcher de te botter les fesses, l’asperge. » à demi-menaçant, la chose bientôt balayée par le tintement des deux bières qu’il avait fait tinter l’une contre l’autre comme s’il s’était agi de celle bien méritée d’une journée éreintante (mais Anwar vous dirait qu’être le père d’un gremlin de deux ans rendait toutes les journées éreintantes). Quant à sa taille supposée de jockey, il avait depuis longtemps fait la paix avec l’idée que Talia autant que Caelan seraient les premiers à voir son crâne se dégarnir lorsque ce jour viendrait. « C’est bien, on commence à voir un peu d’acceptation plutôt que du déni. » Un peu, voilà. Et si Anwar se débattait avec le déni, c’était un autre mauvais génie avec lequel tentait de composer le Leckie : le pessimisme. A commencer par ce qui concernait ses relations amoureuses, qu’il imaginait déjà damnées pour l’éternité par la faute de ses derniers déboires en date. Et s’il ne niais pas que cela puisse être une difficulté supplémentaire à surmonter, Anwar y voyait surtout une excuse facile : si le casier judiciaire vierge était un critère universel, les prisons seraient remplies de célibataires … Hors ce n’était pas le cas, du tout. « Et c’est toi qui vas me les enseigner c’est ça ? » n’avait néanmoins pas manqué d’ironiser le concerné lorsque le brun avait suggéré le fait de revenir aux bases, s’il espérait parvenir à draguer qui que ce soit. Du même ton, et peut-être un peu plus pincé qu’il ne l’aurait dû sur la question, le policier avait rétorqué du même ton « T’es peut-être le premier de nous deux à avoir divorcé, mais c’est pas moi qui ait fait vœu de chasteté depuis ma séparation. » et dressé une liste des atouts de Caelan que ses derniers mois d’incarcération ne suffisaient pas à lui avoir retirés. Borné, le gaillard s’était pourtant contenté de maugréer en réponse « Un diplôme qui ne me sert plus à rien, soyons honnêtes. » et arracher un soupir un peu las. « Peut-être que je devrais me prendre un chat. Ce n’est pas ce que les gens font maintenant ? » Soit, Caelan avait décidé de se morfondre en se cherchant des excuses … Et l’histoire avait déjà prouvé qu’Anwar n’était pas celui vers qui il se tournait en premier choix pour chercher des solutions. Tout au mieux pouvait-il proposer de donner son nom à quelqu’un dont la réinsertion était le métier, mais à dire vrai il proposait sans grand espoir que le Leckie saisisse l’opportunité, et lorsque le concerné avait répondu « Je vais y penser. Je te ferai signe si jamais j’en ai besoin. » l’inspecteur s’était contenté de hocher la tête sans insister plus lourdement. Son ami était un grand garçon, après tout. La vérité, c’est qu’Anwar avait déjà bien assez à faire avec les doutes concernant sa propre vie, tant professionnelle que personnelle, et que même lorsque Caelan effectuait un constat pessimiste de sa propre situation, le brun y trouvait une certaine résonance. Leur situation n’était pas reluisante, mais elle ne pouvait pas être si désespérée ? « Désolé de plomber l’ambiance … » Balayant la chose d’un revers de la main, l’inspecteur avait pris une gorgée de sa bière et répondu du bout des lèvres aux questions du Leckie sur son propre emploi – ou plutôt sur le fait qu’il s’en soit dernièrement tenu éloigné, et doive désormais à nouveau montrer patte blanche pour y retourner. « Des tests physiques ? Ou genre … d’arme à feu ? » Entre autres, disait le hochement de tête la latéral du brun en guise de réponse. « Et … tous les employés qui prennent une pause doivent repasser des tests avant de pouvoir retourner au travail ? » La vérité ? Anwar n’en avait aucune idée, car ce n’était pas le genre de choses dont on entendait ses collègues se vanter à leur retour si tel était le cas. « Le taulier dit que c’est la procédure, alors c’est que ça doit être le cas. » avait-il finalement répondu en haussant les épaules, pas spécialement ravi à cette idée mais néanmoins conscient qu’il n’était pas en position de négocier. « Au moins c’est la preuve qu’on file pas une arme à n’importe qui sans vérif, c’est plutôt une bonne chose. » Et si l’idée de devoir refaire ses preuves comme le dernier des bleus l’agaçait un peu, l’inspecteur ne se faisait pas d'inquiétude quant à ses capacités – il était plutôt bon tireur. Le passage chez le psy, lui, le chiffonnait un peu plus, mais pour des raisons qu’il n’avait pas forcément envie de détailler ce jour-là, et marquant une pause il s’était contenté de mentionner la tendance au cynisme qu’il avait assurément acquise au cours de ces dernières dix-huit années de service. « Ton boulot a le dos large, t’as toujours été comme ça. T’es encore dans le déni. » Conscient que la remarque n’était là que pour le taquiner, Anwar avait esquissé un semblant de sourire et effectué un demi-tour pour s’adosser à la balustrade, son regard allant de nouveau se poser sur Alma en se demandant combien de temps encore avant qu’elle ne se lasse de ses jouets et ne redemande toute son attention. « T’as déjà pensé faire autre chose ? » Oui. Non. Il ne savait plus vraiment. « Comme quoi, baladeur de touristes ? Ça fait que six mois et je tourne déjà en rond, clairement ça a ses limites. » Son congé sabbatique lui aurait au moins servi à vérifier cette théorie : il adorait naviguer, mais en partie parce que cela lui permettait de s’échapper du reste. Si cela devenait son métier, cela risquait aussi de devenir une corvée plus qu’un plaisir, et il n’en avait pas envie. « Tu sais ce que m’a dit Frank, un jour où Norah et lui s’étaient disputés à cause de notre boulot ? Que le vrai flic, c’est celui qui ne saurait pas être autre chose que ça. » Mais Frank avait payé cette certitude de sa vie, alors avait-il réellement raison ? « Je sais pas, c’est un peu comme toi … Je m’imagine pas vraiment faire autre chose. » Il ne se pensait pas non plus capable d’autre chose en réalité, il doutait qu’un autre métier ne lui donne autant l’impression d’être utile. Et Anwar avait besoin de se sentir utile, au moins dans son travail.
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| | | | (#)Sam 8 Avr 2023 - 18:57 | |
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Anwar et Caelan n’étaient pas au top de leur forme physique depuis quelques mois, il n’y avait aucun doute là-dessus. Traversant une passe moins évidente, ils avaient tous les deux négligé de s’entrainer, sans parler de leur consommation d’alcool qui semblait avoir augmenté. Heureusement pour eux, il n’était pas encore trop tard pour renverser la vapeur, bien que la tâche risque d’être de moins en moins évidente à mesure qu’ils vieillissent avec leur métabolisme plus lent. Si certains détenus passaient le temps en détention à gonfler leurs biceps, ce n’était pas le cas de Caelan qui, au contraire, avait vu sa masse musculaire fondre. Depuis sa sortie, il n’avait pas retrouvé la motivation de retourner courir tout comme de renouveler son abonnement au gym. Il avait encore le temps, il n’était pas sorti depuis très longtemps après tout. Pour le moment, sa recherche d’emploi infructueuse lui grugeait toute son énergie. « C’est pas ça qui peut m’empêcher de te botter les fesses, l’asperge. » Ses muscles en moins, Caelan avait de plus en plus la forme d’une asperge, le surnom lui allait encore davantage comme un gant. Malgré ça, son esprit de compétition n’avait pas disparu cependant. « Tu peux toujours essayer le minus, je ne donne pas cher de ta peau. » À défaut d’avoir encore du cardio, il avait de longues jambes qui lui permettraient de prendre de l’avance en faisant de grandes enjambées. Jusqu’à ce que son manque de cardio l’oblige à s’arrêter, suant comme un porc. Il avait tout intérêt à se remettre en forme, pour son bien-être physique, mais aussi pour son estime avant de se remettre sur le marché. « T’es peut-être le premier de nous deux à avoir divorcé, mais c’est pas moi qui ait fait vœu de chasteté depuis ma séparation. » Les yeux plissés, il ricana quelques secondes en observant Anwar. « Je n’ai pas fait vœu de chasteté… » Il n’avait simplement pas envie d’aller dans un bar et de repartir avec la première venue et il n’avait rencontré personne qui lui donnait envie de s’investir depuis Iris. Ses portes n’étaient pas complètement fermées, il y avait bien eu Maggie avec qui il s’était passé quelque chose, mais il était séparé depuis quelques mois à peine et il n’était pas prêt à s’engager à l’époque. Il n’était pas fier de lui avoir fait de la peine alors qu’elle espérait plus que ce qu’il était prêt à lui donner. « Et te concernant, je vois ça. » dit-il en posant son regard sur Alma qui était bien la preuve que son père ne passait pas tout son temps à jouer de la batterie ou à balader des touristes.
Bien qu’il n’ait jamais été inspecteur, Caelan savait qu’il s’agissait d’un métier prenant. Selon les cas sur lesquels ils travaillaient, les inspecteurs ne devaient jamais vraiment décompresser à la maison, incapables de se vider la tête et de ne pas penser au travail. Il s’agissait d’une vocation et non pas d’un simple métier que n’importe qui pouvait faire. Après toutes ces années, en plus de la perte de son coéquipier, Anwar méritait d’être en congé pour pouvoir décompresser, même si Caelan sentait qu’il ne s’agissait pas de simples vacances. Reprendre ses fonctions semblait compliqué. « Le taulier dit que c’est la procédure, alors c’est que ça doit être le cas. » Caelan se contenta d’hocher la tête, l’oreille attentive. « Au moins c’est la preuve qu’on file pas une arme à n’importe qui sans vérif, c’est plutôt une bonne chose. » Il acquiesça avec vigueur, il valait mieux être plus prudent considérant que les policiers avaient une arme sur eux. Leur métier les amenait à être témoins de scènes difficiles et un drame pouvait si vite arriver en état de stress post-traumatique. « En effet. C’est chiant pour ceux qui vont bien j’imagine, mais si ça peut éviter qu’un évènement malheureux se produise… je n’ai pas de mal à imaginer que ça doit être un domaine où beaucoup ne demandent pas d’aide quand ils en ont besoin. » Parce qu’il s’agissait d’un domaine majoritairement masculin et que les hommes ont particulièrement de la difficulté à demander de l’aide, sans parler de l’esprit de compétition probablement fort dans cet environnement, ce qui ne devait pas aider les employés à laisser paraître leur vulnérabilité. C’était beaucoup plus facile de prétendre que tout va bien. Caelan pouvait comprendre cet aspect puisqu’il avait lui-même de la difficulté à se confier quand il n’allait pas bien et ça c’était sans les images difficiles que les policiers gardaient en tête probablement toute leur vie. Jamais il ne serait capable de faire ce métier et il se demandait si Anwar avait déjà songé à faire autre chose. « Comme quoi, baladeur de touristes ? Ça fait que six mois et je tourne déjà en rond, clairement ça a ses limites. » Ça ou autre chose. « Au moins tu as pu le tester sans complètement quitter ton boulot, tu sais à quoi t’en tenir maintenant. » Il avait encore le pied dans la porte du poste de police, il était toujours possible d’y retourner s’il le souhaitait. « Tu sais ce que m’a dit Frank, un jour où Norah et lui s’étaient disputés à cause de notre boulot ? Que le vrai flic, c’est celui qui ne saurait pas être autre chose que ça. Je sais pas, c’est un peu comme toi … Je m’imagine pas vraiment faire autre chose. » Caelan pinça les lèvres en hochant la tête. Anwar avait encore la possibilité de retourner pratiquer le métier qu’il aimait au moins. « Il avait raison, ce n’est pas un métier comme un autre que n’importe qui peut faire. » Les policiers risquaient leur vie en permanence et ça les deux hommes étaient bien placés pour le savoir alors que Frank était décédé en service. Il y avait peu de risques que Caelan se tue à son travail, à moins de tomber sur un chantier qui ne respectait pas les mesures de sécurité. « Après avoir passé tes tests, ça prend combien de temps pour avoir tes résultats? Tu vas pouvoir recommencer rapidement? » demanda-t-il avec curiosité. « C’est pour savoir pour combien de temps encore je peux abuser de ton voilier… » ajouta-t-il avec un léger sourire en coin. Parce que même si sortir lui demandait beaucoup d’énergie en ce moment, il devait bien avouer que l’endroit avait quelque chose d’apaisant qui lui faisait du bien. Ou peut-être était-ce la présence d’Anwar qui lui avait beaucoup manqué ces dernières années. |
| | | | (#)Sam 17 Juin 2023 - 20:33 | |
| I'm starting with the man in the mirror, I'm asking him to change his ways and no message could've been any clearer, if they wanna make the world a better place, take a look at yourself and then make a change. ☆☆Anwar ne s’était jamais illustré par son romantisme, et même la notion de fidélité prenait une dimension toute relative dans le couple qu’il avait longtemps formé avec Riley, l’un ne fermant les yeux sur les écarts de l’autre que parce qu’il n’était pas plus innocent en la matière. Il n’avait même jamais été amoureux, Anwar, ou du moins en avait-il l’impression lorsqu’il se comparait à Frank et Norah, à Talia et son beau-frère, et même à Caelan et Iris du temps où le couple vivait encore un bonheur sans nuages – ils avaient tous l’air si heureux, si certains de l’évidence de leur relation et de leurs sentiments, sans jamais que l’amertume et les non-dits ne viennent gâcher la fête comme pour Riley et lui. Parfois le brun s’en attristait un peu, jalousait l’idée de rentrer chez lui le soir pour retrouver quelqu’un qui aurait autant hâte que lui de le revoir, et contre qui se blottir pour trouver le sommeil ; Mais la majorité du temps il se contentait de faire avec l’idée qu’il n’était simplement pas fait pour cette vie-là, cherchait seulement après ce qui lui permettait de combler solitude éphémère et besoins primaires. Était-ce ce qu'il conseillait à Caelan ? Sans doute que non, mais ce n'était pas en tournant comme un lion en cage dans son appartement et en se morfondant sur son sort de divorcé qu'il tournerait la page sur Iris. « Je n’ai pas fait vœu de chasteté … » s'en était en tout cas mollement défendu le concerné, n'obtenant d'Anwar qu'un regard dubitatif en guise de réponse et ajoutant « Et te concernant, je vois ça. » au moment où le "ça" en question entreprenait de jeter un par un ses cubes par-dessus la banquette où elle était piégée. « T'es peut-être pas forcé d'aller aussi loin. » Sauf s'il avait envie de jouer à la roulette russe quant au caractère de la personne avec qui il devrait prendre des décisions relatives à la survie d'un autre être humain durant les dix-huit (au moins) prochaines années. Lene n'était pas si terrible, mais elle n'était pas tous les jours un cadeau non plus. Et ces six mois passés loin du poste de police et de ce qui s’y tramait, ils auraient peut-être eu une autre saveur s’il ne s’était pas senti aussi seul, et s’il n’avait pas ressenti le besoin de fuir son appartement à la moindre occasion lorsqu’Alma n’était pas sous sa garde – tout pour ne pas avoir à affronter trop souvent et trop difficilement le regard de Maze, sans le savoir passée maîtresse dans l’art de le faire se sentir insignifiant. Pour cela aussi, il avait besoin de reprendre le chemin du travail, et de se replonger dans d'autres problèmes que les siens … Ne restait plus qu'à cocher toutes les cases nécessaires à sa réintégration, port d'arme en tête de liste. « En effet. C’est chiant pour ceux qui vont bien j’imagine, mais si ça peut éviter qu’un événement malheureux se produise … je n’ai pas de mal à imaginer que ça doit être un domaine où beaucoup ne demandent pas d’aide quand ils en ont besoin. » Et Caelan imaginait bien – Anwar, pour sa part, se contentait d'entretenir le cliché et de traîner les pieds à la seule idée de devoir reprendre rendez-vous avec le psy du service. Il aurait pourtant été le premier à pousser un collègue à y avoir recours si cela semblait nécessaire, mais les cordonniers étaient toujours les plus mal chaussés, dit-on. « C'est qu'une formalité, de toute façon. C'est pas la première fois que j'dois en repasser par là. » Il s'en était tenu à cela et n'avait pas élaboré plus loin … Mais nul besoin de creuser très loin pour comprendre qu'il faisait référence à la période ayant suivi la mort de Frank. Difficile de dire qui de lui-même ou des autres sa hiérarchie avait tenté de protéger en lui retirant à la fois son arme de service et ses accès à l'armurerie du poste, à l'époque – dans un cas comme dans l'autre, il s'était agi d'éviter qu'un second drame ne suive le premier. Déjà, que ce qui était arrivé à Frank n’ait pas persuadé l’inspecteur de raccrocher définitivement l’uniforme était une preuve que rien ne saurait le détourner éternellement de ce qui au fil des années s’était vite transformé en vocation. Anwar s’était cherché toute son enfance, toute son adolescence, coincé entre la sensation d’être trop redevable envers son oncle et sa tante de l’avoir recueilli pour pouvoir se permettre d’être et de devenir n’importe quoi, et les ambitions de Riley l’ayant forcé à revoir les siennes à la baisse pour que le poids de leurs décisions ne se répercute pas (trop) sur leur fils. La police c’était un coup de chance, une histoire de bon endroit au bon moment, mais il y avait finalement trouvé un sentiment d’utilité et d’appartenance connu nul part ailleurs … Et certainement pas en jouant les guides touristiques. « Au moins tu as pu le tester sans complètement quitter ton boulot, tu sais à quoi t’en tenir maintenant. » Il le savait déjà, au fond de lui – mais disons qu’il avait eu besoin de se rassurer en mettant ses certitudes à l’épreuve. Et au bout du compte, même depuis là où il se trouvait désormais Frank continuait d’avoir raison ; De quoi offrir à Anwar un peu de réconfort. « Il avait raison, ce n’est pas un métier comme un autre que n’importe qui peut faire. » Les coudes allant s'appuyer contre le bastingage, l'inspecteur avait laissé passer quelques instants de silence, et soupiré en observant l'horizon désormais rouge du soleil qui se couchait « Il me manque toujours. » Frank et ses bons conseils, Frank et sa bonhommie, Frank et sa façon de vous faire croire que tout irait toujours bien. « Après avoir passé tes tests, ça prend combien de temps pour avoir tes résultats ? Tu vas pouvoir recommencer rapidement ? C’est pour savoir pour combien de temps encore je peux abuser de ton voilier … » Terminant sa bière, il avait tourné le dos au coucher de soleil et haussé les épaules « Je reprends début de mois prochain, les tests c’est juste pour savoir si j’ai le droit de retourner parader dans la rue ou si j’dois rester coincé derrière un bureau – et je ne quitte pas ça pour m'ensevelir sous la paperasse. » Le “ça” en question résidant cette fois-ci non seulement en la vue, mais aussi dans le voilier tout entier – matelot en couche-culotte comprise. « Mais d’ici là t’es le bienvenu à bord … J’suis prêt à partager la bière et les pourboires. » Et esquissant finalement à son tour un sourire amusé, il avait quitté le bastingage pour aller récupérer sa progéniture, dont le dernier cube venait de voler de l’autre côté du pont.
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| | | | | | | | (Anwar & Caelan) Freedom is nothing but a chance to be better |
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