try better next time
Laila Ferrer & @Kieran Halstead (crédit gif/belgiane)

Février 2015/Elle terminait toujours ici ; le nez plongé dans une pinte ou dans un goulot dégoulinant de condensation, les pensées tournées vers tout et rien à la fois. Laila, elle avait tout pour être heureuse depuis quelques temps. Sa formation de mécanicienne automobile lui assurait enfin de prendre la relève de son oncle sereinement, ne se basant plus uniquement sur ses connaissances, mais sur une pratique qu’elle avait amélioré en ne boudant pas les stages et les remplacaments, tandis qu’elle avait mis des années à se considérer digne de cet héritage qu’elle partageait désormais avec un partenaire digne de ce nom, choisi par les soins délicats d’Andrea. Elle s’entendait bien avec Ezra, la collaboration était aussi douce qu’elle était grisante à certain moment. Elle en avait rêvé une bonne partie de son adolescence, et même après enfin avoir obtenu ce qu’elle désirait, il lui manquait toujours quelque chose. Elle savait exactement quoi, et si elle s’obstinait à ne pas vouloir combler ce vide qu’elle ressentait là, au creux de son abdomen, elle avait bien du mal à se dire qu’à terme, ce serait vivable de camper sur des souvenirs autant que sur des regrets. Elle en avait des tas, c’était peut-être pour cette raison que c’était si difficile pour elle de se sentir comblée quand elle voyait son entourage s’étoffer au fur et à mesure que le temps passait et qu’elle restait seule, à alimenter une histoire terminée depuis des années désormais. Dania lui rappelait souvent qu’elle devait tourner la page, qu’elle avait pris la bonne décision ; Laila lui rappelait que ce n’était pas le cas, et que de toute façon, ce n’était même pas elle qui l’avait prise, cette décision. Ce n’était pas toujours facile, mais il fallait continuer à vivre avec, et l’alcool, aussi toxique était-elle, ça l’aidait souvent à remettre les choses en perspective. Une perspective bancale, parfois un peu vacillante, qui l’empêchait de se morfondre de trop sur ce qui l’empêchait de dormir la nuit cependant.

Elle releva la tête quand elle arriva près du bar, ce soir-là, et tapota immédiatement sur le comptoir pour attirer l’attention du barman qui lu fit un clin d’œil un air de dire comme d’habitude, mon cœur ? Elle confirma d’un signe de tête pour mieux rester là, les avant-bras posés sur le bord du comptoir, à sourire en se délectant de l’ambiance de la soirée, aussi animée qu’elle l’empêcherait de s’enfoncer trop fort dans ses réflexions.
Doucement, ses yeux firent la focale sur le jeune homme qui était assis à ses côtés quand, tournant la tête pour regarder de l’autre côté, elle fronça les sourcils pour se souvenir l’avoir déjà vu plusieurs fois ici. S’il n’avait pas l’air patibulaire, il lui donnait pourtant l’impression de ne pas être à sa place alors qu’elle avait vu quelques jeunes femmes l’approcher, quelques jeunes hommes aussi, pour finalement faire le chemin inverse et le laisser à ses équipées silencieuses, lui qui paraissait déconnecté du monde qui l’entourait. Attendant sa bière, un sourire naquit au coin de ses lèvres lorsqu’elle se pencha légèrement sur lui pour lui demander, sans doute un peu trop bas pour qui l’entende dans le vacarme environnant "Qu’est-ce que ça donne ce soir ?" Elle ajouta la lueur taquine qui brillait dans ses yeux à son interrogation, relevant la tête en même temps que lui lorsqu’elle se redressa toute entière, opinant du chef pour lui expliquer avec bonhommie "C’est pas la première fois que je te vois ici." Comme si ça expliquait tout, comme si ça pouvait justifier qu’elle se montre si aventureuse à l’idée d’adresser la parole à quelqu’un qu’elle ne connaissait que de vue. D’habitude, Laila n’était pas plus hardie que le jeune homme à qui elle renvoya un regard qu’elle détourna finalement en fronçant le haut de son nez, s’intéressant à la bouteille de bière qu’elle prit entre ses doigts. A cette époque-là, elle n’écumait pas encore les bars pour repartir bien accompagnée, elle les écumait dans l’espoir de noyer son chagrin — ce qu’elle fit sans demander son reste, buvant une grande rasade de boisson qui s’écoula doucereusement dans sa gorge, ses yeux bruns se posant de nouveau, et de biais, vers le jeune homme à ses côtés.

@"LAILA FERRER" & KIERAN HALSTEAD ⊹⊹⊹ try better next time, wake up, wake up. so, you know me, understand me, is that what you think?

(FLASHBACK). Il avait complimenté sa mâchoire. Sa mâchoire. De toutes les parties du corps qu’il aurait pu flatter il avait choisi la plus absurde de toutes, avant de se confondre en excuses à l’idée de lui avoir donné l’impression de s’intéresser qu’à son physique. Kieran s’était ensuite perdu dans un monologue qui a duré bien trop longtemps et dont il aurait préféré ne plus se souvenir, mais dont chaque mot se répétait en boucle dans son esprit pour accentuer toujours un peu plus la honte ressentie au moment de se rattraper auprès de cette Chiara. Il était quasiment certain d’avoir parlé de ses intestins au moment où il voulait lui assurer qu’elle était sûrement aussi belle à l’intérieur qu’elle ne l’était à l’extérieur et qu’il parlait bien de sa personnalité et non de ses organes. La tentative de plaisanterie n’avait pas reçu l’accueil escompté et le regard qu’elle lui avait lancé avant de tourner les talons en silence valait toutes les paroles qu’elle aurait pu lui adresser pour marquer sa surprise, au mieux, ou son dégoût, au plus crédible. C’est cet échec responsable de la commande d’une troisième bière ; celle qui fait officiellement glisser sa consommation du soir de la catégorie « besoin de se donner du courage » à « besoin d’oublier la situation ». Le pluriel serait en réalité plus adapté compte tenu de la régularité de ses échecs depuis quelques semaines – proportionnel à la régularité de ses visites, s’il peut au moins se rassurer sur un point. C’est parce qu’il essaie désespérément de quitter une autre catégorie, celle des célibataires, qu’il accumule autant les calamités. Si elles étaient plutôt rares jusqu’ici, c’est qu’il s’était plus ou moins fait à l’idée d’être seul. Mais cette idée devient de plus en plus lourde à supporter maintenant qu’il touche au quart de siècle et que la situation lorgne plus du côté du pathétique que du surprenant. Et s’il n’était pas assez naïf pour croire qu’une seule visite au bar du coin lui permettrait de réguler les choses, il était néanmoins optimiste quant à la perspective de ne pas passer toutes ses soirées ici. Plusieurs semaines après la mise en place du plan d’attaque (passive, hm), force est de constater qu’il est officiellement devenu un habitué.

Il a repris place au comptoir, loin des duos et groupes qui se forment sur les tables hautes au milieu du bar. Au-delà de sa quête de dates, il recherche surtout un peu d’attention, Kieran. Il se contente de peu, en réalité, et c’est peut-être le plus triste dans cette histoire : ce n’est même pas de l’amour qu’il recherche. Juste la sensation d’être vu, l’envie de trouver un groupe avec lequel il pourra lui-aussi rire aux larmes et décompresser après une journée de boulot, sur lequel il pourra compter en toutes circonstances, qu’il pourra appeler à la hâte quand la solitude se fait aussi pesante qu’elle ne l’est actuellement. Un dernier regard de jalousie adressé à la foule, il se retourne pour détailler les bouteilles derrière le barman, anticipant le besoin de quelque chose de plus fort quand il aura terminé la bière qui, pour l’heure, a tout d’un jouet qu’il fait passer d’une main à l’autre pour se donner un peu de contenance.

Une courageuse s’essaie à l’approcher ; il devrait saisir cette opportunité alors qu’il est le plus souvent celui qui fait cet effort. Mais perturbé par les échanges catastrophiques dont il se sait capable et dont il a encore eu la preuve un peu plus tôt, le jeune homme tente de miser sur une autre stratégie ; mais ce côté laconique ne plaît guère à la blonde qui, elle-aussi, finit par faire demi-tour. Il pousse un soupir, conscient d’être le seul responsable de sa défaite alors qu’il porte la bière à ses lèvres et se maudit intérieurement. Personne ne l’a jamais averti que c’était aussi difficile, de flirter. Ça fait des semaines qu’il ne fait que croiser des silhouettes qui repartent aussitôt. Ridicule. "(...) ça donne ce soir ?" - « Pardon ? » Son attention est attirée par de vagues paroles dont il n’est pas certain d’en avoir saisi la totalité, alors que visage se tourne vers celle qui l’a interpellé. "C’est pas la première fois que je te vois ici." Et la réciproque s’applique. Une habituée, comme lui, qu’il a bien sûr remarqué (il faudrait être aveugle pour ne pas l’avoir fait), mais qu’il n’a jamais osé approcher pour des raisons évidentes. La totalité de ce bar est out of his league, mais elle est en tête de liste et le seul fait qu’elle lui adresse la parole ce soir a le don de le perturber – et il sent déjà qu’il perd la maîtrise de la teinte de ses joues. « Et je… je pense que tu vas encore me voir souvent, ah ah. » Il répond, tentant de ne pas trop perdre ses moyens alors qu’il balance doucement sa bière dans sa main pour appuyer le reste de ses propos : « Et pour ce soir, ça se voit, non ? C’est un succès fou... auprès du barman. » C’est mieux que rien et pour les mauvaises raisons, mais c’est déjà ça, n’est-ce pas ? Il aurait pu préciser qu’il compte rester fidèle à la seule qui accepte sa compagnie, sa bière, mais ça lui rendrait encore moins justice. « Et de ton côté ? » Il l’interroge, un peu hésitant, dans la crainte d’être intrusif, avant de préciser à son tour : « C’est pas la première fois que je te vois ici, moi aussi. » Bien sûr qu’il l’a déjà vue et bien sûr qu’il s’en souvient. Ce dont il n’est pas sûr, à l’inverse, c’est la raison pour laquelle elle-aussi semble être en marge de toute la foule qui festoie, fanfaronne et flirte autour d’eux.

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Laila Ferrer & @Kieran Halstead (crédit gif/belgiane)

Février 2015/Laila ne répéta pas sa question, sûre que dans ce genre de conjoncture, ce n’était pas utile de faire dans la politesse. Ce garçon était au mieux sourd comme un pot, au pire bourré comme un coing… dans les deux cas, les images étaient assez peu engageantes pour qu’elle se risque à s’humilier et à s’obstiner à se faire comprendre. Elle était championne dans le premier domaine, mais pas dans le second. En bonne lâche qu’elle était, les obstacles qui lui paraissaient insurmontables devaient le rester, c’était inscrit dans les écrits, et par conviction, plus que par idéologie, elle tenait à ce que ça reste ainsi.
Alors, elle lui adressa simplement un sourire, s’attendant à ce qu’il passe à autre chose comme elle faisait de même — et puis elle l’entendit rebondir sur sa deuxième invective que le haha qu’il prononça rendit évidente : il n’était pas à l’aise, elle non plus… ils s’étaient bien trouvés "Je vois qu’on vise les mêmes cibles. Attention, je peux mordre si je me rends compte qu’il te préfère." lui fit-elle en parlant un peu plus fort du coup, ne tenant pas à réitérer le bide d’il y avait quelque secondes à peine.

Elle leva brièvement la tête pour jeter un regard par-dessus son épaule, se rendant compte que la foule était dense et que le bruit le serait en conséquence. Elle ne comptait pas faire trop longtemps la causette avec le jeune homme, et d’ordinaire elle appréciait le bruit autant que la bonne musique, mais il y avait des moments où c’était bien aussi de s’en référer au silence. Ou pas. Souvent, elle venait ici pour noyer sa peine, c’était évident, mais aussi pour noyer ses pensées dans la multitude de voix, de cris et de rires qui faisaient partie intégrante du décor des bars de ce genre. Ce soir, c’était peut-être la première fois qu’elle regrettait cette ambiance, qu’elle regrettait aussi d’avoir un timing si mauvais qu’il l’avait fait agir en plein happy-hour "De mon… de mon côté ?" lui demanda-t-elle en essayant de déchiffrer ce qu’il lui disait, suivant le mouvement de ses lèvres en y jetant un œil rapide, répétant à sa suite en approchant de nouveau sa tête vers lui, la penchant pour qu’il se crée un aparté qui embaumait la bière et la gêne.
Qu’était-elle supposée répondre à ça ? Elle n’était pas là pour les mêmes raisons que lui visiblement, et ce n’était pas le juger que de le souligner. Elle l’avait déjà vu ici oui, quelques fois, chaque fois avec quelqu’un de différent à ses côtés, à se caler sur ce qu’il pensait être le plus approprié pour quoi, ne pas rentrer seul ? Elle aurait peut-être dû passer son tour, craignant soudainement qu’elle lui donnerait le mauvais signal quand sa seule velléité était de s’assommer pour trouver le sommeil plus rapidement. Elle décida d’être honnête — enfin relativement "Je te l’ai dit, je suis ici pour le barman." Dans un rire rocailleux, elle ajouta en rentrant la tête dans ses épaules, lui donnant l’âge qu’elle semblait ne pas avoir pourtant : seulement vingt-trois ans "Pour la bière en fait. Ne me juge pas trop, et je te promets de ne pas le faire de mon côté." Elle eut un autre rire en même temps qu’il lui renvoyait la balle, lui indiquant que lui aussi l’avait déjà vu ici. Elle opina par réflexe "C’est un bon bar." ponctua-t-elle, sentant ses jambes s’agiter, ses pieds posés sur les barreaux du tabouret sur lequel elle se glissa, sa bouteille de bière tenue entre ses mains pas très soignées, ses ongles irrégulièrement taillés, et ses bagues grossières lui faisant brusquement assez honte pour qu’elle les dissimula sous le comptoir, les posant sur ses genoux.
Il y eut un silence — entre eux du moins, puisqu’autour l’ambiance ne désemplissait pas, les allers et venus se faisant de plus en plus réguliers à mesure que les secondes s’égrainèrent, forçant Lali à réfléchir à toute vitesse pour relancer la conversation. Elle eut une idée, sans savoir si elle était bonne, ou même appropriée, compte tenu qu’ils venaient à peine de se rencontrer — d’engager la discussion serait plus correct d’ailleurs, comme ils se l’étaient avoués l’un à l’autre, ils s’étaient déjà croisés "Alors, c’était quoi le problème cette fois ?" Elle surprit son regard, explicita dans un léger rire qu’elle accompagna par un chuchotement rendu audible seulement parce, qu’encore une fois, elle se pencha sur lui pour reformuler "Avec celle de ce soir, c’était quoi le problème ?" Elle aurait tout aussi bien lui demander c’était quoi son problème, mais ça sous-entendait autre chose comme c’est quoi ton problème, et elle ne tenait pas à l’insulter. Au lieu de quoi, elle engagea sa première gorgée de bière fraîche, la savourant en continuant à faire danser sa jambe sous le comptoir, sa bougeotte ne semblant pas si facile à contenir.

S’il avait osé demander conseil autour de lui (ce qui aurait voulu dire assumer sa détresse sentimentale) pour déterminer de l’endroit le plus adapté pour tenter de rencontrer quelqu’un, il n’est pas certain qu’on lui aurait conseillé les bars et certainement pas celui-ci, encore moins durant l’happy hour. C’est comme s’il avait voulu cocher toutes les cases les unes après les autres pour s’assurer d’un succès mitigé et ainsi se dédouaner quant aux échecs qu’il essuie. Lui-même est conscient des désavantages du lieu, où les rencontres sont faussées par un taux d’alcoolémie parfois conséquent, par une ambiance qui appelle à des rapprochements éphémères alors que c’est très loin d’être ce qu’il recherche. Probablement trop fleur bleu pour trouver son bonheur ici, les bars ont néanmoins de rassurants qu’ils laissent une porte de sortie en cas de recalage option humiliation – autant pour lui que pour celle l’ayant éconduit. Il peut se faufiler dans la foule et disparaître sans demander son reste, ou opter pour la méthode vieille comme le monde (mais toujours pas socialement valorisée) qui consiste à noyer ses soucis dans l’alcool. D’une nature anxieuse ascendante totalement paniqué, il est certain qu’un échec durant un date prévu à l’avance aurait été bien plus difficile à assumer qu’une venue comme celle-ci où personne n’attend quelque chose de particulier. Ça ne rend pas le goût de ses fiascos moins amers, mais ça a le mérite d’être tout de suite moins de pression. Sauf quand ses exploits semblent documentés par une autre habituée, qu’il a aperçue sans jamais vraiment oser la regarder. "Je vois qu’on vise les mêmes cibles. Attention, je peux mordre si je me rends compte qu’il te préfère." Sa réflexion, somme toute humoristique, eut néanmoins le temps de le déstabiliser un instant alors qu’il se surprit à se demander s’il aimerait ça, avant de s’en vouloir aussitôt pour cette pensée qu’il juge particulièrement impure compte tenu du contexte. Ce n’est même pas qu’il se trompe sur ses attentions ou qu’il espère lui en inspirer de nouvelles, non. C’est seulement le genre de phrase totalement anodine qui ne fait que lui mettre le nez dans un domaine peu familier et sur lequel il s’interroge de plus en plus, parce qu’il s’agit-là d’une pression dont il n’arrive pas à se débarrasser. Honteux comme si elle avait le pouvoir de lire dans ses pensées, ce sont déjà des excuses qui défilent dans sa boîte crânienne (des fois qu’elle pourrait vraiment lire là-dedans, donc) alors qu’il bafouille avec le peu d’assurance qu’il possède (approximativement 0.0001%) : « Je-j’abdique... je pense pas pouvoir, euh, rivaliser avec toi. » Essayant de faire ressortir sa voix par-dessus le bruit ambiant, il n’est pas sûr d’y être parvenu malgré ses efforts. L’instant d’après, la possibilité d’avoir marmonné est vite effacée par la possibilité d’être un lourd qui la renvoie à son seul physique – promis, ce n’est pas ce qu’il voulait faire, il ne pensait même pas à celui-ci. Seulement, elle a l’air d’être bien plus assurée que lui et plus sociale par le seul fait de l’avoir abordé alors évidemment que le barman va la préférer à un mec aussi à l’aise qu’un carnivore au salon du tofu. Un instant, il envisage de se justifier et de s’excuser, avant qu’un nouvel éclat de rires d’un groupe derrière lui le restreigne : ils s’entendent à peine et elle n’aura probablement le droit qu’à la moitié de son laïus, ce qui lui donnera inévitablement envie de s’excuser à nouveau, de tenter de s’expliquer, avant d’être interrompu par le bruit et ainsi de suite. C’est pas une bonne idée, un peu comme toutes celles qu’il a enchaînées ce soir, mais cette fois-ci il a le mérite de s’arrêter à temps.

"De mon… de mon côté ?" L’hésitation dans ses expressions lui fait répéter ses mots dans un premier temps. « Oui, de ton côté ? » Il interroge, sa voix un peu plus portante, avant d’avoir la merveilleuse idée (on n’a pas dit qu’il allait totalement les oublier) de joindre le geste à la parole, en se désignant et cherchant rapidement la blonde qui a fui quelques instants plus tôt et qu’il désigne à son tour du doigt, avant que celui-ci ne montre la jeune femme face à lui. Il n’a jamais été doué pour s’exprimer et encore moins pour le mime, bon. "Je te l’ai dit, je suis ici pour le barman." Cette fois, c’est lui qui n’est pas certain d’avoir identifié tous les mots employés, alors qu’elle poursuit : "Pour la bière en fait. Ne me juge pas trop, et je te promets de ne pas le faire de mon côté." Kieran s’est légèrement approché par réflexe, saisissant au vol chacun de ses mots et esquissant un léger sourire amusé. « Promis. » Levant les deux paumes à hauteur de ses épaules pour prouver sa bonne foi, l’une de ses mains vient aussitôt jouer à nouveau avec sa bière dès que sa démonstration est terminée. "C’est un bon bar." Pinçant les lèvres, n’ayant pas d’avis sur la question, il s’attend à ce qu’elle vaque à nouveau à ses occupations ; après tout, pourquoi perdre son temps à discuter avec un type qui n’a pas vraiment l’air de savoir ce qu’il fout ici ? "Alors, c’était quoi le problème cette fois ?" Surpris par sa question autant que toujours dérangé par le bruit, c’est après qu’elle se soit penchée pour reformuler  "Avec celle de ce soir, c’était quoi le problème ?" qu’il entreprend de rapprocher légèrement son tabouret du sien. Assez pour ne pas l’obliger à se faire un torticolis à chaque fois qu’elle s’adressera à lui, pas assez pour envahir son espace vital et l’obliger à converser avec lui jusqu’à ce que l’un deux décampe d’ici.  « C’était moi. » Autant ne pas mentir et être franc ; même le type de la sécurité à l’autre bout du bar l’a sans doute remarqué. « Avec celle d’avant aussi. Et celle d’avant. Et... » Faisant tourner son index dans l’air pour illustrer son propos, il reste silencieux le temps de porter sa bière à ses lèvres. « Je crois que la technique du mec désintéressé, ça marche que dans les films. » Il reconnaît finalement, l’habitude prise quelques instants plus tôt le faisant se pencher quelque peu. « Sauf que dans les films, ils ont le mérite de savoir à peu près ce qu’ils font. » D’être de bons dragueurs, en somme, ce qui est loin d’être son cas. Réalisant qu’il n’aide pas celui-ci, il se pince la lèvre, à nouveau gêné, alors qu’il recule. « T’as promis de ne pas juger. » Il s’empresse de lui rappeler, avant de reprendre la parole, quelques instants plus tard : « Et c’est quoi le problème, avec le barman, pour que tu te retrouves obligée à me faire la conversation ? » Se calquant sur sa formulation, il esquisse un sourire timide pour lui démontrer qu’il ne s’agit pas d’une attaque, juste d’une simple curiosité. Il a compris que le barman n’a pas son intérêt, il ne comprend seulement pas pourquoi quelqu’un qui a l’air aussi à l’aise qu’elle se retrouve seule au point de lui adresser la parole à lui, alors qu’elle n’aurait probablement qu’à claquer des doigts pour avoir une meilleure compagnie – qu’elle soit amicale ou affective. Dans tout ça, Kieran oublie que certains apprécient cette solitude qu’il fuit tant.

@Laila Ferrer

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Laila Ferrer & @Kieran Halstead (crédit gif/belgiane)

Février 2015/Le lieu n’est pas idéal pour la conversation, elle s’en rendit compte à cause de l’élagage intempestif des mots échangés avec le jeune homme à ses côtés qui, certainement aussi indisposé qu’elle à l’idée de devoir se répéter sans cesse, finit par avancer son tabouret jusqu’à elle pour mieux rebondir sur sa question et entamer un dialogue plus sympathique sur la durée. Et quand il lui répondit avec sincérité sur l’idée que, le problème de son rencard de ce soir, ce n’était que lui, comme toutes les autres fois d’ailleurs, elle lui adressa un regard fixe sans pouvoir décider sur le moment s’il plaisantait, ou s'il était d’une sincérité trop brute pour ne pas avoir envie de mentir à une inconnue.
Dans le fond, c’était peut-être ça le vrai problème de ses tentatives avortées en vérité : il était trop sincère. Les rendez-vous de ce genre, ce n’était qu’un festival de mensonges auxquels se référer pour obtenir ce qu’on était venu chercher ; souvent une finalité bien moins sainte que l’air qu’il lui retourna et qui la fit sourire pour de bon, ses yeux faisant la navette entre plusieurs points de son visage avant qu’elle ne réalise qu’elle le dévisageait peut-être bien, et qu’elle s’en sentit désolée ; pas assez cependant pour ne pas lui rétorquer dans la foulée, ses doigts essuyant la condensation sur sa bouteille de bière qu’elle reposa après sa première gorgée "Dans les films, ils ont surtout un texte à réciter, et des dizaines de scénaristes prêts à nous faire croire que c’est facile de s’ouvrir aux inconnus en étant aussi honnête que tu sembles l’être." Elle arqua un sourcil, ne tenant pas à ce qu’il se méprenne sur ce que son observation voulait bien dire. Laila se pencha à nouveau sur lui,  juste pour clarifier   les choses avec un sourire dans la voix "C’est pas une critique. Tu dois être le seul à pas se sentir obligé de mentir ici… même moi, je vais finir par vouloir me donner le beau rôle en prétendant des trucs qui sont loin de la réalité." Elle rit et conclut en haussant les épaules dans une démonstration de nonchalance assez adorable pour qu’il sache qu’elle était surjouée "Au moins tu sais." Au moins, elle ne mentait pas sur qui elle était, ce qui venait à démonter totalement le gros mensonge qu’elle venait de lui fournir — et la sensation d’être dans une situation où le serpent se mord la queue fût assez prégnante pour qu’elle reprenne une gorgée de sa bière, son regard se posant en coin sur le jeune homme à qui elle donna son prénom sans y penser, ne voulant pas se sentir obligée de l’appeler le mec du bar dans son esprit "Laila." fit-elle un peu plus fort, et elle leva une main devant elle comme il l’avait fait tout à l’heure, histoire de se dédouaner de l’idée d’un quelconque jugement à son encontre "Pas de jugement entre nous, c’est établi." Elle passa sur la bienséance des premières rencontres, ne lui tendant pas la main pour qu’il la serre, la récupérant simplement pour dégageant son visage anguleux des longues mèches de cheveux plus claires à cette époque, ayant laissé sa soeur faire des expérimentions de couleur sur sa crinière mal peignée, des reflets auburn venant encadrer la moue tachetée de taches de rousseur qui la rendait atypique, mais pas moins jolie si elle se référait à ce qu’on disait d’elle quand elle passait ; et qu’elle s’obstinait à ne pas prendre en compte, parce qu’elle savait aussi que ce n’était pas son visage qui faisait des émules, mais passons sur le sujet, celui mit en avant par le jeune homme la forçant à laisser une longue expiration lui échapper, ses épaules s’affaissant tandis qu’elle était appuyée sur le bar, la tête rentrée dans les épaules dans une position pas très classe — elle ne prétendait pas l’être, c’était déjà ça.

Elle n’avait aucun problème avec le barman, elle en avait avec elle-même, Lali. C’était pour cette raison qu’au lieu de se noyer dans la vague de pensées qui marquait la houle dans son crâne, elle se sentait obligée de détourner son attention en faisant la conversation au premier venu. Elle ne lui dirait pas les choses comme ça cependant, puisque comme elle lui avait dit, elle était moins encline à être sincère qu’il semblait l’être ; et ça installait d’emblée un déséquilibre qui ne lui fit pas peur néanmoins, finissant par lui dire en retournant son visage vers lui, mais pas seulement — tout son corps pivota sur l’assise de son tabouret pour venir se tourner vers Kieran, sa tête se penchant pour lui avouer doucement, le nez froncé, le goulot de sa bière à quelques millimètres à peine de ses lèvres dont le bout de sa langue darda quand elle finit par boire, puis par avaler sa gorgée rapidement "J’ai cru te rendre un service en me proposant comme candidate pour sauver ta soirée… et j’ai bien envie de te dire que ce sera à toi de trouver mon problème parce que si je dois être honnête avec toi, j’en ai tellement que c’est difficile de statuer sur lequel est le plus rédhibitoire pour un premier rendez-vous." Ils étaient aussi doués l’un que l’autre pour attiser le je ne sais quoi chez celui qu’ils convoitaient — est-ce qu’elle le convoitait ? Pas tellement, pas même quand elle finit par lui proposer, de plus en plus gênée par le bruit environnant, ses traits se fronçant doucement quand la voix s’élevant un peu plus fort, et son doigt se pointant dans son dos, elle lui demanda enfin "Tu préférerais pas qu’on sorte un peu ? On s’entend mal." Et déjà, sa voix singulière, rauque et éraillée, souffrait de ses efforts à vouloir qu’il la comprenne ; elle sortirait de là avec une extinction de voix qu’elle préférait mettre sur ça plutôt que sur sa consommation excessive d’alcool et de tabac.

Ce n’est ni glorieux ni agréable de reconnaître que le problème vient de soi, mais Kieran ne peut nier l’évidence. Si le problème venait de ces filles qui ont la charité de l’aborder – ou des quelques rares qu’il ose aborder de lui-même – il n’en serait pas là aujourd’hui. Il aurait peut-être déjà trouvé sa perle rare, celle qui l’aurait sorti de sa solitude et fait découvrir ce sentiment qui a toujours été à sens unique jusqu’ici ; mais il est toujours désespérément à la recherche de l’amour et la régularité autant que le l’énergie qu’il met dans sa quête en disent long sur le réel coupable de son célibat. Incapable de vivre seul, incapable tout simplement d’être seul alors que cela dicte une grande part de son quotidien, mais aussi et surtout incapable de s’ouvrir aux rares qui tentent une approche, Kieran refuse pourtant de régler le véritable problème, bien que celui-ci semble (en apparence) avoir été identifié. Mais il sait aussi que s’il se met en tête de travailler sur ses insécurités qui le poussent à toujours tout faire échouer autour de lui, il ne pourra espérer se débarrasser de cette sensation d’isolement qui le retient prisonnier depuis trop longtemps. À ses yeux, il n’aspire pas à grand-chose, seulement au bonheur à deux, il ne prend seulement pas en considération le fait qu’il devrait y parvenir seul avant toute chose – et dans le domaine, le chemin a parcourir est encore long et sinueux.

Le regard de la jeune femme reste trop longtemps sur lui et il sent la gêne qui l’empare autant qu’elle n’entreprend déjà de colorer ses joues ; il tente néanmoins de ne pas se laisser intimider aussi facilement que d’ordinaire, ce qui l’obligerait à baisser les yeux. Il tente de soutenir son regard, bien que l’exercice soit rendu d’autant plus difficile qu’il s’imagine déjà qu’elle cherche à valider ses propos ; et le fait que le problème vient effectivement de lui et qu’elle se doit de le découvrir en le sondant de la sorte. "Dans les films, ils ont surtout un texte à réciter, et des dizaines de scénaristes prêts à nous faire croire que c’est facile de s’ouvrir aux inconnus en étant aussi honnête que tu sembles l’être." Le bruit environnant n’aide pas vraiment à faire de cette conversation une bonne idée, alors que, de plus en plus, elle s’oriente vers un chemin qui le met guerre à l’aise. D’autant plus qu’on ne peut pas vraiment dire que l’honnêteté soit réellement dans ses gênes ; lui qui a toujours eu le mensonge facile pour passer certains pans de sa vie sous silence et donner l’image d’en vivre une bien meilleure que la réalité. Mais sa réserve, sa maladresse et sa gêne sont autant de choses qui l’empêchent de se donner une si belle image au moment le plus opportun. "C’est pas une critique. Tu dois être le seul à pas se sentir obligé de mentir ici… même moi, je vais finir par vouloir me donner le beau rôle en prétendant des trucs qui sont loin de la réalité." Et cette fois-ci, c’est lui qui se permet de la dévisager, alors que son rire résonne doucement à ses oreilles. Oh, il sait, Kieran, que juger sur une première impression est une bien mauvaise idée, pour autant il ne peut s’empêcher de se demander pour quelle raison elle aurait besoin de mentir. Des deux, elle est bien celle qui semble la plus à même d’affirmer qui elle est sans risquer de faire détourner les yeux posés sur elle. Réalisant qu’il la détaille depuis plusieurs secondes, bien moins à l’aise qu’elle dans le domaine, il baisse rapidement les yeux, puis la tête sous le poids de l’embarras. "Au moins tu sais." - « C’est trop tôt pour te dire que tu n’as pas besoin de ça avec moi ? » Il l’interroge en tentant péniblement d’affronter son regard, haussant un peu la voix pour qu’elle puisse l’entendre, avant de réaliser l’ampleur de ses mots, ou plutôt le double sens qu’il est, comme toujours, probablement le seul à voir. « C’est pas... c’est pas une tentative de drague, hein ! » Il se reprend et sous la panique, sa voix porte peut-être trop, au point d’être largement entendue et de l’afficher plus qu’il ne l’aurait voulu. Il voulait simplement souligner qu’en vue de leur conversation, elle n’a pas besoin de se donner le beau rôle ; mais il réalise qu’il se donne un peu trop d’importance alors qu’au final, ils sont encore deux étrangers qui ignorent l’identité de l’autre. Il ne voudrait pas qu’elle se méprenne sur ses intentions, encore moins alors que cette conversation est la plus normale qu’il ait eue dans ces lieux depuis longtemps, sans que ses bégaiements et maladresses ne l’obligent à renoncer à toute tentative de socialisation et à supporter la honte qu’il a lui-même invoquée.

Mais des étrangers, ils ne le sont pourtant pas plus longtemps alors qu’il peut désormais mettre un prénom sur ce visage. "Laila." C’est aussi joli qu’elle, et cette fois il a conscience qu’il s’agit d’une réflexion qu’il doit bien se garder – même s’il était dans une optique de charme, ce serait bien trop banal pour susciter son intérêt. "Pas de jugement entre nous, c’est établi." Il est trop timide pour se faire entendre, mais cette fois-ci c’est bien un rire qu’il laisse échapper face à ses gestes, qui se termine par un sourire qui reste fixé sur ses lèvres en guise d’acceptation de ce deal. « Kieran. » Qu’il finit par se présenter à son tour, et c’est déjà une étape bien plus avancée que beaucoup de ses conversations tenues dans ce bar, avec une (presque) aisance qui est surprenante. Et si, finalement, il devait arrêter de forcer les choses et de simplement ignorer ses attentes ? Plus à l’aise et pourtant toujours aussi gêné alors qu’à chaque fois qu’il s’autorise à lever les yeux vers la jeune femme, il est toujours frappé par sa beauté, désormais accentuée par un charisme qui va bien au-delà du seul physique. En ce sens, la bière entre ses mains lui permet d’atténuer sa réserve autant que d’accentuer son courage, d’autant plus nécessaire quand elle se tourne vers lui. "J’ai cru te rendre un service en me proposant comme candidate pour sauver ta soirée… et j’ai bien envie de te dire que ce sera à toi de trouver mon problème parce que si je dois être honnête avec toi, j’en ai tellement que c’est difficile de statuer sur lequel est le plus rédhibitoire pour un premier rendez-vous." Il rit encore une fois, partagé entre la surprise de son honnêteté tout comme celle de son annonce ; ils ont conclu qu’ils ne devaient plus juger et en ce sens il n’a pas le droit de se surprendre qu’elle puisse avoir une liste de problèmes tout aussi longue que la sienne. "Tu préférerais pas qu’on sorte un peu ? On s’entend mal." Oh. L’hésitation doit se lire sur son visage alors qu’il n’est pas habitué à une telle proposition, alors qu’il n’y voit aucun sous-entendu. Seulement la gêne que le courant qui semble passer entre eux puisse souffrir de leur éloignement d’une source de nombreuses excuses que représente ce bar pour que leur chemin se sépare quand sa maladresse, sa lourdeur ou sa stupidité (entre autres choix) l’aura rendu inintéressant à ses yeux et qu’elle aura besoin de s’échapper de cette conversation. Mais, de ce dont il peut déjà témoigner, elle n’est pas du genre à avoir besoin d’excuse, contrairement à lui. Alors Kieran acquiesce silencieusement, sa bière précédemment payée en mains pour continuer d’avoir ce filet de sécurité susceptible de l’aider à être plus à l’aise et se faufilant à travers la foule jusqu’à la sortie, la jeune femme à ses côtés.

« Je suis désavantagé. » Qu’il ne tarde pas à annoncer une fois dans la rue, après avoir empli ses poumons d’air frais un instant, une inspiration qui vise aussi à diminuer les battements excessifs de son cœur. « Je veux dire, t’as eu une démonstration live de mes échecs, quand de mon côté j’ai pas le moindre indice qui m’aiderait à faire la liste de tes problèmes. » Et réalisant qu’il vient de lui dire qu’elle en a beaucoup, il se reprend, le peu d’assurance dont il arrive à faire preuve par moment ayant disparu : « Pas que... enfin, que je pense que la liste soit inter-... longue, il se corrige, longue, c’est déjà plus acceptable qu’interminable dans le domaine de l’insulte pas du tout volontaire, je pense que t’es sûrement trop dure avec toi-même. » Il souligne, avant d’avoir une illumination qui lui permet d’enchaîner, plus confiant : « D’ailleurs, est-ce que ça fait partie de la liste ? » Il questionne, avec un sourire discret. C’est probablement plus acceptable de mettre en évidence son exigence envers elle-même qu’un quelconque autre défaut qu’il serait tenté de souligner parce qu’il joue le jeu à fond, sans penser au fait que c’est cette même honnêteté qui pourrait couper court à la soirée. « Quoi que, selon moi, c’est pas le plus rédhibitoire à un premier rendez-vous. » Et il parle, Kieran, il parle, jusqu’à réaliser qu’il monopolise tout l’espace. « Tiens, tu peux ajouter à ma liste que j’arrive pas à me taire quand je suis mal à l’aise. » Cette fois, il ne vient pas de l’insulter malgré lui, mais il n’en est pas loin, en supposant que sa présence le gêne. « Enfin, pas que tu... c’est pas toi qui… je suis, hm, mal à l’aise de base, c’est genre… un état naturel ? » Ferme-la, Kieran. Dans l’hypothèse où elle n’avait pas identifié son problème en le scrutant quelques minutes plus tôt, il est désormais plus qu’évident.

@Laila Ferrer

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Laila Ferrer & @Kieran Halstead (crédit gif/belgiane)

Février 2015/C’est trop tôt pour te dire que tu n’as pas besoin de ça avec moi ? Sur le coup, elle eut du mal à savoir si c’était l’empressement de Kieran à se reprendre pour lui affirmer que ce n’était pas une tentative de drague, ou si c’était autre chose qui la fit sourire autant, mais c’est ce qu’elle fit Laila, des fossettes se creusant sur ses joues rougies par sa consommation d’alcool et par la chaleur ambiante. Elle n’apporta pas vraiment de réponse au jeune homme, jouant le mystère sans le vouloir vraiment en détournant la tête. Elle avait tendance à vouloir vivre le moment présent quand elle déboulait dans un bar, Laila, alors qu’est-ce que le temps, vraiment ? Elle vivait dans un passé douloureux, qui la faisait souvent longuement réfléchir à ce que sa vie aurait été si elle avait su mener les choses autrement, alors flouter la ligne du temps avec des rencontres comme celle-ci, barrer la route à la bienséance imposée pour les codes de la société, elle savait faire sans avoir besoin de se forcer trop fort, c’était certain. Elle se fichait que ce soit trop tôt, ou trop tard, elle fût presque soulagée de se dire qu’il y avait au moins quelqu’un qui n’attendait pas grand-chose d’elle, et puisqu’elle était souvent celle à exiger le plus de ce qu’elle était capable de donner ou non, c’était une vraie libération sur le moment, de comprendre qu’elle n’avait pas besoin de faire semblant.
Elle ne serait sans doute pas aussi armée que le jeune homme à qui elle renvoya un regard pour se dire que sa soirée n’était pas perdue, et que c’était une bonne chose finalement, qu’elle se soit amusée de sa solitude en profitant de la sienne ; ils se retrouvaient maintenant à vouloir mettre en exergue leurs défauts respectifs parce qu’il n’y avait aucune attente irréalisable derrière le dialogue qu’ils entretenaient, et c’était presque comme si, à la fin de la soirée, le tampon du rendez-vous réussit pourrait être apposé à ce qu’ils avaient vaguement partager — sans partie de l’idée qu’ils se reverraient, c’était un souvenir qu’elle se sentait prête à couver toutefois, et peut-être qu’après Kieran, elle reverrait les termes de ce qu’elle attendait des autres en matière d’honnêteté.

Lui proposant de sortir, elle fût la première à inspirer l’air frais du soir pour, tout de suite après, s’encombrer les poumons avec la cigarette qu’elle alluma dans un automatisme de dépendance assumée, celui qui lui fit évacuer les derniers restes de nervosité qu’elle pouvait ressentir à l’idée d’être au contact de quelqu’un comme le jeune homme. D’un geste convivial, elle lui tendit sa cigarette sans vraiment s’attendre à ce qu’il la prenne, tirant de nouveau une goulée dessus pour se donner le temps de méditer sur ce qu’il lui dit tandis qu’elle s’appuyait contre la devanture du bar, un pied posé contre le mur.
La tête penchée, elle se demanda si elle était prête à vraiment révéler le fond de sa pensée lorsqu’elle parlait de ses propres défauts, puis elle réalisa qu’elle ne l’était pas, et que malgré le fait qu’elle était en effet, très dure avec elle-même, l’admettre serait avouer qu’elle était sans doute bien meilleure qu’elle le prétendait en affirmant le contraire. Elle fronça le nez, doucement, relevant la tête pour la tourner vers le jeune homme dont elle observa le profil un instant avant de lui répondre, dans un sourire atténué par sa volonté de ne pas trop espérer qu’il lui demande s’ils pourraient se revoir plus tard "Premièrement, j’ai un problème de dépendance à la cigarette. Au mieux, ça veut dire de moi que je me fiche du danger que j’encours en en faisant une mauvaise habitude ; au pire, ça veut dire que je tiens si peu à la vie que j’essaye de me tuer à petit feu. Je te laisse choisir." Elle lui sourit, fière de sa rhétorique, au point d’ajouter avec le genre d’expression sur le visage qui peut aussi bien traduire le mystère que la malice "Cela dit si j’étais à ta place, je fuirais avant de faire la lumière sur ce que ça veut dire vraiment, mais je dis ça…" Elle leva sa main livre pour apposer la fin silencieuse de sa phrase — je ne dis rien — en haussant les épaules pour établir en secret que, si elle tenait si peu à la vie au point d’essayer de se tuer à petit feu, il tenait encore moins à la sienne en se laissant alpaguer par une petite nana dans son genre, qui transpirait tout un tas de choses par-delà les secrets qu’elle couvait sans jamais vouloir en dire plus, pas certaine qu’avouer qu’elle était du genre à mettre les deux pieds dans les problèmes pour se sentir digne d’exister.
Et un rire lui échappa de nouveau — il était drôle sans le vouloir Kieran, et ce n’était pas de la moquerie que de le relever, mais cette manière qu’il avait de se reprendre chaque fois qu’il pensait dire quelque chose de travers, ça avait son charme. Elle se promit néanmoins de ne pas le lui dire parce qu’elle ne voulait pas provoquer quelque chose en lui qui le forcerait à partir en courant, d'autant qu’elle appréciait sincèrement sa présence, mais aussi sa maladresse ; pas parce que ça la faisait paraître plus gaillarde qu’elle ne l’était vraiment, mais parce qu'elle avait toujours apprécié les gentils garçons. Elle tut l’idée que la liste de ses défauts était trop longue, se penchant légèrement contre le mur pour créer un aparté de guingois avecblui sans nécessairement admettre qu’elle avait arrêté de faire la somme de ses tares pour s’éviter d’avoir à les corriger, et lui dit dans un murmure rauque, induit par son grain de voix particulier "Tout dépend ce que tu veux dire par inter-…longue." Elle lui renvoya un sourire un peu complice qui disparut sous le geste qu’elle fit pour reporter sa cigarette à ses lèvres — lèvres qui se tordirent légèrement quand elle recracha la fumée, tournant doucement la tête sur le côté pour ne pas indisposer Kieran avec son poison "C’est pas le cas de tout le monde ? On est pas tous un peu dur avec soi-même ?" Ça lui évitait d’avouer qu’elle faisait partie de ce genre-là, oui. Si elle partait du constat que ça faisait partie des prérogatives à l’espèce humaine, ça la sauvait de devoir expliquer pourquoi elle paraissait si peu convaincue par celle qu’elle était. C’était un peu lâche, seulement elle ne sentait pas obligée de paraître courageuse, Lali.
Elle singea la surprise quand il parla de premier rendez-vous, et ce même si elle savait qu’elle avait été la première à en parler tout à l’heure, lorsqu’ils étaient encore à l’intérieur "Alors c’est officiel, c’est un premier rendez-vous ?" L’embarras qu’elle sentit émaner de lui, elle le mit d’abord sur le compte de ses paroles, qu’elle ne pouvait pas reprendre, mais qu’elle pouvait rendre moins opprimantes, et qu’elle corrigea en se décollant du mur pour aller jeter son mégot de cigarette éteint dans la poubelle devant le bar "Désolée, je voulais pas te donner l’impression d’être trop entreprenante." C’est pas une tentative de drague, hein ! qu’elle aurait pu lui répondre aussi, mais elle s’abstint, fourrant ses deux mains dans les poches de sa veste en cuir, se tournant à distance vers lui quand il se sentit obligé de mettre des raisons sur son malaise "Je peux te dire un secret ?" C’est ce que lui fit lui demander sa confession, et pendant qu’elle lui faisait signe de la rejoindre pour avancer sur le trottoir jouxtant le bar, ayant envie de bouger un peu pour faire passer la sensation de froid qu’elle ressentait sous sa veste, elle n’attendit pas tellement qu’il lui réponde, et enchaîna dans la nuit sombre qu’ils percèrent en avançant doucement "Je suis pas aussi à l’aise que j’en ai l’air. Je crois que je suis un peu comme toi ; être gênée en société, c’est mon état naturel." Elle opina du chef à cette confession qui n’en était pas vraiment une, serrant ses lèvres l’un contre l’autre pour en sentir le goût de sa cigarette terminée. Enfin, dans une légère secousse de sa petite silhouette qu’elle tourna vers lui, ses mains toujours dans ses poches, elle lui demanda en plissant le haut de son nez comme si elle s’apprêtait à dire une bêtise — ce genre de petites choses, de petites manies, c’était ce qui mettait l’accent sur le jeune âge de Lali "Est-ce que c’est le genre de truc qui fait partie de la liste de nos défauts ? Parce que ça nous en fait un en commun du coup, et je suis sûre que c’est pas donné à tout le monde." De sympathiser sur ses défauts ? C’était certain que ça ne l’était pas.

On pourrait croire que le large sourire de la jeune femme suite à sa correction l’aiderait à se détendre et à retrouver ses moyens. C’est pourtant l’effet inverse qui se produit pour Kieran et si ses lèvres restent closes pour l’empêcher de buter à nouveau sur ses mots, c’est désormais son visage qui atteste un peu plus de sa réserve alors que ses joues s’empourprent doucement. Le peu de lumière dans ce bar aurait pu l’aider à conserver la face en s’évitant de baisser la tête pour masquer les preuves de sa gêne, mais dans un geste devenu automatique, c’est bien vers le sol que ses yeux se reportent, alors qu’il aurait toutes les raisons du monde de les garder sur Laila et son large sourire auquel il n’a pas prêté l’attention qu’il méritait. Il se flagelle déjà d’être aussi fuyant, d’autant plus en considérant qu’elle est bien la première depuis longtemps qu’il arrive à faire sourire de manière sincère – et non pas parce qu’elle est elle-aussi gênée ou qu’elle se force le temps de trouver un motif pour déguerpir au plus vite. Du moins, il veut croire aux bonnes intentions de Laila même si son habituelle dépréciation de lui-même lui glisse l’idée selon laquelle elle n’est que polie et qu’elle-aussi, elle attend peut-être le bon moment pour clôturer cette conversation afin qu’il la laisse tranquille. Trop échaudé par les conséquences régulières de sa maladresse, il peine à considérer le fait qu’elle puisse réellement avoir envie de s’intéresser à lui. Et surtout pour lui et non pas à son détriment, bien qu’elle se soit tout d’abord adressée à lui pour sortir de sa solitude ou simplement parce que le spectacle méritait qu’elle s’arrête dessus. Et bien qu’elle ait été la première à se tourner vers lui, il a peur de lui tenir la jambe plus longtemps qu’elle ne le prévoyait au moment d’attirer son attention. Et aussi beau qu’était son sourire, le silence dont elle fait preuve ne l’aide pas à relativiser ses mots. Ce n’était même pas une phrase d’accroche, seulement un constat dont il aurait dû s’abstenir. Parce que Kieran ne peut s’empêcher de ressasser chaque mot qu’il prononce et qui ont un effet auquel il ne s’attendait pas, à tel point que même les plus doux, les plus polis et les plus maîtrisés d’entre eux prennent une toute autre tournure à force d’y songer. Et le silence est pourtant une réponse à laquelle il devrait être préparé ; pour se heurter très régulièrement à celui-ci. Mais pas lorsqu’il s’accompagne d’une expression aussi agréable, trop peu habituelle pour qu’il puisse pleinement l’interpréter. Il devrait se laisser porter par les choses au lieu de toujours chercher à analyser chaque mot, chaque geste, chaque expression – et c’est peut-être là son plus gros problème.

Et son regard n’est pas prêt d’arrêter de fixer le sol, son esprit de répéter la même phrase en boucle jusqu’à ce qu’il y trouve un problème, alors qu’il accepte de suivre la jeune femme jusqu’à l’extérieur, accompagné de sa bière non pas parce qu’il est pingre, mais parce qu’il en a besoin. Secouant la tête par la négative alors qu’elle lui propose sa cigarette, il affiche un léger sourire pour minimiser son refus et tenter de lui faire comprendre que ce n’est pas un problème pour lui. Seulement, il n’a jamais touché à une cigarette de sa vie et si l’envie est tentante de vivre cette expérience, il n’a aucune envie de se ridiculiser face à elle en s’étouffant et en manquer de cracher ses poumons. Alors il refuse, se contentant de son côté de se satisfaire de l’air frais, une main enfoncée dans sa poche, l'autre qui porte la bière à ses lèvres. "Premièrement, j’ai un problème de dépendance à la cigarette. Au mieux, ça veut dire de moi que je me fiche du danger que j’encours en en faisant une mauvaise habitude ; au pire, ça veut dire que je tiens si peu à la vie que j’essaye de me tuer à petit feu. Je te laisse choisir." Surpris un instant par le son rauque de sa voix maintenant qui peut l'entendre correctement et qui ne fait qu’ajouter à son charisme, c’est finalement un rire timide qui vient naturellement s’échapper d’entre ses lèvres, qu’il tente difficilement de réprimer pour ne pas lui donner l’impression de minimiser la perspective de sa mort. Tournant la tête vers elle, la lumière devant le bar lui permet de réellement détailler la jeune femme et de constater qu’elle est encore plus intimidante qu’elle ne l’était à l’intérieur, alors qu’elle apparaît plus jeune qu’il ne l’aurait cru. Il oscille entre le sol et son visage à un rythme régulier. "Cela dit si j’étais à ta place, je fuirais avant de faire la lumière sur ce que ça veut dire vraiment, mais je dis ça…" S’osant à rencontrer à nouveau ses prunelles, un rire s’échappe d’entre ses lèvres face à sa démonstration. « J’ai un truc pour les mauvais choix, alors va falloir faire avec ma présence. » Il précise en s’appuyant un peu plus contre le mur, signe qu’il ne compte pas fuir. Il ne voudrait pas lui faire croire que sortir de ce bar en sa compagnie est un mauvais choix ; mais il ne fuira pas. « Et option trois. Peut-être que ça compense quelque chose. » Il s’ose en désignant d’un bref mouvement de menton la cigarette entre ses mains. « Théorie totalement foireuse de quelqu’un qui n’a jamais touché à une cigarette de sa vie. » Qu’il précise néanmoins pour ne pas paraître intrusif et atténuer son hypothèse. Il a toujours entendu que la cigarette aidait à réduire le stress, que parfois une addiction en remplace une autre ; tant de choses qu’il est mal placé pour juger.

Il se maudit de sentir à nouveau ses joues se réchauffer quand elle induit une légère proximité entre eux en se penchant vers lui, et qu’il tend légèrement le cou par réflexe pour saisir son murmure. "Tout dépend ce que tu veux dire par inter-…longue." Il pince les lèvres alors qu’il se recule d’un pas, embarrassé que sa méprise ne soit pas passée aussi inaperçue qu’il l’aurait souhaité. "C’est pas le cas de tout le monde ? On est pas tous un peu dur avec soi-même ?" Sans doute, oui, et il sait de quoi il parle sur le sujet. « Me pose pas la question, je suis sûrement le pire de tous dans le domaine. » Ce qui équivaut donc à l’hôpital qui se fout de la charité, mais sachant qu’il n’a pas minimisé ses échecs à l’intérieur ou prétendu avoir un succès et une éloquence qui lui réussit, il peut se permettre d’être clivant sur le sujet. "Alors c’est officiel, c’est un premier rendez-vous ?" La surprise qu’elle affiche sur le visage est bientôt imitée par ses propres traits, qui font rapidement place à un embarras évident. « Quoi ? Non ! » Il rétorque rapidement, et quand ce ne sont pas ses mots qui le torturent, c’est l’empressement avec lequel il a apporté la correction. "Désolée, je voulais pas te donner l’impression d’être trop entreprenante." Secouant la tête par la négative, il l’observe s’éloigner alors qu’il reste prostré contre le mur. « Je... je disais ça de manière générale, par rapport, tu sais, aux défauts qu’on pourrait te trouver au premier rencard. » Bien sûr qu’elle sait. Et bien sûr qu’il s’enfonce, alors que soudain, il a peur de l’avoir vexée. « Pas que ça me dérangerait, oh non. Enfin, si... NON ! Non, je veux dire, je t’ai pas suivie avec cette intention-là, c'est ça que je... veux... dire, hm. » Non, promis, ce n’est pas une stratégie rondement menée pour la séduire et lui faire baisser sa garde, il n’a de toute évidence pas assez confiance en lui pour élaborer quelque chose d’aussi poussé. « C’en est un ? » Qu’il se surprend lui-même à demander, histoire d’être fixé sur la question – comme si une réponse affirmative allait l’aider à moins chercher ses mots. Ce serait probablement pire – quoi qu’un refus ne lui ferait pas du bien à son égo déjà à terre. Et le voilà qui se maudit de se poser une telle question, alors que ce n’était pas l’idée en quittant le bar. "Je peux te dire un secret ?" Se décollant du mur après quelques secondes durant lesquelles il n’a pas su bouger, terminant sa bière à la hâte pour la balancer dans un container et pressant le pas pour la rejoindre autant que pour entendre ses mots, il baisse légèrement la tête vers elle une fois à ses côtés, pour l’inviter à poursuivre. "Je suis pas aussi à l’aise que j’en ai l’air. Je crois que je suis un peu comme toi ; être gênée en société, c’est mon état naturel." La lumière qui diminue tandis qu’ils avancent lui permet de dissimuler son haussement de sourcils à cette révélation, alors que son regard retrouve à nouveau le sien lorsqu’elle se tourne dans sa direction. "Est-ce que c’est le genre de truc qui fait partie de la liste de nos défauts ? Parce que ça nous en fait un en commun du coup, et je suis sûre que c’est pas donné à tout le monde." Un rire nerveux s’échappe ensuite de ses lèvres. « C’est bien la première fois que je suis fier de ce défaut, vu ainsi. » Soulignant par la même occasion qu’il fait effectivement partie de la liste, il admet néanmoins que le transformer en point commun le rend moins détestable. « C’est celui en tête de liste me concernant, j’ai pas besoin de t’expliquer pourquoi. » Elle l’a vu de ses propres yeux, la manière dont il bafouille et se perd dès qu’il est intimidé. Et si Laila a bien réagi, ce n’est pas le cas de tout le monde. Il n’est pas assez entreprenant, lui. « Je suis curieux de connaître ta stratégie pour donner le change, par contre. » Il admet, alors que c’est à son tour de se tourner légèrement vers elle. « Curieux et surtout désespéré, mais ça aussi tu l’as vu. » Et à chaque minute qu’il passe il semble lui donner de nouvelles raisons de comprendre ses échecs, alors qu’il n’est pas de ceux qui savent se vendre – foutue honnêteté.

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Février 2015/J’ai un truc pour les mauvais choix. Tiens donc, c’était peut-être ça leur vrai point commun finalement, mais est-ce que ça valait le coup d’être relevé ? Lali ne le croyait pas. Ça serait semer des graines qu’elle n’était pas prête à récolter, parce qu’une question en entraînant une autre, elle se retrouverait à devoir les lister, ses mauvais choix, et ils étaient nombreux, même à cet âge là. Ils n’en finiraient pas de l’être avec le temps, faisant poindre une tendance à l’auto-destruction qui prendrait de l’ampleur au plus elle penserait à l’âge qu’avait sa fille à un point donné, et à ce qu’aurait été sa vie si elle avait insisté pour la garder avec elle. A ça, elle évitait souvent de songer, puisque ça n’avait jamais été ajouté au poids qu’on avait fait peser dans la balance de son erreur au moment où on lui avait imposé de choisir quoi faire de son enfant ; le confier aux bons soins de parents malheureux, ou le laisser au moins bons soins de l’assistance publique. L’un dans l’autre, aucun de ces choix n’auraient été mauvais, l’un était seulement plus facile à supporter parce qu’il promettait des beaux jours à cette petite-fille qu’elle n’avait même pas tenue dans ses bras. Non, définitivement, elle n’avait pas envie de parler de ses mauvais choix, quand bien même certains lui avaient été imposés, ce n’était pas le genre de conversation qu’elle voulait avoir ce soir, avec Kieran — ni avec qui que ce soit, à dire vrai. Et puis à le voir se mouvoir, lui donnant alors l’impression qu’il pensait la déranger alors qu’elle lui avait explicitement demandé de la suivre, elle pouvait facilement se figurer qu’il ne mettrait pas longtemps à rougir jusqu’à la racine de ses cheveux si elle lui avouait être ce genre de femme-là : à tomber enceinte à seize ans alors qu’on lui avait toujours vendu sa vertu comme une fleur à faire pousser jusqu’à l’éclosion d’une vie plus stable et nourrit par sa foi. Des conneries tout ça. Mais tout de même, quel genre d’image ça donnerait d’elle, de lui dire qu’elle était tombée amoureuse d’un garçon plus vieux qu’elle, qui représentait un interdit autant qu’une ouverture sur un monde différent du sien ?
Ici ou à un autre moment, elle ne voulait pas en parler, et c’était pour cette raison qu’elle s’intéressait autant à lui ; pour ne pas avoir à parler d’elle, encore que la conversation qui s’était lancée entre eux équilibrait les forces, elle savait y faire pour préserver ce qu’elle ne jugeait pas bon partager, et c’est d’un signe de tête vers la bouteille de bière qu’il tenait à la main qu’elle illustra la troisième théorie du jeune homme "T’as l’air d’en connaître un rayon sur comment compenser par autre chose." L’alcool, ça s’ajouterait plus tard, aux vices de Laila. Elle n’en était encore qu’à siroter de la mauvaise bière au comptoir d’un bar, trouvant ça plus festif que guérisseur. Mais dans trois ou quatre ans, elle se mettrait à boire seule pour se donner du courage, et elle penserait à ce moment précis à chaque fois, comprenant dans le fond que c’était pour ça que Kieran avait emmené sa bière avec lui, à l’époque : pour trouver le courage, tout simplement.

Elle aurait pu lui conseiller de respirer quand, de nouveau, il sembla paniquer quand elle émit l’hypothèse que tout ça là, ce qui se passait maintenant, était un premier rendez-vous. Dans la foulée, elle s’excusa rapidement pour la rasséréner, et fût prise à son propre jeu quand il lui retourna la question, et qu’elle ne sut quoi lui répondre sur le moment. Interdite, elle garda sa bouche entrouverte, et à distance, elle l’observa sans se montrer critique, simplement pour se donner le temps de penser à une réponse convenable, qui ne la ferait pas passer pour ce qu’elle n’était pas, mais qui ne le blesserait pas non plus. Et aucune solution ne paraissait lui convenir, alors elle ne dit rien en définitive, prenant le chemin jouxtant le bar pour rejoindre sa voiture garée au loin, réduisant le pas pour que Kieran la rattrape alors qu’elle fuyait l’éventualité de quelque chose de plus, quand elle savait au fond qu’ils ne se reverraient sans doute jamais. Au moins, ils auraient passé un bon moment, ça restait le genre de surprise qui n’était pas désagréable, mais qui laissait un goût amer parce qu’elle était trop éphémère et qu’on n’en tirait pas grand-chose quand tout revenait à la normale. Dans quelques minutes à peine, la vie reprendrait son cours comme si rien ne s’était passé, et demain matin, Kieran l’aurait oublié pour passer son temps à chercher d’autres jeune femme à inviter sans y croire ; elle, elle investirait un autre bar pour s’asseoir à un comptoir différent, observant les allers et venues en se demandant qui repartirait avec qui tandis qu’elle restait là, à sagement attendre que quelque chose se passe. C’était peut-être son signal pour prendre les choses en mains.
Mais pas ce soir. Elle tourna la tête vers le jeune homme, le voyant réagir à son secret avec une circonspection qui lui fit lui dire "T’as l’air surpris, mais je te promets que j’essaye pas de te consoler pour ta maladresse en prétendant être autant moins douée que toi." Elle avait remarqué, oui, et ça le mettrait sans doute dans tous ses états qu’elle le dise de cette façon, alors elle ajouta dans la précipitation, une main sortant de la poche de sa veste en cuir pour rattraper sa bévue avec bienveillance "Ce qui encore une fois n’est pas vraiment un défaut dans le fond", d’être maladroit "c’est inutile de t’excuser." termina-t-elle sur le même ton. Dans un nouveau hochement de tête, elle lui fit comprendre qu’en effet, elle n’avait pas besoin de recevoir ses explications concernant la place de choix que prenait le défaut qu’ils avaient en commun, de ne pas savoir agir naturellement en société. Vraiment, elle n’avait aucun tips à donner au jeune homme, mais elle médita tout de même un moment sur ce qui faisait illusion, et elle mit rapidement le doigt dessus tandis que d’un geste gracieux, la tête doucement penchée sur le côté pour tout atteindre en même temps, ses doigts s’étirant sous sa volonté, elle remit ses longs cheveux sombres sur tout un côté de son épaule "Je crois juste que j’ai un bon instinct de survie. J’ai pas de technique à proprement parler, je me dis juste que si je veux pas avoir l’air d’attendre qu’on me bouffe toute crue, ça évitera que ça arrive vraiment." Elle haussa les épaules, trouvant sa stratégie bien foireuse, et ça la fit rire juste le temps d’une seconde — seconde durant laquelle elle le regarda, la tête tournée dans sa direction "C’est un peu croire que croiser les doigts, ça te protège du mauvais sort. C’est pas fiable comme science, mais ça fait du bien de s’y raccrocher." Doucement, mais sûrement, la pénombre la prémunissant d’exposer son malaise au jeune homme, elle se trouva un peu idiote de partager une telle approche avec quelqu’un qu’elle ne connaissait pas. Elle n’était plus à ça près d’un côté, néanmoins pour détourner le projecteur qu’elle sentait dirigée droit sur elle, la lune éclairant à peine le chemin qu’ils foulaient, elle finit par lui dire avec plus de clairvoyance, arborant une mine passablement contrariée qu’elle rendit plus sérieuse encore quand, arrivant à proximité de sa coccinelle jaune, elle toupilla sur elle même pour s’y appuyer, son regard ne quittant pas Kieran "OK, de toi à moi, je crois que c’est toi qui gagne la bataille du je suis dur avec moi-même." Elle se mit à chuchoter, quand elle ajouta tout de suite après "Hey, tu t’en sors plutôt bien là, non ?" Prononcé avec un sourire en demi-teinte, sa phrase se tarit doucement dans les airs pendant qu’elle prenait à coeur l’idée de le quitter sur une note qui ne le laisserait pas amer de ne pas avoir su bien se comporter avec cette fille en qui il avait mis une partie de ses espérances ; avec un peu de chance, elle l’avait aidée à voir les choses d’un meilleur côté, et à ça aussi, ça faisait du bien de s’y raccrocher.

À le voir ainsi, visiblement mal à l’aise et la tête rentrée dans les épaules dans une volonté de s’effacer par peur de déranger, l’on peut en venir à douter de sa réelle capacité à faire les mauvais choix. Si on se fie à son apparence presque chétive, d’autant plus accentuée par l’assurance d’une Laila plus jeune que lui, il serait cohérent d’imaginer Kieran comme particulièrement enclin à suivre les règles et à ne jamais s’écarter du droit chemin, s’assurant une certaine banalité le rendant particulièrement ennuyeux. Et s’il est persuadé que ces deux derniers qualitatifs s’appliquent à lui, la question des mauvais choix, se veut plus surprenante mais tout autant véridique. On ne peut pas dire que Kieran soit doué pour discerner les mauvaises décisions qui s’offrent à lui, fonçant tête baissée dans celles qui lui causeront le plus de conséquences, sans même le vouloir. Et s’il persiste à penser qu’il s’agit simplement de hasard doublé d’une poisse évidente,  ce n’est que la preuve de son déni quand bien même la réponse n’est effectivement pas à chercher très loin. La faute à un schéma familial qui a rendu son besoin d’affection maladif, perturbant ainsi ses relations aux autres, l’empêchant de les vivre pleinement, de s’en satisfaire et, surtout, de considérer être méritant de celles-ci. Alors il accepte l’intérêt des autres sous toutes ses formes, mais surtout sous celles qui sauront causer le plus de dommages ; alors oui, ses mauvais décisions ne l’emmènent pas forcément à reconsidérer sa vie tous les quatre matins, mais leurs effets sur celle-ci ne sont pas négligeables. Mais ça, il ne le dira pas, Kieran, conscient qu’aucune femme n’a envie d’un homme aux daddy et mommy issues aussi conséquents. Conscient aussi qu’il ne s’agit pas de ça avec Laila ; comme le veut l’accord tacite qu’ils ont passé en quittant ce bar.

Ce qui est également surprenant, c’est sa tendance à la fuite à laquelle il ne cède pas (totalement) même quand Laila l’invite à le faire. Lui, préfère une autre interprétation concernant son addiction à la cigarette et sans surprise, elle fait preuve de plus de répondant qu’il n’en aura jamais. "T’as l’air d’en connaître un rayon sur comment compenser par autre chose." Un regard vers sa bouteille et un léger rire amusé plus tard, il prend conscience que sa réflexion veut tout dire et rien à la fois. Est-ce que là où elle passe pour une accro à la nicotine, il rivalise avec une addiction à l’alcool mise en avant sous couvert d’humour ? Est-ce qu’elle s’imagine qu’il fait partie de ces types tellement paumés que leur bouteille est leur seul moyen d’exister ? Il ne peut même pas nier cette pensée, à vrai dire, puisqu’il s’agit bien de la raison pour laquelle il a quitté le bar avec sa bière. « C’est bien pour ça que je me permets l’hypothèse. » Qu’il souligne, pour reprendre contenance, dans l’espoir de ne pas se montrer plus déstabilisé qu’il ne l’est déjà alors que son esprit a la mauvaise idée de ne jamais cessé d’émettre des hypothèses sur absolument tout ; et c’est épuisant de ne jamais s’arrêter de réfléchir et, par la suite, de paniquer.

Il réalise bien vite qu’il aurait accepté une réputation d’alcoolo de service si cela lui avait permis d’avoir une nouvelle bière dans la main pour faire face au silence de Laila après l’avoir interrogée sur la possibilité que ce soit un rencard. Et alors qu’elle reste muette, lui donnant par la même occasion la réponse à sa question, il se maudit d’avoir verbalisé quelque chose qui n’aurait pas dû l’être. Parce qu’il l’a encore pensé quelques minutes plus tôt ; il ne s’agit pas de ça entre eux et voilà qu’il a tout gâché, parce que même en se persuadant de ne pas avoir la moindre attente envers elle, il a néanmoins eu celle-ci. Il n’envisageait pas la possibilité de terminer la nuit chez l’un ou chez l’autre (oh non), ni même de lui voler un baiser à l’issue de cet échange, seulement il n’a pas pu s’empêcher d’imaginer que peut-être... peut-être, justement. Peut-être qu’elle accepterait de le revoir, sans même que ce ne soit vraiment un rencard, seulement parce que la soirée a été sauvée par la jeune femme, parce qu’elle l’a rendue plus agréable que n’importe quelle autre au cours de ces derniers mois, parce qu’il a oublié, pendant une heure, la solitude qui est la sienne au quotidien. Mais ce n’est pas un rencard et il ne peut s’empêcher de se dire qu’il n’est probablement pas assez intéressant, pas assez charmant, pas assez tout simplement et qu’il est stupide d’avoir cru que parce qu’elle s’est adressée à lui elle pourrait le voir avec un autre regard que ceux de pitié et de dépit qui lui ont été adressés le reste de la soirée. Un instant, il a envie de s’excuser pour cette question avant de se raviser ; il n’arrangerait définitivement pas son cas en lui faisant comprendre que ce constat le touche plus qu’il ne le voudrait et qu’il n’a pas su s’en tenir à leur promesse explicite. Mais qui peut le blâmer ? Elle est séduisante, bien sûr, ce serait un affront que de le passer sous silence, mais plus que ça, elle est surprenante, a une répartie qui ne le laisse pas indifférent et son aisance naturelle est fascinante. Elle l’est d’autant plus quand il comprend qu’elle n’est pas aussi innée qu’il le pensait. "T’as l’air surpris, mais je te promets que j’essaye pas de te consoler pour ta maladresse en prétendant être autant moins douée que toi." Grimaçant légèrement comme pour s’avouer vaincu face à une maladresse qu’il ne pourra jamais ignorer autant que par le fait d’être perçu à jour quant à sa surprise, Kieran s’apprête déjà à se justifier (s’excuser) alors qu’elle reprend rapidement "Ce qui encore une fois n’est pas vraiment un défaut dans le fond" Dans le fond, elle n’est pas forcément convaincue, bon "c’est inutile de t’excuser." - « C’est juste que c’est le second défaut sur la liste, déso... » Pinçant les lèvres en réalisant qu’il s’apprête encore une fois à s’excuser, il ne ment pas sur le fait que c’est un véritable défaut ; il a fait des excuses un mot de ponctuation, ce qui en dit long sur la place et la légitimité qu’il s’accorde. Et s’il se doute qu’un conseil ou deux ne seront pas suffisants pour améliorer sa situation, il ne peut pas cracher dessus pour autant. "Je crois juste que j’ai un bon instinct de survie. J’ai pas de technique à proprement parler, je me dis juste que si je veux pas avoir l’air d’attendre qu’on me bouffe toute crue, ça évitera que ça arrive vraiment." Son rire se mélange au sien durant un instant alors qu’il ne peut pas nier qu’il fait partie de ceux qui sont désignés pour être bouffés. Ce n’est pas une fierté, non, mais c’est un fait. "C’est un peu croire que croiser les doigts, ça te protège du mauvais sort. C’est pas fiable comme science, mais ça fait du bien de s’y raccrocher." Baissant légèrement la tête pour accrocher son regard quand elle tourne la tête en sa direction, il songe à la comparaison un instant. « Je pense qu’il m’en faudra un peu plus, mais je prends note de la tactique. » Un peu plus que croiser les doigts, un peu plus que savoir fait semblant, d’autant plus quand on a un instinct de survie proche du néant comme le sien. « Et pour ce que ça vaut, tu fais parfaitement illusion. » Il se permet, toujours en captant son regard alors qu’elle s’appuie contre une voiture qu’il identifie comme la sienne – et qui ne fait que la rendre plus surprenante encore. « T’es clairement plus près du prédateur que de la proie. » Et réalisant que son compliment ne sonne pas aussi bien qu’il l’aurait voulu, il s’apprête à reprendre la parole, se corrigeant néanmoins rapidement alors qu’il a conscience que ce sont des excuses qu’il aurait voulu formuler. « Ok, c’est un compliment à la base, d’accord ? » Celui qui souligne qu’elle ne donne pas envie de lui chercher des emmerdes, et que c’est d’autant plus admirable en sachant qu’elle est aussi adaptée que lui. "OK, de toi à moi, je crois que c’est toi qui gagne la bataille du je suis dur avec moi-même." Haussant les épaules, peu surpris par ce constat, il affiche à son tour un sourire quand elle précise que "Hey, tu t’en sors plutôt bien là, non ?" Qui disparaît doucement quand il prend conscience que non, il ne s’en sort pas autant qu’il l’aurait voulu ; pas suffisamment pour qu’elle puisse imaginer remettre ça, même dans un contexte purement amical. Et il ne peut s’empêcher de se dire qu’il a dû être agaçant, étouffant, pénible, quelque part dans la discussion qu’il aurait apprécié poursuivre, mais l’arrêt contre sa voiture semble en dire long sur son réel ressenti. Ou peut-être qu’il surinterprète encore une fois, et se focalise sur un sentiment d’échec devenu trop familier. « Il y a du progrès, oui. » Qu’il commente, en passant brièvement ses doigts contre sa tempe, mal à l’aise et quelque peu déstabilisé. « T’étais une bonne adversaire quand même, mes félicitations. » Qu’il préfère s’amuser en faisant écho à ses mots, alors que conscient qu’ils arrivent au bout de leur soirée, Kieran ne sait pas vraiment comment terminer celle-ci ; et que le réflexe est celui de lui tendre une main, sa posture bien droite comme s’il s’agissait de la conclusion d’un entretien d’embauche (en sachant pertinemment qu’il n’a pas su faire suffisamment bonne impression pour mériter le poste). Réalisant la stupidité de son geste, son regard se pose sur sa main tendue dont il finit par replier les doigts contre sa paume avant de laisser glisser son bras le long de son corps, sa tête qui se secoue brièvement pour se maudire silencieusement. « J’imagine que c’est ta voiture, alors je veux pas... te retenir plus longtemps. » Il aimerait, pourtant, mais il ne le fera pas, s’empressant désormais de mettre un terme à cet échange agréable, mais à l’issue duquel il se sent stupide : il n’était pas supposé avoir un coup de cœur ; et il ne peut s’en prendre qu’à lui-même. « Euh, donc... conduis bien ? Enfin, j’veux dire, fais attention. » Rentre bien, donc, et cette fois-ci cette main dont il ne sait pas quoi faire se lève pour vaguement la saluer dans un geste hasardeux, alors qu’il recule déjà de quelques pas sans pour autant la quitter des yeux, parce qu’il n’en a pas tout à fait fini. « Et merci. T’as sauvé ma soirée. » Comme elle l’avait annoncé plus tôt en se proposant comme candidate ; et même si c’est un mandat unique, elle peut se vanter de l’avoir rempli avec succès, comme en témoigne le sourire timide, mais sincère, qu’il lui adresse en guise de conclusion.

@Laila Ferrer