En bonne tête de mule (bélier un jour, bélier toujours), Dani n’a pas écouté Noor. Elle a joué à pile ou face. Elle a une chance sur deux de se trouver face à une porte close en se rendant chez Hugo. Elle soupire en jetant son téléphone sur son lit après avoir échanger des sms avec sa meilleure amie. Dani ouvre son armoire, elle troque son pyjama, contre un jean et un sweat trop grand pour elle. Sans s’en rendre compte, il s’agit d’un haut qu’elle avait emprunté à son ex lorsqu’ils étaient encore ensemble. Elle l’a toujours gardé dans ses affaires. Il a voyagé de pays en pays.

Elle attrape sa trousse de secours, car dans l’appart d’Hugo c’est bien le dernier truc qu’elle trouvera sur place. Le Blanchard est une espèce qui ne prévoit rien, qui fait tout au feeling et Dani a été assez longtemps avec le français pour le connaître par cœur. Lyb a peut-être rapporté quelques trucs depuis qu’elle vit chez son meilleur ami, mais la brune est plus du genre à gérer les courses et le stock de papiers toilettes si vous voyez ce que je veux dire.

Bref là n’est pas le sujet. Après vingt minutes de route en plein milieu de la nuit, Dani n’a même pas regardé l’heure. Elle s’en fiche, Hugo est sa priorité. S’il peut éviter de mourir bêtement, surtout après son nombre incalculable d’intoxications alimentaires causées par les filles. Dani dramatique ? A peine. Putain Lyb est en train de déteindre sur elle. Rien ne va. C’est la panique dans sa tête. C’est qu’elle va lui faire un lavage de cerveau à répéter le mot « ton amoureux » dans tous ses messages. Dani n’est plus amoureuse, enfin elle croit, ça fait des années qu’elle n’est plus tombée amoureuse.

Dani se gare sur la première place qu’elle trouve devant l’immeuble d’Hugo. Elle monte les étages avec sa mallette de premiers soins dans les mains. La Hwang, elle est habituée à jouer aux infirmières, entre Jules, Channing et maintenant Hugo. Dans une vie antérieure, elle est certaine d’avoir été une guérisseuse, en même temps les plantes médicinales, elle s’y connait. Merci halmeoni* Hyuna, sa grand-mère qui lui a transmis tous ses savoirs sur ce sujet plein de mystères.

Elle appuie sur la sonnette. Rien. Elle fait une deuxième tentative puis une troisième. Toujours rien. « C’est Dani. » hurle-t-elle en frappant vigoureusement à la porte. Les voisins doivent la détester, pourtant la coréenne s’en fiche. Surtout quand son ex s’est fait défoncer par l’ex de Lyb. N’importe quoi. Elle ira lui faire sa fête à ce connard plus tard. L’œnologue est plus subtile que le français, elle use de son intelligence plutôt que de la force. Elle peut te faire dégueuler ton vin, ou rajouter du piment dans un plat pour rendre malade une personne quand on la cherche. Un conseil : ne jamais cherche Dani Hwang.

Elle soupire, elle n’entend aucun de bruit derrière la porte. Elle ne s’est pas trompée d’étage, elle est sûre et certaine. C’est le numéro 47. Hugo n’est pas aux urgences ? Lyb et son mystère… Elle prend une profonde inspiration. Si c’était aussi grave que ça, elle lui aurait dit. « Hugo ouvre s’il te plait. » Peut-être que la tentative douce va-t-elle marcher ? Echec. Elle commence à perdre patience. « T’es obligé d’ouvrir je suis au courant ! » qu’elle gronde. Lyb lui a tout raconté mais ce n’est qu’un détail. « M’oblige pas à forcer ta porte. » menace-t-elle cette fois-ci d’une voix plus sérieuse. Dani ne va pas défoncer sa porte d’entrée, non, non. Elle est capable de vous ouvrir une porte avec un simple crochet, une épingle à cheveux ou encore un tournevis. L’œnologue a toujours ce genre d’objets incongrus dans son sac, dont un tire-bouchon. Œnologue un jour, œnologue toujours.

Allez Hugo ouvre. Fais pas le con.

*grand-mère en coréen

 

Ça sonne et j'ai franchement la flemme de sortir du lit pour aller ouvrir. Surtout que le moindre mouvement me fait vraiment un mal de chien. Pourquoi c'est toujours quand y'a personne à l'appart que les gens débarquent chez moi ? Je sais même pas qui ça peut être à cette heure-ci. Le voisin a pas intérêt de me faire chier, j'ai même pas mis la musique sur l'enceinte ce soir. Il est quasi minuit, Lyb est partie depuis quinze minutes pour aller me chercher du Doliprane et des trucs pour désinfecter mes plaies je crois. Elle en a pour un bout de temps avant de revenir. C'est ça de pas avoir le permis. J'abuse en vrai. Je sais pas ce que j'aurais fait sans elle aujourd'hui... « C’est Dani. » Quoi ? Mais qu'est-ce que tu fous là, Dani ? Il est bien tard pour passer chez moi. Puis, je suis censé être au boulot, et tu le sais bien. Tu venais voir Noor ? Hm, oui, ça ne peut être que ça. Je serais franchement tenté de venir t'ouvrir, mais avec ma gueule ensanglantée, les douleurs au bide et sur mes côtes, je préfère plutôt rester dans mon lit jusqu'à demain soir. Toute façon, t'es pas là pour moi, et j'ai la flemme de m'expliquer sur l'incident d'aujourd'hui.  « Hugo ouvre s’il te plait. » Euuuuh. Y'a erreur là je crois. Pourquoi tu viens me voir ? Me dis pas que Lyb t'a déjà tout raconté ? Elle est sérieuse ? Elle ne m'a lâché la grappe qu'une trentaine de minutes (et les quinze minutes depuis qu'elle est sortie), et toi, tu rappliques déjà chez moi ? Wah, mais c'est le téléphone arabe par ici ! Qu'est-ce qu'elle a bien pu balancer pour que tu sois sur le pas de ma porte ? « T’es obligé d’ouvrir je suis au courant ! » Putainnnnnnn c'est vraiment la pire la mamma. Je grommèle en silence parce que je sais que tu risques de m'entendre si t'as l'oreille collée sur la porte. "J'vais la niquer", je souffle tout bas. Pour une fois dans ma vie, j'avais pas spécialement envie de voir du monde, mais juste de me pieuter. « M’oblige pas à forcer ta porte. » Rolala. T'es chiante toi aussi quand tu t'y mets. Puis d'ailleurs, pourquoi t'es là ? Qu'est-ce que t'en as à foutre de tout ça, tu t'inquiètes ? Faut pas s'inquiéter pour moi hein, tout roule. Mais bon, c'est mignon quand même si c'est pour ça que t'es là. Je me sors (difficilement) de mon lit, donc ça prend déjà bien trente secondes. J'essaie d'aller assez vite, mais c'est dur de mobiliser mes muscles qui commençaient tout juste à se détendre. Du coup, je crie un rapide "J'arrive" pour éviter que tu défonces vraiment ma porte, et j'enfile un t-shirt parce que je sens que tu vas complètement vriller en voyant tous les hématomes qui se voient bien maintenant. Autant cacher la misère comme on peut. Ce qu'il y a sur ma tronche par contre, c'est beaucoup plus difficile à camoufler. Tant pis, toute façon, t'es déjà au courant. Je débarque après trois bonnes minutes pour déverrouiller le loquet et te laisser rentrer. T'as ramené une petite trousse de secours, t'es trop mignonne. T'aimes bien jouer les infirmières, hein. Même quand j'avais une minuscule ampoule derrière le pied, t'insistais pour me mettre un pansement. "Fallait pas te déplacer, Dani... Y'a Lyb qui est partie me chercher tout ce qu'il faut à la pharmacie de garde." Mais puisque t'es là, autant rentrer. T'es peut-être déjà venue ici en rendant visite à Noor, je sais même pas vraiment qui passe dans mon appart, mais je te montre quand même mon canapé du menton pour que t'ailles t'y asseoir. "Installe-toi. Tu veux boire un truc ?" Pas sûr d'être capable de te faire un cocktail, mais j'arriverais bien à te soulever la bouteille de jus de fruit qui traine au frigo. Je me sers un verre d'eau, te ramène ta boisson à toi, et viens m'asseoir à tes côtés. T'as mis mon pull. Tu l'as gardé malgré toutes ces années... Je savais qu'il était chez toi, mais je te l'ai jamais redemandé. Toute façon, tu le mettais déjà bien plus que moi à l'époque. Même pas sûr que tu te souviennes qu'il n'est pas à toi. "Tu bosses pas demain ? Tu vas être crevée." C'est plus ton rôle de prendre soin de moi à n'importe quelle heure.

T’as jamais été patiente, encore moins lorsque tu sais que derrière la porte, ton ex est amoché. Il s’est battu avec Seth, LE Seth de Noor, de spicy mama. Tu as toujours été une personne loyale et fidèle, Lyb t’as confié quelques sombres secrets de sa relation avec son ex. Elle t’a fait jurer de ne rien dire aux garçons, alors tu n’avais rien dit, muette comme une tombe.

Sauf qu’Hugo est rentré dans l’équation et t’apprends au beau milieu de la nuit qu’il s’est battu avec l’autre imbécile. Tu rumines intérieurement, tu t’apprêtes à hausser la voix de nouveau que la porte s’ouvre. T’as l’air idiote avec ta bouche entrouverte, que t’essayes maladroitement de refermer comme si de rien n’était. Il t’informe que Lyb est partie chercher le nécessaire à la pharmacie du coin. T’as pas le temps de te demander si c’est encore une combine de la mexicaine pour que vous vous retrouvez de nouveau ensemble. Tu ne réfléchis pas, et rentre dans l’appartement sans répondre au Blanchard. Ça te fait tout drôle de découvrir son appart, même si Lyb t’as souvent envoyé des photos depuis qu’elle crèche chez son meilleur ami.

Le français te montre le canapé, étrangement rangé, Lyb est passée par là, t’oses pas imaginer l’état de la chambre d’Hugo. Mais ce qui t’inquiète le plus, c’est de voir son œil au beurre noir. Quel con. T’es vraiment con Blanchard. Un soupire s’échappe d’entre tes lèvres lorsqu’Hugo te propose un verre. Tu fais un non de la tête. Il s’inquiète pour ton travail. L’avantage d’être patronne, c’est que tu gères tes horaires comme tu veux. Puis le vignoble peut tourner un jour sans toi. T’as bien été absente pendant des mois et aucun nouveau drame ne s’est produit depuis. « Ne t’inquiètes pas pour moi. » De toute façon, t’as jamais bien dormi. Et là c’est tout simplement impossible de t’endormir depuis que t’as reçu les messages de Noor.

Tu déposes ta trousse de secours sur la table basse du salon et demandes d’une voix douce, même si à l’intérieur de toi, t’es énervée. Contre Seth, contre Hugo, contre Lyb, contre la Terre entière. « Tu peux venir t’asseoir Hugo s’il te plait. » Il hésite un instant, ton regard se fait plus insistant, et il finit par te rejoindre. Sa démarche maladroite n’échappe pas à ton regard de lynx. Tu te mords l’intérieur des lèvres. Ça te peine de le voir dans cet état. Il n’a plus cette étincelle dans les yeux que tu aimes tant. Doucement, il vient s’assoir à tes côtés, tes opales observent les dégâts sur le visage masculin. « Qu’est-ce qu’il s’est passé Hugo ? » Et t’as pas intérêt à me mentir, tu ne sais pas mentir devant moi de toute façon. T’es un piètre menteur de façon générale. Pourtant, elle veut écouter sa version de l’histoire. Avec l’une de tes mains, tu viens remettre une mèche blonde derrière l’oreille masculine, dévoilant son œil blessé. « Il t’a pas loupé. » Les mecs ça ne réfléchit pas avec leurs têtes, il y a cette espèce d’égo masculin de montrer qui est le plus fort.

 

« Ne t’inquiètes pas pour moi. » Ca ne répond pas à ma question. "T’es vraiment pas obligée, Dani. Tu peux rentrer chez toi. Surtout si t’as une longue journée qui t’att…" « Tu peux venir t’asseoir Hugo s’il te plait. » Tu me coupes. Comme si j’avais pas vraiment le choix, en fait. Je soupire. Face à ton regard insistant, je peux pas faire grand-chose d’autre : je capitule. Je prends place sur ce qui fait office de lit pour Reese, juste à côté de toi. Toute façon, tu reviendras pas sur ta décision, et tu comptes bien rester. Ta voix douce me demande des détails alors que tes doigts glissent le long de ma joue pour remettre une mèche derrière mon oreille. C’est nouveau, cette proximité. Je pourrais jurer sentir la chaleur de ta main, même si tu ne me touches pas directement, et j’ai envie de poser mon visage dans ta paume, toucher ta peau. Je ne bouge pourtant pas, trop intimidé par ce rapprochement après tant d’années. "Je croyais que tu savais tout ?" dis-je alors en souriant doucement, mes yeux venant chercher les tiens. Mais toi, tu observes simplement les marques sur mon visage, d’une douceur infinie. Ca, ça pourrait presque me soigner. "Il y a été fort, ouais… Une crampe survient dans ma cuisse. A force de te contempler, j’en ai oublié de m’asseoir confortablement pour éviter les douleurs sur le reste de mon corps. "Aïe ! Aïe, putain !" Ca m’apprendra à lorgner sur mes exs, tiens. Je détends ma jambe, souffle, et cale finalement mon dos sur le dossier, ma tête basculée en arrière. "Elle t’a dit quoi, Lyb ?" Pour que tu débarques, c’est qu’elle a dû aller dans les détails quand même, non ? "Parce qu’en vrai, y’a pas grand-chose à savoir, hm." J’aurais au moins appris quelque chose grâce à ce con : je suis visiblement très nul pour me battre. Note à moi-même : vaut mieux ramener Kai avec moi si je veux casser du nez ET gagner. "C’est juste trop con, toute cette histoire." J’aurais pu m’en tenir aux mots avec lui, ou même pas aller le voir, en fait. J’aurais juste pu m’excuser et laisser le temps à Theo de revenir, de ne plus m’en vouloir. Puis, je suis sûr qu’elle aurait fini par comprendre : je savais pas que May est sa mère, et jamais je n’aurais couché avec elle si j’avais su. "Si tu veux tout savoir, Seth a couché avec une très bonne amie à moi. Elle est tombée enceinte, lui en a fait part, mais il n’a rien voulu savoir. Elle a dû gérer l’avortement seule." C’est vraiment lâche de la part de Seth, mais c’est vrai que ça ne méritait pas tous ces coups perdus. "Au début, je voulais juste aller le menacer. Pour qu’il laisse Theo tranquille, qu’il ne la recontacte plus, qu’il reste en dehors de sa vie. Mais vu le personnage, j’ai vraiment pas réussi à garder mon sang froid" je poursuis, sans oser te regarder pour autant. Je suis pas très fier d’en être venu aux mains, hm… "Il est tellement arrogant, tellement lâche, tellement… Provocant. Je t’assure Dani, c’est vraiment un con fini à la pisse." Je relève ma tête vers toi pour ancrer mon regard dans le tien. "Puis, si j’avais su que c’était l’ex de Lyb, j’y serai allé bien plus fort. Après tout ce qu’il lui a fait…" Toi-même tu sais à que point je lui en veux à ce salopard, alors que je ne l’avais jamais rencontré de toute ma vie.  

Quand tu prends le lead, il y a ton côté autoritaire qui ressort malgré ta taille de minimoys. Tu es la re présentation de la contradiction, douce mais stricte à la fois. Tu t’énerves vite, impulsive dans l’âme. Mais avec Hugo c’est différent. T’essayes de ne pas montrer ton inquiétude mais ta gestuelle dit le contraire. T’es soudainement proche, trop proche de lui. Ta main remet une mèche rebelle derrière l’oreille masculine.

Il t’interroge, il est persuadé que tu connaissais toute l’histoire. Tu n’as que la version de Lyb en ta possession. Tu veux entendre l’histoire de la bouche d’Hugo. Ton sourire se fait timide alors qu’il plante son regard dans le tiens. Tes lippes s’étirent bêtement. T’oublies presque la gravité de la situation mais tu reviens vite sur Terre quand Hugo reprend la parole.

Sauf que tout ton corps s’alarme lorsqu’Hugo se met à crier de douleur. « Hugo ! Ça va ?? » que tu demandes manquant de perdre l’équilibre sur le canapé. Hugo a mal, tu as mal, comme si vous étiez connecté. Malgré le fait que vous ne soyez plus amants, il y a ce lien spécial entre vous, impérissable. Indissociable. Rapidement tu comprends qu’il s’agissait d’une crampe et ton palpitant se calme.

Ouais y’a sans doute pas grand choses à dire à propos de cette altercation. Les mecs ne pensent pas. Ils agissent. Et Hugo a perdu. Son corps souffre. Triste récompense.

Tes yeux s’écarquillent quand t’apprends les sombres détails de cette histoire. Un bail des plus étranges. Une coïncidence beaucoup trop grande, foutu Destin. Hugo a été malchanceux, clairement. Le Blanchard dépeint un portrait détestable de l’ex de Lyb. Le fameux Seth. Noor et Hugo ne sont pas meilleurs amis pour rien. Ils ont le chic de se retrouver dans ce genre de situation, à fréquenter les mauvaises personnes au mauvais moment. Sauf Dani bien évidemment. « Hugo… tu sais que la violence n’est pas une solution. Je suis d’accord avec toi que Seth est un con fini. Que Lyb ne le mérite pas, qu’il l’a fait souffrir au lieu de la respecter. Mais te rabaisse pas à son niveau s’il te plait. » est-ce que tu m’écouteras ou ton côté protecteur prendra le dessus ?

« Lyb m’a raconté une version similaire à la tienne. » tu soupires. Tu as pris soin d’omettre certains détails. Notamment le côté violent de Seth, tu tiens ta promesse envers ta meilleure amie. Puis tu fais abstraction du forcing de Lyb à jouer les entremetteuses.

« T’as vraiment pas eu de chance. Bon laisse-moi voir l’étendue des dégâts. » Tu ouvres ta trousse de secours, prends le nécessaire et commence à délicatement nettoyer et désinfecter les plaies d’Hugo sur son visage. Ça te fait bizarre d’être aussi proche de lui, pourtant tu restes concentrée et minutieuse dans ton travail, ta mission. Par moment, tu te pinces les lèvres quand tu fais mal à Hugo en appuyant trop fort. Ton regard s’excuse en silence. Quelques minutes plus tard, tu déclares « Bon le visage ça a l’air d’être bon. Il t’as cogné où ce connard ? »

 

T’es tellement belle que j’en chope une crampe, quoi. Mon regard lâche soudainement le tien pour trouver une position plus confortable, et toi, tu t’inquiètes de me voir crier. J’avoue, j’en fais peut-être un peu, un tout petit peu, des caisses. Mon corps se détend alors que je m’adosse sur le canapé. "Ouais, une crampe. T’inquiète" que je te réponds en souriant, avant de te raconter toute ce qui s’est passé cet après-midi. Je cherche ni à me justifier, ni à t’attendrir, ni à me faire engueuler. Ce qui est fait est fait, je suis sans doute allé un chouia trop loin avec Seth, mais l’histoire est réglée maintenant. M’enfin, c’est ce que je pensais. Quand je t’entends me dire que j’ai peut-être fait un peu de la merde, ça me fait un petit pincement au cœur. "Tu crois sincèrement que je me suis rabaissé à son niveau ?" Ca fait franchement mal d’entendre ça. Je suis pas aussi con que lui, pourquoi tu me compares à lui ? "J’ai rien à voir avec lui, Dani…" que j’ajoute quand même, pour te faire comprendre que, vraiment, j’ai pas aimé cette remarque. Je lui suis pas, hein ? Même si moi aussi, je prends Noor pour acquise. Même si, moi aussi, je fous pas grand-chose en terme de tâche ménagère depuis que la mexicaine a débarqué sur Brisbane. Même si je la vire du lit pour que d’autres prennent sa place pour que je vide mes couilles sans jamais les rappeler le lendemain. Non, j’ai rien à voir avec lui, hein ?

Tu t’occupes finalement de nettoyer ces plaies que j’ai grossièrement rincées à l’eau et au savon, sans vraiment prendre le temps de le faire correctement. T’as l’air hyper concentrée alors que ton visage est si près du mien. Je peux sentir ton souffle sur ma peau, et je profite que tu sois focus sur ta tâche pour vraiment observer ton visage. On s’est croisés plus d’une fois ces derniers temps, mais on a jamais vraiment été en tête à tête très longtemps. Sauf le 4 juillet. Mais ce soir-là, c’était particulier. Ce soir-là, y’avait aucune raison pour qu’un rapprochement se fasse. Alors qu’aujourd’hui, t’es venue exprès pour voir comment j’allais. Tu t’es déplacée volontairement pour panser mes blessures. T’étais pas obligée, mais t’es quand même là, avec tes compresses et ta bouteille d’alcool dans la main, en train de brûler ce qui me reste de peau en y passant ton coton aux endroits où j’ai saigné. Ton visage est toujours aussi doux, ton regard aussi bienveillant, tes doigts aussi fins. Je me laisse faire alors que je serre la mâchoire à chaque fois que t’appuies un peu trop fort. T’as vu, je suis docile quand même. J’arrive pas à retenir ce petit sourire tout le long, sans doute un peu gêné de cette proximité. Sourire qui disparait bien vite quand tu me sous-entend qu’il va falloir que je te montre le reste de mon corps pour que tu l’examines. "Non mais le reste, c’est bon, y’a rien d’ouvert." Je me suis regardé dans le miroir en rentrant, j’ai des énormes hématomes qui commencent à pointer le bout de leur nez. Ils sont pas encore bien visibles, mais je les sens pourtant plus que bien. J’ai pas envie de retirer mon t-shirt pour que t’aies à voir ça, mais d’après ton regard, je crois que tu ne me laisses pas bien le choix. Je me redresse alors doucement, me levant du canapé pour me débarrasser plus facilement du tissu.

Je sens ton regard, presque effrayé, posé sur mon torse. Je suis pas du genre pudique habituellement, mais là, ça me fait vraiment tout drôle. "C’est rien, tu vois bien que c’est rien. Ca passera vite." que je t’annonce d’un air détaché, plus pour te rassurer que parce que c’est la vérité. Je sais que les jours qui vont arriver, je vais encore plus souffrir. "C'est bon, tu t'es rincée l'oeil, j'peux me rhabiller maintenant ?" je balance, sourire espiègle sur mes lèvres. Faut bien détendre l'atmosphère, sinon on risque de chialer à deux sur place à ce rythme.

Tu le sens, tu le sais, tu le connais par cœur malgré les années qui ont coulées entre vous. Tes propos l’ont blessé. Tu te mords les lèvres. T’aimes pas faire mal aux gens, mais tu n’es plus la Dani qu’il a connu durant vos années étudiantes. Tu as grandi, tu t’es forgée, tu t’es construit cette armure depuis la mort de ton papy. L’une des principales causes de votre rupture. T’es devenue encore plus butée et têtue que tu ne l’es déjà. Bélier un jour, bélier pour toujours.

Un soupir glisse d’entre tes lèvres. T’hésites entre le silence et la communication, puis c’est plus fort que toi. “J’aime pas la violence.” que tu lâches sur un ton neutre, presque froid, même si ce n’est pas volontaire. T’as toujours eu le don de détourner les questions auxquelles tu n’as pas envie de répondre. Pourtant, tu tentes  un semblant de communication. Et là, y’a une raison importante et valable : Noor. Si tu parles trop, il va se douter d’un truc Hugo. Il cogne Seth en le croisant alors s’il savait… s’il savait la vérité…s’il avait connaissance des violences verbales de l’ex petit-ami de votre meilleure amie. T’as pas envie de passer la nuit aux urgences. Ça te fait déjà du mal de le voir comme ça, comme un chien battu.

Puis tu reviens à la réalité, tu ne veux pas trahir la confiance de Lyb, déjà que tu as bien ramé à la récupérer quand Hugo et toi avaient caché le début de votre relation à l’ensemble du groupe. Désormais, tu as compris la leçon, tu ne feras pas l’erreur deux fois de suite, même si Hugo a toujours eu une grande influence sur toi. Et il l’a toujours, même si tu ne veux rien lui montrer.. Même si Noor a fait son cinéma pour que tu retrouves le Blanchard ce soir, tu serais quand même venue dans tous les cas. Mais tu te raisonnes,  tu n’es plus sa petite amie.. il est ton ex, ton ami ? Tu ne sais plus, tu t’y perds dans cette histoire, encore plus depuis que les five se sont réunis à Brisbane pour de nouvelles aventures.

Alors tu t’appliques à nettoyer et désinfecter les plaies d’Hugo sur son visage. Tu es proche de lui mais ton regard reste concentré. Tu feins l’indifférence alors qu’à l’intérieur de toi, ton cœur bat fort et t’as juste trop peur de faire un pas de travers, genre lui mettre un doigt dans l'œil, tu en serais capable.

Tu finis par reposer les cotons sur la table basse du salon et lui demande de te montrer le reste. Hugo prétend que ce n’est pas nécessaire, alors ton regard se fait plus insistant. Tu ne sais pas si c’est une bonne idée, mais tu dois vérifier s’il n’a rien de grave. Les mecs ils ne savent pas prendre soin d’eux. Combien de fois es-tu allée chercher des bricoles à la pharmacie car l’anus ou/et l’estomac du français étaient en pls à cause de vos conneries ? Trop de fois, t’as arrêté de compter à force. Enfin ça, c’est de l’histoire ancienne, vous n’êtes plus ensemble, reste concentrée Dani, please. Interdiction de mater ton ex.

Alors qu’Hugo se lève pour retirer son tshirt, tu fixes tes pieds. Tu joues nerveusement des mains dans la poche avant de ton sweet avant de te rendre compte que c’était celui d’Hugo (que tu as gardé forcément, dans ta tête c’était devenu l’une de tes fringues). Tu fais les yeux ronds avant de relever tes pupilles vers lui. Oh. Ton regard passe du “wooow” au “mon dieu, c’est vraiment un connard Seth”. L’étincelle dans tes yeux se transforme en inquiétude. Fidèle à lui-même, Hugo joue la carte de l’humour, tes joues virent au rouge et tu te lèves précipitamment. ”Je ne me rince pas l’oeil Blanchard.” Si un peu. ”Et non ce n’est pas rien, j’vais aller trouver un truc de froid dans ton cogélo.” Et tu soupires d’un air détaché, qui est à peine crédible. Tu arrives devant le frigo, ouvre le compartiment supérieur et découvres un pauvre paquet de frites congelées. ”T’es sérieux ? Un barman ce n’est pas censé avoir un congelo remplis de glaçons ?” Tu attrapes le pauvre sachet de McCain que tu enroules dans un torchon. Tu reviens en face d’Hugo qui a la bouche entrouverte. ”T’as fini de loucher ?” Oui, je sais que tu adores voir ma bouille contrariée mais ce n’est pas drôle. ”Assis-toi s’il te plait.” Demandes-tu en français, histoire de baisser ta voix d’un ton. Tu prends place à côté de lui et observes l’étendu des dégâts. Y’en a de partout, il faut un bain de glaçons là. Et tu supposes qu’Hugo n’a pas d’arnica chez lui. Tu poses un instant la poche de glaces, prends ton téléphone et envoies un message à Noor pour qu’elle achète ça à la pharmacie. Ta tête se redresse et tu demandes. ”Bon tu veux commencer par où ?” Et ça va piquer, et ça ne sera pas à cause d’un verre d’alcool ou de nourriture trop épicée cette fois-ci…

 

“J’aime pas la violence.” Oh. C'est tout ce que t'as à me répondre ? Je me suis jamais battu, ça arrive une fois, une seule fois, et tu penses que je suis comme lui ? Comme ce connard de Seth qui a trompé Lyb, qui l'a traitée comme une moins que rien et l'a laissée toute blessée et malheureuse ? Sérieusement, Dani, tu crois vraiment que je lui ressemble ? Bah merde, putain. Je suis pas comme lui pourtant, si ? Bordel, où est-ce que je merde autant pour que tu nous compares ? T'as pas l'air de vouloir en dire plus, tu te préoccupes de mon visage avec concentration. J'arrive même pas à savoir si t'es déçue de moi. Tu caches toujours aussi bien tes émotions, p'tain. Je me tais, je t'observe faire. Je peux pas t'en vouloir de juger mes actes, ce soir, mais tu peux bien te mettre à ma place aussi, non ?

Tu changes carrément de sujet en me demandant si je suis blessé ailleurs, et t'as pas l'air d'en démordre quand je t'assure que tout est ok. Bon, du coup je me déssape devant toi, mais c'est bien parce que t'as insisté. T'es toute gênée, je le vois bien, alors j'appuie précisément sur ce point dans le but de détendre l'atmosphère. ”Je ne me rince pas l’oeil Blanchard.” Mouais. Tes joues rosies te trahissent, Hwang. C'est que... Je te fais toujours autant d'effet je crois bien. Bon, cette fois, je dis rien. Parce que là, ça va te mettre mal à l'aise, et c'est pas mon but. Je te laisse aller chercher du froid au congélo, avec pour seule réponse une sourire tout fier fixé sur mon visage. Le problème, c'est que tu trouveras pas grand chose dans mon congelateur... Et tu t'en rends compte rapidement d'ailleurs. Oups. "Bennnn j'ai tout au bar, quelle est l'utilité d'en avoir chez moi aussi ?" Toute façon c'est bien connu : les cordoniers sont les plus mal chaussés. Je pourrais aller voir chez Bane pour voir si y'a pas de la glace, mais t'as visiblement trouvé ton bonheur. Eh mais ? Elles datent de quand ces frites ? Je me souvenais même plus les avoir dans ma cuisine.

Ça y est, t'as eu le temps de reprendre tes esprits après avoir maté mon beau torse, tu reprends ton job de façon autoritaire et bossy. J'obéis du coup, trop peur d'avoir à faire à la fureur d'une Dani énervée. T'es déjà pas satisfaite du peu de matos que j'ai chez moi pour soigner mes blessures, ni très heureuse de voir que je me suis battu, alors autant me plier à tes attentes puisque tu vas pas lâcher la grappe. ”Bon tu veux commencer par où ?”"Je sais pas trop. Je sais même pas si ça servira à quelque chose de mettre de la glace, y'en a de partout là. On peut juste attendre que ça passe sinon, non ? Ça va bien finir par disparaître." J'crois qu'on peut pas faire grand chose de plus en vrai. Puis, je vais finir congelé ! Bon, t'as pas l'air de cet avis. Je m'allonge sur le dos. "Vas-y, fais toi plaisir, je te laisse faire." C'est pas dans ce contexte que je te sortais ce type de phrase autrefois. Hum.

Quand le sachet de frites touche ma peau, j'ai un petit mouvement de recul qui me ravive les douleurs, mais je serre les dents. "Wah, c'est froid", je souffle, tentant de garder une respiration à peu près stable. Je sais pas pour combien de temps on va en avoir, mais un bout, vu comme c'est parti. Puis Noor va pas rentrer tout de suite en plus. Le silence s'installe à nouveau pendant que tu déplaces le sachet, et ça me laisse suffisamment le temps pour que je repense à ce que tu m'as dit. Ça me trotte en tête, tourne en boucle. "Dani ? Tu penses vraiment que je suis comme lui ?" J'arrive pas à me défaire de cette pensée, parce que je comprends pas comment tu peux nous mettre au même niveau. Est-ce que je suis si méchant que ça ? "J'ai jamais voulu avoir recourt à la violence, c'est vraiment juste la situation qui a fait que..." Mais je suis pas un mec violent. J'espère ne pas l'être en tous cas ? Je redresse la tête pour te regarder. "Est-ce que tu as déjà eu peur de moi ? Est-ce que j'ai été violent avec toi ?" Si la réponse est positive, je crois que je m'en remettrai difficilement.

Tu n’es pas bavarde, profitant clairement de la situation pour contourner les fâcheuses questions. Tu t’en prends même au congélos du barman, râlant dans ta barbe et choppant le pauvre paquet de frites qui trainait dans l’fond. Soupirant tu reviens vers Hugo et lui demandes de s’allonger. C’est l’heure de la torture, même si entre vous, tu aurais préféré ne pas en arriver là. Pourtant, tes opales ne peuvent éviter les ecchymoses qui sont en train de se former sur le torse de ton ex. De toutes tes forces, tu contrôles ton regard et te contentes de faire ton boulot de façon professionnelle. T’es infirmière à tes heures perdues, même si t’es convaincue que l’alcool peut régler tous les maux, mais là, t’es pas trop d’humeur à boire. Ta mission : t’assurer qu’Hugo aille bien, il est impossible pour toi de retourner dormir dans ses conditions. Tu te demandes même si tu vas trouver le sommeil ce soir. Tu dors mal depuis que papy est parti, mais ce détail, tu n’as pas envie qu’Hugo l’apprenne. T’es butée, on ne te changera pas en une soirée.

Attendre que ça passe ? Hors de question. C’est bien une réponse de mec ça, tu t’abstiens de tout commentaire sinon tu peux être vexante. Par contre, un rire s’échappe de tes lippes quand tu entends la phrase suivante du Blanchard. Fais-toi plaisir. Adjugé, vendu, tu le regardes attendant qu’il s’allonge sur le canapé. D’une main, tu pousses les affaires de la table basse et t’assois dessus pour être à la bonne hauteur pour la séance de torture.

Hugo serre les dents au premier contact de la glace sur son torse. Tu pinces tes lèvres. ”Tu m’as dit de me faire plaisir. C’est pas tombé dans l’oreille d’une sourde.” commentes-tu histoire de détendre l’atmosphère. Continuant ton travail, tu prends soin de mettre du froid sur chacun des bleus d’Hugo. Tu y passes un bon moment avant d’entendre la voix masculine briser le silence. Tes mouvements se stoppent et ta main reste en suspens au-dessus tes abdos du blond. Silencieuse, tu écoutes les paroles du français. Son regard est insistant, presque inquiet, voire tourmenté. ”Hugo… J’ai pas dit ça.” Tu poses le sac de patates sur la table avant. ”Tu n’es pas quelqu’un de violent. T’oublies de réfléchir parfois avant d’agir oui.” que tu rajoutes avec un fin sourire, néanmoins tes mots sont sincères. ”Tu n’as jamais été violent avec moi.” Ton regard remonte vers le sien. ”Je n’ai jamais eu peur de toi.” Ta voix est plus calme, plus basse, plus timide. Tu joues nerveusement avec tes doigts, essayant de réchauffer tes mains glacées. ”J’ai juste peur de te retrouver dans un état pire que celui-ci. Ca serait quoi la prochaine fois si tu le croises à nouveau ?” Ca sera quoi si tu savais une infime partie de la vérité de cette sombre histoire ? Si tu savais les violences verbales que Seth a eu envers Noor, votre Noor.

 

Effectivement, c'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde. Je sais que tu fais pas exprès de me faire mal, que le rire, c'est ton mécanisme de défense pour éviter d'être gênée de cette situation. Bon, ok, je te laisse le point pour cette fois, je retorque rien. Dani : 1 - Hugo : 0. T'as bien de la chance, c'est pas à tout le monde que je laisse cette opportunité. Tu continues ta tâche minutieusement pendant que mon cerveau cogite. Je finis par te faire part de mes questionnements, j'avoue que je suis un peu effrayé des réponses que tu vas me donner. J'ai jamais eu l'impression d'être violent avec toi, mais mon avis ne compte pas dans ces circonstances, c'est à toi que revient la parole, moi, je ne peux qu'écouter ce que tu as à me dire. Je retiens mon souffle quand tu poses le sac de frites sur la table, relève un peu ma tête et y cale (non sans mal) un coussin derrière ma nuque. La sentence tombe. Et même si j'essaie de le retenir, le soupir de soulagement qui sort de ma bouche est sans équivoque. J'ai toujours été clean avec toi et t'as jamais eu peur de moi.  

”J’ai juste peur de te retrouver dans un état pire que celui-ci. Ca serait quoi la prochaine fois si tu le croises à nouveau ?” Donc tu t'inquiètes vraiment pour moi. T'as toujours eu un grand coeur, ma Dani, mais j'aime penser que c'est parce que tu tiens encore beaucoup à moi. C'est réciproque, hum. " La prochaine fois, j'appelle Kai à la rescousse, promis." Surtout que maintenant que je sais que l'autre con est aussi l'ex de Noor, j'ai encore plus de raison de lui en vouloir. "Non, en vrai, si ça peut te rassurer, je crois que j'ai assez dégusté pour vouloir recommencer."Je change d'ailleurs de position parce que celle-ci me fait affreusement mal au dos. J'essaie de me mettre du côté le moins oedematié, mais le fait de bouger ravive mes douleurs. Après cette mobilisation catastrophique, je trouve finalement THE position. Faut plus que je bouge. Ça m'a donné chaud tout ça, et j'ai limite une goutte de sueur qui coule sur mon front alors que toi, t'as les doigts congelés. "T'as froid ou c'est juste les mains ?" Avec mon pull, ça m'étonnerait que tu claques des dents tellement il tient chaud, mais t'es tellement frileuse en même temps... "Tu peux réchauffer tes mains sur moi si tu veux, j'crève de chaud et l'effet glaçon sur mes bleus sera plus agréable." Ah ça, rien n'égalera la douceur de tes doigts.

Le Blanchard expire un soupir à ta réponse. Seth et Hugo sont deux hommes différents, Hugo est l’une des âmes les plus bienveillantes que tu connaisses. Jamais tu n’as eu peur de lui, bien au contraire, le français a été la première personne dont ton palpitant s’est épris. Il a eu une place importante dans ton cœur et l’aura toujours, même si t’essayes de ne pas trop le montrer ce soir. C’est étrange entre vous, tu ne vas pas le nier. Tant bien que mal, vous essayez de communiquer maladroitement, mais vous essayez, c’est le principal.

Bien rapidement, l’inquiétude se fait ressentir dans tes paroles. Jamais tu n’accepterais qu’il arrive quelque chose à Hugo. Jamais. T’as un frisson dans le dos à cette simple pensée. T’es brisée depuis que papy est parti, tu n’as pas pu être là pour lui, c’est ton plus grand regret. Depuis ce jour, ton cerveau est comme conditionné pour éprouver de l’inquiétude pour ceux qui comptent pour toi, pour ceux que tu aimes.

Hugo mentionne Kai comme sauveur. Le brésilien est bien plus sage et réfléchi que le français, mais bon tu ne comprendras jamais cette pseudo virilité masculine d’en venir aux bras. Tu trouves ça débile. Les femmes, vous êtes bien plus subtiles et malignes. Vous n’avez pas le même cerveau.

Le Blanchard finit par se raisonner. ”En voilà une sage décision.” Mieux vaut en rire qu’en pleurer. ”Sinon c’est moi qui vais te faire déguster la prochaine fois.” Sans mauvais jeu de mots, tu ne parles pas de vin pour une fois. Oui Hugo et toi, vous vous êtes déjà battus, dans le genre de deux amoureux se chamaillant car le monsieur avait encore fait chier la madame. Hugo sait de quoi Dani est capable quand on la cherche. Il faut se méfier de l’eau qui dort. Elle mord la petite et donne des gifles. ”Je suis sérieuse et tu le sais.” que tu rajoutes d’une voix affirmée alors que le blond se contorsionne sur le canapé. Tu le regardes faire. ”Arrête de bouger Hugo, tu vois bien que tu te fais mal tout seul.” que tu commentes accompagné d’un léger soupir. A tes mots, il se stoppe la goutte au front, il est tout rouge d’un coup. Serait-ce une montée de fièvre ? Sauf qu’il te devance et tu t’arrêtes de jouer avec tes doigts.

Tu clignes des yeux face à sa proposition des plus atypiques, étrange même. Ton ex te demande de mettre ses mains sur lui, sur son corps. Oui oui, vous avez bien entendu. Tu ne sais pas si c’est l’idée du siècle, puis faut garder une distance de sécurité entre vous. ”T’es bizarre Hugo, t’es sûr que ça va ? T’as de la fièvre ?” Et tu brises tes précédentes pensées en approchant la paume de ta main pour la déposer sur son front. Tu fronces les sourcils. ”Ah ouais t’as vraiment chaud.” Tu regardes le sac de frites congelées, puis Hugo, encore les frites et Hugo. Putain fais chier, il est vraiment pas équipé ton ex. Et elle fout quoi Lyb ? Elle s’est perdue ? Elle l’a fait exprès, tu la connais par coeur la mexicaine. intérieurement, tu t’énerves contre toi-même, mais c’est plus fort que toi, le bien-être d’Hugo passe avant tout. Alors tu lui demandes, la voix hésitante.

”Tu me fais de la place sur le canap s’il te plait ?” Tu te lèves de la table, alors qu’Hugo se redresse en grimaçant. Tu t’assois sur la place que le français a eu le temps de réchauffer. ”Viens, mets ta tête sur mes genoux.” que tu demandes d’une voix douce, laissant le blond s’allonger de nouveau sur le canapé et utilisant tes genoux comme oreiller.

Pendant un instant, t’as l’impression de revenir sept ans en arrière lorsque vous étiez ensemble, encore heureux et amoureux. Hugo venait s’assoupir sur toi et vous vous tapiez vos meilleures siestes sur le canapé de la coloc. L’une de tes mains se pose sur sa joue tandis que l’autre trouve son chemin sur le torse masculin, au niveau de son cœur. T’essayes de rester neutre dans tes mouvements, mais tu sens que certaines habitudes ne sont jamais réellement parties. T’as très envie de caresser ses cheveux pour qu’il s’endorme, mais tu te retiens de toutes tes forces. C’est pas raisonnable Dani. Alors tu lui demandes. ”Est-ce que ça va un peu mieux ?”

 

Si c’est toi qui me fais déguster, je vais pas me faire prier. Je suis certain que tu entendais rien de sexuel dans cette phrase, et c’est aussi une des raisons pour laquelle je ne rebondis pas dessus (lol) ; l’autre étant bien évidemment le fait qu’on ne soit (malheureusement) plus ensemble. Je me contente de te sourire, mais toi t’as pas l’air de prendre ce sujet à la légère. Alors je t’affirme : "Promis, je recommencerai pas." C’est mignon que tu sois toujours à mes petits soins et inquiète pour moi. Tu ne devrais pas. Si tu savais toutes les situations limites dans lesquelles je me mets, tu prendrais peur.

Je me réinstalle, et ça passe bien sûr par des douleurs avant de trouver une position confortable. Et même là, tu m’engueules encore. Roh. Je change alors de sujet, propose de te réchauffer les mains. Peut-être de façon un peu trop cash pour toi, visiblement. "Mais non, j’ai pas de fièvre." Ta paume se rapproche pourtant de mon front. "Ah ouais t’as vraiment chaud.” Je suis sûr que tu en fais des caisses. Après tout, c’était peut-être ton excuse pour te rapprocher de moi puisque t’acceptes quand même ma proposition. Je me redresse difficilement pour te faire de la place et tu t’assois sur le canapé, juste à côté de moi. Je vais pas pouvoir monter ma tête pour la mettre sur tes genoux, alors je me contente de coller le haut de mon crâne sur tes cuisses. De l’extérieur, je suis sûr que c’est une image très drôle à voir. Mais de là où je suis, je suis vraiment trop bien.

Une première main vient se poser sur ma joue, et l’autre se fraie un chemin jusqu’à mon torse. Wow. Je bouge tout doucement ma tête, mimant de trouver une position, mais en vérité, c’est simplement pour être plus proche de ta paume. C’est beaucoup d’émotions d’un coup dans mon petit cœur là. Je pourrais jurer que tu le sentes battre tellement il cogne fort, et vite. C’est étrange cette sensation. C’est comme si rien n’avait changé, mais, en même temps, j’ai l’impression que c’est inconnu. Ca fait tellement longtemps qu’on a pas été proches comme ça, tellement longtemps que j’ai pas senti ta peau sur la mienne. J’ai envie de prendre ta main, celle qui est sur mon torse, pour l’enlacer. Sauf que ça, ce serait vraiment too much. Alors je ne bouge pas, j'acquiesce simplement pour répondre à ta question. "Oui, beaucoup mieux." La douleur est toujours là, mais c’est comme si tes mains venaient la panser. Je ferme les yeux. Je pourrais m’endormir comme ça. C’est d’ailleurs ce qui se passe, je crois, puisque quand je reprends conscience, j’entends Lyb rentrer et je te sens te lever. Je sens tes mains se détacher de mon corps, je sens que tu t’en vas. Et moi, je me sens vraiment idiot. Idiot de m’être endormi. Idiot de ne pas avoir profité de ce moment seul avec toi.

C’est étrange et agréable à la fois. Depuis ton arrivée à Brisbane, tu as tout fait pour éviter le Blanchard, pourtant les retrouvailles des Five vous ont rapproché. Durant ces longues années de silence, tu t’es convaincue que tu avais le rôle de la méchante, de celle qui a mis un terme à votre relation. Celle qui a brisé son cœur, alors que tu as brisé le tien au passage. Cette décision, tu ne l’as pas prise à la légère, pourtant tu n’étais plus heureuse. Tu ne supportais plus la distance entre vous, ça te rendait folle qu’Hugo oublie de répondre à tes messages, zappe une fois sur deux vos FaceTime car il bossait au bar. T’avais besoin de lui, plus que tout à l’époque, mais tu voyais que ça ne fonctionnait pas, que ça ne fonctionnait plus.

Timidement, il vient se poser contre ta cuisse, comme s’il avait peur de poser sa tête sur tes genoux, tu le regardes faire avec un sourire bienveillant. T'aimerais lui dire des choses, mais tes mouvements préfèrent parler à la place. Tu poses une main sur la joue masculine et l’autre sur son torse. Ca t’as manqué, mais tu dis rien. Tu ne devrais même pas avoir ce genre de pensées. T’as envie de t’énerver contre toi-même, mais tu n’es pas seule. T’as un Hugo couvert d’ecchymoses et complètement épuisé à tes côtés. D’ailleurs, il ne met pas longtemps à s’endormir après t’avoir répondu. Tu le reconnais à sa respiration qui s’apaise. Tu restes imobile à l’observer. Il est toujours aussi beau. Comment t’as pu le laisser filer Hwang ? Ton esprit est pris de remords et ton cœur bat un peu plus fort.

T’es comme prise en flagrant délit lorsque Lyb rentre les mains chargées. Rapidement, ta tête se redresse. Vous échangez un petit sourire et tu mets un doigt devant ta bouche pour lui faire comprendre qu’Hugo s’est assoupi durant son absence.  Tu restes encore dix bonnes minutes comme ça, profitant simplement du moment présent pendant que Noor s’affaire dans la cuisine. Tu sais qu’Hugo sera entre de bonnes mains. Tu rentreras sereinement ce soir, pas de cauchemars à l’horizon.

C’est un contre-cœur que tu te lèves délicatement en prenant soin de ne pas réveiller le français. Tu rejoins ta meilleure amie, échanges quelques mots avec elle avant de la prendre dans tes bras. Elle aussi, elle t’as manqué. T’es pas du genre tactile, mais ce soir tu fais exception à la règle. T’as vraiment eu peur lorsque Lyb t’as contacté. T’as vraiment peur que son idiot d’ex refasse le portrait de ton ex. Ah les garçons… Après ton étreinte, tu salues ta meilleure amie avant de jeter un dernier regard vers Hugo et partir.

The end