Even if we can't find heaven, hands put your empty hands in mine. And scars show me all the scars you hide, and hey, if your wings are broken, please take mine 'til yours can open too 'cause I'm gonna stand by you.
C’est sur ces mots tristement prémonitoires du danseur que sa rencontre avec Channing s’était achevée, quelques mois plus tôt sur les hauteurs de la ville. Des mots résonnant d’une façon bien particulière aujourd’hui, et n’en finissant plus de le hanter depuis que la nouvelle de l’accident s'est répandue avant de parvenir jusqu’à lui. Trois jours, c’est le temps qu’il lui aura fallu pour sortir de sa grotte et en être informé. Trois jours durant lesquels les proches de l’héritier ont dû faire face à la plus terrible des angoisses, pendant qu’Eddie lui ne se doutait de rien. Il n’est certes pas proche du Walker comme d’autres peuvent l’être, leur relation est même assez indéfinissable et ne répond à aucune étiquette, mais il mentirait s’il disait que cet accident ne le touche pas. Aussi bien parce qu’il apprécie enfin sincèrement l’homme qu’est Channing, qu’à travers son propre rapport à la moto. Ce n’est pas n’importe quel accident, c’est celui qui peut attendre au tournant chacun d’entre eux car la route comportera toujours son lot de dangers, qu’on veuille ou non les voir. Il doute que le Walker ait pris tous les risques ce jour-là, on raconte qu’un véhicule lui est rentré dedans et c’est bien la preuve qu’ils ne sont jamais à l’abri de rien sur leurs cylindrées, ni forcément leur propre ennemi sur la route comme la mère du danseur a toujours voulu le croire. Eddie n’ose pas imaginer dans quel état la moto du grand brun doit désormais se trouver, le choc a été si rude que ce dernier ne s’est pas réveillé et le savoir plongé dans le coma est sûrement ce qui le secoue le plus, dans toute cette histoire. Channing, entre la vie et la mort ? C’est comme un mauvais rêve qui se répète après le geste désespéré de Diana dont la vie ne tenait aussi plus qu’à un fil, quelques semaines plus tôt. L’actrice s’en est sortie grâce à la réactivité des ambulanciers et de l’équipe du St Vincent's Hospital mais l’état du Walker semble plus préoccupant encore, au point qu’Eddie n’ose tout simplement plus actualiser les informations sur son téléphone par crainte de voir tomber la nouvelle tant redoutée qui anéantirait pour de bon tout espoir. Il veut y croire pourtant, Channing est un battant que le ciel ne peut pas déjà rappeler, il s’y refuse catégoriquement.
Contacter Gabrielle a été son premier réflexe une fois le drame porté à sa connaissance car l’avocate a aussitôt rejoint ses pensées, et Eddie s'est immédiatement mis en tête de prendre de ses nouvelles sans savoir à quel point elle était informée de son côté – mais supposant, quand même, qu’elle n’était pas restée dans l’ignorance aussi longtemps que lui. Non, leur échange par sms a même révélé que Gabrielle était présente quand l’accident a eu lieu et il compatit à l’inquiétude qui doit être la sienne depuis ce fameux jour, pour être lui-même resté au chevet de Diana lorsque son pronostic vital était engagé. Il n’aime pas savoir l’avocate seule ou presque dans cette chambre d’hôpital, son dévouement pour le Walker force le respect mais elle ne peut pas porter le poids de l’attente sur ses frêles épaules. Pas au point de s’en rendre malade, il sait que Channing n’approuverait pas ça. Eddie a eu du mal à la convaincre de quitter cette chambre car s’accorder ne serait-ce qu'un moment en dehors de celle-ci mettait l’avocate dans une position d’abandon vis-à-vis du grand brun, aussi triste que compréhensible. Trouver les mots n’a donc pas été simple mais la persévérance du danseur a payé, il ne sait pas combien de temps Gabrielle acceptera de passer à l’extérieur avec lui mais il se satisfera du minimum, tout en se jurant de ne rien forcer.
Eddie n’a sans doute jamais mis un tel temps pour s’équiper avant de partir, en prenant tout le soin du monde à mettre son casque et en vérifiant l’état de ses pneus par deux fois, ce qu’il ne fait pas d’ordinaire. Fébrile, aussi, pendant son trajet car ne pas songer à l’accident s’avère impossible et il se retrouve à lutter contre ces pensées parasites pouvant à tout instant le déconcentrer de la route. C’est comme si ses automatismes n’existaient soudainement plus, comme s’il montait à moto pour la toute première fois en considérant à nouveau tout ce qu’il avait appris à ignorer avec le temps. Et en arrivant devant l’hôpital Eddie sait déjà qu’il ne pourra pas y mettre un pied, pas dans l’immédiat du moins car il conserve trop de souvenirs ici, des souvenirs qui l’ont bien trop empêché de dormir ces derniers mois. C’est donc à proximité de l’entrée qu’il se tient avant d’envoyer le signal de son arrivée à l’avocate, qui le rejoint en quelques minutes et dont l’apparence paraitrait presque fantomatique à première vue. Elle doit avoir si peu dormi, la voir aussi affaiblie et marquée par le souci ne peut qu’arracher un soupir au danseur. « Gaby. » Il s’avance pour passer un bras autour d’elle, un geste d’une simplicité déconcertante dans un tel moment mais qui, il l’espère, ne sera pas pour autant de trop. « J’ai fait aussi vite que j’ai pu. » souffle-t-il d’une voix désemparée, conscient que sa présence ne résoudra rien mais désireux, quand même, de la soutenir à sa minuscule échelle. « Tu n’as pas dû manger grand-chose ces derniers jours alors je t’ai apporté des biscuits aux noix pour te redonner des forces. » Préciser qu’ils sont coréens lui semble dérisoire alors Eddie s’abstient, et sort simplement le sachet de hodu-gwaja de son top case pour le tendre à l’avocate. « Faits ce matin par mes soins alors je ne garantis pas le goût. » Il se fend d’un sourire amusé, s’autorisant un léger trait d’humour avec l’unique intention de lui changer les idées car bien sûr, le cœur n’y est pas. « J’aurais préféré te revoir dans d’autres circonstances tu t’en doutes, mais c’est important pour moi d’être là aujourd’hui. » Eddie l’avoue à lui-même en même temps qu’il le reconnait face à Gabrielle, il s’en serait énormément voulu de ne pas faire le déplacement pour tout ce que ça représente. « Pour toi et pour Channing. » qu’il complète non sans sous-entendre qu’ils se connaissent, laissant ainsi à l’avocate toute la liberté de l’interroger à ce propos si elle le souhaite. Eddie n’a rien à lui cacher, ni son passé commun avec l’héritier, ni leur dernière rencontre qui s'était suivie d’une profonde discussion, ni même le rôle que celui-ci a joué dans son récent déménagement. Rien.
23 juin 2022. Sa vision est toujours la même depuis trois jours. Celle de sa silhouette allongée sur ce lit, dans cette chambre sans chaleur, reliée à des tuyaux. Le bruit des machines est le seul qui vient briser le silence qui règne depuis ces trois malheureux jours qui paraissent être une éternité. Elle n’a jamais été aussi paniquée, angoissée que depuis l’accident auquel elle a assisté, celui causant le coma dans lequel se trouve Channing depuis. Les médecins ne sont pas pessimistes mais ne sont pas certains à cent pour cent de l’issue positive non plus. Rien ne garantit qu’il se réveillera, rien ne garantit qu’il n’en gardera pas des séquelles et Gabrielle a l’impression de vivre un cauchemar éveillé, qui semble interminable quand elle a seulement besoin de s’assurer qu’il va bien. Elle partira, s’il le faut, après qu’il se soit réveillé, surtout quand la veille de l’accident, ils semblaient avoir définitivement tiré un trait sur leur relation indéfinie. Elle partira, s’il lui demande, s’il lui dit qu’elle est la dernière personne qu’il a envie de voir, s’il l’accuse d’être responsable de cet accident qu’il a eu. Elle encaissera et partira, le cœur brisé certes, mais rassurée de le savoir en vie.
Les larmes perlent sur ses joues, sporadiquement, dès qu’elle laisse ses pensées vagabonder dans leur passé ou dans leur présent. C’est le cas à cet instant quand elle a encore sa main dans la sienne et qu’elle pense à leur dispute et toute la culpabilité qu’elle ressent suite à celle-ci quand la dernière chose qu’il a pu entendre de sa part est son nom prononcé avec dédain et déception, ayant accusé l’héritier de mal la connaître, quand il n’a jamais été capable de comprendre à quel point elle l’a aimé et l’aime encore. Ses paupières se ferment à cette pensée, lentement, prenant une profonde inspiration alors que deux autres larmes roulent sur ses joues, qu’elle essuie d’un revers alors que son téléphone se met à vibrer au même moment. Gabrielle lâche alors la main de Channing pour venir extirper son téléphone de la poche arrière de son jean et ainsi découvrir un message d’Eddie. Celui-ci vient d’apprendre pour l’accident de l’héritier et Gabrielle lui signifie sa présence à son chevet. Le jeune coréen propose alors à l’avocate de lui tenir compagnie en venant la rejoindre pour qu’elle prenne l’air dans le parc attenant à l’hôpital et si elle est quelque peu réticente, elle se laisse finalement convaincre et accepte de passer du temps avec lui. Lorsque celui-ci lui indique son arrivée, Gabrielle prend le temps de déposer un baiser sur le front de Channing avant de descendre rejoindre Eddie.
« Gaby. » Elle a envie de s’écrouler, sent même ses jambes flancher sous son poids mais elle ravale un sanglot alors qu’elle retrouve le jeune danseur en bas de l’hôpital. Elle se laisse étreindre, passant elle un de ses bras autour de sa taille, acceptant volontiers ce geste rassurant. « J’ai fait aussi vite que j’ai pu. » Gabrielle hoche lentement de la tête « Merci Eddie » Sa gorge est serrée et cela s’entend au vu de la petite voix qu’elle utilise pour lui répondre et Eddie n’aura aucun mal à comprendre l’état dans lequel elle se trouve actuellement. Il n’aura aucun mal, quand sa mine est déconfite et que son regard est vide et bouffie, ses traits tirés par la fatigue et l’inquiétude. « Tu n’as pas dû manger grand-chose ces derniers jours alors je t’ai apporté des biscuits aux noix pour te redonner des forces. » L’attention lui fait naitre un mince sourire au coin des lèvres, Eddie perspicace quand effectivement, elle est incapable d’avaler quoi que ce soit. Elle se saisit alors du sachet qu’il lui tend « Faits ce matin par mes soins alors je ne garantis pas le goût. » Un tout petit rire s’échappe d’entre ses lèvres « C’est l'intention qui compte dit-t-elle sur un air taquin avant de reprendre plus sérieusement, avec un sourire reconnaissant Merci encore ». Elle se laissera tenter très certainement à un moment ou à un autre, peut-être qu’après avoir pris l’air avec Eddie et en discutant avec lui, sa curiosité et ses papilles voudront déguster ce met qu’il a confectionné.
« J’aurais préféré te revoir dans d’autres circonstances tu t’en doutes, mais c’est important pour moi d’être là aujourd’hui. » Ses mots la touchent, lui faisant baisser son regard, trouvant alors le sol, plus apte à l’affronter lui que le regard d’Eddie. Sa gorge se noue davantage, alors qu’elle acquiesce sans mot dire « Pour toi et pour Channing. ». Et peut-être que le fait d’entendre le prénom de celui qu’elle aime aura raison de cette faille qu’il arrive à créer en elle, celle où, finalement, elle réhausse le regard et accepte de montrer sa vulnérabilité, des larmes perlant sur ses joues « J’aurai préféré aussi que ce soit pour d’autres raisons » parvient-t-elle à aligner. « Merci encore, Eddie et merci pour lui » Sa voix déraille légèrement sur le dernier mot, incitant alors la jeune femme à reprendre une profonde inspiration pour se ressaisir, essuyant ses larmes d’un revers « Ce n’était pas contre toi, quand j’ai d’abord refusé… c’est juste que… je suis incapable de le laisser… j’ai peur que… » A-t-elle réellement besoin d’en dire davantage ? Il comprendra ce qu’elle sous-entend, préférant sûrement conserver les mots pour elle plutôt que de les prononcer à voix haute.
Ils se mettent alors à marcher à pas lents, l’un à côté de l’autre. Un silence s’immisce un court instant entre eux et l’air qu’elle hume l’aide sûrement à s’interroger davantage sur les raisons pour lesquelles Eddie lui a écrit à elle concernant Channing. Comment a-t-il su ? Comment connait-t-il le lien entre elle et l’héritier ? « Comment… commence-t-elle avant de trouver son regard, arquant légèrement un sourcil, tout en poursuivant leur chemin Comment tu sais que Channing et moi sommes liés ? à ces souvenirs, elle ne lui a jamais parlé de son histoire passé ou présente avec lui Tu le connais ? » Le monde est après tout très petit et peut-être qu’Eddie et Channing se sont déjà côtoyés ou se connaissent bien pour expliquer que le premier l'ai contacté à propos du dernier.
Even if we can't find heaven, hands put your empty hands in mine. And scars show me all the scars you hide, and hey, if your wings are broken, please take mine 'til yours can open too 'cause I'm gonna stand by you.
Gabrielle n'est plus que l'ombre d'elle-même, c'est sa toute première pensée en la voyant s'avancer vers lui et ce constat lui retourne aussitôt le ventre. Ce n'est pourtant pas la première fois qu'Eddie a l'occasion de voir l'avocate avec une petite mine mais la fois où il s'était invité chez elle pour découvrir qu'elle trouvait refuge dans le travail n'est rien à côté de sa pâleur aujourd'hui, lui laissant même craindre qu'elle n’a pas fait de nuit correcte ni mangé un vrai repas depuis des jours. « Merci Eddie » Il ne lui connaissait pas cette voix affaiblie par la fatigue et brisée par l'inquiétude, tout comme il découvre un visage que l'avocate n'avait encore jamais exposé à sa vue. C'est déchirant à voir comme à entendre, à cet instant Eddie ferait vraiment tout pour alléger son fardeau mais il ne peut qu'espérer que les médecins feront des miracles, pour n'avoir lui-même aucun pouvoir sur les tourments de l'avocate comme sur le sort de Channing. Elle parait si fragile qu’il prend toutes les précautions du monde au moment de l’approcher mais comment s'en étonner alors qu'elle reste au chevet du Walker depuis que l'accident a eu lieu, comment lui reprocher de s'oublier dans de telles circonstances ? Ce n'est pas pour lui faire une leçon de morale que le danseur a fait le déplacement aujourd'hui, il se soucie c'est vrai de son état et du fait de la voir si abattue mais il restera pour une fois à sa place, c'est certainement ce qu'il peut faire de mieux. Une place qu'Eddie considère être aux côtés de l'avocate comme on soutiendrait simplement une amie, en admettant que Gabrielle soit disposée à accepter un peu de compagnie ainsi que quelques biscuits, confectionnés par ses mains débutantes. Elle n'y touchera peut-être pas et rien ne dit non plus qu'ils seront à son goût dans le cas inverse mais il garde l'infime espoir que Gabrielle parviendra à avaler quelque chose, ces gâteaux ou bien d’autres, pour reprendre quelques unes des forces l'ayant abandonnée. « C’est l'intention qui compte, merci encore » Un maigre sourire retrouve naissance le long des lèvres du danseur car bien sûr il aimerait faire plus, difficile de ne pas se sentir impuissant dans un tel cas de figure et de ne pas culpabiliser, non plus, en apprenant la nouvelle trois jours après tout le monde.
Eddie serait venu bien plus tôt s'il avait su alors même que sa présence n'aurait certainement rien changé, et qu'il se serait aussi bien passé de revoir Gabrielle dans un tel contexte. « J’aurai préféré aussi que ce soit pour d’autres raisons » Ce ne sont pas des circonstances idéales pour être réunis mais c'est au moins l'occasion pour le danseur de lui rendre le soutien qu'elle lui avait apporté pendant sa convalescence, en se montrant digne d'un rôle d'ami qu'il n'a pas toujours brillamment endossé avec d'autres, par le passé. « Merci encore, Eddie et merci pour lui » Le temps d'un instant une question lui traverse l'esprit : que penserait Channing de sa venue aujourd'hui et du fait que cet accident le préoccupe autant ? Il est vrai que leur relation a connu quelques éclaircies la dernière fois qu'ils se sont vus mais l'héritier n'aurait peut-être pas imaginé que la nouvelle secouerait autant le danseur, ce dernier s'en étonne d'ailleurs lui-même tout comme il s'était surpris à s'inquiéter pour Diana, avec bien moins de raisons encore compte tenu de le haine que celle-ci lui vouait et lui voue peut-être toujours. Les voir ainsi fauchés en pleine jeunesse remet pas mal de choses en perspective du côté d’Eddie car on est toujours trop jeune pour se retrouver prisonnier d’une chambre d’hôpital et de son propre corps. « Ce n’était pas contre toi, quand j’ai d’abord refusé… c’est juste que… je suis incapable de le laisser… j’ai peur que… » « Je sais Gaby. » il souffle tout en anticipant les mots que l'avocate ne parvient pas à formuler, une crainte légitime que le danseur partage sans souhaiter lui non plus la faire savoir à voix haute. Ils redoutent l'un comme l'autre la pire issue qui soit mais Eddie a encore bien trop d'espoir pour laisser cette perspective le miner, bien conscient pourtant des risques et du fait que se réveiller d'un coma peut prendre du temps… quand réveil il y a. « Et t'en fais pas. J'imagine bien que tu n’as pas la tête à sortir, ça se comprend et j'aurais honnêtement pas insisté si j'étais pas certain que ça puisse te faire du bien. » Il s'était aussi promis de respecter son choix si ses tentatives n'avaient mené à rien car œuvrer pour le bien-être de Gabrielle passe aussi par le respect et l'écoute de ses envies, contre lesquelles Eddie n'avait aucunement l'intention d'aller. « Mais on rentre dès que tu le décides, d'accord ? Je veux pas que tu te forces à quoi que ce soit avec moi. » Eddie s'assure en un regard qu'elle n'hésitera pas à mettre fin à cette rencontre lorsqu'elle aura eu une dose d'extérieur suffisante pour la journée ou pour la semaine, car il perçoit déjà le fait de parvenir à la faire sortir comme une victoire et pourra amplement s'en contenter. La seule chose qui lui importe est d'apaiser la lourde peine de l'avocate même s'il ne dispose pas de grands moyens pour ça, et que la seule véritable façon de lui redonner le sourire n'est pas à sa portée.
Il laisse après ça ses pas le guider à travers le parc, accueillant le silence du moment et laissant à Gabrielle le soin de briser celui-ci quand elle s'en sentira prête. Car il préfère accorder à l'avocate le privilège d'orienter la discussion comme elle le souhaite si l'envie de parler doit se faire ressentir, plutôt que de lui imposer un échange qui pourrait la fatiguer davantage. Alors là encore Eddie ne force rien et c'est tout naturellement que son regard se pose sur l'avocate lorsque celle-ci émet un début de question. « Comment… » La suite il l'imagine avant même de l'entendre car il s'attend à ce que Gabrielle l'interroge sur ses rapports avec l'héritier comme sur le fait d'avoir automatiquement pensé à elle en apprenant l'accident. Il se poserait aussi la question à sa place et se montre donc à l'écoute de ses prochains mots, ralentissant quelque peu sa marche pour lui offrir sa pleine attention. « Comment tu sais que Channing et moi sommes liés ? Tu le connais ? » Deux questions au lieu d'une seule qu'Eddie aborde avec calme, prêt à lever le voile sur ce qui le lie réellement au Walker et sur ce qu'il sait de leur relation. Il n’a rien à cacher car Gabrielle est en droit de savoir, et il se doutait que tôt ou tard cette discussion aurait lieu. « C'est une longue histoire mais oui, je le connais depuis un certain temps. Plus d'un an, en réalité. » Inévitablement Eddie en vient à se remémorer leur rencontre dans un garage, ce même jour où le grand brun avait proposé de le déposer au théâtre alors que sa modeste cylindrée était en révision. Un bon départ rapidement éclipsé par l'animosité du danseur, plus gratuite qu'autre chose à l'époque. « C'est la moto qui nous a réunis au départ mais on avait aussi une fréquentation en commun, et je n'ai pas été très tendre avec lui. J'en suis pas fier et il le sait. » Cette partie de l'histoire n'est pas à sa gloire mais il ne la passera pas sous silence pour se donner meilleure image, cette inimitié passée définissant aussi ce que leur relation est devenue. « C'était pas bien parti entre nous et je ne l'ai pas revu pendant dix mois après ça, jusqu'à il y a quelques semaines sur les hauteurs de la ville. » Un soir comme les autres où il n'aurait pas pensé que son chemin recroiserait celui du grand brun, comme si l'univers s'était finalement dit que ces deux-là devaient se retrouver. « On a pas mal parlé ce soir-là et c'était bien plus naturel que toutes les discussions qu'on avait pu avoir avant ça. Et comme Channing n'est pas rancunier il a même proposé de m'accompagner dans mes recherches de logement. » Ce qu'il trouve toujours aussi honorable avec le recul, Eddie le voit même comme une seconde chance que le Walker lui aurait accordé alors qu'il n'estimait pas forcément mériter celle-ci. « Il s'est aussi confié à moi et c'est là que j'ai fait le rapprochement avec les photos que j'avais vu chez toi. Tu sais, celles de Los Angeles. » Son regard croise celui de Gabrielle tout en assumant le fait d'en avoir certainement trop dit à Channing ce soir-là, notamment pour les photos. Il comprendrait qu'elle lui en tienne rigueur même s'il ne pensait pas à mal en confiant l’information au grand brun, son seul but ayant été de l'aider à y voir plus clair dans l'épais brouillard qu'il traversait. « Je ne te détaillerai pas tout ce qu'il m'a dit car ça lui appartient, mais sache que votre histoire a beaucoup compté pour lui. Elle compte même encore, je ne crois pas me tromper en le disant. » Et c'est tout ce qu'il s'autorisera à en dire dans l'immédiat, espérant sincèrement que Channing pourra lui-même en parler à l'avocate à son réveil car ce n'est pas à lui de le faire et de mettre des mots sur ce que le grand brun a dans le cœur. « J'aurais du mal à l'avouer devant lui mais ça m'attriste vraiment ce qui lui arrive, tu sais. » il finit par admettre, ses yeux fuyant un court instant autour d'eux car cet aveu le heurte à une double réalité qui ne sera jamais simple à affronter.
23 juin 2022. « Je sais Gaby. » Il lui épargne de prononcer ces mots, ceux qui traduirait le pire qu’il puisse arriver à Channing. Ceux qu’elle ne supporterait pas d’entendre, ceux qu’elle serait incapable d’accepter tant elle ne peut et ne veut s’imaginer ce scénario. S’il venait à arriver le pire à l’australien, elle ne s’en remettrait pas. La douleur serait bien pire que la première fois, lorsqu’il lui a tourné le dos et a quitté Los Angeles. Non, elle ne peut le supporter, ne peut le prononcer, ne peut l’imaginer. « Et t'en fais pas. J'imagine bien que tu n’as pas la tête à sortir, ça se comprend et j'aurais honnêtement pas insisté si j'étais pas certain que ça puisse te faire du bien. » Gabrielle reste silencieuse mais elle est grandement reconnaissante de la bienveillance dont fait preuve Eddie. Elle est consciente elle-même qu’elle a besoin de sortir de cette chambre d’hôpital, qu’elle a besoin de voir autre chose que ces murs indéfiniment blancs et d’entendre autre chose que le bruit incessant de la machine qui aide actuellement l’héritier à rester en vie. Elle acquiesce alors, simplement, sans pour autant prononcer un mot ou un merci de plus « Mais on rentre dès que tu le décides, d'accord ? Je veux pas que tu te forces à quoi que ce soit avec moi. » Elle retrouve alors le regard d’Eddie, tentant à nouveau de faire apparaitre un maigre sourire « Deal… elle marque une pause et je ne me forces pas, je suis contente de te voir, Eddie. Vraiment » Parce que, jusqu’à présent, elle n’a jamais été déçue du temps passé avec le jeune coréen et chaque moment qu’ils ont pu passer ensemble a toujours eu le don de lui faire du bien. Ne serait-ce que lors de leur dernière rencontre, quand autant lui qu’elle avait cruellement besoin de soutien tout comme un besoin de se changer les idées en parlant de choses plus légères. Alors, si elle a accepté l’invitation d’Eddie aujourd’hui, c’est tout simplement parce qu’elle a confiance en lui et du bien qu’il puisse lui procurer par leur rencontre.
Eddie et Gabrielle se mettent alors à marcher dans le parc attenant à l’hôpital. Sentir l’air frais sur son visage est une sensation agréable pour la jeune femme qui apprécie aussi le silence qui s’immisce entre eux, seulement brisé par le chant de quelques oiseaux. Ils marchent côte à côte, et c’est ainsi que l’avocate laisse ses pensées divaguer quelques secondes. C’est aussi de cette façon que vienne s’immiscer dans son esprit des interrogations concernant ce message qu’Eddie lui a envoyé. Pourquoi s’est-t-il adressé à elle dès l’instant où il a eu connaissance de l’accident de Channing ? Elle ne se souvient pas lui avoir parler de l’héritier lors de leurs nombreuses discussions, encore moins d’avoir évoqué leur relation du passé. Peut-être qu’une part d’elle sent une angoisse certaine naitre quand elle imagine que ce mensonge qu’elle a usé pour le suivre dans cette ambulance et pour pouvoir rester à ses côtés sans limite, ait pu fuiter dans la presse. Elle ne l’espère pas, ne souhaiterait pas attirer l’attention sur elle, et encore moins sur Channing en lui causant du tort par des rumeurs infondées – ou presque, si seulement elle n’avait pas prétexté être sa fiancée. « C'est une longue histoire mais oui, je le connais depuis un certain temps. Plus d'un an, en réalité. » Elle se sent soulagée à cet instant quand il lui confirme le connaitre depuis quelques temps, un soulagement qu’elle ne laisse aucunement transparaitre, se contentant de rester neutre en portant toutefois son regard sur le jeune coréen « C'est la moto qui nous a réunis au départ mais on avait aussi une fréquentation en commun, et je n'ai pas été très tendre avec lui. J'en suis pas fier et il le sait. » Ses yeux se plissent, sûrement parce qu’une part d’elle est curieuse de connaitre les raisons qui ont poussé Eddie à ne pas être tendre avec Channing, mais cela n’a pas d’importance en réalité. « C'était pas bien parti entre nous et je ne l'ai pas revu pendant dix mois après ça, jusqu'à il y a quelques semaines sur les hauteurs de la ville. ( …) On a pas mal parlé ce soir-là et c'était bien plus naturel que toutes les discussions qu'on avait pu avoir avant ça. Et comme Channing n'est pas rancunier il a même proposé de m'accompagner dans mes recherches de logement. » Un sourire nait sur les lèvres de Gabrielle, malgré elle et penche légèrement la tête sur le côté, comme si elle remettait en question ce côté rancunier qu’il ne lui connait pas. Parce qu’elle en a fait les frais mais elle l’a été tout autant à son encontre. Cette même rancune est ressortie d’ailleurs lors de leur dernier échange… et son teint se ternit aussitôt en y repensant, cet échange qui était en réalité une dispute où elle avait pris la décision de définitivement tirer un trait sur lui et leur relation. Elle ravale difficilement, reste silencieuse et préfère laisser Eddie continuer sans rien dire « Il s'est aussi confié à moi et c'est là que j'ai fait le rapprochement avec les photos que j'avais vu chez toi. Tu sais, celles de Los Angeles. » Elle marque un arrêt dans ses pas, comme si elle tentait de remettre en ordre ses idées et surtout ses souvenirs de cette soirée passée avec Eddie. Tout en grignotant leurs pizzas respectives, elle se souvient alors lui avoir montré les diverses photographies qu’elle a pu réaliser, et notamment celle faites à Los Angeles. Et à aucun moment, en lui montrant celles-ci, elle n’a pensé qu’Eddie pouvait connaitre Channing, qui apparaissaient sur lesdites photos. Elle se remet alors à marcher doucement, rejoignant Eddie « J’ignorais que tu le connaissais… tu ne m’as rien dit » et si cela peut sonner comme un reproche, il n’en est rien car un sourire se dessine sur ses lèvres au même moment « Tu lui as dit ? elle retrouve alors son regard que tu l’as vu sur mes photos ? » Et si tel est le cas, elle ne lui en tiendra pas rigueur. Peut-être que dans d’autres circonstances, elle se serait légèrement mise en rogne contre le jeune coréen, mais là c’est l’effet inverse qui se produit. Avoir cette discussion l’apaise d’une certaine façon, aussi étonnant que cela puisse paraitre. « Je ne te détaillerai pas tout ce qu'il m'a dit car ça lui appartient, mais sache que votre histoire a beaucoup compté pour lui. Elle compte même encore, je ne crois pas me tromper en le disant. » Et à nouveau, Gaby ralentit la cadence et sent les larmes monter malgré elle. Ce que lui rapporte Eddie la touche, mais la renvoie à cet instant où, immobile et ensanglanté sur le bitume, prêt à perdre connaissance, Channing a eu le courage de lui dire qu’il l’aimait. Et ce qu’ajoute Eddie ne fait que conforter un peu plus la jeune femme dans cette idée, même si celui-ci passe sous silence les confessions faites par l’australien. « J'aurais du mal à l'avouer devant lui mais ça m'attriste vraiment ce qui lui arrive, tu sais. » Elle écoute à peine les derniers mots d’Eddie, non pas parce que ça lui est égal, mais parce qu’elle se sent submerger par l’émotion. Elle prend une profonde inspiration, tente de ravaler ses larmes et de reprendre le dessus en retrouvant le regard d’Eddie « Si tu savais à quel point Channing a pu compter pour moi et compte encore beaucoup aujourd’hui… avoue-t-elle alors, ses mains devenant soudainement tremblantes, au point de ressentir la nécessité de prendre place sur ce banc qui est à leur portée C’est une longue histoire lui et moi… mais il est le seul pour qui j’ai pu ressentir quelque chose d’aussi fort, Eddie. Je pensais que tout ça, lui, notre relation, étaient derrière moi. J’ai voulu m’en persuader, mais il compte… il compte bien plus qu’il ne peut le penser et je m’en veux qu’il puisse… une nouvelle pause, nécessaire quand les mots suivants sont difficiles à prononcer mais elle le fait cette fois potentiellement partir en pensant que je ne l’ai jamais aimé… son regard trouve alors ses doigts qu’elle tortille entre elles en pensant que je ne l’aime pas en retour » Une larme perle, malgré tout, le long d’une de ses joues, qu’elle essuie d’un revers Je m’en voudrais, Eddie si je n’ai pas la possibilité de lui dire en retour ». Elle s’ouvre d’une manière inattendue mais tout ceci est la preuve que cette situation la touche bien trop. Et prétendre n’a plus aucun intérêt, de toute évidence « Notre relation à Los Angeles était si… indéfinissable. C’est aussi ce qui nous a porté préjudice mais j’ai vécu la plus belle relation que j’ai pu connaître jusqu’ici. Tout était si… naturel, logique et léger… je ne sais pas si on pourrait un jour retrouver ce qu’on a eu… mais j’aimerai au moins qu’on nous donne la chance de réessayer… ». Et s’il le souhaite, lui, évidemment.
Even if we can't find heaven, hands put your empty hands in mine. And scars show me all the scars you hide, and hey, if your wings are broken, please take mine 'til yours can open too 'cause I'm gonna stand by you.
Cette sortie durera le temps que Gabrielle se sentira de passer à l'extérieur de l'hôpital, et pas une seconde de plus. Eddie s'est assuré de libérer sa journée pour elle ne sachant pas si ce moment avec l'avocate se chiffrerait en minutes ou en heures, aucune obligation ne l'attend où que ce soit en ville alors il restera à ses côtés jusqu'à ce qu'elle décide d'elle-même de retourner au chevet de Channing. Aussi convaincu soit-il qu'une promenade en dehors des murs de l'hôpital ne pourra lui faire que du bien il n'est pour autant pas question de se montrer insistant ou de retenir Gabrielle dans ce parc car on offre son soutien à quelqu'un, on ne l'impose pas. « Deal… et je ne me forces pas, je suis contente de te voir, Eddie. Vraiment » Et le plaisir est évidemment partagé malgré des circonstances que tous deux auraient préféré nettement plus joyeuses. Eddie se fend d'un sourire tout en allant machinalement chercher la main de Gabrielle pour la garder dans le creux de la sienne durant plusieurs secondes. Comme une façon de lui dire qu'elle pourra compter sur lui aujourd'hui comme à l'avenir car il veut être cet ami dont la présence lui sera garantie dans les bons comme les moins bons moments, sans distinction aucune, tout comme il sait bien que l'inverse sera vrai. Gabrielle était là quand il broyait du noir après son opération, elle était aussi là pour défiler avec lui quand il ne se sentait pas de le faire seul. Et elle sera encore là s'il doit un jour passer par d'autres phases compliquées, Eddie n'en doute pas un instant et ces choses-là sont finalement si évidentes entre eux qu'un geste ou un regard le diront aussi bien que des mots.
Prendre de ses nouvelles en apprenant l'accident a été son premier réflexe, ce qui n'en a pas été un en revanche c'est de lui avouer qu'il connaissait l'homme présent à ses côtés sur ses photos de Los Angeles, aujourd’hui prisonnier d’une chambre d’hôpital. Eddie avait immédiatement posé un nom sur ce grand brun dont il ignorait à ce moment-là le lien avec Gabrielle, l'évidence n'a pu que lui sauter aux yeux car difficile de passer à côté d'un homme comme le Walker, reconnaissable entre mille ne serait-ce que par sa carrure. « J’ignorais que tu le connaissais… tu ne m’as rien dit » Il l'admet aujourd'hui, l'occasion lui a été donnée de faire connaître à l'avocate son passé commun avec l'héritier mais ce jour-là Eddie n'a pas réagi. Il s'est contenté d'observer les photos défilant sous ses yeux, laissant le passé où il devait être aussi bien de son côté que de celui de Gabrielle. « Non, je n'ai pas osé. » Aurait-il dû ? Il s'est beaucoup posé la question à la suite de ses retrouvailles avec Channing mais il avait ses raisons de ne pas s'en mêler, des raisons qu'il n'entend pas cacher à l'avocate car il lui doit bien cette transparence. « Je voyais que ces photos te troublaient alors j'ai préféré me taire, pour ne pas remuer des souvenirs qui auraient pu être douloureux pour toi. » C'est la première raison mais il y en a une deuxième, un peu moins évidente à assumer même s'il a pris le recul nécessaire pour ça. « Et puis je n'étais pas resté sur de très bons rapports avec Channing, je ne voulais pas te mêler à nos histoires ni te laisser penser que j'étais un garçon à problèmes, même si t'aurais été en droit de le penser. » Disons qu'il n'était pas ressorti grandi de son ancienne animosité envers le Walker avant que le temps ne fasse son œuvre et lui apporte assez de maturité pour reconnaître ses torts. Eddie n'a pas voulu prendre le risque de décevoir Gabrielle car lui parler de l'homme sur ces photos sans mentionner ce qui le liait à lui aurait été difficile, elle aurait cherché à en savoir plus et il n'était pas disposé à ressasser cette histoire comme il peut désormais l’être. « Tu lui as dit ? que tu l’as vu sur mes photos ? » Une autre vérité qu'il estime devoir à l'avocate car ces photos ont bien été au cœur de sa dernière discussion avec Channing, c'est même au moyen de celles-ci qu'Eddie lui a fait comprendre qu'ils connaissaient la même californienne et que le monde était plus petit encore qu'il ne le pensait. « Il le sait, oui. C'était sûrement pas à moi de lui dire mais je ne voulais pas lui mentir en prétendant que l'avocate dont il me parlait ne me disait rien. » Il a peut-être fait une erreur en dévoilant cette information le premier à l'héritier mais sur le moment Eddie a jugé bon de le faire, l'expression du grand brun ce jour-là lui revient d'ailleurs à l'esprit tandis qu'il aligne tranquillement les pas à travers le parc aux côtés de Gabrielle. « Channing était surpris, un peu confus aussi d'apprendre que tu avais conservé ces photos. » Le danseur glisse un regard vers elle comme pour guetter sa réaction, espérant peut-être que ces quelques mots provoqueront quelque chose chez l'avocate. Quoi il ne sait pas vraiment, il peut simplement sentir la richesse de leur histoire aux paroles de Gabrielle et il n'imagine pas à quel point les prochaines l'en convaincront plus encore.
Il refuse de parler au nom de Channing et de voler à celui-ci des confessions qu'il pourrait lui-même faire à Gabrielle à son réveil, voilà pourquoi Eddie ne reviendra pas sur tout ce que l'héritier et lui se sont dit ce fameux soir sur les sommets de Brisbane. Il ne détaillera pas les conseils qu'il a pu lui donner comme les doutes que le grand brun a pu lui partager, elle doit juste savoir que ce dernier n'a pas caché l'importance du passé qui les unit car Eddie se souvient d'un Channing particulièrement marqué par cette relation et pensif à l'évocation du nom de l'avocate. Il aurait fallu être aveugle et sourd pour ne rien remarquer et pour ne pas comprendre que ces deux-là ont vécu quelque chose de très fort, une période de sa vie sur laquelle le Walker n'est vraisemblablement pas parvenu à tirer un trait de son côté. Certaines histoires sont plus dures à oublier que d'autres, ces mots en particulier ressurgissent chaque fois qu'il repense à cet échange et à la confiance que le grand brun lui a accordé ce soir-là. « Si tu savais à quel point Channing a pu compter pour moi et compte encore beaucoup aujourd’hui… » Il n'était pas censé le savoir avant que Gabrielle le laisse entendre et pourtant, il n'a qu'à prêter attention à la façon dont elle le dit et au regard qu'elle lui adresse pour en avoir une nette idée. Eddie suit l'avocate sur le premier banc se présentant à eux et lui offre une oreille attentive, tout en posant une main sur les siennes en constatant le tremblement de celles-ci. « C’est une longue histoire lui et moi… mais il est le seul pour qui j’ai pu ressentir quelque chose d’aussi fort, Eddie. Je pensais que tout ça, lui, notre relation, étaient derrière moi. J’ai voulu m’en persuader, mais il compte… il compte bien plus qu’il ne peut le penser et je m’en veux qu’il puisse… potentiellement partir en pensant que je ne l’ai jamais aimé… que je ne l’aime pas en retour » Elle n'a pas à s'en vouloir, personne n'aurait pu prédire que cet accident aurait lieu et qu'elle perdrait momentanément l'occasion de lui dire tout ça. Eddie veut d'ailleurs croire que Channing ne partirait pas avec de telles pensées si l'issue devait être celle qu'ils redoutent, qu'il ne s'en irait pas en étant convaincu que Gabrielle ne l'a jamais aimé parce qu'il doit forcément sentir sa présence à ses côtés à l'hôpital tous les jours. Ce n'est pas parce qu'il n'est pas éveillé qu'il ne peut pas s'en rendre compte, certains n'y croient pas mais le danseur préfère se dire que ce petit lien subsiste, que Channing est encore assez présent pour le ressentir. « Je m’en voudrais, Eddie si je n’ai pas la possibilité de lui dire en retour » Les larmes de l'avocate lui tordent le ventre comme le cœur alors sans tellement réfléchir Eddie se déplace sur le banc pour la prendre dans ses bras. « Viens là. » Il n'a jamais supporté de voir qui que ce soit pleurer et est aussi le dernier à s'autoriser à le faire. La détresse et la peine chez les autres est certainement l'émotion face à laquelle le danseur se sent le plus malhabile et impuissant mais il est avant tout incapable d'observer celles-ci sans réagir. Aussi maladroit peut-il être il n'a pas le cœur de pierre qu'on lui a longtemps attribué, quand sa tendance à tout garder pour lui le faisait facilement passer pour un grand insensible. « Tu pourras lui dire Gaby, peut-être même qu'il ne demandera qu'à l'entendre. » Il se permet d'employer le futur, prenant presque déjà pour acquis le réveil de l'héritier quand bien même s'avancer autant peut paraître bien ambitieux compte tenu du diagnostic réservé des médecins. « La médecine fait des miracles de nos jours et notre corps aussi peut être surprenant. J'ai conscience que tout ça fait très peur mais Channing a la peau dure, tu le sais tout comme moi. » Il ne lui dirait pas tout ça s'il n'en pensait rien, son but n'est pas de lui mentir pour lui redonner un espoir que lui-même n'aurait pas. Eddie peut être optimiste pour deux mais il ne la laissera pas se résigner, pas tant qu'il est encore permis de croire que le réveil tant espéré se fera. « Notre relation à Los Angeles était si… indéfinissable. C’est aussi ce qui nous a porté préjudice mais j’ai vécu la plus belle relation que j’ai pu connaître jusqu’ici. Tout était si… naturel, logique et léger… je ne sais pas si on pourrait un jour retrouver ce qu’on a eu… mais j’aimerai au moins qu’on nous donne la chance de réessayer… » C'est aussi tout ce qu'il leur souhaite car quel incroyable gâchis ce serait que de priver ces deux-là de se retrouver. Eddie en voudrait à l'univers pour toute une vie, il ne croit déjà pas à grand-chose mais un tel dénouement le rendrait incroyant pour de bon, c'est une certitude. « Il y a une chose dont Channing ne m'a justement pas parlé, c'est votre rencontre. » Eddie lui a raconté la sienne avec l'avocate et celle-ci sait à présent aussi comment son chemin a été amené à croiser celui de l'héritier par le passé, mais Eddie ignore encore comment l’américaine et le grand brun se sont connus, ce qu'il devine être plusieurs années en arrière. « Tu voudrais m'en parler, toi ? » questionne-t-il avec douceur, dans l'idée de faire remonter de bons souvenirs d'une époque semblant les rendre tous deux nostalgiques. Il croit comprendre que tout ne s’est pas bien terminé mais leur histoire était belle avant ça, et c'est à ça que Gabrielle ferait mieux de penser.
23 juin 2022. « Non, je n'ai pas osé. » Ce n’est pas un reproche qu’elle lui adresse en lui signifiant qu’il ne lui a rien dit concernant le fait qu’il connaissait Channing. Elle aurait aimé le savoir, certes, mais elle comprend que la situation était délicate pour le jeune homme de le lui signifier à ce moment même où il s’est rendu compte de leur connaissance en commun « « Je voyais que ces photos te troublaient alors j'ai préféré me taire, pour ne pas remuer des souvenirs qui auraient pu être douloureux pour toi. » Et elle apprécie cette bienveillance. Il est vrai que le but premier, lorsqu’elle lui a montré ces clichés, étaient de partager avec lui sa passion pour la photographie et lui montrer ce qu’elle faisait. Les photos avec Channing étaient présentes au milieu d’un tas d’autres, leurs souvenirs gravés dans nombreuses de ses pellicules, tant l’héritier a bien souvent joué – à ses dépens – sa muse et son principal modèle. Gaby se souvient très bien de ce soir où elle a montré donc ses photos et chercher à démentir sur l’effet qu’a eu le défilement de ses photos sous ses yeux – qu’elle a pourtant cherché à cacher par tous les moyens – ne serait pas honnête de sa part. « Et puis je n'étais pas resté sur de très bons rapports avec Channing, je ne voulais pas te mêler à nos histoires ni te laisser penser que j'étais un garçon à problèmes, même si t'aurais été en droit de le penser. » Un fin sourire se dessine sur les lèvres de Gabrielle à cet instant alors qu’elle prononce doucement « A ce moment-là, je n’avais pas de très bons rapports avec lui non plus donc je ne me serai pas permise de te juger… fait-t-elle alors qu’elle trouve son regard avant que son sourire ne disparaisse peu à peu « Mais j’apprécie ta bienveillance… et ta maturité » ça mérite d’être souligné, surtout suite à ce qu’il venait de dire sur lui-même se qualifiant de garçon à problèmes – elle ne le pense d’ailleurs pas une seule seconde. C’est un petit coup léger d’épaules qu’elle lui donne, lui accorde surtout un regard reconnaissant et sincère avant qu’une autre question passe la barrière de ses lèvres. Celle de savoir si Eddie a confessé à Channing avoir vu des photos de lui, photos appartenant donc à l’avocate. « Il le sait, oui. C'était sûrement pas à moi de lui dire mais je ne voulais pas lui mentir en prétendant que l'avocate dont il me parlait ne me disait rien. » Est-ce que Gabrielle lui en veut ? Non. Elle acquiesce même aux paroles du coréen, montrant une nouvelle fois qu’elle comprend son choix, celui d’avoir été honnête envers Channing qui, semble-t-il lui aurait parlé d’elle. « Il l’aurait découvert… tôt ou tard ». Ce tôt ou tard n’étant pas arrivé, bien que la jeune femme ait pu lui envoyer de temps à autre quelques photos, notamment New York sous la neige, ce voyage qu’ils avaient entrepris à deux lors de leur idylle quelques années auparavant. Mais des photos de lui à proprement parlé, Gabrielle ne lui a encore jamais montré. « Channing était surpris, un peu confus aussi d'apprendre que tu avais conservé ces photos. » Gaby porte son regard sur Eddie, quelque peu secoué elle-même pas la confession qu’il lui apporte. Et puis, un échange lui revient avec l’héritier, un qu’ils ont pu avoir par sms, où il lui a justement demandé si elle avait gardé toutes ses photos – sans sous-entendre leurs photos. Et elle comprend désormais d’où a pu sortir cette curiosité, une de laquelle elle ne s’est pas cachée, lui avouant les avoir effectivement toutes conservées et elle se promet alors à cet instant que, dès qu’il se réveillera et ira mieux, elle plongera avec lui dans leurs souvenirs du passé.
Elle s’effondre. Littéralement en avouant à voix haute aimer Channing quand lui-même l’ignore, paisiblement endormi. Et c’est tout ce qu’elle redoute, qu’il ne se réveille pas et qu’il ne puisse jamais entendre ce je t’aime en retour, celui que lui a prononcé lors d’un dernier effort avant de perdre connaissance. Des larmes perlent le long de ses joues alors que son regard est incapable de croiser celui d’Eddie « Viens là. » Il la prend dans ses bras et l’avocate se laisse aller, chose qu’elle ne se serait jamais autorisée en temps normal. Tout comme elle n’aurait jamais craqué en premier lieu si les circonstances et cette attente interminable ne la poussaient pas à bout. Gaby passe ses journées au chevet de l’héritier, et ça depuis son accident trois jours plus tôt. Les minutes paraissent des heures, les heures paraissent des jours et les jours des semaines, tant le temps lui semble long, en attendant qu’il se réveille. Ses nerfs sont mis à rude épreuve, ses émotions aussi et c’est ce qui explique pourquoi, aujourd’hui, devant Eddie, elle craque. « Tu pourras lui dire Gaby, peut-être même qu'il ne demandera qu'à l'entendre. » Elle se raccroche à ses paroles, veut y croire elle aussi « La médecine fait des miracles de nos jours et notre corps aussi peut être surprenant. J'ai conscience que tout ça fait très peur mais Channing a la peau dure, tu le sais tout comme moi. » Elle se recule légèrement sans toutefois se défaire totalement de l’étreinte du jeune coréen, venant à essuyer ses larmes du bout des doigts, laissant échapper de sa voix frêle un « je l’espère, Eddie… » repensant à la violence de l’accident, celle qui lui est impossible d’oublier. Elle ne reviendra pas sur les détails de celui-ci, des raisons qui la font craindre le pire. A la place, Gabrielle revient sur sa relation avec Channing, expliquant à quel point leur relation passée a été une des plus belles qu’elle ait vécu et une de celle qu’elle aimerait retrouver avec lui « Il y a une chose dont Channing ne m'a justement pas parlé, c'est votre rencontre. (…) Tu voudrais m'en parler, toi ? » Elle relève péniblement le regard, plantant celui-ci dans celui du danseur et la simple évocation du mot rencontre semble faire naitre un léger sourire sur ses lèvres, alors qu’elle hausse légèrement les épaules en penchant la tête sur le côté « La toute première fois, c’était lors d’un meeting professionnel. Un contrat potentiel entre le cabinet d’avocat pour lequel je travaillais et le Walker Group… et son sourire s’agrandit davantage alors de manière amusée mais légèrement gênée et dire que Channing n’a pas attiré mon attention serait totalement mentir reconnait-t-elle avant de redevenir un tantinet sérieux on s’est retrouvé dans un bar quelques jours plus tard, par pur hasard. Il est venu s’assoir à mes côtés et nous avons longuement parlé… et bu reconnait-t-elle encore une fois amusé par la confession je lui ai proposé de lui prouver à quel point Los Angeles est une ville fantastique et après s’être éternisé dans les rues de la ville nous avons fini par prendre un bain de minuit se doutant de la réaction d’Eddie, elle ajoute alors en brandissant son index et ce n’est pas ce que tu crois, il ne s’est rien passé, c’était en tout bien tout honneur. Après ça, on a déambulé dans les rues de la ville pour rejoindre sa voiture, il m’a raccompagné chez moi et je l’ai invité à prendre un dernier verre » Et bien plus, il le comprendra par l’air qu’elle adopte alors qu’elle le regarde en coin. L’évocation du souvenir lui donne évidemment du baume au cœur, une lueur ayant fait son apparition dans ses yeux depuis le début de son récit « Après ça, nous avons gardé contact et nous nous sommes très vite revus et de plus en plus souvent. Au point où il a presque élu domicile chez moi, au point où on passait le plus clair de notre temps ensemble, si ce n’est lorsqu’on avait nos obligations professionnelles respectives… et ça jusqu’à… jusqu’à ce qu’il ait dû revenir ici, à Brisbane » Le discours a changé. Il n’est plus celui de reproche, celui où, si elle avait bien souvent conté leur histoire, elle n’avait aucun scrupule à dire qu’il était parti du jour au lendemain, ne cherchant pas à lui trouver d’excuse alors que c’est ce qu’elle fait ici. Comme si toute l’amertume qu’elle avait pu accumuler durant toutes ces années avaient soudainement disparu, au vu des circonstances « Tout ce que je veux c’est que, cette fois, il me revienne… ». Indéniablement, le souvenir de Chan dans le coma n’est jamais loin, l’impression de ressentir par deux fois la même sensation, sensation désagréable de perdre celui qui est cher à son cœur.
Elle passe ses mains sur ses cuisses et propose à Eddie à ce qu’ils se remettent à marcher. Ils se remettent en route d’un pas lent alors que l’avocate relance la conversation « Comment tu vas, toi ? Comment ça se passe avec … Halston, c’est bien ça ? » Le besoin de changer de sujet, le besoin aussi de prendre des nouvelles de son ami, ne souhaitant pas accaparer toute l’attention, alors que, malgré le contexte, ils ont l’occasion de se retrouver, même si cela n’est que le temps d’une heure ou deux.
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Si c'était à refaire, prendrait-il le risque d'interroger Gabrielle sur ces photos ou conserverait-il son mutisme en évitant soigneusement le sujet ? L'échange du jour l'amène à étudier cette question durant plusieurs secondes mais Eddie estime avoir gardé le silence pour de bonnes raisons à l'époque, en comprenant que le sujet était peut-être sensible et en voyant bien que Gabrielle s'efforçait de ne pas réagir face aux fameux clichés. Si les rôles avaient été inversés il aurait sans doute apprécié qu'on ne le titille pas sur des photos chargées en souvenirs plus ou moins douloureux et c'est en tant qu'ami qu'Eddie a raisonné ce jour-là chez l'avocate, quand l'envie de la préserver l'a très largement emporté sur sa curiosité, aussi surpris avait-il pu être en découvrant son lien avec l'héritier. Mais le danseur est bien incapable de lui cacher l'autre raison lui ayant valu de ne pas réagir auxdites photos : ces anciennes tensions entre Channing et lui qu'il ne désirait pas non plus raviver, en ramenant cet houleux passé au beau milieu d'un moment avec Gabrielle qui ne soupçonnait alors pas que les deux hommes se connaissaient. C'est donc aussi un peu à lui qu'Eddie a pensé dans cette histoire, sa propre image qu'il a aussi cherché à préserver au lieu d'assumer ce qui l'avait autrefois opposé à Channing. Avec le recul et sa dernière discussion avec le concerné cette animosité passée semble désormais loin derrière eux mais plusieurs mois en arrière Eddie n'aurait sans doute pas pu l'aborder avec autant d'aisance, encore moins en ne sachant pas à quel point Gabrielle avait pu en être proche car d'un côté comme de l'autre, le danseur se trouvait dans une posture assez délicate. « A ce moment-là, je n’avais pas de très bons rapports avec lui non plus donc je ne me serai pas permise de te juger… » Ce qu'il ignorait, la réaction nuancée de l'avocate face aux photos l'ayant surtout amené à penser que celles-ci remuaient quelque chose de tristement nostalgique en elle car du reste, il ne pouvait pas tellement présumer l'état de ses rapports avec Channing. Aujourd'hui tout paraît bien plus clair et même si Eddie ne détaillera pas ses agissements passés avec l'héritier et les torts qu'il n'a plus aucun mal à endosser, il n'exclut pas de raconter un jour à Gabrielle la façon dont les choses avaient très mal commencé entre eux. Et Channing pourra s'assurer qu'il n'arrange pas l'histoire à sa convenance, en se donnant le beau rôle qu'il n'a clairement jamais eu. « Mais j’apprécie ta bienveillance… et ta maturité » Le Walker avait lui aussi souligné cette prétendue maturité gagnée durant les derniers mois et Eddie mentirait s'il prétendait que ça n'est pas un peu plaisant à entendre, ses efforts pour devenir une meilleure version de lui-même depuis son opération ayant manifestement payé. Ce n'était pas gagné et Gabrielle ne le contredirait sans doute pas sur ce point, compte tenu de la première impression pas qu'Eddie lui avait laissée lors de leur rencontre pendant la fête des voisins. Pas franchement positive, comme on le devine bien. « Je me réjouis en tout cas de savoir que pour vous deux aussi, les choses se sont arrangées. » Et elles continueront de s'arranger, il veut y croire parce que tout semble trop bien engagé dans ce sens pour qu'un fichu accident ne vienne tout compromettre. S'il a pu repartir sur de bonnes bases avec le grand brun Eddie pense que n'importe qui dans ce monde a le pouvoir d'arranger les choses avec de la bonne volonté, qui plus est si les sentiments du passé n'ont jamais cessé d'animer le cœur de l'avocate comme celui de l'héritier. Il doit alors admettre avoir parlé de l'existence de ces photos à Channing, auquel il a préféré ne pas cacher son lien avec Gabrielle même si ce n'était pas son rôle. « Il l’aurait découvert… tôt ou tard. » Sûrement oui mais Eddie a conscience de lui avoir volé l'occasion de lui en parler d'elle-même, aussi bonnes ont pu être ses intentions et aussi sincère a pu être son désir de transparence vis-à-vis de l'héritier.
Les larmes dévalant les joues de Gabrielle et sa voix brisée sont un crève-cœur pour le danseur qui ne tient pas longtemps avant de lui offrir le réconfort et la chaleur de ses bras, à défaut de pouvoir faire tellement plus. On lui a déjà demandé quel super-pouvoir il désirerait posséder sans qu'il n'ait jamais vraiment su quoi répondre à ça mais aujourd'hui Eddie en est sûr : il rendrait son sourire à l'avocate en une fraction de seconde s'il le pouvait et il ramènerait aussi Channing dans le monde des conscients, ne supportant pas l'idée de la savoir aussi inquiète que malheureuse comme d'imaginer le grand brun prisonnier de son corps. Au diable le pronostic des médecins, il ne croit pas se tromper en affirmant que des miracles ont lieu tous les jours et que Channing se trouve aussi entre de bonnes mains dans cet hôpital, en plus de la résistance du Walker dont il n'a aussi jamais douté. Cet accident n'aura pas raison de celle-ci, pas plus qu'il n'aura raison de l'espoir toujours permis qu'Eddie tente tant bien que mal d'insuffler à Gabrielle en attendant que des nouvelles leur parviennent, bonnes obligatoirement. « Je l’espère, Eddie… » Elle en sait assurément plus que lui pour être au chevet du grand brun depuis plusieurs jours, elle a aussi vu l'accident de ses propres yeux ce qui la rend certainement plus légitime de s'inquiéter comme d'avoir parfois du mal à arborer un masque d'optimisme. Et personne ne peut lui reprocher de se laisser gagner par la peur quand les circonstances sont celles-ci, tant que Gabrielle ne baisse pas les bras et continue de maintenir Channing en vie par la force de son amour. Leur rencontre est un sujet qui n'a pas été abordé lors de son dernier échange avec l'héritier, c'est donc la prochaine question qu'Eddie se risque à poser en espérant réactiver de bons souvenirs chez l'avocate et non l'inverse, ce dont le sourire aussitôt récolté ne tarde pas à le rassurer. « La toute première fois, c’était lors d’un meeting professionnel. Un contrat potentiel entre le cabinet d’avocat pour lequel je travaillais et le Walker Group… et dire que Channing n’a pas attiré mon attention serait totalement mentir. » Ce qui ne le surprend pas, Channing n'étant pas de ces hommes passant inaperçus en plus d'être doté de charmes certains qu'Eddie ne peut lui-même que lui accorder. Le grand brun n'a même sûrement pas attiré que l'attention de l'avocate ce jour-là, il note en tout cas que leurs chemins se sont initialement croisés pour des raisons professionnelles ce qu'il aurait, à vrai dire, assez naturellement présumé. « On s’est retrouvé dans un bar quelques jours plus tard, par pur hasard. Il est venu s’assoir à mes côtés et nous avons longuement parlé… et bu. Je lui ai proposé de lui prouver à quel point Los Angeles est une ville fantastique et après s’être éternisé dans les rues de la ville nous avons fini par prendre un bain de minuit. » Eddie lève deux mains innocentes tandis qu'un sourire trahit les pensées qui lui viennent, Gabrielle s'empressant de contrer tout ce qu'il pourrait s'imaginer. « Et ce n’est pas ce que tu crois, il ne s’est rien passé, c’était en tout bien tout honneur. Après ça, on a déambulé dans les rues de la ville pour rejoindre sa voiture, il m’a raccompagné chez moi et je l’ai invité à prendre un dernier verre. » Le fameux dernier verre, oui, Eddie le connait lui-même très bien. C'est là qu'ils ont dépassé le cadre de leur collaboration n'est-ce pas, il le devine sans mal au regard que lui lance Gabrielle alors qu'il se garde d'émettre tout commentaire, les détails ne regardant que les deux intéressés. « Après ça, nous avons gardé contact et nous nous sommes très vite revus et de plus en plus souvent. Au point où il a presque élu domicile chez moi, au point où on passait le plus clair de notre temps ensemble, si ce n’est lorsqu’on avait nos obligations professionnelles respectives… et ça jusqu’à… jusqu’à ce qu’il ait dû revenir ici, à Brisbane. » Un court silence s'invite dans la discussion, le temps pour Eddie d'assimiler les différentes informations lui parvenant comme le fait que Channing était manifestement à l'origine de leur éloignement à l'époque. Gabrielle ne parait pas amère en le disant, si la rancœur était autrefois de mise entre eux il ne semble plus en rester grand-chose car les récents évènements ont sûrement remis en perspective un certain nombre de choses comme balayé d'éventuels ressentiments. « Il s'est passé beaucoup de temps entre le moment où il est rentré et le moment où tu as rejoint Brisbane, à ton tour ? » Il ne peut dater que l'arrivée de l'avocate en ville puisque leur rencontre avait eu lieu peu de temps après celle-ci. « Parce que j'ai comme l'impression que vous êtes de ceux que l'univers ne pourra jamais vraiment séparer. » Des âmes sœurs ? Il n'oserait le supposer alors qu'il n'est même pas sûr d'y croire lui-même, pas plus qu'il ne sait quoi penser de ces histoires de destin qu'il a tendance à brandir uniquement quand ça l'arrange, et encore. Eddie reste bien trop terre-à-terre pour ces choses-là et pourtant, c'est bien lui qui s'en remet à l'univers encore aujourd'hui. « Tout ce que je veux c’est que, cette fois, il me revienne… » Ces mots le touchent en plein cœur et son premier réflexe est de serrer la main de l'avocate dans le creux de la sienne, alors qu'il aimerait tant lui promettre qu'elle ne perdra pas Channing et que tout finira bien. Le danseur se trouve peu à peu à court de mots, il a bon espoir qu'elle pourra bientôt dire au grand brun tout ce qu'elle a sur le cœur et que ce dernier pourra aussi l'entendre mais la douceur de ses gestes et de son regard remplace désormais celle de ses paroles.
Le duo se remet en marche sur demande de Gabrielle et c'est d'un pas tranquille qu'ils reprennent leur avancée à travers le parc, la discussion laissée sur le banc ne tardant pas à renaitre au détour d'un sentier fleuri dont Eddie admire au même instant les couleurs. « Comment tu vas, toi ? Comment ça se passe avec … Halston, c’est bien ça ? » Il s'attendait à cette question parce que Gabrielle s'est toujours sincèrement intéressée aux autres, ce qu'elle lui prouve encore même lorsque les circonstances justifieraient totalement qu'elle s'abstienne de venir aux nouvelles. Eddie n'aurait pas pu s'en offusquer, l'idée n'a même jamais été d'attirer l'attention sur lui alors qu'il s'est engagé à lui consacrer une journée où il est avant tout question d'elle. Mais le danseur accepte volontiers de répondre aux questions de l'avocate si ses réponses peuvent permettre à celle-ci de penser à autre chose, au moins pendant quelques minutes. « C'est ça oui, tu as bien retenu. » il lui confirme dans un sourire tout en ayant bien conscience que sa compagne ne porte pas le prénom le plus évident qui soit, ni le plus répandu. Eddie poursuit sa marche et ajoute alors, d'une voix sereine. « Je vais bien écoute, j'ai récemment déménagé car la vie de couple avec trois chats était devenue un peu compliquée dans mon petit appartement je t'avoue. » Il faudra d’ailleurs qu’il pense à donner sa nouvelle adresse à Gabrielle, celle-ci possédant encore l'ancienne de Redcliffe où elle n'a plus la moindre chance de trouver le danseur – pour le plus grand bonheur du voisinage. « On fêtera bientôt nos un an ensemble d'ailleurs, c'est fou ce que le temps passe vite. » C'est un peu plus timidement qu'Eddie le confesse alors qu'un sourire pourtant très fier étire ses lèvres. Il n'en revient pas de se dire qu'Halston fait partie intégrante de sa vie depuis maintenant un an, les complications des prémices de leur relation ne faisant que rendre ce cap prochainement franchi d'autant plus beau et symbolique. Il croit pouvoir dire qu'ils reviennent de loin tous les deux et que douze mois plus tôt, personne n'aurait pu croire que leur histoire durerait – lui le premier. « J'ai encore du mal à réaliser que ma vie a changé à ce point en l'espace d'une année tu sais, le Eddie du passé serait certainement étonné de voir tout ce qui l'attend et.. le genre de projets qui sont aujourd'hui d'actualité pour moi, alors qu'ils ne l'auraient jamais été un an en arrière. » Il dévie un regard plein de sous-entendus que Gabrielle ne saisira probablement pas et pour cause, elle ne sait encore rien du grand projet que le danseur nourrit avec sa compagne depuis le début d'année. Eddie hésite à répandre l'information autour de lui puisque sa propre famille ne sait rien du cadeau qu'il s'est engagé à faire à Halston, ce qui ne l'empêche pas de tourner autour de la chose comme avec sa prochaine question adressée à l'avocate. « Dis Gaby, tu as déjà pensé au fait d'avoir des enfants ? » Halston et Gabrielle ont sensiblement le même âge s'il ne fait pas erreur, et s'agissant d'un rêve de très longue date pour la première Eddie est assez curieux de savoir si les deux américaines sont susceptibles d'avoir également ça en commun. Il est peut-être un peu indiscret mais il compte sur Gabrielle pour le stopper si c'est le cas, de même qu'il espère ne pas s'aventurer sur un sujet sensible car la seule fois où la question des enfants a été évoquée entre eux est le jour où Eddie avait plaisanté sur le fait qu'elle n'aurait pas supporté d'avoir un fils comme lui. Mais un fils tout court, il ne connait pas la position de Gabrielle vis-à-vis de cette éventualité.
23 juin 2022. « Je me réjouis en tout cas de savoir que pour vous deux aussi, les choses se sont arrangées. » Et Gabrielle s’en réjouit tout autant, même si les choses sont loin d’être parfaites entre eux. Bien loin même quand leur dernier échange, en dehors de ses quelques mots échangés avant qu’il ne perde connaissance, a été houleux et marqué à nouveau la fin de leur rapprochement, l’amertume et l’animosité ayant refait surface dès l’instant où elle l’a vu avec une autre. Mais pour elle, ce qui s’est passé quelques jours auparavant ne compte plus, Channing est le seul à compter désormais, son état de santé évidemment en priorité, et quant à leur relation… advienne que pourra.
Advienne que pourra mais Gabrielle a conscience qu’elle aime Channing. Les souvenirs ressortent, la nostalgie aussi, alors qu’Eddie lui demande de lui raconter comment ils se sont rencontrés tous les deux et au fil de son récit, elle se rend compte que ses sentiments, bel et bien réels, perdurent en réalité et ça, depuis des années. Elle en a l’ultime conviction alors qu’elle donnerait tout pour retrouver ce temps si simple qu’était le leur à Los Angeles, celui-là même où ils sont devenus bien plus proches qu’ils ne voulaient eux-mêmes se l’autoriser ou du moins, y croire. Au point où lorsqu’elle évoque le départ de l’héritier pour Brisbane, qui a sonné le glas de leur relation, l’amertume est totalement absente, bien que la tristesse, elle, le soit. « Il s'est passé beaucoup de temps entre le moment où il est rentré et le moment où tu as rejoint Brisbane, à ton tour ? » Gabrielle ne s’était jamais réellement posée la question, surtout que sa venue à Brisbane n’est en rien lié au fait qu’elle recherchait à rejoindre Channing après tout ce temps. « Deux ans... » et l’héritier a laissé une trace indélébile dans sa mémoire tout comme dans son cœur, tant elle n’a jamais su totalement l’oublier durant ces deux années. La preuve en est, le réconfort qu’elle a pu trouver dans les bras de certains hommes n’ont jamais comblé le manque de la présence de Channing dans sa vie, ni remplacé leur relation qui, pour elle, était unique, ne s’étant jamais senti aussi bien que lorsqu’elle était avec lui. « Parce que j'ai comme l'impression que vous êtes de ceux que l'univers ne pourra jamais vraiment séparer. » Et cette affirmation rend Gabrielle toute fébrile, la faisant se figer alors que son regard retrouve celui d’Eddie. Il souligne là encore quelque chose qu’il la rend songeuse, elle aussi pas nécessairement public à ce type de fantaisie, elle qui, dans la vie de tous le sjours, et dans le cadre de sa profession notamment, s’appuie que sur des faits avérés « Nos chemins se sont à nouveau croisés durant la fête des voisins chez Dani et qu’elle me la présentait… elle n’ira pas plus loin dans la précision de la relation entre Dani et Channing à l’époque, et se remémorait cet instant rend la jeune femme encore plus songeuse qu’elle ne pouvait l’être, son regard portait sur l’horizon et je crois qu’on a jamais autant maudit le destin que ce soir-là pour nous avoir mis sur la route de l’un et de l’autre à nouveau » Et si à l’époque cela la faisait pas du tout sourire, aujourd’hui, en le racontant, une esquisse s’en dessine sur le coin de ses lèvres. « Tu as peut-être raison, nous retrouver en train de sauver une tortue tous les deux pendant un jogging matinal ou nous retrouver parce qu’il a manqué de m’envoyer dans le décor en voiture… effectivement, les chances pour que cela se produise étaient quand même minimes » Minimes mais pas impossible, puisque cela s’est réellement passé. Elle passe bien d’autres moments où ils se sont à nouveau recroisés par pur hasard mais un en particulier mérite peut-être d’être évoqué, parce que les mots d’Eddie font alors sens avec cette rencontre inopinée… « On a renoué après s’être retrouvé tous deux sur un yacht pour le réveillon du nouvel an amorce-t-elle doucement, son regard toujours porté sur l’horizon on s’est isolé pour regarder le feu d’artifice depuis le ponton et après ça, il m’a embrassé souligner que c’est lui qui a été à l’origine de leur rapprochement n’a pas d’importance, et ce n’est pas ce qu’elle cherche à faire de toute façon On s’est autorisé cette nuit-là pour se retrouver mais surtout pour se dire adieu, convenablement cette fois et la suite de l’histoire prouve qu’ils n’ont su se contenter de cette nuit-là on était pas censé recommencer quoi que ce soit… mais il semblerait effectivement qu’on soit incapable de se tenir loin de l’un de l’autre bien longtemps… ». Indéniablement, ses pensées ne peuvent que revenir au présent, elles ne peuvent que se remémorer l’accident, Channing désormais dans le coma, et elle ne peut qu’espérer qu’il lui revienne cette fois, si ce foutu univers est bel et bien incapable de les séparer. La main du jeune coréen qui se resserre autour de la sienne alors qu’elle émet ce souhait, la réconforte, la sienne se nouant davantage alors qu’elle est indéniablement reconnaissante de sa présence à ses côtés aujourd’hui, encore plus de sa bienveillance et de son écoute.
Ils reprennent leur marche, nécessaire quand Gabrielle passe des heures assisses au chevet de l’héritier mais surtout parce qu’elle souhaite en profiter pour changer de sujet. Entendre des nouvelles de la vie d’Eddie actuellement l’aidera à faire abstraction quelques instants de ses préoccupations tout comme cela l’intéresse tout autant d’en avoir, quand cela fait quelques temps qu’ils ne se sont pas vus « C'est ça oui, tu as bien retenu. » La première chose qu’elle veut savoir est comment il va mais aussi si cela se passe bien pour lui avec Halston, sa petite-amie. « Je vais bien écoute, j'ai récemment déménagé car la vie de couple avec trois chats était devenue un peu compliquée dans mon petit appartement je t'avoue. » La remarque la fait sourire, même légèrement rire, visualisant bien le tableau. Elle se souvient avoir mis les pieds une fois chez le jeune coréen, alors qu’elle venait le chercher pour une sortie improvisée alors qu’il était encore en convalescence après son opération, permettant ainsi à la californienne de faire la connaissance de ces fameux trois chats et se souvient très bien de la petitesse de l’endroit. « Tu as emménagé chez elle ? Ou vous avez trouvé votre petit nid douillet à deux ? » et bien sûr qu’elle aimerait savoir où, bien que cela, elle ne se permette pas de lui demander directement. « On fêtera bientôt nos un an ensemble d'ailleurs, c'est fou ce que le temps passe vite. (…) J'ai encore du mal à réaliser que ma vie a changé à ce point en l'espace d'une année tu sais, le Eddie du passé serait certainement étonné de voir tout ce qui l'attend et.. le genre de projets qui sont aujourd'hui d'actualité pour moi, alors qu'ils ne l'auraient jamais été un an en arrière. » Gabrielle acquiesce, toujours ce sourire présent, elle-même fier du Eddie qu’il est devenu « Le Eddie que j’ai connu et rencontré à cette fête des voisins a bien grandi… Et je suis si fière de lui dit-t-elle avec sincérité et bienveillance alors que sa main vient à se poser sur son épaule doucement « J’ai le droit de savoir ce que sont ces futurs projets dont tu parles ? » Sa curiosité est piquée, et notamment parce qu’Eddie adopte cet air qui ne peut que la faire s’interroger à ce sujet. Elle ne le forcera pas à parler s’il préfère garder ça pour lui car elle a toujours été très respectueuse et tolérante à ce propos – hormis dans son travail quand elle a à faire à des clients qui ne veulent pas tout lui dire alors qu’elle est là pour les aider – surtout envers Eddie, qui l’est lui-même avec elle. « Dis Gaby, tu as déjà pensé au fait d'avoir des enfants ? » La question la surprend. Elle la surprend, la met peut-être mal à l’aise aussi et pourtant, elle ne refuse pas d’y répondre, après un court silence qui s’est installé « Ca m’est arrivé, oui… elle marque une pause, s’apprêtant à lui confesser quelque chose qu’elle a uniquement dit à son meilleur ami, Matt quand j’étais avec Channing on sent l’inconfort dans sa voix en faisant une telle confession mais elle ne le regrette pas, car elle sait qu’elle peut faire confiance à Eddie Mais, même si l’idée m’a effleurée l’esprit… je dois dire qu’encore aujourd’hui, je n’arrive pas à me positionner sur la question et ça pour plusieurs raisons, qu’elle lui expose brièvement notamment du fait de mon histoire familiale, je n’ai pas grandi dans un milieu idyllique et je n’ai pas eu un modèle exemplaire de parents… je crains de ne pas être à la hauteur ou de ne pas être faite pour être mère pourtant, le chemin qu’elle a emprunté est bien loin d’être le même que ses parents, il est même à l’opposé, mais elle est aussi une acharnée du travail et elle n'aimerait pas être de ses parents qui passent bien plus de temps au bureau qu’à leur maison auprès de leur proche et je ne suis pas dans une situation stable aussi qui pourrait me conforter dans ce choix » relationnellement parlant, s’entend, Channing et elle n’étant en rien officiellement ensemble, bien qu’elle ait pu prétendre être sa fiancée auprès du personnel soignant « Tu l’envisages, toi ? ». Parce que c’est ce que sous-entend sa question, n’est-ce pas ? Ou du moins, il semble avoir le besoin de parler à ce sujet.
Even if we can't find heaven, hands put your empty hands in mine. And scars show me all the scars you hide, and hey, if your wings are broken, please take mine 'til yours can open too 'cause I'm gonna stand by you.
« Deux ans... » Il intègre l'information dans un léger hochement de tête, tout en ayant bien conscience de ce que deux années peuvent représenter à l'échelle d'une relation – surtout lorsque celle-ci a connu une fin abrupte. Deux années durant lesquelles Gabrielle n'a visiblement pas pu tirer un trait sur le grand brun, deux années qui auraient pourtant pu lui permettre de passer à autre chose mais Eddie est lui-même bien placé pour savoir qu'il y a des histoires dont on ne se remet jamais vraiment. Une part de lui se demandera toujours quel aurait été son avenir avec Alexis si celle-ci n'avait pas claqué la porte un soir, le laissant sur un sentiment d'inachevé et d'échec que Gabrielle a peut-être elle aussi connu quand Channing est rentré au pays. Cinq ans ont passé depuis que le danseur a vu sa première petite amie lui échapper et même si pour sa part Eddie n'est plus du genre à regarder en arrière, il comprend cette difficulté à laisser partir l'autre quand tout semblait si évident. Et l'évidence rattrape parfois ceux qui en viennent à emprunter des routes différentes, comme si le destin ou une quelconque autre force n'était pas décidé à les laisser vivre très longtemps loin de l'autre. « Nos chemins se sont à nouveau croisés durant la fête des voisins chez Dani et qu’elle me la présentait… et je crois qu’on a jamais autant maudit le destin que ce soir-là pour nous avoir mis sur la route de l’un et de l’autre à nouveau » C'est drôle quand il y pense puisque sa rencontre avec Gabrielle découle aussi du même événement, sur lequel Eddie porte à présent un regard mitigé. Il n'en garde pas que de bons souvenirs et n'est pas forcément fier de celui qu'il était à l'époque, mais il saisit en tout cas bien mieux les choses et la façon dont ces deux-là se sont retrouvés alors que les circonstances n'étaient apparemment idéales pour personne. « J’aurais peut-être pu sentir que vous vous connaissiez ce jour-là si j’étais pas parti juste avant l’arrivée de Channing. Ça s’est joué à cinq minutes, je dirais. » Mais sans doute ont-ils prétendu ne pas se connaître pour n'éveiller les soupçons de personne sur leur passé commun, alors rien ne dit qu'il aurait pu faire le rapprochement même en étant le plus observateur qui soit. Tout ça restera à l'état d'hypothèse et cet épisode n'est sûrement pas plus mal là où il se trouve, dans un passé que le danseur n'a pour sa part aucune envie de remuer. « Tu as peut-être raison, nous retrouver en train de sauver une tortue tous les deux pendant un jogging matinal ou nous retrouver parce qu’il a manqué de m’envoyer dans le décor en voiture… effectivement, les chances pour que cela se produise étaient quand même minimes » Cette fois ses yeux s'écarquillent tandis qu'il tente d'évaluer le sérieux de ces paroles, avant de comprendre que Gabrielle ne se fiche pas du tout de lui. « Wow attends, j’ai beaucoup de questions là. » Un rire lui échappe pendant qu'il ralentit sa marche, loin d'imaginer jusque là que le destin – auquel il va vraiment finir par croire à ce stade – avait pu se jouer d'eux à ce point. « Un sauvetage de tortue ? J’avoue que c’est cocasse comme façon de retrouver quelqu’un mais ça rapproche, hein, j’imagine. » Ou peut-être qu’il suppose très mal les choses et que cet autre épisode n’est pas un bon souvenir que Gabrielle garde de ses nombreuses retrouvailles avec l’héritier. Mais c'est une cause pour laquelle ils ont inévitablement dû s'allier ce jour-là, comme si le fait d'avoir choisi la même heure et le même endroit pour courir n'était pas déjà un signe en soi. « On a renoué après s’être retrouvé tous deux sur un yacht pour le réveillon du nouvel an, on s’est isolé pour regarder le feu d’artifice depuis le ponton et après ça, il m’a embrassé. » Et si c'était son genre Eddie pourrait trouver ça romantique ainsi que très bien joué de la part de Channing, ne serait-ce que pour avoir saisi sa chance un jour aussi symbolique que celui-ci. Car c'est avec lui que Gabrielle a terminé son année et commencé la suivante, et ce n'est visiblement pas tout ce qu'ils ont eu l'occasion de partager ensemble. « On s’est autorisé cette nuit-là pour se retrouver mais surtout pour se dire adieu, convenablement cette fois, on était pas censé recommencer quoi que ce soit… mais il semblerait effectivement qu’on soit incapable de se tenir loin de l’un de l’autre bien longtemps… » Ce qu'il ne peut là encore que comprendre pour avoir été lui-même incapable de mettre des barrières avec son agente après un premier dérapage qui en aura entrainé beaucoup d'autres. Tout comme Gabrielle il n'était pas censé récidiver mais les sentiments s'en sont mêlés et son cœur n'a finalement jamais cessé de vibrer pour son américaine, depuis l'instant où il a assumé cette attirance et le fait de vouloir plus. Eddie a très vite su qu'il ne pourrait pas se contenter d'une histoire sans lendemain et si Gabrielle est ici aujourd'hui, c'est certainement parce qu'elle a cessé de se mentir elle aussi. « En tout cas c’est toi qui es à son chevet et je pense que ça veut dire beaucoup de choses vis-à-vis de votre histoire. Je suis même convaincu que Channing en aurait fait autant si les rôles avaient été inversés. » Pas seulement parce que le grand brun est connu pour se soucier beaucoup des autres, le sort de l'avocate étant certainement l'un de ceux lui important le plus, à lui aussi. « Il t’aurait pas lâchée non plus, c’est une chose qu’il pourra sûrement te confirmer à son réveil. » Ce fameux réveil que tout le monde attend et auquel Eddie veut vraiment croire, alors que sa voix n’en finit pas de sonner optimiste. On ne passe pas des heures et des jours auprès de quelqu’un sans y investir beaucoup de son cœur et c’est en tout cas bien ce qu’il sous-entend ici, sans aller plus loin dans ses interprétations et sans imposer plus longtemps le sujet entre eux.
Eddie ne peut pas s'empêcher de trouver sa propre vie insignifiante comparée à ce qui se joue dans cet hôpital derrière eux mais il n'en oublie pas sa mission du jour : changer les idées de Gabrielle et lui donner de quoi penser à autre chose qu'à l'angoisse d'attendre des nouvelles, bonnes ou mauvaises. C'est après tout l'occasion de la tenir à jour sur son récent déménagement et ses autres projets, dont il aurait de toute façon fini par lui parler même s'il aurait assurément préféré trouver de bien meilleures circonstances pour ça. Il culpabiliserait presque d'étaler son bonheur dans ce parc et de centrer ainsi la discussion sur lui mais Gabrielle a de toute évidence besoin de ce genre d'éclaircie dans son ciel gris, et il ne doute pas de sa capacité à se réjouir pour lui malgré tout ce qu'elle peut vivre. « Tu as emménagé chez elle ? Ou vous avez trouvé votre petit nid douillet à deux ? » Étrangement la question de s'installer chez Halston ne s'est jamais posée, pas même dans les débuts de leur histoire – surtout pas dans les débuts de leur histoire. Eddie savait qu'il n'y était pas le bienvenu avec la colocataire de l'américaine lui vouant une haine tenace, un problème qu'Halston n'a pas rencontré chez lui puisqu'il vivait seul avec ses chats et que les trois boules de poils n'ont pas tardé à adopter la nouvelle occupante des lieux. « Pendant plusieurs mois c’est elle qui s’est installée chez moi et puis on s’est finalement pris une maison en centre-ville en début d’année. Un nid plus que douillet, ça c’est sûr. » Il étire un grand sourire en le disant, bien content d'avoir laissé derrière lui son petit appartement de Redcliffe pour un logement qui est aujourd'hui autant celui de l'américaine que le sien. Le couple s'y sent bien et y coule désormais des jours paisibles, une avancée que personne n'aurait pu prédire au commencement de leur histoire un an plus tôt, entre les complications que celle-ci a très vite connu et le fait que le danseur semblait à mille lieues de se poser sentimentalement parlant. « Le Eddie que j’ai connu et rencontré à cette fête des voisins a bien grandi… Et je suis si fière de lui. » Il est effectivement très loin aujourd’hui, cet Eddie qui cherchait à combler un je-ne-sais-quoi avec ses petites provocations et une certaine recherche d’attention. Comme c'est plaisant d'entendre qu'il a évolué pour le meilleur et que cette nouvelle version de lui a de quoi plaire, une preuve de plus qu'Halston ne l'a pas tiré vers le bas comme certains de ses proches avaient d'abord voulu le croire. « Tu sais, ces mots-là comptent vraiment pour moi alors merci Gaby. » il laisse entendre avec retenue, mais bel et bien touché d'entendre de sa bouche des mots que ses parents rechignent depuis toujours à lui accorder. Il n'attend même plus le jour où sa mère se dira fière de lui, résigné quant au fait qu'il ne sera jamais autre chose qu'une déception à ses yeux quand bien même il peut mener une vie honorable avec un travail qui le passionne, une vie amoureuse enfin stable et d'autres choses à venir qui le feront d'autant plus grandir en tant qu'homme. « J’ai le droit de savoir ce que sont ces futurs projets dont tu parles ? » La curiosité de l'avocate l'amène à se pincer les lèvres car à ce stade il pourrait bien tout avouer, sa réaction est peut-être juste la seule chose qu’il redoute pour se dévoiler aussi facilement. « Oh je peux bien t’en parler oui mais tu ferais mieux de te rasseoir, je crois. » Lui, tenter de gagner un peu de temps ? C'est bien possible et l'orientation de sa prochaine question n'a rien d'anodin après ça, alors qu'Eddie prend ouvertement la température quant à l'annonce qu'il lui fera bientôt. Il ne s’arme peut-être pas des pincettes nécessaires en glissant sur la question des enfants et il regrette déjà cette intrusion qu'il aurait pu davantage soigner, ne sachant après tout pas si le sujet peut être sensible. « Ca m’est arrivé, oui… quand j’étais avec Channing. » Il ne sait pas s'il s'y attendait. En l'entendant Eddie n'a pas l'impression que ce soit si surprenant et pourtant il n'aurait sans doute pas pu le présumer par lui-même, si Gabrielle ne lui avait rien dit. « Mais, même si l’idée m’a effleurée l’esprit… je dois dire qu’encore aujourd’hui, je n’arrive pas à me positionner sur la question notamment du fait de mon histoire familiale, je n’ai pas grandi dans un milieu idyllique et je n’ai pas eu un modèle exemplaire de parents… je crains de ne pas être à la hauteur ou de ne pas être faite pour être mère. » Des craintes faisant écho aux siennes alors qu'il reçoit avec respect les confidences de Gabrielle, appréciant sincèrement la confiance qu'elle peut fonder en lui pour se dévoiler de la sorte. « Tu peux aussi choisir de ne pas commettre les mêmes erreurs et de faire les choses différemment, en prenant tout sauf exemple sur eux. » Il n'est pas sûr de trouver les bons mots ni d'être bien placé pour la conseiller là-dessus mais Eddie est lui-même bien décidé à créer son propre modèle, plutôt que de reprendre celui que ses parents lui ont donné. Une éducation intolérante basée sur le rejet des ambitions de ses enfants au nom d'exigences dépassées, voilà ce qu'il ne veut personnellement jamais transmettre à ses enfants plus tard. « Si un jour tu choisis d'en faire un vrai projet bien sûr, ne crois pas que je cherche à te mettre une quelconque pression surtout. » Car personne ne peut prendre ce genre de décision pour elle, aussi pressante puisse être la société lorsque les femmes dépassent un certain âge comme si avoir des enfants était une obligation pour chacune. « Et je ne suis pas dans une situation stable aussi qui pourrait me conforter dans ce choix. » Ce n'est pas l'argent ou la stabilité professionnelle qui pourraient bloquer il s'en doute, car à moins d'entreprendre cette grande aventure seule il faut être deux pour faire un enfant et si cette discussion lui a appris quelque chose c'est bien que Gabrielle n'en est pas encore à officialiser quoi que ce soit avec son héritier. Il entend bien que toutes les conditions ne sont pas réunies et comprend que le projet ne soit pas à l'ordre du jour comme il peut l'être pour lui.
« Tu l’envisages, toi ? » Cette fois Eddie ne peut plus rien esquiver, son regard se raccroche alors à celui de l'avocate à laquelle il sourit posément. Il fait bien plus que l'envisager pour sa part et c'est certainement là où Gabrielle ne l'attend pas, là où il a le plus de chance de la prendre de court. « C’est prévu, en fait. » il confie doucement en guettant déjà la réaction de l’avocate du coin de l’œil, sans trop savoir ce qu’il s’attend exactement à provoquer chez elle. « On essaie d’avoir un enfant avec ma compagne, ça fait des mois qu’on.. travaille dans ce sens. » Et il n’a pas besoin de préciser ce point qui relève de l’évidence, les façons d’y parvenir pour un couple a priori en capacité de concevoir n’étant pas bien nombreuses – du moins, tout dépend de l’angle sous lequel on choisit de voir les choses. « Elle rêve de fonder une famille et je crois qu’un enfant est aussi le plus beau cadeau qu’elle pourrait me faire. » Il ne peut pas prétendre que ce rêve n'est pas d'abord celui d'Halston car on lui a suffisamment reproché de faire passer les envies de sa compagne avant les siennes, mais ça ne veut pas dire que cette envie ne peut pas aussi devenir la sienne, par extension. « Je m’attends déjà à entendre que je suis trop jeune pour ça mais j’avais jamais étudié la question avant de la rencontrer, et j’ai envie de croire que ça veut dire quelque chose. » Qu'en l'occurrence Halston est celle avec qui son avenir pourra s'écrire maintenant qu'il a la maturité nécessaire pour prendre soin de son couple et de la femme qu'il aime. Qu'il est aussi à un tournant de son existence où il peut enfin conjuguer son présent et son futur au pluriel, lui le grand individualiste qui a longtemps fonctionné seul et dont le cœur était avant ça bien trop fermé. Peut-être que cette envie a toujours sommeillé en lui et qu'il lui manquait juste le déclic et la femme pour rendre ça possible, une chose est sûre Eddie n'a pas le couteau sous la gorge et cet enfant sera pleinement désiré, d'un côté comme de l'autre. « Mais tu sais, ta crainte de ne pas être à la hauteur en tant que parent, je la ressens aussi. Ma compagne a ça en elle depuis toujours alors que cette envie est beaucoup plus récente de mon côté, puis.. j'apprends encore à m'occuper de moi et à prendre soin de ma santé, et c'est déjà pas simple. » Alors la perspective de prendre soin d’un enfant lui fait peur par moment, pas au point de lui faire reconsidérer son projet mais au point, quand même, de craindre que les choses se fassent moins naturellement pour lui. De ne pas avoir les bons réflexes quand son tour viendra comme de ne pas ressentir cette fameuse fibre paternelle qui ne se commande pas. « Je sais pas si je serai un bon père Gaby, je sais juste que j’ai envie de vivre cette aventure avec elle et que ça me tuerait de pas réussir à lui donner ce dont elle rêve. » Son regard se perd un instant autour d'eux alors qu'il s'en veut d'envisager déjà le pire. Ils essaient depuis des mois, d'accord, mais personne n'a dit que concevoir un enfant devait être simple et qu'Eddie était forcément un dieu de la fécondité. « Je pourrais pas t’en vouloir de trouver ça précipité toi aussi, j’ai conscience que les choses vont assez vite et que c’est pas un registre dans lequel on m’attendait. » Un sourire passe malgré tout la barrière de ses lèvres tandis qu'il reporte son regard sur elle, réaliste quant au caractère inattendu de cette annonce que l'avocate n'aurait probablement pas pu prédire.
23 juin 2022. « J’aurais peut-être pu sentir que vous vous connaissiez ce jour-là si j’étais pas parti juste avant l’arrivée de Channing. Ça s’est joué à cinq minutes, je dirais. » « C’est presque dommage qu’on se soit manqué de peu… un léger sourire se dessine sur ses lèvres on aurait trouvé notre premier point commun : détester Channing. Ca nous aurait permis de nous entendre tout de suite ». Elle plaisante sur ce point, se souvenant à cet instant de sa première rencontre avec le coréen qui reste pour elle un bon souvenir, surtout parce que, depuis ce jour, ils sont parvenus à construire un réel lien fort et qu’ils s’entendent à merveille. Elle aime un peu moins le fait de dire qu’elle détestait Chan’, ce qui était vrai lors du souvenir relaté, mais ne l’est plus du tout désormais. C’est bien tout le contraire. Et même si elle a haï à maintes reprises le destin de les avoir fait se croiser, aujourd’hui, elle en est reconnaissante… Même si ces petits instants n’ont pas été des plus plaisants, comme elle le raconte à Eddie « Wow attends, j’ai beaucoup de questions là. » Gabrielle ralentit tout comme lui, le regarde avec un sourire, hochant doucement la tête quand elle se doute que ces deux rencontres sont plus que le fait de simple coïncidences, pour ne pas dire improbables « Un sauvetage de tortue ? J’avoue que c’est cocasse comme façon de retrouver quelqu’un mais ça rapproche, hein, j’imagine. » Et Gabrielle de se souvenir de ce jour et un sourire se dessine sur ses lèvres, un léger air honteux prenant place sur ses traits, alors que sa tête se penche légèrement sur le côté « Sauf que j’ai manqué de lui trancher la main avec un couteau en libérant la tortue et son regard retrouve celui d’Eddie c’était qu’une petite entaille de rien du tout, ne t’en fais pas . Elle rit doucement ça ne nous a pas rapproché pour autant » Pour preuve, après ce sauvetage, ils se sont jetés en pleine figure toute l’amertume réciproque qu’ils pouvaient ressentir l’un pour l’autre. Elle poursuit en contant le moment où ils se sont réellement rapprochés, ce moment qui ne devait être qu’une histoire d’un soir pour se dire adieu et qui s’est transformé à bien plus que ça. « En tout cas c’est toi qui es à son chevet et je pense que ça veut dire beaucoup de choses vis-à-vis de votre histoire. Je suis même convaincu que Channing en aurait fait autant si les rôles avaient été inversés. » Les pas de Gabrielle ralentissent alors qu’elle pense à cette éventualité si le cas était inversé. Elle se pose la question une fraction de secondes, celle de savoir si cela aurait été réellement le cas, si Channing serait à son tour à son chevet si c’est elle qui avait eu un accident ce soir-là. Malgré ce qu’elle a pu lui dire, malgré leur dispute, serait-t-il venu à son chevet ? Y resterait-t-il comme elle le fait, actuellement ? Une fraction de secondes parce que les mots de Channing résonnent dans sa tête alors qu’elle ferme ses paupières quelques secondes je t’aime, Gab sont ses derniers mots, ceux qu’il a eu pour elle avant de perdre connaissance. Et inévitablement, cette vision fait rejaillir toute l’émotion, tout le chagrin, toute l’inquiétude qu’elle peut ressentir quand elle ignore si elle va avoir l’occasion de lui dire en retour. Mais lui ôte une partie de ses doutes face à cette affirmation faite par Eddie « Il t’aurait pas lâchée non plus, c’est une chose qu’il pourra sûrement te confirmer à son réveil. » Gaby retrouve le regard d’Eddie une énième fois, lui sourit, camouflant sa tristesse du mieux qu’elle le peut, souhaitant se raccrocher à ce réveil auquel il croit dur comme fer. Elle hoche alors simplement la tête et préfère rester silencieuse en reprenant une cadence normale.
C’est l’occasion pour eux de changer de sujets, de permettre à Gabrielle d’avoir des nouvelles sur la vie actuelle de celui qu’elle considère comme un petit frère sans s’en rendre nécessairement compte « Pendant plusieurs mois c’est elle qui s’est installée chez moi et puis on s’est finalement pris une maison en centre-ville en début d’année. Un nid plus que douillet, ça c’est sûr. » Dire que Gabrielle n’est pas impressionnée par l’évolution plus que positive d’Eddie dans sa relation serait mentir. Elle est surtout heureuse pour lui de le voir évoluer dans le bon sens, d’avoir trouvé une stabilité qui, elle en est persuadée l’aurait fait fuir un an plus tôt. Une stabilité qu’elle n’a jamais elle-même été capable de s’accorder, la seule réelle ayant été celle avec l’héritier quatre ans plus tôt avec l’héritier. « Tu as des photos ? Ou alors, je vais devoir venir juger ta déco… et la musique d’ambiance » Cette allusion est une boutade volontaire pour le taquiner encore et toujours sur leur première rencontre et l’impression qu’il a pu lui laisser de sa personne. En tout cas, Gabrielle est fière de la personne qu’il est devenu « Tu sais, ces mots-là comptent vraiment pour moi alors merci Gaby. »Il sait qu’elle est sincère, que jamais elle ne lui dirait une telle chose si elle ne le pensait pas, parce que ce n’est pas la personne qu’elle est. Sa main se pose quelques secondes sur son bras, une manière de lui dire qu’il n’a pas à la remercier pour ça et lui prouver davantage que ses mots sont pensés. « Oh je peux bien t’en parler oui mais tu ferais mieux de te rasseoir, je crois. » Son sourcil s’arque alors qu’il l’invite à s’assoir et c’est ce qu’ils font d’ailleurs, Gabrielle s’attendant à une annonce qui risque fortement de la surprendre. Des milliers de questions tournent dans son esprit mais la question que vient à lui poser Eddie les occulte totalement, l’obligeant à réfléchir à une question à laquelle elle ne préfère pas penser, une question qui a très rarement effleuré son esprit, si ce n’est lorsqu’elle était avec Channing – encore et toujours, tout la ramène à lui. « Tu peux aussi choisir de ne pas commettre les mêmes erreurs et de faire les choses différemment, en prenant tout sauf exemple sur eux. » parce que oui, Gabrielle ne se sent pas prête, même encore aujourd’hui. Des insécurités, elle en a, elle en a même beaucoup à ce sujet, des insécurités qu’elle n’a jamais partagé et, parce qu’aujourd’hui les confidences sont au rendez-vous, et parce qu’elle accorde une grande confiance à Eddie, elle se permet de lui en faire part. « Si un jour tu choisis d'en faire un vrai projet bien sûr, ne crois pas que je cherche à te mettre une quelconque pression surtout. » « Je sais, Eddie dit-t-elle doucement, ses paroles accompagnés d’un sourire pour lui montrer qu’elle est consciente qu’il ne lui met aucune pression sur ce sujet comme je sais que jamais je ne serai comme eux et reproduirai leurs erreurs… du moins celles de mon père sa mère, ses souvenirs la concernant se cantonnant à des photos et une lettre, celle qu’elle a écrite avant de s’ôter la vie. Elle prendra sûrement le temps un jour de lui raconter davantage son enfance, celle plus sombre qu’elle n’a pas souhaité lui partager encore. Mais aujourd’hui, cela n’est pas le propos quand en réalité c’est plus que j’ai du mal à me projeter dans ce rôle » bien qu’elle l’ait déjà eu, par défaut, quand elle s’est occupée de sa petite sœur Meryl. Mais il y a bien plus que ça, au-delà de la crainte de ce rôle qu’elle endossera sûrement un jour, car pour le moment, sa vie amoureuse est loin d’être stable pour qu’elle puisse se projeter aussi loin.
Et parce que la question lui était avant tout adressée, celle de connaitre ses projets, Gabrielle ne peut que lui retourner la question, surtout quand elle sent que la question des enfants est intimement liée au projet dont il accepte de lui parler. « C’est prévu, en fait. » L’avocate se redresse alors, ce mouvement marquant la surprise, celle de cette annonce à laquelle elle ne s’attendait certainement pas. Son regard devient plus sérieux, non pas parce qu’elle juge ce projet qu’il lui partage mais plus parce qu’elle prend conscience de la réalité de celui-ci. « On essaie d’avoir un enfant avec ma compagne, ça fait des mois qu’on.. travaille dans ce sens. » Elle est assisse proche d’Eddie, ne le quitte pas du regard et acquiesce doucement alors qu’elle croise ses jambes, ses deux mains noués entre elles reposant sur celles-ci, écoutant attentivement le jeune coréen sans l’interrompre. « Elle rêve de fonder une famille et je crois qu’un enfant est aussi le plus beau cadeau qu’elle pourrait me faire. » Bien sûr qu’avec ce qu’il vient de lui dire, Gaby s’interroge. Elle s’interroge quant à son envie propre, à lui de devenir père. Et s’il donne une partie de sa réponse, elle l’interroge tout de même à ce sujet « Tu en as envie aussi ? d’être père ? » une question qu’elle pose avec précaution, une aussi pour s’assurer que c’est ce qu’il veut vraiment, quand ce rêve semble être celui de sa compagne en premier. Elle ne juge pas sa réelle motivation, elle veut juste être certaine qu’il est sûr de lui, qu’il est conscient de tout ce que cela implique. Au final, Gabrielle ne fait qu’endosser là, inconsciemment, ce rôle de grande sœur qui s’est naturellement créé entre eux deux. « Je m’attends déjà à entendre que je suis trop jeune pour ça mais j’avais jamais étudié la question avant de la rencontrer, et j’ai envie de croire que ça veut dire quelque chose. » Elle comprend ce qu’il sous-entend. Si ce souhait de construire cette famille se manifeste aujourd’hui, aux côtés d’Halston, c’est qu’elle est SA personne. Celle avec laquelle tout est envisageable, celle avec laquelle il est prêt à prendre des risques. Gabrielle esquisse enfin un sourire alors que ses traits étaient jusqu’à présent inexpressifs, acquiesçant d’un hochement de tête « Cela n’a rien à voir avec l’âge… C’est une question de maturité, Eddie. Un an plus tôt, je t’aurai vivement déconseillé de devenir père parce que tu étais bien trop centré sur toi-même… et un chouia exécrable elle rit doucement, retrouvant vite son sérieux Aujourd’hui… tu es une tout autre personne. Tu as gagné en maturité, tu te préoccupes des autres et de leur bien-être… En témoigne ta présence, ici, aujourd’hui sa main vient se nouer à la sienne, dans un contact bref, le remerciant silencieusement une nouvelle fois tout ça pour dire que tu ne dois pas te fier à ce que les autres peuvent dire. C’est toi seul qui peut savoir si tu es prêt ou pas… et, de toute évidence, tu ne le seras pas, parce qu’on n’est jamais réellement prêt. Mais tu sauras faire face parce que tu es cette autre personne aujourd’hui. C’est là toute la différence. Et le plus important ». Elle l’encourage donc dans ce sens et surtout d’occulter les mauvaises langues qui auront toujours leurs mots à dire. « Mais tu sais, ta crainte de ne pas être à la hauteur en tant que parent, je la ressens aussi. Ma compagne a ça en elle depuis toujours alors que cette envie est beaucoup plus récente de mon côté, puis.. j'apprends encore à m'occuper de moi et à prendre soin de ma santé, et c'est déjà pas simple. » Elle acquiesce, comprend parfaitement, davantage dans son cas à lui quand il a cette maturité qui tend à grandir encore « Je sais pas si je serai un bon père Gaby, je sais juste que j’ai envie de vivre cette aventure avec elle et que ça me tuerait de pas réussir à lui donner ce dont elle rêve. » « Je suis sûre que ça va bien se passer. Et si ce n’est pas le cas… Auntie Gaby pourra peut-être aidé fait-t-elle pour détendre l’atmosphère alors qu’elle grimace votre amour semble solide et c’est ce qui vous aidera à y arriver, ensemble. Mais, Eddie, promets-moi de ne pas trop de mettre la pression… Si le projet n’aboutit pas dans l’immédiat, ce n’est pas grave… Et s’il aboutit, dis-toi que tu n’es pas le seul qui sera angoissé par ce nouveau rôle, et qui fera très certainement des erreurs. C’est humain » La voilà donneuse de leçons sur le sujet quand elle-même est craintive face à cette responsabilité. C’est d’ailleurs ce qui la fait doucement rire « Tu penseras à me sortir le même discours si ça m’arrive à moi aussi un jour ? ». Elle lui sourit avant que son regard ne trouve le sol et s’estompe « Je pourrais pas t’en vouloir de trouver ça précipité toi aussi, j’ai conscience que les choses vont assez vite et que c’est pas un registre dans lequel on m’attendait. » Gaby relève la tête pour trouver à nouveau le regard du jeune coréen et vient à passer son bras derrière ses épaules Je ne m’y attendais pas, je ne te le cache pas. Je ne peux pas juger si c’est précipité ou non… Tout ce qui m’importe, c’est que tu sois sûr de toi et que tu en es réellement envie elle marque une pause et retrouve un sourire amusé tu grandis définitivement trop vite, Yang. Elle resserre son étreinte autour de ses épaules, posant sa tête rapidement sur une d’elle pour le serrer contre lui Je serai là, quoi qu’il arrive. Ma porte est et sera toujours grande ouverte pour toi, à n’importe quel moment du jour comme de la nuit, quand tu en auras besoin ». Elle relâche un peu son étreinte, se reculant pour retrouver son regard, afin qu’il y lise toute la véracité de ses paroles. Leur amitié se scelle encore plus, leur lien se renforçant encore davantage à chacune de leur rencontre, et Gabrielle ne peut qu’être reconnaissante face à ce destin qui a mis sur sa route Eddie et lui permet de le compter parmi les personnes qui lui sont les plus chères à sa vie. Il a divinement réussi à lui faire se changer les idées, pour quelques heures et c’est tout ce dont elle avait besoin.
Even if we can't find heaven, hands put your empty hands in mine. And scars show me all the scars you hide, and hey, if your wings are broken, please take mine 'til yours can open too 'cause I'm gonna stand by you.
Il n'aurait pas fallu grand-chose à l'époque pour que l'avocate, l'héritier et le danseur tombent les uns sur les autres lors du même événement et c'est désormais un regard amusé qu'Eddie porte sur le fait que leurs routes ont, pour une fois, rechigné à se croiser. Cinq minutes, c'est à peu de choses près ce qui leur a manqué pour se rencontrer juste un peu plus tôt et même si Eddie n'estime pas utile d'avoir le moindre regret là-dessus, il note quand même que la vie est parfois drôlement faite dans un sens comme dans l'autre. « C’est presque dommage qu’on se soit manqué de peu… on aurait trouvé notre premier point commun : détester Channing. Ca nous aurait permis de nous entendre tout de suite. » La référence le fait grandement sourire car il est certain que plus d'un an en arrière, la perspective de se retrouver nez-à-nez avec Channing avait beaucoup moins de chance de l'enchanter. Il n'ignore plus à présent que c'était aussi le cas de Gabrielle, et peut-être que les choses auraient été bien différentes si l'héritier avait joué un rôle dans leur rencontre. Eddie a après tout passé plusieurs mois sans savoir que ces deux-là se connaissaient, tout comme l'avocate n'a longtemps pas pu soupçonner que le danseur avait un passé en commun avec le grand brun. Et pourtant, il ne réécrirait pas cette partie de l'histoire si on lui en donnait la possibilité. « Bien vu Gaby, on aurait carrément pu s'associer. » il souligne d'un air amusé et peut-être même qu'ils se seraient aussi trouvé un intérêt commun pour le vin, qui n'a jamais vraiment réussi à Eddie mais dont il ne s'est pour autant jamais privé. « Tu trouves pas ça joliment ironique d'ailleurs, sachant qu'on est aujourd'hui réunis ici pour lui ? » Son regard glisse à nouveau jusqu'à elle alors que sa voix se fait nettement plus sérieuse. Il aime l'évolution que les choses ont prises et il se félicite même d'avoir largement dépassé tout ça depuis, car c'est tout de même un peu reposant de n'avoir plus personne à prendre en grippe – qui plus est très injustement. Alors oui, la symbolique est belle à ses yeux car c'est bien pour Channing que le petit duo se retrouve plus d'un an après aux alentours de l'hôpital, avec l'espoir que celui-ci revienne prochainement parmi eux. Channing avec lequel l'avocate s'est apparemment déjà retrouvée dans des situations plus que cocasses, à l'image d'un sauvetage de tortue laissant le danseur quelque peu pantois. Ce n'est sans doute pas le genre de choses que l'on imagine un jour entreprendre avec qui que ce soit, alors avec un ancien amour, il l'imagine encore moins. « Sauf que j’ai manqué de lui trancher la main avec un couteau en libérant la tortue. » Une scène qu'il parvient étrangement à visualiser sans le moindre mal tandis qu'il ouvre de grands yeux surpris. Eddie aurait évidemment tout donné pour voir ça, comme le fait bien sentir ce sourire espiègle étirant ses lèvres. « C’était qu’une petite entaille de rien du tout, ne t’en fais pas, ça ne nous a pas rapproché pour autant. » Il se doute bien que ça ne devait pas être très grave, car si Channing avait perdu un doigt ce jour-là il pense quand même qu'il l'aurait remarqué. Entendre que cet épisode n'a rien arrangé entre eux est certes un peu moins plaisant mais l'essentiel est bien que les choses se soient apaisées et même bien plus que ça, depuis. « Je ne vous savais pas aussi dangereuse mademoiselle Strange. » il souligne en se moquant gentiment, gardant tout de même à l'esprit qu'il vaudrait mieux ne jamais les mettre tous les deux dans une même cuisine avec un couteau entre les mains. « Merci pour la tortue en tout cas, c'est le genre d'histoire qu'un amoureux des animaux aime beaucoup entendre. » Et c'est sincère, Eddie se soucierait même du bien-être d'un lézard car il n'a certainement pas effectué un bénévolat en refuge par hasard durant sa longue convalescence – refuge auquel il s'emploie d'ailleurs encore à donner de son temps aujourd'hui, dès que sa vie le lui permet. Gabrielle lui laisse après ça le dernier mot sur l'autre symbole qu'il se plait à voir dans le fait qu'elle soit aujourd'hui au chevet de l'héritier, sans doute plus présente à ses côtés qu'aucune autre personne, dans ce qui doit être le pire moment de sa vie. Eddie veut croire que la réciproque aurait été vraie mais il n'aide sans doute pas l'avocate à se changer les idées en l'invitant à imaginer une situation où les rôles seraient inversés, alors il n'insiste pas et la laisse simplement cogiter sur ces mots exactement comme il l'avait fait avec Channing sur les hauteurs de la ville, quelques mois plus tôt.
Il devine que la récente évolution de sa vie surprend l'avocate dans le bon sens, et il n'est pour le coup pas peu fier d'évoquer cette maison acquise dernièrement avec la femme partageant sa vie. Incroyable mais vrai, le danseur qui n'était pas intéressé par l'idée de se poser et qui vivait il n'y a encore pas si longtemps dans un modeste appartement avec ses chats pour seule compagnie est désormais capable de penser pour deux. Il pourrait d'ailleurs préciser que c'est auprès d'Halston qu'il a découvert la vie de couple, car avant ça Eddie n'avait pas vécu sous le même toit que quelqu'un depuis son départ du domicile familial. Un sacré pari pour celui qui n'a jamais accepté la moindre colocation, convaincu que son rythme ne pourrait que se heurter à celui des autres et trop attaché, aussi, à ses petites habitudes. « Tu as des photos ? Ou alors, je vais devoir venir juger ta déco… et la musique d’ambiance. » Oh, comme si la perspective de recevoir l'avocate chez lui avait de quoi le rebuter. Gabrielle y sera bien évidemment la bienvenue pour cette raison ou pour une autre, ce qu'elle est en principe déjà censée savoir puisque la porte du danseur ne lui a jamais été fermée. Il remue alors la tête, l'air de dire qu'il ne pourra probablement pas satisfaire sa curiosité aujourd'hui. « Pas des récentes, les seules que je peux te montrer datent de notre emménagement alors je te laisse imaginer le bordel qui s'y trouve. » Quelle maison ne ressemble pas à un champ de bataille durant les premières semaines, il se le demande bien. Eddie aurait pu refaire ces fameuses photos maintenant que la demeure du couple est presque entièrement aménagée mais il n'y a même pas pensé, n'ayant jamais vraiment eu le réflexe d'immortaliser ce qui l'entoure contrairement à beaucoup. « Le plus simple ce serait que tu passes à l'occasion, comme ça tu pourras juger mes goûts musicaux et tout le reste. » L'allusion est évidente tout comme l'était celle de Gabrielle, puisque les goûts en matière de musique du danseur n'avaient pas manqué de l'offusquer le jour de leur rencontre. Promis, il fera un effort lorsque l'avocate le gratifiera d'une visite afin qu'elle ne trouve pas à redire sur l'ambiance chez lui. Pour le reste, en revanche... « Et pour la déco, si jamais ça te plait pas, faudra te plaindre à ma petite sœur parce que c'est elle qui nous a conseillé. » Lui, se décharger entièrement sur Callie ? Disons que c'est elle la connaisseuse et qu'Eddie assume de s'en être remis à l'expertise de la benjamine Yang pour donner vie à la plupart des pièces de cette maison, dont il ne dévoile toutefois rien à l'avocate afin de garantir la surprise. La fierté de Gabrielle lui va en tout cas droit au cœur, ce n'est pas tous les jours qu'Eddie a le sentiment de rendre fier qui que ce soit et s'il osait, il lui parlerait dès à présent de ce projet d'enfant se profilant de plus en plus à l'horizon. Le danseur n'en saisit pourtant pas l'occasion, préférant au lieu de ça la rassurer quant aux manquements de ses parents qu'elle ne sera pas forcée de commettre à son tour si la question des enfants doit un jour se poser. Eddie préfère se dire qu'on ne reproduit pas forcément le schéma qu'on a connu et qu'on peut même s'efforcer de faire tout l'inverse, c'est après tout lui-même ce qu'il entrevoit de faire pour que ses enfants ne grandissent pas sous le coup d'une éducation bien trop stricte, et réductrice. Alors Gabrielle peut elle aussi décider qu'elle agira différemment et que le modèle qui lui a été transmis ne sera pas celui qu'elle transmettra à son tour, sans qu’il ne puisse imaginer toutefois de quelles erreurs il peut être question. « Je sais, Eddie, comme je sais que jamais je ne serai comme eux et reproduirai leurs erreurs… du moins celles de mon père. » C'est là qu'il réalise qu'il ne sait pas grand-chose de la famille de l'avocate exceptée l'existence de deux frères, et l'occasion ne lui semble pas vraiment bien choisie pour en apprendre plus à ce propos. Un jour peut-être Gabrielle consentira à lui en dévoiler plus, même si le contraire serait tout aussi acceptable car elle a encore le droit de garder cette partie de son histoire pour elle, comme on préserverait en quelque sorte son petit jardin secret. « C’est plus que j’ai du mal à me projeter dans ce rôle. » Il l'entend Eddie, il le comprend également alors qu'il s'identifie personnellement à ce qu'elle lui confie. Ces choses-là ne sont pas forcément innées et présentes en chaque être humain, certaines personnes évoluent toute leur vie avec la conviction que ce rôle leur revient mais d'autres en sont beaucoup moins sûres, ou n'en veulent tout simplement pas. « Je crois qu'on ne nait pas maman Gaby, on le devient et je pense que c'est même normal d'avoir parfois du mal à se projeter dans un rôle qu'on a jamais eu à endosser. » Il n'y connait pas grand-chose en vérité mais il suppose que toutes les femmes n'aspirent pas à donner la vie aussi simplement, que le cheminement n'est pas le même chez chacune et que l'évidence ne les touchent certainement pas toutes. Eddie partage le quotidien d'une femme qui a su presque toute sa vie qu'elle désirait devenir mère et pourtant, il peut parfaitement entendre que l'on puisse se poser la question à tout âge, pour des raisons aussi diverses que multiples. « Ça veut pas dire que tu ferais pas une bonne mère, et ça signifie pas non plus que t'as l'obligation d'en être une un jour. Tu verras bien. » Ces derniers mots lui sont adressés dans un sourire se voulant rassurant, désireux là encore de ne pas paraître le moins du monde pressant car elle seule pourra (ou non) s'autoriser un jour à y songer.
Et parce que cette même question est d'actualité pour lui, Eddie peut bien enfin lever le voile sur son dernier grand projet en date. Un enfant, c'est bien ce qu'il essaie d'avoir avec sa compagne depuis maintenant plusieurs mois sans que son entourage ne soit vraiment au courant. Sa meilleure amie l'est bien évidemment mais la nouvelle n'est pas encore parvenue jusqu'à la famille du danseur, Eddie n'étant assurément pas pressé de mettre dans la confidence ceux qu'il tient déjà à l'écart de son couple depuis plus d'une année. Il fait les choses dans le désordre Eddie, comme à son habitude et ce secret qu'il confie aujourd'hui aux mains de Gabrielle est une preuve de la confiance qu'il fonde en elle, car quitte à s'exposer au jugement de quelqu'un il préfère encore que ce soit à celui d'une amie proche qui se souciera d'abord de lui avant de désapprouver les décisions qu'il peut prendre. « Tu en as envie aussi ? d’être père ? » Cette question ne le surprend pas et ne l'irrite pas non plus, car il est bien normal de s'interroger sur ses propres envies quand Eddie vend avant tout ce grand projet comme étant le rêve ultime de sa compagne. Charlie lui a déjà dit ce qu'elle en pensait et il sait bien de quoi les choses ont l'air, ce qui ne l'empêche pas d'être sûr de son choix et de cet engagement à vie qui l'attend. « Si tu m'avais posé cette question il y a un an je t'aurais répondu : certainement pas. » Sans l'ombre d'une hésitation, Eddie lui aurait même certainement ri au nez tant l'idée même de devenir père lui aurait paru inconcevable. Ce n'était pas seulement une question de moment trop peu propice, c'est aussi une aventure qu'il n'aurait pas pu envisager avec n'importe qui ni n'importe comment. « Parce que ça m'aurait semblé fou avec la vie que je menais, entre la danse qui me prenait tout mon temps et l'engagement que j'imaginais pas être pour moi. Je me cachais derrière des pseudo envies de liberté, je voulais tout avoir sans jamais prendre le temps et je respire tellement mieux depuis que je suis enfin posé Gaby, sérieusement. » Du point de vue de sa relation avec l'américaine les choses ont peut-être l'air d'aller vite et pourtant, Eddie a bien ralenti la cadence durant la dernière année en faisant une place à son couple dans une vie qu'il consacrait jusque là exclusivement à la danse. Alors oui il respire, bien mieux qu'il ne l'a jamais fait car pour la première fois de sa vie Eddie ne brûle pas la chandelle par les deux bouts en se dispersant beaucoup trop. Cet équilibre n'a pas été simple à trouver et il se rend à présent compte du rythme de vie qu'il avait tendance à s'infliger, tout comme du fait qu'être père n'aurait jamais pu le tenter lorsque sa vie amoureuse était tristement laissée à l'abandon. Il n'avait pas le temps ni l'occasion d'y penser, et il ne regrette en rien cette époque de sa vie où son bonheur (relatif, lui aussi) se limitait à cette passion pour laquelle il a tout sacrifié. La danse est son premier amour mais au point de se marier à celle-ci, il y a tout de même des limites. « Ma vie aujourd'hui n'a rien à avoir avec celle que je pensais mener à vingt-six ans mais je l'échangerais pour rien au monde. J'ai une femme extra à mes côtés et j'ai pas peur de dire que j'ai envie d'être le père de ses enfants. C'est la première fois que je me projette aussi loin avec quelqu'un, c'est peut-être un peu impressionnant quand j'y pense mais oui, je crois qu'on peut dire que son envie est devenue la mienne. » Et le rêve de l'américaine le sien, alors que l'idée de devenir père a désormais tout pour le séduire. Il n'ira pas jusqu'à se dire prêt car Eddie a bien de nombreuses craintes, mais il sait au moins ce qu'il veut et avec qui. Le monde entier se chargera certainement de le trouver trop jeune mais il l'était apparemment déjà pour fréquenter son agente, ce qui ne l'a pourtant pas dissuadé de bâtir toute une vie à ses côtés. « Cela n’a rien à voir avec l’âge… C’est une question de maturité, Eddie. Un an plus tôt, je t’aurai vivement déconseillé de devenir père parce que tu étais bien trop centré sur toi-même… et un chouia exécrable. » L'avocate parvient à lui arracher un rire franc, sûrement audible à plusieurs mètres autour d'eux. Eddie est bien conscient de la tête à claques qu'il a pu être alors qu'à l'époque, il avait vraiment le chic pour s'attirer des problèmes partout où il allait. Dans les couloirs de sa compagnie comme en dehors, le danseur n'était pas connu pour faire l'unanimité et c'est un autre point sur lequel le temps a aussi fait son œuvre, quand il y pense. « J'étais un sacré petit con, hein, tu peux le dire. » il balance avec légèreté, loin de pouvoir s'en indigner. Il ne peut que croire Gabrielle quand celle-ci souligne sa maturité gagnée car il est plus difficile de s'en rendre soi-même compte, les meilleurs juges restant ceux qui l'ont connu il y a un an avant qu'il n'évolue positivement. « Aujourd’hui… tu es une tout autre personne. Tu as gagné en maturité, tu te préoccupes des autres et de leur bien-être… En témoigne ta présence, ici, aujourd’hui. » Ces mots ne tombent pas dans l'oreille d'un sourd, comme en témoigne le fait qu'Eddie baisse timidement la tête pour ne pas montrer la façon dont ils parviennent à le toucher. Il n'est donc plus cet égoïste qui ne pensait qu'à lui et qui avait tant déçu Callie, une petite victoire sur tous les amis qu'il a pu perdre quand ses priorités laissaient encore à désirer. « Tout ça pour dire que tu ne dois pas te fier à ce que les autres peuvent dire. C’est toi seul qui peut savoir si tu es prêt ou pas… et, de toute évidence, tu ne le seras pas, parce qu’on n’est jamais réellement prêt. Mais tu sauras faire face parce que tu es cette autre personne aujourd’hui. C’est là toute la différence. Et le plus important. » Il veut y croire tout comme elle et apprécie cette main posée sur la sienne, même si son honnêteté du moment le pousse aussi à confier les doutes qui l'animent quant au fait d'endosser honorablement son futur rôle de père. « Je suis sûre que ça va bien se passer. Et si ce n’est pas le cas… Auntie Gaby pourra peut-être aidé. » C'est à peine si Eddie prête attention au peut-être, préférant avant tout y voir une forme de soutien assuré dont il n'aurait à vrai dire pas franchement pu douter. « J'espère que cette offre n'est pas posée là à la légère car je risque de réellement la considérer, tu sais. » Il gratifie l'avocate d'un clin d'œil, d'ores et déjà convaincu de la formidable auntie qu'elle pourra être. « Votre amour semble solide et c’est ce qui vous aidera à y arriver, ensemble. Mais, Eddie, promets-moi de ne pas trop de mettre la pression… Si le projet n’aboutit pas dans l’immédiat, ce n’est pas grave… Et s’il aboutit, dis-toi que tu n’es pas le seul qui sera angoissé par ce nouveau rôle, et qui fera très certainement des erreurs. C’est humain. » Les traits du danseur s'affaissent légèrement alors que sans le savoir, Gabrielle met le doigt sur un point loin d'être anodin pour un couple comme le leur. « Je peux toujours essayer de te le promettre Gaby, mais.. » Il s'interroge sur la nécessité de préserver l'information qui n'a encore jamais fuité pendant leurs discussions car si l'avocate connait le nom de sa compagne, elle ignore en revanche en quoi leur histoire est si atypique. « Je t'ai jamais dit que ma compagne a trente-six ans, je jugeais pas important de le préciser jusqu'ici mais.. comme ça tu te rends un peu mieux compte de ce que ce projet représente pour elle. » Pour une femme pressée par le temps du point de vue de l'horloge biologique, ce qu'il se retient d'ajouter pour que Gabrielle ne se sente pas indirectement visée. « J'ai encore toute la vie pour avoir des enfants mais pas elle, c'est pour ça que je me mets la pression comme tu dis. Je peux pas imaginer qu'on y arrive pas et qu'elle doive un jour renoncer à son rêve, c'est une chose que je pourrais pas me pardonner. » Et pourquoi ça ? Parce qu'Halston l'a choisi lui pour fonder sa famille et non un autre, parce qu'il a entre ses mains la possibilité de lui offrir ce qu'elle a toujours désiré et qu'il se sentirait affreusement coupable s'il ne parvenait pas à lui faire cet enfant. Eddie est dur avec lui-même comme le serait un jeune homme sur qui une telle responsabilité pèserait, car c'est bien la contrepartie de cet accord qu'il a un jour donné à Halston. « Tu penseras à me sortir le même discours si ça m’arrive à moi aussi un jour ? » « Promis. » il assure dans un sourire tout en hochant la tête, car bien sûr il répondra lui aussi présent le jour où Gabrielle sera en proie à des craintes similaires, dans l'hypothèse où ce projet deviendrait également le sien. C'est une garantie qu'il peut déjà lui offrir, tout comme il peut accepter que les choses puissent paraître un peu trop précipitées aux yeux de l'avocate, qui ne l'aurait probablement pas imaginé convoiter un tel rôle avant qu'il ne vienne lui-même s'en confier. « Je ne m’y attendais pas, je ne te le cache pas. Je ne peux pas juger si c’est précipité ou non… Tout ce qui m’importe, c’est que tu sois sûr de toi et que tu en es réellement envie. » Il apprécie sincèrement l'inquiétude bienveillante de Gabrielle, désireuse avant tout de s'assurer que le danseur sait où il met les pieds et qu'il ne se sent forcé à rien. « Tu grandis définitivement trop vite, Yang. » C'est si vrai qu'Eddie se contente d'abord d'en sourire humblement, accueillant en silence sa tête contre son épaule avant que sa voix ne retentisse à nouveau. « C'est aussi ce que je me dis certains jours, j'ai l'impression d'avoir pris cinq ans dans la tronche rien que l'année dernière. » Et ça le fait doucement rire, sachant que ses gênes le préservent assez bien des effets du temps et des marques que ce dernier peut laisser. Eddie n'est pas moins jeune physiquement mais il l'est en revanche dans sa tête, ses préoccupations ayant pris un petit coup de vieux comme le reste. Propriétaire d'une maison et aspirant futur papa, deux cases que le Eddie du passé n'aurait sans doute jamais cru cocher si vite. « Je serai là, quoi qu’il arrive. Ma porte est et sera toujours grande ouverte pour toi, à n’importe quel moment du jour comme de la nuit, quand tu en auras besoin. » La sincérité des dires de l'avocate ne saurait être remise en doute alors qu'il peut déjà lire dans ses yeux tout le cœur qu'elle peut y mettre. Cette déclaration d'amitié résonne de la plus jolie façon dans ce parc et parce qu'il est touché, Eddie saisit la première perche qui lui est tendue pour faire diversion. « Même quand il faudra quelqu'un pour garder un mini Yang peut-être aussi insupportable que son père ? » Un trait d'humour qui n'étonnera pas l'avocate, bien trop habituée aux taquineries du danseur et le lui rendant d'ailleurs bien la plupart du temps. « Je plaisante bien sûr, mon enfant héritera de la sagesse de sa mère. Mais je retiens surtout que t'es une amie en or Gaby et ça me rassure vraiment de savoir que je t'ai dans ma vie. J'ai pas toujours été aussi bien entouré, ça aussi c'est encore un peu nouveau pour moi alors merci, vraiment. » Et parce que les gestes sont parfois plus parlants que les mots, Eddie l'attire doucement contre lui pour l'encercler à son tour de ses bras. Une étreinte de quelques secondes qu'il vient lui-même rompre sans que son sourire ne disparaisse, éclairant même plus que jamais le visage du danseur. « Mini Yang n'est même pas encore en route que j'ai déjà envie de te le présenter. » C'est bien le signe que ce futur enfant ne tardera pas à faire la connaissance de Gabrielle, Eddie s'en assurera car il ne conçoit pas qu'elle ne puisse pas aussi faire partie de la vie de ce mini lui. Son regard dévie alors vers l'hôpital laissé derrière eux quand celui-ci lui revient finalement à l'esprit. « T'as peut-être envie de rentrer ? Je peux te raccompagner si tu veux. » Non seulement il le peut mais il le fera, Gabrielle n'a qu'un mot à dire pour que ce soit le cas. Quelque chose lui fait dire que cette discussion touche à sa fin et compte tenu de l'épreuve attendant l'avocate derrière les murs du fameux hôpital, Eddie n'est certainement pas disposé à la laisser effectuer le retour seule comme si sa mission du jour s'arrêtait ici.
23 juin 2022. « Bien vu Gaby, on aurait carrément pu s'associer. » Si Gabrielle s’est permis cette remarque amusante sur une possible association des deux dans le non fanclub de l’héritier un an plus tôt, elle ne ferait cependant pas marche arrière elle non plus pour que cela se produise. Surtout quand elle se souvient que trop bien de toutes les émotions qu’elle a pu ressentir après ses retrouvailles imprévues avec Channing. Si elle avait conscience qu’il vivait à Brisbane et n’était pas sans ignorer qu’elle finirait un jour ou l’autre par lui tomber dessus, la californienne aurait largement préféré que cette rencontre n’est pas lieu. Est-ce qu’elle le pense toujours désormais ? Elle en est moins sûre. « Tu trouves pas ça joliment ironique d'ailleurs, sachant qu'on est aujourd'hui réunis ici pour lui ? » Sa tête se pivote doucement vers lui suite à ce constat qu’il fait, laissant la jeune femme silencieuse quelques instants, rattrapée par cette réalité, celle où l’héritier est paisiblement endormi mais qu’il n’est aucunement certain qu’il ne se réveille de son profond sommeil. Alors, le regard de Gabrielle retrouve l’horizon, un soupir s’échappant d’entre ses lèvres alors que son air est plus sérieux et attristée « C’est vrai, ça l’est… une pause, nécessaire, alors que son ton de voix se fait plus peiné mais je pense que je préférerai retourner un an en arrière, si la possibilité m’en était donné, à le détester et qu’il soit sur ses deux jambes, plutôt que de le voir dans cet état… » un état qui lui est insupportable amenant Gaby a subtilement essuyé une larme au coin de son œil, esquissant un sourire cependant dès que son regard retrouve celui d’Eddie, avec qui elle préfère partager d’autres anecdotes concernant ses différentes rencontres avec Channing avant qu’ils ne finissent par retomber dans les bras l’un de l’autre. « Je ne vous savais pas aussi dangereuse mademoiselle Strange. » Son sourire est plus franc sur ses lèvres, alors qu’elle penche doucement la tête sur le côté « Disons que la victime m’avait légèrement agacée aussi » et par victime, elle ne parle évidemment pas de la tortue « Merci pour la tortue en tout cas, c'est le genre d'histoire qu'un amoureux des animaux aime beaucoup entendre. » Le sourire de Gabrielle s’agrandit sur ses lèvres avec possiblement une pointe de fierté dans celui-ci. Evidemment, elle n’aurait jamais laissé une petite bête innocente dans son état, et elle devait le reconnaitre l’aide de Chan ce jour-là avait finalement été utile – à défaut de leur rencontre.
Les choses semblent pouvoir évoluer à la vitesse de l’éclair parfois dans la vie et prendre des tournures inattendues. C’est ce que Gabrielle découvre au fur et à mesure de sa discussion avec le jeune coréen qui lui apprend l’acquisition récente d’une demeure avec sa compagne. Sa curiosité piquée pousse Gabrielle à demander au jeune homme des photos de celle-ci « Pas des récentes, les seules que je peux te montrer datent de notre emménagement alors je te laisse imaginer le bordel qui s'y trouve. » Elle n’a pas de mal à l’imaginer quand elle se souvient très bien de son plus récent emménagement, celui à Brisbane. Le bazar était de la partie, notamment parce qu’elle a trouvé son nouveau job au même moment et qu’elle devait passer des équivalences pour se faire sa place officielle au sein du cabinet. Gaby acquiesce alors vivement, non sans un sourire qui se veut nostalgique « Le plus simple ce serait que tu passes à l'occasion, comme ça tu pourras juger mes goûts musicaux et tout le reste. » « J’en serai ravie » et si le sourire est sincère il se veut aussi narquois, comme si son esprit de vengeance reprenait le dessus et souhaitait réellement rendre la pareille à Eddie qui n’avait pas manqué de l’agacer lors de leur premier rencontre au sujet de ses goûts musicaux. « Et pour la déco, si jamais ça te plait pas, faudra te plaindre à ma petite sœur parce que c'est elle qui nous a conseillé. » La remarque ne manque pas de faire rire doucement l’avocate « Mais j’imagine qu’elle ne te l’a pas imposée non plus, si ? » il a bien dû donner son aval tout de même quant à ses choix et ne pas lui laisser totalement carte blanche, elle présume du moins.
Au fil de leur rencontre, Gabrielle prend conscience à quel point Eddie et elle parviennent à avoir des conversations profondes et apprennent ainsi encore à se découvrir l’un l’autre. Les confidences sont de plus en plus de mise, Gabrielle la première se voyant aborder un sujet personnel avec lui concernant son souhait de devenir mère. Elle lui partage la crainte qu’elle peut ressentir, celle de ne pas être à la hauteur quand elle n’a jamais connu un modèle familial si ce n’est idyllique, au moins normal. La perte de sa mère alors qu’elle était à peine âgée de quatre ans, un père violent qui ne lui a que très rarement montré des signes d’affection… tout ça représente des traumatismes qui sont bien ancrées en elle, des traumatismes dont elle a su se servir aussi pour en faire sa force aujourd’hui. Pour autant, si elle ne le montre pas, ayant cette apparence d’une femme forte et sûre d’elle, Gabrielle a des insécurités bien ancrées. Celle de devenir mère en est une non seulement par son histoire, mais peut-être aussi parce qu’elle a toujours pensé en priorité à sa carrière professionnelle, dans laquelle elle se donne corps et âme mais aussi parce qu’elle n’a jamais réellement connu une stabilité relationnelle amoureuse avec quelqu’un, si ce n’est avec Channing par le passé. Mais encore, cette relation avait des failles, pour preuve, ils se sont séparés. « Je crois qu'on ne nait pas maman Gaby, on le devient et je pense que c'est même normal d'avoir parfois du mal à se projeter dans un rôle qu'on a jamais eu à endosser. » Il a sûrement raison et Gaby s’étonne même d’avoir des conseils de la part de celui qui est plus de dix ans son cadet. « Ça veut pas dire que tu ferais pas une bonne mère, et ça signifie pas non plus que t'as l'obligation d'en être une un jour. Tu verras bien. » Elle ne sait pas. En réalité, elle se dit que cette envie d’être mère naitra au même moment où elle se sentira en sécurité, dans son cocon, avec l’homme qu’elle aime. Gabrielle ne ferme pas la porte à cette possibilité, et est consciente aussi qu’elle approche de la quarantaine et que, malgré tout, son horloge biologique tourne. Peut-être évite-t-elle aussi de se faire trop d’espoir quand l’avenir est incertain, qu’elle vit dans la crainte perpétuelle d’être abandonnée. En réalité, si elle a normalement de la conviction dans ses opinions et ses pensées, qu’elle pourrait défendre bec et ongles pendant des heures, celui de la maternité en est un sur lequel elle est dans un flou total. Pour preuve, son silence face aux paroles d’Eddie, se contentant là encore d’acquiescer d’un simple signe de tête.
« Si tu m'avais posé cette question il y a un an je t'aurais répondu : certainement pas. » Gabrielle s’interroge sur les envies concrètes de son ami. Parce qu’elle entend que la volonté d’avoir un enfant vient avant tout de sa compagne mais elle a besoin de s’avoir si c’est la sienne également. Elle ne veut pas qu’il se retrouve dans une configuration où, à terme, il pourrait avoir des regrets. Regretter d’avoir été trop vite, regretter d’avoir un enfant car tout bonnement c’était beaucoup trop tôt pour lui. C’est un engagement un enfant. Et la volonté de lui offrir un cadre sain et serein est une question à laquelle il faut penser. Et la réponse à cette question se trouve avant tout dans la volonté et surtout la certitude de vouloir passer le restant de sa vie avec la personne avec qui le projet est en route« Parce que ça m'aurait semblé fou avec la vie que je menais, entre la danse qui me prenait tout mon temps et l'engagement que j'imaginais pas être pour moi. Je me cachais derrière des pseudo envies de liberté, je voulais tout avoir sans jamais prendre le temps et je respire tellement mieux depuis que je suis enfin posé Gaby, sérieusement. » Et évidemment, c’est indéniable qu’Eddie doit aussi être sûr qu’il ne verra pas là sa possible future paternité comme étant un frein à ses rêves, à ses passions et surtout à sa liberté. Mais il semble avoir réfléchit à tout cela et elle s’en rend compte par le teneur de ses propos. « Ma vie aujourd'hui n'a rien à avoir avec celle que je pensais mener à vingt-six ans mais je l'échangerais pour rien au monde. J'ai une femme extra à mes côtés et j'ai pas peur de dire que j'ai envie d'être le père de ses enfants. C'est la première fois que je me projette aussi loin avec quelqu'un, c'est peut-être un peu impressionnant quand j'y pense mais oui, je crois qu'on peut dire que son envie est devenue la mienne. » Et en l’entendant parler de la sorte, un sourire nait sur les lèvres de la brune. Gaby y entend là un jeune homme fou amoureux et qui sait ce qu’il veut avec Halston. Surtout, elle se rend bien compte qu’il a réfléchi à tout ça, avec soin et qu’il n’y a nullement ici une quelconque influence ou volonté d’accepter d’être père pour satisfaire celle qu’il aime « Ca l’est ne lui cache-t-elle pas cependant, avouant que c’est effectivement impressionnant mais quand je t’entends parler Eddie, je sens que tu as réfléchi à cette question et que tu prends en compte tes propres volontés. Et c’est tout ce qui m’importe » et ainsi, sans le dire, elle l’encourage dans cette direction si c’est ce qu’il souhaite. Surtout quand il a changé, qu’il a gagné en maturité et qu’elle ne reconnait plus là le Eddie qu’elle a pu rencontré un an plus tôt face à qui elle aurait ri d’entendre une telle absurdité et lui aurait certainement déconseillé voire interdit de faire un môme. « J'étais un sacré petit con, hein, tu peux le dire. » « Très bien. Oui, tu étais un petit con, Eddie Yang » elle s’est pivotée pour lui dire droit dans les yeux, tentant de garder un sérieux qui dure quelques secondes avant de pouffer légèrement de rire, tournant la tête doucement de droite à gauche. Le sérieux regagne très vite leur conversation, Eddie confiant à la californienne ses craintes à ce futur rôle. Même si elle n’est pas la mieux placée pour le conseiller sur le sujet, elle lui promet au moins une chose : sa présence. « J'espère que cette offre n'est pas posée là à la légère car je risque de réellement la considérer, tu sais. » Elle n’a jamais aussi sérieuse qu’à cet instant « Elle ne l’est pas, je serai vraiment là pour toi, Eddie. Dès que tu en auras besoin ». Gaby sera présente, du mieux qu’elle le pourra mais une chose est certaine c’est qu’Eddie pourra débarquer chez elle, à n’importe quelle heure du jour comme de la nuit, avec son bébé ou non, elle lui ouvrira sans hésiter la porte. Et s’il faut qu’elle accoure pour lui venir en aide, elle le fera aussi. Et s’il y aura forcément des moments de doute au moment où il deviendra père, Gabrielle ne veut pas qu’Eddie se mette la pression si l’arrivée de ce bébé n’est pas pour tout de suite « Je peux toujours essayer de te le promettre Gaby, mais.. » L’air qu’il adopte, les mots qu’il prononce intrigue Gabrielle dont les sourcils se froncent, marquant son interrogation mais aussi son inquiétude « Je t'ai jamais dit que ma compagne a trente-six ans, je jugeais pas important de le préciser jusqu'ici mais.. comme ça tu te rends un peu mieux compte de ce que ce projet représente pour elle. » Gaby comprend alors. Si, elle de son côté, tente de ne pas penser à cette question là, elle se doute que la compagne d’Eddie y pense. Celle de l’horloge biologique qui tourne, des chances qui s’amenuisent malheureusement pour els femmes d’avoir un enfant avec le temps. « J'ai encore toute la vie pour avoir des enfants mais pas elle, c'est pour ça que je me mets la pression comme tu dis. Je peux pas imaginer qu'on y arrive pas et qu'elle doive un jour renoncer à son rêve, c'est une chose que je pourrais pas me pardonner. » « Eddie, ne soit pas aussi dur avec toi-même débute-t-elle alors qu’elle est surprise par l’accablement qu’il peut s’octroyer si jamais ils ne parvenaient pas à concevoir tout ne repose pas sur tes épaules. Et je suis persuadée qu’Halston ne te le reprochera pas si ça ne fonctionne pas ils sont deux dans l’histoire et au-delà de ça, ils ne sont pas entièrement maitres de cette conception quand la nature y est aussi mêlée. Et je suis persuadée que si jamais cela venait à être impossible, vous trouverez bien d’autres solutions ensemble ». Sur ces dernières paroles, Gabrielle porte un regard rassurant sur Eddie, lui souriant doucement pour essayer d’apaiser au mieux ses craintes et cette pression qu’il peut ressentir sur ses épaules. « Promis. » une légèreté dans leur échange quand l’avocate demande à Eddie de lui sortir le discours similaire si elle aussi vient un jour à envisager cette possibilité d’être mère et ainsi de la rassurer face aux craintes certaines qui l’habiteront. « C'est aussi ce que je me dis certains jours, j'ai l'impression d'avoir pris cinq ans dans la tronche rien que l'année dernière. » « Ca explique peut-être cette petite ride que j’ai remarqué tout à l’heure sur ton front » Elle se moque volontairement de lui, gentiment, comme toujours, riant doucement. « Même quand il faudra quelqu'un pour garder un mini Yang peut-être aussi insupportable que son père ? » la remarque la fait rire doucement « Regarde, je t’ai bien supporté toi » ne peut-t-elle s’empêcher d’ajouter pour le taquiner « Je plaisante bien sûr, mon enfant héritera de la sagesse de sa mère. Mais je retiens surtout que t'es une amie en or Gaby et ça me rassure vraiment de savoir que je t'ai dans ma vie. J'ai pas toujours été aussi bien entouré, ça aussi c'est encore un peu nouveau pour moi alors merci, vraiment. » Elle ne saurait expliquer ce lien fort qui les unit désormais, quand ils se sont rencontrés qu’un an plus tôt et ça dans un contexte loin d’être idyllique pour nouer une amitié. Tout ce que c’est Gabrielle en tout cas aujourd’hui c’est qu’Eddie occupe une place importante dans sa vie et qu’elle le considère comme un petit frère dont elle doit prendre soin, tout comme elle l’a fait et le fait toujours avec sa sœur cadette. Elle répond à son étreinte lorsqu’il vient à la prendre dans ses bras, resserrant celle-ci alors qu’elle murmure un simple « De rien » avant qu’ils ne se détachent l’un de l’autre. « Mini Yang n'est même pas encore en route que j'ai déjà envie de te le présenter. » « Et j’ai déjà hâte de le rencontrer ». Et peut-être aussi de voir Eddie dans ce rôle, de le voir avec un enfant dans les bras. Et il n’est pas impossible qu’elle soit émue par l’image lorsque ce moment arrivera.
En attendant que tout cela se produise, la réalité les rattrape, le présent surtout. « T'as peut-être envie de rentrer ? Je peux te raccompagner si tu veux. » Tristement, son regard se porte sur l’imposant bâtiment derrière eux, sa tête se hochant lentement « Je veux bien, oui… ». Son ton de voix dénote avec celui qu’elle a pu avoir jusqu’à maintenant quand Eddie est brillamment parvenu à lui changer les idées le temps de quelques heures. Lorsqu’ils arrivent à l’entrée du bâtiment, ils se stoppent à l’unisson, Gabrielle prenant une profonde inspiration alors que cette boule à l’estomac renait instantanément. Elle se pivote légèrement pour faire face au jeune coréen « Merci encore, Eddie. Cette coupure m’a fait du bien » même si la culpabilité est présente alors qu’elle se sent égoïste d’avoir laissé Channing pendant ce laps de temps, d’avoir pu rire à des moments alors que lui se bat pour rester en vie. Mais c’est ce dont elle avait besoin aussi, elle en a conscience, quand elle n’a pas vu l’extérieur depuis plusieurs jours et que ses uniques conversations se cantonnent à celles avec les médecins, la famille de Channing – Elijah en réalité – et avec lui, surtout, mais ses mots n’obtiennent pas de réponses. « Est-ce que… est-ce que tu veux aller le voir quelques minutes ? lui demande-t-elle prudemment tu as le droit de refuser, je ne m’offusquerai pas. Et lui non plus » un semblant de sourire prend place sur ses lèvres, s’estompant la seconde d’après.
Even if we can't find heaven, hands put your empty hands in mine. And scars show me all the scars you hide, and hey, if your wings are broken, please take mine 'til yours can open too 'cause I'm gonna stand by you.
Joliment ironique, ce n'est peut-être pas la meilleure façon de présenter les choses compte tenu de l'incertitude planant encore sur l'état du Walker mais ces mots échappent maladroitement au danseur avant qu'il puisse réaliser que rien n'est vraiment joli dans ce qui les réunit aujourd'hui. Il aurait préféré retrouver Gabrielle dans un tout autre contexte que celui-là et le symbole qu'Eddie se plait à y voir n'enlève évidemment rien à l'inquiétude éprouvée par chacun depuis que la terrible nouvelle est tombée, même s'il veut croire que Channing apprécierait de les savoir aussi soudés et d'apprendre que le danseur s'emploie à veiller sur elle en son absence. Eddie se doute que s'il avait pu choisir, ce n'est pas forcément à lui que le grand brun aurait confié un tel rôle mais il le prend malgré tout à cœur, sincèrement désireux que l'avocate ne traverse pas cette épreuve seule et que la relève soit assurée en attendant que Channing ne revienne parmi eux. « C’est vrai, ça l’est… mais je pense que je préférerai retourner un an en arrière, si la possibilité m’en était donné, à le détester et qu’il soit sur ses deux jambes, plutôt que de le voir dans cet état… » Des pensées ô combien légitimes alors qu'il devine que Gabrielle connait des heures et des jours très sombres depuis l'accident, dont elle a en plus été directement témoin. Il ne peut pas vraiment se mettre à sa place ni prétendre pouvoir comprendre ce qu'elle ressent car cette place n'a jamais été la sienne, mais il a déjà été amené à regretter le passé quand le présent n'avait rien de bon à lui offrir alors pour ça, Eddie peut au moins s'identifier à ce qu'il entend. L'avocate n'était pas en bons termes avec l'héritier à l'époque mais ce dernier se portait bien, il n'était pas prisonnier d'une chambre d'hôpital ni d'un corps endormi et c'est cette vision de lui qu'elle aimerait retrouver, bien avant la complexité de leurs rapports il s'en doute bien. Sa main retrouve alors celle de Gabrielle dans un geste de soutien que le danseur ne cessera jamais de lui témoigner, car plus que jamais les paroles de son amie trouvent écho en lui. « C'est normal et je suis sûr qu'il ne t'en voudrait pas de le penser. » Il présume d'ailleurs que la rééducation du grand brun sera longue après son réveil, auquel Eddie ne cessera jamais de croire, alors elle ne sera peut-être pas la seule à regretter le temps où la santé de Channing n'était fragilisée par aucun accident. Le principal concerné pourrait bien connaître des tourments similaires lorsqu'il réalisera la longue reconstruction qui l'attend, de la même façon qu'Eddie avait pu regretter ses années d'insouciance à la suite de son opération. Mais l'essentiel sera bien qu'il puisse avant tout s'en remettre, ce dont le danseur choisit là encore de ne pas douter malgré les réserves des médecins. « Disons que la victime m’avait légèrement agacée aussi. » Et ce n'est vraisemblablement pas du sauvetage de la tortue dont elle parle ici, arrachant un sourire à Eddie alors que son étonnante rencontre avec le Walker aura au moins permis d'accomplir cette bonne action. Rien que pour ça, il semblerait que ces deux-là étaient voués à se croiser ce fameux jour.
Il lui montrerait bien volontiers des photos de son nouveau lieu de vie si les plus récentes ne dataient pas déjà de plusieurs mois, alors à défaut de pouvoir lui donner un aperçu de sa maison Eddie convie l'avocate à venir constater tout ça de ses propres yeux quand elle le désirera. Cette invitation serait de toute façon tombée tôt ou tard alors il ne fait que prendre un peu d'avance sur la chose, confirmant au passage à Gabrielle qu'elle pourra aussi donner son avis sur l'ambiance puisqu'il est manifestement attendu au tournant là-dessus. « J’en serai ravie. » Et lui ne peut que l'être à son tour en l'entendant, le large sourire qu'il affiche n'ayant d'égal que la joie animant son regard. « Je t'envoie mon adresse ce soir sans faute. » il l'informe en le notant dans un coin de sa tête, comptant sur son assez bonne mémoire pour ne pas oublier d'ici là car une fois l'adresse en possession de l'avocate, celle-ci sera libre de passer quand elle le souhaitera. Peu importe qu'elle puisse un jour tomber sur la compagne du danseur, car Eddie n'empêchera jamais les deux femmes de se rencontrer compte tenu de leur importance respective dans sa vie. « Mais j’imagine qu’elle ne te l’a pas imposée non plus, si ? » La décoration assurée par sa petite sœur se devait bien évidemment d'être à son goût, quand bien même Eddie n'avait pas tellement d'exigences et était prêt à se fier aux recommandations de celle-ci pour la simple et bonne raison qu'elle s'y connait nettement mieux que lui. Il n'estime pas avoir l'œil pour ces choses-là car ce n'est tout simplement pas son domaine, la seule chose vraiment actée ayant été la recherche d'un intérieur moderne qui ne manquerait pas pour autant de couleur et de vie. Et là-dessus, Callie a parfaitement su répondre à leurs attentes comme la professionnelle qu'elle est. « Oh non, j'avais pleinement confiance en elle pour ça même si on avait quand même une petite idée de ce qu'on voulait. » Eddie n'aurait pas pu se tourner vers quelqu'un d'autre et là où il peut sans doute s'estimer heureux, c'est que Callie ait accepté de leur apporter son expertise malgré le fait que sa rencontre avec la compagne du danseur ne se soit pas déroulée dans les meilleures conditions. « J'adore son travail, elle est vraiment douée et je ne dis pas ça juste parce que c'est ma sœur. » Non, bien sûr, il tâche de conserver toute son objectivité même si c'est bien la fierté d'un frère qui s'entend à travers ces mots et qu'il ne tente pas vraiment de cacher.
Les doutes et questionnements de Gabrielle sur une éventuelle future maternité renvoient le danseur à ses propres projets, bien plus actuels, lui que rien ne prédestinait pourtant à endosser un si grand rôle avant elle. Il sait bien que l'âge ne veut rien dire et il est même le premier à ne pas vouloir être réduit à celui-ci, mais qui aurait sérieusement cru qu'Eddie serait le premier à fonder sa famille alors que la stabilité de sa vie pouvait être encore remise en doute un peu moins d'un an en arrière ? Pas l'avocate, il l'imagine bien et son étonnement dissimule avant tout le besoin de s'assurer qu'il ne s'aventure pas à l'aveugle dans cette histoire et dans la réalisation de ce rêve qui n'est initialement pas le sien. Un rêve qu'Halston a fini par lui transmettre en lui ouvrant les yeux sur des perspectives qu'il n'avait jamais pris le temps d'étudier avant ça, quand il ne jurait que par la danse et s'interdisait de vivre en dehors en se répétant que sa carrière de danseur serait courte et qu'il ne pourrait pas se permettre d'en gaspiller la moindre seconde. Avec le recul Eddie réalise qu'il s'est surtout usé avant l'heure et la blessure qu'il a longtemps négligé a fini par lui remettre les idées en place, et à redéfinir les priorités qu'il pouvait avoir jusque là. Vivre de sa passion et s'épanouir à côté dans une vie de couple et de famille n'a jamais été incompatible pour personne, encore faut-il bien sûr se donner les moyens de concilier les deux comme Eddie s'y emploie à présent. Peut-être que Gabrielle viendra elle aussi aux mêmes conclusions un jour, lorsqu'elle consentira à donner la même importance à sa vie amoureuse qu'à son travail même si là-dessus, il n'est certainement pas en droit de lui dire comment gérer l'un ou l'autre. Ils n'en restent pas moins deux acharnés du boulot qui ont longtemps privilégié ce dernier au détriment du reste, et Eddie pense prouver aujourd'hui qu'une seule rencontre peut aider à redimensionner tout le reste. Il a trouvé celle qui ferait de lui un compagnon et un père, malgré les nombreux obstacles que leur histoire a pu connaître et l'évidence bien plus présente du côté d'Halston que du sien, il ne le niera pas. « Ca l’est mais quand je t’entends parler Eddie, je sens que tu as réfléchi à cette question et que tu prends en compte tes propres volontés. Et c’est tout ce qui m’importe. » C'est un point non négligeable qu'elle lui accorde et Eddie se réjouit d'entendre qu'elle se fie à lui, plutôt que de céder aux jugements faciles que d'autres n'hésiteraient probablement pas à émettre sur son âge et sur cette envie soudaine de conjuguer son futur au pluriel. Il est certain que le danseur rencontré durant la fête des voisins était très loin de se projeter de cette façon mais il faut dire qu'à l'époque Eddie était en roue libre, sans personne pour le pousser à grandir et à prendre du recul sur des agissements pas toujours à sa gloire. « Très bien. Oui, tu étais un petit con, Eddie Yang. » « Merci de le reconnaître. » il glisse dans un sourire amusé, pas mécontent de pouvoir se dire que le petit con peut désormais être mentionné au passé. Il ne dirait pas que le temps et sa maturité gagnée sont parvenus à gommer tous les défauts qu'il pouvait avoir mais quand il s'autorise à regarder en arrière, Eddie n'a aucun mal à admettre que cette ancienne version de lui ne lui manque pas. Et il devine qu'elle ne manque pas non plus à Gabrielle, alors que celle-ci promet déjà d'être à ses côtés si son futur rôle de père doit le confronter à certaines difficultés. Une offre que le danseur pourrait être grandement tenté de saisir, comme s'il pouvait déjà sentir que les prochains mois ne seront pas les plus simples et que le plus dur n'est pas forcément derrière lui. « Elle ne l’est pas, je serai vraiment là pour toi, Eddie. Dès que tu en auras besoin. » Des mots qui font le plus grand bien à entendre, surtout quand un projet d'une telle ampleur parvient à faire naitre en lui certaines appréhensions, parmi lesquelles l'incapacité à donner à Halston l'enfant dont elle rêve. « Eddie, ne soit pas aussi dur avec toi-même, tout ne repose pas sur tes épaules. Et je suis persuadée qu’Halston ne te le reprochera pas si ça ne fonctionne pas. » Pour ça l'avocate doit avoir raison, il n'imagine pas Halston lui rejeter la faute si ce projet ne parvient pas à aboutir car elle était bien la première consciente du temps jouant contre eux. Elle ne lui a d'ailleurs jamais forcé la main et s'attendait dès le départ à entendre qu'il ne serait peut-être pas prêt pour projeter d'avoir un enfant si tôt, alors si les choses devaient tourner à leur désavantage Eddie sait déjà que sa compagne ne lui reprocherait rien. « Et je suis persuadée que si jamais cela venait à être impossible, vous trouverez bien d’autres solutions ensemble. » Il hoche lentement la tête, réaliste quant au fait que l'adoption existe car il y a à vrai dire déjà songé de son côté, les fois où son pessimisme pouvait prendre le dessus. C'est une option qu'Eddie pourrait considérer mais il en doute nettement plus en ce qui concerne Halston, car celle-ci souhaite plus que tout porter la vie, il ne l'ignore pas. « Je l'espère Gaby parce qu'elle mérite d'avoir la famille dont elle rêve, je sais qu'elle serait une mère exceptionnelle et qu'elle rendrait n'importe quel enfant heureux. » Il n'a pas le moindre doute à ce sujet car sa compagne y aspire depuis de très nombreuses années, sans avoir jamais pu se résoudre à y renoncer. Elle a manqué de concrétiser ce rêve pendant son premier mariage et c'est avec le danseur que l'ultime occasion lui en est aujourd'hui donnée, occasion qu'Eddie ne compte pas laisser passer quitte à ce que ce soit au prix de très nombreux efforts. Il apprécie par ailleurs que Gabrielle prenne le temps de le rassurer à ce propos, ses mots atténuant quelque peu ses doutes et lui redonnant progressivement le sourire. « Ca explique peut-être cette petite ride que j’ai remarqué tout à l’heure sur ton front. » Eddie en rit légèrement à son tour, du moins tant qu'il le peut encore car qui sait si ses projets futurs ne finiront pas réellement par lui faire prendre un coup de vieux. « Regarde, je t’ai bien supporté toi. » Et elle a un sacré mérite sachant qu'il peut être très pénible par moment, ce n'est pas à elle que le danseur va l'apprendre. « Je crois qu'on pourrait te décerner une médaille pour ça. » Car beaucoup n'y sont à l'inverse pas parvenus, des pensées qu'Eddie garde toutefois pour lui car il n'est pas du genre à se retourner sur le passé et sur les relations qu'il a perdues. Il préfère au lieu de ça penser que son enfant ne lui ressemblera pas trop en terme de caractère car ce ne serait pas forcément un cadeau à lui faire, même si Gabrielle ne rejetterait sûrement pas cette mini version de lui sous prétexte qu'il serait aussi infernal que son père. « Et j’ai déjà hâte de le rencontrer. » Une hâte qu'il peut déjà lire dans son regard car ce dernier ne trompe pas, tout comme celui du danseur que cette discussion ne pourrait pas davantage attendrir.
Et parce qu'il est désireux de lui faire savoir qu'elle n'est pas seule et qu'il n'a pas fini de veiller sur elle, Eddie lui propose tout naturellement de regagner l'hôpital à ses côtés dans l'optique d'alléger un peu son trajet du retour ainsi que son esprit. « Je veux bien, oui… » Il peut entendre à sa voix que l'avocate affronte péniblement cette réalité qu'ils ne pourront pas écarter plus longtemps et que sa présence pourrait aider, à défaut de faire toute la différence car Eddie n'a pas la prétention de penser détenir un tel pouvoir. Ils coordonnent leurs pas jusqu'au St Vincent's Hospital avant que l'avocate ne se tourne vers lui, couvée par le regard bienveillant du danseur. « Merci encore, Eddie. Cette coupure m’a fait du bien. » Ces mots ne pourraient pas lui faire plus plaisir, pas alors qu'Eddie avait justement très à cœur de faire temporairement oublier ses peines et ses craintes à Gabrielle, sans imaginer qu'elle lui accorderait autant de son temps et qu'ils seraient amenés à discuter si longuement dans ce parc. Sa mission est donc réussie et il en est sincèrement heureux. « À moi aussi. Ça m'a fait plaisir de te voir et de t'aider à penser à autre chose, vraiment. » Même s'il estime que Channing était toujours présent dans ses pensées d'une certaine façon et que c'est bien normal, Eddie se réjouit quand même d'avoir pu redonner le sourire à l'avocate alors que celle-ci en avait perdu l'occasion depuis plusieurs jours. Cet échange n'a d'ailleurs pas fait du bien qu'à elle, puisque le danseur avait lui aussi besoin de parler à cœur ouvert comme il ne s'autorise pas assez souvent à le faire. « Est-ce que… est-ce que tu veux aller le voir quelques minutes ? » La question le prend par surprise, à tel point que son cœur rate un battement en étudiant cette idée. Ce n'est pas qu'elle le dérange, bien au contraire, c'est juste qu'il n'est pas à l'aise avec les hôpitaux et qu'il doute peut-être aussi que sa place soit celle-ci, même s'il mentirait en disant que l'état du grand brun ne le préoccupe pas réellement aujourd'hui. Cet accident le secoue même bien plus qu'il n'est prêt à l'avouer et durant les quelques secondes d'hésitation qu'Eddie s'accorde, il se demande s'il ne regrettera pas d'être reparti de son côté quand l'occasion de glisser quelques mots à l'oreille de Channing lui était donnée. Personne ne peut prédire la manière dont les choses évolueront, il est le premier à croire que l'héritier s'en sortira mais n'en a pas pour autant la garantie, une incertitude qui pourrait bien l'aider à se décider. « Tu as le droit de refuser, je ne m’offusquerai pas. Et lui non plus. » Il n'en doute pas mais s'il y a bien une chose à savoir sur Eddie c'est qu'il ne se sent jamais forcé à rien, quand il s'engage à faire quelque chose ce n'est jamais à la légère. « Non Gaby, je tiens à y aller. » il annonce dans un sourire, pour elle et pour Channing car c'est un pas supplémentaire que le danseur se doit peut-être de faire vers lui au nom de leur inimitié passée. Le fait est qu'il se soucie du grand brun et qu'il ne souhaite pas non plus que Gabrielle rentre seule et se retrouve face au silence angoissant d'une chambre d'hôpital, alors c'est avec douceur qu'il glisse sa main dans celle de l'avocate comme pour confirmer sa réponse déjà donnée. « C'est important pour moi aussi. » Autant que ça peut être symbolique à ses yeux, car c'est sûrement la deuxième meilleure chose qu'Eddie pourra accomplir aujourd'hui. Channing serait certainement le premier surpris par de tels mots venant de lui mais il ressent le besoin d'apporter sa petite pierre à l'édifice, tout comme d'assurer une nouvelle fois son soutien à Gabrielle pour encore quelques minutes, ou tout le temps qu'il faudra.