Adriana est en retard, comme souvent. La ponctualité est loin d’être son fort, la brunette se laissant régulièrement débordée par son travail. Elle ne rechigne pas sur les heures supplémentaires, et fait de son mieux pour accomplir toutes les missions qu’on lui confie. Son métier lui tient vraiment à cœur, et aider et défendre son prochain est une vocation. La mexicaine hâte le pas jusqu’au parking, enfourche sa moto et prend la direction du centre-ville. Elle se gare quelques minutes plus tard devant un studio de danse, et court dans les couloirs à la recherche de la bonne salle. Elle déboule finalement en trombe dans une pièce assez grande, dont plusieurs murs sont entièrement recouverts de miroirs. Son arrivée est loin d’être discrète, et vu le regard que lui lance la prof, elle doit interrompre son speech. Adriana esquisse un sourire angélique et pose son casque et son sac sur un banc.
« Désolée. »
La prof lève les yeux au ciel et va chercher sa liste de participants.
« Je suppose que vous vous êtes bien inscrite à ce cours d’initiation ? »
La brunette se retient d’exploser de rire : elle l’entend, le désir à peine caché dans sa question, alors que la danseuse espère qu’Adriana ne s’est pas inscrite en amont et qu’elle pourra faire partir cette intruse qui la dérange. Avec toute la maladresse qui peut la caractériser, et un manque certain de grâce, la brunette vacille en troquant ses bottines plates pour des escarpins réservés aux cours de danse, se rattrapant de justesse au mur. Elle adresse ensuite un sourire satisfait à la prof.
« Oui, Adriana Castillo. »
Elle rejoint le reste des élèves en se plaçant à côté d’Iris, lui adressant un clin d’œil amusé avant de hausser les épaules d’un air désolé. Sa sœur a l’habitude de ses retards, de ses gaffes, et n’a sans doute pas cru que la jeune femme aurait pu la planter là. Ce n’est pas son genre. La professeure, pendant ce temps, pince les lèvres, repose sa liste et reprend son petit monologue.
« Bien, je disais donc, bienvenue à ce cours d’initiation au rock. Vous allez d’abord vous mettre en libre pour que je vous montre les pas de base, puis on se mettra deux par … »
Elle se fait interrompre par la sonnerie d’un téléphone et cette fois-ci, Ade rougit légèrement en allant éteindre l’appareil et l’enfouir profondément dans son sac.
« Désolée … »
Elle fait la grimace en se replaçant à côté de sa sœur, tentant de prendre un air innocent, en battant des cils en direction de la prof.
« C’était le boulot. Une info pour une de mes affaires. Je passerai p't'être faire un saut après le cours. »
La brunette hausse les épaules et se place en ligne, écoutant d’une oreille les explications de la prof tout en essayant de reproduire ses pas. Elle sait que ce n'est pas urgent. Le cas échéant, elle serait partie immédiatement. Et pourtant, elle consacre tellement de temps à son job qu'elle y retournera bien volontiers après le cours avec Iris, voire après quelques verres (dont un seul avec alcool, évidemment).
« Ca va toi ? », qu’elle demande à sa sœur, comme pour changer de sujet.
25 mars 2022 Ce n’est évidemment pas Adriana qui a proposé un cours de danse à sa sœur ainée. C’est plutôt l’inverse, et comme Iris connait suffisamment sa petite sœur, elle avait bien prévu le coup et lui avait pourtant indiqué une heure bien plus tôt que celle normalement prévu pour le début de ce cours de danse rock auquel elle les a inscrites. Mais visiblement, l’heure indiquée n’était pas suffisante pour parvenir à faire arriver sa sœur, si ce n’est en avance, au moins pile poil à l’heure. D’ailleurs, elle peste un peu dans sa barbe la Castillo quand elle sent que le cours est sur le point de commencer et qu’Adriana n’est toujours pas là. C’est d’un air résigné qu’Iris se met en place et que le cours commence par les explications de la professeur « Désolée. » Tous les regards se tournent alors sur l’inconnue – pour eux, pas pour Iris qui la reconnait immédiatement, ne serait ce que par l’unique son de sa voix – qui tente de passer – en vain – inaperçu. « Je suppose que vous vous êtes bien inscrite à ce cours d’initiation ? » « Oui, Adriana Castillo. ». Et c’est l’esquisse d’un sourire que tente d’adopter Iris alors qu’elle préférerait sûrement se cacher au fond d’un trou plutôt que d’être repérée du coin de l’œil de la part de la professeur, qui comprend rapidement le lien de parenté entre les deux. « Bien, je disais donc, bienvenue à ce cours d’initiation au rock. Vous allez d’abord vous mettre en libre pour que je vous montre les pas de base, puis on se mettra deux par … » « Dios mio, Ade ! » murmure entre ses dents Iris, désespérée alors que le téléphone portable de sa petite sœur se met à sonner « Désolée … » Et voilà qu’elle répond au téléphone en plus ce qui ne manque pas d’exaspérer Iris qui finit par s’excuser à son tour « Veuillez l’excuser… » Elle grimace, souriant par la même occasion dans l’espoir que cela sera suffisant pour convaincre la prof de ne pas la mettre à la porte. Ce qu’en soit, Iris comprendrait et Adriana aurait droit à un savon de la part de son ainée par-dessus le marché. « C’était le boulot. Une info pour une de mes affaires. Je passerai p't'être faire un saut après le cours. » « Tu peux pas décrocher un peu ? Après ça, on a des enchiladas qui nous attende à la maison… Et malgré son sérieux, un sourire se dessine sur le coin de ses lèvres accompagné d’un petit air malicieux enfin vu le remue-ménage que tu viens de créer, je suis pas sûre que tu les mérites » c’est un clin d’œil qu’elle lui lance avant de se concentrer sur les instructions de la professeur, tentant au mieux de répondre à ses exigences. Les pas sont lents pour le moment, mais le but, à la fin de cette heure de cours, est évidemment d’exécuter tout ça d’un pas rapide… et à deux « Ca va toi ? » « Bien sûr que ça va ! ». Trop soudaine comme réponse ? Surement au point même de se faire repérer par la prof auprès de qui elle s’excuse. Iris attrape alors aussitôt les mains de sa sœur, ne lui laissant pas l’occasion de réagir, puis l’oblige à se concentrer sur l’exécution des pas. « C’est quoi cette affaire qui presse tant et qui te fait arriver en retard ? » C’est plus fort qu’elles, les deux sœurs sont incapables de ne pas discuter, tout en faisant attention de le faire le plus discrètement possible, en exécutant leur pas de danse. « C’est par le pied gauche qu’il faut que tu commences » lui dit-t-elle alors que la professeur les regarde et qu’elle donne un coup discret à sa petite sœur pour qu’elle se corrige aussitôt.
Adriana est en retard, comme trop souvent, obnubilée par son job, ne comptant pas les heures supplémentaires. Elle s’excuse auprès de la prof et se glisse aux côtés de sa sœur après avoir enfilé ses escarpins.
« Dios moi, Ade ! »
La brunette adresse à sa sœur un regard innocent, battant des cils pour parfaire son air angélique. Elle sait que Iris est gênée et agacée, mais elle sait aussi que sa sœur ne lui en voudra pas bien longtemps … à moins qu’elles ne fassent jeter du cours, puisque c’est maintenant la sonnerie du téléphone d’Adriana qui interrompt la prof.
« Veuillez l’excuser … »
Ade aussi est gênée, pour être honnête, mais le fait que sa sœur s’excuse ainsi pour elle devant une vieille femme à l’air austère l’agace, et la voilà qui lève les yeux au ciel tout en éteignant son téléphone portable. Elle rejoint ensuite sa sœur, en ligne avec les autres participants, tentant de reproduire les premiers pas de danse que leur montre l’enseignante.
« Tu peux pas décrocher un peu ? Après ça, on a des enchiladas qui nous attendent à la maison … »
Le regard de la brunette s’illumine alors qu’elle fait mine de se lécher les lèvres.
« C’est toi qui les a préparés ? »
Mais sa sœur enchaîne déjà.
« Enfin vu le remue-ménage que tu viens de créer, je suis pas sûre que tu les mérites. »
Une nouvelle fois, Ade montre son visage le plus innocent à sa sœur qui déjà lui adresse un clin d’œil. Elle n’est pas fâchée, et la brunette est assez soulagée pour se concentrer sur le cours, un sourire aux lèvres. Elle se promet d’être sage pour la prochaine heure, sait à quel point Iris adore la danse et voulait participer à cette initiation. Elle ne peut pour autant pas s’empêcher de bavarder, et dévisage sa sœur d’un air circonspect quand celle-ci affirme qu’elle va bien, un peu trop rapidement, et un peu trop fort. Les sourcils de la brunette se froncent.
« Hum ? C’est quand déjà que Caelan sort ? »
Sous-entendu, de prison, mais elle n’ira pas au bout de sa question de peur de s’attirer un regard chargé de lourds reproches de la part de sa sœur. Pourtant, comme à son habitude, Adriana n’y va pas par quatre chemins et met sans hésiter les pieds dans le plat. La jeune femme n’est pas réellement connue pour sa subtilité ou pour des détours inutiles. Elle s’encombre rarement des formes, et encore moins avec sa sœur.
« C’est quoi cette affaire qui presse tant et qui te fait arriver en retard ? »
Adriana hausse les épaules en plongeant son regard dans celui de sa sœur. Elle ne peut pas lui en dire trop, ne veut pas lui en dire trop. Déjà, à cause du secret de l’enquête, ensuite, car même si Iris est sa grande sœur, elle aimerait la protéger de ce monde parfois si horrible dans lequel elles évoluent. Alors elle sourit et fait un petit signe de la main.
« Bah, rien d’important, tu as raison. Ca attendra demain. »
Sa sœur lui donne un petit coup en la grondant doucement.
« C’est par le pied gauche qu’il faut que tu commences. » « Aïe ! »
Elle surprend à son tour le regard de la prof et lui adresse un sourire enjôleur, se concentrant sur les pas qu’on essaie de leur apprendre.
« Tu fréquentes toujours ce médecin ? C’est quoi son nom déjà ? »
Un sourire illumine le visage de la brunette alors qu’elle a trouvé.
« Aiden, c’est ça ! Ca donne quoi ? »
Non, décidément, Adriana n’est pas connue pour sa subtilité.
25 mars 2022 « C’est toi qui les a préparés ? » Elle ose vraiment demander ça à sa sœur ? Quand elle n’a de cesse de lui réclamer toutes sortes de petits plats dès qu’elle en a l’occasion, en sachant pertinemment que son ainée cédera à tous ses caprices « Evidemment, tonta » dit-t-elle en roulant des yeux avant de reporter son attention sur le cours, bien qu’elle glisse aussi en commentaire que sa sœur ne les mérite pas, au vu de son comportement. En effet, Iris a l’impression que tout le monde a les yeux rivés sur elle deux, tant l’arrivée – et la présence – d’Adriana n’est pas passée inaperçu.
Elle est sa sœur cadette et elle fera toujours tout pour camoufler au mieux quand quelque chose ne va pas. C’est une façon pour elle de la protéger, de la préserver de ses problèmes, une façon aussi de jouer le rôle de la grande sœur modèle qui montre toujours l’exemple. Alors, oui quand Adriana lui demande comment elle va, elle préfère mentir Iris. Sauf que le mensonge ne semble pas prendre « Hum ? C’est quand déjà que Caelan sort ? » C’est un regard noir qu’elle lui lance « Pourquoi tu me poses cette question ? » Oh, en réalité, elle le sait Iris, sa sœur n’est tout simplement pas dupe « Il est déjà sorti… Il y a dix jours… ». Elle n’en dirait pas plus. Elle estime de toute façon que le moment est très mal choisi pour en parler. Alors, comme pour recentrer la conversation sur autre chose – et peut-être se venger un tant soit peu de la question que sa sœur a pu lui poser – elle lui demande en retour en quoi consistait l’appel qu’elle a reçu plus tôt « Bah, rien d’important, tu as raison. Ca attendra demain. » Iris acquiesce, non sans un sourire en coin et ne cherche pas à en savoir davantage, consciente que le métier qu’exerce sa sœur est un de ceux où elle ne peut pas discuter comme bon lui semble des affaires en cours.
Les deux jeunes femmes doivent désormais danser à deux et Iris ne manque pas de corriger sa sœur qui se trompe de pied « Aïe ! » « Oh arrêtes de faire l’enfant ! » fait-t-elle en l’incitant à reculer et à se calquer sur ses pas. « Tu fréquentes toujours ce médecin ? C’est quoi son nom déjà ? (…) Aiden, c’est ça ! Ca donne quoi ? » Qu’est-ce qu’elle l’agace ce soir « Ade’, on est pas là pour faire la discussion, tu viens bien te concentrer un peu ? On va finir par se faire virer du cours ! » C’est qu’elle lui fait même les gros yeux pour inciter sa sœur à se taire une bonne fois pour toute. Et comme si elle se doutait que cela ne serait pas suffisant pour dissuader sa sœur, elle laisse échapper un soupir « Si tu te tiens correctement à partir de maintenant et ça jusqu’à la fin du cours, je te raconterai ça » Elle utilise le chantage, mais Ade est, aux yeux d’Iris, et surtout avec Iris, une enfant. D’où le fait qu’elle la traitre encore de la sorte et elle sait aussi que cela fonctionnera.
Justement, le cours touche progressivement à sa fin. Les deux sœurs sont d’ailleurs assez habiles de leurs mouvements et ce sont même elles qui finissent par être applaudis à la fois par tous les participants que par leur enseignante du soir qui semble bien moins crispée qu’au début du cours. Elle vient même à les féliciter et voilà que Adriana et Iris sont désormais en train de se revêtir pour prendre la sortie de la salle de classe « Ca t’a plu ? Je suis fière de toi, en tout cas, tu t’en est très bien sorti elle marque une pause en levant un doigt puis un suivant en l’air ET tu as été sage. Donc, tu auras droit à mes enchilladas ». Ce n’était pas que la partie du deal, elle le sait Iris, tout comme elle sait qu’Adriana ne manquera pas de lui rappeler. Elles se dirigent vers leurs voitures respectives « Tu restes avec moi cette nuit ? On en profite pour se faire une soirée entre filles levant les yeux au ciel, la voyant venir de loin, elle ajoute et oui, promis, je te parlerai d’Aiden ». Iris s’apprête à se diriger vers sa voiture mais se rend compte que sa sœur tarde un peu à monter dans la sienne « On peut y aller ou tu as encore égaré tes clés ? ».
« Evidemment, tonta », que lui répond sa sœur quand elle lui demande si c’est elle qui a cuisiné.
Adriana rit, en essayant de le faire le plus discrètement possible, sans réussir à éviter de s’attirer un nouveau regard noir de la professeure de danse. Evidemment, que Iris avait cuisiné. Iris était un cordon bleu, et il arrivait régulièrement que sa petite sœur reparte de chez elle avec des bons petits plats, ne pouvant se nourrir exclusivement de soupes et de pancakes. La brunette interroge sa sœur, prend de ses nouvelles, et la réponse de l’aînée est trop rapide, trop lacunaire, pour ne pas attirer l’attention de la jeune Castillo. Quelque chose cloche, c’est évident, et il lui faut peu de temps pour se souvenir que Caelan ne devrait pas tarder à être libéré de prison, ou devrait avoir été libéré récemment.
« Pourquoi tu me poses cette question ? »
Ade dévisage sa sœur, plongeant ses yeux noisette dans les siens, lui adressant son fameux regard qui dit : je sais que tu sais que je sais, alors inutile de jouer les innocentes ou de prétendre ne pas savoir de quoi il en retourne.
« Il est déjà sorti … Il y a dix jours … »
Un petit sourire victorieux illumine le visage d’Adriana, alors qu’elle a l’impression d’avoir visé dans le mille. Elle tente de le dissimuler en tentant de reproduire les pas montrés par la prof, feignant d’être concentrée. Elle laisse passer quelques secondes avant de demander d’une voix décontractée.
« Hum hum, et … tu l’as revu ? »
Elle ne peut s’empêcher une remarque, sans doute celle de trop, alors qu’elle observe sa sœur avec un sourire amusé.
« C’est vrai ce qu’on dit sur les mecs qui sortent de prison ? Ils sont chauds comme la braise ? »
Elle la taquine, évidemment, mais ne peut s’empêcher de laisser échapper un rire qui lui vaut un « chuuut » agacé de la professeure. Pourtant, Ade a du mal à se concentrer, et elle a encore plein de questions à poser à sa sœur, alors qu’elle continue à l’interroger.
« Ade, on est pas là pour faire la discussion, tu veux bien te concentrer un peu ? On va finir par se faire virer du cours ! »
La brunette fait la moue et rentre les épaules sous les remarques de sa sœur. Pourtant, son visage s’illumine à nouveau quand son aînée ajoute.
« Si tu te tiens correctement à partir de maintenant et ce jusqu’à la fin du cours, je te raconterai ça. »
Ade lui adresse un clin d’œil, alors qu’elle a presque l’impression d’entendre leur mère.
« A vos ordres, mon général ! »
Et elle fait mine de fermer sa bouche à clés et de jeter la clé. Le cours se déroule ensuite sans nouvelle interruption et, en prêtant attention aux conseils de la prof, Ade y prend beaucoup de plaisirs. Ce n’était qu’une initiation, mais elle se laisserait bien tenter par des cours supplémentaires. Les applaudissements qui clôturent leur démonstration lui font dire que la prof accepterait même de les revoir, d’ici quelques semaines, quand elle aurait oublié les premières minutes désastreuses.
« Ca t’a plu ? Je suis fière de toi, en tout cas, tu t’en es très bien sortie, ET tu as été sage. Donc tu auras droit à mes enchiladas. »
Cette fois-ci, Ade ne peut s’empêcher de lever les yeux au ciel, alors qu’un petit sourire flotte tout de même sur son visage.
« Iris … c’est pas parce que tu vas bientôt entrer dans la décrépitude de la quarantaine que tu dois me traiter comme une enfant. Je t’assure, tu as encore un peu de temps avant de te transformer en mamie. »
Elle la taquine, lui pose une main rassurante pour accentuer son propos, mais elle est tout de même agacée d’être traitée comme une gamine par Iris. Elle comprenait que leur mère les traite toujours comme des enfants, mais pas sa sœur. Elle était une adulte, avait un job, un logement et, si elle ne savait pas cuisiner, elle savait tout de même comment gérer sa vie sans avoir besoin de l’aide de personne.
« Tu restes avec moi cette nuit ? On en profite pour se faire une soirée entre filles. Et oui, promis, je te parlerai d’Aiden. »
Ade éclate de rire et suit son aînée sur le parking.
« Si tu me prêtes un pyjama moins laid que la dernière fois, ça marche. »
Alors qu’Iris monte dans sa voiture, c’est à son tour de taquiner sa petite sœur.
« On peut y aller ou tu as encore égaré tes clés ? »
Adriana laisse échapper un rire et sort ses clés de son sac, victorieuse. Elle enfourche sa moto, enfile son casque et fait rugir son moteur.
« On se retrouve chez toi ? »
Et la voilà déjà partie en direction du logement d’Iris. Moins d’une heure plus tard, Adriana pose ses couverts sur son assiette, repue. Elle tend à nouveau son verre de vin à Iris pour être resservie, et attaque sa tarder le vif du sujet.
« Alors, on commence par lequel : Caelan ou Aiden ? »
Un sourire amusé danse sur ses lèvres alors qu’elle tente de le dissimuler en buvant une nouvelle gorgée de vin.
25 mars 2022 Iris aurait dû s’en douter. Un cours pareil avec sa sœur cadette était tout bonnement impossible à suivre. Bien trop pipelette, bien trop curieuse, la prochaine fois, soit elle se retiendrait de lui proposer de se joindre à elle, soit elle prévoirait un temps avant le début du cours pour pouvoir parler potins, et ainsi obtenir la concentration de sa sœur. Parce que, même quand elle a l’impression qu’elle se calme et qu’elle a enfin compris qu’elles n’étaient pas là pour papoter – surtout qu’elles en auraient largement le loisir après ça – voilà qu’Adriana revient au galop « Hum hum, et … tu l’as revu ? » Evidemment qu’elle allait lui poser cette question, Iris ne dissimulant pas son air ennuyé « C’est vrai ce qu’on dit sur les mecs qui sortent de prison ? Ils sont chauds comme la braise ? » « Adri ! » et voilà que sa sœur se met à rire, non seulement par sa propre question mais très certainement aussi par l’air outré adopté par son ainée. Iris la fusille du regard alors que la professeur la somme d’un chut qui incite la mexicaine a en rajouter une couche, lui demandant de se concentrer d’un air sévère avant de lui promettre que, si elle se tient à carreau, elle aura toutes les réponses à ses questions, ce qui fait renaitre un sourire sur le visage – presque – angélique de sa cadette « A vos ordres, mon général ! » Encore une fois, Iris tourne doucement la tête de droite à gauche, levant les yeux au ciel sans pour autant avoir ce petit sourire qui vient fendre le coin de ses lèvres.
Le cours est terminé et Iris ne manque pas de féliciter sa sœur, lui disant alors qu’elle allait avoir droit à ses fameuses enchiladas. « Iris … c’est pas parce que tu vas bientôt entrer dans la décrépitude de la quarantaine que tu dois me traiter comme une enfant. Je t’assure, tu as encore un peu de temps avant de te transformer en mamie. » La main que sa sœur pose sur son épaule est tout de suite chassée par celle d’Iris, vexée par ses propos « Tu es une enfant, Adriana et elle prononce le prénom de sa sœur à la manière espagnole, et non pas habituelle et je suis bien loin de la quarantaine, merci de ne pas me vieillir bien plus que je ne vieillis déjà » Elle la bouscule légèrement de l’épaule, après l’avoir à nouveau fusillée du regard, se saississant de ses affaires et de sa cadette, au passage, qu’elle entraîne hors de la salle, lui proposant une soirée entre filles, chez elle « Si tu me prêtes un pyjama moins laid que la dernière fois, ça marche. » « Ne compte pas dessus » ne peut s’empêcher de répliquer du tac au tac Iris, non sans laisser échapper un rire. « On se retrouve chez toi ? » Sa sœur, installée sur sa moto – ce qui ne réjouit guère Iris, surtout quand elle marque une accélération exagérée – la jeune femme acquiesce alors « Oui… et sois prudente » c’est plus fort qu’elle, elle reste sa petite sœur et a ce besoin constant de la protéger. Et bien que cela ne plaise guère à la principale concernée, cela n’empêchera pas Iris de continuer à le faire.
***
Les deux sœurs sont installées à table. La conversation a été plutôt légère entre elles tout le long du repas, surtout concentrées à déguster les enchiladas, après ce cours qui a clairement ouvert leur appétit. Désormais bien rassasiées, voilà que Adriana revient à la charge alors qu’Iris avait espéré qu’elle aurait oublié les détails qu’elle lui devait à propos d’Aiden et Caelan « Alors, on commence par lequel : Caelan ou Aiden ? » Iris soupire alors qu’elle repose la bouteille de vin – n’ayant pas pris la peine de se resservir elle, quand elle n’a même pas fini son propre verre, l’alcool et elle, faisant clairement deux – et se lève à la place pour débarrasser la table « Whatever ». Dire qu’elle ne tente pas de fuir à cet instant, si ce n’est la conversation, mais au moins le regard que sa sœur peut poser sur elle, serait un mensonge. Et alors qu’elle délaisse les assiettes dans l’évier, elle prend appui sur le plan de travail, tournant le dos à celui-ci pour faire face malgré tout à sa cadette « J’ai eu le courage d’aller rendre visite à Caelan… en début de semaine amorce-t-elle, choisissant donc le sujet plus houleux de son ex-mari en premier « Il… la prison l’a beaucoup marqué… physiquement parlant elle visualise à nouveau la silhouette de son ex-mari, son regard trouvant le sol « moralement aussi… c’est certain, même si Caelan restera toujours Caelan, parce qu’il ne s’est évidemment pas éternisé sur le sujet. Il dit ne pas m’en vouloir concernant le fait que je ne lui ai pas rendu visite… mais j’en doute. Et en même temps, je ne peux pas le blâmer si c’est réellement le cas » On sent les regrets dans sa voix, la tristesse aussi et pourtant, elle trouve le courage de s’avancer pour rejoindre sa sœur à nouveau à table, se laissant tomber sur sa chaise, attrapant au passage son verre de vin « Je lui ai promis que je serai là pour lui, maintenant mais je ne sais pas s’il m’en laissera l’opportunité » Est-ce qu’Adriana peut voir, à travers l’expression qu’adopte sa sœur, malgré cette grimace qui vient à tordre ses traits après avoir ingurgité une gorgée de vin, à quel point cette dernière est perdue ? Perdue entre la culpabilité, celle d’être avec un autre alors que Caelan était en prison mais aussi la culpabilité de ne pas être honnête envers Aiden quand elle a l’impression d’être avec lui pour les mauvaises raisons, et ses sentiments pour l’un et pour l’autre. « On rangera demain matin. On va dans le canapé ? » fait-t-elle alors soudainement, allant chercher quelques sucreries avec lesquelles elles pourront s’empiffrer, avant de prendre la direction du salon avec sa petite sœur.