Vivre ici, c'est du grand n'importe quoi. C'est encore étonnant que tu sois pas encore mort. Même toi, tu ne comprends pas comment c'est encore possible. T'es là depuis quelques semaines à peine, et t'as dormi presque aussi souvent dans ta cellule qu'à l'infirmerie - t'exagère à peine. Quand tu te fais pas casser la gueule pour aucune foutu raison - bon peut-être bien que t'as déjà des dettes dans le coin, pas ta faute si personne à l'extérieur a pitié de toi pour te donner un peu de fric - tu finis à l'infirmerie à cause de la drogue de mauvaise qualité de la place. Essayez de rester sobre enfermé ici sans devenir fou, c'est impossible. Ouais, vaut mieux être défoncé H24, avec de la chance t'aura qu'à cligner des yeux et tu seras sortie. Tu comprends pas trop ce que tu fous dans ce bureau. T'as l'impression qu'on vient de t'enfermer chez le psy. Mauvaise idée, il risque de vouloir se tirer une balle s'il faut que tu parles des bêtes noires dans ton cerveau - ouais, y'en a pas mal et elles sont défoncées, c'est pire encore. T'es bien enfoncé dans la chaise, putain y'a genre vingt ans (ou vingt jours) que t'as pas eu le cul sur quelque chose d'aussi confortable. Tes bras croisés contre ton torse, tu sursautes bien trop haut quand la porte du bureau s'ouvre. Ouais, peut-être bien que t'as eu le temps de pioncer un peu. Tu as le cerveau au ralenti. Tu frottes tes yeux pour avoir tenté de te sortir de ton état comateux - c'est un échec total. Ça t'empêche pas d'avoir un regard déviant sur les jambes élancées de la femme qui entre dans la pièce, marche jusqu'à derrière son bureau. T'as pas le temps de te rendre à son cul qu'elle s'assoit déjà dessus. Désolant. Son visage n'est pas trop désagréable à regarder, mais même ça, c'est plus assez. Tu veux juste dégager d'ici. Et c'est pas gagné. T'as l'impression que tu sortiras jamais. De toute façon, t'as personne qui t'attend dehors. À quoi bon partir ? « J'vais pas t'faire perdre ton temps, j'compte pas répondre à tes questions débiles, donc on peut juste arrêter ça maintenant et je vais gentiment retourner dans ma cellule. » Elle a qu'à marquer que tu ne veux pas coopérer. Rien à foutre. Elle éviterait une perte de temps considérable si elle le faisait. Mais non, elle ne va pas le faire, parce que tout le monde est chiant ici. « Tu peux toujours m'inviter à prendre un verre quand j'serais sorti si tu tiens tant qu'ça à me parler. » Ah, bon, peut-être bien que son joli visage est suffisant. Peut-être bien que tu veux avoir le loisir de mater ce joli petit cul quand t'auras pas peur que quelqu'un vienne violer le tien pendant ton sommeil - ouais ça dort pas trop bien ici. Enfin, sauf si c'est elle qui veut te violer, ça, y'a pas de problème. Si vous pouvez vous filmer et envoyer une copie à Murphy pour la faire chier, ce serait le comble du bonheur. Ah oui, Murphy est sans l'ombre de doute la raison numéro du pourquoi que t'es toujours défoncé. Foutu connasse celle-là. Elle va revenir en rampant quand elle en aura marre que son mec lui caresse les cheveux au lieu de la faire crier toute la nuit.

@yara day

Dossier sous la main, Yara venait de passer les dix dernières minutes à lire les quelques lignes à propos de Seth Moriarty. Elle savait pourquoi il avait fini derrière les barreaux, avait quelques informations sur son identité et elle avait pu lire le procès-verbal et le jugement en son encontre. Faute à pas d’chance on dirait bien que son cas soit passé rapidement en justice alors que d’autres attendaient encore sagement chez eux, assignés à domicile avec quelques permissions de sorties par jour, en attendant que leur cas soit traité. Pour lui, tout était allé très vite.
Yara ne choisissait jamais avec qui elle allait devait travailler. Les dossiers arrivaient dans ses mails, avec des mandats d’intervention ordonnés par le juge lui-même, ou en tout cas, par son cabinet et ensuite, elle devait s’organiser avec l’administration pénitentiaire pour organiser les rendez-vous. Rares étaient les fois où ceux qui passaient le pas de sa porte arrivaient avec le sourire et elle n’avait jamais aucune exigence en ce sens envers les détenus de la prison. Surtout lorsqu’ils arrivaient pour la première fois. Naturellement, ils étaient en colère, il était dans une situation de stress, rarement détendus et c’était légitime. Son rôle a elle était de les mettre en confiance, elle n’attendait rien de leur part. Elle se donnait rarement pour objectif de les faire ressortir de là avec le sourire, surtout pas au premier rendez-vous. Elle avait un discours bien rôdé et elle avait l’expérience suffisamment aiguisée pour pouvoir anticiper les choses et faire que ça ne tournait pas au drame. Yara avait la répartie, elle avait la posture et savait comment cadrer un entretien, même avec un caïd qui se prenait pour Dieu.
Yara était sortie rapidement pour aller aux toilettes avant de revenir quand elle se rendit compte qu’elle avait passé trop de temps sur son téléphone à regarder les dernières nouvelles. Elle avait gentiment évité d’ouvrir les conversations sur son faux bon et avait glissé l’appareille dans sa poche pour trotter dans les couloirs afin de retourner à son bureau quand, surprise, au moment où elle ouvrit la porte, celui qui ressemblait à la photo du dossier était déjà là. Sauf qu’il avait quelques bleus en plus sur le visage et le nez quelques peu amoché. Elle grimaça d’ailleurs en constatant la différence. « Oh, bonjour Monsieur Moriarty. » oui, pas question de faire des faux copinages en l’appelant par son prénom. La distance avant tout.
Elle alla rapidement s’assoir derrière son bureau pour lui faire face. « J'vais pas t'faire perdre ton temps, j'compte pas répondre à tes questions débiles, donc on peut juste arrêter ça maintenant et je vais gentiment retourner dans ma cellule. » Qu’il est mignon à se croire rebelle plus qu’un autre. Elle tapota sur son bureau, lui faisant signe de se calmer et de rester bien sagement assis là où il était. « Tu peux toujours m'inviter à prendre un verre quand j'serais sorti si tu tiens tant qu'ça à me parler. » elle posa ses coudes sur le bureau et se redressa face à lui, plantant son regard dans le sien, du moins, ce qu’elle pouvait y voir entre ses yeux à moitié fermés et boursouflés. « Vu votre tête, Moriarty, j’ai pas l’impression que j’ai affaire au plus dure à cuire de cette prison, et croyez moi, j’en ai vu passer. Alors ne vous faites pas passer pour ce que vous n’êtes pas. » fit elle, en soufflant doucement, restant de marbre. Ah, elle adorait jouer à ça. Ce sera pas le premier à qui elle fera comprendre qu’il a beau se comporter comme un connard, il ne sera rien de plus qu’un détenu ici. « j’peux vous laisser partir. J’ai aucune obligation de résultat. Par contre, vous, vous avez une obligation de suivi, sans quoi, vous pouvez prendre quelques semaines de plus. A vous de jouer. Moi, je sors et j’entre ici quand je veux. » elle détourne le regard, se penchant sur son dossier, qu’il prenne la porte s’il en a envie, ça ne changera pas sa paie à la fin du mois.

T'as pas envie d'être ici, même si c'est probablement plus divertissant que d'être enfermé derrière des barreaux et avoir un semblant de discussion avec quelqu'un qui ne compte pas te faire un sale coup pendant ton sommeil. Y'a pas d'ami ici. Personne à qui faire confiance. Tu dis pas que tu peux avoir confiance en elle. Elle n'en a rien à foutre de toi et de tous les autres ici. Qu'elle prétende le contraire et elle sera une foutu menteuse comme les autres. Elle est là pour la paie comme tout le monde. Elle n'est sûrement pas assez payer pour endurer les petits cons enfermés ici d'ailleurs - toi y compris. « Vu votre tête, Moriarty, j’ai pas l’impression que j’ai affaire au plus dure à cuire de cette prison, et croyez moi, j’en ai vu passer. Alors ne vous faites pas passer pour ce que vous n’êtes pas. » Non, t'es clairement pas le plus dur à cuire comme elle le dit si bien. Tu ne veux même pas le croiser celui-là. Encore quelques jours, quelques semaines à tout faire pour ne pas attirer son attention. Ni celle de personne d'autre. Bon, c'est pas trop réussi vu la tête que tu as. Tu comprends à la dure. T'essaies d'éviter les emmerdes depuis, mais c'est sûrement déjà trop tard. « Donc, c'est non pour le verre ? » Commence par sortir d'ici ducon avant d'inviter quelqu'un à prendre un verre. Enfin, non, rectification. Demander à quelqu'un de t'inviter à prendre un verre. T'es bien trop fauché pour inviter qui que ce soit. Au vu de votre lieu de rencontre, tu lui apprends rien. « j’peux vous laisser partir. J’ai aucune obligation de résultat. Par contre, vous, vous avez une obligation de suivi, sans quoi, vous pouvez prendre quelques semaines de plus. A vous de jouer. Moi, je sors et j’entre ici quand je veux. » Quelle connasse celle-là. Elle se penche sur un dossier, le tient sûrement qui ne contient rien de bien impressionnant. Elle en a vu d'autres. Elle te laissera partir sans rien dire, sans même te donner la moindre importance. Mais, non, tu ne veux pas passer une seule seconde de plus ici. C'est déjà bien trop loin avant qu'un juge ne décide de simplement entendre ta cause à ton humble avis. Tu comptes pas leur donner une raison de retarder les choses encore plus. Enfin, ce que tu veux et ce que tu fais, c'est deux mondes différents. Malheureusement. Tu serais peut-être déjà sortie sinon. « Tu veux savoir quoi ? » que tu lui demandes sans trop savoir ce que toi tu étais supposé lui dire. T'as pas besoin d'aide pour être réinséré en société. T'as pas tué personne. T'as juste voler un petit collier de rien du tout. C'est carrément abusif que t'es terminé derrière les barreaux. Encore plus de te forcer à rencontrer cette nana. C'est n'importe quoi.

« Donc, c'est non pour le verre ? » question rhétorique, pas besoin de réponse. C’était pas le premier à lui faire des propositions et ce sera surement pas le dernier. Yara, toujours droite dans ses bottes, reposer le cadre : elle n’est pas ici pour se faire des amis, encore moins pour répondre à des avances. Elle sait bien, qu’être une femme dans un centre pénitencier pour homme, c’est être l’objet de convoitise et de fantasmes auxquels elle ne répondra jamais. La question de la sexualité est une réelle problématique dans l’enfermement et Yara en est souvent un dommage collatéral. Du coup, elle esquive et toujours : le cadre.
Pour autant, elle lui laisse le choix, à ce jeune Moriarty. Soit il reste et fait en sorte que ça se passe bien, s’il est coopératif, il met toutes les chances de son côtés pour que le juge soit clément à la révision de son dossier, soit il fait le caïd, le gros malin et prend une peine supplémentaire pour le forcer à réfléchir à ses actes un peu plus. Ici, on est là pour éviter la récidive et Yara est persuadée d’une chose : l’insertion est le meilleur moyen pour répondre à son objectif et faire en sorte de ne plus refaire ses erreurs.
Le jeune Seth qu’elle a devant elle ne lui fait cependant pas bien peur, au vu de son dossier, il a voulu faire le malin et il s’en mord certainement les doigts. Il fait pas forcément parti de ceux qui pourraient être attirés à nouveau par les dérives. « Tu veux savoir quoi ? » et voilà, quand il veut. Il se calme tout de suite et semble avoir compris les enjeux de cet entretien. « Tout, vos projets, la manière dont vous pensez vous y prendre, ce que vous avez l’intention de faire en sortant d’ici. » c’est sans doute trop vague, mais sortir avec un projet et savoir comment faire pour le mener à bien, c’est déjà un bon début. « C’est quoi, vos centres d’intérêt ? Votre parcours ? Vous avez des diplômes ? » elle relève les yeux, son crayons qui danse entre ses doigts, elle prend les notes, elle rapporte, fait sa synthèse, envoie tout au juge. « En fonction de ça, on peut voir si j’ai des pistes pour vous. L’idée, c’est de plus remettre les pieds ici. Plus vous serez impliqué, mieux ça se passera. »

« Tout, vos projets, la manière dont vous pensez vous y prendre, ce que vous avez l’intention de faire en sortant d’ici. » Elle est quand même pas sérieuse ? Ce que tu vas faire en ressortant d'ici ? La même chose qu'avant. Tu retrouveras un taf qui fait chier, mais qui te permet de presque survivre, quand tu sauras plus survivre par toi-même tu te serviras des autres. La routine quoi. « J'ai volé un collier. J'ai pas besoin qu'on m'explique comment vivre en société. » Cette discussion est complètement débile et elle ne sert à rien. T'as pas besoin de son aide ni de celle de personne d'autre. T'as toujours su te débrouiller. Cette fois n'est pas différente même si elle est légèrement plus compliquée qu'à l'habitude. Ce petit séjour en prison t'a suffit pour te calmer sur les conneries. Tu vas te tenir à carreau pendant un temps… jusqu'à ce que tu oublies et que tout redevienne comme avant sans doute. C'est ça le problème avec toi. T'es une roue à problèmes qui tourne continuellement. Il ne faut jamais prendre pour acquis les bons jours parce que les mauvais ne sont jamais loin. « C’est quoi, vos centres d’intérêt ? Votre parcours ? Vous avez des diplômes ? » Elle poursuit son discours et tu te laisses tomber lourdement contre le dossier de la chaise. « En fonction de ça, on peut voir si j’ai des pistes pour vous. L’idée, c’est de plus remettre les pieds ici. Plus vous serez impliqué, mieux ça se passera. » Elle a pas écouter ce que tu as dit tout à l'heure ? T'as pas besoin qu'elle t'aide à être un citoyen modèle. « Tu connais p't'être des boîtes d'architecture qui engagent des mecs avec un dossier ? » Non, il y en a pas. C'est mort si elle veut exploiter les diplômes que tu as déjà en poche. De toute façon, ce n'est pas juste le casier judiciaire qui pose problème. Ce sont aussi tes antécédents et le fait que tu n'as pas pratiqué depuis des années. T'as dû oublier la moitié de ce que tu savais à l'époque. « Je vais aller m'installer chez de la famille le temps de retrouver un appart. Je vais m'trouver un p'tit boulot de merde et rester loin des emmerdes. Satisfaite ? » Elle veut ton plan de sortie ? Le voilà ton plan. Tu te doutes bien que tu seras pas très bien accueilli par Leo si tu retournes là-bas avec tout l'argent que tu lui auras pas donné en ton absence. Ta seule solution s'est d'aller squatter chez ta mère quelques jours - parce qu'elle est facile à manipuler dans le sens que tu veux, elle va dire oui. T'as déjà fait tous les petits boulots du monde, t'en trouvera un nouveau. Et puis, c'est tout. C'est ce qu'ils veulent entendre non ? Savoir que tu auras un toit sur la tête et un boulot pour t'occuper ? Bah voilà. Tu trouveras rendu dehors. C'est pas ici que tu peux envoyer des cv. L'adresse de retour de prison, ça ferait un petit froid en commençant.

« J'ai volé un collier. J'ai pas besoin qu'on m'explique comment vivre en société. » toujours minimiser ses actes, elle a l’habitude ces discours. C’est sûre qu’on est loin du trafiquant de drogue, du violeur, du gangster de rue. Seth a tout du petit con qui a toujours eu tout ce qu’il voulait et qui aime pas qu’on le confronte trop. Seth a l'égo surdimensionné et pense que tout lui est dû. Le problème c’est qu’il a fini par se faire prendre. Qui dit qu’il en est à son premier coup? Et on fini pas en prison pour un collier volé à dix dollars. Il a pas fait semblant, il a voulu jouer avec plus fort que lui, c’est pour ça qu’il a perdu, cette fois. “ il semblerait qu’un rappel soit pas de trop quand même, vous seriez pas ici, si non.” vivre en société, ca commence par respecter la loi, le vol, c’est hors la loi, CQFD.
Par habitude, la brune ne se laisse pas détourner de son travail, elle poursuit ses questions, autant de fois qu’elle devra le faire, jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il n’a pas d’autre choix que de collaborer. Seth est désinvolte, son attitude non chalante, elle la connait par coeur, elle pourrait même prédire chacun de ses faits et gestes. Le problème, avec ces petits cons qu’elle voit défiler heures après heures dans son bureau, c’est qu’ils pensent tous être uniques, mais ils sont tous pareille.
« Tu connais p't'être des boîtes d'architecture qui engagent des mecs avec un dossier ? » voilà une première piste. Elle note sur sa feuille : architecte. Elle aurait lâché l’affaire depuis longtemps, Yara, s’il y avait aucune perspective pour toutes ces personnes incarcérées. La réinsertion, c’est son travail depuis dix ans. Elle sait bien comment s’y prendre, elle a son réseau. Ca fonctionne pas à chaque fois, mais l’excuse du : personne voudra d’un mec comme moi, elle veut même pas l’entendre. “j’connais des mecs qui s’autosabotent.” c’est là, le soucis, l’autosabotage, des gens prêts à laisser leur chances à des “mecs avec un dossier “ oui, elle en connaît. « Je vais aller m'installer chez de la famille le temps de retrouver un appart. Je vais m'trouver un p'tit boulot de merde et rester loin des emmerdes. Satisfaite ? » c’est déjà un bon début; en réalité. “ C’est mon boulot à moi de trouver des boites qui seraient prête à vouloir travailler avec toi.” elle se rattrape. “Vous.” elle se racle doucement la gorge, s’en voulant d’avoir déraper, taffer avec des jeunes comme Seth, c’est prendre le risque de glisser et de réduire la distance professionnelle qu’elle se doit de garder. “ Vous savez faire quoi? Architecte, c’est un projet ou vous déjà des compétences dans le domaine? De l'expérience ? “

“ il semblerait qu’un rappel soit pas de trop quand même, vous seriez pas ici, si non.” La pique est trop facile. Tu roules des yeux alors que tes bras se croisent contre ton torse tout en prenant confortablement tes aises sur ta petite chaise en plastique. Aussi bien le faire, on dirait bien que t'en a pour un petit bout à traîner ici. “j’connais des mecs qui s’autosabotent.” À première vue, on dirait presque que c'est de toi qu'elle parle. Mais non, elle parle de mecs qui embauchent d'autres mecs pour saboter leur boîtes. Des mecs comme toi à l'entendre parler. Ça donne pas envie son truc. « C'est beau la confiance. » Franchement, elle ne donne pas particulièrement envie de placer son avenir entre ses mains si elle parle comme ça avec tout le monde. C'est qu'une foutue perte de temps tout ça. Tu sauras retrouver ta place bien mieux sans elle et ses conseils de merde. “ C’est mon boulot à moi de trouver des boites qui seraient prête à vouloir travailler avec toi. Vous.” qu'elle se reprend aussitôt comme si ça pouvait vraiment passer inaperçu. T'aurais même pas remarqué si elle n'aurait pas fait l'effort de se corriger. « J'crois que tu peux me tutoyer. On va arrêter de faire semblant que t'as le moindre respect pour moi. » Elle n'en a aucun. Elle n'en a sûrement aucun avec toutes les personnes enfermées ici. Sans doute qu'aucun le mérite de toute façon. Toi y compris.

“ Vous savez faire quoi? Architecte, c’est un projet ou vous déjà des compétences dans le domaine? De l'expérience ? “ Quelle idée à la con de lui avoir parler de ça. Tu tournes la tête de droite à gauche. Pas question qu'elle te retrouve un boulot là dedans. Surtout pas avec ces mecs qui s'auto-sabotent. Elles sont loins les heures de gloires londoniennes. « Oublie ça, j'vais pas retravailler là dedans. » Voilà qui répond à moitié à la question. Ouais, t'as de l'expérience. Est-ce que ça compte vraiment vu le nombre d'années où t'as pas exercer ? Y'a pas mal de chose que tu t'souviens, mais y'a aussi pas mal de notion de théorie que t'as déjà connu par coeur que tu as désormais tout oublié. Non, c'est mort pour ça. Juste parce que ça te ramène à Londres, pour aucune autre raison. « J'ai passé tous les p'tits boulots inimaginables. J'peux faire n'importe quoi. » Ou presque. Son défi à elle restera de trouver un endroit à Brisbane où t'as jamais taffer et qui acceptera donc de te prendre. Ce qui n'est quand même pas si facile que ça. Plus personne veut de toi. On s'demande pourquoi hen.

L’attitude nonchalante de Seth ne déstabilise pas la brune, elle a l’habitude et surtout, elle a vu bien pire. Elle maitrise son travail sur le bout des doigts. « C'est beau la confiance. » Yara fronce les sourcils, sans trop comprendre pourquoi il répondait ça, puis elle compris qu’elle n’avait pas été très clair ou du moins, que sa réponse laissait à interprétation. « Je parle de vous. » des autres, des anciens détenus qu’elle a connu. Y a toujours ceux qui ont la volonté de s’en sortir ou du moins, qui sont pas dans le déni comme Seth. Ceux qui croient réellement en une chance de pouvoir se réinsérer et que l’aide de quelqu’un comme Yara peut leur servir, puis y a ceux qui sont trop sûre d’eux, ceux là sont bien plus nombreux. Ceux qui pensent qu’ils n’ont besoin de l’aide de personne. Ceux qui pensent aussi que leur cas est tellement perdu qu’il n’y a rien à en tirer. Y a toujours du bon à tirer de tous, Yara en est persuadée. Ça demande surement plus de rigueur pour certains que d’autres, c’est en ça qu’elle parle d’auto-sabotage. Elle a une confiance totale envers les entrepreneurs qui eux même lui font confiance. Ils savent bien que ça peut être voué l’échec de travailler avec des détendus en réinsertion, mais ils savent aussi que ça peut en valoir la peine.
« J'crois que tu peux me tutoyer. On va arrêter de faire semblant que t'as le moindre respect pour moi. » ça ne mérite aucune réponse selon elle. Si elle avait dérapé une fois, elle se contrôlerait mieux la prochaine fois, Yara ne manque de respect à personne, bien au contraire. « J’suis pas là pour vous passer la pommade, Seth. » elle ne lui dira pas tout ce dont il a envie d’entendre, son boulot, c’est d’être juste. Et pour être juste, elle doit autant savoir quelles sont ses qualités que ses difficultés. « On va travailler ensemble, dans l’respect, ça passe aussi par vous dire ce que vous n’avez pas envie d’entendre. Mon but n’est pas de vous renvoyer droit dans l’mur. » Mais pour qu’il l’accepte, il faut aussi qu’il se prenne au jeu. Elle recentre la conversation en rebondissant sur ce projet dans l’architecture, ça semble être une belle opportunité à saisir. « Oublie ça, j'vais pas retravailler là dedans. » c’est donc qu’il avait déjà mis un pied dans le domaine, il avait forcément une expérience sur laquelle elle pouvait se reposer. « J'ai passé tous les p'tits boulots inimaginables. J'peux faire n'importe quoi. » « Pour subir un taf que vous avez pas envie de faire ? » y a rien de mieux, en auto-sabotage justement. C’est bien de ça qu’elle parlait. « Y a bien quelque chose qui vous attire plus qu’un autre. » il a pu avoir fait cent petits boulots, comme il dit, y a à prendre et à laisser. Là où elle se moque de savoir pourquoi ça fonctionne pas, ce qui l’intéresse, c’est de savoir là où ça a fonctionné. « Qu’est-ce qui vous a le plus plu, dans ces boulots ? Y a forcément un domaine qui vous attire plus qu’un autre et forcément des qualités qu’on remarque chez vous. Pourquoi plus l'architecture ? »

« Je parle de vous. » Bah voyons, elle devrait apprendre à se la fermer parfois. Cette version là de sa phrase n'est pas vraiment mieux que celle que tu supposais y'a trente secondes. « J'vais pas merder ok ? » Elle te connaît pas assez pour savoir à quel point tu es peu fiable au niveau des promesses - même si elle doit bien s'en douter. Des types comme toi - et même des pires que toi, elle en côtoie tous les jours. Elle sait comment ça fonctionne. Elle sait comment vous vous tirez toujours dans le pied, et ce, souvent, bien volontairement. Mais elle doit aussi connaître des pauvres types comme toi, les trouillards qui n'ont besoin que de se retrouver plus qu'une nuit derrière les barreaux pour comprendre le message. Tu fais partie de cette catégorie là. Ou du moins, ça fera un temps. Ça devrait suffir à te recadrer le temps de quelques mois, quelques années peut-être, jusqu'à ce que tu rechutes de nouveau. T'es pas assez con pour croire que la belle vie s'est faite pour toi. Foutu un jour, foutu toujours. « J’suis pas là pour vous passer la pommade, Seth. » T'as cru remarqué, ouais. Pourtant, un peu de gonflage d'égo, ça n'a jamais fait de mal à personne. Un peu de mensonge et de faux espoirs, c'est sans doute ce que chaque détenu recherche ici. « On va travailler ensemble, dans l’respect, ça passe aussi par vous dire ce que vous n’avez pas envie d’entendre. Mon but n’est pas de vous renvoyer droit dans l’mur. » Simplement par le regard que tu lui lances, elle pourra comprendre à quel point ça t'emmerde d'être en face d'elle, à quel point tu penses que tout ceci est une grosse perte de temps. Autant pour elle que pour toi. Elle a juste à te dire ce qu'elle veut que tu fasses en sortant d'ici, ce sera tout bénef' pour tout le monde. « Pour subir un taf que vous avez pas envie de faire ? » Tu lèves les yeux au ciel. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué hm ? « Y a bien quelque chose qui vous attire plus qu’un autre. » Si elle connait un boulot qui demande pas d'études et qui n'est pas trop chiant, franchement, qu'elle propose, parce que t'en connais aucun. « Et toi ? Qu'est-ce que tu ferais si t'étais pas assise là ? » Qu'est-ce qu'elle ferait comme taf si elle n'avait plus la chance de venir faire chier les détenus ? Qu'est-ce qu'elle ferait si elle ne pouvait plus bosser ce pourquoi elle a étudié ? Quel sous-métier de merde la rendrait encore heureuse ? Y'en a pas. « Qu’est-ce qui vous a le plus plu, dans ces boulots ? Y a forcément un domaine qui vous attire plus qu’un autre et forcément des qualités qu’on remarque chez vous. Pourquoi plus l'architecture ? » C'est un rire moqueur qui résonne dans son bureau. Des qualités ? Ouais, non, pas vraiment. « J'ai pas fait ça depuis des années, j'saurais pas recommencer. » Ça , c'est la version courte. Personne n'a envie d'embaucher quelqu'un qui n'a rien dessiné ou réfléchit depuis des années. Mais, bien sûr, qu'en y mettant un peu d'effort, tu serais sans doute capable de t'remettre à jour. « T'as envie d'un défi ? Essaie juste de trouver un endroit à Brisbane où je peux bosser et que je suis pas déjà dans la blacklist. » T'auras le choix de laver la vaisselle dans un resto insalubre ou de passer le balai dans un bureau à deux doigts de la faillite. Tu te lèves finalement de ta chaise pour aller cogner à la porte de sortie où t'attend le gardien qui te reconduira à ta cellule. Tu t'es assez fait chier ici pour aujourd'hui. Bien trop hâte à votre prochaine rencontre où elle pourra t'expliquer ce à quoi elle a réfléchi (non).