Elle a annulé. Elle est partie. Elle a planté son frère devant l’autel, avec un simple message qu’elle n’a même pas eu l’audace de personnaliser pour August mais, surtout, d’envoyer à tous les invités sans la moindre exception. Si le chien avait un téléphone, ce dernier aurait sûrement donné lui aussi. Ambrose peut comprendre que des sentiments aillent et viennent, surtout après autant d’années, mais il ne peut pas comprendre qu’on puisse mettre un terme à une telle relation d’une façon aussi brutale et malhonnête et tout le bien qu’il a pensé de Yara durant toutes ces années n’arrive pas à contrebalancer la ribambelle d’autres sentiments qui l’accablent. Le désir de justice (qu’il refuse d’appeler vengeance) est le seul aiguillon qui arrive encore à l’animer. Tous les autres ont tôt fait de rejeter toute la faute sur Yara et tenter de consoler August et lui n’arrive pas à rejoindre le courant de la foule. Il nage dans le mauvais sens, Ambrose, lui qui a usé de tous ses contacts et de toute son intuition pour enfin trouver l’amie chez laquelle Yara a trouvé refuge, quelques jours à peine après ce qu’il veut qualifier de drame. A August, il tentera de parler plus tard, si son aîné accepte de lâcher le moindre mot en sa présence. En somme, il n’y a rien de moins sûr.

De sa main retournée, ses phalanges cognent doucement contre la porte en bois alors que la nuit commence à tomber sur la ville, signe qu’il sort à peine d’une journée de travail - laquelle s’est terminée plus tôt que n’importe quelle autre, raison pour laquelle il a jugé l’heure encore raisonnable pour faire un détour par Fortitude Valley. Lorsque la silhouette de Yara est celle qui entrouvre la porte, il esquisse un soupir rassuré. “Je voulais te prévenir que j’allais passer, mais j’étais pas certain que tu m’aurais ouvert.” A dire vrai, il était plutôt certain de tout le contraire, raison de son silence et de son absence de prévention, ce qui ne lui ressemble pas. Se subtiliser à son propre mariage, ce n’est pas ce qui aurait dû ressembler à Yara non plus, si on va par là. “August me parle pas. J’espérais que ça serait pas ton cas aussi.” Il avoue dans une moue peinée, ne cherchant qu’à comprendre comment ils en sont arrivés là, sûrement avec l’espoir un peu fou d'avoir la solution à tous leurs problèmes et, surtout, la capacité de remettre sur les rails leur couple, leurs fiançailles, et la possibilité de simplement reporter leur mariage à une date ultérieure en disant à tous les invités que tout ceci n’était qu’une immense et très mauvaise blague. Personne n’y croirait mais au moins son frère aurait une seconde chance d’être heureux, peut-être.”Je veux juste aider, Ya.” Il n’est pas là pour tenir la moindre morale à qui que ce soit, il le jure.

@yara day

Ava n’avait pas cherché à comprendre, quand Yara est venue chez elle avec une simple valise, juste de quoi tenir quelques jours. Elle avait ouvert sa porte, non sans être un peu contrariée quand même et perdue quant à la cause de la venue de la jeune Day, mais elle n’avait pas été trop intrusive, elle n’avait pas -encore- posé milles questions pour tenter de démêler ce qu’il s’était passé. Pour elle, si Yara avait fui le jour de son mariage, c’était qu’il y avait forcément une réponse logique et peut être même trop dramatique derrière ça. Sans doute pourquoi elle avait fait preuve de pudeur et avait voulu respecter l’intimité de sa jeune amie. Yara était quelqu’un de raisonné et si elle avait décidé de mettre un terme à son mariage – même pas débuté – c’est qu’il y avait une raison logique à tout ça. Elle n’avait pas imaginé une seule seconde qu’elle avait pu le faire sur un coup de tête, et Yara faisait quant à elle, comme si de rien n’était. Comme si la vie suivait parfaitement son cours et qu’il n’y avait aucune explication à donner. Simplement parce qu’elle n’avait pas d’explication valable à fournir. Elle n’avait été victime d’aucune emprise de la part de son ex fiancé, celui-ci même si avait toujours été très respectueux envers elle, qui faisait preuve sans cesse de l’expression de ses sentiments, qui s’était montré enthousiaste et plus qu’emballer à l’idée d’officialiser leur amour devant témoins. Elle n’avait jamais subi aucune violence quelle qu’elle soit, psychologique, surement pas, physique, encore moins. Rien, jamais.
Après une journée de travail des plus normales, Yara était retournée là où elle avait récemment élu domicile. Métro, boulot, dodo, elle s’était promis que ce ne serait plus son schéma classique de vie à présent et pourtant, ce soir-là, elle était bel et bien à deux doigts d’aller s’enfermer dans sa chambre après avoir mangé son repas – qui l’attendait encore chaud dans la cuisine. Ava n’était pas encore rentrée, elle, et lorsque Yara entendit frapper à la porte, elle hésita une seconde à aller ouvrir. De son côté, elle n’attendait personne et elle n’avait aucune idée de si Ava avait elle, des invités à accueillir. Elle l’aurait sans doute prévenu mais dans le doute, Yara alla tout de même ouvrir la porte. Et alors qu’elle ne s’y attendait pas du tout, elle se décomposa quand Ambrose était derrière cette porte. Merde. “Je voulais te prévenir que j’allais passer, mais j’étais pas certain que tu m’aurais ouvert.” Elle aurait même finté ne pas être logée ici si elle avait su. La première question était de savoir comment il savait. Mais la seconde arriva aussitôt : comment allait-elle pouvoir mettre fin à cette entrevue le plus rapidement possible ? “August me parle pas. J’espérais que ça serait pas ton cas aussi.” Un pincement au cœur à l’idée que son propre frère ne lui adresse pas la parole. Il n’était pas du genre à être très expansif de manière générale, mais tout de même, elle s’imaginait Ô combien elle avait pu lui briser le cœur et Ô combien il pouvait être triste à présent. Tout comme en réalité, elle l’était elle-même. Elle restait aussi silencieuse, n’ayant aucune remarque qui lui venait à l’esprit pour savoir quoi rétorquer. ”Je veux juste aider, Ya.” Elle ne lâchait pourtant pas son regard, elle ne voulait pas le fuir, elle ne voulait pas échapper à ses responsabilités, elle savait bien que de toutes façons, elle devait bien plus qu’un simple sms pour donner des explications. « Je sais pas comment tu peux aider… » et c’est bien vrai, elle n’avait aucune idée de comment elle-même pouvoir se défaire de tout ça. « est-ce que tu veux entrer ? » elle avait balayé rapidement sa question numéro deux, après tout, il avait fait l’effort de venir à elle, l’ayant trouvé par on ne sait quel moyen. « Est-ce que tu es venu seul ? » ou est-ce que c’est un traquenard où August apparaitra en sortant de la cage d’escalier dans une seconde ? Surement pas, elle savait qu’August ne serait jamais venu avec son frère pour la confronter.
Elle se poussa, laissant un passage derrière elle pour laisser Ambrose entrer dans l’appartement. « J’ai pas essayé de l’appeler… je sais que j’suis à côté d’mes pompes, le truc, c’est que j’ai aucune idée de comment pour rattraper tout ça. » et quand elle parle de rattraper tout ça, elle n’entend pas par là de chercher à se faire pardonner et de pouvoir retourner chez elle et de reprendre sa vie aux côtés d’August. « Je regrette pas, si c’est ce que tu te demandes. » aussi dur que cela puisse paraitre, non, elle ne regrettait pas son choix. « mais je sais que c’est allé bien trop loin. »

« Je sais pas comment tu peux aider… » Il ne sait pas non plus, à vrai dire, lui qui n’a jamais été doué pour l’aspect sentimental de toutes choses, mais il espère qu’à deux ils pourront arriver à trouver une solution, quelle qu’elle soit. Yara reste de sa famille, ce n’est à ses yeux qu’un acte manqué. Il ne veut pas croire qu’après avoir passé des années auprès de quelqu’un, des sentiments peuvent simplement disparaître. « Est-ce que tu veux entrer ? » Il hoche la tête, enfant aussi sage que silencieux. Ce n’est pas une discussion vouée à être entretenue sur un palier, c’est au moins une chose certaine. Cela ne regarde que leur famille, qu’eux deux, et certainement aucune oreille indiscrète. « Est-ce que tu es venu seul ? » - “Oui, bien sûr.” Il souffle avec une certaine empathie, tentant ainsi de faire de son mieux pour la rassurer, au moins à son niveau. Non, ce n’est pas un plan formenté avec August, voilà surtout ce qu’il lui dit entre les lignes, alors qu’il n’a aucun mal à comprendre le fond de sa pensée et surtout de ses doutes. Il aurait aimé que ses mots soient un mensonge, tout comme il aurait aimé pouvoir dire qu’il a parlé à son frère, mais ce serait un tissu de mensonges.

A la seconde où Yara le laisse passer, il s’engouffre dans l’appartement, trop soucieux de ne pas lui laisser le temps de revenir sur son idée. Cette discussion n’est pas vouée à s’éterniser, sans doute, mais il veut tout de même l’avoir avec elle: cela lui semble important. « J’ai pas essayé de l’appeler… je sais que j’suis à côté d’mes pompes, le truc, c’est que j’ai aucune idée de comment pour rattraper tout ça. » Aucune réponse délicate ne lui vient à l’esprit de façon naturelle, alors il se contente de souffler tout bas, sans pour autant se permettre de juger sa belle sœur. Elle a l’air sincère dans ses propos autant que dans son attitude, alors il ne cherche pas à enfoncer le couteau dans la plaie. « Je regrette pas, si c’est ce que tu te demandes. » - “Non, à vrai dire j’aurais pu m’en passer.” Son rire sonne faux, et cela n’a rien d’une maladresse de sa part: il ne veut pas savoir qu’elle ne regrette pas d’avoir abandonné son frère le jour de leur mariage. Cela n’aide en rien sa cause, et il ne veut pas la descendre. « Mais je sais que c’est allé bien trop loin. » Alors, sur ce sujet au moins, ils tombent d’accord aisément.

“Je suis peut-être pas bien vieux, mais je peux comprendre que les sentiments naissent et meurent.” Et aujourd’hui, elle se doute bien qu’il parle du sentiment amoureux et tout particulièrement de celui qu’elle ressentait envers son frère, depuis plusieurs années déjà. "Ça se passait mal avec lui ? Ou il s’est passé quelque chose en particulier ? Parce que c’est ça, justement, que je comprends. De savoir pourquoi est-ce que t’as attendu le dernier moment pour tout abandonner.” Ils étaient l’un des rares couples sérieux de son entourage, peut-être même les seuls à vrai dire, et Ambrose mentirait s’il disait ne pas les avoir érigés à un certain rang de modèles. A ce niveau là, et de façon extrêmement rare, August a détrôné James aux yeux du plus jeune: seul le mariage d’un des deux étaient uniquement composé d’amour, et d’aucune machination politique derrière. Ils étaient son seul modèle, et à nouveau il se retrouve un peu plus perdu dans cette jungle incompréhensible. “Je viens pas défendre August. Je cherche juste à avoir toutes les pièces du puzzle.” Chose pourtant simple qu’on ne cesse de lui refuser, lui qui sera éternellement vu comme un enfant, le petit dernier et orphelin à protéger. Avec Yara au moins, les choses étaient différentes, et il espère qu’elles le resteront. Belle soeur ou non, il ne veut pas la perdre. Sa famille a déjà bien assez été décimée.

Ambrose fait place dans l’appartement d’Ava – Yara ne manquerait pas de lui demander comment il savait qu’elle se trouvait là d’ailleurs. Mais en réalité, c’était sans doute l’endroit le plus logique où elle aurait pu trouver refuge en quittant le nid qu’elle partageait avec Angust. Ava était sa meilleure amie et si elle n’était pas de la famille, elle avait une place importante auprès de Yara. Yara avait déjà indiqué où se situait son logement à Ambrose, alors tout semblait être logique. C’était sans doute le premier endroit auquel il avait pensé et il était venu au culot. Bingo. Enfin, peut-être s’était-il déjà essuyé à quelques échecs en allant frapper à d’autres portes.
Mal à l’aise, la brune se sentie obligée de se défendre aussitôt avant qu’il n’ai envie de poser trop de question, elle préférait baliser le terrain et aller là où elle le choisirait mais elle avait décidé d’être franche et honnête. Cristina lui avait soufflé être lâche, elle en pensait tout le contraire. “Non, à vrai dire j’aurais pu m’en passer.” Son rire échappé lui glace le sang, elle sait bien qu’il n’est pas joyeux, ce rire, qu’il n’a rien de bien heureux. Elle ne regrette pas, elle n’en est pour autant pas plus heureuse à son tour non plus.

“Je suis peut-être pas bien vieux, mais je peux comprendre que les sentiments naissent et meurent.” Elle n’était même pas sûre que ses sentiments soient morts, pour reprendre son expression. Elle n’était pas sûre qu’il s’agisse uniquement de sentiments. "Ça se passait mal avec lui ? Ou il s’est passé quelque chose en particulier ? Parce que c’est ça, justement, que je comprends. De savoir pourquoi est-ce que t’as attendu le dernier moment pour tout abandonner.” Elle secouait la tête négativement à mesure qu’il posait ses questions. Des questions qu’elle n’avait pas envie d’entendre, parce qu’elle n’avait en réalité rien à reprocher à August. « Ca aurait été bien plus simple hm ? » bien plus simple à comprendre que de simplement avoir l’envie de retrouver une liberté qu’elle avait le sentiment de n’avoir jamais connu. “Je viens pas défendre August. Je cherche juste à avoir toutes les pièces du puzzle.”  Le problème, c’est que même Yara semblait avoir perdu certaines pièces du puzzle en question. « J’avais besoin d’air. » ca semble léger comme justification non ? « August me manque. » sans doute pas comme il est censé lui manquer dans l’esprit d’un couple. « Il m’en voudra toujours de l’avoir humilié comme ça. Où est-ce qu'il est ? » fit-elle en redressant la tête, Ambrose avait dit qu'il ne parlait pas, elle s'en doutait bien. Elle le connaissait mieux que quiconque et elle sait à quel point, l’avoir abandonné comme ça pouvait être fatal pour lui et pour autant, elle savait que c’était la meilleure chose à faire. Mais pour qui ? « Je sais que j'ai le mauvais rôle, que j'ai pas le droit d'me plaindre, mais faut me croire quand je dis que c'est pas simple pour moi non plus. J'aime beaucoup August... c'est juste que ça a changé... »

A défaut que Yara semble vouloir lui expliquer la situation par elle-même, Ambrose tente de lui poser des questions ciblées qui, peut-être, pourraient l’aider à obtenir des réponses et, avec elles, un semblant de vérité. « Ça aurait été bien plus simple hm ? » Ce n’aurait pas été plus doux à entendre, et sûrement pas à vivre pour son frère, mais oui: tout aurait été bien plus simple s’il y avait une raison derrière cette fuite. Une dispute, des sentiments qui s’évanouissent, des envies différentes sur leur futur. N’importe quoi, à vrai dire. La moindre petite chose qui ressemblerait à une étincelle aurait pu suffire pour qu’Ambrose comprenne la situation, à défaut de pouvoir l’accepter. Malheureusement, elle ne semble pas vouloir lui proposer quoi que ce soit dans le genre, même alors qu’il souligne ne pas venir jusqu’à elle en vue d’une quelconque croisade.

« J’avais besoin d’air. » Il ouvre la bouche sans savoir quoi dire, se contentant d’être quelque peu outré par ses paroles. « August me manque. » Et avec celles-ci, il finit de l’être, si jamais il subsistait encore le moindre doute à ce propos. “Tu peux pas sérieusement me dire ça, Yara.” C’est elle qui a choisi de tout briser, autant leur couple que son frère, et la voilà qui est déjà capable de dire que tout lui manque, quelques maigres semaines après le carnage ? Aux yeux d’Ambrose, c’est un acte de lâcheté. Elle n’a pas le droit de lui dire tout ça, pas à lui. Si elle doit avoir cette conversation, c’est avec August lui-même, parce que jamais Ambrose n’acceptera d’être le porteur de telles paroles - si jamais son aîné voulait déjà lui parler. « Il m’en voudra toujours de l’avoir humilié comme ça. Où est-ce qu'il est ? » - “A peu près au trente-sixième dessous.” A peu près. Ambrose lui répond avec froideur, ses yeux naturellement sombres posés dans ceux de son interlocutrice. Il a toutes les bonnes intentions du monde, mais il ne peut pas accepter qu’on se moque de près ou de loin de sa famille, et surtout pas de sa fratrie. Ce n’est pas parce qu’il est le petit dernier qu’il ne peut pas les protéger. “J’en sais rien où il est, il ne parle à personne.” Oh, il parle à Flora, ou tout du moins il donne un signe de vie de temps en temps, mais cela ne regarde pas Yara. Elle pourrait le savoir, si elle s’était intéressée au sujet un peu plus tôt, chose qu’elle n’a de toute évidence pas fait. Aujourd’hui, elle va donc devoir se débrouiller seule, parce qu’Ambrose refuse de lui mâcher le travail. Si elle l’aime vraiment, elle doit le prouver.

« Je sais que j'ai le mauvais rôle, que j'ai pas le droit d'me plaindre, mais faut me croire quand je dis que c'est pas simple pour moi non plus. J'aime beaucoup August... c'est juste que ça a changé... »
“Tu veux donner une chance à votre couple ? Ou tu veux juste disparaître, toi aussi ?”

Et dans cette question, il retire toute sorte de jugement, sûrement même plus enclin à accepter l’idée qu’elle veuille disparaître plutôt que celle où elle fait des pieds et des mains pour regagner la confiance d’August, à défaut de ne sûrement jamais avoir perdu son amour. Et tout ce que Ambrose espère, c’est que jamais il ne ressemblera à son aîné sur ce point.

“Tu peux pas sérieusement me dire ça, Yara.” c’est pourtant ce qu’il était venu chercher en arrivant chez elle, de la sincérité non? Des réponses ? Que pouvait-elle lui dire autrement? August lui manquait pour de vrai, au quotidien. Elle avait partagé chaque jour de sa vie avec lui au cours des six dernières années, était-ce si difficile à comprendre que même si, elle ne voulait plus de cette relation avec lui, la personne qu’il est peut lui manquer? En lui livrant ces paroles, elle n’attendait rien d’Ambrose. “Qu’est-ce que tu veux que j’te dise alors, que j’le déteste?" fit-elle en masquant son souffle. Elle n’était ni agressive, plutôt dans une passivité assez déconcertante la connaissant. Yara qui avait l’habitude de toujours tout gérer, sans laisser place à l’improvisation, cette fois, elle était dans des eaux troubles avec une visibilité si sombre qu’elle en était terrorisée. Elle n’avait aucune idée de ce qui pouvait l’attendre. Mais c’était comme salvateur pour elle, elle avait cette sensation que finalement, dans son mal, ça lui faisait aussi du bien. Sensation étrange qu’elle expliquait difficilement. Le lâcher prise était nouveau pour elle.
“A peu près au trente-sixième dessous.” et pour autant, aussi égoïste avait-elle pu être, les dommages causés sur Angust la touchait, elle n’avait pas envie de le blesser, la manœuvre était forcément vouée à l’échec, mais c’était un passage obligatoire pour son bien être à elle. Le regard que posait Ambrose sur la brune la rendait ma à l’aise. Elle croisait ses bras sous sa poitrine et glissait ses mains sur ses avant bras, comme pour se créer une barrière protectrice. “J’en sais rien où il est, il ne parle à personne.” elle savait à quel point August pouvait craindre l’abandon, à quel point il pouvait se renfermer sur lui même, à quel point se retirer du monde pouvait lui être simple pour le moindre prétexte, alors quand il s’agit d’être abandonné par la femme dont il avait l’entière confiance. Sa réaction était forcément à hauteur de la trahison. Elle se pinça les lèvres, se mordillait l'intérieur des joues, sentait sa gorge qui picotait. Aussi bien qu’elle le pouvait, elle tentait encore de se défendre. “Tu veux donner une chance à votre couple ? Ou tu veux juste disparaître, toi aussi ?” elle baissa les yeux, fixant les chaussures de son (ex?) beau frère, elle resta silencieuse un court instant avant de relever les yeux. “ Je sais que c’est fini.” ça avait le mérite d’être clair. Elle en était persuadée aujourd’hui, convaincue même au plus profond de ses tripes. “ Cette vie là, c’est plus celle que je veux à présent.” la maison, l’enfant, le chien, la famille, le couple, les repas à deux, à trois ou à quatre, les rituels qui viennent et reviennent, toujours la même chose, le quotidien, les routines. Non. “ Tout le monde fini par se remettre d’une rupture.” fit-elle, comme pour se rassurer dans un sens. Elle s’en remettra elle aussi, du manque, du deuil de cette relation, August s’en remettra, du manque, du deuil de cette relation. “ Est-ce que t'es venu pour me convaincre que j'ai pris la pire des décisions et que c'est avec August que je suis censée être ? ”

“Qu’est-ce que tu veux que j’te dise alors, que j’le déteste?" Il ouvre la bouche uniquement pour mieux la refermer, n’ayant de toute évidence pas anticipé ce que Yara aurait pu lui dire pour apaiser son cœur. Il veut que son frère soit aimé, tout comme il voudrait que les choses soient plus simples pour lui, ce qui aurait été le cas avec une cassure nette de leur relation. Alors il ne sait pas, il n’y connaît rien en relations amoureuses et ils étaient ce qui se rapprochait le plus de la stabilité, le couple formé par James et Cristina n’ayant pas grand chose de véritable à ses yeux. “Non, je veux pas que tu me mentes.” Elle ne le déteste de toute évidence pas, alors autant ne pas s’embourber dans des mensonges inutiles. La situation est déjà bien assez délicate en l’état. “Je sais que c’est fini.” Elle est la seule à le savoir, et elle n’a apparemment pas jugé bon d’en informer les autres, et Ambrose redoute déjà qu’August lui-même ait été tenu éloigné de cette confession qui fait mal. Il serre les dents et encaisse comme il peut, une colère pourtant grandissante en son sein. Ce n’est pas à lui qu’elle devrait tenir un tel discours, et pourtant il a déjà dû faire énormément d’efforts pour qu’elle daigne lui adresser la parole. “Tu comptes même pas lui expliquer ton point de vue ? Ou quoi que ce soit, en fait ?” Tout ce qu’il veut, c’est que son frère ait tout de même le droit à des explications, à un petit quelque chose qui rendrait l’annonce un peu moins terrible, à défaut d’avoir quoi que ce soit de facile à avaler.  Il ne se battra pas pour faire perdurer leur couple, ce n’est pas son rôle et il peut comprendre que les choses puissent avoir changées depuis les six années écoulées, mais Ambrose tient au moins à établir un dialogue, lequel serait à ses yeux un semblant d’une justice bienvenue.

“Cette vie là, c’est plus celle que je veux à présent.” - “Tu veux quoi, maintenant ?” Il demande avec un intérêt non feint, une curiosité qui n’a rien de déplacée, et une envie de faire au mieux pour elle et non seulement pour son frère. Il veut leur bonheur, à tous les deux, et ce même si cela signifie peut-être qu’ils ne le vivront pas ensemble. Les couples se font et se défont, il le sait et n’est pas né de la dernière pluie. “Tout le monde finit par se remettre d’une rupture.” Mais déjà, les paroles de Yara le font à nouveau grincer des dents, parce qu’elle utilise des raccourcis qui ne devraient pas avoir lieu d’être. “C’est pas juste une rupture, c’est un abandon devant l’autel et une disparition de sa fiancée, ça.” Elle n’a pas le droit de faire comme si ces épisodes n’avaient jamais existé, uniquement parce que cela ne l’arrange pas. Elle n’a pas le droit de faire comme si de rien n’était, comme si elle n’était pas la seule méchante de toute cette histoire, celle qui fait s’effondrer par la base leur tour de Babel à eux. ”Est-ce que t'es venu pour me convaincre que j'ai pris la pire des décisions et que c'est avec August que je suis censée être ?” Sa tête se balance de droite à gauche, tristement. Il n’est pas venu jusqu’ici dans le but de les remettre ensemble, déjà certain que ce serait une opération bien vaine. Ses sentiments ne sont peut-être pas totalement envolés, mais il a l’impression qu’ils ne sont plus les mêmes. Plus des sentiments amoureux, du moins. “C’est l’impression que t’as ? J’en sais rien Yara, j’essaie juste d’obtenir des réponses et vous êtes tous butés.” Elle est sa famille, elle aussi. Elle l’a été pendant six ans, il la connaît depuis l’adolescence et il a grandi avec elle, alors bien sûr que son bonheur lui importe et bien sûr que l’idée qu’August ne lui suffise plus a tout pour le rendre ô combien triste. Pour autant, il sait qu’il n’y peut rien, tout comme il sait qu’elle sera la seule à avoir le dernier mot et qu’elle aura toujours le pouvoir de l’ignorer. “Je te dis juste de lui parler. Même si tu campes sur tes positions. Surtout si tu campes sur tes positions.” Il s’est fait larguer, c’est évident, mais il a tout de même le droit à être considéré, malgré tout.

“Non, je veux pas que tu me mentes.” Et de toute façon, on peut coller bien des défauts sur le dos de Yara, mais la manipulation et le mensonge n’en font pas partie. La maladresse sans doute et depuis quelques temps, l’égoïsme ou plutôt le manque de courage pouvaient rejoindre la liste, mais surtout pas le mensonge. Ou alors, la seule personne qui pouvait avoir été victime de ses propres mensonges, c’était bien elle, à ses dépens. « Tu comptes même pas lui expliquer ton point de vue ? Ou quoi que ce soit, en fait ?” Elle sentait sa poitrine se serrer à mesure qu’il était sur elle, elle avait l’impression de ressentir cette même sensation qu’elle avait ressentie le jour de son mariage, le matin lorsqu’elle s’était levée et qui ne l’avait plus quitté jusqu’à ce qu’elle décide à envoyer ce sms. Yara se mutait dans un silence, avec un sentiment injuste d’avoir à rendre des comptes à des personnes dont elle ne devait finalement pas grand-chose. Ce dont elle n’avait pas vraiment eu conscience, c’est qu’en quittant August, elle quittait aussi sa famille et elle avait l’impression d’avoir plusieurs ruptures à gérer alors que la principale lui semblait déjà insurmontable. Ce qu’elle savait, c’est qu’elle avait besoin de tourner la page. “Tu veux quoi, maintenant ?” qu’on lui foute la paix ? Que chacun s’occupe de ce qui le regarde ? Après tout, s’il y en avait un qui était en droit de lui demander des comptes, c’était August, et uniquement lui, ce qu’il n’avait pas chercher à faire jusqu’à présent. « Je suppose qu’August est suffisamment adulte pour avoir les réponses à ses questions, s’il le souhaite. » c’était sans doute une manière contournée de ne pas répondre à sa question et de la renvoyer à son envoyeur.
“C’est pas juste une rupture, c’est un abandon devant l’autel et une disparition de sa fiancée, ça.” Et il avait raison. L’abandon et la disparition, elle en était la seule fautive. « J’ai besoin de temps. » qu’elle finit par admettre sans être capable de dire combien de temps réellement ça lui prendrait pour se sentir prête. « Je sais que c’est lâche. » qu’elle anticipe, parce qu’elle savait très bien ce qu’il pensait.
“C’est l’impression que t’as ? J’en sais rien Yara, j’essaie juste d’obtenir des réponses et vous êtes tous butés.” C’était pas une question d’être butée, selon elle. « C’est plus compliqué que ça. » à assumer, à admettre, à affronter. “Je te dis juste de lui parler. Même si tu campes sur tes positions. Surtout si tu campes sur tes positions.” Elle hocha la tête. « J’le ferai. » la question était toujours de savoir quand. « J’suis désolée, Ava va rentrer et on reste pas. » elle l’invitait sagement à s’en aller, sans le mettre directement à la porte, mais elle n’avait pas l’envie d’aller plus loin dans cette conversation. « Ton frère est plus fort que c’que tu peux penser. » ou alors, elle surestimait sans doute sa capacité à subir cet abandon de plus. C’était surtout sa façon de se rassurer et de peut être un peu moins culpabiliser.