| hear this complicated heart of mine (craker #26) |
| | (#)Dim 03 Juil 2022, 14:24 | |
| Le vent qui n’avait eu de cesse de souffler durant trois jours s’est complètement atténué dans la nuit laissant l’Océan étrangement calme pour la première fois depuis mon arrivée. Les vagues d’ordinaire puissantes se sont transformé en des rouleaux paresseux qui ont découragé la plupart des surfeurs du coin, laissant la plage étrangement vide et calme. Au cours de ma session, j’ai été rejoint par une bande de jeunes un peu fébrile sur leurs planches, mais trop impatient de tester leurs capacités sur la houle. Après avoir frôlé l’accident avec l’un d’entre eux qui se pensait seul dans la baie, j’ai fini par m’approcher pour leur donner quelques astuces. Ils ont fini par m’appeler Monsieur tout du long, à me remercier d’un rien, tout en s’extasiant sur leur progrès au fil des minutes qui s’écoulait. J’aurai pu m’offusquer de leur politesse, me lasser de répéter dix fois la même chose au point de finir complètement immerger dans l’eau pour tenir une planche à bout de bras et donner un coup de main au plus débutant d’entre eux. Avant, je n’aurais jamais eu la patience. Mais ce matin tout ce que je retiens, la seule chose qui semble faire sens au milieu de tout cela, c’est que dans quelques années, je l’espère, je pourrais faire tout cela avec mon fils. L’amener avec moi au large, le faire tenir sur ma planche et l’entendre se régaler de pouvoir glisser ainsi sur la surface de l’eau. Jamais cette pensée ne vient se teinter d’une quelconque inquiétude ou d’une peur insondable comme cela a pu être le cas par le passé. Alors lorsque je finis par rejoindre la terre ferme, je n’attends pas plus longtemps pour mettre la main sur mon téléphone et ouvrir une conversation en particulier. « Rejoins-moi avec Gabriel. » Je n’hésite pas à envoyer ces quelques mots, la réalisation me frappe telle une évidence après des jours passer à tout remettre en question seul dans cette maison de bord de plage. À tourner le problème dans tous les sens, il ne m’en est venu qu’une seule conclusion, la plus simple de toute : ils me manquent.
Faire le choix de partir, de m’éloigner, c’était imposer avec évidence. Je me devais de prendre quelques pas de recul, il me fallait faire le point avec moi-même avant de promettre quoi que ce soit à Rosalie. Si j’ai passé les premières vingt-quatre heures à prendre cela comme un jeu où je me devais de prétendre n’être qu’en vacances pour toutes les raisons du monde sauf celle de faire le tri dans mes traumatismes, j’ai fini par sortir la tête du sable. D’abord en prenant le temps de tirer un trait sur bien des éléments du passé. J’ai hurlé de toutes mes forces sur une plage baignée par la lumière de la lune avant de trouver le courage de coucher sur le papier tout ce que je n’ai jamais su reprocher de vive voix à ma sœur. Ariane recevra, ou non, une lettre de ma part mettant fin à des années d’actions pardonnées en un claquement de doigts. Jamais je ne lui fermerais complètement ma porte, mais désormais, elle saura que rien ne sera, plus jamais, aussi simple, qu’elle ne pourra plus aller et venir comme bon lui semble quand elle a su tout ruiner ces derniers mois. J’ai continué à écrire après. C’est comme si la porte donnant accès à la boîte de Pandore avait, enfin, finie par céder. J’ai écrit à mon frère, sans jamais rien lui reprocher, si ce n’est m’excuser pour toute la relation que l’on n’a jamais su construire. J’ai écrit à ma mère, pour lui dire tout ce que je n’ai jamais su formuler à ses côtés, la reconnaissance que j’ai de l’avoir toujours vu se battre pour nous et toute la haine que j’ai silencieusement emmagasiné au fil des années pour nous avoir imposé un père comme le nôtre, pour avoir si longtemps tenter de le garder à ses côtés au travers d’un nouveau bébé, puis un second. Je n’ai pas eu besoin d’écrire à Leo, elle est venue jusqu’à moi avec ses propres angoisses et toute sa gratitude enfouie dans des remarques cinglantes. Jour après jour, je me suis déchargé d’un poids puis d’un autre. J’ai arraché des pages à force de ne jamais trouver les bons mots, j’ai encastré mon poing dans l’écorce d’un arbre quand la colère cumulée a fini par devenir ingérable, j’ai fumé trois paquets de cigarettes à une vitesse qui flirt avec le danger et chaque matin, j’ai pris l’habitude d’aller surfer. Retrouver le goût à tout laisser s’échapper dans l’écume des vagues, à se vider la tête en glissant entre les rouleaux tout en dépensant ma frustration d’un sport plutôt que dans le désir de faire foirer tout ce qui m’entoure. Et au milieu de tout cela, il y avait Rosalie. Celle que j’ai laissée sans nouvelles durant plusieurs heures, avant de l’appeler pour lui rappeler ma promesse avant de m’en aller. Puis je l’ai appelé une fois encore, dans le prétexte de vouloir entendre Gabriel, pour mieux raccrocher près de trois heures après. Tout a changé après cela. Il aura fallu une dispute de trop et quelques centaines de kilomètres entre nous pour que se réveille une complicité qui s’était éteinte avec le temps. Soudainement, plus aucun sujet ne semblaient être tabou et comme deux adolescents vivant une relation à longue distance, on a commencé à passer nos soirées au téléphone. Il m’a fallu plusieurs jours avant de lui faire part de ce que j’avais pu écrire, avant de poser des mots sur certaines choses. Puis Gabriel a fini par retourner tout mon monde dès l’instant où il a prononcé ses premiers mots dans le combiné du téléphone : dada. Tout s’est vu être remis en perspective, j’ai passé la nuit à fixer le plafond dans un monologue intérieur mettant face à face mes angoisses contre mes espoirs au point d’en frôler la crise de panique. Mais un seul élément n’a eu de cesse de revenir en boucle : je souhaite pouvoir construire cette famille avec Rosalie, sans plus me laisser bouffer par mon passé, qu’importe le temps que cela prendra pour que l’on vise juste.
Elle a accepté en cinq minutes, et après quelques échanges de messages pour savoir ce qu’elle devait emmener et ce que je pouvais éventuellement emprunter à la voisine pour Gabriel, il ne me restait plus qu’à attendre. Je suis allé me chercher un café en ville, j’ai fait un tour au supermarché pour remplir le frigo et faire le plein de couches. J’ai écrit un peu en sautant le déjeuner, changer les draps du lit, récurer la cuisine et les heures ne passaient toujours pas assez vite. À défaut de m’asseoir sur les marches de l’entrée, je décide de retourner à la plage pour faire passer le temps en surfant quelques vagues.
Combinaison roulée sur les hanches, le soleil de fin d’après-midi viens réchauffer mon torse nu et mordu par le sel qui laisse apparaître une centaine de petites taches blanches sur ma peau plus pâle qu’à l’ordinaire. Avec ma planche sous le bras, je prends le chemin qui mène jusqu’à la maison dont j’ai allongé la réservation. Et alors que j’étais en train de déposer la planche dans le petit garage, une voiture s’arrête dans l’allée. Alors que je m’approche, j’aperçois le petit corps de Gabriel, profondément endormi dans son siège, la tête penchée sur le côté et la bouche entrouverte au point de presque laisser échapper sa sucette. Un sourire se dessine sur mes lèvres tandis que je fais le tour du véhicule pour retrouver Rosalie. « Hey. » Je crois que je n’ai jamais été aussi heureux de la voir, aussi soulagé d’apercevoir son visage et le timide sourire qui viens tirer ses traits. Tout semble faire sens dès l’instant où mon regard se pose sur elle et que mon estomac se contracte sous l’émotion. Lentement, je viens poser ma main sur sa joue, mon pouce caressant légèrement sa peau tandis que mon corps se rapproche du sien. Ses prunelles semblent si hésitantes, comme si elle se balançait sur un fil, incapable de savoir vers quel côté penché. Je prends la décision pour elle dès l’instant où mes lèvres viennent trouver les siennes dans un baiser qui n’a rien de fiévreux, qui ne cherche aucunement le contrôle. Juste un doux baiser qui viendra en prélude de tout le reste. Je suis celui qui recule en premier, venant coller mon front au sien. « Tu m’as manqué. » que je murmure avant de complètement fermer la distance, embrassant son corps dans une étreinte solide tandis que mon visage vient s’enfouir dans le creux de sa nuque.
@rosalie craine |
| | | | (#)Dim 03 Juil 2022, 23:08 | |
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ROSALIE CRAINE & @WYATT PARKER ☽ Say you love me to my face. I need it more than your embrace. Just say you want me, that's all it takes. Heart's getting torn from your mistakes. 'Cause I don't wanna fall in love. If you don't wanna try. But all that I've been thinking of is maybe that you might. And babe, it looks as though we're running out of words to say. And love's floating away. Won't you stay. Slowly, slowly you unfold me. But do you know me at all? Someone told me love controls everything but only if you know. gifs(c)harley Ton regard s’attarde longuement sur le visage de ton fils alors que tu t’assures pour la troisième fois déjà qu’il est bien attaché dans sa coquille. C’est qu’il te semble terriblement grand soudainement dans le siège, lui qui avait l’air si fragile et si petit la première fois que vous l’avez installé Wyatt et toi, à votre sortie de l’hôpital. Il te regarde, grand sourire aux lèvres le petit bonhomme de sept mois désormais, celui qui babille constamment et qui aime vous faire des misères jour et nuit. Celui qui affirme de plus en plus sa forte personnalité au travers d’une impatience qui se traduit dès qu’il doit attendre un peu trop longtemps pour son prochain boire ou son prochain repas. Tu t’émerveilles toujours un peu plus de découvrir ses goûts, ses préférences, lui qui ne se gêne pas pour vous faire comprendre qu’il préfère largement qu’on le tienne debout et non assis, lui qui est déjà si près de se promener à quatre pattes alors que tu voudrais tant qu’il ralentisse un peu, ton petit pressé. Lui qui ne cesse de répéter le doux son de dada depuis hier soir, son qui te serre le cœur à chaque entente. Son qu’il répète une fois encore alors que tu sors de ta torpeur, son petit rire ne manquant pas de te faire fondre exactement comme la première fois que tu l’as entendu. « Oui mon amour, on s’en va voir papa. » Et comme s’il comprenait ce que tu étais en train de lui dire, comme s’il savait exactement ce qui allait se passer ensuite, il s’émerveille un petit peu plus le petit bonhomme et c’est le cœur un peu plus léger que tu refermes la portière avant de venir te glisser derrière le volant, prête à prendre le chemin indiqué sur ton GPS, celui qui te mènerait à Byron Bay, celui qui te mènerait enfin jusqu’à Wyatt.
Tes doigts pianotent nerveusement sur le volant alors que la route file sous tes yeux. Si tu avais été chamboulé par le départ soudain de Wyatt, par son besoin de prendre de l’espace et un peu de temps loin de vous, loin de toi surtout, tu avais rapidement compris que cette décision ne bénéficierait pas que le Parker. Tu avais encore ton propre lot de bagages non-résolus, encore tes propres problèmes à régler, tes propres démons à affronter, et si tu n’avais pas nécessairement l’impression d’être aller au bout des choses, tu savais que tu avais fait du chemin dans ce que tu espérais vraiment être la bonne direction. Tu avais pris le temps d’aller voir ta mère, et même si votre rencontre t’avait laissé un certain goût amer, tu savais que tu avais besoin de briser cette barrière tenue trop longtemps pour pouvoir enfin venir à terme avec toutes tes décisions prises dans la dernière année. De l’annulation de tes fiançailles, de cette grossesse que tu avais décidé de poursuivre malgré les protestations vocales et violentes de ta famille, de cette vie que tu te bâtissais peu à peu avec cette nouvelle famille, celle que tu avais choisi, celle qui s’était créée dans le chaos, mais qui semblait pourtant faire du sens. Et même si tu ne doutais pas le moins du monde ce que tu voulais, même si tu savais que tu ne voulais rien de plus qu’avancer auprès de Wyatt et de Gabriel, que votre famille était ce qu’il y avait de plus précieux à tes yeux, tu savais aussi que tu n’avais pas le choix de faire le ménage dans ton esprit. Que tu devais enfin entamer le travail, le vrai, pour venir à terme avec ce qui s’était passé, le jour où Gabriel était venu au monde. Qu’il fallait que tu te débarrasses de cette culpabilité que tu continuais de porter partout où tu allais. Qu’il fallait que tu lâches prise une bonne fois pour toute, que tu acceptes enfin qu’il y aurait des parts de ta vie et de celle de ton fils qui seraient éternellement en dehors de ton contrôle. Tout ça, tu n’avais jamais été la plus douée pour le verbaliser. Jamais la meilleure pour dire exactement comment tu te sentais, te refermant sur toi-même d’une manière que Wyatt n’avait jamais vu par le passé. Et s’il t’aurait sans doute été impossible de lui dire tout ça en face à face, sans que les mots ne te manquent, ou que tu ne t’enfarges constamment dans tes pensées, il avait été bien plus simple de laisser les mots filés au bout du fil, quand son visage n'existait que dans une image dansant contre tes paupières, que sa voix était la seule chose qui te rattachait encore à lui. Les messages textes sont devenus des appels et les minutes elles se sont transformées en heures et voilà que tu redécouvrais une version de Wyatt que tu croyais avoir perdu à tout jamais, une qui te donnait envie de croire que tout ça, cette distance imposée, ce temps de pause pouvait vous apporter exactement ce dont vous aviez besoin, mais peut-être aussi exactement ce que tu souhaitais.
Même si tu avais envie d’y croire, même si tu te sentais présentement plus proche de Wyatt que tu ne l’avais fait depuis longtemps, il y avait ce doute qui subsistait dans ton esprit, celui qui te rappelait constamment tout ce qui n’avait jamais fonctionné entre vous, toutes les erreurs que vous aviez faites, tous les coups bas qui avaient longtemps rythmés votre relation. Il y avait cette petite voix qui te disait encore et encore que tu ne pouvais pas être certaine de ce qui allait se passer, malgré l’invitation d’aller le rejoindre, malgré ce message qui disait en toute lettre que tu lui avais manqué. Tu as le cœur qui tambourine avec force contre ta poitrine alors que tu vois la distance descendre au point de pratiquement disparaître jusqu’à ton point d’arrivée et que la voix du GPS t’annonce finalement un dernier virage à droite avant d’être à destination. Tu gares la voiture derrière celle de Wyatt, sachant sans l’ombre d’un doute que tu es bel et bien au bon endroit et il te faut encore quelques secondes avant que tu n’oses sortir du véhicule. La portière fermée, tu te retrouves nez à nez avec le Parker qui est simplement vêtu d’une combinaison qui lui tombe sur les hanches. Ton regard se perd temporairement sur son torse nu, avant que le son de sa voix ne force tes yeux à remonter sur son visage. « Hey. » « Hey. » Ta voix est faible, bien plus nerveuse encore que tu ne te l’étais imaginée alors que tu n’oses pas trop bouger, soudainement incertaine sur la marche à suivre. C’est Wyatt qui mène la danse toutefois, lorsqu’il brise toute distance entre vous et qu’il vient délicatement poser une main sur ta joue, caressant ta peau du bout de ses doigts. Ton regard papillonne constamment entre ses prunelles, éternellement hésitante, carrément effrayée de la suite des choses, comme si tu peinais à croire que tu étais vraiment là, devant lui après tout ce temps. Ce sont ses lèvres contre les tiennes qui te plonge dans la réalité, qui te confirme que oui, tu es bien là et lui aussi, et que tout ce qui s’est dit, ce n’était pas seulement un rêve. Ton souffle se fait court malgré la douceur du baiser, et c’est tout ton être qui s’électrise alors que son front se pose contre le tien. « Tu m’as manqué. » Il t’attire contre lui, son visage venant trouver sa place dans le creux de ta nuque et ça ne te prend que quelques secondes à ton tour avant que tes bras ne viennent l’enlacer autour de son cou, tes doigts retrouvant naturellement le chemin de ses boucles un peu plus longues qu’à l’habitude. Tu ne pourrais dire exactement combien de temps vous rester comme ça, mais ça ne te semble pas être assez longtemps, quand bien même tu es celle qui brise peu à peu votre étreinte. « Tu m’as manqué aussi. Je suis contente d’être ici. » Contente qu’il l’ait proposé. Contente de pouvoir le voir enfin, le toucher aussi, sentir l’eau salée sur sa peau que tes doigts continuent de caresser distraitement, d’un geste qui se veut aussi nouveau que naturel entre vous. « T’as l’air bien. » Mieux que la dernière fois que tu l’as vu, valise à la main, quand tu doutais encore de le revoir passer le pas de la porte de la même manière qu’il l’avait pourtant fait à tous les jours pendant la dernière année. « J’avais oublié que tu savais surfer. » que tu commentes sur un ton qui se veut plus léger, sourire en coin alors que ton regard se fait une nouvelle fois un peu plus curieux sur le look actuel de Wyatt. Si tu possédais un bon nombre de talents, celui de savoir faire du surf ne faisait pas partie de ton éventail, détail qui n’était pas inconnu du Parker d’ailleurs. |
| | | | (#)Mer 06 Juil 2022, 14:37 | |
| A l’instant où je me retrouve face à Rosalie, je réalise que m’échapper quelques jours pour m’isoler n’avait rien de semblable au comportement fuyard que j’ai toujours eu à l’égard de notre relation. Je n’ai pas fui pour ne rien entendre et me cacher la tête dans le sable, j’ai décidé de m’éloigner pour prendre du recul et revoir ma vision d’ensemble. Avant de tout vouloir révolutionner de manière bancale comme cela a toujours été le cas, j’ai eu besoin de prendre une pause pour prendre conscience que ces derniers temps toute mon énergie se laissait dévorer dans une bataille contre mon passé sans jamais prendre le temps de jeter un regard sur ce que l’on pouvait créer de nouveau. Je ne faisais que vivre dans l’attente du prochain grain de sable qui viendrait enrayer la machine, cet événement imprévisible, mais qui donnerait enfin raison à toutes mes angoisses. Bouffer par l’attente de quelque chose que je ne pouvais pas maîtriser, sans jamais prendre le temps d’analyser tous les signes qui tendait à pointer dans la direction opposée. Mes angoisses ne peuvent se déconstruire en un simple claquement de doigts, mais il était temps que je prenne conscience de tout ce qui m’entoure au-delà du refrain noir que je force au travers de ma vie. Je devais m’éloigner afin de tirer ce qu’il était grand temps de jeter et ce que je me devais de conserver précieusement sans jamais me laisser influencer par une présence annexe. Il aura fallu tout cela pour que mon cœur tambourine au simple fait de revoir son visage après des jours de séparation. Chaque battement me hurlant que l’évidence se cachait sous mes yeux depuis le début et qu’il serait grand temps de se cacher derrière des excuses qui n’ont plus lieu d’être. « Tu m’as manqué aussi. Je suis contente d’être ici. » C’est comme de revenir à la maison, de sentir son odeur, de frissonner sous le parcours de ses doigts contre ma nuque. Rien n’est entièrement réparé, mais je sais ce que je veux, ce que je ne souhaite plus perdre. Et je compte bien lui démontrer de toutes les façons qui soient, une étape à la fois. « T’as l’air bien. » Le constat sonne doux malgré le froncement de ses sourcils et son regard qui ne cesse de papillonner de partout sur mon visage. « Je me sens mieux. » Mieux. Pas encore réellement bien et pas non plus complètement au fond du trou. Juste mieux. Un peu plus serein, moins harasser par la fatigue et les souvenirs. Je me suis laissé abattre jusqu’à plus bas que terre par mes propres pensées, il est temps de jouer la revanche, pour grimper à nouveau hors de ce trou que j’avais moi-même creuser pour mieux m’enterrer. À nouveau, ma paume trouve sa joue et mon pouce glisse viens glisser sous son œil. « Tu as l’air soucieuse. » Les traits tirés comme si elle venait de passer des heures à ruminer, les cernes prononcés par un manque de sommeil très probablement provoqué par notre fils qui effectue sa meilleure sieste à l’arrière de la voiture.
« J’avais oublié que tu savais surfer. » Je remarque son regard changeant et le sourire en coin qui l’accompagne. « Avoue, la tenue me sied à merveille. » J’éclate de rire ne me prenant clairement pas au sérieux après avoir été rappelé à ma vieillesse toute une partie de la matinée. C’est pire désormais, la deuxième séance de glisse ayant réveillé chaque muscle de mon corps qui s’amuse à me rappeler que je n’ai jamais été un très grand sportif. « On dira à personne que demain, je risque d’avoir mal de partout. » Et avec un haussement d’épaule nonchalant, je laisse échapper un léger rire. Après avoir déposé un baiser sur la joue de la brune, je me dirige vers le coffre de la voiture pour récupérer les affaires. Ma famille m’a rejoint, le véritable séjour, les vraies vacances, vont pouvoir démarrer.
Dès l’instant où Gabriel s’est réveillé de sa sieste, autrement dit juste après que j’aie montré la maison à sa mère, il a déclaré qu’il ne décollerait plus de mes bras. Alors me voilà à devoir jongler avec un petit pot de colle tout en tentant de donner un coup de main à Rosalie pour déposer les valises dans la chambre et mettre en place tout ce dont on aura besoin pour le petit. Je finis clairement par abandonner l’idée de vouloir me rendre utile, quand après avoir fait l’erreur de poser le petit bonhomme sur le sol pour terminer quelque chose, ce dernier s’est mis à hurler à pleins poumons comme si le monde entier venait de l’abandonner. Installer sur l’un des fauteuils de la terrasse, je laisse Gabriel grimper sur mon torse pendant plusieurs minutes avant qu’il ne décide de s’allonger tout en venant blottir sa tête dans mon cou. « Papa il part plus, c’est promis. » Je dépose un baiser sur le sommet de son crâne avant d’attraper le regard de Rosalie au travers de la baie vitrée. D’un signe de la tête, je lui demande de nous rejoindre. Les bagages, le dîner et toutes les autres obligations peuvent bien attendre encore un peu. D’une main, je caresse lentement le dos de mon fils, qui n’avait plus été aussi immobile et câlin depuis des mois, et de l’autre, j’attire Rosalie à nos côtés. « Le voyage a pas été trop long ? » La question est tout ce qu’il y a de plus superficiel quand ce qui m’intrigue réellement depuis son arrivée, c’est ce regard mal assurée qu’elle ne cesse de jeter dans ma direction. Comme si elle ne savait pas quoi faire de son corps, incapable de savoir si elle peut s’approcher encore un peu ou garder des distances. Comme si tous les mots que j’avais déversé avant mon départ avaient eu un effet plus dévastateur que ce que je pensais. De ma main libre, je viens capturer la sienne. « Qu’est-ce qui te tracasse Rosie ? » Et le surnom qui me vient tout naturellement, n’avait pas franchi mes lèvres depuis bien trop longtemps. |
| | | | (#)Mer 06 Juil 2022, 21:21 | |
| Tout ce que tu voulais depuis le moment où Wyatt avait pris la décision de partir, c’était qu’il revienne. Et maintenant qu’il avait fait le premier pas, maintenant qu’il t’avait demandé de venir le rejoindre à Byron Bay, tu étais prise d’une anxiété que tu ne savais pas gérer, comme si tu étais incapable d’analyser complètement que sa requête pointait exactement vers ce que tu voulais entendre. Que ses messages et vos dernières conversations laissaient entendre une ouverture sur laquelle tu serais sautée à pieds joints, il y a une semaine à peine de ça. Il y avait même cette embrassade, ce baiser qui étaient tous deux si éloquents, alors que tu demeurais malgré toi sur tes gardes, incapable de plonger complètement dans le moment présent. Ce n’est pas que tu ne voulais pas, ou que tu n’étais plus sûre de toi, au contraire. C’est la peur maintenant, qui dictait tes mouvements, qui créaient cette résistance, cette distance malgré toi. Malgré tous les sentiments et toutes les sensations que cela te procurait d’enfin pouvoir poser les yeux sur lui, d’enfin pouvoir effacer ces dernières images teintées de tristesse qu’étaient celles de son départ, et pouvoir les modifier pour celles de ces retrouvailles qui étaient d’une douceur infinie, mais aussi teintée d’une hésitation que tu aurais aimé pouvoir chasser sans en être capable. « Je me sens mieux. » C’est ce que tu voulais entendre, et tu voudrais tant que ce soit suffisant pour chasser le reste, pour faire taire cette petite voix dans ta tête qui te rappelle encore et encore que tu ne peux jamais être complètement certaine de comment les choses vont finir avec lui, exactement comme tu n’avais jamais vu venir la violence de votre dernière dispute, il y a à peine sept jours de cela.
Tu déglutis légèrement, tes doigts qui continuent de danser légèrement contre sa peau, sans pourtant être capable de camoufler comme tu le voudrais tout ce qui se bouscule dans le fond de ton esprit depuis de nombreuses heures déjà. « Tu as l’air soucieuse. » Tu viens poser ta main sur la sienne, celle qui caresse tes joues, qui s’attardent un peu trop longuement sur ces cernes qui se sont creusés de manière plus proéminente sous tes yeux dans la dernière semaine. « C’est rien, juste un peu de fatigue. Tu sais comment il est. » Tu tournes légèrement la tête pour pointer du regard votre fils qui est encore profondément endormi dans son siège d’auto. « La semaine a été difficile pour lui aussi. » Tu ne dis pas ça pour le culpabiliser de quoique ce soit, parce que tu le sais qu’il en avait besoin, autant que ça a dû être difficile pour lui de ne pas être là, mais la réalité reste la même : Gabriel, malgré son jeune âge, avait perçu le changement et son humeur en avait grandement témoigné, malgré toutes les réassurances que tu avais tenté de lui offrir. « Il va vraiment être content de te voir, il arrête pas de dire dada depuis hier soir. » Et s’il n’avait rien dit sur le coup, tu devinais assez facilement à quel point ça avait dû être un tourbillon d’émotions pour Wyatt, d’entendre le premier mot de son fil au téléphone, sans pouvoir le serrer contre lui juste après. T’attarder sur son look n’est rien d’autre qu’une tentative de rendre la conversation un peu plus légère, tout en profitant non sans gêne d’une vue qui a toujours su te plaire, bien évidemment. « Avoue, la tenue me sied à merveille. » Il éclate de rire et même si tu sais que ce ne sera qu’une sensation éphémère, tu te sens un peu plus légère. Il y a quelque chose, dans ces éclats de simplicité qui sont rares et précieux lorsqu’il s’agit de Wyatt et tu te demandes s’il le réalise, à quel point tu les conserves tous précieusement. « J’ai déjà vu bien pire. » que tu souffles, amusée. C’est vrai, après tout. Tu l’as vu dans tous ses états. Dans les meilleurs, et puis dans les pires. Tu l’as vu sur son 31, dans ces évènements où il n’a jamais aimé se rendre, et puis tu l’as vu ensanglanté après une bagarre, en état d’ébriété, dans des moments que tu voudrais pouvoir effacer de ta mémoire, mais qui construisent malgré tout une partie du chemin qui vous a mené jusqu’ici. « On dira à personne que demain, je risque d’avoir mal partout. » « Il n’y aura personne à qui le dire. Que nous. » Pas de Parker pour interrompre le moment, pas de Craine pour venir mettre des nuages noirs dans votre paysage. Que lui, Gabriel et toi. Et cette pensée te rassure presqu’autant qu’elle te terrifie.
La visite de la demeure est raccourcie par le réveil d’un Gabriel qui, comme tu te l’étais imaginée, exige la présence de son père en tout temps depuis l’instant même où il a posé les yeux sur lui. Les tentatives d’aide de Wyatt sont bientôt dérisoires tant le petit garçon lui demande son attention complète, et c’est sans trop savoir ce que tu fais que tu installes les différentes nécessitées pour votre fils, le parc dans une chambre d’amis connexe à la chambre des maîtres, l’essentiel pour les changements de couches et les boires installés sur le bureau et quelques jouets ainsi que le tapis d’éveil placé sur le plancher du salon, bien que Gabriel refuse actuellement d’y être déposé. Wyatt s’éclipse à l’extérieur avec le petit alors que tu restes en mode préparation, préférant te perdre dans les différentes tâches à effectuer que de devoir faire face à cette boule d’anxiété qui ne te quitte pas depuis que tu as mis les pieds ici. Planche à découper et légumes à préparer sur le comptoir, tu ne coupes rien pourtant tant ton regard ne cesse de se perdre sur Wyatt et Gabriel, le petit bonhomme se lovant contre son père d’une manière qui n’avait plus rien d’habituelle pour un petit garçon qui cherchait normalement à tout le temps être actif. Ton regard trouve celui de Wyatt, qui t’invite sans un mot à le rejoindre à l’extérieur et si tu hésites quelques secondes, tu finis par déposer le couteau sur la planche avant de traverser la cuisine avant de t’arrêter au salon pour ramasser le doudou de Gabriel, et ensuite faire glisser la baie vitrée pour rejoindre les deux Parker sur la terrasse. « Le voyage a pas été trop long? » Tu fais signe que non de la tête, alors que tu hésites encore et toujours à venir t’installer à ses côtés, restant pour l’instant debout, juste derrière son fauteuil. « Pas du tout, il a dormi tout le long. » que tu précises, ton regard s’attardant sur Gabriel dont les petites mains se sont saisies du t-shirt de Wyatt, pour ne pas lui laisser la chance de se sauver sans aucun doute.
C’est la main de Wyatt contre la tienne qui te propulse de nouveau dans le moment présent, alors qu’il t’incite doucement à venir t’installer à côté de lui, chose que tu fais toujours aussi maladroitement, l’une de tes jambes se remontant instinctivement contre ta poitrine alors que tu sens ses doigts qui pressent doucement contre les tiens. « Qu’est-ce qui te tracasse Rosie? » La question t’arrache un léger rire nerveux et ton regard se baisse sur le doudou de ton fils toujours dans ta main libre, que tes doigts martyre sans que tu ne contrôles le mouvement. « Honnêtement? Toi. » Bien sûr que c’est lui qui te tracasse, qui t’inquiète, qui provoque tes insomnies qui vont bien au-delà du sommeil en dent de scie de Gabriel. « J’ai tellement eu peur que tu reviennes pas, ou que tu reviennes seulement pour lui… » que tu commences, d’une voix hésitante. Techniquement parlant, il n’était pas revenu non plus. Il t’avait demandé de venir à lui, mais pour quelles raisons? Avec quelle idée derrière la tête? Tout semble indiquer qu’il veut de cette vie que vous étiez en train de bâtir avant la dernière tempête, et pourtant, c’est ce que tu croyais naïvement aussi avant d’être mise devant le fait accompli que tout n’était pas aussi beau que tu le croyais. Et si c’était encore le cas? Et si tout changeait, en un claquement de doigt, sans que tu ne puisses le prévenir, sans que tu ne puisses te protéger, ou protéger ton fils? Ton cœur cogne si fort contre ta poitrine que tu en as des nausées, et il te faut prendre multiples grandes respirations avant de pouvoir ouvrir la bouche à nouveau. « Il s’est passé tellement de choses dans la dernière semaine, j’essaye juste… j’essaye seulement d’y voir un peu plus clair. » Entre la version du Wyatt qui avait eu besoin de prendre ses jambes à son cou, celui qui s’était confié à toi avec une vulnérabilité nouvelle au bout du fil et puis celui qui allait mieux juste là, devant toi. Les images s’empilaient, se mélangeaient et tu peinais à savoir sans le moindre doute de quoi serait fait les prochains mots qui viendraient franchir les lèvres du Parker, lui qui avait toujours éviter ces discussions souvent trop lourdes, mais qui avait si aisément initié celle-là, sans même que tu ne t’y sentes totalement prête. Les yeux fermés, repoussant aussi longtemps que possible cette possible réalité où rien ne se passe comme tu le voudrais, tes doigts n’ont pourtant jamais lâcher les siens, caressant sa main à toute vitesse comme si tu craignais d’en oublier la sensation d’une seconde à l’autre. « J’ai peur d’ouvrir les yeux et de t’entendre dire que tu n’es pas arrivé à la même conclusion que moi. » Malgré les messages, malgré le baiser, malgré tous les signes qui devraient pourtant se faire évocateurs, la peur elle, se fait plus grande que tout le reste. |
| | | | (#)Sam 16 Juil 2022, 09:55 | |
| « C’est rien, juste un peu de fatigue. Tu sais comment il est. » La fatigue semble s’être incrusté sous ses yeux, laissant des marques qui n’ont pas toujours autant été prononcé et qui viennent réveiller une certaine culpabilité. « La semaine a été difficile pour lui aussi. » De manière naïve et quelque peu stupide, je n’avais pas réellement envisagé la possibilité que Gabriel se retrouve affecté par mon absence. Il est encore si petit que je n’ai pas pris en compte le fait qu’il reste tout de même parfaitement conscient de son environnement et des gens qui gravitent autour de lui en permanence. Gabriel n’est pas un bébé très timide, mais j’ai déjà remarqué qu’il n’agit pas forcément de la même manière lorsqu’il est auprès de quelqu’un qu’il ne connaît pas. Savoir que mon fils a également été affecté par mon absence, viens tirer sur une corde sensible, au point de me laisser un poids sur la poitrine. Ce n’est pas ce que je voulais laisser comme impression en partant ainsi. Il m’était paru nécessaire de faire un break, de consciemment mettre de la distance entre nous afin de faire le point sur tout ce qui n’avait de cesser de venir empoisonner notre relation. Je n’avais pas pris en compte l’onde de choc que cela allait provoquer. « Il va vraiment être content de te voir, il arrête pas de dire dada depuis hier soir. » Mon cœur se serre avec force à la simple idée d’entendre Gabriel prononcer ce mot. « Je m’en suis pas encore remis de ça. » que je marmonne pour tenter de cacher mon émotion même si Rosalie l’a déjà probablement deviner depuis le début. Mon regard se tourne vers le petit garçon encore endormi, il a l’air si paisible et je dois me retenir pour ne pas aller le prendre dans mes bras immédiatement et m’excuser d’être parti sans avoir pris le temps de tout lui expliquer. « Vous êtes là maintenant. » Et il n’y a rien que je voudrais de plus au monde. C’est bien la seule chose qui fait sens désormais, de les avoirs à mes côtés en sachant exactement ce que je souhaite pour l’avenir. Rien n'est parfaitement résolu, il reste bien des choses à accomplir, mais je n’ai jamais été aussi sûr d’une chose : il est temps de laisser tomber les barricades.
Gabriel, refusant d’être déposé, ne serait-ce qu’une minute, je finis par abandonner l’idée de me rendre utile et préfère m’isoler sur la terrasse avec le petit garçon. Cela fait bien des semaines qu’il n’avait pas été autant câlin, refusant de se redresser et ne cherchant pas à me grimper dessus pour passer dans mon dos ou je ne sais où encore. Non, Gabriel est accroché à mon tee-shirt comme une moule à son rocher et je comprends que je vais passer la soirée avec mon fils dans les bras. Lentement, je caresse son dos, venant murmurer quelques paroles à son oreille sans jamais lâcher Rosalie du regard. Je la vois hésiter dans la maison, prétendant vouloir préparer le repas, mais n’ayant toujours pas commencé quoi que ce soit. C’est pire encore lorsqu’elle finit par nous joindre, comme si elle ne savait plus où se mettre, refusant de croiser mon regard. L’espace d’un instant, je me demande ce que j’ai bien pu dire de travers, mais on s’est à peine adresser la parole depuis son arrivée, autre que quelques échanges pratiques concernant son installation dans la maison de location. Alors, je ne sais plus vraiment sur quel pied dansé.
« Honnêtement? Toi. » Sous l’effet de la surprise, je fronce les sourcils, tandis que Rosalie semble chercher à se faire infiniment petite à mes côtés. « J’ai tellement eu peur que tu reviennes pas, ou que tu reviennes seulement pour lui… » - « Oh. » Je sens ses doigts qui massacrent les miens avec force tandis que son regard se perd sur l’horizon. Malgré nos conversations journalières, malgré mon invitation à venir ici, il faut croire que Rosalie s’est mise en tête que les choses allaient mal se terminer. Comment lui en vouloir quand cela a trop souvent été le cas entre nous ? « Il s’est passé tellement de choses dans la dernière semaine, j’essaye juste… j’essaye seulement d’y voir un peu plus clair. » Cette fois, c’est ma main libre qui vient couvrir la sienne, la forçant à cesser de s’agiter juste un instant. « J’ai peur d’ouvrir les yeux et de t’entendre dire que tu n’es pas arrivé à la même conclusion que moi. » Et je comprends à quel point je n’étais peut-être pas le seul à tout remettre en doute constamment. Mon escapade semble avoir causé plus de dégâts que ce que je n’avais bien pu anticiper et voir Rosalie se torturer ainsi ne fait qu’accroître ma culpabilité. Je pensais bien faire, en prenant un peu de distance pour réfléchir, en lui promettant de revenir. Je n’ai fait que décupler ses angoisses au point où elle ne semble pas s’être reposée une seule seconde depuis mon départ. « Tu ne serais pas là, si la conclusion avait été différente. » J’ai souvent été cruel par le passé, pour lui faire payer tout ce que je ne pouvais plus accepter de sa part, mais jamais je ne lui aurais demandé de me rejoindre pour lui demander de repartir par la suite. Je pensais que le message était clair, encore une fois, j’ai espéré ne pas avoir besoin de me lancer dans une grande conversation. Je n’ai jamais été doué pour cela, pour exprimer mes sentiments dans une conversation intelligible que chaque adulte sur cette planète serait en capacité d’avoir. Dès que je dois parler, pour mettre les choses au clair, pour exprimer un ressenti, je m’emmêle les pinceaux en employant un ton complètement hors de propres ou en parlant à la vitesse de la lumière pour ne pas laisser entrevoir tout ce qui se trame à l’intérieur. Il aurait été fou de croire que cela avait changé en une petite semaine. « Attends une seconde. » Sans jamais déloger Gabriel, je me lève pour retourner dans la maison, fouiller le tiroir du bureau. Au moins, cette fois, j’avais eu l’intelligence de prendre les devants.
Lorsque je me retrouve de nouveau face à Rosalie, je lui adresse un sourire tendre, cherchant à véhiculer toute mon affection pour qu’elle ne s’imagine pas le pire. « Tu sais que j’ai jamais été doué pour parler. » Ecrire c’est mon truc, parler, c’est un enfer pour moi. Je ne sais pas faire, j’angoisse de dire les choses de travers et je finis souvent par ne pas véhiculer la bonne intention. « Je veux vraiment pas me rater cette fois, alors… » A force de jouer avec le papier dans ma main, il se retrouve déjà complètement froissé. « J’ai écrit ça. » Il faut lui donner la lettre Wyatt. Celle qui contient toute la vérité, ce que je ne voulais pas voir, ce que j’ai eu peur de perdre, mais qui est toujours là. Des milliers de déclarations jamais avoué, la conclusion ultime d’une dizaine d’année de jeu stupide, qui ont mené à l’existence de notre famille et à tout ce que je ne veux plus voir s’envoler. Au milieu de ces lignes se cache tous les je t’aime que je n’aie jamais su lui dire. « Je… T’es pas obligé de lire ça maintenant. » Et avant que je ne m’angoisse plus que nécessaire, je dépose le papier sur ses genoux, viens embrasser son front et commence à me diriger vers la maison. « Je vais lui donner le bain. » Fais ce que tu veux Rosalie, je viens de laisser mon cœur et tout le reste entre tes mains. |
| | | | (#)Sam 16 Juil 2022, 12:32 | |
| Tu aurais voulu pouvoir remiser tes inquiétudes au placard, les laisser loin derrière, quelque part sur la route entre Brisbane et Byron Bay. Mais plus tu avais foulé les kilomètres sur la route, moins tu voyais ce qui était pourtant évident, trop concentrée sur les peurs et les doutes qui avaient su prendre de l’ampleur bien malgré toi. C’est un mélange désagréable de fatigue et d’anxiété qui a pris la place de ce qui devait être quelque chose de léger, de doux, que tu avais pourtant attendu depuis le moment qu’il était parti. Gabriel a parfaitement compris lui, du haut de ses quelques mois de vie seulement, quand il s’accroche à son père comme si sa vie en dépendait alors que toi, tu persistes à conserver une distance qui n’a pas lieu d’être. Pour te protéger, inconsciemment, d’une menace qui n’existe même pas. Tu le sais, au fond de toi, mais tu n’arrives pas à t’en convaincre hors de tout doute, parce que trop souvent, les choses ont viré à droite quand tu pensais qu’elles iraient à gauche. Parce que trop souvent, il a dit noir quand tu disais blanc, tu disais go quand il disait stop et ainsi de suite, créant des patterns tellement toxiques pendant si longtemps que tu peines à croire parfois que vous avez vraiment laissé tout ça derrière et ce, depuis plus d’un an maintenant. Que oui, vous savez comment faire sans, même si c’est bancal souvent, même si vous n’assumez pas complètement non plus, les trois quarts du temps. Ça se bouscule de partout, dans ta tête et dans ton cœur et tu essayes si fort d’être transparente et honnête, sans toutefois vouloir donner l’impression que tu voudrais prendre tes jambes à ton cou, parce qu’il n’y a vraiment pas une autre place dans ce monde où tu voudrais être qu’ici précisément. Sa main tente de calmer la tienne et tu n’oses toujours pas ouvrir les yeux, terrifiée. « Tu ne serais pas là, si la conclusion avait été différente. » Et finalement, tes paupières trop lourdes perdent de leur tension, s’ouvrent enfin alors que tu tournes légèrement la tête pour croiser son regard. Tu attends un peu, comme si tu espérais qu’il confirme un peu mieux ce que tu savais pourtant déjà, mais les mots ne viennent pas. Alors c’est ça? Il est là, tu es là, vous êtes là tous les trois et vous reprenez exactement où vous étiez, avant la dispute au sujet de Lachlan? Tu ne sais pas trop quoi en penser, et peut-être que tes interrogations se lisent dans le fond de tes yeux puisqu’il finit par être le premier à bouger. « Attends une seconde. » Tu fronces les sourcils, mais finit par hocher la tête, bien incapable de t’imaginer faire ou dire quoique ce soit dans l’immédiat de toute façon.
Tu le regardes partir sans trop savoir quoi en penser. Tu échappes un long soupir, il y a ton cœur qui persiste à s’affoler contre ta poitrine alors que tu l’observes au travers de la baie vitrée, Gabriel toujours blotti contre lui. Il n’est pas parti longtemps, une minute, peut-être deux grand maximum et lorsqu’il revient, tu t’efforces de te calmer, de l’accueillir sans cette tension que tu te traînes depuis que tu as mis les pieds dans cette maison. « Tu sais que j’ai jamais été doué pour parler. » Ce fait t’arrache un léger rire. Ça n’a jamais été votre force, ni à lui, ni à toi, ce qui a sans aucun doute causé bien des problèmes de communication au fil du temps. Si tu arrives un peu mieux à t’exprimer, surtout depuis la naissance de votre fils, c’est encore un travail hasardeux et tu sais que c’est pire encore, que ça l’a toujours été pour lui. Alors évidemment qu’elle ne passe pas inaperçue, la feuille de papier qui tremble légèrement contre son genou, celle qu’il n’ose pas encore tendre dans ta direction même si tu devines sans qu’il n’ait besoin de te le dire que les mots qui y sont écrits te sont adressés. « Je veux vraiment pas me rater cette fois… » Tu hoches doucement la tête, compréhensive. « J’ai écrit ça. » Tu attends encore quelques secondes, avant qu’il n’ose enfin te donner la feuille de papier. Sans être capable de s’arrêter sur le moindre mot, tu remarques toutefois que les mots sur la longueur de la page, dans son écriture qui se veut toujours aussi difficile à déchiffrer. « Je… T’es pas obligée de lire ça maintenant. » Nerveuse d’y découvrir les mots autant qu’il semble l’être de se mettre ainsi à nu, tu sais toutefois que tu ne sauras pas résister bien longtemps. « J’ai besoin de savoir. » que tu réponds au même moment qu’il vient embrasser ton front et t’annonce qu’il va donner le bain à votre fils, te donnant ainsi le luxe de pouvoir lire la lettre sans qu’il ne puisse regarder tes réactions, sans qu’il ne soit obligé de te regarder décortiquer chacune des phrases comme il sait sans doute que tu vas le faire. Tu attrapes sa main une dernière fois, lui offres un dernier sourire alors qu’il s’éclipse finalement avec Gabriel et tu te retrouves toute seule avec tout ce qu’il ne saurait pas te dire en face.
La première lecture est simplement pour la lire d’un bout à l’autre, sans vraiment pleinement réaliser tout ce qui y est écrit. Les autres lectures elles toutefois, s’attardent sur chaque détail, chaque morceau de la lettre qui te confirme à répétition que non, il n’est pas arrivé à une conclusion différente de la tienne. Que lui aussi, il tient à cette vie de famille que vous avez construit depuis plusieurs mois, et que ça va bien au-delà de cette histoire de co-parentalité que vous vous étiez imposée à la base. Tu souris face aux quelques anecdotes de votre vie à trois, il y a des larmes qui coulent sous tes yeux quand tu y comprends chaque je t’aime qu’il n’a jamais su te dire, ceux que tu voudrais entendre à haute voix, mais dont tu sauras te contenter sur papier pour l’instant. Tu ne sais pas combien de fois tu lis et relis la lettre, mais tu finis par en connaître toutes les phrases les unes après les autres. Quand Wyatt réapparaît dans la cuisine, il est seul. Tu devines que Gabriel a dû sombrer pour la nuit, ou du moins tu l’espères et tu viens placer la lettre dans la poche arrière de ton jean avant finalement te lever et d’aller le rejoindre. Il n’y a aucune hésitation dans tes mouvements cette fois, alors que tes bras se glissent autour de sa nuque et que tes lèvres capturent les siennes dans un baiser qui se veut bien plus enflammer que celui avec lequel il t’a accueilli quelques heures plus tôt. Ton souffle est court lorsque tu te détaches légèrement, sans toutefois briser l’étreinte. « Moi aussi. » C’est tout ce que tu réponds, tout ce que tu as besoin de répondre. Toi aussi, tu l’aimes. Toi aussi, tu veux de cette vie avec lui. Toi aussi, t’es prête à faire les efforts pour que ça fonctionne vraiment, cette fois-ci. Toi aussi, tu as vraiment envie que cette fois, ce soit la bonne. « Gabriel s’est endormi facilement? » que tu lui demandes dans un murmure, bien incapable pourtant de résister à l’envie de lui voler ses lèvres une fois de plus. Pas par peur de ne plus pouvoir le faire cette fois, mais bien plus par envie de rattraper le temps perdu. « Tu veux que je prépare à dîner? » que tu rajoutes entre deux baisers, tes doigts jouant dans ses boucles, ton esprit bien ailleurs que sur la nourriture oubliée sur le comptoir. |
| | | | (#)Ven 12 Aoû 2022, 02:10 | |
| Le bout de papier glisse le long de mes doigts pour mieux s’échapper au creux de son étreinte, elle manipule l’enveloppe avec précaution, comme si je venais de lui livrer un objet précieux. Entre les lignes se dissimule bien plus que quelques mots couchés sur le papiers, il réside dans cette lettre tout ce qui aurait dû être dit depuis bien longtemps, tout ce qui m’effraie le plus, le dernier morceau que je n’ai jamais lâché, ce que je n’ai jamais été en capacité de lui dire pour la retenir toutes ces années en arrières. “J’ai besoin de savoir.” Dans le fond, je me doutais qu’elle n’allait pas attendre, qu’elle n’avait pas fait tous ces kilomètres pour rester dans le flou, pour ne pas avoir de réponses aux milliers de questions qu’elle semble se poser depuis mon départ précipité. “Prends ton temps.” que je souffle avant de m’éloigner avec un Gabriel qui semble ravi de m’avoir pour lui tout seul. Lentement, je laisse la baie vitrée glisser, dernière barrière entre Rosalie et moi. Là, dehors, elle va avoir accès à tout ce que je n’ai jamais offert à personne et l’idée me paralyse. Heureusement, Gabriel est là pour me rappeler à l’ordre. D’une petite tape de sa main contre ma joue, il m’ordonne de bouger, de laisser du temps à sa mère et surtout quémander mon attention tout entière. “On va réussir cette fois mon bonhomme.” Et juste pour le plaisir, je viens embrasser ses joues avec fureur, provoquant des éclats de rire qui viennent alors noyer mes idées dans un son cristallin. Quoiqu’il arrive, qu’importe ce qu’elle pourra bien décider, l’important se situe juste entre mes bras. Pour lui, on arrivera à trouver un équilibre, que ce soit ensemble ou chacun de notre côté.
Bien décidé à profiter de chaque instant, Gabriel ne me laisse pas une seule seconde de répit. Comme s’il avait besoin de rattraper le temps perdu ou bien comme s’il avait compris que je devais rester occuper pour ne pas laisser l’angoisse me gagner. J’ai conscience des minutes qui défilent et de l’absence de Rosalie dans la maison. Plus l’aiguille trotte sur ma montre, plus je me demande si tout cela était une bonne idée, si je n’aurais pas mieux fait de ne rien lui donner, à prétendre que tout irait bien dans le meilleur des mondes. A chaque minute qui s’écoulent, j’en viens à tout remettre en question. Un milliers de soupirs plus tard, j’accepte l’idée qu’elle doit avoir besoin de temps, que je me dois de lui offrir ce moment et finit par dévouer mon attention tout entière à mon fils. Petit garçon qui annonce fièrement un “Dada!” qui vient faire accélérer chacune de mes palpitations dans une vague de sentiments bien trop complexe à décrire. Mélange d’une fierté indéfinissable et d’une sensation d’imposture qui s’en revient à questionner la légitimité de ma paternité. Les doutes ne se sont pas envolés en un claquement de doigt, une semaine loin des miens dans cet isolement imposé n’est pas miraculeusement venu soigner les vieilles blessures. Mais Gabriel continue à chantonner ce mot qui transporte tant de signification. “Dada?” Mon regard croise le sien, empli d'innocence et d’une joie sans faille. “Oui mon amour.” Et pour quelques minutes encore, il n’existe que cet instant suspendu dans le temps, un père qui tente maladroitement de construire la relation avec son fils.
C’est un tout nouveau genre de nervosité qui s’empare de moi dès l’instant où Gabriel s’est endormi et qu’il ne me reste plus qu’à retourner dans la pièce à vivre en espérant y retrouver Rosalie. Pour sûre, elle est bien là, dans la cuisine et pour la première fois depuis des années, je me retrouve comme dans l’incapacité de pouvoir lire dans ses pensées. Incapable de savoir ce qu’elle va bien pouvoir me dire, incroyablement incertain de ce qui va bien pouvoir se dérouler dès l’instant où elle s’approche de moi. Son pas semble déterminé et ses bras viennent se verrouiller autour de ma nuque avec force quand au même moment ses lèvres trouvent les miennes. D’abord surpris, je finis par laisser mes bras glisser autour de ses hanches, venant me perdre dans cette étreinte que j’attendais tant. “Moi aussi.” C’est tout ce que ça prend, deux mots et un baiser, pour que mon coeur s’emballe à en perdre la raison, pour que tout prenne finalement sens. Un léger sourire vient se dessiner sur mes lèvres, son souffle se perdant déjà contre le mien alors que mes lèvres attrapent à nouveau les siennes. Au diable les déclarations qui se veulent conventionnelles, nos “je t’aime” se cachent dans chacuns de nos gestes, dans ce regard malicieux qu’elle vient accrocher au mien, de la façon dont mes bras ne sont plus du tout prêts à la laisser partir. “Gabriel s’est endormi facilement ?” Un rire m’échappe face à sa question de maman poule. “J’ai dû lui laisser mon tee-shirt.” Il avait besoin d’être rassuré avec mon odeur le petit garçon, mais il dort à poing fermé et j’ose espérer qu’il va nous laisser le reste de la soirée. “Tu veux que je prépare le dîner ?” Mon éclat de rire vient mourir contre ses lèvres dans un énième baiser à la hâte, empli de déclarations en tout genre et qui en vient à me faire tourner la tête. “On verra ça plus tard.” que je murmure contre ses lèvres avant que les miennes ne viennent se glisser dans le creux de sa nuque à la recherche d’un contact toujours plus intense. “Tu m’as manqué." Cette semaine et bien plus encore, sous toutes les formes qui soient, de toutes les manières qui puissent exister. Mes doigts glissent le long de ses hanches, cherchant à rapprocher son corps du mien, dans le désir de vouloir réapprendre chacune de ses courbes. Pendant quelques minutes, on se perds là-dedans, deux paires de lèvres qui dansent l’une contre l’autre, des mains qui viennent retrouver les courbes des corps provoquant des frissons qui en viennent à faire tourner la tête. Tel deux adolescents animés par un désir inexplicable, on se perd à en avoir le souffle coupé. “Vous êtes la meilleure chose qui me soit jamais arrivée, Gabriel et toi.” Tout ce dont j’ai toujours eu besoin.
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| | | | (#)Dim 04 Sep 2022, 07:32 | |
| Tu pourrais lire cette lettre des centaines de fois d’affilée, tu es persuadée que tu n’en deviendrais pas moins émotive. Il y a quelque chose dans les mots écrits par Wyatt qui vient te chercher, qui te prouve ce que tu avais besoin de savoir, ce que tu avais besoin d’entendre quand bien même ça ne sort pas de sa bouche. Tu sais que chaque ressenti décrit est sincère, et par-dessus tout, tu sais à quel point l’exercice a dû être compliqué pour le Parker qui n’a jamais aimé se rendre aussi vulnérable. Tu prends le temps de lire et de relire quand même, ne serait-ce que pour t’empreindre un peu plus de tout ce que les mots te font vivre avant de le retrouver. Avant de laisser les doutes derrière toi, derrière vous, une bonne fois pour toute. Les remises en question et l’ambiguïté n’ont plus lieu d’être, tu as l’impression que c’est un chapitre de votre histoire qui se termine, en quelque sorte. Seulement pour en commencer un nouveau, différent, plus beau, plus simple peut-être, plus sain tu l’espères. Tu sais que cela n’efface pas les précédents, que les erreurs demeurent, que tu as encore beaucoup à prouver, mais ça te semble possible désormais et c’est ça, le plus important dans tout ça. C’est seulement à ça que tu penses quand tu rentres dans la demeure et que le retrouves, que tes bras s’entourent autour de son cou et que tes lèvres retrouvent les siennes. Tu penses à cette chance que vous vous donnez enfin, et puis à tous ses sentiments qui sont toujours, malgré tout. Ceux qui font battre ton cœur à la chamaille alors que ton regard accroche le sien et que les mots quittent tes lèvres pour lui, pour toi aussi. Pas besoin d’en dire plus, les je t’aime sont bien meilleurs entre vous quand ils sont silencieux de toute façon. Il s’accroche à toi et tu te fonds contre lui et rien d’autre n’a d’importance. Ou presque. « J’ai dû lui laisser mon tee-shirt. » Tu échappes un léger rire et réponds à son baiser, l’air ambiante se faisant de plus en plus chaude avec chaque seconde qui passe. « On verra ça plus tard. » Tu lui réponds d’un sourire seulement, cette réponse te convenant parfaitement puisque ton esprit est bien loin d’être sur la nourriture présentement.
Les mains se promènent, vos baisers s’intensifient alors que tu sens ton souffle qui se fait de plus en plus court et le désir qui s’accroît avec chaque caresse. « Tu m’as manqué. » Les mots sont soufflés contre ton oreille avant que ses lèvres ne se perdent dans ta nuque et c’est une traînée de frissons qui te parcourent l’échine alors qu’il t’est de plus en plus difficile de tenir sur tes jambes. Les mots meurent contre tes lèvres avant même que tu n’aies le temps de les prononcer, tu n’as pas besoin de le dire, qu’il t’a manqué aussi, c’est tout ton corps qui le fait pour toi alors que tu te perds dans cette danse familière à laquelle vous ne vous êtes pas adonnés depuis plusieurs mois pourtant. Toutes les barrières sont tombées ce soir, tu le sais par la manière qu’il a de te tenir contre lui, puis la manière dont son regard te sonde entre deux baisers, à t’en faire frémir sur place. « Vous êtes la meilleure chose qui me soit jamais arrivée, Gabriel et toi. » Les mots te surprennent, même si tu ne doutes pas une seule seconde de la sincérité qui en découle. Tes doigts caressent naturellement sa nuque, ton regard se perd dans le sien et puis ton souffle soudainement coupé par cette déclaration revient doucement, étirant un sourire sur tes lèvres. « Gabriel pourrait pas avoir un meilleur papa que toi. » Et cette semaine l’a bel et bien prouvé, quand l’absence de Wyatt a su venir perturber le petit garçon plus que tu n’aurais pu te l’imaginer. « Et je t’aime. » que tu lui murmures dans un français à l’accent brisé. Il n’a pas besoin de te le répéter, tu avais seulement besoin de le dire, de le verbaliser, d’en garder un souvenir doux cette fois, loin de ce que c’était la dernière fois que les mots ont franchi la barrière de tes lèvres. « J’ai pas eu le temps de bien voir la chambre, tout à l’heure… » tu avances, de la mesquinerie plein les yeux alors que Wyatt te guide, les baisers et les caresses reprenant de plus belle. Tu le retrouves enfin, tu le redécouvres de toutes les façons qui soient et tu te perds dans ce mélange de désir et d’électricité qui a toujours su si bien vous définir.
La tête nichée contre son cou, tu laisses tes doigts danser sur son torse. Gabriel ne s’est toujours pas réveillé depuis que Wyatt l’a endormi il y a de ça plusieurs heures maintenant, et vous ne semblez pas trouver l’énergie, ni même avoir le désir de quitter ce lit depuis que vous vous êtes y posés. « Ça fait longtemps que j’espérais ça. » que tu glisses doucement, brisant le silence des dernières minutes. « Pas le sexe, j’veux dire. » que tu ajoutes avec un rire avant de lui voler ses lèvres tendrement. « Nous deux. Comme ça. » Une vraie chance d’être ensemble et d’être cette famille que vous êtes pourtant depuis plusieurs mois maintenant, avant même que Gabriel ne vous rejoigne, avant même que la journée de sa naissance ne se glisse autant dans le palmarès des plus belles comme des plus horribles journées de votre vie. « J’laisserais rien ni personne gâcher ça. » Pas comme tu l’as trop souvent fait par le passé. Tu tiens beaucoup trop à lui, à votre famille et à ce que vous êtes en train de bâtir pour laisser les opinions ou les actions des autres autour venir mettre le tout en péril. Mais surtout, pour te laisser auto-saboter ce que tu désires vraiment depuis de nombreuses années, quand bien même tu ne voulais pas te l’admettre pendant trop longtemps. |
| | | | (#)Lun 26 Sep 2022, 15:01 | |
| Le monde semble tourner sur un tout autre axis dès l’instant où ces quelques mots m’échappent. Une vérité bien trop longtemps retenue par un excès de pudeur qui n’avait plus lieu d’être entre nous. « Gabriel pourrait pas avoir un meilleur papa que toi. » Et si pendant longtemps je n’ai pas voulu la croire à ce sujet, cette fois je prends le compliment tel qu’elle me l’offre, sans chercher à me dénigrer, sans vouloir protester. Pour la première fois, j’aurais tendance à croire chacun de ses mots. Mon regard viens se perdre dans le sien à mesure qu’une bulle protectrice semble se former tout autour de nous pour ne rien laisser venir s’interposer. De mes bras autour de ses hanches, je cherche à l’amener plus proche de moi à chaque seconde qui passe, pour ne plus la laisser m’échapper, pour m’assurer de sa présence et retrouver le goût de ses lèvres contre les miennes. « Et je t’aime. » Ces mots se diffusent tel un frisson le long de ma peau. Prononcer dans le seul but d’y attribuer une vérité et non pas dans l’idée de vouloir y accoler une colère refoulée. Ces mots que l’on a si souvent utiliser au pire des moments semble soudainement prendre un tout autre sens. Ils résonnent avec force sans que je ne sois capable de les affirmer à mon tour. C’est trop tôt, trop soudain. Mais mon regard vient chercher le sien, à mesure que mes bras l’enveloppent dans une étreinte traduisant tous les non-dits qui flotte dans l’air. Moi aussi. Voilà ce que mes yeux cherchent à lui transmettre. Moi aussi, je t’aime, au point de ne pas réellement savoir le dire. Le sentiment est trop intense, bien trop fort pour que je puisse le gérer avec aisance. Moi aussi, murmure le baiser que je viens lentement déposer contre ses lèvres. « J’ai pas eu le temps de bien voir la chambre, tout à l’heure… » Un rire m’échappe alors que ma main vient chercher la sienne pour l’entraîner dans le couloir, sans jamais laisser son corps s’échapper plus de quelques secondes.
Chaque effleurement ravive un souvenir, la mémoire de milliers de baisers auparavant donné, l’instinct d’une caresse jamais oublié qui viens se déposer au bon endroit, au bon moment. Une danse que l’on a longtemps abandonnée, mais dont nous n’avons jamais oublié le rythme effréné. On se retrouve ainsi, au milieu de centaines de frissons qui traduisent bien des nouvelles promesses, sans amertume, sans volonté de vengeance. Un amour nouveau qui timidement revient explorer des sensations oubliées, de celles qui vous font tourner la tête au point de s’oublier dans une vulnérabilité qui s’expose à l’autre sans bouclier derrière lequel se cacher. Et je réapprends chacune de ses courbes et de ses formes tandis qu’elle s’approprie à nouveau tout ce qui n’ai toujours laisser accessible auprès d’elle dans une complicité aussi nouvelle que réconfortante.
« Ça fait longtemps que j’espérais ça. » Mes yeux jusqu’à présent fixer sur le plafond redescendent vers son visage d’une manière interrogateur. « Pas le sexe je veux dire. » Oh. « Nous deux. Comme ça. » Je feins la déception, roulant des yeux pour mieux marquer l’offense. « Moi qui pensais que tu ne voulais que mon corps d’éphèbe. » Et pour la toute première fois, ma remarque n’est en rien teinter de reproche et ne dissimule aucunement le début de ce qui aurait pu être une dispute. Il ne reste que la volonté de la taquiner tandis qu’un rire m’échappe face à son air offusqué. Du bout des doigts, je viens effacer la moue qui s’est installée sur son visage, avant que ma paume ne traîne en longueur le long de sa joue et que mon index ne viennent replacer une mèche de ses cheveux derrière son oreille. « J’laisserais rien ni personne gâcher ça. » C’est beaucoup de promesses qui se cachent derrière son affirmation. De celles que l’on n’a jamais réellement su tenir au fil des années, mais qui semblent prendre une tout autre résonnance dans cette maison silencieuse alors que ma main n’a toujours pas quitté sa paume et que mon regard ne se dérobe jamais face au sien. « On devrait peut-être rester cacher ici, alors. » que je murmure lentement. « Loin de tout. » Loin de ceux qui finiront par se mêler à notre histoire, loin des avis mitigés de sa famille et des idées débiles de la mienne. Loin simplement, juste nous et notre fils.
Un soupir m’échappe avant que je ne me redresse pour venir embrasser son front. Le silence persiste dans la maison, Gabriel toujours profondément endormi et la nuit ayant obscurci l’extérieur, ne laissant plus que deviner le bruit lointain des vagues qui s’écrasent contre les rochers. « J’ai écrit à Ariane de ne plus jamais revenir. » Ou quelque chose dans cet ordre là, une lettre qui signait la fin, à jamais. Elle pourra revenir, mais elle ne trouvera plus jamais ma main tendue pour la protéger, elle ne pourra plus jamais se cacher derrière tout ce que j’ai pu ériger à ses côtés. J’ai fait en sorte que personne ne puisse plus venir gâcher quoi que ce soit entre nous. Leo semble enfin avoir compris que jamais quelqu’un ne viendrait prendre sa place, qu’elle avait été élue première de mon attention dès le jour de sa naissance et que mon affection pour Rosalie ne viendrait jamais au milieu de notre lien. « J’ai plus envie de me battre contre toi. » C’est tout le contraire désormais lorsque la seule chose que j’ai envie de faire c’est de me battre à ses côtés pour se donner une chance à un avenir apaisé, pour voir notre fils grandir au sein d’une véritable famille. « Tu penses qu’on va réussir ? » Cette fois, après des tentatives avortées, après tant de disputes et d’échecs ? Est-ce que l’on a véritablement trouvé un équilibre qui pourrait nous convenir ? Et mes doigts tremblent à glisser le long de sa colonne en attendant une quelconque réponse de sa part. |
| | | | (#)Ven 30 Sep 2022, 04:04 | |
| « Moi qui pensais que tu ne voulais que mon corps d’éphèbe. » Tu lui fais des gros yeux, ce qui semble ne l’amuser qu’un peu plus. Il y a sa main qui vient se glisser contre ta joue, ses doigts qui déplacent une mèche de tes cheveux et il y a un amas de frissons qui te parcourent l’échine, un sourire qui prend place au coin de tes lèvres comme lui seul sait le faire apparaître. Le chemin a été long et laborieux, avant que vous ne vous retrouviez ici, et si tu regrettes toutes ces années perdues, prisonniers d’un cercle vicieux dans lequel vous étiez condamnés à vous faire du mal, tu ne regrettes pas le résultat final. Tu ne regrettes pas d’être ici avec lui ce soir, de savoir qu’il y a votre fils qui dort paisiblement dans la chambre d’à côté et surtout, que la suite de cette histoire puisse s’écrire à trois, sans constantes remises en question. Et pour conserver tout cela, tu es prête à faire ce qu’il faut. À ne pas te laisser influencer par tout ceux qui vont continuer de juger votre relation, qui tenteront de te convaincre qu’il n’est pas la bonne personne pour toi alors qu’il est seul que tu veux dans ta vie. « On devrait peut-être rester cacher ici, alors. » L’idée t’arrache un léger rire, même si elle est tentante. « Loin de tout. » Loin de vos familles, loin des jugements, loin des divers facteurs qui ont toujours su créer le bordel. « C’est pas un mauvais plan. On peut écrire n’importe où après tout. » Dans l’idée qu’un jour, tu te remettes à écrire, ce qui n’est pas gagné d’avance bien que loin d’être l’essentiel dans le moment. « Je suis pas contre l’idée d’une maison sur le bord de la plage non plus. » que tu ajoutes d’une petite voix, curieuse de voir sa réaction. L’air salé, le bruit des vagues, être loin de tout et de tout le monde, c’est peut-être idéaliste de croire que ça pourrait tout changer, vous donner de meilleures chances pour la suite, mais tu as bien envie de rêver, pour la première fois depuis trop longtemps.
Il se redresse légèrement et tu suis le mouvement, une main toujours posée contre son torse. « J’ai écrit à Ariane de ne plus jamais revenir. » On pourrait croire que la confidence de nulle part, mais le sous-entendu derrière se veut puissant. Ariane n’aura plus jamais la moindre influence sur ce qui existe entre Wyatt et toi, elle n’aura plus jamais ce soutien infaillible que son frère lui offre depuis toujours et duquel tu as toujours été déraisonnablement jalouse. « Je suis désolée. » Et tu l’es vraiment, parce que même si oui, tu as toujours été jalouse, tu sais aussi à quel point il tient à elle et qu’écrire ce message ou cette lettre n’a pas dû être facile pour lui. « Tu penses qu’elle va bien? » que tu ne peux t’empêcher de demander, parce qu’Ariane a quand même été l’une de tes plus proches amies pendant plusieurs années, simplement pour mieux se dresser au rang d’ennemie ensuite. Dans un cas comme dans l’autre, elle n’était jamais bien loin et son absence laisse un trou, que tu veuilles l’admettre ou non. « J’ai plus envie de me battre contre toi. » « La guerre est finie. » C’est ce que tu veux croire. Que vous avez enfin la capacité d’enterrer la hache de guerre. Que vous pouvez faire partie de la même équipe plutôt que d’être constamment l’un contre l’autre. « Tu penses qu’on va réussir? » Ta main quitte son torse pour mieux se glisser contre sa joue que tu caresses délicatement. Tu pauses quelques secondes et puis tu finis par hocher la tête à la positive. « C’est la première fois depuis des années qu’on veut la même chose en même temps. » Ou du moins, la première fois que vous êtes capables de le verbaliser, chacun à votre manière. Ce n’est pas gagné d’avance, tu le sais que tu as encore des choses à te faire pardonner, que conjuguer une vie de couple en plus de votre vie de famille emmènera certainement une dose de défis, mais tu veux croire que oui, c’est possible. Que vous allez y arriver. Qu’il y a une raison pour laquelle vous n’avez jamais réussi à sortir de la vie de l’autre. Que pour votre fils, et pour vous aussi, vous pouvez enfin apprendre à faire mieux. « Je suis allée voir ma mère, il y a deux jours. Avec Rory. » Parce que tu n’étais pas certaine d’avoir la force de le faire toute seule. Un premier pas pour réparer les ponts qui se sont brisés dans la dernière année. « J’ai emmené Gabriel, pour qu’elle puisse enfin le rencontrer. » Tu souffles doucement, les souvenirs de cette rencontre encore frais dans ta mémoire. Un moment que tu avais appréhendé depuis si longtemps, qui s’était mieux déroulé que tu ne te l’étais imaginée, sans pour autant tout réparer. « Ça s’est bien passé. Enfin, correct. Elle va pas très bien. » Et ça, c’est le moins qu’on puisse dire concernant la matriarche Craine, qui disparait de plus en plus sous le dos de son addiction. |
| | | | (#)Jeu 06 Oct 2022, 04:38 | |
| « C’est pas un mauvais plan. On peut écrire n’importe où après tout. » Le sujet est lancé à la légère, dans un murmure, juste assez audible pour m’intriguer. Elle ne verra pas le froncement de mes sourcils, mais mes doigts se sont stoppés dans leur aller-retour incessant le long de son bras avant de reprendre comme si de rien était, comme si l’on n'avait manqué qu’une simple respiration. Malgré tous nos efforts, en dépit de tout ce que l’on a réussi à surmonter ces derniers temps, l’écriture reste le plus grand tabou de notre relation. J’ai conscience que Rosalie n’a rien écris de nouveau depuis des mois, qu’elle semble avoir atteint un point de non-retour laissant s’installer un syndrome de la page blanche. Un millier de questions m’effleure l’esprit, j’aimerais comprendre, avoir un meilleur aperçu de son état d’esprit, mais les mots restent coincés dans le fond de ma gorge. On peut écrire n’importe où, c’est bien vrai. N’importe quand également. « Je suis pas contre l’idée d’une maison sur le bord de la plage non plus. » Cette fois, mes gestes se stoppent réellement. Juste assez pour me permettre de me contorsionner afin de mieux lire ses expressions. Son regard rieur attrape le mien dans une sincérité qui me déstabilise presque. On ne s’autorisait plus ce genre de confidence sur l’oreiller, cette bulle dans laquelle on s’accorde de rêver un peu. Retrouver l’écriture qui nous avait liés dès le début, se donner le droit à imaginer un lieu dans lequel notre famille pourrait s’épanouir loin de la pression du reste du monde. « Vraiment ? » Est-ce qu’elle aimerait que l’on quitte Brisbane ? J’en doute. Je ne pense pas que je serai prêt à mettre en place un changement aussi drastique, mais se donner le luxe de pouvoir s’échapper loin de la ville ? Ce serait bien différent. Je l’ai longtemps fait à l’autre bout du monde, en France ou à Londres, et parfois juste ici, dans cette maison à deux heures de Brisbane. « Le bruit des vagues, c’est ce qui fait tout le charme. » que je plaisante presque nerveusement alors que mon regard ne cesse d’observer chaque trait de son visage, à la redécouverte de tout ce que je ne prenais plus le temps de noter. Le léger froncement de ses sourcils, cette fichue manie de se mordre la lèvre quand elle réfléchit un peu trop et surtout la tendresse retrouver dans ce regard qu’elle pose sur notre situation. Sans autre raison que la possibilité de le faire, je viens attraper ses lèvres dans un baiser qui vient réveiller le millier de frissons qui me parcourent l’échine depuis que l’on s’est retrouvé ainsi.
L’euphorie de nos retrouvailles se transforme lentement en un besoin de confesser tout ce que l’on avait potentiellement laissé en suspens. Je ne lui cache rien de ce que je suis venu faire ici. Ces derniers jours d’isolement m’ont permis de faire table rase sur tout ce que j’ai trop longtemps mis de côté, incertain de vouloir les affronter. « Je suis désolée. » Les mots paraissent forcés, enrober d’une politesse qu’elle imagine probablement devoir encore tenir face à ce lien qu’elle n’a jamais complètement saisi. « Tu penses qu’elle va bien? » Mais la question est sincère, teintée d’une inquiétude que je n’ai plus la patience d’exercer. « J’ai arrêté de me poser cette question. » Son absence à creuser un trou que je ne pourrais jamais refermer, la plaie reste béante quand bien même je m’efforce de la dissimuler, mais son silence a eu raison de ma patience. Il y a peu encore, j’aurais tout donné pour un signe de vie, capable d’abandonner tout ce que j’ai construit si elle me l’avait demandé. Aujourd’hui, mes priorités ont changé, diriger vers des personnes qui ont bien souvent fui, mais sont toujours revenues sans que je n’aie besoin de supplier, sans me laisser dans le silence le plus absolu. « Elle a fait son choix. » Revenir pour mieux partir, abandonner ses enfants quand toute sa vie elle a craché sur ce géniteur qui n’a jamais pris le temps de nous regarder. Elle est devenue une étrangère reléguée au rang du simple souvenir.
« La guerre est finie. » La conclusion paraît sans appel. « C’est la première fois depuis des années qu’on veut la même chose en même temps. » Un exploit que l’on se doit de marquer avec une pierre blanche. Une nouveauté que l’on se doit encore de maîtriser, mais qui donne un sens à cette nouvelle complicité que l’on ne cesse de lier. Le tout scellé par sa main contre ma joue, l’emprunte d’une caresse légère qui renferme bien des promesses. À nouveau, les mots me manquent et je me penche vers elle pour capturer ses lèvres avec les miennes, l’ultime expression de bien des je t’aime encore si dur a prononcer.
Les confessions ne s’en tiennent pas qu’à ma famille et aux conclusions que j’ai pu atteindre. Il semblerait que mon absence ait également profité à Rosalie. « Je suis allée voir ma mère, il y a deux jours. Avec Rory. » Elle a toute mon attention. Je suis prêt à entendre tout ce qu’elle aurait besoin d’extérioriser après cette visite qu’elle a si longtemps repousser. Mon corps tout entier se tourne vers elle, déterminée à lui offrir le soutien dont elle semble avoir cruellement besoin. Avant que tout n’explose. « J’ai emmené Gabriel, pour qu’elle puisse enfin le rencontrer. » A défaut de me laisser emporter par mon impulsivité, c’est mon corps qui transmet mes pensées. Soudainement, mon bras quitte ses épaules et d’un simple geste sur le matelas, j’impose une distance entre nous. Avant ce soir, j’aurais explosé sans me soucier des conséquences, mais il faut croire que même les plus têtus apprennent de leurs erreurs. Le regard de Rosalie est rempli d’incertitude, incapable de pleinement dissimuler la douleur qui se lie aux souvenirs de sa famille. « Rosalie… » Je prends le temps d’inspirer, m’imposant chaque respiration pour lisser mes expressions et ne pas donner corps libre à cet esprit fougue qui m’a toujours caractérisé. J’ai été le premier à la pousser pour qu’elle fasse enfin ce pas vers eux, je n’avais clairement pas envisagé qu’elle prenne Gabriel avec elle. « Pourquoi tu ne m’en as pas parlé ? » Avec force, je tente de laisser tout le reste sous silence. Les reproches d’avoir emmené notre fils sans mon accord, l’envie de lui rappeler que Gabriel reste avant tout un Parker et que ceux qui prétendent être sa famille n’auront jamais aucun droit sur lui. Je ne voulais pas qu’il aille là-bas, mais Rosalie en a décidé autrement et j’essaye de toutes mes forces de ne pas laisser exploser la colère que j’ai si longtemps emmagasinée contre les Craine. « Ça s’est bien passé. Enfin, correct. Elle va pas très bien. » Il ne manquerait plus que cela se soit mal déroulé ? Oh sa mère a bien dû faire une ou deux remarque à mon sujet. « Elle a dit quelque chose à propos de Gabriel ? » Je me fiche bien de l’état de santé d’une alcoolique notoire, mais je ne laisserais pas mon fils payer pour l’opinion que ces gens ont de son père. Je suis son père, quoiqu’ils en pensent et personne ne m’a encore jamais vu réellement protéger mon fils. C’est mon être tout entier qui passe à la défensive, prêt à grogner sur le moindre étranger s’approchant un peu trop près de ma progéniture. « Je n’aime pas que tu y sois allé, avec lui, sans me prévenir. » Ce n’est pas juste un reproche, mais la verbalisation la plus polie qui soit de ce que j’aurais préféré hurler par le passé. Et puis il a le reste, l’envie de protéger la mère de mon fils qui se réveille doucement. « Comment tu vas ? » Je n’apprécie pas tout ce que je viens d’apprendre, mais j’ai encore conscience de tout l’affect que Rosalie réserve à sa famille. |
| | | | (#)Mar 11 Oct 2022, 07:49 | |
| Wyatt cesse ses caresses suite à tes révélations, mais jamais ton sourire ne s’efface de sur ton visage. Il ne s’agit pas de tout laisser derrière et de déménager dès demain matin, mais tu aimes l’idée que vous puissiez de nouveau rêver tous les deux. Que vous puissiez vous permettre ce genre de pensées, ces idées un peu folle lancer à voix haute sans être terrorisée à l’idée de chasser l’autre. Tout est encore frais, tout est encore neuf oui, mais il y a cette familiarité qui ne s’efface pas. Les années, même celles en guerre, qui ont su creuser ce que vous êtes l’un pour l’autre, cette facilité que vous avez toujours eu de vous lire l’un l’autre. De vous comprendre, même quand vous préfériez fermer les yeux sur tout ce que l’autre essayait de vous dire. « Vraiment? » Tu hausses doucement les épaules alors qu’il bouge juste assez pour bien plonger son regard dans le tien, comme s’il cherchait cette confirmation que tu es bel et bien sérieuse. « Pourquoi pas? Un jour, peut-être. » que tu ajoutes, pour le rassurer, pour ne pas qu’il pense que tu cherches à brûler des étapes de cette fondation que vous êtes toujours en train de construire tous les deux. Celle que vous avez détruite a de nombreuses occasions. Parce que tu as envie de pouvoir te permettre de rêver à nouveau avec lui, mais tu ne veux pas aller trop vite. Vous avez déjà tout fait à l’envers, tu veux profiter de chaque instant, en espérant sincèrement ne pas gâcher le prochain. « Le bruit des vagues, c’est ce qui fait tout le charme. » « En partie. » que tu concèdes toujours sur une voix légère, ne voulant pas faire de cette révélation plus que ce qu’elle n’est vraiment. Son regard se veut inquisiteur, mais tu t’amuses à le laisser regarder chaque parcelle de ton visage, tes yeux suivant les siens avant que ses lèvres ne s’emparent des tiennes dans un baiser dont le goût et la tendresse te feront éternellement chavirés.
« J’ai arrêté de me poser cette question. » Ça te suffit pour comprendre qu’il est complètement sincère, lorsqu’il affirme avoir fait une croix sur elle, sur ce lien qui les unit depuis aussi longtemps que tu les connais, depuis bien plus longtemps encore. C’est étrange, de penser que ce ne sera plus jamais pareille, qu’Ariane soit là ou non. Qu’elle est allée loin trop loin, une fois encore, et que le retour n’est plus possible, qu’importe où elle se trouve, ici ou ailleurs. « Elle a fait son choix. » « T’as le droit d’être en colère. » De lui en vouloir, même s’il a fait son choix, même s’il n’attend plus rien d’elle. Tu sais que tu lui en veux encore, à Ariane. D’avoir été là un jour et disparu le suivant. Vous pourriez en parler longtemps, de ce qu’elle a fait mais surtout de ce qu’elle n’a pas fait, mais ce que tu comprends surtout des mots de Wyatt, c’est qu’il n’a plus envie de lui accorder cette importance, et toi non plus. Tu préfères te concentrer sur ce qui est, sur ce qui peut être. Pour Wyatt, pour Gabriel, pour toi. Pour votre famille qui mérite une vraie chance, pour une fois. Sans la rancune et les conflits du passé. Pour que ces baisers, plein d’une tendresse longtemps oubliée redeviennent la norme, votre norme au milieu de tout ce que ne saviez pas faire comme tout le monde.
Ce n’est sûrement pas le meilleur moment pour lui parler de cette visite que tu as rendu à ta mère dernièrement, mais tu sais que tu dois lui dire. Si les derniers jours lui ont été bénéfiques dans ses remises en question, tu as toi-même fait ton bout de chemin, au point de te retrouver face à face avec ta mère, ou plutôt le peu qu’il reste d’elle derrière sa consommation excessive d’alcool. Lui dire que tu es allée la voir est une chose, lui dire que Gabriel était avec toi en est une autre alors que tu le sens qui se tend à tes côtés, avant de se distancer légèrement, imposant un semblant de périmètre de sécurité entre vous deux. Tu te redresses à ton tour, ton dos appuyé contre le mur. Tu ne cherches pas à briser la distance, consciente qu’il en a besoin alors que tu attends silencieusement une réaction de sa part. « Rosalie… » Il n’a pas besoin d’ouvrir la bouche pour que tu entendes toute la désapprobation qui émane de sa personne. Tu te pinces légèrement les lèvres, consciente que ce territoire pourrait bien facilement mener à une dispute que tu préférerais éviter. « Pourquoi tu ne m’en as pas parlé? » « Parce que je sais que t’aurais essayé de me convaincre de pas y aller. Peut-être même que tu serais revenu avant d’être prêt. » Et que toi, tu avais besoin de le faire pendant que l’élan de courage passait, avant qu’il ne t’échappe et que tu ne cesses de reporter le moment au point de ne jamais être en mesure d’y faire face. Tu n’étais pas certaine d’avoir trouvé ce que tu cherchais vraiment, pas certaine non plus de savoir quel était la suite logique suite à cette rencontre, mais tu ne regrettais pas d’y être allée, peu importe la suite de cette discussion. « Elle a dit quelque chose à propos de Gabriel? » Tu échappes un léger soupir. Évidemment qu’il veut savoir comment ça s’est passé, surtout en ce qui concerne Gabriel, savoir ce qu’elle a pu dire sur votre fils ou même sur son sujet à lui. Et tu sais qu’il a le droit de savoir, même si ce n’est en rien des choses qui sont faciles à répéter pour toi. « Elle a dit qu’il me ressemblait. » Et sûrement qu’elle a dit ça simplement parce qu’elle n’avait pas envie de reconnaître que Gabriel est en réalité le portrait craché de son père. « Elle a pas dit grand chose en vrai. » Pas sur lui, ni sur Wyatt quand tu y repenses vraiment. Il y a eu les commentaires masqués, les insultes peu camouflées et puis elle avait rapidement cessé d’être cohérente, quand ta simple présence l’avait poussé un peu plus dans le fond d’une bouteille de fort, assez pour que tu décides que tu devais partir et assez pour te laisser dans le doute à savoir si tu allais revenir.
Wyatt s’efforce de rester calme, mais tu le sens qui bouille juste à côté de toi et tu ne veux pas lui donner la moindre raison d’exploser. Pas ce soir, pas comme ça. « Je n’aime pas que tu y sois allé, avec lui, sans me prévenir. » « Je sais, je suis désolée. » Et tu l’es, sincèrement, même si ça ne t’empêche pas de savoir que tu as tout de même prise la bonne décision. « Je voulais qu’elle le rencontre au moins une fois. Qu’elle réalise qu’il est bel et bien là et qu’elle passe à côté de quelque chose d’extraordinaire. » Parce que c’est ce qu’il est Gabriel: extraordinaire. Le miracle de ton quotidien. Celui qui t’a montré le chemin jusqu’à la vie que tu espérais vraiment, celle que tu avais le droit de vouloir malgré tout ce qu’on avait voulu te faire croire par le passé. « J’ai jamais voulu agir dans ton dos, j’avais juste besoin de le faire. Pour moi. » Et tu espères vraiment qu’il saura le comprendre. Qu’il ne verra pas ça comme un mensonge de plus ajouté à la longue liste de ceux que tu as pu lui dire dans les dix dernières années. « Comment tu vas? » La question qui vaut tout l’or du monde. Celle à laquelle tu n’es même pas certaine d’avoir la réponse. Tu voudrais pouvoir te rapprocher de lui à nouveau, mais tu n’oses pas. Pas tout de suite. Tu le laisses faire le premier mouvement, quand il s’en sentira prêt. « Je sais pas. » Tu échappes un long soupir. C’est tout ce que tu sais avec certitude pour le moment, que tu ne sais pas du tout comment tu te sens face à tout ça. « Ça faisait tellement longtemps, mais c’est comme si ça lui faisait rien. Je sais pas si je vais y retourner honnêtement. Je suis pas certaine que ça en vaut la peine. » Parce que ta mère est malade. Parce que ton père est absent. Et qu’à la fin de la journée, tu es plus heureuse depuis qu’ils ne sont plus une part de ton quotidien. Mais malgré ces réalisations, il y a quand même ce trou dans ta vie, ce sourire triste sur tes lèvres et ton regard qui fui soudainement alors que tu remontes la couverture contre toi, comme si tu tentais machinalement de couvrir cette vulnérabilité qui ne te vient toujours pas aisément. |
| | | | (#)Dim 23 Oct 2022, 15:43 | |
| « T’as le droit d’être en colère. » Le sentiment paraît presque désuet face à l’immense corrélation de tous les sentiments qui s’entremêle depuis la dernière escapade d’Ariane. Si j’avais su me familiariser avec son silence au cours des années, elle avait fini par franchir toutes les limites que nous avions pu un jour définir au sein de notre relation. Elle a souvent joué avec mes nerfs, mais jamais elle n’était allée jusqu’à transgresser ce que l’on s’était juré de ne jamais faire subir à l’autre. « C’est bien plus que ça, Rosalie. » La colère s’est déjà diluée, elle était venue me ronger de manière sournoise avant de laisser place à un sentiment de trahison que je ne saurais réellement définir. Le simple fait de pensée à Ariane réveille une véritable rage, alimenter par ce sentiment d’abandon que j’ai pourtant si souvent tenté de jeter par-dessus bord. C’est bien plus encore que de la colère, mais ce n’est plus vraiment un sujet sur lequel je souhaite m’attarder. Il est désormais temps de tourner cette page, de laissé Ariane dans le passé sans jamais s’attendre à réellement la revoir un jour même si je sais avec certitude que son fantôme flottera toujours au-dessus de mon épaule.
Il semblerait que je ne sois pas le seul à avoir entrepris une certaine introspection sur ma famille durant ces derniers jours. Je savais que Rosalie allait finir par rendre visite à ses parents, ce n’était plus qu’une question de temps. D’une certaine manière, j’aurais aimé qu’elle me fasse assez confiance pour au moins m’en parler. « Parce que je sais que t’aurais essayé de me convaincre de pas y aller. Peut-être même que tu serais revenu avant d’être prêt. » Je secoue légèrement la tête, souhaitant clarifier un point qui me paraît avoir toute son importance. « Tu fais ce que tu veux pour toi, Rosalie. » Jamais je ne me permettrais de venir juger les actions qu’elle prend envers elle-même. C’est une autre histoire lorsque Gabriel se retrouve soudainement concerné. « Mais je t’aurais demandé de m’attendre pour y amener Gabriel. » Je ne vais plus lui mentir, a quoi bon cacher ma déception quand elle en connaît déjà la cause. Elle peut le rendre visite cent fois si cela lui chante, mais quand il s’agit de notre fils, j’estime avoir mon mot à dire, surtout lorsque l’on connaît l’opinion de ses parents sur ma personne. « Elle a dit qu’il me ressemblait. » Je ne peux empêcher l’éclat de rire nerveux qui m’échappe. « Forcément. » Il serait trop dur pour elle d’admettre que Gabriel puisse me ressembler. S’il a su hériter de certains traits de sa mère, il faut tout de même avouer que le petit garçon tant à être ma copie conforme. « Elle a pas dit grand chose en vrai. » Sur notre fils et probablement sur ma personne, puisqu’elle préfère prétendre que je n’ai jamais existé, mais je doute que cela s’applique pour Rosalie. « Et sur toi, qu’est-ce qu’elle a dit ? » Quelles horreurs a-t-elle bien pu balancer au visage de sa fille pour que cette dernière ne cesse de se recroqueviller sur elle-même à mesure que la conversation avance.
« Je voulais qu’elle le rencontre au moins une fois. Qu’elle réalise qu’il est bel et bien là et qu’elle passe à côté de quelque chose d’extraordinaire. » Je ne peux que comprendre la démarche. Rosalie voulait leur montrer qu’elle en était capable, que quelque chose de beau à découler de tout cela et que personne pourra venir lui reprendre son droit d’être mère loin de tout les diktats qu’on lui imposait. Je ne suis pas le gendre dont il rêvait et peut-être que dans le fond elle m’en voudra toujours un peu pour cela, mais on a réussi à se construire quelque chose à l’opposé de ce que nos familles ont toujours voulu nous imposer. Nous sommes loin d’être parfaits, mais on essaye de faire de notre mieux. « J’ai jamais voulu agir dans ton dos, j’avais juste besoin de le faire. Pour moi. » - « Je comprends. » Ce n’est pas une phrase jetée en l’air pour clore la conversation, mais une vérité que je suis prêt à lui donner. Je comprends son désir de vouloir encore tenter, je ne l’approuve pas, je ne suis pas pleinement en accord avec tout cela, mais je comprends son besoin. Et je me donne le droit de leur en vouloir pour tout ce qu’ils lui font subir, parce que Rosalie est en train de se tasser dans un coin comme si elle attendait que le silence soit brisé par des cris. « Je sais pas. » Je peux voir la chair de poule qui se dessine sur ses avant-bras et je me penche vers le sol pour récupérer mon tee-shirt qui avait été abandonné là afin de lui tendre. « Enfile ça. » Je lui adresse un léger sourire avant de me repositionner dans le lit tandis que ses traits semblent s’assombrir encore un peu face à la conclusion qu’elle cherche à amener. « Ça faisait tellement longtemps, mais c’est comme si ça lui faisait rien. Je sais pas si je vais y retourner honnêtement. Je suis pas certaine que ça en vaut la peine. » Dans un geste tout en douceur, je reviens passer mon bras autour de ses épaules afin de l’attirer tout contre moi. « Tu auras essayé… » Et sa mère ne comprendra sûrement jamais l’erreur qu’elle venait de commettre en dénigrant ainsi son petit-fils et sa propre fille. Mes lèvres effleurent à nouveau sa tempe alors que l’on se retrouve de nouveau allongé l’un contre l’autre. Il nous faut un instant pour trouver une position confortable sans que jamais je ne relâche mon étreinte. « C’est ta décision désormais. » Il n’y a qu’elle qui pourra décider si elle souhaite la revoir ou non, si elle veut accorder une énième chance à ceux qui n’ont de cesse de la juger depuis des années. « Et je serais là, quoique tu décides. » Je te le promets Rosalie…
On a fini par s’endormir, épuisé par les émotions de la soirée. Gabriel a même décidé de s’offrir une grasse matinée, ce qui nous a laissés le temps de s’explorer à nouveau, entre les draps puis sous la douche. Et pour la première fois depuis ce qui me paraît être une éternité, on s’est accordé une journée à trois. Notre fils a été le centre de notre attention, on lui a fait découvrir la plage et il a adoré joué avec le sable entre ses doigts (et un peu sur sa langue aussi, il faut l’avouer). Il a mis les pieds dans l’Océan pour la première fois, et même si Rosalie semblait inquiète, je l’ai amener avec moi, un peu plus loin que le rivage. Le petit garçon a passé sa journée à rire et à découvrir, partageant son temps entre le creux de mes bras puis l’étreinte de sa mère. Tout est paru simple, comme si l’on avait enfin trouvé la clé qui nous permettait de fonctionner en laissant les doutes et les craintes au vestiaire.
Il est à peine dix-huit heures trente et Gabriel dort déjà profondément, complètement sécher par tout les événements de la journée. La nuit est en train de tomber lentement, dehors le vent, c’est lever et la maison craque quelque peu sous l’effet des bourrasques. Rosalie est posée sur le divan lorsque je reviens de la salle de bain après une bonne douche. Elle semble perdue dans ses pensées tout en pianotant sur son téléphone et puisqu’elle n’a toujours pas relevé les yeux vers moi, j’en profite pour venir poser quelques pages sur ses cuisses. « J’aimerais ton avis là-dessus. » Ce n’est pas tout le manuscrit, que le premier chapitre, celui que j’ai retravaillé d’arrache-pied depuis que je suis ici. J’ai envoyé une copie à Jules juste avant que Rosalie n’arrive la veille, mais il y’a une personne dont j’aimerais l’avis et c’est le sien. Auparavant, c’était notre truc. Lire les écrits de l’autre afin de donner un avis tranché, sans détour et sans artifices. Juste la pure vérité, celle parfois un peu trop crue, mais qui est véritablement nécessaire pour avancer dans le processus. « S’il te plaît ? » Avant que je ne flippe et que je change d'avis. Il y a bien des choses que je ne sais pas encore dire, mais là, à cet instant, je lui prouve que je suis prêt à avancer. Pas a tout pardonner, encore moins à tout lui donner, mais c’est un début. Un petit quelque chose qui marque tout le sérieux que je souhaite donner à la situation. |
| | | | (#)Mer 26 Oct 2022, 08:03 | |
| « Tu fais ce que tu veux pour toi, Rosalie. » Il y a ce mais qui s’en vient, ce mais que tu connais déjà mais que tu as ignoré lorsque tu as décidé d’emmener Gabriel avec toi pour aller voir ta mère. « Mais je t’aurais demandé de m’attendre pour y amener Gabriel. » Tu hoches doucement la tête. Tu t’étonnes du calme avec laquelle cette conversation se déroule, si loin des cris et des insultes qui vous ont toujours si bien décrits. Le calme ne vient pas sans une pointe de culpabilité toutefois, même si tu ne regrettes pas de l’avoir fait. « Je sais. » Tu ne peux rien dire ni faire pour changer le fait que tu te sois rendue au manoir Craine, tu ne peux que prendre en compte la déception qui habite le visage de Wyatt présentement et retenir qu’à l’avenir, tout ce qui a trait à votre fils se doit d’être approuvé par vous deux, peu importe ce que c’est. « Je suis désolée. » Tu devras apprendre à les dire plus souvent, ces mots-là, si tu veux la moindre chance que cette nouvelle chance que vous venez à peine de vous offrir fonctionne réellement, mais tu vois les efforts qu’il fait et tu es prête à en faire de même. Tu aimerais pouvoir dire que les frasques de ta mère ne te chamboulent plus, que tu es au-dessous de tout ça, mais la vérité c’est que peu import le temps et la distance que tu peux mettre avec tes parents, tu te sens encore complètement sous l’emprise de leurs jugements et de leurs opinions. Et surtout, incroyablement vexée par leur manque d’intérêt pour ta vie depuis que tu ne suis plus leur trajet parfaitement tracé. « Forcément. » Tu offres une moue désolée à Wyatt, consciente qu’il n’a jamais joué un beau rôle aux yeux de ta famille, particulièrement de tes parents. « Et sur toi, qu’est-ce qu’elle a dit? » « Rien que j’ai pas entendu des centaines de fois. » Rien de bien glorieux, donc. Tu n’as pas besoin de répéter, Wyatt connaît le discours par cœur. Déception, honte de la famille, Rosalie aurait pu faire tellement mieux, elle avait tout pour elle, blablabla. Sans jamais prendre en considération que jamais tu n’avais été heureuse dans cette prison dans laquelle il t’avait enfermé, qu’importe si tu avais su jouer le jeu si longtemps. « Elle était pas très cohérente de toute façon. » Ça, c’est ce que tu dis pour te convaincre que ses mots n’ont pas de poids, quand bien même tu les sens bien trop lourds, a hanté la moindre de tes pensées.
« Je comprends. » Un sourire triste se place sur tes lèvres à l’entente de ses mots. Tu n’aurais pas eu la force que cette discussion devienne une dispute, pas plus que tu n’aurais eu le courage de lui expliquer pourquoi tu t’entêtes autant, pourquoi tu n’es pas capable de couper les ponts complètement. Tu te demandes s’il a vraiment réussi, Wyatt, avec Ariane et avec son père. Quelque chose te dit que oui et peut-être qu’un jour, tu sauras en faire de même. Mais pas aujourd’hui. « Enfile ça. » Il te tend son t-shirt autrefois délaissé sur le plancher et tu effectues le mouvement machinalement avant de retourner ton attention vers Wyatt, alors que tu continues de chercher les mots pour expliquer sincèrement comment tu te sens, sans que rien ne te vienne facilement. Il te rapproche contre lui et telle une poupée de chiffon, tu te laisses faire, retrouvant un peu de confort et de sérénité contre lui, à défaut d’en ressentir à l’évocation de ta mère. « Tu auras essayé… » Mais est-ce que ça en valait vraiment la peine? Est-ce que tu t’y es prise trop tard? Est-ce que tu aurais vraiment pu faire quoique ce soit pour gagner leur respect et leur affection sans devoir en payer le prix, bien trop cher? « C’est ta décision désormais. » « Je vais y penser. » Tu n’es pas prête à décider de quoique ce soit. Pas si vite, pas alors que c’est encore si frais et que tu as tant à penser et tant à comprendre. « Et je serais là, quoique tu décides. » Et ces mots-là, c’est bien tout ce que tu as besoin d’entendre pour apaiser ton esprit, pour te rappeler que vous êtes un vous maintenant, et que ta famille n’aura plus jamais le pouvoir de briser ça. « Merci. » Tu lèves la tête et viens trouver ses lèvres dans un énième baiser, avant de te blottir confortablement contre lui et te laisser filer entre les bras de Morphée.
Tu n'aurais pas pu espérer une plus belle journée. Les rires et les moments précieux ont rythmé chacune des activités, pour la première fois depuis trop longtemps, tu ne te posais aucune question concernant les intentions de Wyatt envers toi, pouvant profiter de votre proximité, de cette sensation soudaine et entière que vous êtes réellement une famille soudée, désormais. De voir Gabriel découvrir l’océan, de pouvoir partager tout ça avec Wyatt sans jamais craindre un jour où l’un de vous manquera nécessairement des premières fois pour cause de garde partagée, ça n’a vraiment pas de prix. Pour la première fois depuis presque deux ans, tu te sens légère, tu sens bien, sereine. Tu sais que tu es à la bonne place, auprès de ceux que tu aimes et tu ne veux rien de plus qu’embouteiller tous ces sentiments pour ne jamais les oublier et espérer que ce sentiment bien-être puisse perdurer. Tu sais que ce ne sera pas toujours aussi beau, toujours aussi facile, mais si cette journée peut vous donner un léger aperçu de ce que vous attend, quand ça va bien, alors tu te sens prête à affronter les tempêtes, avec lui pour une fois. La nuit sur le point de tomber, tu es complètement épuisée, reconnaissante pour ton fils qui a rapidement trouvé le sommeil après cette journée occupée. Tes doigts pianotent machinalement sur l’écran de ton téléphone, absorbée par le contenu aléatoire des réseaux sociaux que tu n’entends pas les pas de Wyatt qui s’approche de toi. « J’aimerais ton avis là-dessus. » Tu relèves les yeux, t’attendant à voir quelque chose sur son téléphone qu’il voudrait peut-être acheter ou n’importe quoi. Ce à quoi tu ne t’attendais pas toutefois, c’est à voir un amas de feuilles trouver place sur tes cuisses et un sourire semi-confiant sur le visage du Parker. Tu parcoures la première page rapidement des yeux et ça ne te prend que quelques secondes pour comprendre de quoi il s’agit. Un manuscrit, ou une partie de du moins. Un accès à son monde auquel tu n’as plus eu droit depuis si longtemps. Les brouillons, les premiers jets, ceux sur lesquels vous pouviez débattre pendant des heures pour des points et des virgules, des mots redondants ou des idées qui ne mènent nulle part. Une confiance que tu avais perdue, une confiance que tu n’étais pas certaine de mériter aujourd’hui. La surprise se lit sur ton visage et tu hésites à attraper les pages, comme si tu attendais une confirmation que oui, c’est bien ce qu’il veut. Et toujours dans le silence, il comprend Wyatt. « S’il te plaît. » « Bien sûr. » que tu réponds finalement, tes lèvres s’étirant dans un sourire. « Maintenant? » que tu lui demandes et c’est à la suite d’un hochement de la tête que tu plonges dans les premières lignes, te perdant entre les pages, les idées et les personnages émanant de l’esprit du Parker. Si tes commentaires se veulent plus réserver au départ, vous retrouvez naturellement votre rythme, celui des échanges enflammés et des opinions qui divergent sans que jamais ça ne déborde. Une dynamique qui avait longtemps été mise de côté mais qui, comme tout le reste, semblait vous revenir facilement. |
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