| time to say sorry (hassan&camil) |
| | (#)Jeu 1 Sep - 21:28 | |
| En apparence, Camil Smith était un homme à qui tout avait toujours souri dans la vie. Il avait connu le succès dans chaque projet qu’il avait entrepris, qu’il soit professionnel ou personnel. Il s’était donné, il s’était échiné, il s’était même parfois acharné. Mais au final, il avait toujours été récompensé ; le temps qu’il avait passé sur tel ou tel projet n’avait jamais été vain. Installé derrière son volant, que ses doigts tapotaient en rythme en attendant que le feu daigne enfin passer au vert, l’Américain songea à l’image idyllique qu’il renvoyait. Un mince sourire étira ses lèvres, alors qu’il réalisait être passé maître dans l’art de la manipulation. Un politicien, un vrai de vrai ; voilà ce qu’il était devenu. Franchement élu à la Chambre des Représentants, il n’avait pas chômé au cours des dernières semaines ; discours en tous genres, présence à des événements importants, réunions importantes, commissions pour discuter de tel ou tel point… Désormais, Camil Smith était sur tous les fronts. Et alors que sa vie professionnelle atteignait aujourd’hui son apogée, ou ce qui s’en rapprocherait le plus, il contemplait dans l’inaction la plus totale sa vie privée décliner. Il n’avait pas de contact avec son frère. Il n’avait pas revu Sixtine depuis son départ pour soigner sa maladie. Sa prétendue petite-amie était officiellement enceinte, officieusement terrassée. Était-ce la rançon de la gloire ? Était-ce une forme d’équilibre, une règle tacite qui disait qu’on ne pouvait pas gagner sur tous les fronts ? Camil s’interrogeait, incapable de trancher. Non, ça ne devait être qu’un concours de circonstances — ça ne pouvait être que ça, d’ailleurs. Parce que sinon, cela signifiait qu’il ne serait jamais heureux et que son succès en politique devrait toujours se faire au détriment de sa vie privée — ou inversement, d’ailleurs. Perdu dans ses pensées, il n’avait pas vu que le feu était passé au vert. Ce ne sont que les hurlements d’un Klaxon d’un automobiliste agacé qui le firent réagir, et démarrer en trombe.
Il avait frappé, d’abord timidement, à la porte du bureau de son ami et collaborateur Hassan. Il avait attendu devant sa porte pendant une longue minute, se questionnant sur la façon de présenter les choses au professeur d’université. Devait-il s’excuser, faire son mea culpa ? Devait-il agir comme si de rien était ? Devait-il à nouveau aborder les sujets épineux qui avaient mené à une dispute entre eux ? Hassan aurait probablement apprécié que son ami opte pour la première option, mais ce n’était tout bonnement pas dans ses habitudes. Il était trop fier et trop… Camil, pour agir de la sorte. Il frappa à nouveau et, restant sans réponse, tenta d’ouvrir la porte. Celle-ci ne résista pas, et l’élu constata que son ami n’était pas présent. Il soupira, un brin déçu ; les retrouvailles allaient devoir attendre. À moins que… Il jeta un coup d’oeil à sa montre, et décida d’attendre. Aujourd’hui, il avait décidé de prendre le temps. Il s’installa sur une chaise qui se trouvait dans un coin du bureau de son ami, et consulta ses mails en attendant l’arrivée providentielle d’Hassan. Des réunions, des débriefings, des projets de lois, un dîner d’affaires, des rapports d’organisme plus ou moins sérieux à lire et à étudier, des projets pour les années à venir… Camil ne chômait pas, et l’agenda politique était dense. Pourtant, il ne regrettait pas son choix. Il se sentait à sa place, en haut de l’affiche. Et il n’y était arrivé ni seul, ni par hasard ; il avait conscience que les travailleurs de l’ombre avaient permis son ascension, tout comme lui avait permis au maire de Brisbane d’exécuter son mandat sereinement alors qu’il était à l’époque son directeur de cabinet. Par politesse, mais aussi par franche camaraderie, il envisagea d’écrire à son ancien employeur — mais le professeur d’université fit une entrée discrète, à son image. C’était presque incroyable que ces deux personnes aient fini par s’entendre, tant elles étaient différentes. « Salut Hassan. » Déclara le blond, après avoir relevé la tête vers son ami. Ce dernier avait pris place derrière son bureau d’universitaire, vraisemblablement perdu dans ses pensées. Était-ce ses élèves, qui lui donnaient du fil à retordre ? « Je suis content de te voir. » Et ça n’avait rien d’un mensonge ; Camil était sincèrement heureux d’être à nouveau face à celui qu’il considérait comme son ami. Même si, ces derniers temps, le politicien n’avait pas été irréprochable.
@Hassan Jaafari |
| | | | (#)Mer 30 Nov - 5:39 | |
| You say "sit down, it's just a talk", he smiles politely back at you, you stare politely right on through. Some sort of window to your right, as he goes left, and you stay right, between the lines of fear and blame you begin to wonder why you came. ☆☆C’était la troisième fois déjà depuis le début de leur discussion que le téléphone d’Hassan vibrait sur le coin du bureau pour signaler l’arrivée d’une notification, et d’un geste un peu las Emily l’avait vu tendre la main vers l’objet pour le passer en mode silencieux, non sans avoir au préalable jeté un bref coup d’oeil à l’écran pour s’assurer que tout cela (quoi que ce soit) pouvait attendre la fin de leur entrevue. Hassan Jaafari était un homme occupé, il suffisait de l’imaginer se dédoubler entre ses casquettes universitaires, télévisuelles et bénévoles, tout en tentant d’avoir en parallèle un semblant de vie personnelle – quand bien même sur ce dernier point la jeune femme ne pouvait que se perdre en suppositions. Ces derniers mois cependant, l’homme lui semblait plus affairé encore qu’il ne l’était avant, les réponses aux mails se faisant plus tardive, la concentration semblant parfois lui faire défaut lorsqu’il s’exprimait, et ce malgré l’arrivée d’une assistante à laquelle Emily avait plus souvent eu affaire au téléphone qu’à Hassan lui-même au cours des dernières semaines. Ethel Hartfield avait-elle un lien de parenté avec celui qui entraînait l’équipe de rugby de l’université ? Là encore, la chargée de TD ne pouvait que se perdre en suppositions, mais tendait à penser que oui, si l’on se fiait à la récurrence des moments où les deux hommes pouvaient être croisés ensemble sur le campus. « C’est une excellente nouvelle. » Ça l’était, oui, et machinalement Emily avait posé une main sur ce ventre que l’on devinait encore à peine sous le gilet en mailles qu’elle ne quittait (presque) jamais. « On est vraiment contents, oui. » Contents, impatients, terrifiés, excités, et tout un tas d’autres choses que la jeune femme n’avait même pas encore eu le temps d’identifier. « Mais je … Je préfèrerais que ça ne s’ébruite pas, pour l’instant. Je t’en parle maintenant parce que je sais que tu vas devoir te dégager du temps pour me trouver une remplaçante la rentrée prochaine. » La rentrée prochaine et peut-être même la suivante, comment savoir. Emily n’avait pas la prétention de se croire irremplaçable, pas plus qu’elle n’avait la certitude d’avoir toujours le temps et l’énergie pour cela d’ici quelques mois – sa vie s’apprêtait à changer, après tout. La discussion avait dérivé ailleurs, sans jamais quitter la sphère professionnelle néanmoins, mais gentleman Hassan avait tenu à la raccompagner jusqu’à l’ascenseur ouest où ils avaient encore discuté quelques instants, le travail laissant place aux banalités sans que ni elle ni lui ne s’imaginent un instant que dans le bureau de l’enseignant un troisième protagoniste venait de s’installer après avoir trouvé porte ouverte mais pièce vide. Pour ce qu’elle en connaissait, difficile pour Emily d’imaginer que la moindre amitié puisse s’être tissée entre le libéral Camil Smith et le travailliste Hassan Jaafari. Et d’autant plus impossible dès lors de deviner que les deux hommes, s’ils avaient bien été amis, étaient fâchés depuis des mois, et sur un sujet à mille lieues de leurs sensibilités politiques respectives. L’ascenseur s’immobilisant à leur étage Emily s’y était engouffrée, et saluant une dernière fois elle avait profité du miroir pour vérifier l’état de ses cheveux en s’imaginant le professeur retourner prestement à son bureau : il avait oublié son paquet de cigarettes, sans quoi il aurait probablement fait un détour par le rez-de-chaussée pour prendre l’air et s’en griller une. Quittant la cabine d’ascenseur au -1, elle avait traversé le parking souterrain pour rejoindre sa voiture au moment où Hassan repassait la porte de son bureau, la surprise d’y trouver quelqu’un provoquant un mouvement d’hésitation de sa part et le visage de Camil se révélant en même temps que son « Salut Hassan. » calme. Refermant la porte du bureau derrière lui, le brun avait attendu de faire à nouveau face à son visiteur pour se fendre d’un « Camil. » prudent, et non sans se faire la remarque que maintenant encore plus que la minute précédente il aurait aimé s’accorder une pause nicotine, il s’était installé derrière son bureau au moment où Emily faisait vrombir le moteur de sa voiture. « Je suis content de te voir. » La chose était rare, mais le brun n’était pas certain de pouvoir en dire autant. Il n’était pas mécontent de voir Camil, mais sa visite après des mois de silence le laissait perplexe – et un peu inquiet. « T’es un peu la dernière personne que je m’attendais à trouver dans mon bureau, je t’avoue. » Sans s’annoncer qui plus est, sans quoi Ethel l’aurait forcément informée, comme elle l’avait fait en lui rappelant par SMS son entrevue avec Emily “au cas où”. « C’est l’ami ou le politicien, qui me rend visite ? » Il doutait que l’américain soit là en sa qualité de “frère de Sixtine” cette fois-ci. Encore que … Mais Hassan n’allait pas pousser sa chance jusqu’à demander des nouvelles de la jeune femme, au risque de provoquer une nouvelle esclandre. « Je t’offre un café, un thé ? » La tasse vide dans laquelle Emily avait bu une infusion trônait encore sur un coin du bureau, mais c’était mal connaître Hassan que de croire qu’il n’avait pas encore une ribambelle de tasses dans l’un de ses placards – un des nombreux avantages à avoir hérité d’un bureau plus grand.
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| | | | (#)Mer 28 Déc - 17:10 | |
| « Je comprends. » Avoua Camil. Il nota que, contrairement à lui, Hassan ne semblait pas être réellement content de le voir. Surpris, tout au plus. Mais comment lui en vouloir ? Leur dernière entrevue avait été catastrophique. Elle avait mis leur collaboration géopolitique en stand-by, Camil s’étant, par facilité et par fierté, exclusivement concentré sur son ascension vers d’autres sommets. Quant à leur relation amicale, elle avait connu une traversée du désert. Un désert glacial, dénué de bon sentiment, qu’aucun des deux hommes n’avait jugé bon de réchauffer par un quelconque biais, au grand damn de Sixtine. La dernière née des Smith, repartie aux Etats-Unis quelques mois plus tôt pour un traitement médical expérimental, avait longuement fait la morale à son frère ainé. Elle avait, entre autre, dit de lui qu’il était un idiot, un homme borné doublé d'un crétin fini. Il avait accepté sans broncher, justifiant son manque de réaction par un travail harassant et une indisponibilité évidente. Il n’allait tout de même pas régler ses problèmes par téléphone interposé, si ? Il n’avait plus quatorze ans, et préférait affronter la réalité en face. Sauf que, jusqu’à ce jour, il n’avait jamais pris le temps de le faire. Laissant la situation stagner, à défaut d’empirer. Et justifiait son manque de courage par un manque de temps — bien plus acceptable à ses yeux, bien moins difficile à assumer. Il n’avait peut-être plus quatorze ans mais, en fin de compte, il restait un adolescent à bien des égards. Triste constat, mais terriblement réaliste. « Je ne suis pas sûr que l’un et l’autre soient complètement dissociables. » Confia Camil à voix basse. Il aurait bien aimé, pourtant : ça lui aurait probablement évité bien des tracas, surtout dernièrement. Et malheureusement, cette question anodine d’Hassan éveillait en lui des interrogations auxquelles il n’était pas capable de répondre. Qui était-il, finalement ? Son rôle politique avait-il fini par grignoter tout ce qui faisait de lui un homme, un ami, un frère ? Avait-il été submergé par son métier, au point d’être devenu le même requin que son double politique ? « Mais je pencherais plus pour l’ami. Je crois. » Précisa le blond en faisant disparaître son téléphone portable à l’intérieur de sa poche. Le geste pouvait paraître anodin, mais il ne l’était pas : il confirmait la volonté de Camil d’être attentif, et complètement disponible envers son interlocuteur. « J’espère. » Ajouta-t-il, initiant un premier pas vers ce qu’il espérait être un moment de réconciliation. Il ne cherchait pas spécialement à parler en énigme ou à dissimuler les raisons de sa présence ; seulement, il ne se voyait pas non plus tout débiter de but en blanc. Il n’était pas là pour soulager sa conscience ; il était là pour renouer avec un ami. Un ami fidèle, un allié de confiance, un homme droit et respectable. « Un café, merci. » Choisit le politicien en inclinant la tête, à la fois en guise de remerciement et de respect. D’une certaine façon, il était soulagé que son ami ne le mette pas dehors immédiatement, sans avoir pris le temps d’entendre Camil lui énoncer les raisons de sa présence en ces lieux. Mais l’Américain, gauche et peu habitué à faire des excuses, demeurait étrangement silencieux. Seul le bruit caractéristique du café coulant dans une tasse franchement sortie d’un des placards derrière Hassan venait troubler le silence de la pièce. « Tu es toujours aussi addict à tes thés ? » Demanda l’élu en arquant un sourcil, alors qu’il voyait une tasse trôner sur le bureau du professeur. C’était une façon comme une autre d’engager la conversation, sans prendre trop de risque. « Tu as changé de bureau, non ? » Le politicien avait l’impression que le bureau était plus grand, plus spacieux, tout en étant étrangement semblable à ce qu’il avait déjà vu préalablement. L’architecte de l’université aurait-il manqué d’imagination ? A moins que, plus probable, cette similitude soit due à un manque de moyens financiers. Hassan, cependant, avait réussi à prendre possession de ce lieu pour y imprimer sa patte. « Tu as été promu ? » Ça aurait été mérité, en tout cas ; Hassan avait toujours été un travailleur dévoué, acharné, et consciencieux. Pas assez reconnu à sa juste valeur, selon Camil. Mais il se garderait bien d’évoquer son ressenti à son ami, sachant pertinemment qu’il n’avait pas été irréprochable au cours des derniers mois. L’universitaire tendit finalement la tasse de café, qui avait répandu ses arômes, à l’Américain. « Je n’aurais pas dû disparaître comme ça des radars. » Admit l’élu en faisant la moue. Allez Camil, tu es sur la bonne voie. Encore un petit effort, et tu devrais être capable de reconnaître à voix haute que tu as merdé. « Ce n’était pas correct de ma part. » Mais il avait été déboussolé, déçu et surtout, terriblement inquiet pour sa petite-soeur. Ce qui ne justifiait pas tout, comme il l’avait compris après coup. « Cette problématique n’était pas la tienne, mais la mienne. Je ne l’ai pas compris immédiatement. » Confessa-t-il à voix basse, son regard planté dans le fond de sa tasse de café. Ça n’effaçait pas ses agissements, ses paroles… Mais ça constituait un premier pas vers une forme de rédemption.
@Hassan Jaafari |
| | | | (#)Ven 27 Jan - 19:57 | |
| You say "sit down, it's just a talk", he smiles politely back at you, you stare politely right on through. Some sort of window to your right, as he goes left, and you stay right, between the lines of fear and blame you begin to wonder why you came. ☆☆Tant de choses avaient changé depuis la dernière fois que Camil et lui s’étaient retrouvés l’un en face de l’autre, que tout cela lui semblait remonter à une éternité. Hassan avait fini par se faire à l’idée : celle que Camil ne reviendrait pas. Il ne s’y était pas résigné de gaîté de cœur, mais il avait très rapidement pris le parti de ne pas espérer après son retour, et sur le revirement total de son avis sur ce qu’il estimait être la trahison d’un ami. Et qu’en restait-il, presque deux ans plus tard, de ces lambeaux d’amitié ? L’incertitude légitime pour le brun que son interlocuteur soit là pour raccrocher les wagons, plutôt que pour Dieu savait quel motif plus terre à terre. « Je ne suis pas sûr que l’un et l’autre soient complètement dissociables. » avait de son côté fait remarquer Camil, étonnamment docile face à une question qu’il aurait pourtant été aisé de prendre pour une provocation. « Mais je pencherais plus pour l’ami. Je crois. J’espère. » L’américain était bien le seul à pouvoir apporter une réponse à cette question, mais acquiesçant pour témoigner du fait que lui-même n’était pas fermé à l’idée, Hassan s’était levé pour remettre sa bouilloire en route et avait répondu « Ça tombe bien, c’est celui des deux qui reçoit sans rendez-vous. » avec une pointe de plaisanterie, avant de proposer à son invité de lui préparer quelque chose. « Un café, merci. » Un café ce serait, donc, et attrapant une capsule d’espresso le brun l’avait fait passer dans la machine avant de reporter son attention sur Camil. « Tu es toujours aussi addict à tes thés ? » Mieux valait cette addiction que celle reprise récemment à la cigarette, mais la visite impromptue du politicien avait au moins l’avantage de remettre à plus tard le prochain shoot de nicotine auquel Hassan ne couperait pas. « Il fallait bien que mes racines perses continuent de ressortir ici et là. Mon père serait fier. » Moins des tatouages, du divorce et de la vie sentimentale dissolue, mais hey, ce à quoi père et mère ne pouvaient plus assister ne pouvait plus leur faire de mal. La tasse de café tendue à Camil encore fumante, celui-ci s’en était saisi en cherchant déjà une nouvelle banalité à laquelle se raccrocher pour continuer de tourner autour du pot : « Tu as changé de bureau, non ? Tu as été promu ? » Une éternité depuis leur dernière conversation, toujours. « Toi aussi, il paraît. Félicitations. » Tout ami qu’avait été Camil – qu’était toujours, peut-être – Hassan n’avait pas mis son nom en tête de liste sur son bulletin, mais ça l’américain le savait déjà ; Les félicitations ne s’adressaient donc pas tant au candidat qu’à l’ami. « L’ancien doyen de ma filière est allé s’installer chez les kiwis. » avait-il par ailleurs repris, pour ne pas laisser la question initiale sans réponse. « Je voulais son bureau, on m’a dit que j’étais obligé de prendre le poste qui allait avec, alors voilà. » Façon modeste d’admettre qu’effectivement, il avait accédé à une promotion néanmoins bien méritée, d’autant plus maintenant qu’il y laissait énergie et heures de sommeil qu’il ne rattraperait jamais. La tasse de thé remplie et poussée sur un coin du bureau pour la laisser infuser un peu, le brun avait enfin pu reprendre place sur son fauteuil et l’atmosphère en avait aussitôt profité pour redevenir sérieuse. « Je n’aurais pas dû disparaître comme ça des radars. » Ils en étaient donc là, désormais. « Ce n’était pas correct de ma part. » Sans doute que non, mais sans le contredire Hassan n’en avait pas moins conscience que les torts étaient partagés : lui non plus n’avait jamais fait l’effort de prendre des nouvelles de Camil, en pratiquement deux ans. Et s’il avait les premières semaines pu se cacher derrière l’excuse de laisser un peu d’air et d’espace à son ami, trop de temps avait continué de s’écouler ensuite pour que cela reste une justification suffisante. « Cette problématique n’était pas la tienne, mais la mienne. Je ne l’ai pas compris immédiatement. » Cette problématique était avant tout celle de Sixtine, en réalité, mais Hassan n’avait pas envie de rentrer à nouveau dans ce débat, et s’était contenté de balayer la chose d’un mouvement de tête. « Je suis désolé aussi, va. » avait-il alors confessé dans un léger soupir, dispensant même à son ami d’avoir à formuler en bonne et due forme ce qui lui semblait si difficile à articuler. « D’avoir laissé les choses se tasser, au moins. J’avais ton numéro, j’aurai aussi pu m’en servir. » Et s’il aurait aisément pu se cacher derrière mille et une excuses, de son emploi du temps chargé au capharnaüm actuel de sa vie personnelle, en passant par le fait de n’avoir pas voulu risquer d’être jeté comme un malpropre, le pourquoi n’était pas réellement important. « Comment va ta sœur ? » avait-il en tout cas trouvé le courage de demander, à défaut d’avoir la moindre intention de s’excuser du secret qu’il avait gardé pour elle.
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| | | | (#)Dim 9 Avr - 20:20 | |
| Si Camil maniait les mots et la diplomatie avec aisance en public, il n’était pas spécialement volubile ni tendre en privé. Seules sa soeur Sixtine et sa prétendue compagne Deborah bénéficiaient de la douceur et de la tendresse du blond, qui se montrait nettement plus rugueux et cinglant avec les autres. Hassan, qui était pourtant un ami depuis de longues années, ne pourrait pas dire le contraire : il avait eu à subir les foudres du politicien, quelques mois plus tôt. Des foudres qui, à l’époque, lui semblaient justifiées : comment son ami avait-il pu garder le secret concernant la maladie de sa propre soeur ? Comment avait-il pu lui cacher une telle chose, alors même qu’il savait quels étaient les liens qui unissaient les deux Américains ? En quête d’un coupable à accuser pour justifier sa peine et son abattement, Camil s’était déchargé sur Hassan. À tort, bien évidemment ; il lui avait néanmoins fallu quelques semaines pour s’en apercevoir, et pour retrouver la raison. Et quelques unes de plus pour se décider à aller présenter ses excuses au principal concerné. « Alléluia. » Répondit l’Américain en esquissant un sourire amusé. Il n’avait pas encore fait son mea culpa mais, déjà, le poids qui pesait sur ses épaules s’était allégé. Au moins, l’universitaire ne lui claquait pas la porte au nez — un fait que Camil aurait pu concevoir, conscient qu’il aurait été le seul responsable de cette situation détériorée et catastrophique. Invité par Hassan, le politicien prit place dans l’un des fauteuils qui faisait face à son bureau. « Ah, les racines… » Souffla Camil en souriant, amusé. S’il y avait bien quelqu’un qui était pleinement en mesure de comprendre l’universitaire, c’était bien lui. Bi-national, il ne s’était jamais considéré comme un expatrié en Australie (même si ses opposants n’avaient jamais manqué de souligner qu’il n’était pas né sur le territoire et que, de fait, cela faisait de lui un étranger). « Sans doute. » Concéda-t-il avec bienveillance. Il n’avait jamais eu la chance de rencontrer le père de son ami, mais ce dernier l’avait toujours décrit comme étant fier. Nul doute qu’il apprécierait que son fils continue à véhiculer certaines traditions ancestrales… Mais qu’il tiquerait sur certains autres points.
« Merci. » Déclara simplement le politicien, désormais fraîchement élu à la Chambre des Représentants. L’annonce de sa candidature n’avait pas été une surprise pour ses proches, qui avaient pleinement connaissance du caractère ambitieux de l’Américain. Ainsi, la question principale le concernant n’avait jamais été « quoi ? », mais plutôt « quand ? ». Il avait pris le temps nécessaire pour bien s’entourer, pour comprendre tous les rouages de la machine politique, pour asseoir son image. Et quand il avait été temps de se lancer, il l’avait fait. Sans regret, aujourd’hui. Sans doute un peu à la manière d’Hassan. « Quelle idée. » Fit remarquer Camil en arquant un sourcil. « Et quelle aubaine, pour toi. » Ajouta-t-il en souriant, alors que son ami lui confirmait avoir reçu une promotion. Grandement méritée, l’Américain en était certain ; Hassan s’était toujours défoncé pour son travail. Pour tout le monde, d’ailleurs. C’était son tempérament. « Tu te plais, dans tes nouvelles fonctions ? » Demanda-t-il, sincèrement intéressé. Il était curieux d’en savoir davantage, curieux de voir à quoi ressemblait désormais le quotidien de son ami. « Raconte-moi ; ça m’intrigue. » Quémanda-t-il.
La première raison de la présence de Camil en ces lieux fût abordée rapidement. Comme à son habitude, le politicien préférait aller droit au but plutôt que de prendre des chemins détournés pour arriver à ses fins. Il s’excusa platement, et admit que son attitude avait été déplorable. Hassan aurait pu lui rétorquer qu’il avait mis du temps à s’en rendre compte, et encore plus de temps à venir s’en excuser. Mais il demeurait cet homme bienveillant à l’égard de ses amis, et Camil en fût instantanément soulagé. « Non. Ce n’était pas à toi de faire le premier pas. » Parce qu’il n’était coupable de rien, parce qu’il n’avait aucun mea culpa à faire. Hassan était resté droit dans ses bottes, du début à la fin. Et on ne pouvait le lui reprocher en rien. Il but une gorgée de son café pour se donner un brin de contenance, et répondit finalement à l’universitaire. « Elle va bien. » C’était en tout cas ce qu’elle lui clamait haut et fort à chaque fois qu’il l’avait en ligne — soit deux fois par jour, en moyenne. Fusionnels, les Smith ? Non, c’était plus que ça encore. Camil s’en rendait bien compte. « Elle est repartie aux Etats-Unis, pour bénéficier d’un traitement expérimental. » Expliqua-t-il en haussant les épaules. Il déposa sa tasse sur le bureau d’Hassan, et passa une main sur son visage. « J’aurais aimé fêter mes succès avec elle. Comme tu le sais, Six y a grandement contribué. » Mais la vie n’était pas toujours tendre, pas toujours facile, et Hassan était bien placé pour le savoir. « Ça fait vide sans elle. » Avoua-t-il en haussant les épaules. D’une certaine façon, et même si leur relation sentimentale était montée de toute pièce, heureusement que Deborah était à ses côtés. « Elle me manque beaucoup. » Mais il savait que ce ne serait qu’une question de temps avant qu’elle ne revienne.
@Hassan Jaafari |
| | | | (#)Dim 18 Juin - 22:42 | |
| You say "sit down, it's just a talk", he smiles politely back at you, you stare politely right on through. Some sort of window to your right, as he goes left, and you stay right, between the lines of fear and blame you begin to wonder why you came. ☆☆Si Hassan ne s’était jamais plaint de la taille (pourtant ridicule) du bureau qu’il avait occupé durant des années à un autre étage de l’université, pas du genre à envier ce qui se trouvait dans l’assiette du voisin quand il pouvait se contenter d’apprécier ce qui était à lui, il devait bien admettre s’être habitué à vitesse grand V au spacieux bureau dont la porte arborait désormais son nom, et dans lequel il pouvait désormais recevoir sans avoir à pousser les murs ou craindre la claustrophobie de son interlocuteur – il avait des fenêtres, rendez-vous compte. Les étagères débordaient toujours de livres, sa paperasse en cours n’avait pas réduit au prétexte qu’elle était désormais cachée dans des placards plutôt qu’empilée sur un coin de son bureau, et ce que le brun avait gagné en espace il l’avait assurément aussi gagné en charge de travail, loin de s’en plaindre puisqu’ayant sauté à pieds joints sur une opportunité inconsciemment attendue depuis le début de sa carrière, lui toujours le premier à chercher mille façons de s’investir dans le mécanisme universitaire pour ne pas y être qu’un simple rouage interchangeable. L’ambition d’Hassan, si elle ne se traduisait pas de la même manière, n’avait au fond rien à envier à celle bien connue de Camil, pour qui les derniers mois avaient à aussi été riches en rebondissements et en accomplissements professionnels ; La différence étant que, par essence, ceux de Camil étaient suffisamment publics pour que l’universitaire n’ait pas eu besoin de se l’entendre dire par le principal intéressé. « Merci. » s’était d’ailleurs contenté de répondre l’américain après avoir été félicité à ce sujet, probablement aussi habitué à remercier qu’à serrer des mains. Nulle élection pour Hassan, mais simplement une opportunité saisie au vol avec l’hésitation de la raison, mais l’envie terriblement égoïste d’accepter dans la seconde. « Quelle idée. Et quelle aubaine, pour toi. » Acquiesçant silencieusement, l’enseignant avait pincé les lèvres comme pour marquer une hésitation, et finalement il avait admis « Je n’ai pas accepté immédiatement, si je dois être honnête. Mais je ne regrette pas. » en faisant momentanément disparaître son nez dans sa tasse de thé. Il s’était imaginé d’autres opportunités, d’autres espoirs plus personnels qui l’auraient tenu suffisamment occupé pour ne plus avoir envie de donner à son travail la plus grosse part de son temps – mais les espoirs étaient une chose, la réalité en était une autre. « Tu te plais, dans tes nouvelles fonctions ? Raconte-moi ; ça m’intrigue. » Quelles étaient la part de sincérité et de politesse dans la question de Camil ? Désireux de ne pas noyer le politicien dans des détails dont il n’aurait peut-être que faire, Hassan s’était appuyé contre le dossier de son fauteuil en se donnant l’air de réfléchir un instant « C’est un peu … C’est comme avoir joué dans une équipe pendant suffisamment longtemps pour en avoir trouvé les limites et les défauts, et se voir offrir le poste d’entraîneur. Tu vois ce que je veux dire ? » Évidemment que la métaphore sportive était de rigueur ; Le fan de rugby qui sommeillait n’était jamais loin. « Maintenant c’est à moi de sélectionner les meilleurs joueurs et de m’assurer que la dynamique de l’équipe fonctionne. » Pas de championnat à la clef en fin d’année, mais la volonté commune que les élèves obtiennent un diplôme qui avait du sens. Mais à tenter de se mettre ainsi à jours sur leurs derniers développements professionnels, les deux hommes avaient surtout l’air d’éviter l’éléphant dans la pièce : qu’ils ne se soient pas vus ni même parlés durant pratiquement deux ans n’avait rien d’un hasard ou d’une incompatibilité d’emplois du temps, et trop de mois s’étaient écoulés pour qu’Hassan ne puisse encore prétendre qu’il ne s’agissait que de la volonté de Camil. « Non. Ce n’était pas à toi de faire le premier pas. » s’en était pourtant défendu le politicien, Hassan se contentant de ne pas renchérir sur un débat qui serait probablement sans fin – ils ne l’avaient fait ni l’un ni l’autre pendant trop longtemps, c’était fâcheux, mais le politicien était là aujourd’hui et ils avaient mieux à faire que de distribuer les bons et les mauvais points. « Elle va bien. » avait-il finalement déclaré à propos de sa soeur, moins avare sur le sujet que ne l’aurait pensé Hassan. « Elle est repartie aux Etats-Unis, pour bénéficier d’un traitement expérimental. J’aurais aimé fêter mes succès avec elle. Comme tu le sais, Six y a grandement contribué. » Alors elle n’était pas guérie. Aux prises avec son propre pessimisme et la santé d’une Joanne qui ne semblait que décliner, le brun en avait eu le cœur serré – mais sans rien en dire, se contentant de hocher la tête. « Ça fait vide sans elle. Elle me manque beaucoup. » S’il n’en doutait pas un instant, Hassan était néanmoins surpris que Camil le verbalise à voix-haute, lui d’ordinaire plutôt du genre à économiser ses mots lorsqu’il était question de sentiments. « Je me doute, oui. » Lui-même trouvait parfois que son propre frère vivait trop loin de lui, et il n’était installé qu’à Sydney – alors l’autre bout du monde ? « Mais c’est ce genre de sacrifice nécessaire qui lui permettra de contribuer aussi aux suivants. » Même accompagnés d’un sourire, les mots d’Hassan lui semblaient un peu vains : la maladie n’avait ni Dieu ni maître, elle n’en faisait qu’à sa tête et croire le contraire n’était que superstition. « Expérimental à quel point ? » s’était-il alors entendu questionner avec prudence, pesant tant ses mots que le regard qu’il avait posé sur Camil la seconde suivante, en reposant sa tasse de thé sur le bureau. Expérimental- onéreux, ou expérimental- désespéré – c’était probablement le sens de la question, bien qu’il ait préféré se garder de le préciser.
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| | | | (#)Ven 14 Juil - 22:20 | |
| S’il avait pris un peu de hauteur et de distance, Camil aurait eu tout le loisir de contempler l’étrangeté de son amitié avec Hassan. À vrai dire, rien n’allait de source : ils étaient complètement différents, avaient des cultures qui n’étaient semblables en rien, et ne possédaient pas tellement de points communs. Pourtant, tous deux avaient mené leur barque jusqu’à obtenir un statut aussi enviable que mérité. Ils étaient deux acharnés, deux gros bosseurs, deux courageux. Les lippes de Camil s’étirèrent en un sourire malicieux, alors que son ami lui avouait ne pas avoir accepté immédiatement l’offre que ses supérieurs avait faite. « Je ne suis pas tellement surpris, pour être honnête. » Confessa le politicien, amusé. Contrairement à lui, Hassan était un homme humble, qui ne courrait pas spécialement après l’avancement et après le fait de grimper le plus rapidement possible les échelons. « Tu t’y attendais ? Ou ça a été une véritable surprise ? » Demanda l’Américain, avec curiosité. Il interrogea ensuite son ami sur ses nouvelles fonctions, et sur son ressenti. Ça devait être un sacré chamboulement, mine de rien : désormais, Hassan avait une autre stature auprès de ses pairs, tout en restant la personne qu’ils avaient toujours connu. L’Américain inclina la tête, confirmant les propos de son ami. « Je vois exactement ce que tu veux dire. » Précisa-t-il, alors que Camil trouvait la métaphore sportive choisie par Hassan judicieuse. Ça reflétait complètement l’état d’esprit que devait avoir un manager, à son sens. Et nul doute que, dans ce rôle, le professeur excellait. Patient, à l’écoute et tolérant : tous ceux qui se succédaient devant lui ne pouvaient pas trouver un meilleur interlocuteur. « Tu n’envisages pas de… » Il hésita, cherchant les meilleurs mots pour préciser sa pensée : « Je ne sais pas, réformer ton équipe ? Puisque tu en connais les difficultés. » Mais Hassan avait-il seulement la possibilité de le faire ? Avait-il les mains libres pour faire ce qu’il jugeait bon, et nécessaire ? Camil en doutait ; les grands institutions étaient bien moins souples qu’elles voulaient le faire croire. « Et la question la plus importante : y a-t-il un trophée pour récompenser le vainqueur, à la fin ? » Demanda le politicien, qui était relativement étranger au monde universitaire Australien. Pour sa part, il avait fait ses études aux États-Unis… Sans compter qu’il avait quitté les bancs de la faculté depuis de nombreuses années. « Tu trouves quand même le temps de donner des cours, ou tu laisses ça à ton équipe de choc ? » Camil ne savait pas vraiment si Hassan trouvait encore le temps nécessaire pour dispenser son savoir. Pour lui, il espérait que ce soit le cas : le professeur avait toujours aimé son travail, et savait tisser des relatons comme personne avec ses étudiants. Une force, louable, que le blond admirait.
L’amitié des deux hommes avait été mise à rude épreuve, au cours des derniers mois. Camil savait pertinemment qu’il était le seul et unique responsable de cette situation ; c’était lui, qui avait tiré à boulets rouges sur son ami. Lui, qui l’avait accusé de mensonge, de trahison, et d’autres maux encore. Lui, qui n’avait rien voulu entendre — sa peine et son impuissance jetant un voile obscur sur ce qui lui restait de raison. Il n’en était pas fier, Camil ; et c’est pour cela qu’il avait décidé de faire un premier pas en direction de son ami — en espérant sincèrement qu’Hassan accepterait de l’écouter dans un premier temps, et de le pardonner dans un second. « Tu as probablement raison. » Répondit Camil avec un pincement au coeur. Il aurait tant aimé que sa petite-soeur ne soit pas victime d’une telle injustice. Pourquoi avait-il fallu qu’elle enchaîne les problèmes de santé ? Il aurait tout donné, absolument tout, pour échanger sa place avec celle de Sixtine. Mais la vie n’était pas juste, et troquer sa place contre celle de sa soeur relevait d’un espoir fou et impossible. « Ce n’est pas aussi terrible que ça y parait. » Fit remarquer l’Américain en haussant les épaules. En fait, d’une certaine façon, ça l’était ; mais par un tour de passe-passe dont Sixtine avait le secret, elle avait réussi à le rassurer et à lui faire croire l’inverse. Cependant, force est de constater qu’elle avait vraisemblablement raison d’y croire : ces derniers temps, ses analyses n’avaient jamais été aussi bonnes. « Il semblerait que le traitement soit prometteur, et que Six y réagisse bien. » Confia le politicien, avant d’ajouter : « Mais je ne veux pas crier victoire trop vite. J’ai peur que ça me porte le mauvais oeil. » C’était une superstition idiote, complètement irrationnelle, qui ne reposait sur aucun fait scientifique tangible. Absurde, quand on connaissait le tempérament cartésien du blond. « Elle parle déjà de revenir le plus vite possible, pour reprendre ses fonctions. » Il ricana, et secoua la tête : « Elle est cinglée. » Mais il l’aimait à s’en arracher le coeur à mains nues. « Tu peux lui envoyer quelques nouvelles, tu sais. Elle serait contente. » Confessa-t-il, avant de poursuivre : « Elle avait tout confiance en toi. » Et, à tort, Camil avait cru que cela signifiait qu’elle n’avait pas confiance en lui. Il n’avait compris que bien plus tardivement qu’elle avait surtout cherché à le préserver. @Hassan Jaafari |
| | | | (#)Dim 12 Nov - 15:25 | |
| You say "sit down, it's just a talk", he smiles politely back at you, you stare politely right on through. Some sort of window to your right, as he goes left, and you stay right, between the lines of fear and blame you begin to wonder why you came. ☆☆ « Je ne suis pas tellement surpris, pour être honnête. »Hassan avouait ne pas bien savoir quoi penser ni comment interpréter cette phrase, aussi n’avait-il pas fait de commentaire supplémentaire et s’était-il simplement contenté de secouer la tête pour apporter de la nuance lorsque Camil avait demandé « Tu t’y attendais ? Ou ça a été une véritable surprise ? » Il mentirait en disant que la surprise avait été totale, mais savait tout aussi bien qu’en cas de refus de sa part le conseil d’administration de l’université n’aurait eu aucun mal à proposer le poste à un autre que lui sans pour autant donner l’impression d’agir par dépit. L’UQ regorgeait de profils intéressants, chacun à leur manière, et s’il avait pleinement conscience de ses capacités et de ce qu’il était en mesure d’apporter en terme de dynamisme et de pédagogie, il savait aussi que la façon dont il laissait sans cesse sa vie professionnelle déborder sur le personnel faute de réelles obligations à ce niveau lui donnaient un avantage sur d’autres collègues qui, une fois hors des murs de l’université, parvenaient encore à être suffisamment occupés pour ne pas tout ramener à leur travail. « Disons que dès l’instant où mon prédécesseur a annoncé son départ, j’ai su que j’étais en bonne position pour lui succéder. Mais je n’étais pas le seul. » s’était-il donc contenté de répondre d’un ton mesuré. Reste que son profil était celui qui avait fait la différence, et qu’en ayant décidé d’accepter après bien des semaines à peser le pour et le contre, Hassan se sentait désormais investi d’une mission dans laquelle il n’avait pas d’autre choix que de s’investir corps et âme pour y faire honneur. En cela, la métaphore sportive lui semblait particulièrement adaptée, et acquiesçant d’un signe de tête son ami avait commenté « Je vois exactement ce que tu veux dire. » avant de marquer une pause, visiblement hésitant sur la suite de ce qu’il envisageait de verbaliser. « Tu n’envisages pas de … Je ne sais pas, réformer ton équipe ? Puisque tu en connais les difficultés. » S’il avait été du genre à dire les choses sans veiller à tourner sept (mille) fois sa langue dans sa bouche, Hassan aurait probablement fait remarquer que congédier les gens à tour de bras était bien une technique de politicien. Au lieu de cela, il s’était contenté de secouer la tête d’un air vaguement amusé « Mon but c’est d’apporter du sang neuf, mais pas de mettre les gens au chômage. C’est un équilibre à trouver. » Sans compter les départs qui n’étaient pas de son fait – la collègue assise une demi-heure plus tôt à la place occupée par Camil n’en était que le dernier exemple. « Et la question la plus importante : y a-t-il un trophée pour récompenser le vainqueur, à la fin ? » Cette fois-ci, le politicien était parvenu à lui arracher un rire franc, sa réponse néanmoins sérieuse lorsque ce dernier avait ajouté « Tu trouves quand même le temps de donner des cours, ou tu laisses ça à ton équipe de choc ? » et posé sans le savoir le doigt sur ce qu’Hassan avait considéré comme la plus indispensable des conditions à son acceptation. « Je continue d’enseigner, c’était non-négociable. J’aurais sacrifié le contrat avec ABC s’il avait fallu faire un choix, mais pas les cours. » Ses interventions hebdomadaires pour la chaîne d’information lui plaisaient pourtant beaucoup, et lui permettaient d’aborder son domaine d’expertise par un prisme différent de celui offert par l’université … Mais il ne s’agissait que d’une activité annexe. L’enseignement était une vocation. Mais de monopoliser ainsi la conversation, Hassan avait la sensation de passer à côté du réel motif de la visite de Camil, qu’il imaginait – à tort ou à raison – forcément être lié à la soeur de l’américain, et plus globalement à la manière dont Camil et lui s’étaient brouillés, un peu bêtement il fallait l’avouer, des mois plus tôt. Soulagé d’abord d’apprendre que Sixtine se portait bien, il ne doutait pas que son éloignement temporaire puisse être un crève-cœur pour son aîné, habitué à la couver. « Tu as probablement raison. » s’en était-il alors sorti lorsqu’Hassan avait tenté de lui apporter un brin de relativisation, ce dernier néanmoins interpellé par la formulation “expérimentale” accolée aux traitements que semblait désormais suivre son ancienne élève. « Ce n’est pas aussi terrible que ça y parait. » avait néanmoins assuré à ce sujet l’américain. « Il semblerait que le traitement soit prometteur, et que Six y réagisse bien. Mais je ne veux pas crier victoire trop vite. J’ai peur que ça me porte le mauvais œil. » Hassan n’avait jamais connu Camil comme quelqu’un de particulièrement superstitieux, mais savait mieux que personne que c’était dans les situations désespérées que l’on était le plus susceptible de revoir sa copie à ce sujet. « Je comprends. Je lui souhaite d’aller vite mieux, que vous puissiez laisser tout ça derrière vous. » s’était-il donc contenté de commenter, le sourire sincère mais le ton prudent, sa tendance personnelle allant plutôt à la prière qu’aux espoirs basés sur rien, mais pas du genre à en faire état avec ceux qui ne partageaient pas sa foi. « Elle parle déjà de revenir le plus vite possible, pour reprendre ses fonctions. Elle est cinglée. » – « Ou très impatiente. » De retourner à sa vie, de retrouver son quotidien et ses habitudes, et de partager avec son frère autre chose que des updates sur l’état de sa santé, probablement. « Tu peux lui envoyer quelques nouvelles, tu sais. Elle serait contente. Elle avait toute confiance en toi. » avait fini par lui suggérer Camil, et bien que répondant d’abord par un sourire Hassan s’était senti le devoir de lui avouer « Je n’ai pas vraiment de moyens de la joindre, ce n’est plus une de mes étudiantes. » La crispation initiale, en réalité, venait peut-être d’une proximité que le politicien imaginait exister entre sa sœur et son ami. « Mais tu n’auras qu’à lui transmettre mes vœux de rétablissement la prochaine fois que tu lui parles. » Ce qui, il n’en doutait pas, arriverait rapidement. Sa tasse de thé terminée, le professeur avait machinalement enclenché l’écran de son téléphone portable pour consulter l’heure, ignorant une fois encore les notifications accumulées depuis que s’étaient succédés coup sur coup son rendez-vous avec sa collègue, et l’arrivée inopinée que Camil à sa suite. « Ça m’embête de devoir te mettre à la porte, mais je donne cours dans une demi-heure, et je dois encore passer par l’administration réclamer un micro en état de marche. » S’il était capable de tenir ses cours de la matinée à la force sa propre voix, ses cordes vocales n’étaient plus du même avis lorsqu’arrivait la fin de la journée, et qu’à la résonance des amphithéâtres se rajoutait les bavardages dissipés d’élèves pour qui la journée avait été dense. « Essayons de faire en sorte de ne pas attendre aussi longtemps entre cette conversation et la suivante ? C’est de la mauvaise volonté, quand on sait le peu de distance entre ton bureau et le mien. » Il s’en amusait, mais la réalité était qu’Hassan était même plus proche du parlement qu’il ne l’était des studios d’ABC ; L’un comme l’autre n’avaient donc aucune excuse.
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| | | | (#)Dim 3 Déc - 15:07 | |
| Les lippes de Camil s’étirèrent en un léger sourire, un brin narquois. Il ne se moquait pas de son ami, bien au contraire ; seulement, comme à son habitude, Hassan ne pouvait s’empêcher de faire preuve de modestie. C’était à peine s’il osait dire que son nom figurait dans les petits papiers du doyen pour succéder à son prédécesseur — même si, l’Australien en avait conscience, la concurrence dans les métiers universitaires pouvait aussi être rude et déloyale. Les places étaient peu nombreuses, et les opportunités ne se présentaient pas sur le palier de votre porte tous les quatre matins. « Je suis content que tu aies pu bénéficier de cette occasion pour te faire une place au sommet. » Mais Camil le savait pertinemment : il s’agissait aussi du résultat d’un travail acharné, d’un dévouement sincère et d’une irréprochabilité constante. Il s’était donné, Hassan, et il récoltait désormais les fruits des graines qu’il avait semées.
Peu familier sur le fonctionnement du système universitaire australien, Camil interrogea son ami à ce sujet. La composition de son équipe était naturellement un point important, pour ne pas dire essentiel. À l’instar du politicien, Hassan devait s’entourer de professeurs et de membres du personnel en qui il pouvait avoir confiance, sur lesquels il pourrait se reposer si le besoin s’en faisait ressentir. L’Américain arqua un sourcil, un brin perplexe, lorsque son ami lui fit savoir que s’il comptait apporter du sang-neuf, il ne souhaitait pas pour autant faire table rase du passé. C’était louable, mais ça ressemblait peu aux habitudes des politiciens. À ses habitudes à lui. « Tu as toujours été si… » Camil cherchait le bon mot, sans être réellement capable de mettre le doigt dessus. Tolérant ? Évidemment qu’Hassan l’était, mais il ne s’agissait pas complètement de ça. Optimiste ? Non plus, mais il en possédait forcément une touche, pour tenir un pareil discours. Prévenant ? En quelque sorte. Là où Camil avait souvent besoin d’être canalisé pour ne pas se révéler être un bulldozer ambulant, Hassan, lui, oeuvrait en douceur et en finesse. Deux caractéristiques auraient pu posséder ou développer, si son domaine d’activité le lui avait permis. Mais on ne grimpait pas en haut de l’échelle politique (ni celle de la finance, d’ailleurs) en étant gentil avec les autres. « J’en sais rien. À vouloir faire le bien autour de toi. » Déclara Camil en haussant les épaules, renonçant au fait de mettre un mot sur le caractère si humain et si louable de son ami. « Je suis persuadé que chacun se rendra compte de la chance qu’il a de travailler avec toi. » Et ce n’était pas une parole en l’air, ni destinée à brosser son ami dans le sens du poil : il le pensait sincèrement. Si leur amitié avait connu quelques remous dernièrement, leurs collaborations professionnelles sur des sujets bien spécifiques avaient toujours été un succès. « Et là, tu parviens à tout garder ? » Demanda le blond, avant d’ajouter : « Est-ce que tu te shootes au thé pour éviter de tomber de fatigue ? » Il titillait son ami, bien sûr, mais c’était aussi une façon pour lui de s’inquiéter discrètement de sa santé. « Tu te donnes encore combien de temps, avant de prendre la place du doyen ? » Plaisanta Camil, qui imaginait déjà Hassan siéger sur le plus grand et le plus haut des trônes. Mais, connaissant le tempérament du professeur, Camil était convaincu qu’il n’y avait pas (encore) pensé.
Les deux hommes en vinrent ensuite à évoquer la véritable raison du passage de Camil : leur brouille, directement liée à Sixtine — et bien que cette dernière n’ait jamais voulu de cette tournure d’événement. Le politicien avait compris, un peu tardivement cependant, qu’Hassan n’était pas coupable des maux dont il l’avait accusé. Il n’avait fait que respecter la volonté de la dernière des Smith, respecter ses choix. Cette dernière, rentrée aux États-Unis pour suivre un traitement expérimental, y répondait pour le moment bien. Camil crevait d’envie d’y croire, mais son naturel peu optimiste le forçait à la prudence. « Moi aussi. » Soupira le blond en inclinant la tête. « L’un et l’autre ne sont pas incompatibles. » Fit-il remarquer en souriant, amusé. Bien sûr, Camil aurait préféré que sa soeur soit plus mesurée, plus raisonnable ; mais elle avait toujours vécu à fond. Puisqu’elle ne savait pas de quoi serait fait son futur, elle avait choisi de croquer la vie à pleines dents, et de profiter de l’instant présent. « Je lui ferai parvenir ton message. » Promit le politicien. Et il le ferait : il avait finalement compris qu’Hassan n’était pas un adversaire ou un ennemi, mais un ami qui lui voulait simplement du bien.
Le temps de terminer leurs tasses était venu, et chacun devait retourner à ses occupations. Hassan auprès de ses étudiants, Camil auprès de son équipe. « Aucun souci. » Déclara-t-il en se redressant. Il gloussa en entendant parler du micro, et suggéra : « Rédige une note à cette intention, et je te promets d’essayer de faire quelque chose lors de l’attribution des budgets. » C’était aussi ça, d’être ami avec un politicien. Il lui tendit une main franche et amicale, qu’Hassan serra. Camil fit quelques pas en direction de la porte du bureau pour s’éclipser, mais fut retenu une fraction de seconde supplémentaire par les mots de son ami. « Tu peux passer quand tu veux ; tu seras toujours le bienvenu. » Déclara-t-il en souriant. « A bientôt, mon ami. »
@Hassan Jaafari
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| | | | | | | | time to say sorry (hassan&camil) |
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