Deux semaines, c’était le temps que Nino s’était donné pour recontacter Maze depuis qu’il était allé chez Gaïa. C’était depuis un peu plus longtemps que ça que l’italien s’était enfuit comme un voleur de la plage, cette soirée qu’il avait passé avec Maze, cette soirée où elle avait avoué au brun qu’elle connaissait Gaïa et sans savoir quoi faire de cette information, lui, avait pris la fuite. En colère, sentiment de trahison, sentiment d’avoir été pris pour un idiot. C’était un jeu ? Gaïa avait-elle missionnée Maze de séduire l’homme pour mieux se moquer de ensuite ? c’est la première chose qu’il avait pensé, puis, lorsqu’il avait confronté Gaïa, il avait eu le sentiment de s’être trompé sur toute la ligne. L’italienne était aussi surprise et presque en colère que lui de savoir que l’anglaise leur était commune. Il avait flippé, flippé de savoir ce que Maze pouvait bien savoir à son sujet, flippé de savoir si tout ça n’était qu’une mascarade parce que lui savait une chose : ce lien qui l’unissait à l’anglaise était réel et sincère et que plus que jamais, il serait blessé si ça n’allait que dans un sens.
Les deux semaines les plus longues, Maze avait bien entendu tenté de rentrer en contact avec l’italien après sa fuite, surement en colère de son côté aussi, paumée ou quoi d’autre ? Il ne le savait pas parce qu’il n’avait même pas tenter de lui donner la parole, il n’avait rien écouté de ce qu’elle avait à lui dire. Il avait tourné en rond encore et encore dans son appartement, n’avait mis que très peu les pieds dehors, si ce n’est pour aller récupérer deux jours Lucia chez sa mère, passer un peu de temps avec elle et la redéposer. La dead line arrivait et il savait que si ce n’était pas lui qui allait voir Maze, ce serait Gaïa et d’après la brune, elle n’avait rien dit à propos de son passé, quelques brides d’informations, rien qui ne pourrait réellement le pousser dans le précipice. Et si c’était lui-même qui faisait le plongeon ? Il en avait une boule au ventre. Il avait tenté tant bien que mal de dissimulé celui qu’il avait pu être par le passé, ce qu’il était à Naples, à Scampia. Il n’était plus ce délinquant de quartier, celui qui dealait, celui qui volait, celui qui faisait passer à tabac… beaucoup de choses avaient évolués depuis son arrivée à Brisbane et pour lui, c’était ce qui comptait avant tout. Son frère pourrait sans doute en témoigner, Nino n’était plus ce brigand qu’il avait besoin de sortir de cellule tous les mois. Maze allait-elle pouvoir l’entendre ?
Il se rendit chez elle, du moins, là où elle habitait depuis plusieurs mois à présent. Il semblerait qu’elle y ait élu domicile officiellement. Il espérait au moins que son colocataire ne soit pas là, il espérait surtout qu’elle soit là, car il n’avait pas prévenue de son arrivée et il s’attendait bien sûre à ce qu’elle ne le reçoive pas avec un grand sourire et les bras grands ouverts. Il avait peur.
Il avait sonné sur l’interphone d’un voisin pour pouvoir s’introduire dans l’immeuble où se trouvait le duplex de Maze. C’était la première fois qu’il venait chez elle et même dans le quartier, se disant qu’elle s’était mise plutôt bien à Bayside. Il n’avait jamais vraiment mis les pieds dans le coin, si ce n’est près du port ou encore ce restaurant italien dans lequel il avait recroisé Adèle, il y a quelques temps...
Il avait repéré où se trouvait l’appartement en regardant la liste dans le hall de l’immeuble et se rendit devant celui-ci. Il frappait à la porte, espérait réellement que ce ne soit pas un homme qui finisse par ouvrir et que Maze n’allait pas lui claquer la porte au nez quand elle verra qui vient frapper à sa porte…


@Maze Crawley

Assise sur son lit, un livre en main, Maze jetait des coups d’œil déconcentrés en direction de son téléphone portable posé un peu plus loin. Hors de portée. Parce qu’elle savait pertinemment qu’il ne servait à rien de vérifier une énième fois si Nino lui avait écrit alors qu’il prenait grand soin de l’éviter depuis plus de deux semaines. Elle se doutait que la conversation n’allait pas être plaisante en abordant le sujet Gaïa, mais elle n’imaginait pas qu’il y aurait un complet manque de conversation. Et définitif qui plus est. Avait-il décidé de la rayer de sa vie définitivement sans lui donner d’explications ? Avait-elle si peu d’importance à ses yeux ? Elle avait envie de s’en ficher. De laisser couler et de faire sortir l’Italien de sa vie étant donné que c’était vraisemblablement ce qu’il avait décidé de faire de son côté. Et pourtant elle ne parvenait pas à l’ôter de ses pensées. Ca faisait bien deux jours qu’elle n’avait pas tenté de l’appeler ou de lui envoyer des messages pour comprendre ce qui se passait. Elle avait lâché l’affaire de ce côté-là…mais cela ne l’empêchait en rien de continuer de penser à lui et d’espérer qu’il finisse par lui répondre. Parce que même s’il avait décidé de couper les ponts, elle jugeait qu’elle méritait au moins des explications quant à son départ soudain lors de leur dernier rendez-vous sur la plage. Sa réaction avait été brutale : le choc, puis la fuite. Pourquoi ? Maze ne pouvait que mettre cela en parallèle avec le frisson qui avait parcouru Gaïa quand elle lui avait parlé de son passé et de sa relation avec Nino…et cette addition ne faisait résolument pas bon ménage. Si Nino n’avait rien eu à se reprocher, il n’aurait pas fui comme ça. Et pourquoi Gaïa refusait-elle aussi de lui donner des explications de son côté ? Au milieu de quoi était-elle encore tombée ? Elle reposa son livre à côté d’elle dans un soupir désespéré et dramatique. Elle n’avait de toutes façons pas compris une seule des lignes qu’elle venait de lire car son cerveau était trop occupé à traiter les mille et une questions qui lui traversaient l’esprit depuis deux semaines. S’il y avait bien un domaine dans lequel elle excellait, c’était dans celui qui consistait à imaginer le pire. Et c’était justement là-dedans qu’elle s’apprêtait à se lancer une nouvelle fois quand elle entendit toquer à la porte. Ses sourcils se froncèrent légèrement, inquiète à l’idée de qui elle allait bien pouvoir trouver devant l’appartement. Anwar n’était pas du genre à oublier ses clés, elle avait rarement croisé les voisins, et elle n’attendait personne. Si l’option de rester couchée et de faire la sourde oreille en attendant que la personne parte était tentante, elle daigna tout de même se lever en trainant les pieds pour aller ouvrir. Et si elle espérait une réponse de Nino, elle ne s’attendait clairement pas à le retrouver sur le pas de la porte. Son regard se posa dans le sien, incrédule. Elle resta silencieuse et immobile de longues secondes avant de finir par s’écarter pour le laisser rentrer. Elle voulait des explications. Elle voulait comprendre. Et elle espérait qu’il allait enfin lui apporter des réponses. En revanche cela ne l’empêchait en rien de ressentir un élan de colère en le voyant enfin réapparaître après plusieurs jours de silence radio. Elle avait été prête à prendre sur elle et admettre ses torts quant au fait qu’elle connaissait Gaïa depuis longtemps et qu’elle ne lui en avait pas parlé dès qu’elle avait appris le lien qui existait entre eux. Mais à présent elle était surtout énervée par la lâcheté avec laquelle il avait géré la situation. Et Maze n’avait pas besoin de prononcer un seul mot pour lui faire comprendre qu’elle était en colère. Elle avait claqué la porte et était passée devant lui sans un regard pour se diriger vers la cuisine. Elle avait sorti deux bières du frigo -parce que cette discussion n’allait clairement pas pouvoir se faire autour d’un verre d’eau- et les avait décapsulées avant de poser bruyamment celle de Nino devant lui sur le comptoir. Gardant une certaine distance avec lui, elle s’était adossée contre le mur de la cuisine, sans le lâcher du regard, prenant une gorgée de sa bière avant de lancer les hostilités : « T’es venu parler du beau temps j’imagine ? Un sujet banal, neutre, dont personne n’a rien à foutre et qui ne requiert aucun engagement personnel donc qui te conviendra par conséquent parfaitement ? » Son ton était sec, mais elle ne criait pas. Elle était juste complètement désabusée par la situation. Et si elle était dure dans ses propos, c’était surtout toute sa déception qui s’exprimait. Ainsi que son angoisse de découvrir quelles raisons avaient bien pu le pousser à prendre la fuite.

A vrai dire, Nino n’avait aucune notion des concepts qui existait dans l’ère du numérique, des applications, des téléphones portables. Ghoster, il ne savait même pas ce que ça voulait dire et si on lui expliquait même la définition, il nierait que c’était ce qu’il avait fait avec Maze. Pour lui, ne pas donner de nouvelles n’était pas si étonnant, il avait juste besoin d’un temps de reflexion et il était bien capable de se torturer l’esprit pendant plusieurs jours, avoir besoin de se couper. Avoir un smartphone lui demandait d’être beaucoup plus disponible qu’avant et il n’avait pas l’habitude que cet objet soit l’extansion de son être, contrairement à beaucoup de personne de nos jours. Il n’en était pas accro, mais se rendait compte qu’il y consacrait bien plus de temps que lorsqu’il avait son vieux nokia. Bien sur, il avait beaucoup plus de sources de distractions, des applications en plus. Mais ce n’était pas les applications qui le détournaient de Maze, ou, peut-être bien que si. Il avait depuis, multiplié les rencontres, ce qu’il n’avait pas l’habitude de faire, les dates, comme on dit. Il s’était rendu compte comme c’était devenu facile de rencontrer des femmes, d’aller boire un verre et plus si affinité et pourtant, aussi nombreuses pouvaient-elle être, les femmes qu’il croisait n’arrivaient pas à la cheville de Maze. Aussi belles, aussi charmantes, drôles et intelligentes même, il s’étonnait d’ailleurs d’être capable de ne pas passer pour un mec trop idiot lorsqu’il était avec elles. Mais c’était bien toujours la même personne qui lui revenait à l’esprit lorsqu’il rentrait chez lui, lorsqu’il était seul. Et ça n’a rien à voir avec le fait que de son côté, Maze tentait de rentrer en contact avec lui. Elle avait multiplié les sms, les appels, toujours restés sans réponse. Il était paralysé à chaque fois qu’il voyait son nom s’afficher à l’écran et les jours passaient, la dead line arrivait. Il savait que Gaïa ne le louperait pas.
Le voilà devant sa porte, sentant son pouls s’accélérer à mesure que les secondes passaient depuis qu’il avait frappé. Et voilà que la porte s’ouvre et que, soulagement – ou détresse – Maze apparu sous ses yeux. Il avala sa salive, baissant le regard un court instant pour ne pas à avoir à croiser les yeux revolvers de la brune. Oh oui, elle l’avait sans doute fusillé du regard à l’instant où elle l’avait reconnu. Surprise ? Elle ne devait surement pas s’attendre à ce qu’il se pointe chez elle, même pour lui, c’était étonnant. Les réactions qu’il avait anticipées de sa part n’arrivèrent pas. Il s’attendait à ce qu’elle lui claque la porte au nez, elle ne l’avait pas fait. Il s’attendait à ce qu’elle l’insulte, elle ne l’avait pas fait. Elle s’était décalée, sans un mot, lui laissant l’opportunité d’entrer chez elle, ce qu’il fit d’un pas timide, sans dire un mot non plus. Puis, elle claque la porte oui, mais derrière lui. Il savait quand même qu’il allait passer un sale quart d’heure mais il savait aussi que c’était mérité. Mais alors elle, qu’avait-elle aussi à dire sur ce silence depuis des mois ? Pourquoi ne lui avait-elle jamais parlé de Gaïa ? Non, en fait, pourquoi aurait-elle du le faire ? Elle n’avait aucune obligation et aucune opportunité. Sauf, si comme l’imaginait Nino, elle s’était moquée de lui, depuis le début.
Elle avance, lui passant devant et il la suit, comme un petit chien qui venait de faire une connerie et qui devait éviter d’énerver davantage son maître. Elle sorti deux bières du frigo, au moins, elle avait le sens de l’accueil. Mais contrairement à elle, il ne toucha pas la canette. « T’es venu parler du beau temps j’imagine ? Un sujet banal, neutre, dont personne n’a rien à foutre et qui ne requiert aucun engagement personnel donc qui te conviendra par conséquent parfaitement ? » trop de mots, Maze et trop vite. Bon, il en avait compris l’sens, il était bien moins idiot qu’il ne le laissait paraître quand même. Il ouvrit la bouche et avant de répondre, il se ravisa concernant la bière, elle avait sans doute raison, on a toujours besoin d’une bière. Il la pris, l’approcha vers lui avant de la lever vers ses lèvres pour en boire quelques gorgées. « J’ai vu Gaïa. j'suis allé chez elle.» qu’il lacha, parce que c’était bien le sujet de la discorde. « Dis moi juste pourquoi tu m’as jamais dis que tu la connaissais, et pourquoi ca sort d’un coup ? Est-ce que vous vous êtes foutus d’moi depuis l’début ? » c’était même pas un reproche, il avait juste besoin d’écarter ces soupçons-là, de se rassurer sur la sincérité de Maze.

Elle l’observa silencieusement tout en reprenant par moment une gorgée de bière. Il attendait quoi à ouvrir et fermer sa bouche comme le plus perdu des poissons rouges ? Elle l’avait rarement vu aussi déstabilisé et si, en temps normal, elle se serait fait violence afin de faire preuve de plus de clémence et tenter de décrypter avec lui les sources de son malaise, la situation n’avait malheureusement rien de normal. Il y avait une raison pour qu’il se montre aussi démuni et stressé face à elle. Tout comme il y avait une raison pour qu’il ait décidé de ne plus donner signe de vie. Et toute la bonne volonté de Maze n’aurait pas suffi à gommer sa colère et son propre stress face à ce qui l’attendait. « J’ai vu Gaïa. j'suis allé chez elle. » Elle hocha sobrement la tête, ravie de constater qu’il avait retrouvé la parole. Les explications s’en seraient retrouvées bien compliquées s’il n’avait pas été en mesure d’aligner deux mots. Et bien que l’information la surprenne, elle décida de ne pas le couper dans son élan. « Dis moi juste pourquoi tu m’as jamais dis que tu la connaissais, et pourquoi ca sort d’un coup ? Est-ce que vous vous êtes foutus d’moi depuis l’début ? » « Pardon ? » Les sourcils froncés, les traits de son visage s’étaient tous transformés en l’espace d’une demi-seconde pour refléter son incrédulité face à ses propos. « Putain mais qu’est-ce que tu racontes Nino ? » Sa voix était cette fois-ci bel et bien montée de quelques tons. La moitié de ses questions étaient légitimes même si elle n’aurait clairement pas eu le culot de les aborder dès le début de la conversation si les rôles avaient été inversés. Mais qu’elles se soient foutues de lui depuis le début ? Qu’est-ce que c’était que ces conneries encore ? « Je suis pas certaine d’être celle qui a le plus d’explications à donner dans cette histoire mais puisque tu tiens absolument à le savoir, je connais Gaïa depuis des années. » Elle ne s’attendait pas à ce qu’il débarque pour lui faire son propre procès. Mais il voulait savoir ce qu’il en était ? Très bien. Il allait être bien déçu face aux scénarios qu’il s’était vraisemblablement faits tout seul comme un grand dans sa tête. « Par contre ça fait pas si longtemps que ça que j’ai découvert que vous vous connaissiez. » Certes elle aurait largement eu le temps d’en parler plus tôt…mais le temps qui passe était une notion toute relative. « Et il me restait plus qu’à assembler les pièces du puzzle récoltées malgré moi depuis que je vous connais pour comprendre que Gaïa ne te portait pas dans son cœur et que c’était vraisemblablement réciproque. » Apercevoir Vittorio à l’hôpital en allant récupérer son amie avait été la pièce ultime qui lui avait permis de décrypter toute cette histoire. Elle marqua quelques secondes de pause avant d’ajouter un tacle bien mérité : « Enfin quand je parle des informations que j’ai pu récolter au fil des années…je parle surtout de celles que Gaïa m’a données. Parce que c’est clairement pas toi qui allais te confier à moi. » Son regard obstinément ancré dans le sien, elle attendait une quelconque réaction de sa part. Mais elle n’avait pas fini son plaidoyer et elle n’avait toujours aucunement l’intention de minimiser son ressenti pour le mettre moins mal à l’aise. « J’avais juste peur de la réaction que pouvaient avoir deux personnes auxquelles je tiens plus que de raison en apprenant tout ça. » Elle craignait qu’ils se sentent trahis. Et à juste titre si l’on considérait la manière dont Nino s’était éclipsé sans un mot lors de leur dernier rendez-vous. Gaïa était quant à elle tombée des nues mais avait au moins eu le courage d’affronter cette conversation avec Maze. « J’en ai parlé à Gaïa…elle a refusé de me dire quoi que ce soit sur votre passé. C’est pour ça que j’ai voulu en parler avec toi. » Le frisson qui avait parcouru son amie quand elle avait refusé de lui en dire plus au sujet de l’Italien avait eu raison de ses nerfs. C’était pour cette raison qu’elle avait fini par aborder le sujet avec lui. Parce qu’elle voulait avoir le fin mot de l’histoire et comprendre ce qui s’était passé pour, elle l’espérait, être enfin rassurée. Mais le silence de Nino n’avait fait qu’accentuer encore un peu plus ses craintes. « Alors pour répondre à ta dernière question Nino…j’en sais rien. Lequel d’entre nous se fiche le plus de l’autre depuis le début à ton avis ? » Son ton était certes à nouveau plus calme, mais également d’une froideur dont elle n’avait jamais fait preuve à son égard. Parce qu’elle était en colère mais aussi et surtout profondément blessée par sa réaction et ses accusations.  

« Pardon ? »  La technique de Nino n’était surement pas la meilleure, mettre en avant que Maze et Gaïa s’étaient moquée de lui ne pouvait que contrarier davantage la brune. Nino avait l’habitude des coups de couteau dans le dos, depuis qu’il était jeune, l’habitude d’être trahis et qu’on le manipule bien qu’il pensait être souvent celui qui menait le jeu. C’était rarement le cas. Même si sa vie n’avait plus rien à voir avec son passé à Scampia, il ne pouvait pas non plus effacer tous les traumatismes qu’il avait vécu et qui étaient bien encrés en lui. Pas toujours simple de réellement tourner la page, malgré tous les efforts qu’il pouvait faire, parfois, c’était plus fort que lui. « Putain mais qu’est-ce que tu racontes Nino ? » pourquoi ne se contentait-elle pas de répondre simplement à sa question, aussi maladroite pouvait-elle être ? Tentative d’évitement ? Possible, du moins, c’est ce qu’il pensait actuellement. Elle était prise la main dans le sac et n’assumait pas, voilà tout. « Je suis pas certaine d’être celle qui a le plus d’explications à donner dans cette histoire mais puisque tu tiens absolument à le savoir, je connais Gaïa depuis des années. » Ca, il avait compris, mais ça ne répondait pas à sa question. S’étaient-elles moquées de lui, toutes les deux ? « Par contre ça fait pas si longtemps que ça que j’ai découvert que vous vous connaissiez. » Ah. Un semblant de réponse ? Ou avait-elle chercher à gagner du temps pour savoir quoi lui dire et semer le doute ? « Et il me restait plus qu’à assembler les pièces du puzzle récoltées malgré moi depuis que je vous connais pour comprendre que Gaïa ne te portait pas dans son cœur et que c’était vraisemblablement réciproque. » elle avait les mots justes et résumait très bien la situation. Gaïa et Nino ne s’aimaient pas et à raison. Du moins, Nino était persuadé d’avoir les bonnes raisons pour ne pas la porter dans son cœur, comme Maze pouvait le dire. Alors que Gaïa avait simplement payé les conséquences de ses actes. Mais aujourd’hui, peut être qu’il regrettait d’être allé aussi loin. Il sait que le comportement et les réactions qu’il pouvait avoir, lorsqu’il était en Italie n’étaient pas adapté, mais ça, sur l’instant présent, il n’en avait pas l’impression. C’était un comportement normal pour survivre dans un mode de lions en cage. « Enfin quand je parle des informations que j’ai pu récolter au fil des années…je parle surtout de celles que Gaïa m’a données. Parce que c’est clairement pas toi qui allais te confier à moi. » a quoi bon ? Qu’attendait-elle de lui ? Qu’il lui dise qu’il était un délinquant de bas étage ? Qu’il passait son temps à dealer, à cambrioler des appartements et des villas de riches sur la côte napolitaine ? Qu’il passait à tabac les emmerdeurs de service ? Pour qu’elle lui tourne le dos ? Qui voudrait fréquenter un mec comme ça. Ce n’était plus le mec qu’il était aujourd’hui et elle ne ferait sans doute pas la différence. « J’avais juste peur de la réaction que pouvaient avoir deux personnes auxquelles je tiens plus que de raison en apprenant tout ça. » il avait du mal à comprendre où elle voulait en venir. « J’en ai parlé à Gaïa…elle a refusé de me dire quoi que ce soit sur votre passé. C’est pour ça que j’ai voulu en parler avec toi. » et c’est pour ça que Gaïa a laissé un ultimatum à Nino pour qu’il lui annonce lui-même dans un temps à parti ? Ben voyons.  « Alors pour répondre à ta dernière question Nino…j’en sais rien. Lequel d’entre nous se fiche le plus de l’autre depuis le début à ton avis ? » il fronça les sourcils, regarda Maze en restant encore silencieux, sentant que son corps battait la chamade sous sa poitrine et que ses mains devenaient de plus en plus moites. « J’me suis jamais foutu de toi ! » il prenait un ton semblable à celui qu’elle avait emprunté quand il avait débarqué ici. Il était ferme et ne lui laisserait aucun doute à ce propos. « J’vais pas raconter ma vie à toutes les personnes que j’croise sous prétexte que peut être, on a des connaissances en commun. » venait-il de comparer Maze au tout venant, sans distinction de sentiment ? Peut être. En tout cas, que ce soit elle ou quelqu’un d’autre, personne n’a envie d’entendre son histoire. « J’vais te dire ce qu’il s’est passé, mais j’vais aussi te dire ce qu’il va se passer ensuite Maze. » il avala sa salive, ayant l’impression d’avoir un couteau sous la gorge, forcé de se dévoiler alors qu’il déteste ça, qu’il ne l’a jamais fait. La réalité c’est qu’il est empli de honte et qu’il a peur de se retrouver seul ensuite. « Il va se passer que tu voudras plus jamais me voir, que t’auras pas envie de fréquenter un mec comme moi. Parce que tu vas te concentrer uniquement sur ces dernières paroles et oublier tout le reste depuis qu’on s’est rencontré. » ce mec charmeur, un peu brut et maladroit qu’elle a rencontré sur son balcon il y a quelques années. Ce mec un peu idiot mais charmant qui joue de ses origines italiennes pour faire semblant de ne pas tout comprendre à ce qu’il se passe et ce qui se dit autour de lui, juste pour n’avoir aucun effort à faire. Ce mec susceptible et bougon qui boit volontiers un coup quand il est contrarié. Ce mec sur qui elle pourrait compter à tout moment de la journée et de la nuit, si elle lui demandait… « J’ai grandit dans un quartier où la Mafia italienne est à chaque coin de rue, que si tu te plis par à leur loi, t’es bon pour crever la bouche ouverte sur un trottoir à l’âge de 18 ans. J’suis pas un enfant d’cœur. J’ai pas de diplôme, j’ai jamais été foutu d’apprendre une leçon par cœur. J’ai vendu d’la drogue, j’ai volé des mecs blindés alors qu’il conduisait leur Ferrari sous nos yeux de gosses qui avaient la dale. J’ai braqué des bijouteries. J’ai menacé des personnes de les butter avec un flingue. J’ai fais passer Gaïa à tabac parce qu’elle a touché la seule personne qui avait un peu d’interet pour moi à l’époque. Voilà, tu sais tout c’que tu devais savoir. C’est maintenant que j’me casse ? »

« J’me suis jamais foutu de toi ! » Maze était énervée et dans de parfaites conditions pour rendre Nino directement responsable de tous les maux du monde entier. Pourtant elle eut un mouvement de recul en l’entendant se défendre de la sorte. Parce qu’il avait l’air sincère et véritablement offusqué par son accusation. Toute la mauvaise foi du monde n’aurait pas suffi à la faire douter de son honnêteté à ce moment précis. Est-ce que cela suffisait pour autant à lui faire passer l’éponge sur le silence radio qu’il lui avait imposé ? Certainement pas. « J’vais pas raconter ma vie à toutes les personnes que j’croise sous prétexte que peut être, on a des connaissances en commun. » Elle se pinça les lèvres avant de lâcher spontanément et avec rancœur : « Ravie de constater que je ne suis qu’une personne que tu croises. Je pensais naïvement compter un peu plus que ça pour toi. » Parce que c’est ce qu’il venait de dire non ? Qu’elle ne sortait pas plus du lot qu’un parfait inconnu ? Qu’elle ne valait pas la peine qu’il lui raconte son histoire et qu’il se confie à elle ? C’est en tout cas comme ça qu’elle traduisait ses mots, sans avoir conscience que l’état émotionnel dans lequel elle se trouvait ne faisait que lui faire voir les choses plus noire encore qu’elles n’étaient, déformant au passage allègrement la réalité des faits. Pour Maze il n’y avait qu’une vérité : Nino ne lui avait jamais parlé de son passé parce qu’elle n’avait pas véritablement de valeur à ses yeux. Ou en tout cas pas autant qu’il n’en avait aux siens. Et il venait de le lui confirmer. « J’vais te dire ce qu’il s’est passé, mais j’vais aussi te dire ce qu’il va se passer ensuite Maze. » Les doigts de sa main droite se crispèrent un peu plus autour de sa bouteille alors qu’elle effectua une révérence exagérée de la main gauche pour l’inviter à parler. Enfin. Mais les mots semblaient avoir du mal à sortir. Elle se pencha en avant et posa ses avant-bras sur le comptoir tout en le fixant, en attendant la suite de l’histoire. « Il va se passer que tu voudras plus jamais me voir, que t’auras pas envie de fréquenter un mec comme moi. Parce que tu vas te concentrer uniquement sur ces dernières paroles et oublier tout le reste depuis qu’on s’est rencontré. » Ses sourcils se froncèrent avant qu’elle ne rétorque, sans filtre aucun (parce qu’ils étaient là pour enfin se dire les choses après tout, non ?) : « Je sais pas si je dois m’inquiéter de ce que t’as à me dire ou du peu d’estime que tu sembles avoir de moi pour considérer que je pourrais agir comme ça. » Elle était à la fois énervée et peinée par ses propos et par l’image qu’il semblait avoir d’elle. « T’as peut-être raison de considérer que je suis une personne lambda finalement. J’ai de plus en plus l’impression qu’on est que deux inconnus l’un pour l’autre. » Elle se faisait mal avec ses propres mots, mais elle ne pouvait s’empêcher de les prononcer. Elle n’avait plus l’intention de cacher la moindre pensée qui pourrait lui traverser l’esprit. Tout simplement parce qu’elle avait la désagréable impression qu’ils n’avaient de toutes façons plus rien à perdre. Mais elle l’écouta. Elle était suspendu à ses lèvres, le visage de plus en plus sévère au fur et à mesure qu’il avançait dans son histoire. Non pas parce qu’elle était en train de le juger, mais bel et bien parce qu’elle tentait de visualiser toutes les épreuves qu’il avait dû traverser en Italie et qu’il était en train de lui décrire. Evidemment que ça n’était pas cette personne qu’elle avait en face d’elle. Nino n’était pas suffisamment bon acteur pour se faire passer pour quelqu’un qu’il n’était pas. Cela lui aurait par ailleurs certainement demandé trop d’efforts. Alors elle ne pouvait que comprendre qu’il avait en effet bien changé depuis cette époque là et qu’il était devenu quelqu’un d’autre. Mais même en ayant conscience de tout ça, elle n’avait pu s’empêcher d’abaisser son regard vers sa bouteille et de reculer quelque peu quand il évoqua le passage à tabac de sa meilleure amie. Peut-être que l’information aurait été moins brutale à assimiler si elle n’avait pas concerné très directement une personne à laquelle elle tenait autant. Agacée par les derniers mots qu’il avait prononcés, sa main libre vint claquer contre la surface du comptoir, les yeux toujours rivés vers sa bouteille. « Non Marchetti, c’est pas maintenant que tu te casses putain. C’est pas en fuyant qu’on règle ses problèmes. » Qu’il évite donc de reproduire la fin de leur dernier rendez-vous à la plage. « Tu me laisses deux minutes pour assimiler tout ça ok ? Je pense pas que ce soit trop te demander. » Parce que son cerveau était présentement un bordel sans nom dans lequel toutes les informations se mélangeaient et qu’elle avait besoin d’y faire du tri. Gaïa avait fait du mal à Vitto et Nino. Mais la réaction de ce dernier n’était-elle pas complètement disproportionnée ? Maze n'était pas capable de justifier un quelconque acte violent, encore moins après le traumatisme qu’elle avait vécu. Et pourtant elle ne se voyait pas non plus rayer l’Italien de sa vie pour autant. « Tu sais ce que c’est mon problème Nino ? C’est que ne plus te parler, même après tout ce que tu viens de me dire, me parait complètement inconcevable. Pourtant toi t’as eu aucun mal à agir de la sorte avec moi ces dernières semaines. » Ca n’était certainement pas le plus gros problème après ce qu’il venait de lui dire. Mais ça en restait un malgré tout. Elle daigna finalement se redresser pour le regarder à nouveau, une expression indéchiffrable sur le visage. « Comment est-ce que vous vous entendez avec Gaïa aujourd’hui ? » Parce qu’elle ne savait pas par où commencer, ni comment réagir face à ses confessions. Mais elle savait que si Gaïa acceptait de lui parler ou ne serait-ce que de se trouver dans la même pièce que lui, c’est qu’elle était parvenue en partie à mettre cette histoire derrière elle. Elle avait besoin de se rassurer en se disant que son amie tolérait l’italien aujourd’hui, malgré ce qu’il lui avait fait subir. Pourtant, tout ce qu’elle avait en tête pour l’instant, c’était le frisson qui avait parcouru Gaïa quand elle lui avait raconté une partie de sa version des faits. Et elle avait peur de découvrir qu’il lui restait autant de traces de ce passage à tabac qu’elle n’avait elle-même de traumatismes suite à son enlèvement.  

« Ravie de constater que je ne suis qu’une personne que tu croises. Je pensais naïvement compter un peu plus que ça pour toi. » Maze devait bien savoir que la délicatesse ne faisait pas partie des qualités de l’italien. Il était maladroit et ne se rendait pas toujours compte de la manière dont il disait les choses. Bien sûre que Maze n’était pas simplement cette personne rencontrée par hasard, ou du moins, ça faisait des années qu’elle ne l’était plus. Il avait ce sentiment d’être complétement à côté de la plaque dès qu’il ouvrait la bouche et c’est sans doute pour ne pas vouloir décevoir une des seule personne qui compte réellement pour lui qu’il avait fait l’effort de venir ici finalement, qu’il voulait faire en sorte de garder Maze près de lui. De toute façons, Gaïa ne lui avait pas laissé le choix, il était ici surement sous contrainte, mais finalement, il voulait aussi prouver à la brune qu’il tenait à elle, quitte à devoir la perdre en faisant preuve d’honnêteté, pour une fois.
De nature pessimiste, l’italien était persuadé qu’elle ne voudrait plus lui adresser la parole quand elle connaitra vraiment ses origines et le passif qui allait avec, d’autant plus concernant Gaïa, il était clairement tombé sur la mauvaise pioche. « Je sais pas si je dois m’inquiéter de ce que t’as à me dire ou du peu d’estime que tu sembles avoir de moi pour considérer que je pourrais agir comme ça. » Il aurait corrigé en disant que c’était de lui-même qu’il avait peu d’estime mais la laissait reprendre la parole. « T’as peut-être raison de considérer que je suis une personne lambda finalement. J’ai de plus en plus l’impression qu’on est que deux inconnus l’un pour l’autre. » il n’avait aucune envie de la laisser entendre ça parce que pour lui, Maze était plus que ça, bien plus… et plus le temps passait, plus ça se confirmait. Puis, il se lança pour de bon, maintenant, c’était quitte ou double. Si son regard visait le visage de la brune, sa vision était comme brouillée pour ne pas à voir ce qu’elle pouvait en penser et il vit bien le recul qu’elle pris lorsqu’il évoqua son amie italienne. Il avala sa salive, démontrant pour la première fois cette honte qu’il pouvait ressentir d’avoir été ce mec là. Mec qu’il avait la sensation de pouvoir redevenir n’importe quand. Après tout, s’il avait été capable de ces actes par le passé, pourquoi ne pourrait-il pas à nouveau les reproduire ? L’excuse de Lucia semblait lui satisfaire pour le moment mais Katherine pouvait aussi décider de lui retirer la garde de leur fille, de l’en tenir éloigner quand elle apprendra elle aussi de quoi le Marchetti était capable. Un rien pourrait le faire vriller et repartir dans ses travers.
L’italien fu rapidement ramené à l’instant présent en entendant claquer la paume de la main de Maze sur le plan de travail qui les séparait. « Non Marchetti, c’est pas maintenant que tu te casses putain. C’est pas en fuyant qu’on règle ses problèmes. » c’était pas une question de fuir ses problèmes, c’était plus question de savoir si elle allait l’accepter ou non. Elle-même ayant vécu des événements traumatisants dans sa vie, et assez récemment, peut être qu’elle pourrait l’assimiler à ces gens qui lui ont fait du mal… «Tu me laisses deux minutes pour assimiler tout ça ok ? Je pense pas que ce soit trop te demander. » obéissant, comme un chien a qui on demande de rester calme et de ne pas bouger en attendant un signal d’alerte pour pouvoir s’exprimer. L’italien reste bouche bée, sentant ses pulsations courir derrière un train en pleine vitesse. C’est pourtant jamais bon de laisser quelqu’un trop réfléchir.  « Tu sais ce que c’est mon problème Nino ? C’est que ne plus te parler, même après tout ce que tu viens de me dire, me parait complètement inconcevable. Pourtant toi t’as eu aucun mal à agir de la sorte avec moi ces dernières semaines. » s’il avait l’impression que le train perdait en vitesse quand Maze repris la parole, il le voyait de nouveau s’éloigner avec sa conclusion. Oh qu’il allait ramer encore et encore et en même temps, il ne pouvait qu’admettre que ce que venait de lui dire Maze lui avait fait du bien… « Ca a pas été facile… » qu’il se permet tout de même de répondre, bien qu’on ne lui avait pas demandé son avis. . « Comment est-ce que vous vous entendez avec Gaïa aujourd’hui ? » il grimace, fallait pas trop en demander non plus. « C’est la meuf de mon frère. » qu’il dit, alors que ça lui arrache les lèvres de l’admettre. « on s’est croisé plusieurs fois à Brisbane, depuis qu’on est là, elle et moi. J’ai l’impression qu’elle veut m’arracher la tête dès qu’elle me voit. » à juste titre non ? « Mais c’est aussi grâce à elle que j’suis là aujourd’hui. » enfin, grâce ou à cause… « c’est elle qui m’a dit de venir te voir. » qui aurait cru qu’il aurait cédé ? Enfin, il avait pas réellement le choix. « J’te jure que tu m’as manqué Maze… je savais juste pas comment faire et comment te dire tout ça. » il redressa son visage et cette fois, il ne voyait plus flou en regardant l’anglaise en face de lui. « Elle m’a un peu forcé la main pour que j’te parle de tout ça, c’était elle ou moi. Elle m’a donné 15 jours… j’voulais pas que tu l’entende de sa bouche. » preuve de courage ? Selon lui, oui. « crois pas que c’était facile de faire comme si t’existait pas pendant tout ce temps. J’t’assure que c’était pas le cas… »

La britannique était tiraillée entre différents sentiments qui ne l’aidaient en rien à rationnaliser la situation. Elle était énervée. Elle lui en voulait. Et pourtant elle ne pouvait s’empêcher de constater qu’il avait l’air sincèrement désolé et perturbé. Est-ce que ça allait lui suffire pour tourner la page pour autant ? Certainement pas. « Ca a pas été facile… » Elle secoua la tête de gauche à droite. On tendant l’oreille, on aurait presque pu entendre le buzzer "mauvaise réponse" qui venait de résonner dans sa tête. « Et pourtant t’en as été parfaitement capable. T’as tenu. Félicitations. » Son ton s’était fait à nouveau froid l’espace d’un instant. Il n’avait pas été contraint par quiconque à agir de la sorte. Il aurait pu choisir de procéder autrement, sans la tenir à l’écart aussi longtemps. Il aurait pu commencer par lui dire qu’il avait besoin de temps pour réfléchir à tout ça plutôt que d’opter pour le silence radio. Peut-être l’aurait-elle mal pris également, mais sans aucun doute moins qu’avec l’option qu’il avait choisie. Son regard restait fuyant, le malaise était palpable d’un côté comme de l’autre. Mais aucune gêne n’aurait pu empêcher Maze de dire ce qu’elle avait sur le cœur présentement. Et une fois ses piques lancées, elle avait choisi de s’enquérir de la relation de l’Italien avec son amie. Comme si le fait qu’ils puissent s’entendre aurait permis d’une certaine manière de dédouaner Nino. Mais elle savait pertinemment que ça n’était pas le cas et qu’elle allait devoir avoir une nouvelle discussion avec Gaïa pour mettre les choses au clair une bonne fois pour toutes. « C’est la meuf de mon frère. » « Ca j’ai cru le comprendre merci. » Tardivement, certes, mais l’information était à présent bien ancrée dans son cerveau. « on s’est croisé plusieurs fois à Brisbane, depuis qu’on est là, elle et moi. J’ai l’impression qu’elle veut m’arracher la tête dès qu’elle me voit. » Super. Parfait. Elle ne pouvait même plus espérer se raccrocher à sa théorie de la bonne entente. « Mais c’est aussi grâce à elle que j’suis là aujourd’hui. » Ses sourcils se froncèrent. « c’est elle qui m’a dit de venir te voir. » Ha. Etait-elle censée se sentir réconfortée par cette information ? « Donc sans Gaïa, tu serais encore en train de m’ignorer ? Est-ce que c’est ça que je dois comprendre ? » Elle était blessée. Elle savait qu’elle détournait allègrement ses propos et que ses conclusions étaient hâtives. Mais la question méritait d’être posée malgré tout : quand serait-il venu la voir si Gaïa ne lui avait pas dit de venir ? Serait-il seulement venu ou aurait-il choisi la solution de facilité consistant à faire l’autruche jusqu’à la fin des temps ? « J’te jure que tu m’as manqué Maze… je savais juste pas comment faire et comment te dire tout ça. » Son regard avait cessé d’être fuyant. Il la regardait enfin dans les yeux et ce qu’elle lisait sur son visage lui permit de se calmer quelque peu. « T’aurais pu faire n’importe quoi…mais pas ça. » Parce qu’elle l’avait mal vécu. Parce qu’elle avait eu le temps d’imaginer les pires scénarios : « Je pensais vraiment que c’était fini et que tu m’en voulais au point d’avoir tiré un trait sur moi. » Ce qui aurait signifié mettre très rapidement derrière eux des années de relation pour un mensonge qui n’en était pas vraiment un. Mais elle était suffisamment rancunière pour savoir que cette option était envisageable. « Elle m’a un peu forcé la main pour que j’te parle de tout ça, c’était elle ou moi. Elle m’a donné 15 jours… j’voulais pas que tu l’entende de sa bouche. » C’était donc bel et bien à cause de Gaïa qu’il était là ? Parce qu’elle l’avait contraint à venir ? « crois pas que c’était facile de faire comme si t’existait pas pendant tout ce temps. J’t’assure que c’était pas le cas… » Elle se tut durant de longues secondes, se laissant le temps de mieux appréhender ce qu’il venait de dire et de connecter tout ça à l’expression qu’elle pouvait lire sur son visage et aux sentiments qu’elle détectait derrière ses mots. « Je sais pas quoi te dire Nino. » Elle ne l’avait pas quitté des yeux. Sa main posée sur le comptoir, son bras encore crispé quelques secondes auparavant se détendait enfin quelque peu. « Tu fais chier. » Voilà qui ressemblait déjà davantage à leur dynamique. Mais on pouvait voir qu’elle restait sur la défensive et blessée par toute cette histoire. « Je tiens beaucoup trop à toi pour t’en vouloir indéfiniment. Mais là, maintenant, tout de suite, je t’en veux toujours énormément. Et je sais pas ce que c’est la suite. Je sais pas où on va avec tout ça. » A défaut de parvenir à trouver une solution et d’y voir plus clair, elle parvenait au moins à lui dire ce qu’elle avait en tête et la façon dont elle ressentait la situation. Ca ne leur permettrait peut-être pas d’avancer, mais ça avait le mérite de lui permettre d’avoir ça en moins sur la conscience, et surtout sur le cœur. « Et j’imagine que tu le sais pas plus que moi. Mais hypothétiquement parlant, est-ce qu’on arriverait à imaginer quelle pourrait être la suite dans un monde idéal ? » Dans un monde idéal, il ne lui aurait pas menti. Il n’aurait pas eu à le faire. Et elle non plus. Et elle ne l’aurait surtout pas inscrit sur une putain d’application de rencontre. Voilà le monde idéal dans lequel elle voulait vivre ; mais ce projet lui semblait beaucoup trop éloigné de la réalité pour pouvoir s’en rapprocher d’une quelconque manière que ce soit.  

Si l’Italien était de nature buté et têtu, il avait surement en face de lui bien meilleure championne dans la discipline. Il avait cette impression de pouvoir dire n’importe quoi, finalement, elle ne voulait rien entendre et toutes ses réponses seraient mauvaises. Il s’embourbait dans des sables mouvant et essayer d’en sortir ne faisait qu’aggraver la situation. « Et pourtant t’en as été parfaitement capable. T’as tenu. Félicitations. »  Silencieux ou plutôt résigné, l’Italien avait l’air d’un petit chiot qui savait qu’il avait fait une connerie et qui regardait son maitre l’engueuler. Il préféra enchainer sur le sujet qu’était Gaïa, la petite amie de son frère, chose qui ne l’avait jamais enchanté et qu’il n’avait jamais compris d’ailleurs. La situation lui avait totalement échappé et son frère était devenu une enigme, bien plus qu’avant. Lui qui avait toujours été son modèle, il n’en avait pourtant jamais vraiment suivi le chemin, allant toujours dans des directions opposée et le Marchetti avait pourtant toujours eu cœur à rendre fier son frère. Vraiment ? A croire qu’il s’y prend toujours de la mauvaise manière. Vitto avait choisi la justice et alors que Nino avait toujours eu un pied dans l’illégalité. Aujourd’hui, s’il était rangé, il n’en avait pour autant pas fini avec ses travers.  « Ca j’ai cru le comprendre merci. » L’italien admis qu’il avait recroisé Gaïa il y a peu de temps et qu’elle lui avait laissé un ultimatum pour venir retrouver Maze et lui confier ses petits secrets. Deux semaines, c’est le temps qu’elle lui avait accordé avant qu’elle ne prenne elle-même les devants et les deux italiens savaient bien qu’il valait mieux que ce soit Nino qui se lance, plutôt qu’elle. S’il voulait avoir un petit espoir que Maze finisse par lui laisser une seconde chance.  « Donc sans Gaïa, tu serais encore en train de m’ignorer ? Est-ce que c’est ça que je dois comprendre ? » il grogna, il souffla, serrant le poing tant c’était rageant de la voir réagir ainsi et toujours voir le mauvais côté de la chose. L’impasse dans laquelle elle mettait Nino l’agaçait fortement, plutôt, il sentait l’espoir de la seconde chance diminuer et il n’était pas possible pour lui de l’accepter. Elle était dure avec lui et il avait tendance à la trouver même injuste de ne pas faire semblant de comprendre. Il avait ce sentiment d’ouvrir son cœur plus qu’il ne l’avait jamais fait et même bien plus que lorsqu’il était fiancé à Giulia en Italie. Avouant qu’elle lui avait manqué, qu’il n’avait aucune idée de comment s’y prendre, il senti que l’anglaise s’apaisa. « T’aurais pu faire n’importe quoi…mais pas ça. » ou pas… l’espoir s’éloignait de plus en plus. « Je pensais vraiment que c’était fini et que tu m’en voulais au point d’avoir tiré un trait sur moi. » il tenta maladroitement de se raccrocher aux branches – cassantes – pour tout faire pour qu’au moins, après cette entrevue, elle puisse réfléchir à tête reposée , et même si elle le rejette aujourd’hui, avec du recul, qu’elle puisse revenir vers lui.  « Je sais pas quoi te dire Nino. » encore une mauvais technique. « Tu fais chier. » il aurait pu esquisser un petit sourire, au moins, elle éprouvait de la colère et non de l’ignorance, qui aurait été bien pire. Elle se retrouvait elle-même dans une impasse, surement noyée par des sentiments contradictoires, mais une chose était sûre, elle n’était pas indifférente à l’italien. « Je tiens beaucoup trop à toi pour t’en vouloir indéfiniment. Mais là, maintenant, tout de suite, je t’en veux toujours énormément. Et je sais pas ce que c’est la suite. Je sais pas où on va avec tout ça. » lui laisse prendre du recul, c’est tout ce don elle avait besoin. L’italien de son côté, se contentera de retenir qu’elle tien beaucoup trop à lui, comme elle venait de le dire. L’espoir de la seconde chance se rapprochait à nouveau. « Et j’imagine que tu le sais pas plus que moi. Mais hypothétiquement parlant, est-ce qu’on arriverait à imaginer quelle pourrait être la suite dans un monde idéal ? »  elle venait de le prendre de cour avec cette question. A vrai dire, il n’avait pas réellement compris là où elle voulait en venir. La phrase lui semblait trop compliquée et trop longue et en même temps, elle lui demandait de se projeter avec bien trop de supposition. L’italien n’était pas un grand rêveur, toujours encré dans une réalité très dure, bien qu’il pût être parfois bien trop naïf pour survivre dans cette réalité. C’était bien étonnant qu’il ait passé la barre des 28 ans à Scampia, d’ailleurs.  Il tentait quand même de répondre à sa question, ayant l’impression que la réponse allait compter pour la jeune anglaise. « Dans un monde idéal… » fit il avec son accent bien trop prononcé. « Tu m’en veux plus, et on oublie tout ça… » ce qui l’arrangeait bien l’italien, bien sûre. « tu m’laisses une chance pour te montrer que j’suis plus le même mec que celui qui a ordonner le passage à tabac de Gaïa… » ça, se serait même pas un monde idéal, ce serait juste ce qu’il espère dans les prochains jours. « J’oublie jamais c’qu’il s’est passé entre nous chez moi, Maze. » fit il, comme changeant de sujet alors que c’était presque une suite logique. « Dans un monde idéal… » il s’arrête, n’étant pas certain de pouvoir poursuivre en allant au fond de ses pensées. Il se trouve maladroit et n’a aucune certitude de la réponse qu’il pourrait avoir en retour, mais finalement, foutu pour foutu… « on recommence tout… » il pourrait lui dire qu’il n’a qu’une envie, c’est qu’elle soit la femme qui partage sa vie, qui soit là pour lui, qu’ils puissent se soutenir tous les jours, pas comme des amis, comme des amants. Un couple, c’est ça, ce qu’il veut, dans son monde idéal, qu’elle soit sa petite amie.

Elle voyait bien qu’il était énervé et frustré. Comment l’ignorer quand il semblait sur le point d’exploser alors qu’elle remettait le sujet Gaïa sur le tapis, se servant aisément de chaque argument qu’il avançait pour les retourner contre lui. Elle était bien consciente de l’agacement qu’un tel comportement pouvait provoquer, mais elle ne parvenait tout bonnement pas à agir autrement. Elle ne voyait que les mauvais côtés de toute cette histoire. Son cerveau restait persuadé que la réaction que Nino avait eu avec elle sur la plage et les jours suivants était une preuve du peu d’intérêt qu’elle avait à ses yeux, tout comme le fait qu’il ne lui ait jamais parlé de son passé montrait qu’il ne lui faisait pas confiance. Pourquoi cela changerait-il aujourd’hui ? Et pourtant il était bien là, face à elle, à essayer d’enfin mettre les choses à plat et faire amende honorable. Personne ne l’avait contraint à venir sonner pour lui donner des explications. Enfin si : Gaïa. Mais si elle faisait un minimum preuve d’objectivité, elle devait admettre qu’il aurait très bien pu se moquer de cette menace et continuer de ne pas lui répondre, laissant la journaliste avoir le fin mot de l’histoire sur ce qu’il lui avait fait par le passé. Or il avait fait l’effort de venir lui-même s’expliquer. Pourquoi ? Force était d’admettre qu’elle devait compter un minimum pour lui  pour qu’il prenne cette décision. Mais la colère et la confusion ne l’aidaient en rien à y voir plus clair dans toute cette situation. Elle ne parvenait pas à trier les informations qu’elle recevait et qui lui semblaient toutes contradictoires.
Nino avait réagi comme un parfait imbécile - Mais il était là à présent.
Il lui avait menti sur son passé. - Mais il était venu rétablir la vérité.
Il se moquait d’elle. - Et pourtant il avait l’air tout aussi contrarié qu’elle à chaque argument qu’elle avançait.
Oui il la faisait chier. Parce qu’elle ne savait plus quoi penser, quoi dire, quoi faire. Parce qu’elle se sentait complètement démunie. Parce qu’elle n’avait pas envie de le mettre à la porte mais qu’elle ne pouvait pas non plus reprendre leur relation comme si rien ne s’était passé. Alors lui demander selon lui quelle était la marche à suivre dans un monde idéal était une façon de botter en touche et de gagner du temps. Peut-être trouverait-il une solution miracle après tout. Alors ? Quelle était la vision d’un mon idéal pour Nino ? « Tu m’en veux plus, et on oublie tout ça… » Elle baissa les yeux vers sa bouteille de bière, laissant un soupir lui échapper. Non pas par agacement cette fois-ci, mais par dépit. Parce que ça n’était tout bonnement pas une option envisageable malheureusement. Pas si facilement. « tu m’laisses une chance pour te montrer que j’suis plus le même mec que celui qui a ordonner le passage à tabac de Gaïa… » Elle hocha imperceptiblement la tête. Elle allait devoir parler à son amie avant ça, mais l’hypothèse restait somme toute bien plus réaliste que la précédente, ou tout du moins applicable dans un laps de temps plus court. Elle l’espérait. « J’oublie jamais c’qu’il s’est passé entre nous chez moi, Maze. » Son visage se releva, son regard venant instinctivement chercher le sien. Elle ne s’attendait clairement pas à ce qu’il refasse mention de cette histoire. « Qu’est-ce que … » c’était un fragile filet de voix qui s’était échappé de ses lèvres avant de s’éteindre très rapidement dans un silence surpris. Qu’est-ce que cela signifiait ? Qu’est-ce qu’il voulait dire ? Pourquoi en parlait-il maintenant ? C’était toutes ces questions qu’il pouvait lire dans ses yeux alors qu’elle se sentait plus déstabilisée et perdue que jamais. Parce qu’il n’y avait que lui qui avait ce pouvoir sur elle. Qui parvenait à l’énerver autant qu’il pouvait la surprendre et la prendre de court en une fraction de seconde. Elle non plus n’avait rien oublié de cette nuit-là, et ce souvenir participait grandement à la rancune qu’elle entretenait envers l’Italien suite au silence qu’il lui avait imposé. Parce que cette nuit avait compté plus qu’elle ne l’admettrait jamais. Parce que lui-même comptait bien plus pour elle qu’elle n’était prête à le reconnaitre. « Dans un monde idéal…on recommence tout… » Son regard et son silence se firent plus pesants alors qu’elle essayait toujours de trouver un sens à ses mots, cherchant de l’aide mais aussi du courage et de la sincérité dans les yeux de Nino. Il lui fallut de longues secondes avant de lever sa bière dans sa direction et déclarer : « A un nouveau départ alors. » Elle n’avait aucune foutue idée d’où ils allaient avec ça. Elle ne savait pas si c’était possible. Mais elle avait besoin d’y croire. Parce qu’elle voulait continuer de partager des moments aussi futiles qu’importants avec lui. Parce qu’elle ne voyait pas son quotidien et sa vie sans lui.