AND WHEN FRIENDS JUST CAN’T BE FOUND, LIKE A BRIDGE OVER TROUBLED WATER, I WILL LAY ME DOWN.
with Gaby Strange
Claire soupire. Une fois, puis deux. Le téléphone collé à son oreille, elle tente une dernière fois d’appeler son frère. Cette fois-ci, ça ne sonne pas à l’autre bout du fil. Elle tombe directement sur la messagerie. Claire soupire bruyamment en se laissant tomber sur le canapé. Elle aura beau essayé de garder un semblant de contact avec son frère, afin de garder un œil sur lui, ce dernier ne lui rend en rien la tâche facile. Leur échange de la veille avait pris une tournure regrettable et l’avocate souhaite à présent s’expliquer afin de retrouver un semblant de paix entre eux. De toute façon, Claire n’aime pas ce rôle de grande sœur modèle qui lui a été assigné de force. Claire n’est pas faite pour ça. Elle a déjà suffisamment de mal à garder sa propre vie sur les rails. Que pourrait-elle pour les deux autres? Claire se le demande toujours mais elle ne rechigne pas. Parce que Claire se conforme toujours à l’ordre des choses. C’est comme ça. L’avocate a pris un jour de congé aujourd’hui, pas pour rattraper son manque de sommeil mais plutôt pour superviser quelques travaux de rénovations en cours dans sa cuisine. Elle jette un regard las vers la cuisine qui ressemble tout simplement à un champ de guerre. Tant pis, qu’elle se dit. Le ménage sera fait demain de toute façon. Mais au fond, elle avait envie de s’atteler à la tache et en finir une bonne fois. Le bip de sa montre finit par la sortir de sa rêverie. 16h30. Il serait peut être temps qu’elle se bouge un peu. Elle a proposé à Gabrielle de se retrouver à la plage en fin d’après-midi afin de partager un verre. Cela fait un petit moment que les deux ne se sont pas retrouvées hors du cabinet, comme à leur habitude. Claire avait d’ailleurs trouvé son amie un peu distraite dernièrement. Gaby semble un peu moins… elle. Peut-être est-elle préoccupée? Ou même fatiguée? Claire n’est pas trop sure mais elle espère que cette sortie leur fera du bien à toutes les deux. Claire récupère la bouteille de vin qu’elle avait mise au frais plus tôt, non sans oublier deux verres ainsi qu’un paquet de crackers. Elle s’empare de sa veste, de ses clés et referme la porte. “I’m gonna go, go, go, there’s no stopping me. I’m burning through the sky yeaaah” Les paroles résonnent dans ses oreilles. Chanson de circonstance, alors qu’installée derrière le volant, elle apprécie le plaisir de la balade, cheveux au vent. Claire monte le son, baisse un peu plus les vitres et met le cap sur le bord de mer. Et l’avocate roule vite, peut être même un peu plus que permis. Elle finit par enfin s’arrêter après une vingtaine de minutes et s'extirpe de la voiture. L'air iodé lui chatouille les narines. C'est avec un sourire que la belle descend sur la plage. Elle retire ses chaussures afin de sentir le sable chaud contre sa peau. C’est agréable. Il n’y a pas beaucoup de monde. Elle s’en réjouit un peu. Elle a envie de passer un moment tranquille loin du tumulte du centre ville. Claire se surprend s’imaginer un court instant que ça serait plutôt agréable de vivre ici, avec l’océan à portée de main. Ne trouvant pas Gabrielle, Claire finit par s’installer tranquillement sur le sable. Elle replie ses genoux et les encercle de ses bras. Et elle regarde l'horizon. La conversation de la veille lui revient à l’esprit et de manière encore bien distincte. Son frère a eu des mots durs voire blessants à son égard et la belle ne pas trop quoi en faire. Lui tourner le dos serait si simple, après tout il est majeur… Claire soupire tout en jouant distraitement de sa main avec le sable.
Août 2021. Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire et ce proverbe n’aura jamais eu autant de sens pour Gabrielle que depuis quelques jours. Des jours qu’elle a désormais à sa connaissance cette vérité, celle qu’elle a longuement cherché à propos de ses frères, celle qu’elle a tenu, et ça depuis des années, à connaitre. C’est presque des remords qu’elle peut ressentir présentement, jusqu’à se demander pourquoi elle a choisi l’Australie, et plus précisément Brisbane, quand elle a la sensation que ce ne sont pas deux frères qu’elle a retrouvés ici mais deux inconnus. Déçue, elle l’est, bien plus qu’elle ne le montre. La vérité est difficile à avaler, l’impression que son passé la poursuit malgré elle. Elle qui s’est construite une vie à l’opposé de celle qu’elle a pu connaitre enfant, elle qui a tout fait pour s’en sortir et ne pas emprunter le même chemin que ses propres parents. De son père surtout, celui qui n’a été qu’un minable à ses yeux, et qu’elle aimait pourtant, quand elle n’oublie pas les bons souvenirs – peu nombreux, certes mais qui ont compté – qu’elle a pu avoir avec lui. Le scénario semble inlassablement se reproduire avec ses frères voire un scénario encore pire que celui de leur enfance. Pire quand ils sont ou ont été à la tête d’un gang criminel de la ville, à décider de qui avait le droit de vivre et qui ne l’avait pas. La main mise sur des trafics en tout genre, et l’image inlassable lui revient de toutes les raisons qui l’ont obligé à quitter Los Angeles. Parce que c’est à cause de type comme eux, des types comme ses propres frères, qu’elle a dû fuir la ville qu’elle aimait tant et, ces derniers jours, elle s’interroge à savoir si elle n’en ferait pas de même un an seulement après être arrivé sur les terres australiennes.
Elle leur en veut, elle n’arrive pas à digérer la nouvelle et elle qui pourtant, parvient toujours à dissimuler derrière un masque ce qu’elle ressent, elle n’y parvient pas cette fois. La preuve en est que de nombreuses fois, encore aujourd’hui, quelques collègues avocats lui ont demandé comment elle allait ou ont eu à l’appeler plusieurs fois avant qu’elle ne réagisse. Cette proposition de la part de Claire de se retrouver ce soir, au bord de la plage, autour d’un verre, semble être la bouffée d’oxygène dont elle a besoin. Habitant le quartier de Bayside et le lieu de rendez-vous n’étant pas bien loin de chez elle, la californienne décide de s’y rendre à pied. L’air frais lui fait du bien, alors qu’elle a délaissé sa tenue plus chic d’avocate contre une tenue plus confortable. Et si Claire a dit se charger du vin, Gaby a prévu une bouteille de plus… juste au cas où.
« Hey, Claire » fait-t-elle en approchant doucement de la jeune femme qu’elle a repéré de loin. Un sourire se dessine sur ses lèvres, terne alors qu’elle prend place à ses côtés « Ca fait longtemps que tu es arrivée ? » lui demande-t-elle, certainement pour éviter le perpétuel comment tu vas dont elle préférait ne pas avoir à répondre. Elle brandit alors la bouteille de vin qu’elle a apporté « Je me suis dit qu’une bouteille de plus ne serait pas de trop » son sourire est plutôt fier, même s’il montre une certaine impatience à entamer cette fameuse bouteille. Peut-être qu’un peu d’alcool aidera à parler un peu plus aisément ou au moins, à se sentir mieux. « Tes travaux avancent bien ? ». Elle lui a parlé l’autre jour à la machine à café des travaux qu’elle entamait dans sa cuisine et c’est le parfait sujet pour repousser le plus possible la conversation qui finira par se recentrer sur… elle.
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with Gaby Strange
Claire a le regard rivé sur la mer. Elle observe les vagues rouler sur le sable, l'écume recouvrant les grains. Elle pourrait rester ainsi, seule, silencieuse. Hors du temps. Hors de son quotidien. Elle donnerait beaucoup pour quelques instants de répits. Mais peut-on seulement prendre congé de soi-même? Ne serait-ce que quelques instants? Peut-on mettre de côté les pensées encombrantes. Celles un peu plus sombres. Les doutes. Les incertitudes... Parce que Claire en a plein la tête, plein le cœur. Elle a à plusieurs occasions pensé à tort qu'enfermer ces pensées dans un coin de son esprit serait une solution réaliste. Mais le cœur a sa volonté propre et Claire n'a nullement la prétention d'être de ceux qui savent parfaitement contrôler leurs émotions. Elle le reconnait. Pour toutes ces fois où l'idée de prendre ses distances avec sa famille lui a frôlée l'esprit après une énième dispute avec son frère ou sa sœur. Pour tous ces moments où elle s'est demandée comment elle pourrait rendre la pareille à son ex fiancé, lui faire ressentir la même douleur qu'elle a ressenti pendant si longtemps. Autant de choses qui ne lui ressemblent pourtant. Mais dernièrement, elle n'est plus tellement maître de ses émotions.
Elle ferme les yeux, penche la tête en arrière et respire. Elle reste un instant ainsi, faisant le vide. Et ça ferait presque du bien, comme si le bruit du va-et-vient des vagues la lavait un peu plus de ses tracas pour les emmener loin dans les bas-fonds. Ca la fait sourire, Claire. Parce que c'est tellement stupide. Tellement naïf. C'est la voix de Gaby qui la sort de sa rêverie. Elle lève les yeux vers la brune, souriant instinctivement. "Hey, te voilà donc" qu'elle répond l'air un peu trop heureux. "Non, ça fait à peine dix minutes. Peut-être même moins... A vrai dire, le temps passe si vite devant cette vue " Elle porte alors à nouveau son regard sur l'horizon. Elle ne s'en lasse pas. C'est un peu son happy place. Peut-être qu'elle devrait songer à vivre par ici. Parait-il que ceux qui vivent près de l'eau sont les plus heureux. Parait-il. Lorsque Claire voit la bouteille que lui montre l'avocate, elle ne peut retenir un rire. En guise de réponse, elle se contente de lui adresser un regard approbateur alors qu'elle entreprend d'ouvrir la première bouteille. Elle hausse les épaules à la question de son amie. "Plus ou moins, on est presque au bout. Encore une semaine de travaux et je pourrais enfin retrouver une vie normale, sans poussière" C'est vrai que les travaux ont pris plus de temps que prévu, mais le plus souvent parce que Claire s'est montrée exigeante, n'hésitant pas à demander que les choses soient corrigées, faites à nouveau, encore et encore. Elle a donc hâte de ne plus vivre dans un chantier. "Je t'inviterai à déguster ma spécialité de pâtes lorsque les travaux seront terminés. Ça sera l'occasion d'ouvrir une bouteille que je garde depuis un peu trop longtemps maintenant... tu verras, questa è la perfezione" qu'elle dit dans un très mauvais accent italien, imitant le client qui lui avait offert la bouteille en question après une victoire au terme d'un long procès. Elle finit de servir le vin. Elle tend un verre à Gabi avant de lever le sien dans sa direction. "A la tienne" Elle porte ensuite le verre à ses lèvres, appréciant le goût frais et fruité du vin blanc. "Et toi alors, que racontes-tu de beau?" qu'elle ajoute d'un ton détaché. Pourtant, elle regarde Gabi en coin. Parce que dans le fond sa question n'est pas anodine. Ce n'est pas une question posée pour simplement faire la conversation. Claire souhaite réellement savoir. Parce que Gabi avait été un peu distante dernièrement. Avant de lui proposer de se retrouver à la plage, Claire s'est demandée si elle avait peut-être à un moment dit quelque chose qu'il ne fallait pas. Si sa collègue lui en voulait pour raison ou pour une autre. Mais elle avait beau chercher, rien ne lui venait. "T'as l'air un peu distraite dernièrement..." Elle ajoute finalement, au cas où. Non sans une point d'hésitation dans la voix. Elle n'est pas trop sûre d'elle, car après tout elle apprend encore à connaître la jeune femme. Elle ne sait pas encore où se trouve la ligne. Cette ligne invisible entre ce qu'elle peut s'autoriser ou non. Elle aurait peut-être pu attendre quelques minutes de plus. Mais Claire n'est pas du genre à tourner autour du pot longtemps. Et ses traits la trahissent si facilement, la vendant aussitôt auprès de son interlocuteur. Elle ne peut rien cacher longtemps. Aujourd'hui ne fait donc pas exception.
@Gabrielle Strange100 ans plus tard, j'ai honte allez, plus jamais, promis
Août 2021. "Hey, te voilà donc" C’est un sourire qui se dessine sur ses lèvres, un sourire sûrement un peu forcé pour ne pas laisser transparaitre ses états d’âmes actuels, dus à toutes ces pensées nocives qui envahissent son esprit depuis des jours. Il est dur pour elle de n’avoir personne avec qui en parler, si ce n’est son meilleur ami, qui habite à des milliers de kilomètres de là, et qu’elle n’est pas parvenu à appeler encore pour en discuter avec lui. Elle se renferme alors qu’elle a besoin d’être soutenue, d’être écoutée, d’être conseillée sûrement mais Gaby a toujours eu l’habitude d’affronter seule les embuches sur son chemin. Et dans ce cas précis, ce n’est pas une chose dont vous parlez aisément et à n’importe qui, elle ne pourra pas se confier à un collègue, ou à une amie dont elle a pu faire la connaissance ici, à Brisbane. Parce que son histoire familiale reste floue pour bon nombre d’entre eux, quand elle-même avait bien des zones d’ombres… jusqu’à il y a peu. "Non, ça fait à peine dix minutes. Peut-être même moins... A vrai dire, le temps passe si vite devant cette vue " Et la californienne porte son regard sur l’horizon et ne peut qu’acquiescer « Je ne m'en lasse pas l'avantage d’habiter dans ce quartier et elle est bien souvent la raison pour laquelle j’arrive tout juste à l’heure le matin au cabinet » parce qu’elle a cette routine, qui ne l’a jamais quitté, celle de venir faire son jogging chaque matin – ou presque – au bord de l’eau et de savourer cet instant de calme avant d’entamer sa journée.
Le regard de Gaby se porte sur les gestes de Claire lorsqu’elle entreprend d’ouvrir la première bouteille et qu’elle répond en même temps à la question qu’elle vient de lui poser "Plus ou moins, on est presque au bout. Encore une semaine de travaux et je pourrais enfin retrouver une vie normale, sans poussière" La remarque la fait sourire alors qu’elle acquiesce doucement tout en tendant un des deux verres à Claire "Je t'inviterai à déguster ma spécialité de pâtes lorsque les travaux seront terminés. Ça sera l'occasion d'ouvrir une bouteille que je garde depuis un peu trop longtemps maintenant... tu verras, questa è la perfezione" Elle adopte un air étonné, reculant légèrement sa tête pour marquer un peu plus sa surprise face à cette phrase en italien « Je suis partante et pour déguster ta spécialité de pâtes, surtout quand tu connais mes talents inexistants en tant que cuisinière la conversation était plusieurs fois venue sur le tapis, notamment lors des pauses déjeuners au boulot où Gabrielle était souvent la seule à ne pas ramener son petit tupperware comme bon nombre de ses collègues, son inexistant talent n’étant plus un secret pour personne d’ailleurs au cabinet et pour t’aider à boire cette bouteille le vin et elle, une grande histoire d’amour et pour des cours d’italien aussi » elle se moque gentiment d’elle, adoptant un petit air malicieux alors qu’elle se saisit du verre que lui tend Claire, la remerciant d’un signe de tête. "A la tienne" Les deux jeunes femmes trinquent alors et dégustent en silence leur première gorgée "Et toi alors, que racontes-tu de beau?" Il était certain que la question finirait par lui être retourner. Elle ne pouvait pas y échapper, de toute évidence. Ses épaules se haussent alors que son regard, plus terne, se reportent sur l’océan légèrement agité par les petites bourrasques de vent « La routine. Mon dossier actuel me donne toujours autant de fil à retordre, je ne sais pas si je ne vais pas être celle qui va finir par nécessité un avocat à la longue non pas qu’elle projette de tuer Monsieur Jefferson, mais un petit incident pourrait être vite arrivé. Un petit rire s’échappe d’entre ses lèvres Sinon Andrew s’est découvert une nouvelle lubie et s’est ridiculisé devant Mancini. Ca a détendu l’atmosphère » Une bonne ambiance régnait entre les murs du cabinet Sherman & Mancini, que ce soit entre les divers avocats travaillant pour le cabinet, que les associés et les supérieurs. Gabrielle n’avait aucun regret d’avoir rejoint cette équipe un an plus tôt. "T'as l'air un peu distraite dernièrement..." Une gorgée de plus qu’elle prend et sûrement est-ce nécessaire quand elle sait qu’elle ne pourra continuer à prétendre. Surtout quand elle sait que Claire pourrait être la seule à comprendre, elle qui s’est occupée du dossier de son frère aîné… six ans plus tôt. Gabrielle le sait, ne l’a jamais dit à Claire, et c’est ce qui fait aussi douter l’avocate dans le fait de lui en parler, quand elle ignore si Claire sait que Gabrielle est la sœur de Mitchell. Son regard porté sur l’horizon, elle laisse échapper un soupir avant de reprendre la parole « Tu n’es pas la seule à me le faire remarquer ça sonne comme un reproche, ça en est pas un, juste un constat en réalité de la part de l’avocate j’ai quelques petits tracas… familiaux sans croiser le regard de Claire, Gaby cependant jette un coup d’œil vers elle pour guetter une quelconque réaction des vérités apprisses lors d’une soirée passée avec mes deux frères… il y a une hésitation et puis… tu en connais au moins un de deux si je ne me trompe… » Et cette fois, son regard vient à trouver le sien.
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Paraît-il que les regards en disent toujours plus que les simples paroles. Que l’on peut lire dans les yeux un tas de choses, d’émotions, que les mots seuls ne pourraient exprimer. La surprise. Le doute. La détresse. La tristesse… C’est peut-être pour cela que Claire a toujours préféré être de ceux qui prennent leur temps et observent. Pour mieux analyser, mieux comprendre, ce et ceux qui l’entourent. Pour mieux se rassurer qu’elle a le mot juste ou le bon geste. Claire, elle n'a pas besoin de scruter les traits de son amie bien longtemps pour savoir que quelque chose cloche. Qu’il manque cette petite étincelle gaie qu’elle trouve habituellement dans le regard de Gabrielle. Qu’elle n’a pas son entrain et sa bonne humeur habituelle. À vrai dire, Claire l’a remarqué depuis quelques jours, sauf que jusqu’ici, il semblerait que le bon moment ne se soit toujours pas présenté pour qu’enfin, elle puisse tenter d’y voir un peu plus claire. « Sinon Andrew s’est découvert une nouvelle lubie et s’est ridiculisé devant Mancini. Ca a détendu l’atmosphère » Claire boit une gorgée de son verre tout en laissant échappé un rire amusé à l’entente de cette anecdote. En réalité, elle ne l’écoute que distraitement, parce qu’un peu dans ses pensées. Parce que pesant le pour et le contre dans son esprit. Je lui demande ou pas, qu’elle pense intérieurement. Après tout, c’est pour cela qu’elle a proposé de la voir aujourd’hui. Après tout, elle reste la même Claire qui ne peut s’empêcher de s’inquiéter pour ses amis et aujourd’hui ne ferait pas exception à la règle… C’est sur cette dernière pensée que Claire ose finalement mentionner la distance apparente de Gaby ces derniers temps. Elle scrute les traits de l’avocate tentant d’y déceler la moindre expression. Gabrielle ne semble pas s’offusquer de la question au premier abord. Claire se rassure un peu. « Tu n’es pas la seule à me le faire remarquer » La brune arque un sourcil avant d’afficher un sourire qu’elle veut désolée bien qu’au fond elle ne le soit pas vraiment. Elle est désolée d’en rajouter une couche, mais rassurée de savoir qu’elle ne s’est pas fait de film. Si d’autres l’ont remarqué, c’est qu’il doit y avoir une petite part de vérité. Lorsque sa collègue mentionne sa famille, Claire fronce imperceptiblement les sourcils. Parce que Gaby n’a jamais parlé de sa famille avant. Du moins, elle ne s’est jamais attardée sur le sujet. Claire est un peu surprise et prise de court. « des vérités apprises lors d’une soirée passée avec mes deux frères… tu en connais au moins un de deux si je ne me trompe… » Claire lève enfin les yeux et croise le regard de son amie alors que le sien trahit sa surprise. Elle se demande un court instant si elle avait mal entendu la question. Mais le fait est qu’il ne s’agit pas d’une question, mais d’une affirmation. Qui de surcroit est vraie… L’avocate finit par détourner le regard, un peu gênée, ne sachant quoi répondre. Elle porte à nouveau son son verre à ses lèvres, préférant garder les yeux sur la mer. Comment Gaby sait-elle cela? Et depuis quand? se demande-t-elle, en proie à de nombreuses questions. Claire aurait certainement réagi différemment si cela n’avait pas été la réalité. Si elle ne connaissait pas Mitch, le frère de Gaby. Ironiquement, elle aurait préféré ne jamais avoir croisé le chemin du bonhomme, et surtout ne jamais avoir eu à le défendre. Elle se souvient encore de ce procès, le seul qu’elle avait gagné mais qu’elle regrette encore à ce jour. Celui qui lui a fait comprendre qu’être avocat n’avait finalement rien d’héroïque. C’est un travail comme un autre où il faut bien faire les choses, que cela aille ou non dans le sens de nos principes… Claire prend une poignée de sable dans sa main pour les laisser s’échapper les grains un à un à quelques centimètre du sol. Elle affiche un faible sourire en acquiesçant simplement pour confirmer les paroles de Gabrielle. « Oui, c’est vrai… Je connais Mitch » Son regard croise brièvement celui de son amie avant qu’elle ne porte à nouveau son attention sur le sable. Sans qu’elle ne puisse se l’expliquer réellement, Claire ressent une pointe de culpabilité. Peut-être pour n’avoir jamais mentionné ce détail à Gaby. Peut-être parce qu’il n’y avait pas de raison pour qu’elle garde le silence ainsi. « Gaby… ne m’en veux pas s’il te plait… » Elle soupire. « On n’en a jamais parlé et je sais que je ne l’ai pas mentionné non plus » Claire hausse distraitement les épaules, cherchant ses mots. Aussi fou que cela puisse paraître, elle n’avait jamais anticipé d’avance ce moment. Ce jour où elle et Gabrielle en viendrait enfin à parler de son frère. « J’ai su bien après que Mitch était ton frère… il n’y en a pas des masses des Strange à Brisbane. » Elle ponctue sa phrase par un sourire, qui contraste un peu avec sa gêne, quelques minutes plus tôt. Et Claire se garde bien de mentionner pour le moment qu’elle avait fait le rapprochement lorsque Mitch était passé au cabinet pour voir sa sœur. Parce que ça en ferait peut être trop d’un coup. Et aussi parce qu’il lui avait fait comprendre cette fois là qu'il ne souhaitait pas qu’elle dise mot de son procès à Gabrielle. De toute façon, Claire n’aurait su par où commencer. « Je ne savais pas vraiment comment en parler avec toi tout simplement… Tout ce qui touche à la famille est souvent assez… délicat » Elle est toujours concentrée sur le sable dont elle recouvre maintenant ses pieds.
Août 2021. Le sommeil est difficile à trouver depuis cette soirée passée avec ses frères. Les nuits blanches depuis ce jour ont été bien plus nombreuses que le nombre d’heures de sommeil cumulées et c’est ce qui trahit sûrement l’avocate qui ne peut plus nier devant des tu n’as pas l’air dans ton assiette ou des toi, tu n’as pas dormi de la nuit. Cette dernière remarque est toujours assez simple à transformer en sous-entendu et donc en plaisanterie, lui permettant de ne pas s’attarder davantage sur ce qui rend réellement ses nuits bien trop longues. Ses pensées sont les seules coupables, celles qui ressassent en boucle les révélations de ses frères, la violence de leur propos, la haine transparaissant dans celle-ci et surtout celle qu’ils ressentent mutuellement l’un pour l’autre. En plus de ces vérités, c’est aussi cette image de cette fratrie désormais brisée qui causent autant de tort à Gabrielle. Elle qui pensait revenir à Brisbane pour retrouver cette fratrie bien trop longtemps séparée, elle qui pensait – stupidement – qu’elle pourrait retrouver cette complicité avec eux et qu’ils renoueraient de sorte à recréer cette famille proche qu’ils ont toujours formé tous les trois. Mais la californienne sait désormais que cela est impossible, non seulement parce que Mitch et Alec se détestent et ne supportent plus de se trouver au même endroit, mais parce qu’elle-même ne se pense pas capable de leur pardonner leur mensonge… tout comme elle ne se sent pas capable d’accepter les personnes qu’ils sont devenus. Deux étrangers à ses yeux. « Oui, c’est vrai… Je connais Mitch » Et Claire connait certainement mieux son frère ainé qu’elle-même. Parce que ce Mitchell n’est pas son frère, pas celui avec qui elle a grandi lorsqu’ils vivaient encore à Vegas. Il n’est plus cet Alexander de son vrai prénom, il n’est plus ce frère qu’elle a tant admiré et cherché à rendre fier d’elle. Tout n’a été qu’illusion pendant des années, illusion alimentée par la distance qui permettait de garder l’avocate bien loin de la réalité. Une réalité qu’elle préférerait oublier, quelques instants. Mais ce ne sera pas le cas ce soir, quand elle a décidé de parler ouvertement de ce qui la tracasse et de confronter aussi Claire à ce propos. Car elle en connait une grande partie. « Gaby… ne m’en veux pas s’il te plait… » Gabrielle n’a pas flanché, son regard toujours dans celui de Claire, son expression neutre et son silence pesant « On n’en a jamais parlé et je sais que je ne l’ai pas mentionné non plus » Gaby peut lui concéder cela. En réalité, elle est quelque peu épuisée de tout ça. De ces vérités qui lui viennent en pleine figure, de ces désillusions, ces déceptions. Alors ce soir, elle n’a pas la force de se battre. Elle n'en a plus la force. « J’ai su bien après que Mitch était ton frère… il n’y en a pas des masses des Strange à Brisbane. » Gaby l’écoute, son regard porté désormais sur l’horizon, elle aussi, attentive aux mots de Claire « Je ne savais pas vraiment comment en parler avec toi tout simplement… Tout ce qui touche à la famille est souvent assez… délicat » Mollement, la californienne acquiesce d’un signe de tête. Un silence s’installe, quelques secondes encore, avant qu’elle ne l’interrompe, venant à pivoter sa tête pour regarder son interlocutrice « Je ne l’ai pas évoqué, moi non plus… le sujet épineux de son frère alors que je savais qui tu étais… et ça, depuis le début confesse-t-elle quand Claire, elle, lui a avoué ne pas avoir tout de suite fait le rapprochement Quand tu t’es présenté à moi, à mon arrivée au cabinet, ton nom a fait tout de suite écho. Ce dossier, celui dont elle s’est occupée, celui de son frère donc je le connais par cœur. Je l’ai épluchée à maintes reprises pour tenter de découvrir la vérité sur mes frères. Sur Mitch. Je ne croyais pas à son innocence son flair surement, celui d’une avocate aguerrie, sens acquis au fur et à mesure de ses années de pratique je ne vais pas te mentir. Si je me suis rapprochée de toi, au départ, c’était uniquement pour m’aider à faire la lumière sur ce dossier. Puis j’ai découvert qui tu étais. Et je ne t’ai jamais interrogée à ce sujet » voilà qu’elle fait preuve d’honnêteté à son tour, son regard se détournant à nouveau, soupirant « Je ne t’en veux pas, Claire » elle, en revanche, le pourrait, elle le comprendrait.
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with Gaby Strange
Claire n’aurait pas pensé, qu'en rencontrant son amie aujourd'hui, que la discussion finirait par tourner ainsi. Bien entendu, elle ne s'était guère attendue à ce que la conversation soit gaie, parce qu'elle l'avait vu, voir ressenti depuis plusieurs jours maintenant, que son amie n'était pas dans son assiette. Elle s'était peut-être attendue à une affaire de boulot, ou même une histoire de coeur qui n'aurait pas forcément bien fini. Mais la discussion porte finalement sur un sujet auquel l'avocate ne s'est pas préparée - sur Mitch. Le frère de l'avocate... Gaby l'a prise de court. Claire ne sait trop quoi dire de plus à part confirmer ce que Gaby semble déjà savoir. Pourtant Claire aurait dû le deviner depuis le début, que d’une façon ou d’une autre, le sujet Mitch aurait toujours fini par revenir sur la table. Parce que sa longue expérience de la vie jusqu'ici lui a bien apprise que ce genre de chose ne peut jamais être tu bien longtemps. Ou peut-être l'évidence a-t-elle toujours été là, refoulée au plus profond d'elle-même. Pour autant, Claire voudrait bien s'en convaincre que ce n'était finalement pas un si mauvais choix que de n'avoir rien dit à Gaby, peut-être que ce n'est pas son rôle à elle. Mais ça sonne un peu faux dans le fond parce que trop invraisemblable que pour pouvoir y croire. Il y a à présent peu de place pour les explications ; l'avocate se sent quelque peu coupable. Les yeux rivés sur le sable, elle peine à savoir quoi dire de plus. « Je ne l’ai pas évoqué, moi non plus alors que je savais qui tu étais… et ça, depuis le début » Claire tourne instinctivement la tête vers la brune, surprise. « Quand tu t’es présenté à moi, à mon arrivée au cabinet, ton nom a fait tout de suite écho... Si je me suis rapprochée de toi, au départ, c’était uniquement pour m’aider à faire la lumière sur ce dossier. »Et Claire arque un sourcil à mesure que les mots prennent sens. Elle regarde Gabrielle, la dévisage avec cette lueur de surprise non-feinte dans les yeux. Est-elle sérieuse? qu'elle se demande initialement pensant peut-être à une plaisanterie de mauvais goût. Elle finit par détourner le regard avant de soupirer légèrement. Un rire lui échappe, bien malgré elle. Un peu jaune. Elle qui pensait être la fautive de l'histoire, la voilà finalement bien accompagnée. Gabrielle savait donc tout sur ce dossier depuis le début, une dossier dont Claire s'est bien tenue de mentionner depuis qu'elles se connaissent. « Je ne t’en veux pas, Claire » L'avocate ne répond rien. Ces paroles l'auraient davantage rassurées quelques minutes plus tôt mais plus maintenant. Elle est partagée entre l'étonnement et le questionnement. Pendant un court instant, elle se demande si la nature de leur relation avait également été calculée depuis le début. Mais elle chasse bien vite cette pensée de son esprit, ne voulant point laisser un quelconque excès d'orgueil parler pour elle à cet instant. « Je ne m'attendais pas à ça » qu'elle finit par dire, toujours un peu surprise. Elle n'en n'est pas vexée pour autant voire remontée à l'égard de sa collègue avocate. Claire aurait peut-être été la première à faire de même si les rôles avaient été inversés. « Je suis juste un peu surprise... tu sais, tu aurais pu me dire que tu t'intéressais au dossier, je t'aurais partagé les informations que j'avais... ça ne m'aurait pas dérangé. » Du moins, elle le pense. « Mais je te comprends tout de même » qu'elle ajoute, juste au cas où. Et Claire, elle garde son regard rivé sur la mer pendant un court instant, silencieuse, dans ses pensées, avant de décider de le rompre, ce silence. Peut-être est-ce l'atmosphère du lieu qui les pousse ainsi aux confidences? Elle n'en est pas trop sûre mais puisque le pas a ainsi été déjà franchi, il n' y a maintenant pas de raison de faire marche arrière. « Je m'excuse d'avance si cela est peut-être un peu trop indiscret mais... que se passe-t-il donc avec tes frères? » Claire pose enfin la question non sans une certaine hésitation. Parce qu'au final, c'est la raison pour laquelle elle avait initialement proposé à Gaby cette sortie. Afin de savoir ce qui semble ainsi troubler son amie ces derniers jours. Pourtant maintenant qu'elle sait que cela a un lien, aussi petit qu'il soit, avec Mitch, elle n'est que peu rassurée « Je ne sais pas si ça sert à grand chose de te dire cela, mais si vraiment je peux faire quelque chose, n'hésite pas » Cette fois-ci elle se tourne vers Gabrielle, cherchant le regard de la brune.
Août 2021. « Je ne m'attendais pas à ça » Gabrielle s’en doute et comprendrait parfaitement que Claire s’offusque. Elle aurait ses raisons quand leur rapprochement, cette amitié qu’elles ont commencé à construire n’a pour base, qu’un mensonge et un manque de sincérité certain. « Je suis juste un peu surprise... tu sais, tu aurais pu me dire que tu t'intéressais au dossier, je t'aurais partagé les informations que j'avais... ça ne m'aurait pas dérangé. » « Je ne voulais pas te mettre dans une position délicate » Surtout qu’elles ne se connaissaient pas et même si Claire savait que Gabrielle était la sœur de Mitchell, rien ne garantissait qu’elle accepte. Elle aurait tout aussi bien pu refuser, ce qu’elle aurait compris avec le recul. Mais, à son arrivée à Brisbane, Gabrielle n’acceptait aucun non pour simple réponse, d’autant plus quand elle était dans une réelle quête de la vérité. Pour preuve, elle voulait faire la lumière elle-même sur tout ça avant d’aller confronter ses frères. Mais ses propres recherches ont quasi été vaines et pour cette raison, peut-être qu’aujourd’hui, elle agirait autrement. « Mais je te comprends tout de même » Et cela l’apaise de l’entendre le lui dire. Elle n’a pas spécialement la force de faire face à une énième dispute, d’autant plus qu’elle estime que Claire est la seule qui peut l’entendre ce soir, alors qu’elle a besoin de vider son sac. Les informations qu’elle lui livrera cependant se voudront prudentes, ne tenant pas à exposer ses frères, malgré toute la colère qu’elle peut ressentir à leur égard. « Je m'excuse d'avance si cela est peut-être un peu trop indiscret mais... que se passe-t-il donc avec tes frères? » Le ton de voix de Claire est prudent, marqué par une hésitation certaine. Elle sait le sujet délicat, tout autant quand elle a été au cœur de celui-ci pendant quelque temps. Le regard de la brune trouve l’horizon, nécessitant quelques secondes de silence pour livrer son récit, un dont Claire se sert pour ajouter « Je ne sais pas si ça sert à grand-chose de te dire cela, mais si vraiment je peux faire quelque chose, n'hésite pas » « Merci » dit-t-elle sincèrement, acceptant de trouver son regard en retour. Un long soupir s’échappe d’entre ses lèvres, son regard fuyant à nouveau et là voilà qui se lance « Ils m’ont enfin dit dans quoi ils traînaient depuis toutes ces années… Des activités que tu peux te douter loin d’être saines et qui m’ont surtout laissé entrapercevoir leurs véritables identités » Celles qu’elle ne leur connaissait pas, celles qu’elle n’avait jamais imaginées pour eux. Un passé bien trop sombre qui semblait les avoir atteints, au point de les avoir poussé à faire de mauvais choix quand, elle, a tout fait pour s’éloigner de leur héritage. La déception n’en est que plus grande, surtout face à la violence des faits dont ils ont pu être auteur et si elle parvient à être neutre dans le cadre de sa profession, s’agissant de sa propre famille, elle en est tout bonnement incapable. Gabrielle poursuit son récit, expliquant davantage le déroulé de cette soirée anniversaire qui s’est transformée en réel cauchemar, permettant donc à Claire de comprendre davantage l’état d’esprit actuel de la Strange. Il est indéniable que ces confidences vont avoir au moins le mérite de les rapprocher, consolidant cette amitié qui a débuté sur des bases malsaines.
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