De l’importance de s’entourer des bonnes personnes et de préférence, le plus tôt possible. Maze était entrée dans sa vie en 2004, soit dix-huit ans auparavant pour ne plus jamais la quitter, et heureusement. Les origines de sa mère avaient guidée Greta vers Brisbane mais peut-être un jour oserait-elle avouer à sa meilleure amie que sa présence dans la ville Australienne était en partie liée au fait qu’elle y résidait. Un véritable luxe, un privilège de pouvoir compter sur une personne comme Maze, joignable jour et nuit et incapable du moindre jugement quant à ce qui pouvait attrister Greta. Et c’était finalement réciproque, difficile pour elle d’oublier la fois où Maze avait frappé à sa porte avec une tête d’enterrement et les larmes aux yeux car Travis était mort. Greta avait frôlé la crise cardiaque avant de se frapper le front : Travis aka le personnage préféré de sa série. Impossible de se fâcher contre elle, elles avaient finalement bu toute la soirée avant de pouvoir enfin rire de l’anecdote.

Encore une fois, Maze avait accouru à peine le SMS ouvert et c’est avec les mains un peu trop chargées qu’elle était arrivée. « Heu…combien de bouteilles en plus j’aurais dû ramener exactement ? » Comme si trois bouteilles pour deux ne suffisaient pas. « Mais quand je disais avoir besoin de vin ça signifiait besoin de boire du vin avec toi, pas que tu ramènes tout ça, t’as déjà vu ma cave ? » avait-elle plaisanté, tout de même ravie de pouvoir déguster de nouveaux crûs avec Maze. Les filles n’avaient aucune formation en oenologie mais pouvaient probablement passer professionnelle tant elles avaient bu de verres toutes les deux. « Il se passe quoi exactement ? Tu me fais un résumé de la situation ? » Après avoir posé les bouteilles dans la cuisine et servi le premier verre, le ton de Maze était devenu sérieux et il semblait qu’elle s’inquiétait réellement et pour cause. Greta avait échangé des messages avec un Lucas particulièrement incisif et elle devait bien admettre qu’il l’avait déstabilisée. Le discours avait été rompu et la douceur avait été remplacée par l’amertume sans que la jeune femme puisse réellement y changer quoique ce soit s’il refusait de discuter. « Nan mais c’est stupide, pardon, je t’ai fait venir pour rien mais j’avais besoin de toi quand même. » Elle se devait de s’excuser parce qu’en formulant le problème dans sa tête, cela sonnait plutôt creux. J’ai menti à Lucas sur qui j’étais et il ne me parle plus. Comment expliquer que cela soit plus qu’une simple incompréhension ? Que cela ait autant d’impact sur son humeur ? « Je sais pas par où commencer. Je t’ai parlé de rien parce qu’il y’a rien. » avait-elle commencé, consciente que mentionner Lucas comme étant à la base de ses soucis allait amener tout un tas d’autres questions. « C’est Lucas. » Bien sûr, Maze connaissait le pompier et l’avait croisé quelques fois durant leurs trois années d’amitié mais Greta se demandait maintenant si elle n’avait ne serait-ce qu’évoqué son accident. Difficile de raconter le moindre détail de sa vie à Maze avec ce qui lui était arrivée. Le regard interrogateur de la brune avait été un peu trop perçant pour que Greta ne souhaite continuer le récit de comment elle avait probablement brisé une amitié. « Je suis étonnée que ce soit pas toi qui m’ait contactée après avoir appris pour Lizzie. » Evidemment, Greta souhaitait changer de sujet pour éviter que Maze ne vienne trop rapidement lui confirmer ce qu’elle craignait d’avoir compris elle-même, que personne ne se mettait dans cet état pour un simple ami. Le chemin emprunté était maladroit et le regard furieux de Maze n’avait pas tardé à la faire rire et terminer son verre en le tendant vers son amie pour qu’elle lui serve un second verre, vite.

Ses yeux avaient roulé de manière dramatique alors que son amie tentait de lui faire comprendre que ses messages laissaient à penser que quelque chose de grave se passait. Greta savait que Maze avait raison, comme bien souvent. Elle connaissait maintenant par cœur le caractère de la brune et savait que le moindre détail pouvait la contrarier si elle ne l’interprétait pas correctement et il fallait avouer que l’auteure avait laissé penser que son état était bien pire. Du moins, un peu plus inquiétant que ce que laissaient penser sa voix enjouée et son accueil. Peu importe, le vin allait apaiser tous les maux, même ceux d’une Maze visiblement peu ravie d’avoir accouru quand le problème ne le nécessitait pas forcément. « Je suis désolée, je sais que t’as d’autres préoccupations en ce moment.Merci, comme d’habitude, d’être là. » Son ton était sincère, les plaisanteries étaient finies et laissaient place à une réelle gratitude de pouvoir toujours compter sur son amie lorsqu’elle était au plus bas. « Ce qui nous empêche en rien de piocher EN PLUS dans ta cave soit dit en passant. » Encore une fois, Maze savait trouver les mots pour lui redonner le sourire ou plutôt pour lui permettre de garder le sourire de façade qu’elle avait réussi à maintenir sur son visage jusqu’alors. Maze était ici chez elle et pourrait prendre le nombre de bouteilles qu’elle souhaitait si elle permettait à Greta de vider ce qu’elle avait sur le coeur. A qui d’autre pouvait-elle se confier ? « Excuse-moi, mais tu serais pas en train de dire tout et son contraire par hasard ? » Si, Maze. C’était exactement ça. Tout simplement parce que l’auteure, en plus d’être en panne d’inspiration, ne réussissait même plus à organiser ses propres pensées. Le danger était imminent, évident, et pourtant, il semblait que la jeune femme se dirige tout droit vers le piège qui se dresait devant elle. Lucas était un ami, son meilleur ami peut-être, rien de plus. Alors pourquoi avait-elle ressenti tant d’émotions en le retrouvant à l’hôpital ? Pourquoi cette chanson résonnait-elle dans sa tête en boucle ? Quelque chose n’allait pas et elle devait mettre des mots sur tout ce qui se tramait dans son esprit. « Ok…Et qu’est-ce qu’il a exactement Lucas ? » Rien. Il n’avait rien, il était juste tout. « Attends attends…Non seulement t’essayes de noyer le poisson mais en plus tu fais appel à Lizzie pour ça ? T’as pas honte Moore ? » Greta avait était plutôt fière d’avoir réussi à détourner l’attention de Maze de cette façon et elle la connaissait trop bien pour savoir ce qui la ferait réagir. Le coup était bas et Greta avait ri en buvant son, probablement, deuxième verre de vin. Des verres que Maze remplissait à ras bord parce que le loft de Greta n’était pas le lieu où l’on se permettait de servir une goutte d’alcool pour le prix d’une bouteille.  « Pardon, c’était plus fort que moi. Je te jure que dans d’autres circonstances, j’aurais vraiment pleuré avec toi, c’est terrible. » Greta tendait son verre, Maze le remplissait. L’équipe était organisée, soudée, prête à continuer le match qui les opposait. « Et pour te répondre : bien sûr que non c’est pas moi. J’avais les yeux beaucoup trop embués pour réussir à écrire quoi que ce soit sur mon téléphone. » avait poursuivi son amie, visiblement encore choquée par l’événement. Peut-être que le moment était mal choisi pour lui annoncer le retour de Carmine, qui, lui aussi, avait versé sa petite larme malgré ses tentatives pour affirmer le contraire. « Donc je réitère ma question : qu’est-ce qu’il a exactement Lucas ? » Son troisième verre de vin était maintenant entamé, son téléphone était juste là dans sa poche de jean et ses mains la brûlaient tant elle souhaitait tenter à nouveau de le racontacter. Maze ne lâchait pas et c’était normal, elle était ici exactement à cause de ce sujet. Soufflant un bon coup, jouant nerveusement avec ses mains, Greta s’était lancée, aidée par la boisson alcoolisée. « Je me lance, alors, mais ça va être long. » Maze était à deux doigts de la gifler, elle en était sûre, elle s’était donc réellement lancée. « En gros, Lucas a découvert par je ne sais quel moyen que j’étais une putain de Sighbury. Il m’a balancé ça à la gueule quand je l’ai croisé par hasard l’autre jour à la pizzeria… » Repenser à cette scène lui avait fait serrer les poings et boire une autre gorgée. « Il m’a sorti t’es célèbre bla bla, t’as mieux à faire bla bla. J'suis restée plantée là... J’ai essayé de lui expliquer que je voulais pas qu’il me voit comme une gosse de riche, j’ai essayé de comprendre comment il avait su ça aussi… » Est-ce que des larmes étaient réellement en train de couler le long de ses joues ? De la colère ou de la tristesse, il était difficile pour elle de comprendre ses propres émotions alors elle avait jugé que le vin était le coupable mais en avait tout de même repris un peu. Juste au cas où. « Depuis il m’a dit qu’il ne voulait plus me parler alors j'ai même pas pu lui dire tout ça... » Et alors ? lui répondrait sûrement Maze. Et bien depuis, tout lui paraissait fade et elle avait l’impression de se balader avec un trou béant dans la poitrine. Dieu ce qu’il lui manquait.

« Du coup je me demande bien quelles circonstances peuvent te détourner ainsi d’un deuil national. » Maze était pointilleuse, attentive aux détails et passait difficilement à autre chose si elle n’avait pas eu l’explication qu’elle désirait. Finalement, la voir exceller dans le métier de wedding planner n’était pas étonnant, elle possédait toutes les qualités nécessaires à ce rôle et avait un don pour l'événementiel. Pourtant, ces qualités qu’elle lui reconnaissait venaient ce soir embarrasser une Greta dont l’alcool commençait dangereusement à devenir un sérum de vérité. « J’ai toute la soirée, toute la nuit même s’il le faut… …et toi t’as une bonne réserve de vins, je vois pas de quoi on pourrait encore avoir besoin pour tenir jusqu’au bout de ton histoire. » Alors Greta récitait, buvait, racontait, reprenait une gorgée. Pas assez enivrée pour ne pas réaliser à quel point elle était en train de se livrer sur un sujet qu’elle ne maîtrisait pas elle-même, déjà trop alcoolisée pour pouvoir s’arrêter. Les yeux suppliants d’une Maze probablement plus inquiète que curieuse n’aidaient pas non plus l’auteure à stopper ses explications. Les sentiments qui se bousculaient en elle alors qu’elle racontait pourquoi Lucas ne lui parlait plus étaient en train de la prendre de court et Greta continuait à terminer le contenu de ses verres, les uns après les autres, sans réellement penser à l’ivresse qui s’en suivrait. « Je peux comprendre qu’il soit surpris et…déçu que tu ne lui aies pas dit plus tôt j’imagine. » Par ses mots qui se voulaient compréhensifs et rassurants, Maze traduisait elle aussi un niveau d’alcoolémie avancé et articulait avec bien des difficultés. Laissant échapper un rire face à leur fâcheuse tendance à vider les bouteilles comme si leurs vies en dépendaient, Greta l’écoutait tenter de donner son point de vue sur la situation, son avis étant étrangement similaire à celui de son amie. « En revanche il aurait clairement pu te laisser une chance de t’expliquer au lieu de se fermer comme ça. Parce que t’avais tes raisons pour agir de la sorte. Et je suis sûre qu’il serait en mesure de les comprendre s’il voulait juste bien les entendre. » A une exception près. « J’ai eu le temps de réfléchir à sa réaction et j’ai eu du mal à comprendre qu’elle ait été aussi intense au début, mais je pense que j’aurais réagi pareil, en fait. » avait-elle commencé et la dernière gorgée avait été prise avec détermination, avec l’envie de sortir ce qui lui pesait depuis qu’elle avait quitté sa chambre d’hôpital quelques mois avant. « Parce que… » Les mots lui brûlaient les lèvres mais elle hésitait à les prononcer, assumant difficilement ce qui se tramait dans son esprit. Mais l’auteure, grâce à ces semaines de silence, avait eu le temps de tourner le problème dans tous les sens, d’essayer de donner une explication à sa réaction à lui mais également à la sienne, à sa façon de boire plus que de normale et de s’isoler chez elle parce qu’il ne donnait plus signe de vie. « Parce que je crois que je suis amoureuse, putain. Je vais vomir.  » In vino veritas, probablement. Mais le soupir qui s’était échappée d’elle après avoir dit ces mots avait été suivi d’une affreuse nausée, probablement dûe à l’addition d’un verre de trop et d’un sentiment qu’elle refusait de ressentir depuis maintenant cinq années. D’un geste de la main, Greta avait stoppé Maze dans ce qui allait devenir des cris stridents - elle en était sûre. «T’as essayé de sonner à sa porte ? » Alors celle-ci avait plutôt enchaîné avec des conseils qui n’étaient pas aussi judicieux que ceux que la brune lui donnait quand son alcoolémie n’était pas aussi haute. « Sonner à sa porte comme une stalkeuse ? Je suis rassurée de voir que t’as picolé au moins autant que moi. » Maze semblait malgré tout déterminée à renouer le dialogue entre un Lucas et une Greta légèrement bornés. « De l’appeler ? De lui envoyer un message ? Il est pas obligé de répondre, mais il y a de fortes chances pour qu’il lise au moins ce que tu lui envoies non ? » Elle avait essayé, à peine l’avait-il repoussée qu’elle avait tenté de se justifier et de trouver les mots justes pour qu’il ne pense pas qu’elle lui avait caché la vérité par manque de confiance ou n’importe quelle autre raison. Simplement pour se protéger, pour qu’il continue à la regarder de la même façon. Ignorant le mouchoir tendu par Maze et explosant de rire avec la pression qui retombait, Greta lui avait montré ses yeux qui n’étaient pas en train de pleurer, probablement à cours de larmes. Peu cohérente, oscillant entre désespoir, romance et rires incontrôlés, Greta avait tout de même souhaité donner une nouvelle chance à l’échange de SMS. « Merde. J’ai cliqué sur envoyer. J’aurais dû boire un thé à la passiflore, pas ça… » avait-elle dit, paniquée à l’idée de ce qu’elle venait de dire plus tôt et de ce qu'elle avait envoyé à Lucas. Son écran de téléphone était flou et l’auteure appréhendait déjà la suite des opérations, incapable de réellement relire ce qu’elle avait souhaité lui dire. Rien de tout cela ne lui ressemblait, elle qui avait tant critiqué l’amour depuis sa rupture. Mais pouvait-elle réellement comparer Lucas Allen à Arthur Coventry ? Difficilement. « Bref. Sujet clos, il répondra probablement pas, comment ça va toi ? » Après tout, Maze aussi avait ses problèmes.

La culpabilité de l’avoir fait venir pour pratiquement rien, pour quelque chose qui pouvait paraître insignifiant, s’était rapidement envolée. Au fur et à mesure des verres et des confidences. Difficile de savoir si c’était l’alcool ingurgité bien trop vite qui lui donnait la nausée ou plutôt ces sentiments naissants sur lesquels elle venait de mettre un nom. « Jeez, Greta Moore amoureuse, dans quelle réalité est-on passées ?? » Greta avait secoué la tête en signe de désapprobation. Certes, il n’était plus à prouver que son rapport aux relations amoureuses était devenu extrêmement complexe depuis sa rupture mais entendre Maze le crier tout haut la mettait face à ses propres contradictions. « Vomis pas sur ton tapis par contre, ce serait franchement dommage. » La brune retombait sur ses pattes comme un chat. « Je fais ce que je peux avec ce qu’il me reste de cerveau. T’aurais franchement pu m’annoncer ça pendant que j’étais sobre, tu fais pas d’efforts ! » Consciente de la situation actuelle, Greta avait marqué une pause avant de répondre, comme si elle tentait déjà de répondre à la question rhétorique qu’elle s’apprêtait à poser. « Je sais pas si j’aurais dit la même chose étant sobre. » Et il était peu envisageable que Maze soit sobre pendant qu’elle était assez alcoolisée pour se confier. Ou peut-être pas. Le fait était que Greta s’était très rapidement sentie dépassée par ses aveux mais qu’elle avait malgré tout écouté les conseils de Maze en attrapant son téléphone et en écrivant à Lucas. « Quoi ??? » Si Greta n’était pas certaine que cela ait été une bonne idée, la réaction de son amie avait suffit à confirmer ses doutes. «Tu lui as écrit quoi exactement ? Et est-ce que t’es sûre que t’as envoyé le message au bon destinataire ? » La blonde avait tenté tant bien que mal de se relire tout en portant un poignet bien mal assuré jusqu’à ses lèvres pour prendre une gorgée. « J’arrive pas a me reli… IL A RÉPONDU. » avait-elle répondu avec une attitude très similaire à celle d’une adolescente, criant sous l’effet de surprise de la sonnerie de son téléphone. « Oh. » Greta avait tendu son téléphone vers les yeux - bien trop plissés - de Maze pour qu’elle puisse lire. Il n’avait pas tort mais sa réponse n’était pas celle attendue alors elle avait terminé son verre et rangé son téléphone. « Tu rêves Moore. Le sujet est pas clos du tout. Il le sera quand j’aurais eu droit à ma happy end…heu…quand VOUS aurez eu droit à votre happy end…Et puis de toutes façons y a rien à raconter de mon côté. » Ses sourcils étaient venus s’arquer pour deux raisons : après la réponse de Lucas il était évident que le sujet était clos pour ce soir et il était également évident qu’il y avait forcément des choses à raconter. « …enfin rien si ce n’est des histoires avec un italien, un mexicain et un australien. » « Tu vois quand tu veux ! L’Italien c’est Nino j’imagine mais pour le reste, il me manque des infos. » Les filles avaient bien trop à se dire et bien trop de verres à se servir pour s’installer confortablement alors elles se tenaient dans la cuisine de Greta, s‘avachissant toujours un peu plus sur les meubles pour réussir à tenir debout. « Y a encore une bouteille dans le coin ? » La compagnie de Maze ne décevait jamais. « Y a plein de bouteilles dans le coin mais les meilleures sont à là cave et je suis pas en état d’y aller. » Alors la blonde s’était accroupie pour accéder à des placards un peu plus bas qui contenaient des alcools un peu plus fort que ce vin qu’elles descendaient à une vitesse folle. « Tiens, ça fera l’affaire. » avait-elle dit en brandissant fièrement une bouteille de gin, pour continuer la soirée et pour réussir à accuser le coup d’un Lucas ignorant le premier pas qu’elle venait de faire. Greta avait sorti deux verres dans lesquels elle avait versé une quantité de gin probablement convenable qu’elle avait ensuite arrosé de ginger beer. « Maintenant je veux tout savoir, fais moi voyager, Maze. »   Et en parlant, Greta avait désigné de la tête le canapé qui serait le théâtre de biens des confidences ce soir et s’y était installée accompagnée de son verre.

Les mauvaises décisions - un titre qu’elle songerait à donner à son prochain romain si seulement elle était capable de relancer son inspiration. Elles étaient ivres, la règle d’or voulait que les téléphones ne soient pas utilisés dans ces moments là, surtout dans les circonstances actuelles. « PERSONNE EST SAOUL ICI, QU’EST-CE QU’IL RACONTE ? » Greta regrettait mais la quantité d’alcool additionnée à l’attitude de Maze suffisaient ce soir à lui redonner le sourire. Hochant la tête et trinquant avec Maze et son verre vide, le contenu s’étant déversé sur son tapis, Greta avait abandonné son téléphone pour scruter l’énorme tâche.. « Merde. Ca va laisser une trace tu crois ? »  Elle avait haussé les épaules en se dirigeant vers le canapé - qui resterait immaculé, espérait-elle. « J’m’en fous, j’suis riche. » avait-elle dit en regardant Maze droit dans les yeux pour comprendre qui la première exploserait de rire. Le duo avait craqué au même moment, venant empirer l’état de la pièce. « On va lui réécrire quand on sera sobres hein ? C’est quoi la suite du plan ? » avait-elle demandé en désignant le téléphone lâchement abandonné. « Je sais pas, faut que je répare ça. » Parce qu’à l’inverse de la catastrophe de son tapis, sa relation avec Lucas avait toute son attention et la blonde sonnait extrêmement lucide en l’évoquant. « T’as raison, t’es plus à la page, faut que je te résume tout ça. Faut qu’on fasse le point G. » Le moment de flottement qui avait suivi et le vide dans leurs yeux avaient laissé présager le fou rire qui s’en était suivi. « Tu crois que je développe des compétences pour écrire un one woman show quand je suis ivre ? » « Bah quand tu vois que moi j’ai écrit un livre, tout est possible. Et ton pouvoir comique est bien plus reconnu que ma plume. » Maze la faisait rire à chaque fois qu’elle la voyait et ce même si les filles se retrouvaient pour annoncer des mauvaises nouvelles, que ce soit sciemment ou malgré elle, les éclats de rire ne manquaient jamais. Quant à son talent d’écriture, il restait encore tout à prouver maintenant que le nom de Sighbury ne figurerait plus à côté de son prénom sur la couverture.

Mais elles avaient assez parlé d’elle pour la soirée et Greta avait ajouté assez d’huile sur le feu de sa relation avec Lucas, alors, c’était à la brune de se confier.  « Ma vie sexuelle et amoureuse c’est en fait le début d’une bonne blague je crois…C’est l’histoire d’un homme à tout faire italien, d’un anthropologue australien et d’un agent artistique mexicain qui rentrent dans un bar… » Contre toute attente, la blonde n’avait pas eu à trop insister pour que le récit commence mais celui-ci l’avait très vite amené à se redresser en replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille comme si cela l’aiderait à mieux entendre. « Attends. Attends, attends, attends. Un anthropo quoi ? » Si elles avaient été les personnages d’un cartoon, Greta aurait craché sa gorgée de gin en fines gouttelettes au visage de Maze tant la dernière phrase de son amie l’avait surprise. Les coïncidences existaient, mais un doute s’était emparé d’elle. « J’ai foutrement aucune idée de la chute de cette histoire, mais je suis pas persuadée qu’elle sera particulièrement drôle. » « La chute, je crois que j’ai très peur de la connaître moi… » Parce que la chute risquait en effet d’être bien moins drôle si Maze venait lui confirmer l’identité de ses conquêtes. Greta l’avait laissée continuer avec les sourcils arqués, trop alcoolisée pour comprendre où elle voulait en venir. « Pourquoi est-ce que rien n’est jamais simple pour nous ? » A cette conclusion, Greta - qui avait laissé Maze terminer son récit dans l’espoir qu’elle vienne démentir le scénario qu’elle s’était fait dans la tête - s’était mise à s’agiter. « MAZE. L’anthropologue. Comment il s’appelle… » Son regard était venu se planter dans le sien parce qu’elle était convaincue qu’elle pourrait y lire ce qu’elle essayait de lui faire dire. Le métier n’était pas courant, Greta savait grâce à son entrevue catastrophique avec Juliet qu’Alfie Maslow était en Australie et les points étaient venus s’ajouter sur les i un peu trop rapidement dans son esprit. « MAZE. Si tu me dis que tu t’es tapée Sergio Gutiérrez, je te jure que je vais hurler extrêmement fort. »  Peut-être qu’elle fabulait, peut-être que le gin lui faisait entendre les mauvaises choses, pourtant, la liste évoquée semblait drôlement similaire à la liste des hommes ayant fait un passage dans sa vie. La tête de Maze, son air faussement désolé et la façon dont elle se mordait la lèvre inférieure ne la rassurait pas. « Putain. Je crois que je vais avoir pas mal de choses à te dire et qu’il va te falloir encore un peu d’alcool. »

« Moi je crois en toi G. »  Les problèmes des deux filles se réglaient à une vitesse impressionnante avec juste un petit coup de pouces des différentes bouteilles que la blonde avait à offrir. « On appellera ce plan : mission reconquête du cœur de Lucas. » Songeuse, elle avait répondu. « Ce serait bien plus simple si c’était toi que je devais conquérir. » Mais son regard extrêmement sérieux planté dans le sien n’avait rien changé, Greta n’avait pas réussi à faire croire à Maze à sa déclaration d’amour. Alors elle avait haussé les épaules et fixé un instant cette tâche qui en disait plus long sur l’état de leurs vies actuellement que n’importe quelle autre image. « Tu les as achetés où exactement ? » La question était sortie de nul part, la brune fixait à présent les verres sans que la blonde n’ait pu voir son visage changer de direction et toute cette incohérence faisait parfaitement sens dans l’esprit de Greta. « Je demanderais à mes parents, mais évite de les casser si tu veux pas faire baisser leur fortune d’un pourcentage non négligeable. » Le tapis était cher, les verres étaient chers, son chemisier était cher, tout était cher et c’est le prix qu’elle aurait payé pour que les gueules de bois n’existent pas.  « Ha non. Pour moi ça s’appelle la politesse et la capacité à feindre un rire gêné  pour que je ne me sente pas mal. Mais si tu veux j’écrirai la préface de ton prochain livre…ça c’est une bonne idée non ? Tu me verseras quel pourcentage des ventes ? » Elle s’était imaginé un instant la qualité du préface s’il était écrit à cet exact moment. « Je peux te payer en verre ? Genre, en verre le contenant, pas en alcool car sinon je pourrais déjà dire que je te verse un salaire plutôt raisonnable ? » Les filles continuaient à divaguer au fur et à mesure des verres d’alcool que Greta ne savait plus nommer et il suffisait que leurs deux regards vides ne se croisent pour qu’elles éclatent de rire. Pourtant, en une phrase - en une mauvaise blague, plutôt -, Maze lui avait fait reprendre ses esprits.

« Les chaussettes de l’archidu… » Oh dear god. « Non mais Greta, c’est pas une vraie blague qui existe…enfin si mais heu…c’est ma blague. Enfin sur ma vie. Enfin la blague c’est ma vie. Ma vie est une blague ? » Attrapant les épaules de son amie pour la secouer, Greta la regardait d’un air grave pour qu’elle reprenne ses esprits, elle devait avoir un semblant de lucidité pour continuer cette conversation.  « Alfie. Comme dans ce film avec Jude Law. Mais il ressemble pas à Jude Law. Enfin….non. Non il ressemble pas à Jude Law. Tu penses quoi de Jude Law ? » A travers des balbutiements difficilement perceptibles, Greta réussissait à attraper des pièces d’informations ici et là et le choc était réel. « T’as le DVD ? » « Bien sûr que j’ai le DVD parce que je vis encore dans les années 90, par contre, je crois que Carmine a le numéro de Jude.. MAZE. FOCUS. » Parce que si elles sortaient indemnes de cette conversation, elle lui obtiendrait le numéro de qui elle voulait. « Alors tu vas…heu…hurler j’imagine. » Plaquant ses mains sur son front, Greta avait demandé plus d’alcool pour lui expliquer - avec des mots simples pour qu’elle puisse suivre - la situation et avait fini par se lancer. « Tu te rappelles de cette soirée pour mes 18 ans? Ou t’étais pas venue d’ailleurs, et ça se dit meilleure amie… »  Évitant de justesse le coup qu’allait lui mettre Maze dans le bras, Greta avait lancé un sourire narquois avant de poursuivre son récit. « Bref. Cette soirée je me suis vengée en couchant avec un ami de mon père je t’avais raconté ça hin? » la voyant froncer les sourcils en tentant de se remémorer, une moue là faisant ressembler à un très célèbre meme d’une dame qui calcule, elle avait confirmé. « Si je t’ai raconté. Eh bah cet ami de mon père, c’était Sergio. » Son verre était vidé - incroyablement rapidement - mais Greta n’aurait pas été fâchée si elle avait craché sa gorgée tant le hasard était étrange. « Oui. J’ai eu la même réaction que toi quand j’ai vu … »  Et sans aucune forme de honte mais tout en taisant le mot, Greta avait baissé la tête vers son entrejambe en repensant à ce soir là. La blague n’avait pas semblé au goût d’une Maze dont la couleur avait viré au rouge vif. « Oh quoi, si on peut plus rire. » A moins que la couleur de son visage ne soit pas lié à la honte mais plutôt à l’euphorie et le degré d’alcool. De son côté, la blonde continuait de tiquer sur le même prénom, espérant qu’il s’agisse juste d’une coïncidence malheureuse. « Je te dis où j’ai acheté mes verres, je t’offre les même si tu veux mais à une condition. Me dis pas que tu t’es aussi tapée Alfie maslow… »  Cela faisait deux fois qu’elle proposait ses verres comme monnaie d’échange et cela faisait deux hommes commun sur leur liste - les calculs étaient extrêmement mauvais et ce même pour les littéraires qu’elles étaient.

Difficile de réaliser que Maze était arrivée quelques heures plus tôt dans un état de panique avancé parce que Greta l’avait appelée au secours. Au final, l’état dans lequel elles s’étaient mises en un temps record témoignait de leur capacité à se remonter le moral : Maze aurait réussi l’exploit et ce même sans alcool et cela aurait d’ailleurs probablement facilité leurs échanges. « Pas besoin, je suis déjà conquise. » Greta avait fixé Maze un moment long, très long, en songeant à s’il pouvait être envisageable qu’elles finissent ensemble avant de se souvenir de leur attirance très prononcée pour les membres des groupes de rock. « Depuis le temps qu’ils me connaissent, tu crois pas qu’ils m’ont ajoutée dans leur testament au même titre que Carmine et toi ? Je veux dire…ça me semblerait cohérent…et puis je mérite, non ? » L’idée n’était pas complètement incohérente et la fortune Sighbury permettrait de mettre bien plus de deux enfants à l’abri durant des décennies, pourtant, Greta restait consciente que leurs idées n’étaient pas forcément glorieuses lorsqu’elles avaient un peu trop bu. « Faudrait vérifier à l’occasion. Mais si t’as besoin d’argent, je suis là. Si t’as besoin de cacher un corps aussi. Bordel, qu’est ce que je t’aime. » Assez pour la laisser écrire le préface de son prochain livre pour de vrai, et ce même si ce serait assurément un texte qui la mettrait dans l’embarras pour l’éternité - elle ne connaissait que trop bien la brune. « Excellente idée ça. Deal. J’ai hâte de recevoir mon nouveau service. Et de le remplir. » Greta lui avait serré la main avec un air extrêmement solennel. Le tableau des deux amies complètement bourrées aurait été parfait si la blonde s’était mise à pleurer devant tant de plans sur la comètes mais l’heure était aux confidences et les sujets bien trop brûlants pour que l’écrivaine ne fasse pas de son mieux pour retrouver un peu de cohérence. « J’étais malade non ? » Whatever, la blonde avait de toute façon trouvé d’autres façons de s’occuper en attendant de fêter ses vingt ans, puis ses trente ans - cette machine ne s’arrêtait visiblement jamais - avec Maze et c’était justement là toute l’importance de cette conversation. « Putain. De. Merde. Quoi ???? » Les hochements de tête exagérément lents de Greta étaient venus confirmer qu’elle avait bien entendu. « J’arrive pas à me décider. Est-ce que cette coïncidence est incroyable ? Parfaitement dégueulasse ? Triste à en pleurer ? Dérangeante ? Exceptionnellement hilarante ? » C'était à elle de choisir. Posant sa main sur le menton de Maze pour lui refermer la bouche, elle n’avait pas pu s’empêcher d’ajouter une remarque à l’encontre de son ex amant. « J’en conclus qu’il se débrouillait déjà bien à l’époque ? » De quoi la laisser songeuse, mais le temps n'était pas à la nostalgie et Greta avait réalisé qu'elle n’avait pas posé LA question. « Oui j’ai pris un pied d’enfer mais Maze, quand est-ce que t’as couché avec toi… ? Et pourquoi ? Parce que c’est un sacré connard, pardon de le dire ? » A sa réaction, il était évident que le désaccord allait tomber là; sur leurs points de vue sur le mexicain et non pas sur le fait d’avoir toutes les deux partagé son lit. La blonde était arrivé à un tel point où chaque gorgée devenait difficile et ou elle continuait pourtant à en prendre à intervalles réguliers, les différentes confessions nécéssitant beaucoup de réconfort. « Adieu les verres alors. T’as aussi couché avec lui et je suis vouée à passer derrière toi jusqu’à la fin des temps ? » La gorgée de cette fois-ci avait été assez grande pour terminer le verre à moitié plein et Greta se félicitait d’être assise. Passant sa main sur son visage, elle avait répondu. « Pour le coup là j’adorerais passer derrière toi. »  Elle avait froncé les sourcils, bien peu sûre de la tournure de cette dernière phrase. « Enfin je veux dire avec Alfie. »  avait-elle précisé. « Enfin je fantasme sur Alfie depuis mon adolescence ? Et tu as couché avec ? » L’air désolé de Maze lui donnait une moue bien trop adorable pour que Greta lui en veuille réellement, pourtant, cette confidence là avait été extrêmement difficile à avaler. « J’arrive pas à te détester. YOU GO GIRL. » Et son tapis avait définitivement rendu son tablier, mis fin à sa carrière ou rendu l’âme parce qu’avec la force avec laquelle elle avait cogné son verre contre celui de Maze, l’alcool s’en était échappé pour créer une seconde tâche. « L’avantage c’est qu’avec la quantité d’alcool dessus, il va prendre feu comme du petit bois. » La pyromanie n’était pas un de ses défauts et elle irait au pressing le lendemain matin comme une personne normale, si elle réussissait à émerger avant que celui-ci ne ferme.