De façon tout à fait surprenante, Rhett a survécu à ses deux voyages au bâtiment colonial (Ruben et Hassan aussi, si jamais vous vous posiez la question). Maintenant que son ami de toujours est rentré au pays, éternelle surcharge de travail et impossibilité de prendre des vacances étendues oblige, il est un enfant laissé seul dans un pays inconnu. Au moins, il peut toujours profiter de sa chambre d’hôtel et du bar du rez de chaussée, ce qui est déjà un bon début et sûrement le meilleur (pire) endroit pour planifier les quelques jours de plus qu’il passera en Indonésie. Même son frère lui fausse désormais compagnie, lui qui dort chez des inconnus ou Dieu sait quelle bêtise encore - c’est un coup de Ruben tout craché, ça, d’obtenir le consentement et l’approbation même du premier inconnu venu. Il va attraper la tourista, qui plus est, ce bougre, et ça ne sera toujours pas le problème de Rhett, encore parfaitement installé dans son hôtel de haut standing.

“Un virgin de ce que vous voulez.” qu’il commande alors, le pire client du monde qui vient se hisser sur un des hauts tabourets du bar, toutes les brochures volées dans les environs s’étendant désormais sous ses yeux. Il a déjà fait beaucoup d’activités mais sans doute pas assez pour rivaliser avec Ruben et son séjour chez l’habitant, alors il doit rivaliser d’ingéniosité. Même lorsque personne ne pourrait le penser, il existe toujours une compétition entre les deux frères, quand bien même leur relation ne s’est jamais aussi bien portée que très récemment. Tout ce que se demande Rhett, c’est combien de temps cela peut-il durer.

Tout ce qu’il se demande, la seconde suivante, c’est de quelle malédiction il est frappé pour trouver le moyen de retrouver des figures importantes de sa vie dans un autre pays. Pas même un autre bâtiment, un autre quartier ou même une autre ville: un autre fichu pays ; un autre continent, même. Ainsi, lorsque les cheveux blonds de Mabel fendent l’air à la vitesse de ses pas, c’est un “Putain de merde.” qu’il murmure contre sa pareille en roulant des yeux. Au moins, elle ne semble pas être accompagnée de son mini-elle, ce qui est un lot de consolation comme un autre, assez important pour que Rhett trouve le courage d’esquisser un sourire contre sa paille, de toute façon bien incapable de se cacher dans cet endroit désert. “Un autre, sans le virgin.” Ses premiers mots sont pour le barman, à qui il tend un coup d’oeil sans doute désespéré. “A moins que tu sois à nouveau enceinte, Mabe ?” Il demande avec une curiosité sincère, sans doute prêt à tout entendre maintenant. Il n’est plus à ça près.

@mabel griffiths

Il sourit par automatisme, comme il sourirait avant même que la caméra ne clignote au rouge pour lui annoncer qu’il est à l’antenne. Face à Mabel, son ressenti reste encore bien trop paradoxal pour qu’il ne sache précisément comme réagir, surtout alors que la jeune femme semble particulièrement être douée pour retrouver son chemin lorsqu’il s’y attend le moins: des vacances en Indonésie, bon sang. Il n’en a même pas parlé sur le moindre réseau, et seulement à son entourage proche. « Pas de nouveau bébé, et heureusement. Ça rendrait les choses plus... Compliquées. » Cette fois-ci, son sourire se veut plus contrasté, plus sincère et personnalisé aussi. Bien qu’il voudrait dire le contraire sans mentir, il connaît un peu trop Mabel pour savoir quand quelque chose la tracasse. Et en cet instant précis, il en connaît même la raison, sans avoir eu à l’interroger au préalable. “J’ai appris pour le divorce.” Rhett énonce doucement, tout bas, laissant le barman faire son travail à quelques mètres de là. Ses yeux remontent rapidement dans ceux de Mabel pour mieux se noyer dans son cocktail et s’y attarder davantage. “Je suis désolé.” qu’il finit par avouer avec une sincérité non feinte. Elle n’a pas la vie dont il rêve, pas du point de vue personnel tout du moins, mais cela ne l’empêche pas de souhaiter son bonheur, lequel devait sans nul doute passer par son mariage et la naissance de leur fille. Les raisons du divorce ne le regardent pas, alors il se garde bien de poser toute question indiscrète à ce sujet.

Le verre pas virgin commandé par le présentateur arrive rapidement alors que le serveur est gratifié d’un sourire de la part de la belle actrice. L’instant d’après, Rhett répond à son geste et lève son verre près du sien pour faire tinter les deux ensemble. Il ne sait pas à quoi ils trinquent, mais si cela peut lui faire plaisir alors il se garde bien de tout refus. « J'espère que toi, tu as quelque chose à fêter ? » - “Avoir survécu aux tuk tuk ?” Il commence alors, son regard brillant puisqu’il essaye encore d’utiliser l’humour comme réponse à tous les maux. N’empêche qu’il est heureux, Rhett, de ne pas avoir été écrasé par la moindre de ces voitures de malheur autant que d’avoir survécu à un trajet interminable en bus et deux excursions dans ce fichu bâtiment hanté. Mais si quelque chose le rend plus heureux encore, et surtout, ce n’est en rien lié à ce voyage et Mabel mérite de le savoir de sa bouche plutôt que par Dieu sait quel moyen. “Et je vais être tonton. Et parrain.” Son sourire est contenu tant bien que mal, ce qui n’est pas suffisant pour cacher à quel point il est non seulement heureux de la nouvelle mais surtout fier de cette dernière. Ruben a peut-être un avis mitigé sur la paternité en cet instant mais si son aîné est certain d’une chose, c’est qu’il fera un bon père. Bien meilleur que lui ne l’aurait jamais été. “Mon frère va être papa. Ruben.” Il précise le prénom par besoin de lui donner toutes les cartes, encore assuré qu’elle n’a jamais réellement écouté ce qu’il pouvait lui dire durant leurs années de couple. Et sûrement qu’aujourd’hui encore, elle n’en a pas tant de chose que ça à faire, raison pour laquelle il redirige bien vite le sujet de discussion sur la personne de la blonde, toujours aussi intéressé pourtant. "Comment va ta fille ?"

Il est sincère, Rhett, quand il lui annonce être désolé pour son mariage. Ce n’est pas parce qu’il n’a pas sauté de joie au plafond au moment de l’apprendre, le contraire le rend pourtant sincèrement triste. Si elle était heureuse, alors c’est tout ce qui importait en l’instant, et il aurait préféré que rien ne change. Peu importe l’état de leur relation et leur capacité ou non à faire la paix, Mabel mérite d’être heureuse et de trouver un homme qui la comble. « Tu n'y es pour rien » Elle sourit faiblement, il en fait de même avec un effet de miroir. « On peut jamais vraiment prévoir l'avenir, hein? » Cette fois-ci, il écarte ses lèvres d’un sourire un peu plus triste encore. “C’est sûr.” Personne ne se lance à corps perdu dans une relation en en anticipant déjà sa fin ; il le sait par expérience, peuvent en témoigner Mabel autant que Jenna. Personne n’attend le pire d’une histoire d’amour, jamais, quitte à s’accrocher à des espoirs impossibles. C’est toujours comme ça que ça se passe, non ?

A défaut de vouloir faire davantage de parallèles avec leur propre histoire, Rhett préfère encore parler de ce qui le rend heureux en cet instant, c’est à dire la naissance à venir de son neveu, lequel se veut aussi être son filleul. Sera, son filleul. « Je suis contente pour lui ! Je ne suis pas sûre qu'il apprécie des félicitations de ma part... Mais qu'il se prépare à être bien occupé dans les mois à venir ! » Et le fait qu’elle sache de quoi elle parle, expérience oblige, laisse Rhett avec une sensation ambiguë, inexplicable. Il est heureux, triste, en colère. Il n’en sait rien, en réalité, alors qu’il souhaiterait sincèrement pouvoir se contenter du simple fait d’être heureux pour elle, sans reconnaître dans un tel sentiment une pointe de jalousie ou même d’amertume, qui sait. Une part de lui se dit que c’est avec lui qu’elle aurait pu avoir cet enfant ; tout comme il se raisonne rapidement en se rappelant qu’il n’en veut pas, des enfants. “Il t’a toujours apprécié, tu sais. Enfin, il aime tout le monde, et il n’a jamais rien eu à te reprocher.” Parce que Ruben ne sait pas ce que Rhett sait, tout simplement. Il ne sait pas à quel point ils ont pu se disputer, à quel point Mabel a pu le blesser par ses mots autant que ses actes stratégiques. Et il y a fort à parier que Rhett ne le dise jamais à son cadet, par souci de protection pour lui autant que pour son ex-petite-amie, elle qui a tant compté à ses yeux. “Il sera un bon papa, même si j’ai aucune idée de quand est-ce qu’il trouvera le temps de dormir.” Il rigole avec une certaine amertume, prenant une gorgée de son cocktail pour ne pas laisser perdurer son rire faux. Ruben travaille déjà beaucoup et dort trop peu, son frère n’a donc aucune idée de comment est-ce qu’il pourra gérer l’arrivée de son enfant, lui qui voudra sans nul doute profiter de la moindre seconde pour être à ses côtés, peu importe ce qu’il a pu raconter à Rhett il y a peu.

« Ils ne mettent pas le bébé dans les bras des parrain et marraine, au moment du baptême ? » Et c’est à cet instant précis qu’il manque de s’étouffer, le sportif de renom terrifié à l’idée de tenir un bambin entre ses bras. “Merde, c’est vrai ? J’ai jamais fait attention, je crois. Enfin c’est pas comme si j’avais assisté à beaucoup de baptêmes non plus.” Il a de vagues souvenirs de celui de Ruben, ceci dit, mais aucun pour Ethel. Il était encore un gamin à l’époque, lui aussi, bien plus intéressé par le repas qui suivrait le baptême plutôt que l’instant en lui-même. Comme n’importe quel autre enfant de son âge et même pas mal d’adultes, sans doute, soyons honnêtes. « Rosie va bien. Elle commence à attraper ses jouets, ça la fait rire toute seule ! » Il imagine sans mal les joues rebondies de sa fille et son regard brillant, le tout couronné d’un sourire enfantin, typiquement amusé d’un rien et pouvant attendrir n’importe quel adulte - même Rhett, c’est pour dire. “Je suis heureux de l’entendre.” Et il l’est, oui, sincèrement. « Elle a bien grandi depuis la dernière fois que tu l'as vue. Elle tient sa tête, et elle essaye de rouler sur elle-même. C'est un peu maladroit, mais elle essaye avec acharnement ! » Rhett rigole bien volontiers face à ces explications typiques d’une jeune mère. Bien sûr qu’elle est heureuse de parler de sa fille, de ses exploits, de tout ce qu’il se passe dans sa jeune vie. “Tu t’en occupes seule, maintenant ? Vous avez trouvé un compromis ?” D’une voix plus basse, plus soucieuse aussi, il tente de lui demander des explications sur sa vie de couple, sans que ce soit pour autant ce qui l’intéresse réellement, au fond. Alors Rhett se racle la gorge, hésite, sourit une seconde avant de reprendre. “Ça va, je veux dire ? Toi ?” Non pas que le sujet de sa fille ne l’intéresse mais c’est Mabel et seulement Mabel qu’il connaît depuis près de dix ans.

« Si tu veux t'entraîner à porter un tout petit humain avant le baptême, je peux te prêter des poupons » Et s’il sourit à son tour, Rhett, c’est bien plus par politesse que quoique ce soit d’autre. Il aimera son neveu, bien sûr, mais il est aussi heureux que ce ne soit pas son enfant et qu’il n’aura qu’à être avec lui lorsqu’il le désire, sans que l’enfant soit une charge à plein temps le moins du monde. Le temps du baptême, si tant est qu’il sera effectivement baptisé, Rhett n’aura aucun mal à garder le nourrisson près de lui et sans doute même qu’il en sera heureux, à vrai dire. “Tu essayes de t’en débarrasser ?” Il commente avec un certain humour, Mabel ne lui ayant jusque-là jamais parlé d’une passion cachée pour les poupons - rien dont il ne se souvienne, tout du moins.

C’est bien moins amusé qu’il aborde le sujet de son divorce, aussi soudain qu’inattendu alors qu’il a encore le souvenir de discussions autour de sa parfaite relation avec son parfait mari (et si l’ironie est appuyée, il ne s’agit là que de Rhett et de son éternellement pincement au coeur, il faut bien l’avouer). Il n’a aucune envie de revenir en arrière, surtout pas en ce qui concerne leur relation, mais l’idée qu’un autre soit arrivé à dompter le cœur de la Griffiths là où il a lamentablement échoué ne peut que le rendre aigri. « Comme il n'a jamais arrêté de travailler, c'est surtout moi qui continue de m'occuper de Rosie, ça ne la perturbe pas trop. » Mabel baisse la tête en direction de son verre mais le sportif continue d’hocher la tête comme si elle pouvait toujours l’observer. Ce dont il est heureux, ou tout du moins soulagé, c’est de savoir que la situation n’affecte pas autant qu’il aurait pu le croire sa jeune fille, laquelle n’a rien demandé, pas même de venir au monde. « Et là, il avait des vacances, donc il s'en occupe cette semaine. » - “Ça te convient, comme rythme ?” La question, c’est de savoir si elle s’entend encore assez avec lui au point de ne pas rechigner à l’idée de lui confier la garde de sa fille, la prunelle de ses yeux. Peut-être que tout a éclaté bien plus violemment qu’elle ne voudrait jamais l’avouer, et lui ne jamais l’interroger. « On a pas vraiment un compromis fixe. On va s'adapter à nos emplois du temps, et à Rosalie. » C’est une chose qui vous tombe dessus sans prévenir, le divorce, alors il ne peut qu’être admiratif de la capacité d’adaptation de tout parent dans cette situation. Il veut croire que Mabel autant que son mari font du mieux qu’ils peuvent pour leur fille, et à en juger par le regard qu’elle lui tend, il n’a aucune raison de penser le contraire. Elle semble confiante pour l’avenir.

« Mais non, ça ne va pas... » Et tout aussi rapidement, ses espoirs volent en éclat et son sourire se fade. Oh ? Fut un temps où il se serait quelque peu réjoui de l’entendre dire de tels mots mais aujourd’hui, il en est bien loin. Mabel mérite d’être heureuse, peu importe ce qu’elle a pu dire ou faire dans le passé. Son silence est un encouragement pour qu’elle parle et se confie à lui, comme elle semble sur le point de le faire, lui accordant apparemment une certaine confiance, contre toutes attentes. « Mais tous les jours sont douloureux. Et j'ai jamais appris à gérer la souffrance... » - “Hey, Mab’.” Il reprend doucement, tentant de capter son regard. “C’est pas quelque chose que t’aurais pu prévoir. Y’aura des jours meilleurs, je te le promets. Et tu auras toujours Rosalie avec toi, pas vrai ?” Quand bien même, oui, peut-être qu’elle continuera de toujours lui rappeler l’existence de son mari et le fait qu’il ait un jour tant compté à ses yeux et dans son coeur, au point de vouloir vivre le reste de sa vie avec lui. “Tu as encore de belles choses devant toi, tu retrouveras quelqu’un.” Il confie dans un maigre sourire, confiant. Cela prendra le temps qu’il faudra, mais elle saura trouver quelqu’un avec qui élever Rosalie, à n’en pas douter.

« J'ai une fille. Tu n'imagines pas le nombre de jouets roses et colorés j'ai déjà chez moi, alors qu'elle ne tient même pas assise ! » Il ne peut que s'en douter, pourtant, alors que cette simple phrase le laisse avec un maigre sourire au coin des lèvres, réminiscence de leur histoire passée et de toute la décoration que Mabel insistait pour faire elle-même. Lui n’en avait jamais rien à faire de rien, que ce soit de la couleur de la cuisine ou de la forme de la lampe de la chambre principale. Tant qu’il pouvait continuer à jouer et ne pas être trop loin du centre d’entraînement de Londres, finalement, c’est tout ce qui continuait à importer. Oh, et être un bon petit-ami pour la femme qu’il aimait aussi, oui, bien sûr. Nul doute que Mabel gâte sa fille de tous les cadeaux du monde et de tous ceux qu’elle trouve sur son chemin, elle qui a toujours eu du mal avec la notion de raison.

L’ambiance, jusqu’ici plutôt décontractée, change pourtant du tout au tout lorsque le sujet de son divorce en vient à être abordé. Rhett ne pouvait pas décement agir comme s’il en ignorait l’existence, raison pour laquelle il a préféré se montrer transparent avec elle, comme à son habitude. « Comment ça pourrait me convenir ? » Elle répond du tac au tac, amère. En retour, l’australien ne cille pas et continue de l’observer les yeux dans les yeux. S’il sait reconnaître sa culpabilité (plus ou moins) selon le sujet abordé, cette fois-ci il n’en est rien. “Parce qu’au moins vous pouvez tous les deux continuer à la voir.” Et parce que, aussi, qu’elle soit contente ou non d’une telle situation ne la fera pas changer, à moins d’avoir recours à la justice et tout ce qui s’ensuit. Il ne sait pas si elle oserait aller jusque là, tout comme il doute qu’elle résignerait à se battre bec et ongle pour la chair de sa chair. « Je m'imaginais pas mère, je pensais encore moins finir par assumer ce rôle seule ! » - “Le problème c’est que tu ne la vois pas assez, ou c’est de t’en occuper seule lorsque c’est le cas ?” Il note et demande avec un étonnement non feint. A ses yeux, le problème se posait uniquement sur le fait qu’elle voulait sa fille pleinement pour elle et pour elle seule, à chaque jour que Dieu fait. Il n’aurait pas imaginé le caractère plutôt égoïste de Mabel revenir en trombe sur un tel sujet, alors qu’il est question de sa fille et qu’elle semble montrer tant d’attachement à son égard et être une bonne mère.

« C'est... A double tranchant, d'avoir un enfant » Peut-être. Peut-être pas. Il veut bien la croire, puisque de toute façon il est assuré de ne jamais expériencer ça lui-même. Les récits d’autrui lui suffisent largement et aucun d’entre eux n’a su faire naître en lui le désir de devenir père. Il sera bientôt parrain, et c’est déjà une superbe nouvelle dont il sait se contenter avec joie. “Tu regrettes, parfois ?” Il demande alors du tac au tac, oubliant comme à son habitude que certaines questions devraient être répétées un certain nombre de fois avant d’être prononcées. « Une rupture, c'est toujours compliqué, mais là, j'ai pas le choix que de penser à lui genre... Tout le temps. Pour organiser ses jours de garde, ou parce que je vois un peu de lui dans notre fille. » La question qui lui vient à l’esprit, cette fois, il la garde soigneusement pour lui. Lui demander si elle est toujours amoureuse de son ex-mari n’est pas une chose qu’il veut savoir, ce n’est pas non plus un couteau qu’il souhaite enfoncer dans la plaie encore fraîche de Mabel. Il lui en veut de beaucoup de choses mais la faire souffrir n’est pas ce qu’il désire. “Je pense que tous les parents divorcés passent par là. Ca va se tasser avec le temps.” Ce sont des paroles génériques dont il ignore absolument tout, n’ayant aucune expérience dans le divorce ni dans la parentalité, pas même de véritables connaissances. Tout ce qu’il essaye de faire, c’est d’assez occuper la discussion pour passer outre les larmes qu’il observe jaloner ses yeux.

Il tente de lui remonter le morale à sa manière en lui disant que l’avenir sera peut-être meilleur, sans pour autant savoir s’il ne fait qu’anticiper les choses ou lui raconter d’immenses bobards. « Je sais pas quand je serai capable de me projeter de nouveau dans une relation... Pour l'instant, c'est clairement trop dur. » Ce qu’il peut comprendre sans le moindre mal. Après s’être séparé de Jenna, il ne se serait lui-même jamais imaginé capable d’entamer une nouvelle relation, dans un avenir proche ou plus lointain. Il pensait qu’il ne trouverait plus jamais personne, son coeur à jamais brisé. « Je pensais pas que tu serais si confiant dans le fait que je puisse retrouver quelqu'un » Elle termine son verre et en commande déjà un autre, sous le regard silencieux de Rhett qui n’émet aucun jugement. Pas oralement, du moins - mais après tout, elle est vacances et plus le moins du monde enceinte, qu’elle fasse ce qu’elle désire. “Je vois aucune raison pour laquelle ça ne pourrait pas arriver.” Il finit par statuer, haussant les épaules. Il n’est pas en train de dire que c’est avec lui qu’elle finira par retourner, et loin de là. Tout ce qu’il dit, c’est qu’elle est jeune, belle et intéressante et qu’un jour quelqu’un saura lui donner l’attention et l’amour qu’elle mérite. Avec un peu de chance, tout sera réciproque et elle retrouvera goût au bonheur. "C'est pas écrit sur ton front que tu m'as jeté comme une merde et que étais avec moi pour ma notoriété." Il sourit faussement, roule la tête sans conviction, avant de finalement prendre une gorgée de son verre, qui manque soudainement cruellement d'alcool. Il ne voulait pas aller par là mais il dira qu'elle lui a tendu une perche bien trop immense.

Elle lui parle de choses qu’il essaye de comprendre de tout son cœur et autant que possible mais sans expérience aucune sur les questions d’enfants, il est forcé de constater qu’il n’y parvient pas réellement. Ce n’est pas faute de vouloir essayer, simplement il existe un plafond de verre en la matière. Tout est plus simple lorsqu’il peut continuer à blâmer Mabel, sans pour autant qu’il ne soit capable, ni veuille, faire peser sur elle tous les maux du monde. Simplement, maintenant qu’elle est mère, elle doit aussi comprendre qu’aucun retour en arrière n’est possible autant qu’elle n’a pas le droit de faire souffrir son enfant comme elle a pu le faire dans le passé avec lui - et certes, les deux ne devraient même pas pouvoir être comparables. « Le plus dur, c'est de gérer un bébé tout seul. De n'avoir personne à qui passer le relais quand on ne supporte plus les pleurs. Et de n'avoir personne avec qui parler de mes angoisses. » Et ça, il arrive à le comprendre sans le moindre mal. Mabel n’avait pas prévu de devenir mère, mais elle avait surtout encore moins prévu de divorcer. Elle qui pensait avoir trouvé l’homme avec qui partager le reste de sa vie, Rhett est sincèrement désolé pour elle que ce ne soit finalement pas le cas. Il a beau lui reprocher un certain nombre de choses, il ne lui souhaite pas le moindre malheur pour autant. Simplement, il espère que ce n’est pas à lui qu’elle compte partager ses moments de doute et de peine, tant parce qu’il ne saurait quoi lui répondre que parce qu’il estimerait ça un peu trop osé de sa part. « Je regrette dans le sens où... Je me sens pas capable d'assumer ce rôle. » - “Tu t’en sors très bien.” Sa fille a l’air heureuse, elle est en bonne santé, et c’est finalement tout ce qui devrait importer, et ce peu importe ce qu’en dit le regard du monde suivant les exploits de la jeune Griffiths prodige. “Si jamais… Si jamais tu sais vraiment pas à qui la confier en cas de besoin, tu sais que je pourrais aider.” Mais uniquement si elle n’a vraiment personne d’autre de confiance de disponible, et il insiste largement sur ce point, n’étant pas réellement le genre de personne à se réjouir à l’idée d’accueillir un enfant sous son toit ou même de la lui garder chez elle. L’idée d’avoir sur ses épaules la responsabilité de la vie d’un nourrisson sans aucune once de jugeote n’a rien pour le rassurer, lui le grand sportif.

Simplement, s’il souhaite être une personne sur laquelle Mabel peut se reposer, il ne peut pourtant pas aussi simplement passer l’éponge sur ce qu’elle lui a fait subir et ce qu’il garde en travers de la gorge. « Tu attends quoi, de moi ? Des excuses publiques dans lesquelles j'avoue quelle garce je suis ? Ou que je te raconte par le menu combien le divorce me fait mal, histoire que tu juges si j'ai été bien punie ? » Il roule des yeux au ciel, ne s’étant pas le moins du monde attendu en retour à ce qu’elle joue la carte des médias ou de quoi que ce soit en ce sens. A ses yeux, cette histoire - leur histoire - ne regarde qu’eux et il se moque bien de ce que peuvent en disent les journaux, les magazines, et n’importe quelles autres pages de réseaux sociaux ou ragots en tous genres. Personne n’a jamais su l’envers du décor et personne ne devrait le connaître, autant parce qu’il souhaite la protéger de la haine d’autrui que parce qu’il ne veut pas passer pour la victime d’une histoire pathétique qu’il aurait dû voir venir. “Arrête ta comédie Mab, c’est pas ce que je te demande.” Ni les excuses publiques, ni ses lamentations autour de son divorce. Il boit une gorgée de son verre, agacé par sa réaction, n’ayant aucune envie en retour d’entamer une discussion faite de reproches et de coups bas. Il avait besoin de lui raconter sa blessure et son mal être mais, paradoxalement, il ne veut rien entendre de ce qu’elle pourrait dire en retour. « Je suis désolée de t'avoir fait souffrir, Rhett. Et je suis désolée d'avoir croisé ta route ce soir. » Sans un mot, il l’observe manœuvre avec hâte et sous le coup de l’émotion, vidant son verre autant que son sac à la recherche de son porte monnaie. Il ne dit rien, déjà bien conscient qu’elle est trop décidée pour que s’interposer soit une bonne idée. Il voudrait s’excuser à son tour, préciser le fond de sa pensée, lui dire qu’il ne lui en veut pas autant qu’il pourrait la laisser croire. Cependant, seul le silence s’impose, et sa voix au moment où elle commence déjà à lui tourner le dos. “Prends soin de toi, Mab.” Il annonce, son regard vrillé sur le second verre qu’il vient de commander et dont il a bien besoin. Un jour, ils arriveront à avoir toute une conversation sans se détester à un moment ou à un autre.