≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

Les roues du vélo duquel elle descendit sans lui laisser le temps de s’arrêter émit un bruit inquiétant, qui ne l’empêcha pourtant pas de l’ignorer, le souffle court. Ce n’était pas le genre de moyen de locomotion qu’elle empruntait d’ordinaire, mais à défaut de mieux, à défaut de vouloir contacter son voisin pour la déposer, et ce pour d’obscures raisons, c’était tout ce qu’elle avait trouvé pour se rendre en ville plus ou moins rapidement sans dépenser un centime dans le processus. Passons sur le fait que le vélo était rose fushia, avec des pompons à paillettes à chaque extrémité du guidon surplombé d’une sonnette cristalline. Elle l’avait volé à sa petite voisine de 13 ans qui habitait à l’angle de la rue ; elle l’avait fait chialer pour détourner son attention en lui révélant, à tort, que son père tringlait sa coach de gymnastique rythmique à l’arrière de son monospace. Une méthode comme une autre, qui n’avait fait naître en elle aucune espèce de remords.
Nana n’était pas avec elle, Dieu merci. Elle était à la maison de retraite, à se la donner avec Richard et les autres ; elle la rejoindrait plus tard pour assister à cette journée qui serait la sienne, qui la placerait au centre du film qu’était sa vie, personnage principal d’une histoire qu’elle ne maîtrisait plus. Jo prit une grande inspiration, les mains posées sur le guidon de son vélo qu’elle tracta à côté d’elle, s’approchant de la devanture d’une enseigne neuve et qu’elle observa en roulant des yeux. Si elle n’était pas aussi fière de Megan de ne pas vouloir vivre sur la richesse de son pseudo-mari, elle lui aurait fait savoir que franchement, le nom du studio photo dans lequel elle bossait craignait grave. Du coup, elle l’avait fait savoir au propriétaire qu’elle devait rejoindre d’ailleurs, non sans grimacer parce que ça lui plaisait davantage de faire semblant de ne pas le vouloir. Comme elle lui avait dit dans les messages qu’ils avaient échangé, elle se prêtait au jeu pour sa grand-mère. Mais avant ça, il y avait des détails à voir, c’était clair. Elle ne tenait pas à retrouver sa Nana mise en scène de façon grotesque pour que l’autre taré derrière l’objectif kiffe le petit pouvoir qu’il prenait en se plaçant comme celui qui l’immortaliserait. Jo, elle savait ce que ça faisait de perdre le contrôle de son image, alors elle ne voulait pas l’imposer à sa grand-mère qui n’était maîtresse de plus grand-chose, depuis un certain temps maintenant.

Elle largua son vélo contre la façade du studio, baissa les côtés de son short en toile qui ne lui couvrait pas grand-chose et cracha son chewing-gum par terre pour faire bonne mesure, pas le moins du monde impressionnée par ce qu’Edge avait réussi à mettre sur pieds en l’espace de quelques mois seulement. Elle poussa la porte, ne s’annonçant pas en lui envoyant un message dans la foulée, préférant s’introduire dans le studio en constatant qu’il n’était pas dans la pièce principale et se baladant comme une cliente lambda qui laissait vadrouiller ses yeux à droite et à gauche dans la seule optique d’apposer des critiques arbitraires sur ce qu’elle observait. Le crissement de ses semelles sur le sol était feutré, aussi elle s’approcha d’une espèce de point de chute, un comptoir derrière lequel Edge et Meg devaient sûrement faire leurs petites affaires, et s’y appuya avec le mine faussement ingénue qui caractérisait ses sorties les plus vicieuses, celles qui étaient supposées lui attirer plus de sympathie quand on savait tous qu’elle n’était qu’une insupportable sale gosse dans le fond. Sur la pointe des pieds, son menton dans sa main, elle se hissa pour voir derrière le comptoir sans grande conviction avant de tourner la tête vers la source des pas qu’elle entendit pour mieux accueillir le jeune homme avec un sourire aussi faux qu’il était sarcastique "Salut, toi." Elle fit danser ses sourcils bien dessinés sur son front, déjà prête à faire son cinéma quand elle ajouta "Je me suis dit que c’était le temps de venir voir ce que tu me proposes pour ma grand-mère. Je t’ai pas envoyé d’autres textos, j’ai senti que ça te mettait mal à l’aise de correspondre avec une meuf qui pourrait bien être ta sœur." Là, elle battit des cils parce que ça la faisait rire, ses yeux opérant un léger mouvement pour s’arrêter sur le cliché d’une brune à la peau bronzée et aux yeux vert, qui devait faire partie des clichés les plus vendeurs que le jeune homme avait en sa possession pour montrer quel genre de choses il était capable de proposer à ses potentiels clients ; l’autre se servait de sa copine pour faire des affaires, tu parles d’une classe "Faudrait pas qu’elle se sente menacée." Peu importe son nom d’ailleurs, elle l’avait déjà oublié, et comme elle avait la capacité de concentration d’une enfant de douze ans gavée de soda et de bonbons, elle enchaîna dans la foulée "Je l’ai pas fait venir tout de suite, je voulais d’abord savoir ce que t’allais lui faire faire." A sa grand-mère, bien sûr. Elle se décolla du comptoir, prit soudain une posture plus mature, qui lui fit baisser sur ses hanches dénudées les pans du cache-cœur serré quelle portait sur le dos "Pas que j’ai pas confiance, mais j’en ai connu, des photographes pas très honnêtes." qu’elle fit sans rentrer dans les détails, plantant son regard souligné de mauve dans celui d’Edge.

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

Quand est-ce que tu dors dans tout cela, voilà la question que t’a posé un de tes collègues une fois que tu es sorti du bureau de ta supérieure et que tu as eu le feu vert pour bosser sur tes clichés dans ton studio photo. Tu n’es pas vraiment demandé dans les locaux du Brisbane Times aujourd’hui et tu n’aimes pas vraiment développer des photos ici, et ce même si le département photo du prestigieux journal regorge de petits bijoux technologiques et une chambre noire plus qu’honorable, de même pour les ordinateurs et les derniers programmes du moment pour quelqu'un avec ton métier… c’est juste toi, encore une fois, qui est pointilleux à souhait et qui préfère faire les choses à ta manière. Et personne ne va argumenter avec toi si les résultats sont là, voilà ce que ta dit ta patronne et elle te laisse t’éclipser dans les locaux de Mirages pour le reste de la journée et maintenant que tu repasses à ton bureau pour récupérer tes affaires et ton thermos rempli de café, on remerciera vraiment Yasmine pour cette petite attention, tu ne peux t’empêcher de laisser échapper un léger rire et de répliquer un : oh crois-moi je dors, à ton collègue. Oui, d’un œil externe, tu peux sûrement paraitre pour le type qui en fait beaucoup, le boulot, le studio, les visites avec ta partenaire, les voyages… mais pas pour toi, c’est un rythme qui te convient parfaitement bien et tu connais une certaine brune qui dirait même que tu passes un peu trop de temps à dormir, cependant, tu as réussi à avoir un équilibre et un quotidien qui te plaise assez pour ne pas avoir à te plaindre.
Et tu conseilles juste à ton homologue masculin de revoir ses priorités, il se rendra compte que le reste suivra. Un conseil peut-être en bateau, sans doute même, mais qui fonctionne bien pour toi et sac enfin sur les épaules, la bandoulière s’enfonçant légèrement dans le tissu de ton t-shirt du jour, tu finis par disparaitre dans un coin de la ville. Megan est déjà derrière le comptoir, pour un temps, elle va sur le terrain aujourd’hui et après une brève discussion, tu es seul dans le studio, avec la promesse de ne faire fuir aucun client potentiel et tu sais que les premières heures seront consacrées à ton boulot au journal. Ensuite tu pourras te concentrer sur tes propres photos et celles de Megan. Cela te parait être un bon compromis, un très bon compromis et tu dois avouer que les photos prises pour ton boulot sont bonnes, plus que bonnes mêmes, tu pourrais t’envoyer des fleurs que tu te dis après quelques moments passés à les retoucher. Tu n’as plus qu’à les envoyer par email à ton collègue et… tu en es là dans tes pensées quand tu réalises que tu n’es plus tout seul dans le studio photo et tu renvoies un léger sourire à Jo, ne sachant pas si vous aviez quelque chose de prévu ou pas. Elle t’avait bien dit, après t’avoir remis à ta place, bien entendu, qu’elle allait passer, pour sa grand-mère et uniquement pour cette dernière. "Oh mais qui va là, c'est Josephine, je me demandais quand est-ce que tu ferais une apparition dans le coin..." Que tu dis en finissant par atteindre le comptoir, tu l’écoutes tout en continuant de bosser, la clé USB trouve l’ordinateur et tu regardes la jeune femme battre des cils et te dire qu’elle ne t’a pas envoyé d’autres messages histoire de protéger ta réputation et ton intégrité. Ou pas, tu n’y crois pas une seule seconde et tu te dis surtout qu’elle voulait jouer les intéressantes, histoire que tu ne saches pas quand est-ce qu’elle viendrait. D’ailleurs comment est-ce que la brune est venue ? De ce que tu sais, elle n’a pas de véhicule à elle et tu imagines mal Jo dans les transports publics, à devoir laisser un parfait inconnu s’asseoir sur un siège juste à côté d’elle. Impensable vraiment.
Tu roules néanmoins des yeux à la mention de ta partenaire et encore une fois, tu résistes à l’envie de demander à Jo comment elle imagine ta relation avec Yasmine. Ou même de lui demander qui a arraché son palpitant pour marcher dessus, il y a une histoire derrière son attitude de grande dame et les murs qu’elle a su ériger pour se protéger, aucun doute là-dessus. Ce n’est pas le moment, tu le sais, cela ne sera sûrement jamais le bon moment et tu prétends être blessé quand elle dénigre ta profession et parle de photographes pas très honorables, tu en as connus aussi, malheureusement. "C'est le moment où tu me dis que tous les mecs sont des porcs et que quelqu'un garde tes nudes quelque part ou ... ? Enfin bref..." Enfin bref, c’est son histoire à elle, non pas que cela soit le propos aujourd’hui, tu décides que tu enverras cet email plus tard, Jo est plus intéressante et tu finis par hausser les épaules, parce que tu n’as jamais voulu faire compliqué.
"De base, je voulais faire cela chez vous, qu'elle soit dans son élément, mais si tu préfères le studio, on fera cela ici." Tu trouves cela plus intéressant d’immortaliser les gens dans leurs éléments, de ton expérience, ils sont tout de suite beaucoup plus détendus, il n’y a aucun apriori et les choses se passent mieux. Mais, tu comprends la réticence de Jo et surtout au vu des problèmes de santé de sa grand-mère, elle n’est pas rentrée dans les détails, elle n’aura jamais besoin de le faire, le sujet est autant sensible que délicat, il n’y aura pas de blagues déplacées à ce sujet ni d’autres railleries. Tu fais signe à Jo de te suivre, histoire qu’elle ne soit pas confinée qu’au comptoir qui accueille les clients dès qu’ils rentrent, en plus de la petite chambre noire, il y a également de la place, de taille plus que raisonnable, pour faire quelque chose d’intéressant. Pour le moment, il y a les traditionnelles bâches noires et blanches et des projecteurs. "Je veux qu'elle soit confortable, on peut ramener quelques fauteuils et autres, des objets de son passé si cela lui va et je voulais la photographier en train de parler de sa vie, tout simplement." Tout comme Ava a su le faire dans sa cuisine quand elle t’a accueilli toi, un parfait inconnu, dans sa cuisine et que tu t’es tout de suite senti à l’aise, immédiatement, c’est ce sentiment que tu voudrais capturer sur la pellicule, si tu y parviens, ce qui sera un vrai défi.  "Si j'ai la permission de sa petite-fille bien entendu."

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

"T’es photographe, tu veux me faire croire que t’as pas essayé de lever qui que ce soit en te servant de ça ?" Elle s’en foutait un peu à dire vrai, mais la condescendance de la verve du propriétaire des lieux la força à répliquer avec au moins autant d’aplomb. Elle le fixa avec le culot qui était le sien, le menton rentré, un air de le juger sans chercher à le cacher "Arrête ton char, papa. Je sais que t’as un album rempli de photos de tes conquêtes à poil planqué quelque part." C’était probablement sa version salace à lui de la boîte à souvenirs, celle qu’on garde planqué sous son lit en espérant y dénicher sa dignité quand on se fait larguer comme une sombre bouse. La réplique était trop facile, elle coula de sa gorge comme de l’or liquide déversé sur la face sans défaut du jeune homme qu’elle regarda sans cligner des yeux cette fois, la provocation teintant ses traits à peine maquillés ce matin-là "On garde ça sous la main pour quand madame est pas d’humeur ? Je t’ai pas déjà dit que ça rendait sourd ce genre de pratique ?" Elle n’avait pas apporté sa classe avec elle, c’était une certitude. En même temps, il jouait les papas de banlieue aujourd’hui, monsieur Price, mais il y avait une époque, celle où ils s’étaient connus, où il se soustrayait de la corvée de devoir cacher ses secrets dans sa barbe épaisse. Certes, ils ne se connaissaient pas dans les moindres détails, Jo savait toutefois qu’elle pouvait se vanter d’avoir observé une partie de lui qui aurait dû le contraindre à arrêter de jouer les grands hommes quand elle lui faisait face.

Il était comme tous les autres, à se servir de ses compétences pour asseoir le pouvoir que lui donnait ce qui pendouillait entre les jambes. Il avait beau se montrer ouvert et tolérant, à prétendre traiter les femmes avec respect, il restait un bonhomme dont elle avait vu la facette la moins reluisante et il semblait qu’il avait tendance à oublier cette partie, papa Edgerton. Elle papillonna presque des cils pour asseoir le sien, de pouvoir, et se décolla du comptoir qu’elle avait investi par le haut de son corps recourbé par-dessus pour mieux le regarder répondre à ses interrogations à propos de ce qui l’amenait ici : la séance-photo qu'il avait proposé à sa grand-mère "Je préfère rien du tout pour le moment. Ma décision est pas prise, je veux juste avoir une idée précise de comment organiser les choses. T’es pas sans savoir que Nana est pas en super forme." Elle avait été honnête avec lui, quand il était venu chez elle, invité par la bonne femme à se joindre à la table du petit-déjeuner. Elle n’était certes pas rentrée dans les détails, mais elle avait parlé de l’état de sa grand-mère en lui demandant de ne pas la brusquer, en lui demandant de se montrer délicat et de ne pas commencer à la prendre en pitié. Il était intelligent malgré l’air qu’il se donnait, à trimballer ses muscles comme d’autres trimballent leur matière grise, il avait dû relier les points sans chercher à creuser néanmoins.
Se détournant d’Edge, Jo se mit à marcher le long des murs tapissés de photos du studio et se mordit le bout de la langue en repassant la réponse du jeune homme dans sa tête pour finalement trouver que ce n’était pas une mauvaise idée, de laisser Ava évoluer dans un environnement qu’elle était supposée connaître — supposée, c’était le bon mot puisque de plus en plus, elle avait bien du mal à se repérer dans sa propre maison. Elle marqua un temps devant la photo de la partenaire du jeune homme qui avait attiré son attention et finit par s’en détourner pour rejoindre le comptoir "J’aime bien l’idée de la shooter à la maison. Ce sera mieux qu’ici je crois. Sans vouloir t’offenser, je suis déjà passée par la case séance-photo et y a rien de plus impersonnel qu’un fond blanc." qu’elle lui dit, sans aucune ironie ni provocation de sa part. Elle constatait juste, se basant sur sa propre expérience pour rendre celle de sa grand-mère plus agréable à vivre malgré sa maladie "Elle a Alzheimer." De but en blanc, elle le lui avoua quand il déroula ses envies pour mieux photographier sa grand-mère. Ça n’allégea pas grand-chose dans la poitrine de Jo, ça la resserra juste un peu plus quand elle dut être plus claire et préciser, haussant les épaules comme si ça lui était égal "Du coup, pour parler de sa vie et de son histoire, ça va être un peu compliqué. Ça dépendra de si elle est dans un bon jour ou pas, de si elle est capable de se souvenir de l’histoire derrière les objets qui l’entoureront à ce moment-là." Ça ne lui était pas égal, mais à quoi bon se plaindre ? Elle ajouta "Je peux pas te garantir que l’expérience sera très agréable, c’est au petit-bonheur la chance." Son ton était aussi monocorde que possible quand ses yeux trouvèrent ceux du jeune homme qu’elle regarda sans vraiment le voir. Elle savait parfaitement qu’elle ne lui devait aucune explication, mais quitte à faire de ce moment une bonne expérience pour tout le monde, elle préférait qu’il soit mis au parfum plutôt qu’il peine à attirer l’attention de sa grand-mère quand il viendrait faire cette séance-photo.

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

Est-ce que les piques de Jo vont vraiment finir par t'atteindre ? Non, bien entendu que non, elle possède peut-être un répertoire d'insultes illimité, mais tu as un ego aussi gros que ton tour de bras (rien que cela) et tu comprends que la jeune femme soit un peu plus sur sa garde quand le sujet de la famille est concerné. Si tu avais demandé de la prendre en photos elle, la brune aurait sûrement joué les divas avant de te rappeler que tu n'es pas assez doué pour immortaliser quelqu'un comme elle (tu peux même entendre son petit ton hautain et satisfaisant rien qu'en y pensant) mais quand Ava est concernée, c'est complètement différent. Tu as envie de poser un milliard de question à l'ainé des Carter et également à sa petite-fille, qui se retrouve au beau milieu de sa vie, un peu à protéger sa grand-mère de tout le monde, Jo t'a déjà dit qu'elle avait des frères, mais tu ne les as jamais vus en ville, ni ses parents à elle d'ailleurs. Tu imagines une rupture brutale et Jo qui se réfugie chez la seule personne qui croit en elle : sa grand-mère, c'est sûrement un peu cliché, mais ce n'est pas comme si c'était le genre de Jo de parler ou de se confier. Là encore, tu comprends, ses petites piques, c'est pour se protéger, comme celle qu'elle vient de te balancer à propos de ton passé de photographe. Qui t'arrache tout de même un léger sourire, avant que tu ne croises les bras sur ta poitrine avant de répliquer. "Tu veux entendre tous les détails sordides de ma vie de célibataire ? T'es certaine ? Tu veux vraiment faire disparaitre le mystère et les étincelles entre nous, Jo-se-phine ?" Déjà, il vous faudrait plus d'une après-midi pour en parler, tu es plus âgé qu'elle et pour rester dans le poli et le politiquement correct, on peut dire que tu as bien vécu.
Au moins, tu n'as forcé personne, tu as été bien élevé et tu as peut-être des tares mais celle d'imposer ta présence ou celle de ton objectif... non, cela n'a jamais fait partie de ta liste d'erreurs et ça ne compte pas commencer maintenant, c'est bien pour cela, dans un sens, que tu demandes la permission à Jo. Qui te rappelle qu'elle n'a pas encore dire oui et tu hoches la tête, la suivant du regard dans le petit studio photo, écoutant la brune. "Je le sais et c'est pour cela que je voulais voir avec toi, je ne suis pas aussi chiant que tu sembles le penser, je sais ce que non veut dire et le but n’est pas de te forcer la main. La tienne ou la sienne d'ailleurs." Que tu réponds lentement quand elle te rappelle que sa grand-mère n'est pas en pleine forme, et puis, contrairement à elle, tu ne vis pas la situation, pour toi, Ava est la grand-mère pleine de vie qui n'a pas hésité à t'accueillir sous son toit avec du café et prête à t'expliquer comment discerner le vrai du faux. On pourrait t'accuser d'un peu trop t'accrocher à cinq minutes de conversation, cela ne serait pas faux du tout, ou même de te projeter un peu parce que ta relation avec tes propres grands parents a toujours été houleuse. Et même plus que compliquée, là encore, tu serais le premier d'accord, cependant ce n'est pas à propos de toi là tout de suite et tu perds un peu de ton sourire habituel quand Jo met des mots sur la faiblesse de sa grand-mère. Tu hoches de nouveau la tête, marmonnant un simple : "Okay, je t'entends et je comprends..." touché par l'honnêteté de la jeune femme.
Elle n'était vraiment pas obligée de te le dire, et parce que tu réalises bien que cela vient avec des enjeux et un quotidien compliqué. Comment est-ce que Jo fait pour tenir pendant les mauvais jours justement et être là pour Ava ? Et est-ce que cette responsabilité devrait être uniquement la sienne ou celle de professionnels bien payés et entrainés ? Tu sais que tu n'auras pas de réponses à ses deux interrogations silencieuses, tout comme tu sais que la jeune femme t'enverra sur la touche si tu tentes de la rassurer ou même pire encore, de la prendre dans tes bras ou quelque chose du genre pour lui faire comprendre qu'elle n'est pas seule. Non, si les rôles étaient inversés, tu sais que tu ne voudrais pas de ce genre de sentiment, la vie est dure, maintenant tu sais, hors de question de traiter Jo différemment, ce serait encore plus hypocrite. "Le but n'est vraiment pas que l'expérience soit mauvaise pour elle et douloureuse pour toi, du tout." Que tu dis dans un premier temps, tu es plus que sincère pour le coup, cherchant une solution qui pourrait convenir à tout le monde et rassurer Jo au passage.
"Tout ce que je peux te proposer c'est qu'on peut lui dire que je viens pour le café, ce qui serait vrai, et je peux venir avec un de mes appareils et on voit comment ça se passe... Elle avait juste l'air très fière la dernière fois en parlant de son boulot, c'est juste cela que j'aimerais capturer." Tu n'es pas doué pour expliciter ton processus tu t'en rends compte dans la seconde, c'est mettre des mots sur quelque chose qui te vient plus que naturellement et que tu fais depuis des années. "Qu'est-ce que tu en penses ?"

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

Elle laissa un rire enroué lui échapper, sa tête s’inclinant sur le côté pour marquer son insistance quand l’autre se crut malin de rétorquer. Jo arqua un sourcil en le fixant d’un air de lui demander t’as cru que j’étais née de la dernière averse, du gland,  ou c’est comment "Please. Y a jamais eu de mystère entre nous. Je te rappelle que je t’ai trouvé ta dernière grognasse à tringler avant de rencontrer l’élue ou whatever." L’une des dernières en tout cas, l’élue en question rentrant dans la case des grognasses selon la définition sans appel de Josephine Ophelia. Un jour, elle penserait à se passer la bouche à l’eau de javel pour chasser tous les relents de grossièretés qui rendait sa langue rugueuse comme du papier de verre. Mais pour l’heure, elle avait d’autres chats à fouetter que d’être désolée de ne se comporter comme une vulgaire mêle-tout, à toujours s’attarder sur le détail qui faisait tache pour mieux s’en servir comme d’une arme et se retrouver victorieuse par la force des choses.
Ce n’était jamais à la loyale, mais qui se foutait vraiment de ce genre de choses ? Tant qu’elle avait la satisfaction de pouvoir se tirer d’ici en ayant remporté toutes ses parties de joutes, elle ne se soucierait pas d’avoir heurté l’égo surdimensionné du photographe. Tournée de nouveau vers lui, elle prit une mine faussement triste, puis impressionnée, une main posée à plat sur le haut de sa poitrine découverte, quand il lui déroula son discours sur le consentement. Son menton se rentra momentanément pour qu’elle puisse le jauger comme s’il elle venait de rencontrer le Pape  dans un bar et sa bouche s’ouvrit un peu pour expirer un murmure épaté "Wouah, un homme qui sait ce que c’est que le consentement. Tu veux une médaille, une bouteille de champ’ à sabrer avec ta copine peut-être ?" Ce genre d’attitude, c’était ce qui pourrait la forcer à prendre ses jambes à son cou ; se coltiner les élans woke du genre masculin, comme si pencher vers le commun accord et faire de l’unanimité une valeur digne à respecter ne faisait pas partie des bases du savoir-vivre. Grand bien lui faisait de nE pAs êTrE cOmMe LeS aUtReS, ça voulait dire qu’il avait reçu une éducation à la hauteur de ce qu’elle était en droit d’exiger pour Nana… encore qu’au fond, elle en doutait plus qu’un peu : elle l’avait vu à l’œuvre,  le gaillard. Et on ne pouvait pas dire qu’il était bien différent de ses compères malgré les grands airs qu’il cherchait à se donner encore une fois.

Nana, c’était elle le vrai sujet de cette visite impromptue. Elle ne pouvait pas se permettre d’être sarcastique quand ça la concernait, alors elle rongea son humeur narquoise quand elle en vint au fond du problème, et que sentant un ange passer après avoir annoncé sa pathologie au jeune homme, elle le pointa d’un doigt menaçant "Ah nan, hein. Commence pas à avoir pitié ou à t’imaginer que ça va me rendre plus douce de te mettre dans la confidence. Te mets pas à chialer sur mon sort, j’ai choisi d’être ici." Ici, sous-entendu, avec sa grand-mère, dans sa jolie maison qu’elle aimait sans doute autant qu’elle, et qui recelait de trésors ramenés de la grande vie qu’elle avait menée en Amérique. Il ne fallait pas que Musclor en face d’elle face éclater sa sensibilité en se désolant des faits, ça lui donnerait tout bonnement envie de le laisser à ses photos en studio et de tourner les talons pour aller voir si l’herbe était plus verte ailleurs ; pas de pitié, c’était un deal qu’elle le savait capable de respecter, de fait elle ne s’appesantit pas malgré la volonté du jeune homme de faire tourner les choses en psycho-drame — elle n’avait pas besoin de ça, merci beaucoup "Ce sera difficile pour personne tant que je serai là, et c’est pas non plus la peine de la regarder différemment parce que tu sais. Ça reste une vieille dame respectable, elle a pas besoin qu’on la traite comme un bébé." En lui parlant doucement, en la prenant de haut, en la diminuant avant l’heure… ce n’était pas lui rendre service que de se comporter de cette façon avec elle. Jo avait ses méthodes, elle consentirait peut-être à les partager avec le jeune homme s’il arrêtait de la regarder comme si elle venait de lui annoncer qu’elle avait un troisième bras qui lui sortait de là où vous pensez.
Elle se redressa de toute sa petitesse, faisant taper son pied contre le sol propre du studio quand il lui exposa son idée. Décroisant les bras, elle lui dit "J’aime bien l’idée de la laisser prendre les rênes, de pas la forcer à suivre un plan précis… elle s’y tiendrait pas de toute façon, vaut mieux partir sur de l’improvisation." Elle avait l’impression de mettre sur pieds le spectacle de l’année, et c’est peut-être pour ça que cette fois-là, elle se montra moins réfractaire à endosser le rôle qu’elle tenait depuis des années maintenant, quand la porte était fermée sur elle et sur Ava : celui de l’adulte responsable "Ça pourrait le faire." qu’elle lui fit après un instant, haussant une nouvelle fois les épaules en se mordillant la lèvre inférieure, le regard vrillant de quelques centimètres pour ajouter, les sourcils légèrement froncés "Je ferai en sorte qu’elle soit à son avantage le jour où tu te pointeras, j’ai pas envie que le résultat soit pas à la hauteur de la classe qu’elle a toujours eue. C’est pas n’importe qui, ma grand-mère." Elle tenait à la souligner. C’était peut-être puéril sur le fond, mais sur le forme, c’était une vérité qu’il avait besoin de connaître pour ne pas faire des photos de kermesse de la vieille femme ; elle méritait le meilleur, point final.

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

"Tu penses que je n'ai pas déjà des médailles chez moi, oh Jo, t'es plus naïve que ce que je ne pensais." Que tu réponds dans un battement de sourcils parce qu'elle n'est pas si maligne qu'elle le croit et tu ne te feras pas l'affront de défendre d'autres hommes devant elle. Tu le sais que c'est une bataille perdue et tu ne vas pas t'excuser non plus d'avoir eu un passé, ou d'avoir été un homme célibataire avec beaucoup, beaucoup, de temps à perdre. Cela a été marrant pendant un temps, de ne pas s'attarder sur qui que ce soit, de passer de femmes en femmes parce que tu pouvais le faire et parce que tu ne voulais pas, tu refusais même catégoriquement de t'attacher. C'est complètement différent aujourd'hui, tu ne sais pas vraiment ce qui as vraiment changé, toi sûrement, mais maintenant tu as bien du mal à concevoir quoi que ce soit sans Yasmine. Tu supposes que c'est une bonne chose, vous êtes un couple après tout et il serait dommage de voir qu'être avec la brune est un frein à tes envies ou à ton quotidien, c'est même tout le contraire. Si ce n'était pas pour Yasmine, Jo et toi, vous ne seriez pas en train d'avoir cette conversation dans ce studio, Yasmine croit en toi mieux que personne, mieux que toi et tu lui dois beaucoup, en plus de la présence constante et rassurante qu'elle est au jour le jour.
Tu sais que Jo en fait de même avec sa grand-mère, sans rien attendre en retour et la jeune femme est déjà sur la défensive, alors que tu n'as rien dit de si incriminant que cela. Et non, ce n'était pas de la pitié dans ta voix ou dans ton regard, tu ne te permettrais pas d'être aussi condescendant avec elle, jamais même. Tu ne sais tout simplement pas ce que cela fait d'être dans une telle situation, de veiller sur quelqu'un de cette manière-là, et tu ne pourras jamais l'imaginer et malgré tes meilleurs efforts. "Je retiens mes larmes si tu retiens tes poings, je t'ai déjà vue à l'œuvre donc hein..." Tes épaules ne lui disent pas merci, que tu conclus d'un simple regard et tu écoutes Jo t'énoncer ce qu'il ne faut surtout pas faire en présence d'Ava. Elle croit sans doute que tu n'es qu'un beau-parleur qui va mettre les pieds dans le plat, tu es capable de beaucoup déjà, merci bien, que tu te dis intérieurement, et si Jo n'a pas encore compris que ce n'est qu'une façade très bien travaillée et pas toute ta personnalité eh bien... tant pis pour elle, pas vrai ? Oui, que tu te dis, avant de défendre ton argument d'un : "Ce que je ne ferais pas." parce que tu ne comptes pas traiter Ava comme si elle était quelqu'un de particulièrement fragile.
Le peu que tu as vu d'elle indique le contraire, tout le contraire même et Jo n'a aucun doute à se faire sur ce sujet. Ton idée semble lui plaire, tu la laisses arriver à ses propres conclusions et te confirmer qu'il s'agit de la meilleure approche. Tu hoches la tête, comme pour la rassurer. "On peut improviser alors, ça me va." Laisser Ava décider elle-même si la séance photo est une bonne idée et quel serait le meilleur endroit de leur maison pour le faire. "Okay, tu as mon numéro, il suffit juste de me prévenir, ça peut totalement être au dernier moment et je rappliquerais, si ça devient un peu trop, on arrête et voilà." Pas de soucis à se faire, pas d'inquiétudes et Jo pourra te mettre à la porte si elle le souhaite et pour reprendre le contrôle de la situation comme elle aime si bien le faire.
"Aucune pression à avoir." Que tu dis en posant un regard sur la jeune femme qui en dit long, tu voudrais également lui dire qu'elle a beaucoup de courage de faire cela et lui demander comment elle vit tout cela au quotidien. Ce serait dépasser une limite entre toi et Jo, tu le sais, est-ce que vous êtes amis ? Bonne question, elle est plus une petite sœur que tu as récupérée au passage, sans vraiment le demander et sans vraiment t'en débarrasser, tu serais bien embêté si tu venais à apprendre qu'il lui était arrivé quelque chose et oui, tu te ferais une joie d'aller menacer toute personne qui lui aurait joué un mauvais tour. Ta thérapeute te dirait certainement que tu projettes et que tu devrais arrêter d'agrandir ta famille de substitution parce que tu ne peux pas sauver tout le monde mais, Jo ne te parait pas comme quelqu'un qui a besoin d'un sauveur. Elle a besoin d'un public, pour pouvoir continuer de faire la diva et sûrement se sentir mieux en remettant une ou deux personnes à sa place, mais il y a plus que cela, tu l'avais déjà ressenti lors de vos précédents échanges et encore plus en rencontrant Ava.
Et dans le fond oui, tu ne sais pas pourquoi, mais cela t'aurait ennuyé si elle n'était qu'une gamine capricieuse et rien d'autre. "Maintenant l'autre question importante c'est..." Un autre sourire se dessine sur ton visage, parce que tu es bien déterminé à alléger l'atmosphère et la tension que tu peux sentir émaner d'elle. Le sujet ne doit pas être facile à aborder dans tous les cas. "Est-ce que tu vas me laisser te prendre en photos ou c'est uniquement réservé à Megan ? Je ne veux pas me vanter mais, je suis doué. Et puis... il faut bien que tu saches si ça va être assez bien pour Ava, non ?"

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

"Ouais, tu dis ça maintenant, mais vous êtes tous pareils." qu’elle lui dit, toujours sur la défensive, ses bras se croisant sur sa poitrine, à le jauger de bas en haut parce qu’elle pouvait le faire sans qu’il ne s’imagine qu’elle le reluquait "A minauder et à chialer quand vous pensez à ce que ça veut dire vraiment pour elle, et par extension, pour moi." Elle ne marqua pas de pause, ajoutant sur le même ton, les sourcils retrouvant leur ligne originelle et donnant à son visage une expression dure "On est pas une œuvre de charité, t’as intérêt de t’en rappeler." Les bons sentiments des autres, c’était un peu comme la galle ; elle préférait en rester loin pour ne pas se les prendre dans la gueule et tergiverser sur le meilleur moyen de s’en débarrasser sans plus ou moins de séquelle.
Elle en connaissait des tas, des gens qui prétendaient être assez forts pour ne pas se laisser attendrir par la maladie de sa grand-mère et pas l’idée que, ouais, c’était injuste qu’elle en soit l’une des nombreuses victimes. Ils finissaient tous par chialer en catimini, à la prendre dans leurs bras pour lui demander comment elle faisait pour gérer, comment elle faisait pour supporter. Elle n’avait pas le temps de se poser la question, elle continuait de vivre en traitant avec l’inévitable parce que, comme elle l’avait dit au jeune homme, elle l’avait choisi. Jo aurait pu continuer sa vie de strass et de paillettes, s’obstiner pour qu’on la reconnaisse et qu’on l’adule, devenir une idole intouchable, mais elle avait préféré mettre de côté tout ça pour gagner une autre forme de compétition.

Chacun la voyait comme il l’entendait, et ce n’était pas faux qu’elle avait un putain de caractère, en attendant, elle passait ses journées à s’occuper d’une cause qui valait la peine en pleurnichant assez rarement sur sa vie pour qu’on la prenne en pitié.
Ce qu’elle ne tenait pas que le grand costaud qu’elle avait face à elle fasse en commençant à lui poser des questions, à souligner que ça devait être atroce, que ça devait être lourd. Ça l’était, ce n’était pas la peine d’en faire toute une histoire et d’autoriser quiconque à la voir autrement que ce qu’elle voulait être "J’ai une vie quand même. Ça doit être de l’impro pour elle, mais on peut voir les détails en amont si ça t’embêtes pas." Un minimum d’organisation pour se préparer mentalement de son côté, ce n’était pas un caprice, c’était une nécessité qu’elle développa avec une bonne dose de sarcasmes "Je me la donne pas en attendant que des clients poussent la porte, moi. J’ai une vie, des horaires de nuit, et j’ai pas encore trouvé le moyen de vivre sans dormir." Si elle pouvait échapper à ce rituel, elle s’en réjouirait. Mais à défaut d’être autre chose qu’humaine, se reposer faisait partie du contrat de la vie en ce bas monde.
Elle le regarda de là où elle se trouvait, ne dérogeant pas à cette manie qu’elle avait d’affronter les yeux des autres sans les craindre "Est-ce que j’ai l’air de quelqu’un qui se met la pression ? Arrête ton char, si t’as quelque chose à me dire, fais-le au lieu de te cacher derrière des phrases toutes faites." Le regard qu’il lui accorda, lui aussi, il était appuyé, mais d’une façon différente qui lui fit rouler les siens. Cette œillade, elle était censée quoi, lui transmettre quelque chose ? Jo n’avait jamais été extralucide ; elle ne lisait pas dans les pensées, elle ne sondait pas les esprits. Elle préférait le factuel, alors ce serait sans doute un mauvais moment à passer, seulement s’il avait un truc à lui dire, c’était le seul moment où elle l’autoriserait à le faire. Elle leva une main devant elle, paume ouverte, doigts ramassant la masse implicite du message qu’il tentait de lui faire passer "C’est de ça que je parle quand je dis que vous êtes tous pareils." Comme si tout devait obligatoirement finir en psycho-drame. Venant de la part de la drama queen de la ville, ça voulait dire quelque chose quand elle ne supportait pas ce genre d’atmosphère.
Elle fit un pas un arrière, se redressant doucement quand il l’arrêta avec une nouvelle question. Cette fois-là, elle laissa un sourire lui échapper, et il était aussi goguenard qu’il était sincère dans le fond "Megan me soudoie avec des spas et des sacs de luxe." qu’elle commença en penchant la tête sur le côté. Ce n’était pas vrai, si Megan avait accès à toute la photogénie de sa bonne copine, c’était avant tout parce qu’elle savait y faire, et que Jo n’avait jamais douté qu’elle puisse rendre justice à cette beauté qui transpirait du moindre pore de sa peau. Les arguments qu’il lui donnaient étaient judicieux cependant, elle savait aussi qu’ils n’étaient qu’une excuse minable pour faire quelque chose d’elle. Pour savoir de quoi son talent était fait, elle n’avait qu’à traverser le studio-photo et regarder les clichés exposés. Elle garda cette joute-ci pour plus tard, sa joue s’arrondissant sous le sourire en biais qu’elle lui adressa quand, levant un sourcil en accent circonflexe, gardant l’avantage qu’elle avant indéniablement, elle termina par lui demander, en sachant de toute façon qu’elle accepterait de se laisser photographier, les flashs des appareils-photos lui manquant assez pour ne pas repousser l’opportunité de faire sa Mariah Carey "Toi, t’as quoi à me proposer pour que j’accepte ?" Elle ne voulait rien, elle n’attendait rien de sa part. Mais elle ne savait pas s’accommoder de la simplicité d’une réponse positive quand elle pouvait en faire un petit jeu, Josephine.

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

Tu pensais très sincèrement que Jo ferait durer les négociations à propos d'Ava plus longemps. Après tout, toi, tu débarques dans leur vie, comme un cheveux sur la soupe, avec tes questions et tes appareils photos. Elle en aurait eu le droit, tu aurais compris, tu aurais accueilli ses piques avec un sourire aux lèvres, prêt à exposer tes arguments un à un et à gagner ses faveurs. Mais, pour la première fois il te semble, Jo est plus raisonnable que ce que tu pensais et tu te dis que ça doit être toi le problème au final, parce que tu aurais voulu que Jo te prenne la tête encore plus que cela. Oui, il y a définitivement quelque chose qui cloche chez toi que tu penses aussitôt, écoutant la jeune brune te dire qu'elle a une vie et que tu ne peux pas débarquer comme cela chez elle et taper à sa porte. Ce que tu comprends, et tu as même un sourire quand elle t'accuse d'être flemmard et de te tourner les pouces, elle a fait mieux niveau insulte, vraiment, ça ne mérite même pas un 10/20. "T'inquiète, on s'arrangera entre nous pour trouver une date, j'ai plus de temps libre après le boulot, donc après dix sept heures, une fois que je termine au Brisbane Times, je peux faire un crochet par chez toi un de ces quatres..." Il te suffira juste de prévenir Yasmine en avance, tu veux toujours poser des questions à ta partenaire sur l'affliction d'Ava, mais tu t'efforceras de faire cela avec un certain tact et sans trop en révéler sur Jo et sa grand-mère. Après tout, elle vient juste de te dire de ne pas les traiter différemment alors tu vas le faire, ce sont des clientes et tu dois respecter leur vie privée, cela ne change pas à tes yeux.
Et ce même si tu as rencontré Jo dans des circonstances que l'on qualifiera de... peu ordinaires ? C'est l'adjectif qui correspond sans doute le mieux que tu te dis une seconde plus tard. "Oui, je n'oublie pas ta vie sulfureuse de serveuse, chanteuse à mi temps et briseuse de coeurs à temps plein... je n'oublie pas." Est-ce que tu as oublié des activités à sa liste et à l'emploi du temps de Jo ? Sûrement en réalité, mais ce n'est pas comme si la brune était du genre à partager tous ses secrets, ou qu'elle devait te rendre des comptes. Dans un sens, elle gagne plus ton respect comme cela et il est clair à tes yeux que Jo a beaucoup plus de ressources que certains de son âge et qu'elle est équipée pour tout ce que la vie va mettre sur son chemin. Tu as bien dû mal à l'imaginer flancher ou même à courber l'échine, elle est plus du genre à soigner ses blessures seule, pour se relever et venir faire ce qu'elle a à faire, quand elle doit le faire. Non, pas que tu vas le dire à voix haute et la féliciter, bien sûr que non. "Arrête sinon je vais finir par me vexer, hmm?" Que tu lâches avec une main sur le cœur, avec une expression qui se veut chagrinée, cela ne dure qu'une seconde ou deux avant que tu ne retrouves ton sourire joueur. Jo est en train de sourire aussi, comme si tu venais de commettre une grosse erreur.
Et la suite de son discours te fait réaliser, justement ton erreur et un léger rire quitte tes lèvres et tu recules à ton tour, croisant les bras sur ta poitrine. "Oh, chérie, tu te rends bien compte que c'est le photographe qui se fait payer d'ordinaire, pas l'inverse ?" Ou elle pourrait juste répondre oui, cependant, les choses ne sont jamais aussi simples avec Jo et que tu sais que tu vas devoir marchander, encore une fois... juste pour qu'elle te laisse la prendre en photos. C'est un peu ridicule quand on y pense bien mais il semble que Jo sait exactement sur quel bouton appuyer pour te donner envie de répliquer et surtout, te donner envie d'avoir le dernier mot, ce n'est pas très mature, certes, mais ce n'était pas comme si tu avais à lui prouver quoi que ce soit. "Ne compte pas sur moi pour te payer un week-end, toutes dépenses comprises hors de Brisbane, dans un endroit qui a une piscine et un spa, hein. Et avant que tu ne montes sur tes grands chevaux, je peux me le permettre, moi... tu n'es juste pas à celle à qui je pense quand j'imagine de genre de folies." Définitivement la mauvaise brune, et bien entendu que tu parles de Yasmine, contrairement à ce que Jo semble imaginer, il n'y a que Yasmine dans ta vie de cette façon-là et tu n'as pas une longue liste de prétendantes prêtes à prendre la place occupée par la Khadji. Si certains hommes le font, tant mieux pour eux, ce n'est pas trop ce que tu recherches.
Et tenter d'acheter les faveurs de Jo comme cela, n'est pas non plus dans tes plans immédiats. "Mais." Un autre sourire se dessine sur tes lèvres et tu tentes une autre approche: "... c'est surtout pour toi, tu ne veux pas des photos pour faire rager tes followers ? Ou l'idiot du moment qui croit avoir une chance avec toi ?" Parce qu'il doit forcément y avoir un idiot du moment, qui va perdre son temps et sa raison, à essayer de déchiffrer Jo et d'attirer son attention, tu en es persuadé. "Allez... juste quinze minutes... Après tu peux partir d'ici en claquant la porte si tu veux."

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

Il avait son numéro, non ? Il pourrait lui dérouler son programme quand ça lui chanterait sans qu’elle ne se sente obligée de supporter sa belle gueule, à se comporter comme le roi du monde juste parce qu’il avait des abdos en relief et trois poils de barbe sur la tronche.
"Je t’ai pas demandé de me raconter ta vie non plus, y a des choses que j’ai pas envie de savoir et ça comporte ton emploi du temps." Qu’elle était agaçante, à souffler le chaud et le froid, mais ça donnait du pep’s à ses échanges, et au moins, on ne savait jamais ce qui allait se passer quand on se retrouvait en sa présence. Elle se rassurait de cette façon, ça la rendait fun à côtoyer de se dire qu’elle était capable du meilleur comme du pire — surtout du pire, comme semblait le penser le jeune homme qui lui dépeignait une vie de briseuse de cœur, ce à quoi elle ne répondit même pas parce que franchement, à quoi ça servait de remettre dix centimes dans la machine quand il n’avait pas tort ?

Et puis sur le moment, elle avait autre chose à penser que préserver son image et sa réputation, dont elle se fichait comme de sa première culotte, mais c’était un autre sujet "Et toi, tu te rends bien compte que j’ai passé huit mois à concourir pour une franchise internationale qui s’est soldée par un mois de compétition en prime-time ? Je suis l’entrée la plus cotée de ton carnet d’adresses, chéri." Il se prenait pour qui, Edgerton Gros Biscottos Price ? De nouveau, elle le toisa avec l’air de ceux qui ont été moulés dans de l’or et du diamant "Rien que de te parler là, ça fait grimper ta côte." Il posterait une photo d’elle sur Instagram, et il verrait son nombre de followers augmenter en l’espace de quelques secondes, pour passer de bots de chaudasses et de désespérés de le voir se pavaner à poils après ses séances de gym à une fanbase avide de savoir ce que devenait vraiment celle qu’ils avaient suivies à la télévision étant donné qu’elle avait quasiment disparues des radars, il y avait des années. Elle n’avait pas inventée la modestie, c’était un fait qu’il pouvait bien comprendre, n’étant pas doté d’autre chose que de l’amour propre. Aussi, elle arqua un sourcil, ses yeux se relevant pour affronter les siens quand elle ajouta "Ah, ça te la coupe, hein. Tu veux connaître ma place au classement final ? T’as qu’à taper mon nom sur Google, ça te fera redescendre d’un étage." Connard, qu’elle était tentée d’ajouter, mais il y avait des moments où utiliser des insultes comme ponctuation n’était pas nécessaire tant son ton était cassant.
Elle croisa les bras sur sa poitrine, le regardant lui répondre avec une mine aussi incurieuse que soulée par un tout petit détail "Tu sais que t’es pas obligée de parler d’elle chaque fois que t’ouvres la bouche ?" De sa meuf, tout le monde avait saisi qu’il était maqué, il n’avait pas besoin d’en faire une garantie chaque fois qu’il ne savait pas quoi dire pour se faire mousser "Pardon de pas dilapider mon argent pour mieux passer pour un canard. Fais gaffe, si ça se trouve, elle est avec toi juste parce que c’est facile de te faire raquer." Ce serait bien fait pour sa gueule, après avoir pris les femmes pour des gadgets, ça la ferait bien marrer que sa copine était seulement là pour lui faire regretter de penser avec autre chose que son cerveau "Tu sais, mon petit chat…" Mon petit chat, ça sentait l’ironie à plein nez, et elle ne s’en cacha pas, s’approchant de lui pour mieux faire pianoter ses doigts sur sa poitrine quand elle ajouta, levant la tête pour ne voir que son menton barbu, beaucoup trop petite pour observer son visage à cette distance "C’est pas parce que toi, t’es dépendant affectif, et que t’as besoin qu’on te tienne la main pour vivre, que c’est le cas pour tout le monde. Le célibat, c’est un luxe qui est pas à ta portée, mais que moi, je tiens à chérir aussi longtemps qu’il y aura des piles dans Pablo." Il savait qui était Pablo. Le grand sourire factice qu’elle lui renvoya à l’instant où elle fit un pas en arrière, il lui servit juste à ménager son effet quand elle finit par lui répondre, plus taquine qu’autre chose "Quinze minutes, c’est ton record personnel ?" Le haha qu’elle laissa échapper, il était aussi surjoué que le tour qu’elle fit sur elle-même pour, un doigt sur le coeur de sa bouche, ajouter  sur le ton trainant de la taquinerie "Laisse-moi y réfléchir, hmm…" Elle alla vaquer à droite et à gauche de la pièce, posant ses yeux sur les clichés exposés avant de le pointer du doigt, et de lui dire "C’est parce que j’ai rien de mieux à faire." Et aussi parce qu’elle avait assez joué, et que l’éventualité de se faire shooter la rendait extatique dans le fond ; encore qu’elle le cachait particulièrement bien, faisant retomber son bras pour lui dire, presque en lui aboyant dessus, ses mains claquant l’une contre l’autre pour le motiver à se bouger "Yo, j’ai pas toute la journée, magne-toi le train."

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

Conciliante ? Jo ne l'est absolument pas, tu comprends bien que pour la jeune fille en face de toi, il suffit juste d'avoir le dernier mot et de te montrer à quel point elle est importante et bien mieux que toi. Ce qui doit être fatiguant à la longue, maintenant que tu y penses, même toi qui joues également dans la catégorie des arrogants, tu dois admettre que la plupart du temps ce n'est que du vent. Tu sais ce que tu vaux dans le fond, tu n'as pas besoin de le crier sur tous les toits, tous les gens qui sont dans ta vie sont là pour de très bonnes raisons, du moins, c'est ce que tu estimes, et si cela ne leur convient pas, tu peux tout à fait leur montrer la porte, tu l'as déjà fait par le passé. C'est différent pour Jo, la brune veut te montrer qu'elle est bien supérieure et grand bien lui fasse, cela ne t'intéresse pas vraiment, elle n'accepte pas le petit nom doux que tu lui donnes et quand elle s'explicite un peu plus et te parle de son passé à elle, tu ne peux que froncer les sourcils. Parce que Jo sera déçue de t'apprendre que tu t'en fiches, et qu'elle n'a pas un entourage qui la suit H24, ni des paparazzi là pour immortaliser le moindre de ses faits et gestes, pour le moment, tu es le seul photographe en train de frapper à sa porte. Avec toute la délicatesse dont tu fais preuve d'habitude certes, mais c'est bien elle qui ne voulait pas de traitement de faveur il y a des secondes de cela, non ?
Quand Jo remarque ton silence, si peu caractéristique il faut l'avouer, tu finis par te reprendre, passant une main sur ta barbe de plusieurs jours avant de reprendre. "Non si j'ai arrêté de parler, c'est pour que tu me dises par quoi je dois être impressionné.... T'es passé sur le petit écran et alors ?" Tu ne dis même pas cela sur un ton sarcastique, non, véritablement, tu attends la suite de sa phrase comme on attend la suite d'une plaisanterie, tu attends la chute, le moment où elle te dit que cela justifie amplement son comportement de petite gamine ingrate et sa personnalité de diva... Parce qu'on lui a dit qu'elle était talentueuse, elle se rend bien compte que des femmes belles, jeunes et talentueuses, il y en a plein les rues de Brisbane et que si elle se repose juste cela, elle n'ira pas très loin. Tu pourrais lui dire, quelqu'un comme Camille qui a autant de répondant qu'elle et beaucoup, beaucoup plus envie de prouver au monde ce qu'elle vaut, pourrait le lui dire sans aucun problème. "T'as vu la télé récemment ? N'importe quel idiot peut avoir son moment de gloire, donc sorry not sorry, il n'y a pas vraiment de quoi se vanter." Et cela vient de la part d'une personne qui se moque ouvertement des participants de compétitions, d'émissions de télé-réalité et tout ce genre de tremplins médiatiques, bien installé sur son canapé et généralement entouré de sa partenaire. Est-ce que cela fait de toi une meilleure personne que Jo ? Non, grand dieu non, cependant, tu te rends compte que si c'est le plus gros de l'argument de Josephine Carter, elle a ses priorités à revoir, ou alors elle ne peut pas, justement, à cause d'Ava. Tu as des éléments en plus pour le puzzle, ce n'est pas le but de l'opération de déchiffrer Jo et de toute façon, elle est déjà partie dans une autre tirade.
"Et je suppose que toi au contraire, tu pourrais écrire des volumes et des volumes sur le célibat ? Je ne critique pas, je suis passé par cette case aussi donc..." Donc tu ne vas pas t'excuser pour parler de Yasmine, c'est sûrement irritant, mais tu es heureux et elle sait où se trouve la porte si elle veut s'éviter ce sujet si inconfortable, vraiment, c'est elle qui s'est déplacée, tout ça pour te dire qu'elle avait mieux à faire ? Jo est un peu ridicule, tu espères qu'elle s'en rend bien compte, si elle cherche à t'intimider comme le sont probablement certains devant elle, ça ne prend pas. "Je croyais que je devais arrêter de parler de ma copine ?" Que tu répliques presque automatiquement quand elle te parle de record et tu roules des yeux, ne cherchant même pas à te cacher quand elle fait mine de réfléchir. Elle va dire oui, tu le sais, tu ne sais pas comment tu en es persuadé, mais encore une fois, tout son petit manège c'est pour se donner de l'importance et l'impression d'être une reine. Encore une fois ? Ridicule. "C’est parce que je n’ai rien de mieux à faire." Tu roules encore des yeux, juste devant elle, avant de soupirer, parce que tu devrais lui dire de partir en réalité, revenir en s'excusant mais à quoi bon ?
"... t'es fatigante, tu le sais...? mais allez, suis-moi." Fatigante est un euphémisme que ne peut s'empêcher de marmonner une petite voix dans ta tête alors que tu lui fais signe de te suivre, loin du comptoir et dans le studio spacieux et dernièrement utilisé par Megan. Tu mets le tabouret devant la bâche blanche et anticipant déjà que Jo te fasse remarquer que c'est cliché à souhait, tu prends les devants."Juste.... Laisse-moi tout installer avant de critiquer." Qu'elle te laisse prendre ta photo avant de proclamer que tu n'as pas de talent... Tu fais coulisser l'autre partie de la bâche pour qu'elle se retrouve assise devant un fond noir, avant d'aller éteindre les lumières environnantes pour vous plonger dans une semi-pénombre et tu vas même plus loin que cela, tirant les rideaux de la vitrine pour vous priver de la lumière naturelle du soleil. Une fois que cela est fait, tu attrapes un projecteur pour l'allumer et venir le placer à côté de Jo, la lumière est sûrement un peu trop directe, mais c'est voulu et tu ajustes l'intensité pour ne pas trop abimer ton modèle. Tu es content avec ses paramètres là, tu jettes un coup d'œil à tout pendant quelques seconde avant de hocher la tête et d'aller attraper un de tes appareils photo, tu sais déjà lequel utiliser et bientôt, Jo apparait dans ton objectif. "Regarde-moi." Un simple ordre tandis que tu te rapproches d'elle, près mais pas trop près, il y a bien deux bon mètres de distance entre vous deux et tu prends deux clichés rapides, face à elle, avant de commencer à te déplacer. Généralement, tu poses des questions à ceux qui sont de l'autre côté, pour avoir différentes réactions et quelque chose de plus réel, une conversation aide, mais tu te dis que ça ne prendrait pas avec Jo. "Je ne t'ennuie pas avec les détails de l'appareil que j'utilise je suppose ?"

insp:

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

"Et alors. C’est la répartie des jaloux, tu le sais ça ?" Absolument pas, mais il fallait bien garder la face, et puis ce qu’en disait monsieur Biscottos Dingos, c’était bien le cadet de ses soucis au fond. Il y en avait d’autres qui seraient impressionnés, d’autres qui sauteraient sur l’occasion pour faire d’elle leur jouet du moment avant de se rendre compte que c’était eux, les jouets, qu’elle jetterait sans vergogne parce qu’elle avait la capacité de concentration d’une gamine de cinq ans, qui se lassait de tout en un battement de cils, et qui passait au prochain sans conviction, si ce n’était celle de tout gâcher. Il pouvait bien jouer les blasés, il savait au moins que si elle ne prêtait pas son image à n’importe qui, c’était pour de bonnes raisons que sa mauvaise foi pouvait bien enterrer si ça lui permettait de paraître moins con. Restait que si elle n’avait rien fait de sa carrière, c’était  sur de bons prétextes qu’elle n’avait pas envie d’expliciter face au jeune homme qui continuait d’agir comme si rien ne le touchait vraiment, à part peut-être le sort de la nana qu’il soulevait et dont il se servait pour relancer la conversation à chaque fois.
"Ouais, nan… j’ai juste pas envie de perdre toute ma crédibilité, j’ai passé l’âge d’être excitée par les yeux en forme de cœur et les pétales de roses." Elle n’écrivait pas de livres, elle écrivait des chansons. Mais ça faisait partie de son jardin secret, de ce genre de trucs qu’elle ne tournait pas en dérision parce que ça la touchait, parce que ça la rendait quoi, humaine ? Elle toupilla sur ses talons, faisant la grimace comme chaque fois qu’elle se rendait compte que l’autre suintait l’amour par tous ses orifices "T’es pas censé avoir 80 piges ? Tu devrais t’être fait une raison sur l’amour et tous ces trucs ; ça dure pas, ça sert à rien de s’y accrocher." Là par contre, elle ne lésinait pas pour tourner les choses en dérision, peut-être parce que c’était trop intime pour être discuté au milieu d’un studio-photos au nom douteux, face à un type qui, à une époque, pensait que la meilleure façon de terminer une soirée, c’était de gémir dans l’oreille d’une grognasse trop soule pour se rendre compte qu’elle faisait une erreur — fatigante, elle l’était, avec son humour noir, ses mécanismes de défense foireux, et c’est avec une synchronie parfaite que le jeune homme sembla tomber d’accord avec ses pensées tandis qu’elle acceptait enfin de passer derrière son objectif.

Il aurait ce qu’il voulait, mais c’était sous ses conditions et ça ne pouvait pas être autrement. Cachant sa joie, elle le suivit pour s’arrêter face à un fond blanc devant lequel elle grogna, frappant du pied quand il lui demanda de ne pas critiquer — comme si elle en était capable, comme si Josephine Ophelia Carter était supposée se la boucler quand on lui tendait la perche pour défoncer les efforts engagés pour lui faire plaisir, pour la contenter. Une éternelle insatisfaite, c’était de cette manière que la définissait certaines de ses connaissances, et ils n’avaient pas torts. Il fallait remonter loin pour comprendre pourquoi elle était aussi difficile à étancher, cette soif qu’elle semblait avoir en permanence, et clairement, elle avait autre chose à foutre dans la minute que de s’épancher sur son enfance, merci bien.
Elle croisa les bras sur sa poitrine, regardant le grand bonhomme avec elle dans la pièce s’agiter pour mettre en place son champs de travail. Etonnamment, une question lui traversa l’esprit "Pourquoi t’aimes tant la photo, c’est le truc le plus superficiel qui soit." Dans le fond, ça n’aurait pas dû l’étonner vu qu’il n’était qu’apparence — mais elle aussi alors finalement, ça devait être pour cette raison que, s’ils prétendaient se taper sur les nerfs par crainte de se donner l’impression de trop s’apprécier, ils s’entendaient aussi bien. Quand il éteignit la lumière, elle eut une voix roucoulante, ses sourcils parfaits s’appliquant à exécuter une danse suggestive qu’elle agrémenta d’une blague made in Carter "Je savais que tu voulais me pécho en vrai. C’est ton jour de chance, j’ai pas mis de culotte." Elle se trouva hilarante, bien que l’image la fit soudainement lâcher un eww les moins ironiques de son répertoire. Ce serait la chose la plus contre-nature qui soit, mais c’était aussi un moyen d’alléger l’atmosphère parce qu’il la rendait nerveuse, à faire ses grands mouvements, à s’agiter et à agir comme un ArTiStE.
Et puis soudain, elle suivit son ordre pour aller s’installer, le faisant en roulant des yeux et en trainant des pieds pour se donner des airs. Et c’était facile de suivre cette cadence-là, elle l’avait déjà fait suffisamment de fois pour savoir qu’elle captait la lumière, qu’elle n’avait pas grand-chose à faire pour paraître belle et charismatique — on pouvait la targuer de prétentieuse, mais les faits étaient là. Encore qu’elle n’était pas dans le bon attirail, sauf qu’elle soupçonnait Edge de préférer qu’elle soit plus ou moins au naturel et ça la gênait peut-être un peu au fond de son petit cœur battant la chamade, consciente de l’attention qu’on lui portait soudain. Elle changea de position sans qu’il n’ait besoin de lui demander, posant sans en avoir l’air, répondant à sa question une fois seulement que le flash suivant éclaira la pièce — une grande professionnelle, vraiment "T’as peur du silence autant que moi. T’es pas obligé de l’ouvrir quand y a rien à dire tu sais." C’était clairement l’hôpital qui se foutait de la charité. Elle continua à jouer le jeu parce que c’était agréable de se sentir désirée par quelque chose, par quelqu’un encore plus — pas par Edge, ce n’était pas aussi simple que ça, et c’était ça qui rendait les choses fort jolies au final. Jo contrôlait tellement bien son image qu’elle savait que les photos seraient sublimes, mais dans un enthousiasme mesuré, elle lui dit "Montre, que je vois si t’es capable de me rendre encore plus belle sous cet éclairage merdique." Et elle s’approcha pour qu’il s’exécute, prête à juger son talent comme si elle en avait le droit.

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

"Dit-elle pas du tout jalouse..." Que tu as marmonné dans ta barbe, même pas certain que la pique atteigne Jo au final. Elle a la tête un peu trop haute, un peu trop dans les nuages pour que tu puisses arriver à la faire redescendre de son trône en vérité, et ce n'est pas une si mauvaise chose que cela en réalité. Et puis, est-ce que la jeune femme a tort ? Tu n'en sais rien, si Yasmine n'était pas revenue dans ta vie de cette façon-là, tu serais très certainement aussi blasé que Jo, parce qu'il faut bien le dire, tu n'es pas la personne la plus romantique ou la plus délicate du monde et que les efforts ont été faits pour Yasmine. Pour réaliser que si tu allais souvent à cent à l'heure, c'était bien par peur de te poser et que quelqu'un te voit pour ce que tu es vraiment. Et oui, être vulnérable de cette façon-là est effrayant, ce n'est pas quelque chose que tu as envie de faire devant un parfait inconnu et pas quelque chose que tu aurais fait au nom de l'amour il y a des années en arrière, cela t'aurait paru complètement ridicule. Mais maintenant que tu vis cette relation, que Yasmine est dans ta vie et d'une manière bien permanente tu l'espères, que tu ne te contentes pas d'observer tout cela depuis l'extérieur, tu n'as absolument aucun mal à comprendre tous les clichés. Oui, tous, tu les vis bien au quotidien maintenant et tu réalises qu'il n'y a plus de retour en arrière possible pour toi en réalité.
Donc Jo peut juger et critiquer autant qu'elle veut, tu l'entends, cela ne veut pas dire que tu vas argumenter davantage ou la faire changer d'avis. Tu ne crois pas vraiment que chaque personne a quelqu'un qui l'attend, ou qui est faite pour elle, c'est une notion un peu ridicule, soit cela arrivera à la brune, soit non, si ce n'est pas le cas, cela ne sera pas une tragédie comme certains aiment bien le croire en réalité. Sous l'objectif, le silence ne dure pas si longtemps que cela, et tu sais que tout ce que Jo te dit, c'est pour se protéger, parce que tu vas l'immortaliser et parce que tu es drôlement proche d'elle soudainement et ce dans tous les sens du terme, elle n'est pas si mystérieuse qu'elle aime bien le faire croire. Ou alors, vous êtes un peu trop similaires pour que tout ça prenne avec toi, oui, tu décides que c'est cela avant d'hausser un sourcil et de la regarder par-dessus ton appareil pendant quelques secondes. "Si c'est ça tes supers techniques de dragues secrètes, je ne veux pas vraiment être ce mec-là, mais tu as besoin de cours clairement." Clairement que tu penses sombrement, mais enfin, tu peux faire ce que tu voulais et la prendre en photo et Jo a l'habitude, c'est perceptible dans ses mouvements, sa pose et elle change déjà de position sans vraiment avoir besoin de guide ou de plus de directions.
Une vraie professionnelle, peut-être qu'elle devrait considérer une carrière de mannequin, il y a beaucoup de potentiel là et tu sais qu'elle jonglerait très bien la côte de popularité et établir des trends et tout ce genre de petites choses. C'est presque calme pendant quelques instants, entre vous deux, quelque chose de rare en réalité, Jo le sait tout aussi bien que toi et elle n'a pas tort quand t'accuse d'avoir peur du silence. Oui, et ? Que tu as envie de répondre avant de tirer la langue, ce n'est pas très mature, absolument aucun doute là-dessus, tu ne te lanceras pas dans de grandes explications pour révéler qu'en réalité, c'est ce que le silence cache que tu détestes. Les insécurités, les doutes, toutes ces vilaines petites choses, tu ne te dis pas que c'est une conversation que tu peux avoir avec Jo Carter, étrangement.
"Et je ne sais pas mademoiselle Carter, pourquoi est-ce que tu aimes tant chanter ? Okay tu es douée, mais il n'y a pas que ça, n'est-ce pas ?" Que tu réponds après une autre série de photos, et parce que tu te dis qu'elle peut comprendre ce que tu veux dire, sans vraiment jouer les idiotes en réalité. Elle est loin d'être une idiote, Jo, même si tu supposes que c'est plus facile de faire semblant pour juger les autres et leur ressortir tous leurs petits défauts après. Au moins, c'est plus difficile de faire semblant face à un objectif, c'est une série de moments figés, qui peut être complètement truqués et trafiqués, tu t'en rends bien compte. Ce n'est cependant pas ce que tu cherches à faire quand tu as un appareil entre les mains personnellement, il s'agit juste de montrer aux autres ce que toi tu vois, dans le plus de détail possible certes. "Jo, si tu n'es pas prête à suivre tes propres conseils, n'en donne pas, okay?" Que tu répliques automatiquement, alors qu'elle demande, exige même de voir les photos."... T'es épuisante, tu le sais, et c'est moi qui dis ça, en général, je me contente de l'entendre."
Tu dis cela avec un sourire cependant, réalisant qu'elle n'est pas disposée à attendre, tu appuies sur une série de boutons pour transférer les photos de l'appareil à l'ordinateur le plus proche. "Impatiente en plus de tout, donne-moi cinq secondes." Tu lui fais signe de te suivre vers le comptoir que vous avez quitté il y a quelques secondes et en quelques clics, son visage apparait sur le grand écran. "Voilà." Et même toi, tu ne peux pas le nier, Jo est jolie, il y a quelque chose là, dans son regard, dans les angles précis formés par son visage... elle te parait encore plus loin sous l'objectif, comme s'il était vraiment impossible de la comprendre ou même de l'atteindre. "Pas si mal que cela, hein ?" Et c'est un euphémisme, en réalité, tu n'as pas besoin de compliments, tu sais ce que tu vaux avec un appareil photo entre les mains. "Assez bien pour photographier ta grand-mère aussi ou... ?"

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (ssoveia & malibu) ✰ w/ @Edge Price

"Je drague pas, moi." C’était le début du statement de l’année "On me drague." Elle ne doutait vraiment de rien, c’en était presque risible "C’est la différence entre toi et moi ; t’es un queutard, je suis une princesse." Dans la version la moins conventionnelle, en tout cas. Pas sûre que Sa Majesté trouverait ça très opportun de se coltiner une spécimen comme elle dans son arbre généalogique, de quoi lui faire regretter Meghan "Garde tes conseils. J’ai pas l’intention de me caser incessamment sous peu. Et je te l’ai dit, je préfère être seule qu’accompagnée par la médiocrité. J’ai une réputation à tenir." C’était une pique pour Amina ou peu importait comment elle s’appelait vraiment, sa copine. Elle avait déjà changé de sujet quand il réalisa qu’elle était devant son objectif à poser comme si elle était née pour ça, répondant à peine à la question qu’il lui posa en retour, et attendant qu’il fasse une pause pour y daigner avec une honnêteté qui n’était pas insolente cette fois, juste assez brute pour qu’il se rende compte que ça sortait du cœur, et de la partie la plus tendre ; celle qu’elle gardait pour les grandes occasions, et pour les gens spéciaux "Parce que c’est facile. Je me pose pas de questions quand je chante, ça vient comme ça." Elle claqua des doigts devant son propre nez, ne cillant pas, même pas quand elle reprit sur sa lancée "Ceux qui prétendent que c’est archi profond, de monter sur une scène, sont des menteurs. Y a rien de plus facile à faire quand tu sais ce que tu vaux, et je sais ce que je vaux, alors j’ai pas besoin de mentir en prétendant que ça soigne mes blessures ou que ça me permet d’être la vraie moi. Des conneries tout ça." C’était la tagline d’un film des années 2000, elle en était tellement persuadée qu’elle était à deux doigts d’envoyer un texto à Nicholas pour lui demander quel genre de personne il était en train de le faire devenir, à citer du Hannah Montana alors qu’elle se prenait pour une grande.

"Ouais, je sais, tu l’as déjà dit, ça." Elle ne ferait pas de blague sur un potentiel Alzheimer précoce du photographe, encore que tourner en dérision le fait qu’il lui disait toujours la même chose pour la désigner, ça lui aurait permis d’exorciser tout ce qu’elle avait sur le cœur à propos de la maladie de sa grand-mère. Mais merde, elle n’était pas là pour ça ; elle était là pourquoi, déjà ? A la base, ce n’était pas pour faire la belle devant Edge qu’elle mena à la baguette parce que ça la faisait kiffer d’avoir la main, le sommant de lui montrer le résultat de la petite séance improvisée qu’ils venaient de faire en bonne collaboration "Ça va, on a compris que j’avais aucune qualité à tes yeux, et que la seule qui y trouve grâce, c’est l’autre là." Impatiente, elle l’était tout autant que le reste, mais ça ne faisait pas d’elle quelqu’un de mauvais — juste d’assez jeune pour croire que tout lui était dû, et qu’agir comme elle le faisait  ne la desservait pas plus que ça ne lui rendait service dans le fond. Elle s’en apercevrait bien assez tôt, et puis elle s’en remettrait, parce qu’elle s’en était mangé d’autres, des portes dans la gueule, pour savoir lécher ses blessures sans chercher à ce que quelqu’un ne le fasse à sa place.
Elle rejoignit le coin où Edge installa son matos pour lui montrer le résultat sur un écran avec une meilleure résolution, et évidemment le résultat fût à la hauteur de ses espérances puisque c’était elle le modèle, mais aussi parce que les choix du jeune homme étaient assez bons pour qu’elle lui adresse un regard en coin avec un léger sourire qui disparut aussitôt quand il ouvrit la bouche pour avoir sa bénédiction "Pas si mal que ça." qu’elle lui fit seulement, loin d’être généreuse quand il s’agissait de faire des compliments.
S’étant accoudée au comptoir, elle s’en redressa pour lui demander, la tête serpentant, ses sourcils se haussant dans une imitation trop clichée de la peste de base "Tu crois que tu pourrais m’en développer une ou deux ?" Il lui dirait oui, elle n’en douta pas assez longtemps comme lui ne douta pas assez longtemps qu’elle puisse apprécier qu’il photographie sa grand-mère. Pourtant, elle joua le suspens, encore une fois, et attrapa ses affaires laissées sur le comptoir qu’elle contourna en lui disant avec la nonchalance et l’insolence qui faisait sa singularité "Faut voir, je te tiens au courant comme on a dit ?" Au mieux, elle méritait une bonne paire de gifles ; au pire, il faudrait qu’un jour quelqu’un se porte volontaire pour la faire descendre de son piédestal, et fissa.

≈ ≈ ≈
{give me a photograph to hang on my wall}
crédits gif & code fiche/ (caldecotts & malibu) ✰ w/ @Jo Carter

Tu ne qualifierais certainement pas Jo de princesse, de gamine capricieuse oui, mais aller jusqu'à princesse ? Ta nièce qui possède ce titre t'en voudrait très certainement et même dans ses mauvais jours, la petite fille de Paul n'est pas aussi exécrable que Jo peut l'être parfois. Et puis contrairement à ton modèle du jour, ta nièce à l'âge qu'il faut pour justifier ses bêtises et ses éclats, si elle, elle ne sait pas gérer ses émotions et ne sait pas encore comme les exprimer de la meilleure façon, c'est parce qu'il y a encore beaucoup de premières fois dans son parcours et qu'elle va tout apprendre. Jo, en revanche ? Peut-être qu'elle en a trop appris justement, mais au moins, tu ne vas pas tenter de défendre les membres de ton espèce et lui dire que vous n'êtes pas tous des enfoirés et qu'il y en aura bien un qui se distingue du lot. C'est un mensonge suffisamment répété et un joli mythe pour accepter de subir des horreurs que tu ne cautionnes pas vraiment, là encore, ce sont des attitudes de gamin, tu es bien content que cette période-là de ta vie soit derrière toi, aucun doute à ce sujet. "Parce que c'est facile, je connais quelques personnes qui ne seraient pas du tout d'accord avec toi, mais soit..." Mais soit, tu la crois sur paroles quand Jo te dit que c'est facile pour elle, d'avoir toute l'attention, d'épater avec sa voix, tu sais que ce n'est pas que cela en réalité, il s'agit aussi d'être doué dans un domaine. Exceller et se distinguer de la masse, et ça, tu peux le comprendre, ça ne fait pas d'elle quelqu'un d'arrogant, connaitre sa propre valeur est également quelque chose de très important.
La petite mise en abime est terminée, tu le sais au moment où elle demande à voir les clichés, tu n'en attendais pas autant de la part de Jo après tout, vous avez beau vous envoyer des piques à chaque fois que vous vous croisez, cela ne veut pas pour autant dire que vous allez avoir des conversations profondes et refaire le monde à chaque fois. Tu lui montres le résultat, ponctué d'un : "Je te signale que tu es aussi avare en compliment que moi en réalité, donc, tu es mal placée pour me critiquer." parce que c'est la vérité et c'est une philosophie que tu aimes bien pratiquer. Pourquoi récompenser la médiocrité ou le minimum, non vraiment, pourquoi ? Toi, on ne le fait jamais avec toi et tu supposes que c'est pareil pour Jo, que pour toi, cela à avoir avec ta couleur de peau et pour elle son statut de femme lui fait perdre quelques points aux yeux de certains, quoi qu'il en soit, tu attends son verdict, ton regard marron de nouveau posé sur elle. Si bien que tu perçois le léger sourire qui se dessine sur son visage, sourire qui disparait aussitôt qu'il est arrivé et elle ne fait que répéter tes mots à toi mais tu hoches tout de même la tête, parce que tu sais, tu as bien compris ce qu'elle ne dirait jamais. Si Jo avait été insatisfaite, elle ne se serait pas gênée pour te le dire et jamais elle ne te ferait la requête suivante, jamais, même toi, tu en as conscience. "Je peux même t'en développer plus qu'une ou deux, je les mettrai dans ta boite au lettre, vu que je sais déjà où tu habites." Tu confirmes cela par un autre hochement de tête, le mettant déjà sur ta liste de choses à faire et en réalisant que tu pourras passer du temps dans la chambre noire du studio, au lieu de juste lui imprimer quelques clichés comme le ferait certain.
Tu ne choisis pas le chemin de la facilité, cela n'a rien avoir avec Jo, elle serait sûrement outrée de l'apprendre, c'est comme cela que tu préfères développer tes clichés, une méthode qui ne changera jamais. "Et oui, on se tient au courant, et file, je sais que tu as mieux à faire de toute façon." Vient-elle seulement de te donner son feu vert pour photographier sa grand-mère ? Oui, il faut faire beaucoup de détour avec Jo, mais même toi tu es étonné d'avoir réussi à avoir son accord aujourd'hui, est-ce que cela veut dire que vous vous entendez bien, qu'elle fait plus que tolérer la présence de toi et de tes larges épaules ? Tu n'en sais rien, tu ne vas même pas tenter de trop analyser cela et tu vas considérer cela comme une petite victoire, parce que Jo te laisse définitivement rentrer dans sa vie et dans tout ce qu'elle considère important. Et pour toi qui es aussi doué qu'elle pour garder les gens loin de toi quand tu le souhaites, tu sais que ce n'est pas quelque chose d'anodin. "Fais gaffe avec ta monture hein ?" Petit coup de tête vers son vélo et tu lui lances un dernier clin d'œil, la regardant s'éclipser et en te disant que le reste de la journée sera bien calme après son passage.
Peut-être même trop calme.

rp terminé