when the death come knocking
Raelyn Blackwell & @Millie Butcher

« Ça a intérêt à être la bonne direction parce que je fais pas le chemin dans le sens contraire. » - « Tu fais ce que tu veux, ça m’importe peu. »

C’est la la dernière phrase - et le dernier son prononcé par un être humain - que le jeune homme dont j’ignore toujours le nom entend. Puisqu’une seconde après, la coque du navire se troue sous lui et il chute dans les eaux sombres du pacifique. Choquée et horrifiée, je me plaque contre un mur espérant ainsi ne pas subir le même sort. J’oublie de respirer, je n’ose émettre le moindre son alors que j’entends des grognements bestiaux qui se mêlent aux hurlements sinistres du jeune homme. J’ai déjà vécu des horreurs mais je ne m’y suis jamais habituée : c’est trop pour moi. Je me plie en deux et rend le contenu de mon estomac à quelques centimètres de mes chaussures. Il me faut plusieurs minutes pour réussir à me calmer, à ne pas sombrer dans la panique et me remettre en marche. L’adrénaline reprend le dessus sur la terreur, et j’avance jusqu’à la salle de communication.

Elle n’est pas vide et, méfiante, je braque la lampe torche sur la jeune femme qui se trouve à l’intérieur. « Montre moi tes yeux. » Elle est de dos, et je suis terrorisée à l’idée qu’elle soit elle aussi possédée. Je n’ai pas envie qu’elle appelle une horde de créatures sur moi pour que je connaisse le même sort que ce malheureux. « Tes yeux, montre les moi ! » Elle se retourne enfin, et je pousse un soupir de soulagement. « Désolée, je devais être sûre. » J’observe la pièce autour de moi. Ici, les moyens de communications n’ont rien d’une simple radio et tout a l’air bien compliqué. « Tu es ici pour envoyer un message de S.O.S. ? » Comment est-elle arrivée là ? Existe-t-il un autre passage secret ?

Des bruits sombres et inquiétants se faisaient entendre dans son dos, mais Millie n’avait pas le temps de se concentrer sur ce type de détails pour le moment. Les panneaux de communication s’élevaient enfin devant ses yeux, et elle devait trouver au plus vite le moyen d’établir une liaison avec la côte avant que le bateau entier finisse dans les abysses.

« Montre moi tes yeux. » Elle avait à peine eu le temps de commencer à lire les étiques accrochées aux boutons qu’une voix s’éleva derrière elle. Fuck: elle n’avait pas prévu d’être ralentie dans le processus. « Tes yeux, montre les moi ! » Oh, elle avait entendu les avertissements du capitaine clairement et savait pertinemment pourquoi la voix derrière elle lui demandait d’agir de la sorte. « Deux secondes, deux secondes ! » Elle n’aimait pas être pressée de la sorte, plutôt habituée à donner des ordres qu’à en recevoir. Finalement, Millie se tourna vers la blonde qui braquait sa lumière dans sa direction. « Satisfaite ? » - « Désolée, je devais être sûre. » - « Je sais, mais pas la peine de me crier dessus comme ça. » Oh, en plus de pas vraiment aimer être traitée de la sorte, la jeune femme n’était pas dans le meilleur des jours - mais qui l’était réellement ? - et se retrouvait avec un comportement presque exécrable; surtout l’attitude de celle qui voulait s’en sortir, aussi.

« Tu es ici pour envoyer un message de S.O.S. ? » Elle hocha vivement la tête, et avec des gestes lents, se tourna de nouveau vers le panneau de communication. « Ouais. » Elle soupira. « Mais c’est pas mon domaine et je comprends pas grand chose à comment tout ça fonctionne. Je sais juste qu’il faut qu’on se dépêche de faire quelque-chose… » Sinon, ils allaient tous finir par devenir fous à lier et par se jeter dans l’océan en guise de dernier espoir. Rien que d’imaginer cette scène donnait des frissons à la Butcher. « Des connaissances dans le domaine de ton côté, par hasard ? »

when the death come knocking
Raelyn Blackwell & @Millie Butcher

« Satisfaite ? » Je hoche la tête et ma respiration se ralentit. La fille que j’ai en face de moi a l’air complètement humaine. Pas d’iris blanc, jaune, ou d’attitude de quelqu’un de possédé. Je n’ai pas la prétention d’être capable de les reconnaître à coup sûr, mais jusque-là, ceux que j’ai croisé ne savaient pas faire semblant. Ils n’étaient plus que… Des bêtes sauvages. « Je sais, mais pas la peine de me crier dessus comme ça. » - « Je viens de voir un garçon tomber dans l’eau et être déchiqueté par ces choses. J’ai pas le temps de penser à la délicatesse. » Je ne connaissais pas le jeune homme et je ne suis pas attristée par sa mort. Je n’ai pas assez d’empathie pour ça et, pour être honnête, je suis focalisée sur ma propre survie. Non, je suis tout simplement terrifiée au-delà de l’imaginable.

« Ouais. Mais c’est pas mon domaine et je comprends pas grand chose à comment tout ça fonctionne. Je sais juste qu’il faut qu’on se dépêche de faire quelque-chose… » - « Merde. » Peut-être que c’était le cas du malheureux, mais je suppose qu’à présent, on ne le saura jamais. Je m’approche de la table de commande, touchant quelques boutons un peu au hasard, je dois bien l’admettre. « Des connaissances dans le domaine de ton côté, par hasard ? » - « Non. Je sors à peine du lycée. » Je suis fraîchement diplômée de l’an dernier et je doute que les études de commerce que je m’apprêtais à débuter auraient été d’une franche utilité, de toute façon. Que je vais débuter, si je survis, rectification. Je continue à toucher tous les boutons et sans que je sache s’il s’agit d’une question de timing ou de quelque chose que j’ai fait, un bruit strident retentit. Des bips, non réguliers et qui alternent longs et courts. Je fronce les sourcils, n’ayant jamais été confrontée à ce type de chose. « Qu’est-ce que c’est que ça ? » Je tente d’attraper le microphone pour parler dedans, mais rien ne se passe.

« Je viens de voir un garçon tomber dans l’eau et être déchiqueté par ces choses. J’ai pas le temps de penser à la délicatesse. » Millie eut un petit rire. « T’es pas la seule qui a vu des horreurs aujourd’hui, calme toi princesse. » Parce-qu’ils étaient tous - littéralement - dans le même bateau désormais et que ce genre de commentaire n’allait pas leur permettre d’avancer plus vite. Le mieux était de se concentrer sur les choses factuelles et surtout de faire en sorte de garder les vivants et les gens pas encore cinglés du même côté de la barrière.

Tout ceci était bien beau, cependant, mais si elles ne trouvaient pas un moyen de faire fonctionner le panneau de contrôle des communications, elles n’iraient pas plus loin dans l’aventure. « Merde. » - « Comme tu dis. » C’était pas le pied de rien comprendre à ce qui se passait sous son nez, c’était bien vrai. « Non. Je sors à peine du lycée. » C’était bien sa veine: la blonde était en réalité encore qu’une gamine. Un côté de Millie eut mal au coeur de savoir que des personnes plus jeunes qu’elle se trouvaient ici à se débattre de la sorte; c’était normalement aux adultes d’agir de la sorte. Cependant, ces derniers n’étaient pas des plus fiables, puisque la malédiction pouvait toucher tout le monde et il valait mieux apprendre à se débrouiller coute que coute.

« Qu’est-ce que c’est que ça ? » La jeune fille était peut-être encore jeune, mais elle était débrouillarde et téméraire: c’était ça dont ils avaient tous besoin. « Chut, écoute. » Les bips qui se faisaient entendre paraissaient sans queue ni tête, mais ce n’était en aucun cas le cas si on prêtait une oreille un peu plus attentive. « On dirait… Du morse ? Vite, faut trouver de quoi noter ! » Après un tour sur elle même, elle tomba sur un bloc-note et un crayon, abandonné par on ne savait qui et fonctionnant toujours par miracle. « Note pendant que je te dicte, pour pas que je perde trop le fil des bruits. » Millie fronça les sourcils pour se concentrer. « On dirait… Comme des indications de lancement d’un mécanisme ? »

when the death come knocking
Raelyn Blackwell & @Millie Butcher

« T’es pas la seule qui a vu des horreurs aujourd’hui, calme toi princesse. »
« Connasse. » Direct, efficace, classe (non). La politesse n’a plus la moindre importance.

« Chut, écoute. On dirait… Du morse ? Vite, faut trouver de quoi noter ! » La machine que nous avons sous les yeux a l’air bien compliquée et j’ignore ce qui l’a déclenché. Ce que je sais en revanche, c’est que la jeune femme a l’air de saisir quelque chose qui m’échappe. Du morse ? Je n’ai entendu Amos en parler qu’à quelques reprises, lorsqu’il me parle de son enfance avec trois frères ou bien de son passage chez les scouts. En revanches, je suis bien incapable de le traduire. Je regarde autour de moi, mais la brune est plus rapide pour trouver un bloc note que moi. « Note pendant que je te dicte, pour pas que je perde trop le fil des bruits. » Je hoche la tête, avant de crayonner sur le calepin qu’elle me tend. Pour moi, ces points et ces traits n’ont pas la moindre signification mais je m’exécute, mettant ma fierté au placard. Elle n’a plus lieu d’être puisque j’ai envie de vivre et que, au fond, je suis terrifiée. « On dirait… Comme des indications de lancement d’un mécanisme ? » - « Tu sais lire le morse ? » Je lui jette un regard en coin, espérant qu’il s’agit d’autre chose que d’une supposition. « Le capitaine a certainement un dictionnaire dans sa cabine. Ou même ici, ce serait étrange qu’il n’y en ait pas. » Je regarde autour de moi, et je mets enfin la main sur un vieux grimoire. Bingo : à la fin se trouve une table de traduction du morse. « Comment on sait où sont les espaces entre les lettres ? » A défaut d’avoir la réponse, je tente de traduire chaque lettre. Je trouve un message terrible, une menace qui nous enjoint à nouveau à chercher le crâne de cette fichue créature. « C’est une blague ? » Les communications sont foutues ? Piratées ? « La cale ? c’est là bas qu’il faut aller ? »

« Connasse. » Direct, efficace - un sourire se fit voir l’espace d’un instant sur les lèvres de Millie, avant qu’elle ne reprenne son plus grand sérieux. Elles étaient dans une situation de vie ou de mort, et n’avait pas le temps pour ce genre de choses.

Surtout alors que la machine sous leurs yeux commençaient à émettre des bruits dans tous les sens et qu’elles se devaient de ne pas en perdre une miette. L’information capitale à la survie de tous pouvait se trouver quelque part à travers ce code, et si tout reposait sur leurs épaules, elles n’avaient pas le temps de se chamailler. « Tu sais lire le morse ? » Millie ouvrit la bouche pour finalement la refermer, ne sachant trop que répondre à cette question. Effectivement, elle savait lire le morse mais le problème ne résidait pas là: ce qu’elle lisait à travers les mots se dessinant désormais sur le papier n’étaient pas plaisants à découvrir. La blonde à ses côtés n’attendit cependant pas qu’elle réagisse pour enchainer sur le plan de base. « Le capitaine a certainement un dictionnaire dans sa cabine. Ou même ici, ce serait étrange qu’il n’y en ait pas. »

« Comment on sait où sont les espaces entre les lettres ? » Silence radio, encore une fois, de la part de Millie. Oh, elles devaient se dépêcher mais elles n’étaient pas à une minute près: au moins, l’autre jeune fille resterait dans l’ignorance encore un peu, et c’était là un mal pour un maigre bien à ses yeux. « C’est une blague ? La cale ? c’est là bas qu’il faut aller ? » - « C’est là-bas qu’il est caché plutôt. » Elle retrouvait enfin la parole. « Y’a une ou deux erreur dans ta traduction, ça dit que c’est là-bas qu’il a terminé sa course. Le mot parle du crâne, pas réellement de ce qu’on doit faire. » Elle soupira, se laissant glisser contre le mur en bois de la salle. « Je pensais vraiment qu’il aurait caché la clef pour sortir d’un merdier pareil ici, mais il avait déjà du perdre la boule avant même que la malédiction frappe. » Si son père, ce cher capitaine de navire, avait misé sur la découverte du crâne en cas de gros pépin et sur rien d’autre, c’est qu’il n’était déjà plus sain d’esprit en quittant la terre ferme. Pourtant, Millie savait que la malédiction était vraie: elle l’avait vu agir de bien trop près. « Si y’a pas d’autre clef que ce mot ici, j’ai bien peur qu’on doive se rendre à la cale, oui. »

when the death come knocking
Raelyn Blackwell & @Millie Butcher

« Y’a une ou deux erreurs dans ta traduction, ça dit que c’est là-bas qu’il a terminé sa course. Le mot parle du crâne, pas réellement de ce qu’on doit faire. » Y’a une ou deux erreurs dans ta traduction gna gna gna. Personne ne dit à Raelyn Blackwell qu’elle a fait une erreur. Personne. Pourtant, je me tais et garde mes dents scellées puisque nous n’avons pas le temps de nous chamailler pour des bêtises de ce genre. Je respire un grand coup, avant d’écouter la théorie de la brune. « Faut le trouver, c’est ce qu’a dit le capitaine pendant son discours. T’étais pas là ? » Il me semblait pourtant que tous les passagers avaient été réunis sur le pont pour l’occasion. Pour nous piéger. Pour nous montrer ce qui nous attend en cas d’échec. « Je pensais vraiment qu’il aurait caché la clef pour sortir d’un merdier pareil ici, mais il avait déjà du perdre la boule avant même que la malédiction frappe. » - « De qui tu parles ? » Je fais un pas en arrière, avant de la regarder de haut en bas. « Si y’a pas d’autre clef que ce mot ici, j’ai bien peur qu’on doive se rendre à la cale, oui. » - « Tu connais le capitaine ? » N’est-ce pas lui qui a perdu la boule ? N’est-il pas la cause du déchaînement de ces créatures des fonds marins ? Que ne me dit-elle pas ? Est-elle vraiment de mon côté, de celui des humains qui veulent s’enfuir et échapper à cette tragédie.

D’instinct et par méfiance, je recule de quelques pas de plus. « M’approche pas. » Je ne sais plus à qui me fier et sans doute suis-je rendue folle par toutes les horreurs que je viens de voir et qui m’ont traumatisée. Je sors de la pièce, en faisant attention sur quoi je marche.

Sauf qu’une planche craque et j’ai à peine le temps de baisser les yeux que le bâteau s’ouvre sous mes pieds et que l’Océan apparaît. Je n’ai que le temps de hurler, alors que les créatures terrifiantes qui ont attaqué le malheureux inconnu s’en prennent à moi. Au moins, c’est rapide : la première m’arrache la tête et je meurs sous le coup, dévorée par ce monstre que je pensais réservé aux histoires que l’on raconte pour terroriser les enfants.

« Faut le trouver, c’est ce qu’a dit le capitaine pendant son discours. T’étais pas là ? » A dire vrai, non, elle n’était pas sur le pont au moment de l’annonce; elle avait eu pour l’occasion obtenu un passe-droit et avait pu rester dans sa cabine, alors que le reste de l’embarcation s’apprêtait à être mis au courant des misères dans lesquelles ils plongeaient tous. Le capitaine avait mis au courant la jeune femme avant les autres, si bien que c’était d’effroi et tentant de déjà trouver une solution qu’elle était venue se réfugier, via son propre passage privé, dans ce maudit fond de bateau. Elle regrettait maintenant de ne pas s’être rendue dans la salle de réception comme les autres, pour se rendre plus utile qu’ici où elle n’avait pas plus d’informations récoltées. « De qui tu parles ? » - « Du capitaine. » - « Tu connais le capitaine ? » Et si Millie s’apprêtait à répondre du tac-au-tac, elle se rendit compte qu’une certaine méfiance s’était glissée dans le ton employé par la jeune fille à ses côtés. Alors, plutôt que de garder son regard sur le papier contenant le message en morse, elle tourna ses prunelles vers l’autre demoiselle.

Et effectivement, elle était de nouveau méfiante envers elle - ce qui fit froncer les sourcils de la brune. « Ca pose un problème si c’est le cas ? » Quoi, cela faisait d’elle une ennemie désormais, c’était ça l’histoire ? Si elle connaissait le capitaine, le responsable de touts ces horreurs, elle ne pouvait se trouver du bon côté de l’histoire ? « M’approche pas. » - « Je vais pas te bouffer, si c’est ça dont t’as peur. » Elle avait vu la folie dans le regard de son paternel: ce n’était pas son cas présentement, elle était en plein contrôle de ses capacités. Elle ne savait pas combien de temps cela allait durer, mais tant que ça persistait, c’était le principal.

Millie aurait bien voulu débattre un instant de plus avec la blondinette, cependant la méfiance de cette dernière l’avait forcé à faire un battre en retrait - et à faire un pas en arrière de trop. « Non ! » Millie eut à peine le temps de tendre une main en avant que déjà, l’autre fille tombait à travers les planches qui avaient cédé sous ses pieds. Il ne fallait pas être un génie pour comprendre que ce hurlement, auquel on avait coupé court, ne s’était pas éternisé puisque les monstres de mers guettaient la moindre nouvelle proie à se mettre sous la dent. Elle aurait pu se pencher par dessus le trou béant, celui qui semblait s’en venir depuis le bout d’un des deux couloirs d’accès - celui par lequel la blonde était arrivée. Le fond du bateau se dérobait sous leurs pieds, emportant tout sur son chemin. « Bord… » Millie s’était mise à courir dans le sens opposé, mais ses efforts furent vains: elle se fit happer la seconde suivante à son tour, n’ayant pas l’occasion de revoir une fois la lumière du jour avant les ténèbres éternelles.