Gabrielle
J'arrive pas à te joindre... je suis à l'hôpital... Chan' a eu un accident. J'ai besoin que tu me rejoigne dès que tu peux...

Meryl relit le message de sa soeur, celui qui lui annonce que Channing a eu un accident de moto. Ca semble grave, du moins c’est l’effet que ça lui donne quand elle discerne la panique dans les mots de Gabrielle. Elle a l’impression que son monde vient de s’écrouler alors qu’elle réalise ce que ça peut vouloir dire. Channing a eu un accident et quand elle voit le temps qu’il y a à l’extérieur, elle s’imagine le pire. Ses gestes sont automatiques alors qu’elle range quelques plateaux, elle est maladroite et manque de faire tomber une tasse. La blonde doit avoir une mine affreuse, le choc de la nouvelle lui coupe les jambes et elle ne sait même pas comment elle arrive à rester debout. Alors quand on s’approche pour venir la voir et s’assurer qu’elle va bien, l’américaine peine à trouver ses mots. « Je... C’est mon frère... » Et puis elle réalise l’ineptie qu’elle vient de dire. « Enfin non... C’est le copain de ma soeur il... » Elle vient passer une main sur son visage, la panique vient faire taper son coeur dans sa poitrine et la boule dans sa gorge l’empêche de déglutir correctement. « Je... je dois aller à l’hôpital... » Elle cherche machinalement les clés dans son sac, fouille sans les trouver et ça l’agace. « Je sais pas où j’ai mis mes clés. » Et déjà elle sent les larmes sur ses joues et un sanglot lui oppresser la poitrine. Son sac tombe au sol et elle réalise que les clés qu’elle cherche partout depuis cinq minutes sont dans sa main depuis le début. « Je dois aller à l’hôpital... » Elle l’a déjà dit, mais elle est trop perturbée pour s’en rendre compte.

Quand elle arrive devant l’entrée principale, la blonde n’est toujours pas redescendue, l’inquiétude qui la mine se traduit par sa nervosité. Elle a peur d’entrer, de voir la détresse sur le visage de sa soeur, mais surtout elle a peur de ce qu’on va lui dire. « Merci Stacey. » C’est tout ce qu’elle peut dire à sa collègue, elle a insisté pour l’amener jusqu’ici et c’est sûrement mieux comme ça, parce qu’elle aurait été incapable de le faire. Sa main tremble légèrement alors qu’elle cherche à ouvrir la portière. Quand elle se présente enfin devant les portes automatiques, l’angoisse lui file presque la nausée. Et dès qu’elle voit Gabrielle c’est pire. Elle est là, elle reconnaît ses cheveux bruns et sa silhouette, même si elle ne l’a pas encore vue. « Gaby ! » Sans plus de réflexion, la blonde s’approche de son aînée pour finalement la prendre dans ses bras et la serrer du plus fort qu’elle peut. « J’ai fait aussi vite que j’ai pu. » Elle doit être forte, garder la tête froide, même si elle a envie de crier. « Gaby qu’est-ce qui s’est passé ? » Un accident oui elle sait ça, mais elle a besoin de comprendre, d’avoir une explication sur tout ce merdier ! « Est-ce que tu as eu des nouvelles ? C’est grave à quel point ? »

« Je sais. Merci d’être venue » La détresse de son aînée la percute de plein fouet et Meryl n’a pas besoin d’en savoir plus pour comprendre le drame qui s’est produit. Elle s’imagine déjà tout un tas de choses, son imaginaire venant combler les vides laissés par toutes les questions qu’elle se pose. Channing a eu un accident, grave et ça elle le comprend aux larmes qui marquent les joues de la brune. Elle n’a pas l’habitude de la voir dans cet état et elle ne craint que plus encore les révélations qui pourraient suivre. « Il… il s’est fait renversé par une voiture alors qu’il était en moto... le choc a été violent…» Meryl prend les informations comme elles viennent, se forçant à déglutir alors qu’elle visualise la scène. Elle n’a pas besoin d’en savoir plus, pas vraiment, même si elle crève de savoir s’il est encore en vie et si oui dans quel état. Elle n’a pas la présence d’esprit de demander comment elle est au courant de tout ça. Elle n’imagine pas qu’elle ait pu assister à la scène, qu’il s’agit d’un délit de fuite par dessus le marché. « Comment... » c’est possible... Elle ne termine pas sa phrase, la boule qui lui barre la gorge l’en empêche, d’ailleurs elle n’est même pas certaine d’avoir mis assez de corps dans sa voix pour qu’un son en sorte. On s’en fiche de savoir comment, pourquoi... Le temps est affreux cette nuit et elle a assez fait de nuit aux urgences pendant sa deuxième année pour savoir que ces nuits sont les plus macabres... « Il est… il est dans le coma … Ses blessures sont importantes et ils ne savent pas encore s’il…» Non, non, non ne dit pas ce que ton regard pense si fort Gabrielle ! Le choc passé, la blonde s’inscrit dans le déni en secouant négativement la tête. Parce que ça ne peut pas se terminer comme ça, pas d’une façon aussi bête et tragique ! Non ça n’est pas comme ça que doit se terminer l’histoire, dans les films, ça n’est pas le clap de fin ! « Bien sûr qu’il va s’en sortir ! » La conviction qu’elle met dans ses mots prouve à quel point elle est incapable de concevoir la mort de celui qu’elle considère comme son frère. « Je ne veux pas le perdre, Meryl… » Gabrielle a beau détourner le regard, la blonde n’est pas dupe et si les siennes se contiennent c’est uniquement parce qu’elle ne réalise pas encore le fait qu’elle l’a peut-être perdu pour toujours. « On le perdra pas... Il va se réveiller et tout ça sera de l’histoire ancienne ! » Peut-être que si elle le répète encore et encore, alors on va venir leur dire que tout ça n’est pas réel, qu’il va bien.
La villa lui semble immensément vide depuis un bon moment maintenant. Elle n’est pas spécialement habituée à la solitude la blonde et pour dire vrai, ça a tendance à l’angoisser plus qu’autre chose. C’est peut-être pour ça qu’elle s’échappe presque tous les jours quand elle sait que Gabrielle ne sera pas là. Et faut dire qu’elle n’est pas souvent présente puisqu’elle passe l’essentiel de son temps au chevet de Channing, chose qu’elle comprend et jamais elle ne lui reprochera le fait de vouloir profiter de chaque moment. Ca fait quelques jours qu’elle songe à passer les portes de l’hôpital pour aller le voir, pourtant aujourd’hui encore, elle s’est dégonflée après le boulot et si elle est à la villa ce soir, c’est uniquement parce que Gabrielle lui a fait savoir qu’elle serait là. « Meryl ? » La blonde sort de sa rêverie, s’empresse de ranger son téléphone où elle pianotait des excuses bidon qu’elle n’enverra jamais, trop lâche qu’elle est pour le faire. « Ça va ? » Sourire de façade bien ancré sur son joli minois, la jeune femme tâche de faire illusion pour ne pas que la brune se fasse plus de soucis qu’elle ne s’en fait déjà. « Un peu fatiguée et surtout affamée en fait et toi ?! » Question stupide, mais elle préfère de loin qu’on éloigne la conversation d’elle. « J’ai pris des burgers… et beaucoup de frites » De son poing fermé, elle lâche un ‘yes’ satisfait alors que déjà elle fouille dans le sac pour aller taper une frite ou deux. « Tu as lu dans mes pensées ! J’avais peur que tu ramènes... Un truc ‘diététique’ » Elle prend soin de mimer les guillemets en levant les yeux au ciel. Parce qu’elle est du genre à se jeter dans la malbouffe et le sucre quand elle est contrariée, et que ça fait bien longtemps qu’elle a dépassé ce stade. « Comment va Channing ? » La question semble anodine pourtant la blonde brûle de savoir comment il va réellement. Elle se doute que moralement, ça ne doit pas aller fort, mais elle a espoir qu’il puisse aller un peu mieux sur le plan physique au moins.

« Same » La cadette acquiesce d’un signe de tête, elle sait qu’elle n’aura pas plus d’informations sur l’état de sa soeur et par ce simple mot, elle clôture l’éventuel échange qui aurait pu avoir lieu entre elles deux. La jeune femme ne compte pas insister, le sujet est toujours sensible et cela même si le brun s’est réveillé et qu’il est conscient. De ce qu’elle sait, il n’est pas des plus en forme, les séquelles sont présentes et ça la bouffe d’autant plus. Elle préfère donc elle-aussi chasser la potentielle conversation qui pourrait découler de tout ça. « Profites-en, demain, ce sera un repas diététique, préparé par mes soins » Et là elle ne peut s’empêcher de grimacer en reprenant une frite au passage. « Pourquoi tant de haine envers moi ? Tu sais, si tu veux récupérer ta chambre d’ami, suffit de me le dire, pas besoin de tenter de m’empoisonner ! » Elle lui adresse un clin d’oeil avant de laisser passer un rire amusé, elle tente de se détacher, pourtant le sujet Channing occupe trop ses pensées pour qu’elle s’en détache totalement.

« Il va… d’apparence... C’est difficile pour lui, même s’il ne laisse rien transparaitre. Il est seul toute la journée, il ne sait pas comment il va pouvoir récupérer de ses blessures, même si avec son frère on essaye de le rassurer. Il ira mieux… mais il va falloir du temps » Elle imagine sans peine à quel point le brun doit trouver le temps long et l’avenir bien incertain. Elle l’imagine mal cloué dans un fauteuil, pour être franche, elle a du mal à se projeter tant elle est partagée entre tous les sentiments qui se bousculent en elle. L’américaine garde le silence, se contente d’acquiescer car elle ne sait pas vraiment quoi dire. « Tu devrais aller le voir… Il serait content et ça lui ferait un peu de compagnie, même si ce n’est que quelques minutes » Elle détourne le regard, la boule qu’elle avait dans l’estomac vient de gagner sa gorge et elle a toutes les peines du monde à déglutir. « Ca m’étonne venant de toi, Meryl… Je sais que tu apprécies Channing, qu’est-ce qui te retient ? » Bien sûr qu’elle apprécie Channing, elle l’a toujours considéré comme un frère et le savoir aussi mal en point la blesse plus qu’elle le laisse voir. « C’est... compliqué. » Pas vraiment en réalité, elle a juste été stupide et s’en veut. L’espace d’une seconde, elle songe à se tirer, fuir la conversation qu’elle a elle-même amené, mais elle renonce. Un soupire passe ses lèvres, tandis qu’elle continue de fuir le regard de son aînée. « Il n’a sûrement pas envie de me voir... » Elle joue un instant avec la nourriture qu’elle tient entre ses doigts, peut-être qu’elle cherche ses mots. « Pas après ce que je lui ai dit... Channing doit me détester, et il a raison... » Détester, le terme est sûrement un peu fort, mais il est à l’image de cette culpabilité qui la ronge depuis le soir de l’accident. C’est peut-être pour ça qu’elle a besoin de vider son sac, même si elle a peur de décevoir sa soeur également. « J’étais en colère après votre dispute... Je lui ai envoyé des messages... C’était stupide. » Elle se garde bien de dire ce qu’elle a dit au brun, elle se contente là-encore de déglutir difficilement, sa voix est chargée par l’émotion qui la bouffe. « Je suis sûrement la dernière personne qu’il veut voir à son chevet. » Et ça lui crève la poitrine de le réaliser.

« Arrête donc de te plaindre » La jeune femme sourit à son tour, ravie de pouvoir plaisanter un peu avec sa sœur. « Je ne me plains pas, je ne fais qu’énoncer un fait... Tu veux attenté à ma vie, c’est grave... TRES grave ! » Ca lui fait du bien un peu de légèreté, d’autant que l’ambiance est un peu tendue. Elle aimerait que tout redevienne comme avant... Avant cette accident, avant la dispute et ce qui en a découlé. Si elle avait une machine à remonter le temps, nul doute qu’elle effacerait beaucoup de ses erreurs pour ne pas avoir à vivre avec ce poids sur l’estomac. Channing reste sa principale préoccupation et elle aimerait oser franchir le seuil de sa porte, le serrer contre elle tant il lui manque d’une certaine façon. Elle voit bien que son comportement interroge son aînée qui ne doit rien comprendre à tout ça. « Pourquoi dis-tu une chose pareille, Mer’ ? » L’américaine ouvre les vannes sans pour autant passer aux aveux sur le fond. L’avocate recule et la jeune femme ne sait pas vraiment comment interpréter les choses tant elle craint la réaction de Gabrielle. Elle a beau lui répéter encore et encore qu’elle sera toujours là, elle ne peut rien contre l’angoisse de la gamine qu’elle reste au fond d’elle, celle qui craint toujours de se faire repousser. « Ne dis pas ça, Mer’... mais je suis persuadée qu’il ne t’en tient pas rigueur. » Elle serre sa main dans la sienne, comme si ça pouvait suffire à la rassurer et la convaincre qu’en effet Channing ne lui en voudrait pas. « J’en sais rien... » A son tour, elle soupire, toute la culpabilité du monde accumulée sur son estomac. « il aurait pu me repousser aussi et il ne l’a pas fait. Cette dispute… n’a plus d’importance. Et puis, il a bien d’autres soucis désormais que de se focaliser sur des mots que tu aurais pu avoir à son encontre» Elle lève son regard pour trouver celui de sa soeur pour y trouver toute la bienveillance dont elle a besoin pour se rassurer. « J’espère que tu as raison... Je n’ai pas envie de le perdre. » Parce qu’elle l’aime le brun, pas comme Gabrielle l’aime c’est certain, mais elle l’aime à sa façon. « et il sait que tu as fait ça pour défendre ta grande sœur...» Un rire léger passe ses lèvres, le genre qui fait du bien car il vient retirer un soupçon d’angoisse. Ca détend l’atmosphère et la rend bien plus respirable.

«Je peux savoir ce que tu lui as dit au juste ? » L’américaine grimace en repensant à chaque lettres, chaque mots qu’elle a tapé sur son smartphone sous le coup de l’impulsion. « J’ai... peut-être dit que... c’était un putain d’idiot et... qu’il avait encore tout gâché. » Elle se sent stupide en prononçant les mots. « Je l’ai envoyé se promener en voyant qu’il ne me répondait pas... J’ai... Pas vraiment été courtoise. » Loin de là même. « J’aurai pas dû me mêler de vos affaires, je suis désolée. C’était égoïste de ma part, mais je me rappelle dans quel état tu étais à LA après votre séparation... J’avais pas envie que ça recommence. » Comme une gamine qui n’a pas envie de voir ses parents se séparer dans le fond.

« Et n’oublies pas que ta grande sœur est avocate ET avocate pénaliste qui plus est, ET qu’elle en connait donc un rayon sur comment attenter à ta vie et ça, sans se faire débusquer » La jeune femme porte la main sur sa poitrine en affichant un air des plus choqué digne des plus grands comédiens, à ce demander pourquoi elle n’avait pas percé à Hollywood !  « Me voilà condamnée ! Moi qui avait toute la vie devant moi ! » La Strange ne peut s’empêcher de rire à sa propre bêtise, parce qu’elle sait que Gabrielle est bien trop protectrice avec elle pour tenter quoi que ce soit, la preuve en est qu’elle l’a accueillie chez elle, alors qu’elle aurait pu la laisser se dépatouiller dans ses galères adolescentes. D’autant que les conneries, elle a tendance à les enchaîner depuis un moment et que ça la ronge à petit feu tant elle a l’impression d’être embourbée dans une situation qu’elle ne contrôle pas vraiment. Au final, cet accident c’est venu lui rappeler une nouvelle fois que la vie, ça ne tient à rien, et qu’en un claquement de doigts, tout un équilibre peut voler en éclat. « On a failli le perdre mais je te garantis qu’on ne le perdra plus… » Elle a envie d’y croire alors elle acquiesce d’un signe de tête la gorge un peu nouée, elle n’a plus qu’un ersatz de famille et la blonde a toujours eu du mal à gérer les choses dès lors qu’elle s’attache... et c’est bien là le problème, elle à tendance à prendre les choses trop à cœur et à déraper.

La blonde guette la réaction de sa sœur, sûrement qu’elle a peur de se prendre une remontrance quant au fait qu’elle se mêle de ses affaires. « C’est moi qui suis censée jouer les grandes sœurs, pas l’inverse » A cette remarque, la blonde ne peut s’empêcher de lever les yeux au ciel. « Faut bien que quelqu’un veille sur toi aussi... » Sous-entendu, ce ne serait pas leurs frères qui s’en chargeraient ! Du moins c’est le sentiment qu’elle ressent, quoi qu’ils seraient sûrement présents pour Gabrielle si elle en avait besoin... Pas sûre qu’ils se donnent la peine de s’intéresser à elle si Meryl était en galère ! « Ca n'était pas égoïste… tu n’as pas réfléchi, tu as agi sur le coup de l’impulsion… j’aurai préféré que tu t’abstiennes mais… je suis reconnaissante que tu ai cherché aussi à me défendre et à me protéger » Elle soupire, baissant les épaules acceptant les mots de sa soeur sans chercher à la contredire ou autre... après tout les mots posés par Gabrielle étaient justes... Elle voulait juste la protéger, veiller sur elle, s’assurer qu’elle n’aurait pas son coeur en miettes. Meryl serre la main de son ainée, se raccrochant à elle. « Promets moi juste de ne plus recommencer ? et promets moi surtout d’aller le voir ? » Elle vient ramener sa main contre son visage en levant les yeux au ciel, secouant la tête par la même occasion. « Tu as ma parole. » Elle n’irait plus se mêler de ses affaires, sauf si elle sent que les choses sont trop graves... « Je vais aller le voir... bientôt. » Il faudrait juste qu’elle trouve le courage de le faire. Et même si elle rit avec sa soeur, elle se dit qu’elle n’est pas encore prête à assumer le regard et les blessures du brun. et de t’excuser de l’avoir traité d’idiot » La blonde grimace en mangeant plusieurs frites. « Hmmm... je suis obligée ?!!! » Bien sûr qu’elle va le faire, mais elle ne peut s’empêcher de faire sa petite moue boudeuse. « Très bien... je vais m’excuser...  !» Elle attrape son burger et quand elle en prend une bouchée, elle ne peut s’empêcher de faire rouler ses yeux de satisfaction. « Ce truc est une tuerie ! » Et elle pèse ses mots ! « Tu sais que je t’aime toi ? » Elle fait exprès de jouer sur ambiguïté de sa phrase, à savoir si elle parle du burger ou de sa sœur, un doux sourire accroché à son visage plus apaisé maintenant qu’elle avait avoué ce qui lui pesait sur le coeur. « Merci Gaby. » D’être là encore et toujours pour elle !