-Ç- a faisait quelques temps que tu n’étais pas sorti. Parce que tu n’avais pas les moyens et parce que tu t’acharnais un peu trop au travail ces derniers temps. Tu ne quittais l’hôpital plus que pour sortir ton chien. Alors, forcément t’as eu besoin de t’aérer l’esprit. L’occasion s’est présentée lorsqu’une amie t’a proposé de l’accompagner à une soirée. Alors pour une fois t’as accepté avec enthousiasme. Tu avais reconnu quelques têtes en arrivant. Et puis après une heure, tu les as remarqués, ses cheveux sont d’un rose étincelant. Tu n’es pas sur que la dernière fois que tu l’avais vu, il avait adopté cette teinture. Ça faisait plusieurs mois que tu n’avais pas croisé le chemin de Bellamy. Mais ce soir, comment aurais tu pu le louper, le flamant rose. Il dénotait au milieu d’un foule de classiques bruns et blonds. Cependant, tu attrapes ta bière pour t’éloigner un peu de lui. T’as pas forcément envie de lui parler ce soir -ou un autre d’ailleurs. T’as l’avantage de la sobriété, quoi que t’as ce jogging rouge bien voyant. Tu ne peux t’empêcher de garder une certaine distance entre vous, surveillant qu’une foule suffisante pour conserver ton anonymat vous sépare.
Tu termines ta bière en quelques minutes, préférant quitter la soirée rapidement. Il y a du monde. Et lorsque tu te retournes pour te diriger vers la sortie, ton épaule bouscule une main qui elle même tenait une bière. La bouteille se brise au sol, éparpillant ses éclats sur la plancher. En réaction à la scène, tu lèves les mains au niveau de tes épaules d’un air innocent, comme si tu n’y étais pour rien. Tu te permets même d’observer la fille face à toi d’un regard accusateur, reportant toute la faute sur elle, qui te collait d’un peu trop près. « C’est malin. » Tu lui lances avec ce sourire provocateur particulièrement agaçant. T’avais cette fâcheuse tendance à reporter entièrement la faute sur les autres. Un peu comme avec Bella -franchement, t’as toujours trouvé ce surnom ridicule, c’est sans doute pour ça que tu l'utilises. T’as jamais assumé ta part de responsabilité dans ses ennuis avec la police. Après tout, c’est lui qui avait proposé d’aller faire un tag sur ce mur -en réalité t’en es pas si sur. C’est lui qui n’avait pas couru assez vite pour déguerpir. Alors que franchement, face à une handicapé, il aurait pu mieux faire. Du coup, t’as eu aucun scrupule à le laisser gérer cette situation avec les collègues d’Adriana, filant en douce sans que personne n’ait remarqué ta présence. Et tu as simplement perdu contact avec lui, que tu te plais à dire. T’as juste ignoré ses messages, adoptant la méthode Reese. Et sincèrement, elle était drôlement efficace. Tu n’aurais pas cru qu’il aurait lâché l’affaire si facilement. Alors tu t’étais contenté de disparaitre de sa vie, comme tu le faisais souvent avec les personnes qui ne t’intéressent plus, ou à qui tu devais quelque chose. Tu l’avais fait pendant un an avec Alma avant de croiser de nouveau sa route, plusieurs mois avec Sergio. Alors t’espérais pouvoir en faire de même avec la cacatoès rosalbin.
Tu reportes ton attention sur la sortie et c’est à cet instant précis que tu croises le regard que Bellamy qui avait du être attiré par le bruit de la casse. Il était à deux mètres de toi et ne lâchait pas ses opales sombres des tiennes. « Oh. Bell. » Tu achoppes sur ton mot qui ne sort finalement pas, et tu gardes un instant ton regard planté dans le sien, sans dévier. Tes yeux sont fixes, fiers, n’éprouvant aucun remord. Tu fais comme si tu n’avais pas remarqué sa présence auparavant. « Bon allez je file. » Tu ne t’adresses même pas à l’axolotl, mais à la fille à qui tu as renversé la consommation. Et tu tentes non sans discrétion de faire quelques pas pour déguerpir d’ici.


 

-S- a réaction, tu ne t’y attends pas vraiment. Tu fronces doucement tes sourcils lorsqu’il sourit, peut être trop méfiant face à la naïveté de Bellamy. Il s’approche de toi, l’air innocent. Pas avec les mêmes traits angéliques que tu pouvais parfois faussement arborer, non, il respirait la sincérité. Alors tu ne bouges pas, te contentes de l’observer, sceptique. « Jcrois que t'as perdu mon numéro » Qu’il répond poliment. Tu restes un instant interdit, le jaugeant de ton regard méfiant. T’as trop l’habitude qu’on t’en veuille, alors tu ne sais pas comment interpréter ses mots. Il a pourtant un visage si gentil, Bellamy. Il a cette bouille de mec qui ne pourrait jamais faire de mal à qui que ce soit. « C’est possible. » Que tu réponds de façon totalement détachée, inclinant légèrement la tête, cherchant à comprendre où il voulait en venir exactement. C’était un reproche? Ton interprétation rentrait en conflit avec ses traits solaires. Tu n’avais jamais cherché à le recontacter, ni à répondre à ses messages. Tu n’as simplement plus donné de nouvelles. Alors, son numéro, même si tu l’avais encore -tu ne faisais jamais ton tri dans ton téléphone-, il était depuis bien longtemps bien loin dans la liste de tes conversations, t’as même ta mère qui était passé devant lui. Pourtant tu ne lui parlais que très rarement, et tu évitais toujours la discussion, sachant pertinemment qu’elle finira en dispute. « Bah attends, depuis le temps qu'on s'est pas vus » Et c’était voulu. L’ignorance était devenue volontaire, autant que l’éloignement. Si tu savais habituellement rapidement te faire remarquer, devenir le centre de l’attention et t’en délecter, tu savais aussi soudainement disparaître des radars comme si tu n’avais jamais existé. Grace, ou à cause, de tes dettes, tu savais maintenant parfaitement faire profil bas, et avais appris à esquiver un certain temps. Jusqu’à ce que tu brilles de nouveau par inadvertance, le naturel ne pouvant être contenu trop longtemps. « Ouais. J’t’ai manqué? » Que tu te permets avec un certain toupet. Tu te doutais bien que ce n’était pas le cas, et qu’au contraire, te voir sortir de sa vie était sans doute une bonne chose. Tu n’étais pas quelqu’un de fiable et tu avais toujours pensé à toi avant les autres. C’était sans doute la pire caractéristique que l’on pouvait trouver chez un médecin, et sans doute que ta place, tu aurais du la laisser à quelqu’un de plus emphatique que toi. Mais tu t’y accrochais fermement, parce qu’encore une fois, tu ne pensais qu’à ta gueule. Les autres s’adapteront à toi.
« En plus il te faut une nouvelle bière. » Tu la sens pas cette histoire. Tu ne comprends pas pourquoi il insistait tant pour que tu restes alors qu’il n’avait pas forcément poussé pour te revoir. Mais ce soir, il semblait avoir envie de discuter. Tu ne sais cependant pas encore exactement de quoi. Tu aurais bien pensé à ce soir où tu l’avais lâché sans remord face aux flics. Mais sa bienveillance te fait douter. « Tu payes ta tournée? » Tu réponds d’un rictus provocateur, un sourcil arqué, la phrase faisant écho à l’ardoise que tu l’avais laissé réglé. Parfois, tu ferais mieux de fermer ta gueule. Pour ta défense, on pourrait dire que tu te complais dans l’humour noir, celui qui fait grincer des dents, mais t’as juste un humour de merde, provocateur né. Tu ne t’en privais pas avec Bellamy. Plus tes interlocuteurs se montraient compréhensifs et doux, tu leur marchais sur les pieds jusqu’à les piétiner. T’es comme un enfant qui cherche sans cesse les limites, tu tâtonnes, pousses à bout et profites de la moindre faille. « Qu’est ce que tu deviens? » Que tu lui lances, rentrant dans son jeu. Faire comme si de rien était, tu savais bien le faire. Et tu ne te gênes pas pour l’imiter. Ça t’arrangeait, alors s’il pouvait simplement continuer dans cette direction. Ce n’est pas pour autant que tu chercheras à renouer le même lien que vous aviez, mais faire l’hypocrite le temps d’une soirée, ce n’était pas un problème.


 

-C- ’était déconcertant, ce soir. Tu ne savais pas ce que pensais Bellamy, s’il avait des rancoeurs ou s’il n’y portait aucune importance. Il avait simplement ce sourire naïf qui lui collait trop souvent aux lèvres. « C’est con. »  La conversation était lunaire, d’un froid anormal quand les mots auraient pu être ceux de deux vieux amis qui se retrouvent. Pourtant, t’étais sur la réserve, et tu ne faisais que dévisager Bellamy dans l’espoir de décrypter ses pensées. « Ouais. » Quel étrange échange. Un petit silence s’amorce, et tu ne le laisses pas s’installer bien longtemps puisque tu lui fais part de la volonté de t’éclipser de la soirée. Et lorsqu’il te postpose de rester, tu ne peux t’empêcher d’amorcer un jeu sur un terrain bien glissant, agitateur dans l’âme. « Peut-être bien. » Vraiment. De plus en plus insolite cette conversation. Et le problème, c’est que tu ne savais toujours pas comment interpréter ses phrases. Tu avais rarement des réaction aussi calmes face à tes trahisons, et tu étais plutôt habitué aux crises de nerfs et aux regards haineux. Et là, tu ne saurais pas dire quelle émotion se logeait dans les opales de Bellamy.
Et comme tu ne sens pas de colère franche envers toi, tu pousses le vice, tu provoques toujours un peu plus, tâtonnes pour trouver les limites. Tu lui proposes de te payer ta tournée, quand tu savais pertinemment que tu lui en devais plus d’une. « Ben jcrois que c’est toi qui m’en dois plusieurs. » Et tout ce que ça provoque chez lui, c’est un sourire, baignant dans une bienveillance hors norme -ou de l’hypocrisie, tu n’en sais trop rien. T’as du mal à concevoir qu’il y avait des personnes aussi sereines et pacifistes que Bellamy. Alors forcément, tu trouves ça louche. Tu te demandes ce qu’il prépare, quand il comptait passer aux représailles. « Oh maintenant il doit y avoir prescription. Non? » Que tu rétorques le sourire sournois au bord des lèvres.

Il se dirige vers la cuisine, et son regard insistant ne te laisse pas vraiment le choix. Il veut que tu le suives. Alors tu le suis, te faufilant entre les personnes qui formait une foule plus dense que tu n’aurais pensé. Il fallait croire qu’il y avait la queue pour aller se servir dans le frigo. Tu tentes une banalité, lui demandes de ses nouvelles sans trop être attentif à la réponse. « Oh la routine… Et toi ? T'as trouvé d'autres personnes a qui laisser tes additions ? » Qu’il répond avec douceur. Il attrape une bière, qu’il décapsule aisément puis te la tend. Tu t’en empares, tout en haussant tes épaules. « Ne t’en fais pas pour ça, je trouve toujours. » Que tu rétorques d'un ton ironique. Pourtant, elle était si vraie, cette phrase. Bien plus que des additions, tu laissais de véritables dettes monstrueuses, que tu tentais de rembourser vainement. Tu empruntais, si on pouvait encore appeler ça un emprunt. A ce stade, ça devenait presque du vol. Alors laisser quelques ardoises, ce n’était pas grand chose à ton niveau. C’était presque si tu pouvais t’en réjouir. Parce que t’as beau gagner ta vie, tu dois régulièrement l’argent à ton entourage. Tu sais pas le gérer ton fric, autant que tu ne sais pas gérer ta vie. « Aux retrouvailles. » Qu’il lance en tendant sa bouteille pour trinquer, ce que tu fais sans attendre. « Comme tu dis. » Tu sais pourtant que tu ne chercheras pas à reprendre plus contact que ça. Tu n’étais pas plus attaché à lui que ça, il fallait croire. Ou tu t’étais habitué à modifier ton entourage du jour au lendemain, sans remord. Tu portes le goulot à tes lèvres, at avales deux ou trois gorgées qui pétillent sur ton palais. « Alors, les flics ont été sympa avec toi? » Tu demandes des mois après l’incident, quand tu avais du t’en inquiéter bien avant. Mais ce n’est qu’un curiosité mal placée. Tu n’avais jamais su comment cette histoire s’était terminée, et n’avais pas cherché non plus à l’époque. Alors maintenant qu’il était face à toi, autant savoir. Tu n’avais de toute façon pas un grand panel de sujet à aborder avec lui, et visiblement, c’était réciproque, puisqu’il ne s’était pas étendu sur sa vie non plus.


 

-L- e rire de Bellamy sonne si vrai. Et tu restes pourtant si méfiant. Parce que si Bellamy a toujours eu l’air aussi doux et inoffensif qu’un agneau, tu as appris cette année à ne pas toujours te fier aux apparences. « J’avoue. »  Tu te contentes d’un sourire amusé, sans doute aux consonances un peu fausses aussi. Bellamy, il est étrange. Il a l’air de ne pas t’en vouloir, au premier abord. Et t’as du mal à comprendre comment il pouvait se montrer si compréhensif et si amical. T’es si loin de lui et cette mentalité bienveillante et apaisée. Assez pour que tu restes pris de doutes. Tu cherches le moindre signe d’un traquenard, d’un piège qu’il pourrait te tendre en guise de retour de bâton.
«  C’est un peu comme un talent en fait, j’espère que tu l’as mis dans ton cv. » Tu ricanes, gardant toujours la même ligne directrice. Pour l’instant, tu rentres dans son jeu et tu t’en amuses. Tu y restes sagement, pour voir où ça vous mènera. « Non, ça marche que quand l’autre personne ne connait pas ce talent. » Et puis tu poses un regard insistant sur le danseur, pour que tes lèvres s’étirent avec sarcasme. « Enfin en général. » Parce que t’es pas tout à fait sur que tu ne pourrais pas lui refaire le coup. Tu n’es seulement pas très motivé pour t’investir suffisamment pour tenter de renouveler l’expérience, pour voir à quel point Bell était naïf ou s’il l’était réellement, en réalité.

Puis vous trinquez, et de l’extérieur, personne ne ressentait cette pression, dans une conversation qui semblait si banale. C’était comme deux amis qui passaient une bonne soirée. Tu n’es même pas sur que Bellamy la ressente, cette tension. T’es peut être le seul à te monter la tête, à chercher des problèmes là où il n’y en a peut être plus. « Boarf, ça aurait pu être pire, » Tu arques un sourcil, dans un premier temps silencieux. Tu n’avais rien de plus à ajouter, alors tu te contentais d’écouter ses commentaires. « Tsavais qu’on risquait de la prison ? » Non. T’en avais aucune idée. Tu n’as jamais réfléchi aux conséquences de tes actes. T’as toujours agi sans y songer en toute franchise. Et t’as toujours eu une chance déconcertante, si bien que tu évitais toujours les lourdes sanctions. « Et quoi, t’as fait de la prison? » Tu demandes non sans une pointe de moquerie. Tu le voyais très mal passer ne serait ce qu’une nuit dans ce genre d’endroit. Il se ferait bouffer, Bellamy. « Ya fallut que j'efface ce qu'on avait fait aussi, jtrouve que c'est ça le plus dommage, » Tu prends un air faussement déçu. En réalité, ça n’avait rien de grave. C’était l’acte, qui t’avait le plus plu, et non pas votre sens artistique assez douteux en ce qui te concerne. « Quoi, c’est pour ça que je ne vois plus ce chef d’oeuvre? » Tu fais comme si tu étais outré de cette perte, et le manque de franchise est  plutôt flagrant. Tu t’en foutais. Et il pouvait le sentir, puisque tu ne t’en caches pas.  « En vrai t'as déjà eu des problèmes ou t'y as toujours échappé ? » Tu restes silencieux quelques secondes, surpris de la question. Etrangement, elle ne sonne pas comme un reproche, en tout cas, pas uniquement de cette manière. Alors t’y réfléchis, parce que la réponse n’est pas évidente. T’as déjà eu affaire aux flics, plusieurs fois, et souvent étant mineur. « Hm, ma mère m’a engueulé une ou deux fois oui. » Tu ironises d’un petit sourire. Oh c’était bien plus que ça. Tu passais ton temps à te prendre la tête avec elle, jusqu’à ce que tu déménages à Brisbane. « Quoi, c’était la première fois que tu te faisais interpeler par des flics? Même en étant jeune? » Tu demandes ça comme si c’était une chose étonnante. Pourtant, ce n’était pas la norme, mais toi, tu considères que tu es la norme. « Ou alors tu as toujours été si sage? » Et venant de ta bouche, ça sonne comme un reproche.



 

-L- e tag réalisé n’avait rien d’esthétique. Le sens très peu artistique, tes dessins ressemblaient souvent à des bâtons plus ou moins droits. Alors lorsque ceux ci étaient réalisés à l’aide d’une bombe, la beauté n’avait plus rien de subjectif. C’était tout simplement laid. Les coulures par manque de pratiques étaient nombreuses, empirant tes capacités déjà faibles à réaliser un graphe. « Et ouais » Qu’il répond dans un haussement d’épaule, tandis que tu prends une moue faussement déçue. C’était exagéré, puisque tu n’avais aucune affection pour ce dessin raté. Ça t’amusait simplement de voir cette horreur au milieu de la ville. « Ya un truc qu'ils étaient sûrs quand ils m'ont demandé mon nom c'est que j'étais pas Banksy. » Tu souffles un rire à peine perceptible, les lèvres amusées de sa légèreté. Ce n’était pas pour le côté artistique mais plutôt pour le destructeur que tu avais tenté l’expérience. Un brin éméché, tu avais même trouvé l’idée carrément excellente quand elle avait été mentionnée. Et même pendant la réalisation tu persistais à croire qu’il s’agissait d’une bonne idée. Même aujourd’hui d’ailleurs.

« Mais nan, c’est la troisième fois là. » Il avait pris le temps de mentionner le chiffre exacte de bavures réalisées. Comme si ça avait de l’importance, et que tu étais sensé t’impressionner de ce qui semble avoir titillé sa fierté. Pourtant, c’était déjà beaucoup plus que ce que tu pensais. Toi qui le soupçonnais d’être en enfant modèle. Maintenant tu sais qu’il ne l’est pas complètement. « Hm, félicitations. » Tu souffles d’un large sourire goguenard. Tu ne pouvais pas ne pas rebondir sur ce détail que tu soulignes trop fort. Tu prenais un malin plaisir à railler, diminuer, moquer. Comme si dénigrer devenait un besoin, pour soulager ton ego, sentir et prouver que tu avais le dessus sur une situation qui pourtant était des plus légères. T’as une suffisance prétentieuse. Et peu importe ce qu’il aurait répondu, tu sais d’avance que tu en aurais profité pour te moquer. « Mais bon, c’était au lycée, ça passe mieux qu’à notre grand âge. » Un sourire en coin se dessine sur tes lèvres. Tu t’étais pourtant calmé, depuis ton adolescence. Tu faisais moins d’excès puisque tu étais sensé être responsable et puisque tu ne pouvais décemment pas fuguer de ton propre appartement, ni continuer la majorité de tes gamineries. Mais tu continuais parfois -peut être trop souvent- à déroger aux règles, par pur esprit de contradiction. Tu provoquais sans cesse, parce que ça t’amuse, ça en devient presque vital. Sinon tu te ferais bien trop chier. « C’est sûr qu’ils étaient plus cléments. » C’est pour ca qu’il fallait être plus agile pour éviter les flics. Ou peut être aurait ce été plus raisonnable de laisser ce mur en paix. Mais ça ne t’a pas effleuré l’esprit, ça. « Enfin, ils l’ont été aussi du coup, avec toi. » Que tu fais remarquer. Parce que selon ses dires, il aurait pu faire de la prison. Alors finalement, ça va. « Hé tu te serais trop bien entendu avec mes potes du lycée ! » Tu arques un sourcil intrigué. Bien sûr, tu étais une crème, tu t’entendais avec tout le monde. C’est ce que tu aimais croire, car lorsqu’un conflit éclatait, le con c’était toujours l’autre. Toi, t’étais juste normal. « Pourquoi? » Parce qu’il semblait y avoir une raison à cette bonne entente vraisemblablement si évidente. Et tu serais curieux de savoir laquelle. Et de savoir si c’était vexant. T’es un brin susceptible, pour ajouter une qualité de plus à la longue liste. « Ils ont pas aussi bien fini que toi par contre, c'est toi qui fait médecine nan ? » Tu hausses tes épaules désinvoltes, comme si ce n’était rien. Pourtant tu penses bien le contraire. « Chirurgien. Mais oui. » Tu aimais corriger ce détail. Tu n’étais pas simplement médecin mais tu magnais le bistouri. Et ça faisait une large différence avec le généraliste coincé dans son cabinet. Et ça permettait de flatter un peu plus ton égo. « Il parait qu’il faut de tout dans un monde. Y’en a juste certain avec plus d’ambition que d’autres. » Tu ne peux t’empêcher de juger. Et ceux qui ne parvenaient pas à gravir les échelons étaient simplement des branleurs. Tu ne saurais plus dire où se situait Bellamy. Tu n’avais pas enregistré l’information quant à son métier, sans doute assez peu importante. Peut être parce que tu ne comprenais pas grand chose à ce qu’il faisait. « Enfin voilà quoi. » Tu souffles tout en regardant ton téléphone. « J’vais te laisser hein. » Que tu finis par lâcher, au moment où tu détaches tes yeux de ton écran.