Kiss me under the light of a thousand stars. People fall in love in mysterious ways, Maybe it's all part of a plan. I'll just keep on making the same mistakes , Hoping that you’ll understand. Nephtys & @Andrew Livingstone
L’air marin s’engouffrait dans mes cheveux alors que j’appelais pour la troisième fois mes chats. Je ne voulais pas partir à la plage sans que je me sois assurée qu’ils étaient bien dedans. La journée était particulièrement chaude, il faisait déjà 27° et il n’était que 13h alors hors de question de les laisser dehors. Lorsque j’eus la confirmation visuelle que mes 3 bébés étaient dans la maison, je partais tranquillement à mon spot de surf préféré. Il est vrai que j’avais un peu abandonné ce sport ces 3 dernières années alors que je savais très bien que je pouvais surfer aux alentours de Melbourne mais je m’étais laissée obnubiler par le travail. Lorsque j’étais de retour à Brisbane pour quelques jours, j’étais allée à la rencontre de quelques vagues mais aujourd’hui, j’étais décidée : je me remettais sérieusement au surf.
Après un trajet d’une bonne trentaine de minutes en voiture, je me munissais de ma planche, mon sac et m’avançais vers la plage. J’attachais ma lourde chevelure blonde en chignon indiscipliné, attachais la sécurité à ma cheville et lorsque je relevais la tête, sur qui je tombais ? « Oh Andrew ! Mais quel plaisir de te voir ! »m’écriais-je, sincèrement heureuse de le voir ici. Andrew Livingstone avait été le dernier patient que j’avais pris avant qu’on ne me propose ce boulot à Melbourne. Par pure conscience professionnelle, je lui avais recommandé des collègues qui pourraient le prendre en charge et ça aurait ou s’arrêter là mais finalement, nous étions restés en contact … Et ça faisait beaucoup trop longtemps que nous ne nous étions pas vu !
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Dernière édition par Nephtys Sharp le Mar 21 Juin 2022 - 20:29, édité 4 fois
Assis sur le sable face à la mer, mon regard est posé sur la prothèse qui trône fièrement en parfait équilibre sur ma planche de surf. Alors que mon cœur attend le moment où je retournerais enfin dans l'eau avec une impatience inouïe, mon esprit, lui, est très hésitant. Ça fait quelques jours maintenant que les douleurs dans mon genou gauche persistent et mon moignon semble de plus en plus fragile. Si bien que je me demande si c'est vraiment une bonne idée que de faire cette cession surf aujourd'hui. Dans un soupir, je me redresse, me passe une main sur la nuque et j'étais sur le point de me lever pour abandonné la plage, lorsqu'une voix féminine m'interpelle.
Relevant la tête, je plisse les yeux et met ma main en casquette pour contrer les rayons du soleil avant que mon regard ne s'illumine en reconnaissant mon ancienne psychologue. «Nephtys ! » m'exclamais-je alors qu'un large sourire vient étirer mes lèvres « Qu'est-ce que ... mais qu'est-ce que tu fais là ? » demandais-je alors que je prends appui sur mes mains pour me relever. En équilibre sur une jambe, je fais face à celle qui a été le premier vrai rayon de soleil dans ma nouvelle vie « t'aurais pu me prévenir que t'étais en ville ! » Reprenais-je en lui donnant une tape contre l'épaule « j'ai beau être un gars bien occupé, pour toi, j'aurais fait de la place dans mon quotidien » je souris, amusé, alors que je m'appuie un instant sur elle lorsque l'équilibre me fait un instant défaut. « 13h ... Toujours aussi ponctuelle dans tes habitudes hein» reprenais-je avec humour, me moquant légèrement de l'esprit parfois un peu trop carré de la jeune femme.
Kiss me under the light of a thousand stars. People fall in love in mysterious ways, Maybe it's all part of a plan. I'll just keep on making the same mistakes , Hoping that you’ll understand. Nephtys & @Andrew Livingstone
Je ne sais pas trop ce que ça disait de moi cette constance à aller surfer toujours à la même heure. Peut-être mon côté carré et légèrement maniaque du contrôle ? Dans tous les cas, ça pouvait être une chose à explorer en thérapie … Une caractéristique que j’avais retrouvé chez beaucoup de prisonniers pendant mes 3 ans passé en entretien avec des criminels dans les prisons de Melbourne. Merde ! ça craignait. Je m’étais promis de ne pas penser au travail aujourd’hui. J’en aurais bien assez du travail puisque je reprends à temps plein en « service » si on peut dire ça comme ça au sein des services sociaux. Cette après-midi, ça devait être détente alors hors de question de penser au travail.
Et quoi de mieux pour ne pas penser au travail que de tomber sur un de mes anciens patient, n’est-ce pas ? Ce que je faisais là ? « Hmm comme toi … enfin je crois ? T’allais bien surfer ? Pas draguer ou faire un shooting photo, rassures-moi ? » Demandais-je interrogative tout en levant mon sourcil droit presque dans la foulée, l’air amusé. « Arrrrf je saiiiiis ! » répondis-je, une petite grimace coupable sur le visage tandis qu’il me tapait sur l’épaule. « Je suis rentrée officiellement, il y a quoi ? Deux semaines grand max ! Il aurait pas fallu que je reste plus longtemps à Melbourne parce que j’aurais dû faire appel à un camion déménageur tellement j’avais de choses à rapatrier … Et pourtant, tous mes meubles étaient ici, c’est dingue ! » Je m’emportais je le sais, mais je m’étais installée un peu trop à Melbourne pour ces 3 années, aussi parce que ce boulot avait été très bénéfique, formateur et m’avait éloigné des mauvaises choses que je vivais à ce moment-là. Il m’avait inexorablement éloigné de Colin et aujourd’hui je ne le regrettais pas même si parfois je me demandais ce qu’il était devenu. Etait-il revenu avec son ex, la mère de ses enfants, était-il toujours aussi allergique à l’engagement ? Une femme l’avait-il fait changé d’avis ? Tant de questions que je ne devrais même pas me poser parce que je m’en fous de ce tocard !!
Je finis par me concentrer sur le moment présent et Andrew qui prend appuie sur mon épaule pour garder l’équilibre. Dans la foulée, je posais ma main sur son avant-bras au cas où son équilibre lui ferait encore défaut. « ça va ? » L’interrogeais-je, mon regard se focalisant sur le sien pour déceler quelconque douleur, « C’est pas gentil de se moquer, j’essaie de me soigner Mr Livingstone …. Bon Ok, c’est pas concluant mais j’essaie ! » insistais-je tout en repensant à mon essaie en poterie, c’est pareil, j’essaie mais c’est franchement pas concluant !!
Je me serais attendu à voir débarquer n'importe qui. Kieran, Penny, Micah, Rory, même James. Mais jamais, oh non, jamais, je n'aurais imaginé faire face à Nephtys ! Je me rappelle encore parfaitement ce sentiment que j'ai ressenti lorsqu'elle m'a annoncé qu'elle ne pourrait plus me prendre en charge, car elle s'en va vers de nouveaux horizons à Melbourne. C'était un mélange de tristesse et d'amertume que j'ai ressenti, avec l'impression d'être abandonné au milieu de nulle part. Et pourtant, la joie et l'excitation pour elle étaient bien plus grandes : elle avait besoin de changer d'air et je ne suis personne si ce n'est un patient de plus dans sa liste. Je ne l'ai absolument pas mal pris, tant le confrère qui a pris son relais a fait un travail de dingue avec moi et me suit encore aujourd'hui trois ans après. Et pourtant, une part de moi regrette encore maintenant le départ de la jolie blonde. Bien que n'ayant pas perdu contact, notre relation étant passée de 'professionnel' à 'amicale', il m'arrive régulièrement de m'imaginer ce que ça aurait été si nous avions continué notre prise en charge, elle et moi.
Mais soit. Au final, ce qui importe réellement, c'est le fait qu'elle soit là, en entière, avec son esprit malin et son humour. Je laisse échapper un rire lorsqu'elle me demande si je suis là, moi aussi, pour surfer ou si je suis présent pour draguer ou alors peut-être que je me prépare pour un shooting ? « Non, c'est mon jour de repos» expliquais-je rapidement « Et impossible pour moi de draguer, y a personne à part toi » haussais-je les épaules alors que je me lève tout en lui indiquant que la prochaine fois qu'elle est en ville, elle devra me prévenir avant. Sauf qu'il n'y aura pas de 'prochaine fois', car c'est avec une joie non dissimulée que j'apprends qu'elle est officiellement de retour en ville et qu'elle ne retournera plus à Melbourne «Eh, mais si ça ce n'est pas la meilleure de la journée ! » Je lui offre un large sourire « Pourquoi t'es revenu ? Les criminels de Brisbane sont plus intéressant que ceux de Melbourne, c'est ça ?» Demandais-je avec un humour bien à moi.
Lorsque mon équilibre me fait défaut un instant, je me rattrape rapidement à l'épaule de la psychologue. Par reflex, celle-ci vient poser sa main sur mon avant-bras, me procurant une encore plus grande stabilité, avant de me demander si ça va. «Oui, oui » répondais-je alors que je me redresse, sans pour autant lâcher son épaule « C'est juste que le sable mou ici n'est pas le sol le plus stable qui soit et je me suis levé un peu trop vite» acting : on. J'ose faire quelque chose que je n'ai jamais fait avant face à Nephtys : j'utilise mes talents d'acteur pour cacher parfaitement mes vraies émotions et mentir honteusement alors que ma petite perte d'équilibre vient clairement des douleurs qui se sont un instant intensifiés. Mais je sais que je peux les supporter et que celles-ci passeront.
Fort heureusement, la jolie blonde me suit dans mon changement de sujet et répond qu'elle fait un effort pour contrer son esprit trop carré. « Mouais… -2 points pour le manque de persévérance » déclarais-je amusé avant de lui tapoter l'épaule « mais ça ira déjà, un jour, tu viendras surfer à 13h15, je crois en toi» je laisse, à nouveau, échappé un rire, avant que je ne relâche la jeune femme et, pliant ma jambe, je me laisse glisser au sol « Bon du coup... On va surfer ?» demandais-je, lançant un coup d'œil à la prothèse qui n'a pas bougé de la planche. «Ça fait 10 minutes qu'elle est debout, là, comme ça » dis-je en la désignant « Si j'ai, ne serait-ce que la moitié de la performance pour tenir aussi bien en équilibre sur une planche, je serais vraiment heureux» cacher ses questionnements derrière un trait d'humour :à, ma spécialité.
« Parce qu’en plus vous avez des jours de repos dans le showbiz ?! » m’exclamais-je, faussement étonnée et catastrophée. Bien sûr je plaisantais, puis j’ajoutais : « Oh ! c’est parce que j’ai été ta psy pendant deux séances que je fais partie des intouchables ? » Indraguable ? Demandais-je. D’ailleurs, pourquoi est-ce que ça me piquait de d’être dans la catégorie intouchable ? ça ne devrait même pas me toucher et pourtant, oui ça me piquait … un peu ! Je ne devrais même pas en faire cas, y prêter attention. Sa mine heureuse lorsque je lui dis que je suis officiellement et à 100% de retour à Brisbane me fit oublier immédiatement cet espèce de malaise que j’avais ressenti. « Ma mission est officiellement terminée. Ça devait durer un an, ça en a duré trois et on a presque fini le rapport à envoyer au ministère de la défense. Je suis en pleine relecture du rapport. Je corrige les fautes, je réécoute certaines séances pour rajouter deux trois choses et je l’envoie au responsable du projet. » ça avait été un honneur pour moi de faire partie de ce projet et j’étais sortie des sentiers battus, de ma spécialité auprès des enfants malade, mais cela m’avait permis d’explorer une facette de mon métier : la psychologie judiciaire et franchement, j’avais adoré ! Il est vrai que, jusqu’à présent, je m’étais cantonné à la pédiatrie. Même lorsque je travaillais pour l’association Beauregard, je faisais des consultations aux enfants et aux ados et je ne m’étais jamais trop éloignée de cette patientèle. Sortir de ma zone de confort avait été la meilleure chose que j’avais faite parce que ça me donnait envie de découvrir d’autres horizons. Travailler pour les services sociaux était un nouveau challenge, tout comme l’avait été ma mission à Melbourne.
Andrew se mit alors à tanguer légèrement et je posais directement ma main sur son avant-bras au cas où. je n’étais que moyennement convaincue par le fait que le sable ne soit pas très stable. « Mm », j’haussais un sourcil, interrogative et pas complètement convaincue, « T’es sûr ? » , après tout, il ne me donnait pas de raison de douter de ses paroles, « De toute façon, il faut bien que tu t’habitues à marcher dans le sable et puis je suppose que ça doit être bon pour ta rééducation, sinon un kiné t’aurait déjà dit que la plage c’était terminé pour toi. » … J’imagine ! Après tout, je suis psychologue pas kiné.
En tout cas, mes efforts pour contrarier mon esprit trop carré semble l’amuser. « Ehhh mais t’es sévère !! » m’écriais-je, « Même pas un point parce que j’essaie ? Et puis tu peux dire merci à mon esprit trop carré, on serait pas tombé l’un sur l’autre sinon ! » et on aurait pas cette discussion sans fin … et drôle ! J’étais vraiment contente des progrès qu’il avait fait depuis que je l’avais confié à un confrère. Son amputation, son cancer puis la rémission, tout ça était dur à vivre psychologiquement et il s’en sortait formidablement bien. « Tu sais quoi ? la prochaine fois je viendrais surfer à 14h ! …. Et peut-être même que je chercherais un autre spot !» le taquinais-je tout en le regardant s’asseoir dans le sable à côté de moi. Je plantais ma planche dans le sable à quelques pas de nous, puis je revins vers lui pour poser mes fesses à côté de lui. Mon regard, de la même couleur que l’océan face à nous, se posa sur sa planche adaptée. « T’as besoin d’aide pour te mettre debout sur la planche ? Je peux peut-être t’aider. » Je pouvais surfer quand je le voulais et j’étais curieuse de le voir tenir sur sa planche. Je trouvais ça littéralement miraculeux le fait qu’il puisse reprendre ce sport. « Il fait un temps magnfique, l’océan est plutôt calme, c’est le moment idéal. » Lui proposais-je tout en étant pas certaine qu’il veuille de mon aide. La fierté tout ça tout ça !!
Je grimace un peu dès le moment où j'ai dit que je ne peux pas draguer, car la seule personne sur la place à part moi, c'est Nephtys. Même si son ton est amusé lorsqu'elle me le fait comprendre, je perçois une certaine intonation qui montre qu'elle prend assez mal ce que je viens de dire alors que ce n'était absolument pas mon intention ! « Mais non ! Absolument pas !» m'exclamais-je lorsqu'elle me demande si c'est parce qu'elle était ma psychologue « De toute manière t'es bien plus qu'une psychologue pour moi. Et pis tu ne m'a suivi que trois mois donc t'es rapidement passée au stade d'amie et...bref» je clos le sujet par un geste de la main afin de ne pas m'enfoncer davantage dans cette discussion de laquelle je risque de ne pas sortir indemne.
Au lieu de cela, je m'intéresse davantage au fait qu'elle revienne en ville après trois ans à Melbourne et j'apprends ainsi que c'est tout simplement parce qu'ils ont fini la mission pour laquelle elle était initialement partie. « On génial que ça se soit enfin fini. Mais pourquoi est-ce que ça s'est tant éternisé ? Et puis tu n'avais pas dit que tu voulais quitter la ville pour toujours ?» Demandais-je, fronçant légèrement les sourcils, intrigué et interrogateur. Dans mon esprit, Nephtys m'a donné l'impression de vouloir partir pour ne jamais revenir. Mais après, je peux aussi me tromper étant donné qu'elle est partie à un moment crucial de ma vie et que je n'avais pas forcément la tête à vraiment écouter ce qu'on me disait.
J'allais ajouter quelque chose, mais une douleur irradie brusquement mon moignon et je suis obligé de me rattraper à la psychologue afin d'assurer mon équilibre. Je lui balance, en même temps, un petit mensonge, mettant la faute sur lea sable mou. Mais Nephtys n'est pas dupe, me demande si je suis sûr puis hausse les épaules en supposant que marcher sur le sable serait bon pour ma rééducation, sinon on m'aurait déjà dit que la plage, c'est fini pour moi. « Ouais et tu me connais aussi, dès qu'on me dit que je pourrais plus faire quelque chose, je redouble d'efforts pour le faire quand même» haussais-je les épaules, amusé, car les professionnels de santé ont très vite compris qu'ils devaient arrêter de me parler avec négation.
En parlant de chose que je ne pourrais, d'après mon kiné et mon chirurgien, plus faire, il y a le surf et je suis bien décidé de remonter sur une planche aujourd'hui après quelques mois loin des vagues. M'installant à nouveau sur le sable, je fais d'abord un commentaire sur l'esprit trop carré de mon amie et éclate de rire lorsqu'elle s'insurge. « C'est beaucoup trop facile de te faire sortir de tes gonds, tu sais ?» Je lui tapote l'épaule «On verra bien la prochaine fois... Je viendrais mardi à 14h et non lundi à 13h et je verrai bien si tu es là ou non. »
Je lui adresse un clin d’œil et un sourire en coin avant de porter mon attention sur ma planche adaptée à mon handicap. C'est à haute voix que je doute de mon équilibre, mais secoue la tête lorsque Nephtys me propose son aide «Non non t'inquiète ça ira déjà » assurais-je avant de me pencher en avant et attraper la prothèse que j'enfile en quelques gestes d'experts puis me relève. J'assure quelques instants, mon équilibre prend ma planche en main et me tourne vers la jeune femme «On y va ? » Demandais-je, tout sourire.
« Mmm oui bref ! » répondis-je en balayant ses paroles d’un revers de main. Ça n’aurait pas dû me contrarier. Andrew avait été mon patient 3 mois et maintenant, il était devenu un ami. Pas plus. Pas moins. Nos vies étaient à 1000 lieux l’une de l’autre. Il baignait dans le showbiz et moi je préférais rester dans l’ombre. C’était … étrange ce que je ressentais et je préférais ne pas m’y attarder. C’est pourquoi j’accueillis avec un certain soulagement le fait qu’il me parle de mon travail. « Nous n’avions pas prévu qu’autant de détenus accepteraient les entretiens et surtout des détenus avec autant de profils différents. Il était question, au départ, de faire des entretiens avec des tueurs en série et finalement, j’ai aussi interrogé des violeurs, des pédophiles … La restitution des entretiens a été plus longue, on a pu aller plus loin dans notre réflexion. » J’étais consciente que ce n’était pas drôle, c’était même gore, mais ça m’avait permis d’explorer une autre facette de mon métier que je ne me serais jamais autorisée à explorer. « Oh … C’est pas que je voulais quitter la ville pour toujours, » continuais-je un peu gênée de la tournure que prenait la conversation. Je considérais ma dernière relation officiellement officieuse avec Colin comme un désastre et je n’aimais pas trop parler de moi. C’est assez ironique pour une psychologue n’est-ce pas ? « Le fait de partir – à la base – ou plutôt m’éloigner de Brisbane pendant un an, c’était pour me forcer à prendre de la distance avec une relation qui n’était pas pour moi. Je me faisais croire que la non-exclusivité ne me dérangeait pas mais il faut croire que je suis une romantique qui a besoin de mettre un nom sur une relation dès que je la commence. » A cet instant, j’avais perdu toute la confiance en moi que je pouvais montrer et je fuyais le regard de mon interlocuteur. C’était un fait, j’avais été très attachée à Colin, peut-être même plus que ça, mais il voulait trop jouer et j’aurais perdu beaucoup trop de plumes si j’étais restée près de lui. J’en étais certaine aujourd’hui : il m’aurait brisé le cœur … D’ailleurs, si j’étais honnête un instant avec moi-même, je l’avouerais : oui il m’a brisé le cœur. Je m’étais projetée avec lui et ça faisait mal de se tromper.
Je n’avais plus de nouvelles de Colin depuis que j’avais accepté cette opportunité professionnelle à Melbourne. On s’était pris la tête au téléphone, il m’avait, une énième fois provoqué à propos de collègues qui lui faisaient du rentre dedans en insistant sur le fait qu’il avait totalement le droit de céder parce qu’il était célibataire. Et c’était ça, clairement, qui posait problème et qui faisait très très très mal. Qu’il se considère comme célibataire. Il s’était déjà éloigné lorsque j’avais cru être enceinte – ça prouvait son niveau d’implication dans notre espèce de couple qui n’en était pas et qui n’en avait jamais été un – et ce comportement aurait déjà dû me faire fuir. Mais non, il avait fallu cette énième prise de tête pour que je l’envoie chier. J’étais comme ça, je pouvais en supporter beaucoup mais lorsque je disais stop, on ne pouvait plus me faire changer d’avis. Partir avait été ma meilleure décision parce que j’avais pu me détacher définitivement de cette relation malsaine mais ça faisait sacrément du bien de revenir. Andrew faisait partie de ces personnes que j’étais ravie de revoir.
Ce dernier perdit quelques instant son équilibre et se raccrocha à moi. Apparemment, c’était à cause du sable. J’étais moyennement convaincue par cette réponse mais Andrew persistait et je craignais d’être un peu lourde si j’insistais encore. « On t’a jamais dit que tu étais têtu ? » Plaisantais-je avant de lui faire un grand sourire, plongeant mon regard couleur océan dans le sien.
C’était une bien trop belle coïncidence de se retrouver sur la même plage le même jour pour ne pas surfer ensemble. Andrew m’avait confié qu’il surfait … avant d’être amputé et il avait l’air bien décidé à reprendre cette activité. « Bon … C’est toi qui vois ! J’espère que t’es prêt à te faire massacrer parce que je suis en super forme aujourd’hui ! » M’exclamais-je tout en me relevant moi aussi. Je fermais le fermeture éclair de mon haut pour surfer sans être un petit glaçon puis attrapais ma planche. « A toi l’honneur ! Je t’avoue que j’ai hâte de te voir à l’œuvre, je suis impressionnée par ta ténacité Andrew. » Et j’étais sincère. Je ne sais pas si, à sa place, j’aurais eu une telle force de caractère. Une telle volonté à continuer « comme avant ».
J’avançais vers l’océan, humant l’air marin puis me jetais à l’eau, mon corps sur la planche de surf, je me mis à pagayer tout en me disant que je devais le laisser s’habituer quelques instants à ces nouvelles sensations.
Je soupire doucement et hoche la tête lorsque, du revers de la main, Nephtys balaie, elle aussi, le sujet de la drague. C'est, donc, un thème sur lequel nous nous accordons pour dire que nous n'y reviendrons pas -ou du moins pas de si tôt en tout cas- et je change donc de sujet, lui disant combien je suis étonné qu'elle soit rester aussi longtemps à Melbourne. C'est ainsi que j'apprends qu'elle a pu faire beaucoup d'interview et a eu beaucoup de discussion avec de nombreux profils de criminels différents. « Ah ça devait être intéressant comme approche !» dis-je avec sincérité. Bien que je serais absolument incapable de faire le même boulot qu'elle, je dois dire que la psychologie est un domaine tellement peu connu qu'il me fascine. Je suis persuadé que Nephtys pourrait en parler des heures et des heures, mais autant j'aimerais bien en apprendre plus autant je sais que je ne suis pas dans le bon état d'esprit et que je serais incapable de suivre une conversation portant sur ce thème là.
Ainsi, je l'écoute avec une attention encore plus particulière lorsqu'elle m'annonce les raisons qui l'ont poussée à partir et apprends ainsi qu'elle avait besoin de se retrouver loin d'une relation à sens unique. Grimaçant par compassion, je hoche doucement la tête et pince les lèvres. « Ah ouais je vois ...merde, c'est pas cool ça, je suis désolé» soufflais-je en secouant la tête, incapable de comprendre ce qui peut se passer par la tête d'un homme pour qu'il puisse vouloir tromper sa compagne. « Bon, c'est du passé maintenant. Tu te trouveras sûrement quelqu'un qui saura t'aimer à ta juste valeur » j'en suis persuadé tant je ne trouve pas de défauts à Nephtys.
Nous finissons toutefois par faire ce pour quoi nous sommes venu ici à la base : du surf. J'évoque rapidement mes appréhensions et fini par rigoler lorsque la psychologue me demande si on m'a déjà dis que j'étais têtu. « Si je devais avoir 1$ à chaque fois qu'on m'a dit ça, je pense que je pourrais ouvrir un compte en banque off shore» annonçais-je avec humour avant de me redresser et d'attraper la prothèse que je fini par enfiler. Je me relève ensuite et attrape ma planche sous mon bras avant de me diriger vers la mer « ouais, on va voir si tu sauras me battre !» lançais-je au dessus de mon épaule alors que je me jette à plat ventre sur ma planche, pagayant avec mes bras et mes jambes pour prendre le large, ne m'arrêtant que lorsque les vagues commencent à devenir plus hautes et puissantes. Après un dernier regard vers Nephtys et avoir échanger un sourire, je me retourne, dos à la mer et attend le bon moment avant de pagayer vers le littoral, me redresser et finalement me mettre debout sur la planche. Les sensations et les reflex que j'avais acquit avant l'amputation reviennent très rapidement et c'est sans problème que je chevauche cette vague ainsi que les suivantes. Nephtys et moi ne sortons de l'eau que deux heures plus tard lorsque nos corps et nos muscles nous ordonnent de le faire. Et c'est, avec une accolade amicale que je fais durer un peu plus longtemps que prévu que nous nous quittons, avec la promesse solennelle de refaire une cession le plus vite possible.