Bip-bip-bip… Bip-bip-bip… Ma main cherche mon portable à tâtons dans mon petit lit. Pendant quelques secondes je supporte ce bruit strident, pour finalement ouvrir les yeux avec un soupir. C’est déjà l’heure ? Il faut dire que je ne me suis pas encore totalement faite au décalage horaire. Il y a une dizaine de jours, j’étais encore en France, où sont restés mes repères. Tant pis, je m’en trouverai d’autres, c’est aussi pour ça que je suis ici. J’ai pris l’habitude de faire une petite sieste en journée, avant mon service, histoire d’arriver détendue et prête pour le service qui durera jusque tard dans la soirée. Je me lève, et me dirige vers la salle de bain de mon studio, petite mais fonctionnelle. Je laisse le lit en plan, je ne suis pas vraiment une maniaque de l’ordre, et puis personne ne vient ici… Aïe, la corde sensible de la solitude. Je chasse cette sensation de mon esprit : comment se sentir seule quand on ne vient chez soi quasiment que pour dormir ? Je ne vais pas me plaindre, Fortitude Valley est un quartier vivant, avec du monde dans les rues à toute heure. Le reflet que me renvoie mon miroir me ramène à l’instant présent : j’ai les cheveux en bataille et le mascara qui a coulé, on dirait presque l’un des monstres de mes histoires… Bon d’accord, j’exagère un peu. Je me refait une beauté, disons le strict minimum, puis je quitte mon domicile en prenant mon sac et mes clés. Un regard sur mon portable m’informe que je suis à l’heure, mais il s’agirait de ne pas trop traîner. J’arrive au Canvas en saluant le responsable avec un sourire. Il est vrai que quelques heures de service ne vont pas m’enrichir, mais c’est mon seul moyen de subsistance, ça paye les factures et les courses. Habituée aux petits boulots, j’arrive à gérer mon salaire, et je sais qu’arriver avec le sourire, c’est l’un des détails qui permet de garder son job. Il y a déjà quelques clients, je prends les commandes, et le bar se remplit au fil des heures. Je dois être rapide et concentrée, mais j’ai quand même un moyen de me détendre : la manie d’essayer de se souvenir des collègues. Il y en a un ou deux dont je connais le nom et le visage par cœur, mais pour les autres j’ai encore du mal. Ce soir il y a un homme avec moi, et loin de me détendre, ça me frustre parce que je n’arrive pas à remettre un nom sur son visage. En même temps, je crois que j’ai dû le voir… Une fois, ou peut-être deux ? Je ne me souviens pas qu’on ait particulièrement discuté ensemble, c’est même probable qu’il ne m’ait tout simplement pas dit comment il s’appelle. Les cheveux bruns, plus grand que moi (évidemment), il semble cependant un peu plus jeune. Ou bien est-ce son air avenant, son sourire qui donnent cette impression ? C’est quand il y a du monde qu’il faut se serrer les coudes et s’organiser. J’entends le patron qui lui dit quelque chose, mais je ne parviens pas à percevoir distinctement comment il l’appelle… « I » quelque chose ? Est-ce que je connais des prénoms d’hommes qui commencent par cette lettre ? Isidore ? Ismaël ? Nous nous croisons quelques fois avec les plateaux, il y a une autre serveuse avec nous, plus le patron qui discute avec les habitués. Un fan de karaoké se lève et commence une interprétation de Dead Can Dance, qui trahit son taux d’alcoolémie sans doute déjà bien élevé. Près de l’écran où s’affichent les paroles, on s’entend à peine. Bon ma fille, tu veux prendre un nouveau départ, pas vrai ? Alors commence par être moins réservée. Nous allons tous les deux déposer des plateaux de verres vides à l’intérieur, j’en profite pour souffler un peu et je m’adresse gentiment à mon collègue. « Sacrée soirée, pas vrai ? Le temps passe hyper vite. » J’ai l’impression que ce que je viens de dire est complètement absurde… Au moins, j’ai tenté une approche, maintenant il faut voir s’il ne choisit pas tout bonnement de m’ignorer.
Icare dormait peu de façon générale, être insomniaque n'était pas toujours la chose la plus plaisante au monde. Mais il faisait avec, c'était aussi pourquoi il tenait toujours à s'occuper, à se divertir et se changer les idées. Il avait commencé à accumuler les boulots. Il en avait un principal, et il se rajoutait des heures à droite ou à gauche. Ici, il était au Canvas, c'était un bar comme un autre, au moins ici, il n'avait pas à porter la tenue obligatoire des serveurs en restaurant, mais il avait tout de même gardé la chemise (bleu marine ici, grande différence du classique blanc immaculé) et un jean délavé mais pas déchiré. Détendu et facile. C'était son humeur général ce soir, le bar tournait bien, il avait commencé il y a quelques semaines et y bossait surtout en soirée. Il s'était assez vite senti à sa place, le patron était assez cool, la clientèle n'était pas des plus difficile, évidemment, certains buvaient trop et pouvaient par moment s'emporter. Mais ces gens là étaient assez rapidement priés de déguerpir. De toute façon, ils avaient de ne plus servir les gens trop éméchés et c'était une bonne chose, ceux-ci restaient une variable trop imprévisible.
Icare était donc focus : marché, servir, prendre commande, plaisanter et continuer... encore et toujours. Au plus vite son service serait fini, au plus vite il pourrait aller faire un tour en voiture. Rouler pendant la nuit était une de ses choses préférées au monde. Voir le ciel changer de couleur à la levée du jour aussi. C'était un spectacle qu'il admirait tous les matins avant de consentir à s'offrir quelques heures de repos avant de retourner bosser quelque part. Souvent au DBD. « Sacrée soirée, pas vrai ? Le temps passe hyper vite. » Icare cligna des yeux en comprenant que sa nouvelle collègue s'adressait à lui. Ils s'étaient croisés mais n'avaient pas cherché à s'adresser la parole. Icare était du genre à faire son boulot en tentant de se fondre dans le décor la plupart du temps. Pas qu'il était asociale, mais il ne savait jamais quoi dire, comment commencer une discussion. Il offrit à la blonde un sourire contrit avant de lui répondre. « Effectivement, en plus on a une vue imprenable sur le spectacle » ajouta-t-il tout en indiquant de la tête la scène sur laquelle les chanteurs du dimanche prenait place pour massacrer quelques classiques. Il grimaça en écoutant attentivement le chanteur du moment avant de secouer la tête pour se reconcentrer sur sa collègue. « Excuse-moi mais... tu sais me rappeler ton prénom ? » demanda-t-il sans autre préambule. Être serveur, ce n'était pas juste connaitre ses collègues, quand on bossait dans un endroit, on connaissait les clients, ses habitudes, plein de détails qui avaient à la fin leur importance si on voulait un bon pourboire. Retenir les prénoms de tous étaient compliqués en somme. Ne pas se rappeler le prénom d'un habitué était embêtant parce qu'il fallait user de subterfuges pour qu'il ne le remarque pas. Mais avec les collègues, on pouvait être plus direct, ils comprenaient, eux aussi avaient beaucoup d'autres choses à retenir.
« Effectivement, en plus on a une vue imprenable sur le spectacle » Bon au moins, je ne me suis pas pris un vent… Pourquoi je prenais ça à cœur, comme si je devais absolument avoir l’air cool et à l’aise ? Je fais ça tout le temps, et ça me désespère parce que ça me demande beaucoup d’énergie, et un espère de stress sous-jacent… De l’angoisse peut-être ? Celle de se faire rejeter ? Quoi qu’il en soit, le jeune homme me rend mon sourire, et me désigne les chanteurs d’un soir. Je ne me suis pas encore habituée à ce spectacle ; les clients y mettent parfois tant d’énergie et d’enthousiasme ! D’ailleurs, je pense que celui que j’ai vu chanter ne va pas faire long feu ici, vu son comportement ça m’étonnerait que le patron nous laisse encore le servir pendant longtemps. Cette habitude de ne pas accepter les soulards me rassure, il y a moins de risques que la soirée se finisse mal, même si bien sûr tous les clients ne sont pas forcément respectueux. Il en faut bien quelques-uns dans le lot… « Excuse-moi mais... tu sais me rappeler ton prénom ? » Ca tombe bien, on ne connaît pas nos prénoms respectifs, je me sens moins seule ! Je dispose quelques verres pleins sur mon plateau, je me concentre sur ma tâche une poignée de secondes, avant de lui répondre. « Moi c’est Nathanaëlle… Naëlle, pour faire plus simple. » J’aime bien mon prénom, mais sa longueur engendre assez souvent des oublis de la part des personnes que je rencontre ; mon surnom est plus simple à retenir et à utiliser dans la vie de tous les jours. « Et toi, c’est comment ? Je ne me rappelle plus… » Je suis plus à l’aise de le dire, au moins les présentations seront officiellement faites. Après lui avoir adressé un regard, je retourne en terrasse pour servir les clients, sous l’œil attentif du patron. Je suppose qu’il voudrait qu’on serve sans arrêt, sans discuter, mais on n’est pas des robots. Ça fait du bien parfois, de discuter, histoire de faire retomber la pression du rush. Bon il est déjà cool sur la tenue, je dois le reconnaître. Je peux venir en jean et tee-shirt, ça ne pose aucun problème. Mon interlocuteur et moi reprenons le service, nous croisant de temps à autre entre les tables. J’essaie de faire vite, tout en ne renversant rien. Au bout d’un certain moment, les clients affluent moins vers la terrasse du Canvas ; c’est un bon moment pour faire une petite pause. On a le droit de boire quand même, sinon ce serait insupportable. Je me sers rapidement un verre d’eau bien fraîche, que je bois par petites gorgées. Le jeune homme se rapproche, jusqu’à être à portée de voix. « Tu veux aussi un verre ? » Je prends un verre vide en main, attendant sa réponse. Ok, on pourrait peut-être pas faire la pause en même temps, mais on peut boire de temps en temps et assurer le service normalement.
« Moi c’est Nathanaëlle… Naëlle, pour faire plus simple. » Icare opina de la tête, démontrant qu'il avait compris, il eut un petit sourire, c'était assez original pour qu'il le retienne. « Et toi, c’est comment ? Je ne me rappelle plus… » vrai, lui aussi devait également à présent. « Moi c'est Icare, j'ai pas de diminutif par contre » certains avaient pourtant essayer mais ça ne sonnait pas aussi bien que son pseudo d'Icare. « Comment se déroule tes débuts ici ? tu aimes bien ? » c'était un boulot de serveur comme un autre après tout. Rien de bien folichon mais au moins, ils étaient pas si mal payé et les pourboires étaient encore correcte. Sans oublier que les clients n'étaient pas si lourd que ça ici, mais c'était aussi peut-être parce que c'était un garçon, il était conscient que certaines filles étaient parfois draguées de façon un peu lourde, surtout par les soulards qui avaient du mal à comprendre le terme "non". Il vit une main se lever dans la salle et Icare offrit un sourire contrit à Naëlle avant d'aller prendre la commande, c'était des filles déjantées mais amusantes qui lui firent une commande de cocktails tous plus sucrés les uns que les autres. Une commanda évidemment un "Sex on the beach" avec un sourire mutin tout en le regardant droit dans les yeux, il lui fit un clin d'oeil qui fit rigoler ses amies aux éclats, il revint avec sa commande auprès du barmaid qui se lança dans l'exécution tout en soupirant. Icare l'aida évidemment, il s'y connaissait assez pour lui donner une avance sur certains cocktails, il n'allait pas rester les bras croisés. Il continua son tour des tables, plaisantant avec les clients, draguant ce qu'il fallait avant de ramasser des verres vides pour en apporter des pleins.
La fois d'après où il se retrouva à pouvoir souffler quelque peu, il se retrouva avec la blonde. « Tu veux aussi un verre ? » il opina de la tête « L'eau ça me va très bien, merci » approuva-t-il simplement tout en vérifiant d'un regard rapide que tout le monde était bien servi et heureux. Il observa la blonde du coin de l’œil, honnêtement, elle s'était bien débrouillée, on ne savait jamais à quoi s'attendre avec les nouveaux et là au moins, c'était une bonne surprise. « Tu as fait du bon boulot » avoua alors Icare tout en lui offrant un clin d’œil, il aurait des mots positifs à son encontre pour le patron, celle-là, ils pouvaient la garder. « ça fait longtemps que tu es sur Brisbane ? » demanda-t-il par politesse.
Icare… Je n’aurais jamais pensé à ce prénom, je sais qu’il existe mais je n’ai encore jamais rencontré quelqu’un portant ce prénom. Il y a une première fois à tout ! Ça sonne bien et c’est original, il faut l’avouer. « Comment se déroule tes débuts ici ? tu aimes bien ? »Et en plus il est sympa ! Y a pas à dire, l’ambiance dans un job ça compte beaucoup. Combien de fois j’ai fait le boulot que d’autres ne voulaient pas faire, un rythme infernal et le patron qui stresse tout le monde… Je chasse ces pensées de mon esprit, et reviens au moment présent. « Oui ça va, j’aime bien, et toi ? » J’ignore depuis combien de temps il travaille ici, mais il semble à l’aise, même avec les clients. Pour le peu que je l’ai vu, c’est vrai que je suis bien occupée aussi de mon côté. Je me dis que je ne suis peut-être pas trop gauche non plus, j’ai déjà travaillé dans des bars en France, c’est un domaine qui recrute assez régulièrement. J’aperçois deux hommes qui s’installent à une table, je vais vers eux pour prendre leur commande. Certains me parlent de manière assez familière, m’appelant « ma jolie » et autres surnoms du même genre. Je sais qu’il n’y a rien de méchant à cela, et je fais attention à toujours avoir l’air enjouée et souriante. Si j’y arrive, c’est encore une autre histoire… Mais au moins, j’essaie. Je suis allée voir un psychiatre australien pour qu’il me prescrive un traitement avec les médicaments disponibles en ici, et je dois dire que ça me stabilise plutôt bien, même si c’est récent. Icare veut de l’eau, comme moi ; c’est qu’on en brûle des calories, mine de rien. Je lui tends un verre plein. « Tu as fait du bon boulot ». Je me sens rougir, je ne m’attendais pas à un compliment de sa part ! Ça fait plaisir, et je lui réponds avec un sourire franc. « Merci c’est gentil… Toi aussi, tu as l’air à l’aise ! Ça fait longtemps que tu bosses ici ? » Je bois quelques gorgées d’eau fraîche, avant de reposer mon verre quasiment vide. « Ça fait longtemps que tu es sur Brisbane ? »Aïe… Ça se voit tant que ça, que je ne suis pas du coin ? En y réfléchissant bien je dois avoir un sacré accent, même si j’étais habituée à parler à mes grands-parents en anglais australien… « Tu as vu juste, je ne suis pas d’ici, j’arrive de l’étranger. J’ai quitté la France il y a une dizaine de jours. » Je l’écoute, mais je n’arrive pas à percevoir d’accent particulier dans sa manière de parler. Soit ça fait longtemps qu’il est ici, soit il est doué pour les langues. Je vois le patron me faire signe à l’autre bout de la salle. Je m’adresse à Icare, un peu plus à l’aise maintenant que nous avons brisé la glace. « Je vais voir ce qu’il veut. » Je lui désigne de la tête notre employeur. Revigorée et rafraîchie, je vais le rejoindre. « Dis-moi, il y a du monde, ça te dérangerait de travailler une heure de plus ? Payée, évidemment. »Heureusement que j’ai fait une sieste ! Bien sûr je sens l’effort physique effectué par mon corps, mais si ce n’est qu’une heure ça va, en plus ça me fera de l’argent supplémentaire, je ne vais pas cracher dessus ! « Pas de problème, je finis dans une heure dans ce cas. » Je me demande s’il va proposer ça à Icare aussi… Quand on vient d’arriver la motivation est encore indemne, mais pour quelqu’un qui travaille au Canvas depuis un certain temps c’est peut-être moins enthousiasmant. Je n’ai rien à faire de toute façon après le service, si ce n’est d’aller me coucher.
« Oui ça va, j’aime bien, et toi ? » Icare cligna des yeux avant de hausser les épaules avec un petit sourire aux lèvres. « C'est un boulot comme un autre pour moi, j'ai d'ailleurs un autre boulot, j'fais juste quelques heures en plus ici » avoua alors Icare. Il n'aimait pas spécialement se tuer au boulot, mais il aimait assez bien l'argent, surtout si ça l'aidait à payer son loyer et ses autres activités au quotidien. Puis autant avouer, son insomnie chronique rendait ses journées plus longue que la moyenne et il se voyait mal être bêtement dans son studio à tourner en rond, comme un lion en cage. Autant faire un maximum tant qu'il avait l'énergie, il comptait sur sa jeunesse pour tenir le coup. Et du café aussi en cas de coup de mou, autant être honnête sur ce point.
Puis ils se recentrent sur leur boulot tout un temps, il y a un peu de monde, la clientèle reste dû à l'ambiance karaoké de la soirée, Icare au moins est occupé, tant qu'il est en mouvement, il ne ressent aucun des effets de la fatigue. Ils se retrouvent ensemble une nouvelle fois derrière le bar pour boire un verre d'eau mérité. Après tout, ils bossent bien et dans un rythme assez soutenu afin de satisfaire à tous. Le patron comme a son habitude et avec des amis qu'il rince à l’œil, ça c'est son problème, son bar, son argent, tant qu'il est payé, Icare se fiche bien de tout le reste. Pour l'instant, Icare doit bien admettre que Nathanaëlle fait bien le staff, elle est volontaire et elle veut bien faire, c'est tout ce qui compte pour le jeune brun. « Merci c’est gentil… Toi aussi, tu as l’air à l’aise ! Ça fait longtemps que tu bosses ici ? » Icare rigole légèrement avant de secouer négativement la tête. « Non, mais j'ai été serveur quelques fois sur ces dernières années, je connais et maitrise le taff » expliqua-t-il une lueur amusée au fond du regard. Ah ça, pour le maitriser, et il savait même le faire en plusieurs langues, être serveur, ça pouvait se faire partout, tant qu'il apportait les bonnes commandes aux bonnes tables, c'était tout ce qui comptait aux yeux des patrons.
Icare demanda si elle était dans le coin depuis longtemps, elle avait un petit accent discret mais tout de même bien présent. « Tu as vu juste, je ne suis pas d’ici, j’arrive de l’étranger. J’ai quitté la France il y a une dizaine de jours. » le regard d'Icare se fit aussi tôt pétillant. « La France est un très beau pays, pourquoi tu as décidé de débarquer ici du coup ? » demanda alors curieusement Icare, intéressé par ce point. Il était le premier à comprendre l'envie de voyager à travers le monde, sur ce point, il n'allait pas la juger de ce choix.
Le patron l'appela et Icare reprit simplement le boulot, quand l'heure de sa fin de service approcha, le patron lui fit un signe de main à son tour. « Bon boulot gamin, comment t'as trouvée la nouvelle ? » « Efficace, elle fait le taff qu'on lui demande, tu devrais la garder celle-là. » l'autre rigola avant de lui taper sur l'épaule. « Tu as bien mérité un verre de ma part, tu reviens quand cette semaine ? » « Après demain en soirée » lui rappela alors le brun avant de le saluer une dernière fois et d'offrir un sourire sympathique aux personnes de sa table à ses côtés. Il retourna au bar pour prendre place sur un tabouret, il commanda une bière et se mit à discuter avec le barmaid attitré du soir, ils avaient sympathisé à force de bosser ensemble. Mais un habitué un peu saoul commença à ennuyer d'un peu trop près la nouvelle et Icare fronça les sourcils avant de se décider à intervenir. « Mike, si tu retournais à ta table plutôt que d'ennuyer notre nouvelle serveuse ? » « Oh Icare, c'est bon, on ne fait que discuter » Icare se leva alors de sa chaise et il se rapprocha de toute sa hauteur. « Écoute, soit tu retournes à ta table, soit je te mets moi-même hors du bar par le peau du cul, est-ce que c'est clair ? » l'autre déglutit avant de prendre la poudre d'escampette. Icare soupira longuement, il ne savait pas se battre, du tout. Mais il savait que son physique pour quelqu'un avec un verre dans le nez pouvait être impressionnant. « Faut pas te laisser faire et tu dois pas hésiter à nous indiquer quand des clients deviennent trop lourd avec toi » fit alors remarquer le jeune homme à Nathanaëlle d'une voix qui se voulait sympathique et compréhensive.
Plus je parle avec Icare, plus je le sens à l’aise. Plusieurs boulots, de l’expérience en tant que serveur… Il doit avoir une vie trépidante ! Je ne pourrais pas être à sa place, le traitement me fatigue, donc j’ai tendance à être moins active au quotidien que ce que l’on pourrait penser. Pourtant quand je fais une sieste, je fais mon travail comme tout le monde et au rythme normal, il faut juste que je connaisse mon corps, ses besoins et ses limites. « La France est un très beau pays, pourquoi tu as décidé de débarquer ici du coup ? » Mon voyage a l’air de l’intéresser, même s’il ne me connaît pas. Il faut dire que la France jouit d’une bonne image à l’international : la mode, la cuisine… Même si j’avais l’impression là-bas que ça avait tendance à se perdre, le mythe reste indemne. Il suffit de regarder la « mode » de certains pour douter de sa qualité. Jeans troués, chemises transparentes… Ce n’est que mon avis, mais ce n’est pas vraiment la définition que je me fais de la « mode ». Pour autant, je ne juge pas, chacun s’habille comme il veut. « Mon père est né et a grandi ici, mes grands-parents ne sont pas loin. J’aime ce pays, où j’ai encore tellement de choses à découvrir. » Je lui épargne mes questions existentielles concernant ma façon de gérer ma vie en France, il n’a pas besoin de connaître tous les détails. Nous continuons de travailler, servant les cocktails et sodas çà et là ; puis je me rends compte que je ne croise plus le jeune homme. Et pour cause : il est assis au bar, sirotant une bière, parlant au barmaid. Il doit avoir fini ses heures de boulot… Je sors rapidement mon téléphone de ma poche, loin des clients : il me reste environ 45 minutes de travail. Soudain, j’ai un sursaut quand je sens quelqu’un me toucher l’épaule, et je me redresse en fourrant mon portable dans ma poche arrière. Il s’agit d’un homme dans la cinquantaine environ, aussi grand que moi et sentant passablement l’alcool. C’est bizarre qu’on ne l’ait toujours pas mis dehors, lui… Ou bien a-t-il pris plus que de l’alcool ? On ne sait jamais. Il se met à me parler, et je le trouve un peu trop proche de moi. « Bonjour mademoiselle… Vous êtes très jolie, vous me faites un peu penser à Tatiana… C’était ma femme, elle était jolie comme vous… C’est quoi votre nom ? » Je sens le rouge me monter aux joues ; j’ai connu des clients un peu lourds, mais lui commence à franchement m’intimider, à me parler de sa femme, ou de son ex-femme, je ne sais pas vraiment… Je me recule, mais c’est peine perdue, il s’approche. « C’est quoi ton nom ? Tu es comme ma femme… Jolie Tatiana… » J’ai puisé dans à peu près toutes mes ressources, je m’éloigne mais je n’ose pas le toucher, vu son état d’esprit il serait encore capable d'interpréter ça comme une tentative d’approche. « Je dois aller travailler. Retournez vous asseoir. » Je n'ai pas d’ordre à donner à un client, mais celui-ci dépasse les limites, et j’espère que le ton de ma voix était aussi sec que je le souhaitais. Je jette un coup d’œil à la terrasse pour trouver le patron, mais celui-ci discute en lui tourant le dos. « Mike, si tu retournais à ta table plutôt que d'ennuyer notre nouvelle serveuse ? » Sans même avoir le temps de prendre totalement conscience de l’irruption d’Icare, je me sens soulagée. Le dénommé Mike ne semble pas pour autant disposé à faire preuve de plus de bienséance ; la réaction de mon collègue ne se fait pas attendre, il se lève et le menace. Toute mon attention est portée sur le jeune homme, il semble vraiment sérieux et, ô miracle, il réfrène l’ardeur du client. Ça doit être un habitué pour qu’Icare l’appelle par son prénom. Personnellement j’ai dû le servir deux ou trois fois, mais peut-être qu’il vient plus tôt que ma prise de poste. Je me souviendrai de lui, ça c’est sûr… Mais pas en bien. Mon collègue s’avance vers moi, l’air sérieux. « Faut pas te laisser faire et tu dois pas hésiter à nous indiquer quand des clients deviennent trop lourd avec toi ». J’ai été bête de me faire coincer comme ça. Quelque part, cet homme me faisait pitié… Mais je dois être claire et nette dans ce genre de situation. Je m’en veux d’avoir dérangé Icare alors qu’il se détendait. Des « j’aurais dû », il y en a des dizaines qui me viennent à l’esprit, mais c’est trop tard. Je suis la femme qui a décidé de tout quitter. La femme courageuse, qui sait s’en sortir seule. Mais ce soir, j’ai été trop laxiste. Mon regard se porte vers Icare, et quand je m’adresse à lui je me sens vraiment reconnaissante de son intervention. « Je suis désolée… Ça ne se reproduira plus. » Si je veux garder ce travail, je dois être plus autoritaire. « Ça me servira de leçon pour les prochaines fois. » En espérant qu’il n’y ait pas trop de « prochaines fois » tout de même… Je souris à mon collègue, puis je retourne voir les clients en terrasse. Le dénommé Mike ne se fait plus remarquer, et finit par s’en aller sans causer d’autres ennuis. Je me concentre dans mon travail, pour ne pas penser à quel point je me trouve… Nulle. Le mot est peut-être fort, et je sais que j’exagère. C'est pourquoi, je ressers les quelques clients qui bavardent encore joyeusement, témoins de la scène eux aussi se tiennent bien, personne n’a envie de se frotter à Icare. Il me reste dix minutes. Les dernières personnes s’en vont à leur tour, et je passe un chiffon humide sur les tables, avant de commencer à tout rentrer à l’intérieur. Avec de l’organisation ça va vite ; et mes deux collègues s’éloignent du bar. Secouant légèrement mes épaules pour détendre mes muscles, je marche doucement vers mon « sauveur » de la soirée : « Hey… Je ne t’ai même pas remercié, tout à l’heure. C’était très gentil de ta part ». Gentil ça oui, il l’est ; entre autres qualités que je ne doute pas de découvrir par la suite.
Icare avait appris à devenir plus sociale grâce à ses voyages, ça n'avait pas été gagné au début, il était loin d'avoir toujours été le plus convivial ou même jovial d'une pièce, c'était une nature qui avait mis son temps avant d'arriver chez lui. Devenir serveur par la force des choses (ou vendeur, fleuriste, pêcheur même une fois) avaient fini par le détendre en société et l'avait rendu... au moins un peu plus abordable. Son sourire aidait aussi les autres à se détendre, on voyait tout de suite que c'était un bon petit gars, il n'avait pas un mauvais fond, il faisait juste de temps en temps les mauvais choix. Grâce à sa nature plus ouverte, il finit par apprendre que la blonde avait des origines australiennes aussi. Elle avait juste grandi en France mais avait une partie de son histoire sur les terres australienne. Le fait de toujours travailler les empêcha de trop développer la question, ils étaient collègues, du coup, ouais, ils se posaient des questions en restant à la surface des choses. C'était une question de professionalisme pour le jeune brun, il ne mélangeait pas boulot et plaisir, question de principe et s'était aussi surtout pour s'éviter le moindre ennui. Been there, done that. Il avait déjà donné une fois en somme.
Icare fut le premier à terminer son service et il profita pour se détendre et se changer les idées comme à chaque fois, sauf qu'un habitué se mit à coller un peu trop la nouvelle et Icare se sentit obligé d'intervenir. « Je suis désolée… Ça ne se reproduira plus. » le brun cligna des yeux un peu surpris. « Ça me servira de leçon pour les prochaines fois. » cette fois-ci il poussa un soupire. « Hey, c'pas à toi d'être désolée tu sais ? Enfin, tu n'as rien fait du tout, c'est juste que je ne pensais pas qu'il avait déjà bu autant » grimaça-t-il simplement, Mike compensait ses mauvais agissements avec de bons pourboires, puis c'était une crème tant qu'il n'avait pas un verre dans le nez... d'ailleurs il ne fut pas surpris de le voir surgir pour lui glisser en main un billet de 50$ avant de prendre la poudre d'escampette après avoir payé ses consommations. Il roula des yeux, typique de Mike. Finalement, la soirée prit fin et les derniers clients commencèrent à partir, Icare termina sa bière pour que son collègue puisse nettoyer ses derniers verres, ils se levèrent et Icare voulu prendre sa veste avant de se rappeler qu'il n'en avait plus pour l'instant. Vrai. Ils se dirigèrent vers Nathanaëlle qui fut la première à reprendre la parole. « Hey… Je ne t’ai même pas remercié, tout à l’heure. C’était très gentil de ta part » « Non, c'est normal, pas de soucis... d'ailleurs... » Icare brandit alors le billet de 50$ de Mike et il le remit dans la main de la blonde. « Pourboire du soir, je sais pas si tu as envie, mais avec Liam on allait prendre un dernier verre dans un bar un peu plus loin ? Fin, te sens pas obligée, beaucoup sont fatigués après le premier service... » proposa tout de même Icare avec un sourire mutin sur les lèvres.
Je suis très surprise de voir mon collègue mettre un billet de cinquante dollars dans ma main. « Dis donc, les clients ont été généreux ce soir… » Honnêtement, je suis fatiguée, je ne peux pas dire le contraire ; en plus, j’ai travaillé une heure supplémentaire. Je retrouverai mon lit avec plaisir, mais… « Une partie de mon pourboire doit partir ce soir… » Je lui souris en retour. Liam, c’est apparemment le nom du barman, que je ne connais pas plus que ça. Ce soir, nous resserrons les liens de l’équipe ! Bon, sans rire, je ne compte pas m’éterniser, il faut savoir être raisonnable. En plus, quand je suis fatiguée je suis ankylosée comme un enfant, à moitié moi-même… Autant ne pas me ridiculiser. Je prends mon sac, avant de saluer le patron qui ferme le Canvas. Il fait bon, les badauds se font rares dans les rues, donc nous avons de la tranquillité. Le dénommé Liam a la tchatche du métier, et ne semble jamais être à court de sujets de conversation, ce qui m’arrange. Il apporte de la vie dans notre petite bande. Finalement, nous arrivons au bar où ils voulaient aller, et je m’assieds avec plaisir, reposant mes muscles, des bras aussi bien que des jambes. L’ambiance est cosy, je me sens à l’aise même si je ne suis jamais venue auparavant ; j’écoute les garçons bavarder, mettant mon grain de sel de temps en temps. Bien sûr, cela reste superficiel, mais ça fait du bien de passer de bons moments avec les collègues. Dorénavant, je serai encore plus motivée d’aller travailler ! Nous remarquons le serveur qui s’approche, je n’ai absolument pas pensé à ce que je voulais commander. Pas d’alcool, à cause des médicaments ; ou alors vraiment pas fort. « Pour moi ce sera un Coca, s’il-vous-plaît » dis-je en souriant à l’homme qui prend notre commande. Simple et efficace, le Coca, on peut être sûrs qu’il y en a à peu près partout, dans tous les pays. « Avec une paille », le petit mot de la fin, un détail que j’aime préciser. Ma discussion avec Icare me revient en tête. « Dis-moi Icare, tu as dit que tu avais un autre boulot, c’est quoi du coup ? » Le serveur ne tarde pas à revenir avec nos boissons, et je commence à siroter mon Coca doucement, attentive à notre conversation à trois. Depuis que je me suis assise, la fatigue a pris possession de mon corps et je ne compte pas m’éterniser une fois que j’aurai fini ma boisson. Et puis les deux hommes semblent s’apprécier, c’est comme les femmes, ils ont besoin de leur temps rien que pour eux. Cependant, je dois avouer que ça me fait plaisir de passer du temps avec eux. Ça fait d’une pierre deux coups : je m’amuse, et je montre au patron que je m’intègre à l’équipe, un détail qui peut avoir son importance.
« Dis donc, les clients ont été généreux ce soir… » Icare se gratta un peu la joue et Liam haussa les épaules, peut-être que lui avouer la provenance ne servait à rien dans le fond, il ne voulait pas mentir, mais il ne se voyait pas non plus lui révéler la vérité sur la provenance, elle avait eu une soirée compliquée, elle le méritait, c'était comme ça. Puis, c'était aussi pour ça qu'il voulait qu'elle se change définitivement les idées en venant boire un verre avec eux. Pourquoi pas après tout, il fallait bien qu'elle s'intègre à l'équipe après tout. « Une partie de mon pourboire doit partir ce soir… » « Cool, c'est pas trop loin ! » indiqua aussi tôt le jeune brun, et lui et Liam connaissaient bien le chemin maintenant. Il n'y avait rien d'exceptionnel au principe qu'Icare aille boire des verres après des services, ça lui permettait de décompresser et de juste profiter de sa fin de soirée.
L'ambiance était légère, Liam faisait son show, comme à son habitude, Nathanaëlle mettait sa petite touche à la conversation et c'était bien assez quelque part. C'était simple et facile. Ils arrivèrent finalement à destination et ils attendirent qu'un serveur (connaissance aussi) vienne prendre leur commande. « Pour moi ce sera un Coca, s’il-vous-plaît. Avec une paille » le serveur resta impassible, Liam eut un petit sourire aux lèvres et Icare cligna des yeux deux fois avant de prendre la parole tout en se raclant la gorge. « Deux bières pour nous » « Sans paille » ajouta aussi tôt Liam avec un air ravi de son trait d'esprit, Icare lui refila un coup sous la table.
« Dis-moi Icare, tu as dit que tu avais un autre boulot, c’est quoi du coup ? » Icare se tourne alors vers Nathanaëlle pour lui répondre, il aime observer les gens dans les yeux quand il leur parle, c'est un détail qui reste important selon lui. « Serveur aussi, mais dans un autre café » « Il a plusieurs boulot juste au cas où il se fasse virer d'un endroit, Icky est doué mais il manque de volonté par moment » ajoute Liam qui décidément a envie de le faire chier ce soir. Il lui fait un doigt d'honneur qui ne fait qu'attiser le rire de son collègue. Il n'avait pas fondamentalement tord cela dit. Icare doit reconnaitre qu'il est encore assez instable et qu'il a cette fâcheuse tendance à changer de boulot au bout d'un temps. Du coup, il préfère changer de sujet, être sur un terrain moins glissant et surtout qui ne tourne pas complètement autour de sa personne. « Et toi du coup, l'Australie, tu aimes ? Pas trop dur le changement de température ? » parce que lui savait que ça pouvait être surprenant de passer d'un hémisphère à l'autre, les saisons y étaient inversé après tout, si elle venait de France, elle passait de l'été à l'hiver australien.
« Et toi du coup, l'Australie, tu aimes ? Pas trop dur le changement de température ? » C’est vrai qu’ici, c’est bien différent. Peut-être est-ce l’hiver australien qui me fatigue davantage, même si je dois avouer que j’ai connu bien plus frais, comme saison. Si j’aime l’Australie… La nation d’une partie de mes ancêtres et de ma famille actuelle, l’endroit que j’ai choisi comme pays d’adoption… J’ai une relation particulière à ce pays, je m’y sens peut-être moins perdue qu’ailleurs. J’ai trouvé du travail rapidement, et je sens que je prends mes repères petit à petit. « Je n’ai pas beaucoup voyagé à l’intérieur de l’Australie, mais je me sens bien à Brisbane. J’y étais déjà allée en vacances, plus jeune. Il fait frais, mais ça va. » Je lui souris : ça fait bizarre de faire un petit bilan si rapidement après mon arrivée, j’ai le sentiment d’être encore en train de m’installer, d’évoluer par moi-même. Encore en train de me faire des connaissances ici, d’ailleurs, et je trouve ça important pour ma qualité de vie ; je déteste la solitude donc même si je ne suis pas très expansive je fais un effort. J’observe les deux hommes se chamailler, un sourire aux lèvres. Il y a des choses qui ne changent pas, peu importe où nous nous trouvons. Nous sommes humains avant tout. Le serveur revient avec nos boissons, et je bois une bonne partie de mon Coca rapidement, j’avais soif et les petites bulles sont très agréables. Je vide environ la moitié de mon verre, puis je reporte mon attention sur mes interlocuteurs. Je trouve que nous sommes bien ensemble, et le temps passe vite. Je regarde mon portable pour vérifier que je n’ai pas de message (en France ma famille est en pleine journée), et je m’étonne de voir que tellement de temps s’est écoulé depuis que nous avons quitté le Canvas. Bon, je ne vais pas tarder à filer, sinon je le regretterai demain… Je laisse Liam et Icare discuter ensemble, rigolant de temps à autre de leurs pitreries, tout en finissant ma boisson fraîche. « Bon les garçons… Merci de l’invitation, mais je vais rentrer maintenant, il se fait tard. Il faut encore que je rentre chez moi. » A leurs têtes, je suppose qu’ils ne vont pas partir de suite. Après tout, ça fait partie des conséquences de mon traitement, la fatigue… Et même sans ça, je pense que je ne serais pas une couche tard de toute façon. Je me lève en prenant mes affaires, et me rends à l’intérieur pour payer les trois boissons que nous avons consommées ensemble, avec une partie du bon pourboire de ce soir. Au moins, ça nous a profité à tous les trois, ils ont travaillé aussi dur que moi. De l’intérieur, j’adresse un clin d’œil aux garçons, pour leur signifier que tout va bien. Après avoir réglé la note, je ressors et leur dit au revoir avant de me mettre en route. « C’était très sympa, on se refera ça si vous voulez ! Au plaisir de vous revoir au boulot. »
Je me mets en marche vers chez moi, avec le sentiment d'avoir passé une bonne soirée... Je n'oublierai pas Icare et Liam, c'est clair !
« Je n’ai pas beaucoup voyagé à l’intérieur de l’Australie, mais je me sens bien à Brisbane. J’y étais déjà allée en vacances, plus jeune. Il fait frais, mais ça va. » Icare pouvait comprendre, elle venait juste d'arriver après tout. Il lui offrit un sourire compréhensif. « Si tu vis ici, tu auras le temps de découvrir plus de pays bientôt » finit-il par conclure sans trop de problème.
Ils finirent par recevoir leurs verres, les garçons... chahutaient, évidemment, ils s'entendaient bien et ils avaient établi une certaine amitié tout relative. Icare aimait trainer avec Liam de plus en plus, et l'idée qu'une troisième personne se rajoute à leur petit groupe lui convenait encore assez bien. Plus on est de fou, plus on rit, disait la maxime après tout. « Bon les garçons… Merci de l’invitation, mais je vais rentrer maintenant, il se fait tard. Il faut encore que je rentre chez moi. » Icare cligne des yeux avant de vérifier l'heure sur son téléphone, effectivement, un petit moment s'était déjà écoulé depuis leur sortie du Canvas. « Okay, bon retour, fais attention à toi ! » préconisa alors Icare sans hésitation. Mais n'ayant pas envie pour autant d'en faire de même, il était insomniaque, dormir aussi tôt n'était jamais une éventualité pour lui. Il vit Nathanaëlle aller au bar pour payer les consommations et Icare fronça un peu les sourcils, quand la blonde revint à leur table, c'était pour définitivement tirée sa révérence. « C’était très sympa, on se refera ça si vous voulez ! Au plaisir de vous revoir au boulot. » « La prochaine fois, les verres c'est pour nous ! » préconisa alors le brun sans hésitation. « On se reverra vite de toute façon ! » lui fit-il un clin d’œil. Lorsqu'elle partit, Icare se tourna vers Liam. « Partie de fléchette ? » son collègue sourit tout en levant son verre à cette invitation. Icare alla s'installer devant la machine. Cette soirée et rencontre avec Nathanaëlle restait positive à son sens.
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