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@swann buchanan

Ce séjour en Indonésie avait été des plus… intéressants - c’était surement ça l’adjectif qui était nécessaire d’utiliser pour décrire les journées que Ruben venait de vivre. Afin de vivre l’expérience au maximum, le jeune homme avait opté pour la majeure partie de l’aventure d’aller séjourner chez un habitant de la ville; le séjour s’était très bien passé, il avait pu faire la rencontre d’autres australiens de Brisbane également, et se forger de nouveaux souvenirs avec les deux jeunes hommes. Par un pur hasard, d’un autre côté, il avait croisé la route de son frère et cette partie là relevait vraiment de l’improbable - ou tout du moins, c’était ce qu’il s’était jusque maintenant.

Se retournant une fois de plus dans son lit, Ruben soupira. Il s’était octroyé le luxe de prendre une chambre d’hôtel pour la dernière nuit sur place, juste avant de prendre l’avion et de rentrer en Australie - ses congés allaient bientôt prendre fin et il se devait de retourner au travail, sentant déjà le manque des journées à n’en plus finir. Cependant, ce n’était pas pour cette raison là que le sommeil était plutôt compliqué à trouver ce soir, et c’était surtout la raison pour laquelle il avait pris la poudre d’escampette ces derniers jours, sans l’avouer à haute voix. Lorsqu’il serait de retour à Brisbane, chez lui, il viendrait croiser de nouveau la route de Grace et disons que pour changer depuis le début de l’année, les choses n’étaient en rien au beau fixe entre eux. Cette fois-ci, l’ampleur était d’autant plus importante: la jeune femme était enceinte et ils seraient parents tous les deux dès le début de l’année d’après. Sauf que c’était tout le contraire de ce que Ruben souhaitait - il se leva de son lit dans une précipitation qui ne lui ressemblait pas, enfilant son peignoir dans l’objectif de se dégourdir quelque peu les jambes et d’aller prendre l’air.

A cette heure avancée de la nuit, l'hôtel était plongé dans un calme qui faisait presque peur, et finalement le jeune Hartfield n’était plus tant sur que son idée de se promener dans la nuit dans les couloirs soit si bonne. Faisant en sorte de déclencher les lumières des corridors au fur et à mesure que ses pas lui faisaient parcourir ces derniers, il ne mit qu’une minute ou deux à finalement rejoindre la cage d’escaliers et l’accueil du baissent par la suite. Et s’il pensait se trouvait seul au rez-de-chaussée en cet instant, il fronça quelque peu les sourcils lorsque son regard se posa sur une silhouette qui lui semblait étrangement familière. Les coïncidences ne s’arrêtaient-elles donc jamais ? « Swann ? » Et puis tant pis si ce n’était pas lui, il pourrait toujours prétendre être somnambule si on le prenait pour un fou.

Trois petites heures de décalage horaire et il n’en faut pas plus à Swann pour être complètement perdu et déboussolé, incapable de trouver le sommeil la nuit. Sans doute que le peu d’activité physique entretenue à Semarang est la raison de ce manque de fatigue, il ne se voile pas la face à ce sujet, mais pour rien au monde le programme ne saurait se retrouver changé. Dans le lit, il bouge le moins possible pour ne pas risquer de réveiller Rory malgré lui, pas alors qu’il a enfin trouvé le temps de se reposer et de reprendre des forces. C’est avec un sourire tendre et comblé que l’anglais l’observe un instant, plus que jamais conscient qu’il vivra jamais avec qui que ce soit d’autre. Non pas qu’il en doutait encore, mais ce voyage a assuré la moindre de ses convictions et il est sans doute le premier étonné à être encore plus amoureux aujourd’hui qu’il ne l’était quelques jours plus tôt, alors que leur escapade touche bientôt à sa fin, déjà. Ses lèvres se reposent contre son front pour l’embrasser, sans doute faudra-t-il repasser pour l’envie de ne pas le réveiller. Sa main s’égare un instant contre sa joue, contre cette mèche trop courte qu’il tente pourtant de placer derrière son oreille. Il sourit dans l’obscurité, bien trop conscient qu’il ne fait que l’embêter bien plus que tout autre chose. Swann n’a sûrement rien de mieux à faire au beau milieu de la nuit mais s’il peut au moins éviter de troubler le sommeil de Rory, alors c’est la solution qui devient la sienne au moment de quitter la chambre de leur hôtel, non sans avoir laissé une note sur le téléphone du brun et pris le sien propre, au cas où il se réveillerait et voudrait l’appeler. La dernière chose qu’il voudrait faire serait de l’effrayer en lui faisant croire qu’il est parti, sans raison apparente.

C’est sur la pointe des pieds qu’il tâtonne pour trouver ses habits et tout aussi doucement qu’il referme la porte de la chambre, priant pour ne pas avoir oublié la carte magnétique. L’hôtel est silencieux, trop sans doute. La lumière s’éclaire sur son passage, elle peine parfois à se réactiver, lui rappelant quelques films d’horreur sans budget. Ça le fait sourire, lui qui ne sait de toute façon pas même ce qu’il cherche, sauf peut-être le rez-de-chaussée du bâtiment pour espérer trouver un fauteuil avec vue sur l’océan. Ce serait pas si mal, pour attendre que le soleil se lève, mais à vrai dire ses plans sont rapidement contrecarrés par une voie familière qu’il ne peut pourtant pas reconnaître aussi rapidement qu’il le voudrait. « Swann ? » Il se fige, fronce des sourcils, se retourne pleinement en direction de la source. Pendant une seconde, il a pensé que ce pourrait être Rory, avant de rapidement revenir à la raison: il connaît bien trop sa voix et, même après une courte nuit, elle ne serait en rien semblable à celle-ci. Finalement, la surprise se lit sur son visage autant que la joie lorsque c’est le visage de Ruben qu’il reconnaît sans mal et vers lui qu’il avance pour lui offrir une accolade. “Merde alors, Ruben, tu m’as fait peur.” Y’a pas idée, aussi, de l’appeler au milieu de la nuit dans un hôtel où seuls ses pas se faisaient entendre. “Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu cherchais Rory ?” Il demande aussitôt, ne pouvant réellement avoir comme première pensée qu’il est lui aussi en vacances tant la coïncidence est étrange, trop étrange. Déjà, il ne peut que penser qu’il est ici parce qu’il n’arrive pas à joindre Rory et qu’il doit lui annoncer une terrible nouvelle - parce qu’il n’y a que pour les nouvelles du genre que les gens se déplacent. “J’ai appris que t’allais être papa, félicitations.” Il ajoute pourtant, autant parce qu’il veut se rassurer que parce que le sujet le touche et qu’il est sincèrement heureux pour le jeune médecin. Preuve en est de son sourire, revenu en force.

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Peut-être qu’il se trompait sur la silhouette qui arrivait à sa hauteur au rez-de-chaussée de le l’hôtel, mais malgré l’heure avancée de la nuit, Ruben ne pensait pas être dans le faux. En revanche, il restait quelque peu sceptique à l’idée que par simple coïncidence, Swann puisse se retrouver face à lui ce soir - n’avait-il pas eu sa dose d’étrange en croisant son propre frère lors d’une escapade faisant partie des activités proposées par ce jumelage et ce voyage ?  Le jeune homme devant lui finit par se tourner complètement vers Ben, fronçant quelque peu les sourcils, ce qui vint arracher un sourire au jeune Hartfield: il n’était en rien dans le faux et avait vu juste en appelant le petit-ami de Rory au milieu de la nuit. « Merde alors, Ruben, tu m’as fait peur. » Il laissa échapper un petit rire, alors qu’il lui rendait sans aucune once d’hésitation l’accolade que l’anglais lui faisait. « Pardon, c’était pas mon but. » Ils étaient surement tout autant étonnés de se croiser l’un l’autre en ces lieux. « Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu cherchais Rory ? » Il fit un pas en arrière, sourire rassurant sur les lèvres, alors qu’il secouait doucement sa tête. « Absolument pas. » Pas qu’il ne serait pas content de le voir ici, détrompez vous; simplement, il n’avait aucune idée que son ami de longue date se trouvait dans les parages, et il était venu choisir avec le plus grand des hasards cet hôtel ce soir pour y passer sa dernière nuit avant de rentrer sur leur continent. « Je savais pas qu’il était là. Enfin, que vous étiez là du coup. » Il était parti presque sur un coup de tête, le brun, à l’aventure alors qu’il cherchait à fuir la réalité qu’il allait se retrouver dès le lendemain lorsqu’il serait de retour chez lui. « Rassure moi et dis moi que vous êtes venus dans le cadre du jumelage et que le hasard n’est pas aussi poussé qu’il en à l’air. » Il ajouta à ses paroles un petit rire - mais ce dernier était forcé.

Et puis, il tendit à disparaitre aussi rapidement qu’il avait pu arriver lorsqu’il entendit les paroles suivantes, prononcées par Swann. « J’ai appris que t’allais être papa, félicitations. » Si la bonne nouvelle avait du mal à se faire voir sur le visage du médecin, elle était en revanche bien présente sur les traits du Buchanan et Ruben se dit en cet instant précis que rien n’était normal, dans cette situation. Oh bien sur, Swann avait amplement le loisir d’être réellement content pour eux; en revanche, il aurait du lui rendre un sourire miroir alors que le sujet de sa futur paternité était avancé - il n’en était rien, et il dut même se forcer pour ne pas venir tirer une tronche de six pieds de long. Swann et lui se connaissaient depuis assez longtemps pour qu’il puisse dénoter que tout cette façon d’agir était on ne pouvait plus faux - mais il était tard, et il était fatigué, surtout fatigué de devoir prétendre partout où il se rendait qu'il était heureux de cette nouvelle. Il tentait quand même, vraiment de tout son coeur, mais il ne garantissait pas que l’acte prête racine auprès de l’anglais. « Je vois que Rory te cache rien. » Qui d’autre aurait pu le tenir au courant de cette nouvelle les concernant Grace et lui. « Merci. Pour les félicitations. » Pour quoi d’autre, après tout ? N’était-ce pas étrange de répondre à ce type de phrase par un remerciement ? Il n’était plus sur de quoi que ce soit dans cette situation, de toutes façons, Ruben. Tout ce dont il était sûr, c’était qu’il ne comptait pas camper à parler de son futur enfant et qu’il préférait détourner la conversation vers les deux tourtereaux en voyage. « C’est marrant, j’ai toujours pensé qu’entre Rory et moi, il serait le premier à devenir papa. » Le sourcil quelque peu haussé, sur son visage, laissait sous-entendre qu’il se demandait si l’idée leur était parvenue, jusqu’à eux deux également. Après tout, Swann et Rory se connaissaient depuis bien longtemps désormais, peut-être que l’idée était au gout du jour pour eux également.

L’accolade est inattendue au plus haut point mais elle est chaleureuse, sincère. Les deux hommes n’ont jamais été aussi proches que Ruben l’est avec Rory mais cela ne les empêche pas de s’entendre sans le moindre mal, autant que de s’apprécier. Et de toute façon, ce n’est pas le calme que Swann cherchait en sortant de sa chambre ; ce n’est pas comme s’il cherchait quoi que ce soit, d’ailleurs. « Pardon, c’était pas mon but. » Ils se séparent rapidement, l’anglais laissant glisser un sourire contre ses lèvres. C’est tout aussi vite qu’il le questionne sur la raison de sa présence en Indonésie autant que dans cet hôtel bien précis, aussi tard dans la nuit, bien plus intrigué que inquiété d’une telle situation. « Absolument pas. » Ses mèches volent doucement lorsqu’il secoue la tête et rassure Swann du seul doute qui pouvait l’habiter, celui qu’il ait quelque chose d’assez important pour devoir le dire à Rory en personne, sans que cela ne puisse attendre leur retour. Fort heureusement, l’idée qu’ils passent enfin des vacances sans le moindre accroc peut continuer à subsister dans son esprit. “Alors quoi ?” Il demande, par simple curiosité finalement. « Je savais pas qu’il était là. Enfin, que vous étiez là du coup. » C’est au tour de Swann d’hocher la tête, n’ayant aucune raison de remettre en doute les paroles de son ami. “On savait pas non plus, si ça peut te rassurer.” Il n’y a rien de rassurant dans ces quelques mots mais Swann les souffle dans un sourire amusé, ne voulant pas lui laisser penser un seul instant que tout tourne déjà à l’interrogatoire.

Son attitude positive se voile d’une ombre sombre lorsqu’après l’avoir félicité pour sa paternité et son enfant à venir, l’attitude de Ruben change du tout au tout, assez pour faire naître une pointe d’inquiétude dans le regard de l’anglais. « Je vois que Rory te cache rien. » Non, bien sûr. Pas à ce sujet, tout du moins. Pas quand il s’agit de lui dire qu’il va être tonton, et que tout porte à croire que Swann a aussi l’impression de se voir annoncer la même chose. Ils étaient heureux, ce soir-là, bien plus heureux que Ruben ne semble l’être en cet instant, sans que cela ne puisse uniquement être lié à la fatigue ou à des pensées volatiles. “Il était trop heureux de me l’annoncer pour ça.” Les deux hommes ont sûrement une infinité de secrets que Swann ne cherche même pas à connaître mais celui-ci n’aurait jamais pu en être un. « Merci. Pour les félicitations. » Il hoche la tête, de rien silencieux que Ruben n’a sans doute pas besoin d’entendre. « C’est marrant, j’ai toujours pensé qu’entre Rory et moi, il serait le premier à devenir papa. » Swann esquisse un rire en demi-teinte, pris de court, ne s’étant pas le moins du monde attendu à ce qu’il ose faire le parallèle. Il décroche un instant son regard du sien pour le faire vriller vers le sol et, après une tape dans le dos du médecin, l’enjoint à avancer avec lui jusqu’au bar de l’hôtel. “C’est pas l’envie qui manque.” Et s’il met un point d’honneur à garder leur vie privée justement privée, il sait aussi que Rory a une totale confiance en Ruben et qu’il est bien placé pour entendre beaucoup de choses ; au moins celles-ci. “Mais tu sais, entre les différentes démarches et le fait qu’on veuille avoir une vie posée et bien ordonnée avant d’agrandir notre famille, t’étais assuré de gagner haut la main.” Il esquisse en quelques mots des problèmes pour lesquels ils ont eu besoin d’années entières pour les régler, et d’autres qui ne le sont toujours pas. En somme, la conclusion reste la même: c’est compliqué. “T’aurais peut-être préféré attendre un peu de ton côté avant de devenir papa, je me trompe ?” Et pour avoir cette discussion, c’est deux verres d’alcool qu’il propose. Après tout, il n’est pas celui qui prend des médicaments, alors rien ne le lui interdit, pas même sa bonne conscience. “Y’aurait pas de mal, si c’était le cas.” Déjà, Swann le rassure à ce propos, n’ayant aucun mal à comprendre le rapport bien différent que chacun entretient avec l’idée, ou non, de fonder une famille.

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« Alors quoi ? » Que ce soit dans son regard ou dans ses paroles, désormais, toute trace d’inquiétude semblait s’être faite la malle. Tant mieux - Ruben n’était pas sur de savoir pourquoi la première réaction de Swann était d’être inquiet quant au fait de croiser l’ami d’enfance de son petit-copain dans un hôtel, à des kilomètres de la ville où ils habitaient tous. « Le hasard, le plus gros des hasards vraiment. J’ai participé au projet de jumelage qu’a proposé la ville de Brisbane avec ici, et je passe la nuit à l’hôtel pour attraper le premier vol demain matin. J’ai du boulot qui m’attend en rentrant à la maison. » Que ce soit autant littéralement dans sa propre maison, qu’au boulot - un seul coup d’oeil à son agenda numérique avait pu lui confirmer que prendre des vacances faisait peut-être du bien au moral mais donnait la double de charge de travail au retour. « On savait pas non plus, si ça peut te rassurer. » Un bref sourire fit son apparition sur les lèvres de Ruben. « Heureusement, je me serais vexé sinon. » Il accompagna ses paroles d’un clin d’oeil, prouvant ainsi à Swann qu’il n’était en rien sérieux et que les deux jeunes hommes faisaient bien ce qu’ils voulaient de leur vie - s’ils avaient envie d’éviter Ben comme la peste pour passer des vacances tranquilles, grand bien leur fasse surtout.

Et s’il ne se serait pas vexé de savoir les deux tourtereaux à profiter de l’endroit où ils se tenaient, cependant son attitude ne sut faire autrement que de changer lorsqu’il comprit que Swann était au courant pour le bébé et qu’il abordait le sujet d’une façon trop naturelle aux yeux de Ruben. Pour lui, si cela avait pu rester un secret aux yeux du monde entier, il aurait pris cette option - également parce-qu’il ne s’attendait pas à devoir prévenir ses proches qu’il serait père dans les mois à venir. « Il était trop heureux de me l’annoncer pour ça. « Rory avait du être bien plus heureux que Ruben lui-même lorsque la nouvelle lui était parvenue, l’australien y mettait sa main à couper. Après tout, une nouvelle arrivée dans une famille était toujours quelque-chose de joyeux, normalement; mais il était vrai que le Hartfield ne s’était pas attendu à être le premier, entre son ami et lui, à ce que cette expérience arrive. Lui qui s’était toujours imaginé avoir des années devant lui avant d’en arriver à ce point là de sa vie devait revoir ses priorités car ce n’étaient plus des années mais simplement des mois qu’il avait à sa disposition désormais. Contre toute attente, ce fut avec une tape amicale dans le dos que Swann lui répondit dans un premier temps, l’intimant à le suivre vers le bar de l’hôtel. Cela se voyait-il donc comme le nez au milieu de la figure, que cette situation n’était en rien confortable pour Ruben ?

« C’est pas l’envie qui manque. » Ils étaient assis au bar lorsque la voix du jeune homme se fit de nouveau entendre, et lorsque Ruben releva son regard vers ce dernier. « Mais tu sais, entre les différentes démarches et le fait qu’on veuille avoir une vie posée et bien ordonnée avant d’agrandir notre famille, t’étais assuré de gagner haut la main. » Et en guise de première réponse à celui qui avait croisé sa route cette nuit, il ne cacha pas son petit soupire. Effectivement, les choses se verraient être bien plus complexes pour les deux hommes, alors que cela crevait les yeux qu’ils seraient de parfaits parents - bien plus que tout ce que Ruben pouvait être, c’était à ne pas en douter. « Vous les avez déjà commencé, les démarches ? Ou vous attendez d’être parfaitement installés juste vous deux pour y jeter un coup d’oeil ? » Parce-que cela n’était pas une surprise: le temps serait leur pire ennemi, dans toute cette histoire. Les démarches pour devenir parents lorsque la conception naturelle n’était pas à l’ordre du jour étaient une vraie épine dans le pied. Le serveur, qui avait été discret jusque maintenant - et qui avait jeté un coup d’oeil légèrement de travers lorsqu’il avait vu Ruben arriver en peignoir sur les lieux, ce dernier n’en ayant rien à faire en réalité de la tenue dans laquelle il se trouvait -, pris finalement leur commande et leur apporta les verres au plus vite. Ce n’était pas une mauvaise idée, un petit remontant; il dormirait que mieux dans l’avion demain matin comme ça. « T’aurais peut-être préféré attendre un peu de ton côté avant de devenir papa, je me trompe ? » Il ne cacha pas le brin de panique qui traversa son regard. « Y’aurait pas de mal, si c’était le cas. » Laissant son regard finalement se poser sur le verre devant lui, une fois de plus, il laissa échapper un soupire. « C’est si évident que ça ? » Les autres autour de lui avaient su simplement se réjouir de cette nouvelle - pour ceux qui avaient été mis au courant -, mais Ruben s’était bien gardé de venir exprimer son avis un brin trop tranché sur l’affaire. En l’espace d’une seconde et pas plus, Swann avait su décrypter que les choses n’étaient pas attendues de la sorte de son côté. « J’aurais aimé attendre que notre vie soit posée et ordonnée aussi, pour être tout à fait honnête. » Après tout, si Rory lui faisait confiance, il pouvait agir de la même manière. « Et ça a beau être le cas vu de l’extérieur, c’est pas comme ça que je vois les choses. Alors forcément, c’est pas maintenant que je me serai vu accueillir un enfant. » Il avait prévu de grimper encore un ou deux échelons à l’hôpital avant de jouer au papa et à la maman avec Grace - vision des choses qu’elle ne semblait finalement ne pas partager avec lui. « C’est égoïste, de te dire ça à toi. » Son regard était désormais emprunt d’une émotivité en rien faussée. « On me donne un enfant alors que j’en attendais pas autant, et j’ose m’en plaindre alors que les choses vont être beaucoup plus compliquées pour vous. » Pour couvrir le petit rire amer qui s’apprêtait à se faire entendre, il but une gorgée de son verre.

« Vous les avez déjà commencé, les démarches ? Ou vous attendez d’être parfaitement installés juste vous deux pour y jeter un coup d'œil ? » Sa main entoure le verre d’alcool, il ne sait déjà plus ce qu’il a commandé. Ce n’est pas grave, il saura tenir le cap sans le moindre mal s’il ne s’agit que d’un verre, et peut-être même que cela l’aidera à aller se rendormir le plus rapidement possible. En attendant, cela lui sert surtout de distraction quand il s’agit d’aborder un sujet qui le rend aussi heureux que triste, sans juste milieu. “Non, pas encore. On sait pas si on se penche vers l’adoption ou autre chose, si on entame les démarches en Australie, en Angleterre ou Dieu sait où non plus. Et entre la théorie et la pratique, pour un couple comme le nôtre, on a parfois des mauvaises surprises.” Il ne donne pas davantage de détails, ayant déjà bien trop l’impression de gâcher le temps de Ruben pour avancer son propre pathos et susciter l’empathie. Tout ce qu’il dit, c’est que l’idée même d’adopter semble être la plus facile, et pourtant certains pays le leur interdisent encore, quand d’autres leur réservent une file d’attente infinie. Swann souffle doucement, sans doute triste, mais pas découragé pour autant. Une gorgée du verre lui redonne déjà un peu de courage. “On va devoir entamer les démarches avant d’être parfaitement installés comme on le voudrait.” Vue le temps qu’elles prendront de toute façon. Cette fois-ci, il esquisse un sourire rassurant.

Face à la panique imprégnant rapidement le regard de son ami lorsqu’il est question de sa paternité, Swann ne tarde pas avant de modérer ses propos et, surtout, de lui préciser qu’il n’est en rien moralisateur, ni même juge, et surtout pas bourreau. « C’est si évident que ça ? » - “T’es un bon acteur mais je commence à te connaître, depuis le temps.” Ils ne sont officiellement beaux-frère que depuis six mois, mais c’est en années que se comptent le temps passé ensemble, à un repas de famille ou un autre, un anniversaire ou une fête. Toujours l’ombre de Rory, l’anglais connaît Ruben depuis son arrivée en Australie ou presque, et peu peuvent se vanter d’une telle longévité. « J’aurais aimé attendre que notre vie soit posée et ordonnée aussi, pour être tout à fait honnête. Et ça a beau être le cas vu de l’extérieur, c’est pas comme ça que je vois les choses. Alors forcément, c’est pas maintenant que je me serai vu accueillir un enfant. » Il hoche de la tête, le blond, comprenant parfaitement ce dont il en retourne. Il n’est pas carriériste lui-même mais n’a aucun mal à comprendre qu’après avoir étudié autant d’années, Ruben souhaite prouver ce dont il est capable, et ce au plus de monde possible. “C’est pas parce que vous vous connaissez depuis aussi longtemps que tu te sens prêt, je peux comprendre.” Ne pas vivre la même vie et ne pas désirer les mêmes choses ne l’empêche pas de ne pas pouvoir se mettre à sa place. Il est empathique et imaginatif, bien assez pour ça. Il veut le mieux pour sa famille, c’est une attitude plus que louable et compréhensible.

« C’est égoïste, de te dire ça à toi. » Swann ne retrouve son regard qu’un instant, esquissant un sourire triste qui ne reflète pourtant qu’à moitié sa pensée. « On me donne un enfant alors que j’en attendais pas autant, et j’ose m’en plaindre alors que les choses vont être beaucoup plus compliquées pour vous. » - “C’est pas parce qu’on veut un enfant que tu devrais t’excuser que ce ne soit pas ton cas dans l’immédiat. On a des vies différentes, c’est normal.” Il voudrait lui dire, à lui aussi, de ne pas aller au bout de cette grossesse si jamais il pense une seule seconde à être absente dans la vie de cet enfant mais il n’en a pas le coeur. Pas avec l’ami de Rory, pas après avoir déjà eu cette discussion avec Maddy. “Ca nous empêche pas d’être vraiment heureux pour toi. Le timing est sans doute pas celui que t’avais espéré, mais ça ne t’empêchera pas d’être un bon père.” Et ça, il le pense sincèrement. Il a toutes les qualités nécessaires à cela. “Rory sait ce que tu m’as dit ?” Plus bas, sur le ton de la confession et en changeant drastiquement de sujet, il le lui demande. “Ca peut rester entre nous, si c’est pas le cas, et si c’est ce que tu veux.” Il n’a pas à tout lui dire, sachant déjà que son petit-ami pourrait comprendre la raison de son silence. Il le ferait pour Ruben, pour Grace aussi.

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« Non, pas encore. On sait pas si on se penche vers l’adoption ou autre chose, si on entame les démarches en Australie, en Angleterre ou Dieu sait où non plus. Et entre la théorie et la pratique, pour un couple comme le nôtre, on a parfois des mauvaises surprises. » Les choses étaient parfois - souvent - injustes. Là où les deux hommes étaient parfaitement prêts à accueillir un nouveau petit être dans leur famille - qu’importe ce que disait Swann, Ruben pouvait voir que c’était le cas sans faire le moindre effort -, c’était lui qui récoltait l’ingrate tâche d’éduquer un enfant, de l’aider à grandir, là où il n’en avait aucunement envie. « On va devoir entamer les démarches avant d’être parfaitement installés comme on le voudrait. » Aux paroles de l’anglais, il se contenta d’hocher doucement la tête. C’était peut-être là leur meilleure espoir que de ne pas avoir le temps contre eux, que d’anticiper la longévité de telles procédures. Ruben gardait cependant dans un coin de son esprit que le jeune homme à ses côtés avait émis la possibilité de commencer cette nouvelle vie de famille ailleurs qu’en Australie, et si l’idée de savoir Rory heureux qu’importe où il se trouvait sur la planète terre le rendait également heureux, il avait un pincement au coeur à imaginer que ça puisse être le cas à des milliers de kilomètres de lui. Dans un pays qui plus était qui lui avait déjà volé des années auprès de son véritable frère, la situation était des plus cocasses.

Pourtant, ce ne fut pas sur cette partie là de l’histoire qu’il ne sut empêcher son inquiétude de se montrer, mais sur le fait que Swann ait deviné qu’il était loin d’être ravi de devenir père si rapidement. « T’es un bon acteur mais je commence à te connaître, depuis le temps. » Une esquisse de sourire se fit voir sur ses lèvres. « C’est Rory, le bon acteur. » Littéralement, sans aucun sous-entendu dans ses paroles que simplement le fait peut-être que cela soit exceptionnel d’ailleurs que Swann soit le premier à s’apercevoir de cette peur appairassent dans le regard de Ruben à chaque fois qu’on lui soulignait qu’il allait bientôt devenir père. Et, peut-être était-ce l’heure avancée de la nuit ou les circonstances plus qu’étranges, mais la réponse qu’il fournit au blond à ses côtés fut imprégnée de toute l’honnêteté dont il disposait. « C’est pas parce que vous vous connaissez depuis aussi longtemps que tu te sens prêt, je peux comprendre. » Un soupire - surement de soulagement - s’échappa d’entre les lèvres du brun. « Si seulement c’était aussi facile que ça. » De simplement réussir à s’accorder avec tout le monde sur le fait que parfois, même si leur parcours semblait parfait et accordé aux attentes de la société, un couple pouvait ne pas se sentir prêt en simultané pour une nouvelle étape de vie.

Balayant ses dernières réflexions d’un revers de la main, il s’excusa cependant auprès de Swann. C’était égoïste de sa part que de se plaindre de sa situation, alors qu’il n’avait simplement que de la chance d’avoir une fiancée pouvant enfanter sans effort et prête à agrandir leur famille à ses côtés. « C’est pas parce qu’on veut un enfant que tu devrais t’excuser que ce ne soit pas ton cas dans l’immédiat. On a des vies différentes, c’est normal. » Il pinça ses lèvres. « C’est quand même maladroit de ma part. » Et il n’aimait pas se trouver dans une telle situation face à quelqu’un qui ne méritait pas que l’on vienne souligner la complexité de sa situation de la sorte. Swann méritait lui aussi, tout comme Rory à ses côtés, de pouvoir agrandir leur famille sans que personne ne vienne leur mettre des bâtons dans leurs roues. « Ca nous empêche pas d’être vraiment heureux pour toi. Le timing est sans doute pas celui que t’avais espéré, mais ça ne t’empêchera pas d’être un bon père. » Le sourire sur les lèvres de Ruben n’était pas volontaire, mais plutôt instinctif. Bien sur qu’il avait espoir d’être un bon père, là n’était pas la question. Il aurait simplement voulu avoir un peu plus de temps pour pouvoir le devenir, rien de plus. Etait-ce trop demandé, à trente ans, que de pouvoir prendre encore un peu de temps pour soi ? « J’espère l’être malgré tout. » Il plongea un instant, un seul, son regard dans celui de Swann. « Merci. De pas ne douter, malgré tout. » Parce-que ce n’était pas avec un début d’histoire de la sorte qu’il mettait les atouts de son côté, Ruben.

« Rory sait ce que tu m’as dit ? » Il perdit son sourire, remplaça sa trace sur ses lèvres par le passage d’une gorgée d’alcool. « Ca peut rester entre nous, si c’est pas le cas, et si c’est ce que tu veux. » Il déglutit avec peine. « Il est pas au courant, non. Ca le briserait, si je lui avouais ça comme je viens de le faire avec toi. » Même sans le fait que la fiancée de Ruben était sa propre soeur, il savait d’avance que cela toucherait le comédien de savoir que son ami ne désirait pas accueillir cet enfant dans sa famille. Mais d’autant plus parce-que c’était Grace qui était présentement enceinte, il ne pouvait se permettre de partager avec lui ses doutes et ses peines. « J’ai pas envie de t’imposer quelque-chose, si tu veux pas le garder pour toi, Swann. Mais si ça peut rester entre nous, je dis pas non. » Un énième soupire, un nouvelle gorgée d’alcool. « J’ai besoin d’un peu de temps encore pour m’habituer à l’idée de devenir père, et j’ai pas envie de faire de la peine à un autre Craine. » Un frisson lui parcourut l’échine à ce même instant, lui donnant la chair de poule. Il avait déjà brisé Grace, il le savait, il n’avait pas besoin de se mettre tout le clan à dos.

« Je me souvenais pas qu’on profitait des moments seuls tous les deux dans les soirées pour se plomber le moral comme ça. » Le rire qu’il ajouta était faux, bien entendu, et se frotter les yeux si fort de la paume de ses mains n’allait arranger rien du tout. Simplement, depuis le temps qu’il connaissait Swann, il avait été plus habitué à ajouter une touche de couleur à ses journées lors des interminables déjeuners de famille chez les Craine plutôt que de ternir leurs conversations.

« C’est Rory, le bon acteur. » Et ça, Swann serait le dernier à le nier, non pas parce que son petit-ami joue un rôle à ses côtés mais bien parce que selon lui, il est l’un des meilleurs de sa génération, si ce n’est le meilleur. Sans doute aussi que son avis n’est que peu objectif. Son sourire fier et ému disparaît bien rapidement au profit d’une mine ô combien sérieuse lorsque le sujet de la paternité revient entre eux tel un boomerang. « Si seulement c’était aussi facile que ça. » Sans réellement savoir ce qu’il sous entend par ces quelques mots, l’anglais se contente de lui sourire, tentant ainsi de lui faire comprendre qu’il est dans son camp, si jamais même il y en avait.

« C’est quand même maladroit de ma part. »
“Non, je trouve pas. T’en fais pas.”

Il n’est pas susceptible et encore moins égoïste. Ce n’est pas parce qu’il n’a pas la vie rêvée sur le terrain de la paternité qu’il pourrait en vouloir à Ruben d’avoir des rêves différents, des envies différentes aussi. Ils ne sont pas la même personne et, de là, il est libre de lui parler de ce dont il veut, surtout au beau milieu de la nuit et de façon inopinée. « J’espère l’être malgré tout. » Swann garde le contact avec les yeux de Ruben. Sur ce point là, il ne se fait pas le moindre souci. Il est soucieux, attentionné, droit. Il est aussi doux et gentil ; il fera un père formidable. « Merci. De pas ne douter, malgré tout. » - “C’est normal.” Il mérite d’être épaulé, si ce n’est par lui alors par qui que ce soit d’autre. S’il n’accueille pas l’arrivée de cet enfant avec autant de joie que les deux hommes auraient pu l’imaginer en retour, n’en reste pas moins que c’est un fait dont leur enfant ne sera jamais tenu au courant, et aux yeux de Swann c’est tout ce qui importe.

La question sur Rory semble amener une vague de panique dans le cœur de l’australien, ce que Swann tente de réparer rapidement en précisant ses propos et, surtout, le fond de sa pensée. « Il est pas au courant, non. Ça le briserait, si je lui avouais ça comme je viens de le faire avec toi. » A cela, il ne peut que déglutir avec peine, incapable de nier l’évidence dans les paroles de Ruben. Il aurait voulu pouvoir dire autre chose mais la vérité est évidente, alors Swann esquisse une moue triste qu’il ne cherche pas à cacher, imaginant déjà la réaction que Rory pourrait effectivement avoir face à une telle annonce, lui pour qui la famille tient une place si importante dans son coeur. « J’ai pas envie de t’imposer quelque-chose, si tu veux pas le garder pour toi, Swann. Mais si ça peut rester entre nous, je dis pas non. » Par mimétisme, Swann boit à son tour une gorgée de son verre. “Je te le propose, Ruben. Je sais ce que ça implique.” Qu’il pouvait accepter la main tendue, comme il vient effectivement de le faire. Ce n’était pas une proposition dans le vent, par simple politesse. Il sait ce qu’il risque à lui proposer de garder un tel secret et, à ses yeux, le jeu en vaut la chandelle. « J’ai besoin d’un peu de temps encore pour m’habituer à l’idée de devenir père, et j’ai pas envie de faire de la peine à un autre Craine. » A ainsi penser aux autres bien avant lui-même, l’anglais en vient à esquisser un sourire. “Si ça vient à se savoir, je sais que Rory comprendra que je n’ai rien dit. Tout comme il comprendra ton ressenti.” Il l’aurait compris s’il lui en avait parlé en temps et en heure mais ce n’est pas le rôle de Swann que de le forcer à le faire ; raison pour laquelle il n’essaye même pas. Il est le petit-ami de l’un, l’ami de l’autre, mais il sait aussi que parfois il vaut mieux ne pas se mettre au milieu d’histoires qui ne le regardent pas directement.

« Je me souvenais pas qu’on profitait des moments seuls tous les deux dans les soirées pour se plomber le moral comme ça. »
“Moi non plus. Tu crois que c’est ça de prendre de l’âge ?”

L’anglais prend donc la tangente, comprenant le sous entendu des paroles d’un Ruben qui ne rêve sûrement que de changer de sujet. Il ne luttera pas pour le contraire, loin de lui l’idée. “Ca serait sans doute un peu différent, maintenant, les repas en famille. Avec les enfants partout et tout le monde en couple, je veux dire, il faudrait réquisitionner le grand salon.” La place ne manque pas chez les Craine, bien sûr que non. Simplement, ils ont tous du mal à s’accorder sur une date ou même sur l’envie de se réunir, voilà leur problème la plupart du temps et pour avoir une famille bien compliquée lui aussi, il ne se risquerait pas à les juger. “Mais au moins on s’enfuie avec un verre, certaines choses ne changent pas.” Et à cette vision, il lève son verre, déjà presque vide, pour porter un rapide toast. “Rory sera sans doute triste de t’avoir raté, tu devrais lui proposer de vous voir quand vous rentrez.” Il soumet doucement la proposition et tous ses entendus, un sourire au coin des lèvres.

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« Non, je trouve pas. T’en fais pas. » Ruben esquissa un petit sourie à l’intention de Swann, remerciement silencieux d’être autant ouvert d’esprit et de tenter de la sorte de comprendre son point de vue. Nombreuses étaient les personnes qui auraient déjà fermé la discussion, ne souhaitant confronter les points de vue sur de tels sujets - ils étaient après tout l’essence même de l’évolution d’un homme selon les critères de la société. « C’est normal. » De penser d’un homme qu’il ferait un bon père alors qu’il semblait dégoûté rien qu’à imaginer le devenir ? Cela montrait surtout une fois de plus que l’anglais face à lui avait vraiment bon fond et qu’il savait voir au delà des apparences, des premières réactions et des jugements qui pourraient être émis par toute personne se trouvant à leurs côtés. En l’occurence, dans la situation de Ruben, la seule personne ayant surement quelque-chose d’assez négatif à dire sur sa personne était Grace elle-même - mais étant donné qu’elle n’était pas présente pour se défendre, il gagnait un peu de répit.

Cependant, lorsqu’il apprendrait l’envers du décor, Rory rejoindrait surement les rangs de sa soeur et le Hartfield n’avait pas hâte d’être à ce jour - qui pourrait arriver bien plus rapidement que prévu si le Buchanan partageait avec son petit-ami la conversation qu’ils étaient en train d’avoir. « Je te le propose, Ruben. Je sais ce que ça implique. » Le regard du dit-Ruben se logea un instant dans les noisettes de l’anglais, ce dernier pouvant certainement y lire un soulagement non-négligeable. Il parlerait avec Rory, c’était promis - il n’aimait pas lui cacher des choses, ni demander à d’autres de le faire pour lui -; il n’était simplement pas encore prêt à avoir cette discussion. « Si ça vient à se savoir, je sais que Rory comprendra que je n’ai rien dit. Tout comme il comprendra ton ressenti. » Il haussa lassement les épaules. « Tu le connais mieux que moi, alors j’espère vraiment que t’as raison. » Parce-que s’il existait bien une personne sur cette terre contre qui il n’avait envie d’être fâché, c’était le Craine; que ce soit par rapport à son point de vue sur la paternité ou sur le fait qu’il ait mis son petit-ami dans la confidence avant de le mettre lui. Et peut-être en réalité que Grace avait déjà vendu la mèche, ouvrant son coeur et l’envers du décor de leur couple à son frère, sans qu’il ne soit au courant. Il n’était pas sûr qu’il s’agisse là d’une meilleure perspective.

« Moi non plus. Tu crois que c’est ça de prendre de l’âge ? » Un nouveau sourire prit place sur les lèvres de Ben alors que Swann saisissait la perche qu’il tendait, de changer de sujet. Ou tout du moins, de ne pas en discuter de façon aussi frontale qu’ils étaient en train de le faire jusque maintenant. « Si c’est ça, j’ai pas hâte de vieillir encore plus. »

« Ca serait sans doute un peu différent, maintenant, les repas en famille. Avec les enfants partout et tout le monde en couple, je veux dire, il faudrait réquisitionner le grand salon. » La famille Craine avait déjà commencé à s’agrandir avec l’arrivée d’un enfant de Rosalie quelques temps auparavant, et déjà les choses commençaient à changer - dans le bon sens du terme, comme dans le mauvais. Effectivement, cela apportait joie et effervescence au sein du foyer, mais cela apportait également son lot de regards de travers - était-ce pour ça que l’idée d’avoir un enfant avait été autant présente, dans l’esprit de Grace ces derniers temps, parce-qu’elle avait vu sa soeur donner la vie ? Ruben ne s’était pas penché sur la question de ce point de vue là. « Je suis sur que les parents Craine ont attendu ça toute leur vie et que le grand salon est déjà prêts à accueillir la nouvelle génération. » Malgré tout, l’idée de voir des bambins courir dans tous les sens au milieu des adultes lors des prochaines réunions de famille décrochait un petit sourire timide à Ruben. Il aimait les enfants, mais des autres pour le moment. « Mais au moins on s’enfuie avec un verre, certaines choses ne changent pas. » Imitant le jeune homme à ses côtés, il leva également son verre, faisant tinter le sien contre celui de l’autre dans la lancée. « Heureusement que certaines choses ne changent pas. » S’il ne s’était pas attendu à trouver un allier de cette taille dans une si grande famille, il était depuis longtemps plus qu’heureux d’avoir croisé le chemin de Swann et de pouvoir le compter parmi ses proches désormais.

« Rory sera sans doute triste de t’avoir raté, tu devrais lui proposer de vous voir quand vous rentrez. » Ce fut avec un petit sourire un brin amusé qu’il répondit dans un premier temps à l’anglais. « Toujours à veiller à son bonheur, à ce que je vois ? » Ils étaient parfaits l’un pour l’autre et si quelqu’un osait dire le contraire, Ruben avait des années de souvenirs pour prouver que c’était le cas. « Mais oui, tu as raison. » Comme souvent. « Quand les choses se seront calmées, avec Grace… » Il n’avait pas besoin de donner de détails à quelle sorte de situation il référait. « … vous devriez venir diner à la maison tous les deux. J’ai pas cuisiné depuis longtemps mais j'ai encore quelques recettes en réserve. » Parce-que bien sur que dans son attirail de gendre parfait, Ruben savait cuisiner par dessus tout. Il ne prenait jamais le temps d’exploiter ses connaissances dans le domaine, mais personne n’était jamais reparti malade après avoir diné chez eux. Une fois ce moment de légèreté passé, cependant, un air davantage sérieux voila le visage du brun. « Comment va t-il, dis moi ? » Parce-que si Swann avait toujours eu à coeur le bonheur et le bien-être de Rory, cela avait également toujours été le cas de Ruben et c’était d’ailleurs peut-être le premier point commun qui les avait rapprochés. « Je sais que ça a pas été facile ces derniers temps, mais je sais aussi qu’il sait faire son plus beau sourire quand il en a envie, pour prétendre que ça va bien. »

Il s’est promis de tout dire à Rory et de ne surtout pas faire peser le poids du secret sur leur relation, mais il sait tout autant que son petit-ami est quelqu’un de raisonné et raisonnable et qu’il saura comprendre les raisons d’un tel silence, quand bien même cela concerne son beau-frère et, par extension, sa soeur. Tous deux savent à quel point Ruben est quelqu’un de bien, Swann n’est personne pour l’accabler de reproches ni même les partager - quand bien même il n’aurait eu l’idée de le partager qu’avec Rory, la personne en qui il a le plus confiance sur cette Terre. Cette discussion, les deux hommes doivent l’avoir ensemble. Cela ne le regarde en rien. « Tu le connais mieux que moi, alors j’espère vraiment que t’as raison. » Il l’espère, lui aussi. Il l’espère sincèrement, en témoigne son sourire bienveillant et le verre qu’il lève une fois de plus en direction du brun, sans un mot de plus.

« Je suis sur que les parents Craine ont attendu ça toute leur vie et que le grand salon est déjà prêts à accueillir la nouvelle génération. » Ruben marque un point, évidemment. Swann hoche vivement de la tête, accueillant cette vision avec une certaine joie. Aujourd’hui, il fait officiellement partie de cette famille et ne se contente plus d’être une pièce rapportée qui n’aurait jamais dû avoir sa place aux anniversaires et autres événements intimes de la famille Craine. Et aujourd’hui, aussi, la fratrie de Rory ne représente plus les plus jeunes de la famille, pour le plus grand bonheur des parents autant que de tous les autres membres. “Ils attendaient sûrement que ça.” Il exagère à peine, en réalité, ayant désormais l’habitude et la connaissance du caractère des parents de Rory. « Heureusement que certaines choses ne changent pas. » Ruben en profite pour ajouter aussitôt, répondant à la proposition à peine voilée du blond de profiter de la moindre occasion pour filer en douce avec une bouteille dérobée et profiter d’un coin du jardin parfaitement entretenu pour parler de la pluie et du beau temps à l’abri de tous les regards et oreilles indiscrètes de la famille. Rien de mauvais là dedans, simplement deux hommes qui ont besoin d’un peu de repos dans leur aventure pour tenter de se faire pleinement acceptés par la famille Craine et toutes ses complexités.

C’est sur un ton bien différent qu’il lui propose et demande de parler à Rory, quand il sera rentré, ne serait-ce pour qu’ils puissent profiter d’un verre ensemble à la terrasse d’un café. Ce n’est pas tant de Grace et leur enfant à venir dont il voudrait qu’ils parlent, simplement qu’ils prennent un peu de temps pour se retrouver en tête à ête et ainsi sortir Rory de ses pensées et de son quotidien ayant tendance à ne comporter que Swann depuis de longues semaines. Il ne se lassera jamais de l’acteur, lui, mais ne veut pas être la seule personne à qui il peut parler en retour, par simple besoin de s’assurer qu’il est et reste heureux et épanoui dans sa vie. « Toujours à veiller à son bonheur, à ce que je vois ? » Il esquisse un sourire presque gêné, laissant un temps son regard retomber sur la table alors qu’une fossette décore sa joue. Bien sûr qu’il continue de veiller sur Rory, sinon que ferait-il de ses journées ? “Certaines choses ne changent pas.” Il commente avec délicatesse, incapable de garder pour lui son sourire dès qu’il est question de l’homme qu’il aime. « Mais oui, tu as raison. Quand les choses se seront calmées, avec Grace… » Il hoche vivement la tête, ne voulant pas lui laisser penser qu’il le presse d’une façon ou d’une autre dans l’opération. Il lui parlera quand il pensera que c’est le bon moment, et pour ça seul Ruben peut en décider. … vous devriez venir diner à la maison tous les deux. J’ai pas cuisiné depuis longtemps mais j'ai encore quelques recettes en réserve. - “Oh.” Il commente en premier lieu, n’ayant pas su anticiper l’invitation chez eux et se voyant pris de court, au milieu de la nuit et avec déjà un peu trop d’alcool dans le sang à son goût. “Je veux dire oui, bien sûr. On serait contents de venir et de te mettre aux fourneaux pour l’occasion.” Et quand bien même il n’aime pas l’idée de parler pour Rory, il anticipe aussi sans la moindre crainte ou doute que ce dernier sera heureux de retrouver sa soeur autant que Ruben, le temps d’un repas chez eux. Et qui sait, ce serait sans doute l’occasion pour imposer une certaine paix dans leur couple, lesquels n’auront pas le temps de trouver des sujets de dissenssion sur Rory et Swann occupent toute la discussion à commenter tout et n’importe quoi.

« Comment va t-il, dis moi ? » L’anglais l’observe un instant, ses yeux sombres traversant le visage du médecin avec une certaine émotion. Lui aussi continue de prendre soin de Rory, quoi qu’il en dise, quoi qu’il en pense. “Il te dira qu’il va bien.” Swann entreprend donc de répondre, l’immense mais à cette simple phrase étant évident. « Je sais que ça a pas été facile ces derniers temps, mais je sais aussi qu’il sait faire son plus beau sourire quand il en a envie, pour prétendre que ça va bien. » Ruben le connaît bien, à n’en pas douter. Il a des années d’expérience avec Rory et l’entente des deux hommes est évidente, autant que le sont les confessions qu’ils se sont partagées au fil des années. Swann ne s’en montre pas jaloux, bien au contraire. Il est plutôt soulagé de pouvoir toujours constater la capacité de son petit-ami à s’entourer des bonnes personnes, lesquelles répondront toujours présentes pour lui. “Honnêtement, ça a été difficile.” Il annonce donc, ne voulant pas mentir à Ruben et sachant déjà que s’il peut confier à quelqu’un les difficultés de la vie de Rory, c’est lui. Sans jugement, sans mauvaise pensée, il saura tout entendre ; ou tout du moins ce que Swann veut bien lui partager, conscient que chaque confession tient ses limites. “Il se sent coupable de s’être blessé et le fait d’avoir dû rester dans l’appartement aussi longtemps n’a rien arrangé.” La gorge nouée, il repense à leurs nombreuses disputes, lesquelles n’auraient jamais existé si l’un comme l’autre n’étaient pas déjà tendus à cause du contexte de leurs vies. “Il… La douleur était forte, on lui a donné des médicaments.” Personne ne le sait, personne n’en a jamais entendu parler. Ruben, lui, peut comprendre. En tant qu’ami, en tant que médecin, il est la bonne personne à qui en parler. “J’étais déjà constamment sur son dos, je voulais pas lui donner l’impression de le fliquer ou de manquer de confiance en lui. Mais entre toi et moi, j’ai peur qu’il garde pour lui l’intensité de la douleur.” Et si aujourd’hui il a l’impression que tout va mieux, il ne saurait finalement dire si c’est parce que c’est vraiment le cas ou si c’est parce que c’est ce qu’il veut entendre et s’en convaincre.

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« Ils attendaient sûrement que ça. » Oh, il n’y avait pas à douter de cette affirmation; les parents Craine n’avaient jamais tenté la subtilité lorsqu’il agissait d’assurer le futur de leur lignée. Ils étaient toujours prêts, aux aguets, afin de s’assurer que leurs progénitures assureraient un futur avec des petits-enfants à la clef. Combien de fois Ruben avait-il s’entendre dire qu’il était peut-être temps de songer à donner des enfants à Grace - et par extension, des petits enfants au couple originel de la famille ? Il but une gorgée de son verre un brin trop rapidement, comme pour chasser définitivement cette idée là de son esprit. Au moins, il en connaissait deux qui allaient être ravis d’apprendre que leur cher et tendre Ruben avait bien travaillé.

L’occasion lancée par Swann de changer de sujet, et de discuter de toute autre chose plutôt que de sa future paternité, fut grandement appréciée par Ruben. Ce qui était également appréciable, c’était de voir que Swann avait toujours à coeur de prendre soin de celui qu’ils avaient en commun. « Certaines choses ne changent pas. » Le sourire de l’anglais était presque timide, ce qui donna un côté amusé à celui de Ben. Lorsqu’il s’agissait de choses positives comme ça, c’était tant mieux qu’elles ne changent pas - c’étaient même des choses à encourager. « Oh. » Ne fut cependant pas une réponse à laquelle il se serait attendue de la part de son ami, et un sourcil quelque peu inquiet fut rapidement haussé sur le visage du jeune Hartfield. « Oh ? » Il venait là autant taquiner Swann qu’il s’inquiétait vraiment de ce début de réponse qui, lui, n’allait pas dans la bonne direction. N’était-ce pas d’une façon déguisée lui-même qui venait de suggérer que Craine et Hartfield se revoient ? Alors, pourquoi pas le faire autour d’un bon diner et tous les quatre plutôt que simplement eux deux ? « Je veux dire oui, bien sûr. On serait contents de venir et de te mettre aux fourneaux pour l’occasion. » Les quelques traits qui s’étaient chargés de porter l’inquiétude sur le visage de Ben firent disparaitre en une fraction de seconde cette dernière, étant donné la réponse positive de son ami. « Tant mieux. » Même s’il ne l’exprimait pas à haute voix, c’était une idée là qui l’enchantait grandement. A quand remontait la dernière fois où ils avaient pu passer un bon moment tous ensemble ?

Pour sûr, cela remontait à plusieurs semaines, puisque dernièrement Rory s’était retrouvé dans l’incapacité de pouvoir se déplacer à son aise - et ça n’aurait été dans une telle période que Ben lui aurait proposé de s’embêter de la sorte. Pendant qu’il avait Swann avec lui, d’ailleurs, il en profita pour prendre des nouvelles de son ami. « Il te dira qu’il va bien. » Ben plissa le nez. Forcément qu’il allait répondre ça, il était parfaitement apte à mentir sur son état afin de ne pas alerter la moitié de la population de Brisbane. De plus, le Craine ne voulait surement déranger ni son ami de longue date, ni sa soeur, avec ses problèmes personnels - ce que Ruben trouvait ridicule puisqu’il se tiendrait toujours disponible pour ses proches s’ils se trouvaient dans le besoin. « Honnêtement, ça a été difficile. » Là étaient des paroles que Ruben croyait volontiers. « Il se sent coupable de s’être blessé et le fait d’avoir dû rester dans l’appartement aussi longtemps n’a rien arrangé. » - « Le contraire m’aurait étonné. » - « Il… La douleur était forte, on lui a donné des médicaments. » Le regard du jeune homme se posa sur Swann, une lueur compatissante dans ce dernier. Il connaissait les procédures et savait vers quelles types de médications pouvaient s’orienter les médecins lorsque cela était nécessaire. Doucement, il hocha la tête. « Ca m’étonne pas non plus. » La gestion de la douleur était quelque-chose de particulier, mais qui avait sa place toute entière dans la continuité des soins lors d'un accident comme celui qu’avait subi Rory. Il était même plutôt rassuré de savoir que ses collègues avaient fait le nécessaire. Cependant, quelque-chose dans la façon dont l’information était apportée par Swann ne plaisait qu’à moitié à Ben. « Mais ? » Parce-que cela crevait les yeux qu’il y avait un mais. « J’étais déjà constamment sur son dos, je voulais pas lui donner l’impression de le fliquer ou de manquer de confiance en lui. Mais entre toi et moi, j’ai peur qu’il garde pour lui l’intensité de la douleur. » Les lèvres de l’australien étaient pincées, l’inquiétude pour son ami réelle et bien présente. Il n’aimait pas ça, de savoir Rory dans une souffrance qu’il ne méritait en rien - la partie de son cerveau qui lui rappelait qu’il connaissait bien mieux qu’il ne voudrait l’avouer cette histoire se faisait petite, en cet instant.

« Tu veux que je lui en parle ? » Il plongea son regard dans celui de Swann. « Il m’en a pas parlé directement, je sais pas s’il veut le faire ou non… mais si tu m’autorises à dire que ça vient de toi, peut-être que je pourrais l’aider. » Loin de lui l’idée de dénoncer les confidences que Swann était en train de lui faire, alors que ce dernier lui avait de son côté promis de ne pas piper mot concernant les inquiétudes du jeune médecin sur sa paternité prochaine. Ruben tentait plutôt ici de se rendre utile, de pouvoir faire quelque-chose là où il n’avait pu être d’une quelconque utilité jusqu’à présent. « J’aime pas, savoir qu’il est comme ça et qu’il en parle pas. Peut-être qu’il veut pas te mettre ça en plus sur les épaules… » Après, traverser une épreuve de cette ampleur avec quelqu’un était déjà assez lourd sans vouloir en rajouter davantage, surtout si Rory s’en voulait déjà assez comme ça. « … mais moi il aurait qu’à me dire d’aller me faire voir s’il trouve que j’empiète trop sur un territoire qui me concerne pas. Et je m’en formaliserai pas. » Haussant les épaules de façon presque lasse, Ben finit son verre d’une gorgée, le reposant délicatement par la suite. Ce n’était pas grand chose, mais c’était toute l’aide qu’il pensait pouvoir apporter - l’heure avancée de la nuit et les quelques centilitres d’alcool n’aidant pas en cet instant - avec les informations qu’il avait là en sa possession.

C’est la gorge nouée que Swann évoque les problèmes auxquels Rory a dû faire face, une part de lui ayant l’impression de trahir la confiance de son petit-ami alors que l’autre sait bien évidemment qu’il n’en est rien et que tout ce qu’il dit ou fait, il le fait pour aider Rory, encore et toujours. D’autant plus qu’il se confie à Ruben et non au premier venu, en sachant que l’acteur a une confiance aveugle en celui qui est son ami bien avant d’être son beau-frère. « Ça m’étonne pas non plus. » Il esquisse un demi-sourire, conscient que Rory est allé au bout de ses capacités en terme de gestion de la douleur mais qu’il ne peut pas s’inventer un rétablissement, peu importe à quel point il souhaite effectivement aller mieux et se donne la force d’y parvenir. Tout ça, Ruben le sait tout aussi bien que lui et sans doute même mieux ; ses études le prouvent. « Mais ? » Mais ce n’est pas tout, mais Rory souffre d’une douleur bien plus intense que ce qu’il souhaite avouer à Swann ou aux médecins. Mais il va mal et son petit-ami ne sait pas y faire, ne sait pas tout court. Mais cette situation le ronge de l’intérieur, quand bien même il voudrait croire qu’ils ont passé l’étape la plus difficile et qu’ils peuvent se contenter d’être pleinement et simplement heureux désormais, l’envie de le demander en mariage se montrant plus forte que n’importe quoi. Il y a ça, c’est bien vrai, mais cela ne fait pas taire ses autres sentiments pour autant, et c’est justement parce qu’il l’aime et tient à lui bien plus qu’à sa propre personne qu’il ne peut pas se contenter de laisser les choses se faire. Alors Swann finit par parler, bien malgré lui.

« Tu veux que je lui en parle ? » L’anglais remonte aussitôt ses yeux dans ceux du médecin, jaugeant rapidement du sérieux de sa question autant que de la possibilité qu’il accepte la proposition. En premier lieu, le silence l’emporte pourtant. « Il m’en a pas parlé directement, je sais pas s’il veut le faire ou non… mais si tu m’autorises à dire que ça vient de toi, peut-être que je pourrais l’aider. » Il éclate nerveusement les bulles d’air entre ses phalanges, pesant rapidement le pour et le contre sans pour autant arriver à en venir une conclusion simple. « J’aime pas, savoir qu’il est comme ça et qu’il en parle pas. Peut-être qu’il veut pas te mettre ça en plus sur les épaules… » Bien sûr que non, Rory ne veut que son bien et il souhaite le délester d’autant de problèmes que possible, surtout s’il juge pouvoir les affronter seuls et avoir déjà bien assez dérangé son petit ami. Swann souffle à nouveau doucement, ses yeux perdus dans les différentes couleurs de son cocktail dont il en demande déjà un autre, estimant que la discussion le nécessite bien plus que son foie. « … mais moi il aurait qu’à me dire d’aller me faire voir s’il trouve que j’empiète trop sur un territoire qui me concerne pas. Et je m’en formaliserai pas. » Il esquisse un sourire amusé, appréciant Ruben pour la personne qu’il est autant que pour son rôle d’ami bienveillant qu’il tient depuis toujours auprès de Rory. “Mon but c’est pas de t’envoyer au charbon.” Qu’il commence donc ses explications, le ton de sa voix laissant largement supposer qu’il ne s’arrêtera pas là. Il ne veut pas faire de Ruben de la chair à canon, encore moins risquer de détruire leur précieux lien. Pourtant, les deux hommes s’accordent déjà sur la nécessité de faire quelque chose, pour le bien de Rory. “Tu as le droit de revenir sur ta proposition. N’importe quand. Mais si tu me le demandes, oui, j’aimerais bien que tu lui parles.” Et c’est difficile pour lui de demander son aide puisque cela revient à avouer qu’il n’est pas aussi présent qu’il le voudrait pour Rory, ou tout du moins capable de résoudre ses problèmes à la hauteur qu’il le voudrait. Mais puisque son ego n’est pas ce dont il est question, il saura prendre sur lui et repousser un peu plus loin ses insécurités, jugeant qu’elles ne sont pas ce qui importe réellement. “Il saura que c’est moi qui t’en aies parlé, mais je sais qu’il a confiance en toi. Et moi aussi, par extension.” Il apprécie Ruben, mais les deux hommes sont évidemment moins proche que lui ne l’est avec Rory, sans que cela n’ait rien de bizarre et bien au contraire. “Je te jette la patate chaude, je suis désolé. Je crois que j’avais juste besoin d’enfin dire à quelqu’un que je m’inquiète.” Et pour autant, il n’a pas les réponses allant avec, ni même une foutue idée de comment Ruben pourrait amener le sujet. Il se contente finalement de plonger la tête en avant pour passer ses deux mains entre ses mèches, rageant contre lui-même de la tournure de la discussion, se gardant d’ajouter d’énièmes excuses. “Aussi bien je me fais du souci pour rien. C’est aussi pour ça que c’est à toi que j’en parle.” Parce que Ruben saura sans doute mieux déceler que lui le vrai du faux, sa formation oblige, autant que le fait que ses sentiments l’aveugleront bien moins que c’est le cas pour l’anglais.

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Peut-être qu’il empiétait là sur un territoire qui n’était en rien le sien, peut-être qu’il n’était pas attendu de cette façon là pour soutenir Rory ou ne serait-ce que Swann à ses côtés en cet instant. Peut-être qu’il ferait mieux de repartir d’où il venait avec ses fausses bonnes idées et sa volonté de vouloir aider tout le monde et peut-être personne à la fois. Mais la façon dont l’anglais à ses côtés en arrivait à parler de son ami depuis l’enfance, Ruben n’aimait pas ça. Il se doutait que les choses n’étaient pas facile pour le Craine et qu’il lui arrivait de minimiser les problèmes pour ne pas trop inquiéter ses proches de son état. Cependant, ce n’était pas en agissant de la sorte que ces derniers étaient réellement rassurés, la preuve en était. Et puis, il disait vrai: si là n’était en rien sa place, Rory lui demanderait d’aller voir ailleurs s’il s’y trouvait et Ben ne lui en voudrait pour rien au monde et s’exécuterait s’il pensait que c’était là la plus sage des façons de rendre servir à tout le monde. Mais pour arriver à agir de la sorte, il fallait qu’il confronte Rory - et ce n’était pas quelque-chose qu’il ferait sans l’accord de Swann, surtout maintenant que ce dernier lui avait révélé des informations qu’il était le seul à détenir. « Mon but c’est pas de t’envoyer au charbon. » Avec cette simple phrase, le Buchanan annonçait la direction que prenait leur discussion et déjà, Ruben faisait signe au serveur de le resservir également. « Tu as le droit de revenir sur ta proposition. N’importe quand. Mais si tu me le demandes, oui, j’aimerais bien que tu lui parles. » - « Swann, si je te propose de lui en parler, c’est pas pour revenir sur ma décision. » Il n’avait rien à perdre, tout à gagner, l’amitié entre Rory et lui ne s’effondrait pas simplement parce-qu’il s’était davantage inquiété pour lui qu’il ne pouvait le faire en temps normal.

« Il saura que c’est moi qui t’en aies parlé, mais je sais qu’il a confiance en toi. Et moi aussi, par extension. » Un petit sourire reconnaissant se glissa sur les lèvres de Ben à l’intention de Swann. Les deux hommes se connaissaient depuis des années désormais, mais ce n’était en rien une raison qui faisait que forcément, ils devaient se vouer une confiance aveugle juste parce-que la personne qui les liait entre eux agissait de telle sorte d’un côté comme de l’autre. Mais justement, ils se connaissaient et se côtoyaient depuis assez de temps pour se permettre d’agir désormais de la sorte, leur permettant d’avoir des discussions comme celle qu’ils partageaient présentement, et d’agir comme ils s'apprêtaient à le faire auprès de l’homme qu’ils avaient en commun. « Je te jette la patate chaude, je suis désolé. Je crois que j’avais juste besoin d’enfin dire à quelqu’un que je m’inquiète. » Il secoua gentiment la tête. « Sois pas désolé, c’est moi qui te propose de la récupérer. » Il but une gorgée de son verre avant d’ajouter les prochaines paroles. « Et c’est normal, de t’inquiéter. Tu l’aimes et tu veux uniquement son bien. » C’était la façon naturelle d’agir lorsqu’il s’agissait de ses proches, de ceux qui importaient dans notre vie. Ils n’auraient pas cette discussion s’ils ne s’inquiétaient pas tous les deux pour Rory. « Donc si plus tard, à un autre moment, t’as besoin de te rassurer et de savoir que t’es pas le seul à t’inquiéter pour lui, faut pas que t’hésites. » Parce-que Ruben saurait toujours avoir une oreille attentive, si tel était le besoin de Swann, pour écouter ses inquiétudes quant à la santé de Rory - ou que puisse être le sujet qui occupait son esprit.

« Aussi bien je me fais du souci pour rien. C’est aussi pour ça que c’est à toi que j’en parle. » En rien une marque d’agacement ou quoi que ce soit, un petit soupire s’échappa d’entre les lèvres du Hartfield. « Aussi bien tu t’inquiètes pour rien, peut-être. » Si c’était quelque-chose de naturelle que de s’inquiéter pour ses proches, parfois l’amour qu’on leur portait nous poussait à être de trop sur nos gardes pour des situations qui ne le méritaient pas forcément. « Mais aussi bien tu le connais assez pour savoir que t’as raison de t’inquiéter comme ça et de pas garder ça que pour toi. » Il ne se présentait pas comme étant le faiseur de miracle, mais Ruben était apte et habitué à porter l’inquiétude des autres, à se porter volontaire pour ne pas les laisser seuls dans une situation qui leur posait problème. C’était même l’exercice auquel il savait le mieux se prêter, si bien qu’il en avait fait son métier. Il savait aussi aujourd’hui que Swann se permettait de lui parler de l’état de Rory parce-que Ben possédait des compétences qui étaient plus avancées que celle de l’anglais, et que des solutions pourraient être apportées par l’australien là où d’autres n’avaient pas les clefs pour les présenter. Il espérait ne pas en arriver là, Ruben; mais il savait qu’en ouvrant une boite de Pandore qui n’était pas sienne, il pourrait être surpris. « Je lui en parlerai, et je verrai avec lui ce que je peux faire pour l’aider. » Il n’ajoutait pas un c’est promis à la fin de ses paroles, mais la façon dont il avait choisi ses mots et dont il les avait formulés laissait sous-entendre tout ça sans aucune difficulté. A voir et entendre la détresse que possédait Swann quant à l’état de santé de son petit-ami, Ruben ne saurait rester en dehors de cette situation désormais. A ce moment là, il se garda bien d’exprimer à haute voix la réflexion qu’il pensait pourtant très fort tout bas; mais Ben espérait qu’effectivement, il puisse venir en aide à Rory et que ce dernier saurait accepter que quelqu’un lui tende la main. Ce n’était jamais simple, d’accepter de l’aide d’autrui, lorsque les choses n’allaient pas de façon ni optimale ni voulue.

A cette pensée, il but une longue gorgée de son second et dernier verre - il sentait l’alcool attaquer son attention et ses réflexes déjà. « Vous rentrez quand, à Brisbane ? » Autant par simple curiosité que parce-qu’ils en auraient des choses à se dire, et à faire ensemble, une fois qu’ils seraient tous de nouveau regroupés sur le même territoire. Ruben n’avait pas oublié qu’avant de discuter de l’état de santé de Rory, les deux hommes avaient statué sur un autre sujet et que ce dernier allait également impliquer l’idée que l’anglais et le chirurgien se croisent de nouveau de façon régulière dans les prochaines semaines. C’était là une chose qui ravissait Ben, en réalité - simplement les raisons pour lesquelles Swann et lui allaient se revoir étaient bien moins ravissantes, à ses yeux. Avaient-ils tous deux un peu de répit avant que ce soit le cas, ou pouvaient-ils silencieusement statuer ici et maintenant que leur repos serait de courte durée pour les semaines à venir ?