Alma appréciait réellement le luxe de cette croisière depuis le départ. Elle était ravie de partager ce moment avec son mari, et même s'il avait disparu à plusieurs reprises sans lui donner trop d'explications, et que son humeur était loin d'être au beau fixe, elle avait largement trouvé son compte dans ces vacances avec lui. Elle espérait que le dîner du jour réussirait à lui donner le sourire et à le lui faire garder pour de bon, et c'est dans cet objectif qu'elle s'était apprêtée pour lui plaire, pour que rien dans cette soirée ne vienne gâcher leur instant. La longue robe qu'elle avait enfilée pour assister au dîner du soir était somptueuse, à l'instar de la décoration de la salle de réception. Les mets servis étaient délicieux et la brune appréciait largement son repas, quoi qu'elle aurait voulu que Winston soit un peu plus bavard et avenant. Mais elle avait décidé de ne pas lui faire de reproches, persuadée qu'il avait d'autres choses à penser, qu'être bienveillante et patiente était pour l'instant la meilleure chose à faire pour l'aider. Et elle aurait pu continuer sur cette voie là encore un bon moment si la bulle de rêve qu'elle s'était créée ne venait pas d'imploser avec le discours du capitaine qui, de son aura sombre et mystérieusement effrayante, venait de menacer tous les passagers de la Narelle. Un cri qui vint lui glacer le sang se faisait entendre, et d'instinct toutes les personnes présentes se mirent à paniquer, à courir dans tous les sens pour trouver une issue. Viens. Elle suivait son mari sans réfléchir, refusant de le perdre dans la foule et dans cette cohue. Si ce qu'il se passait était réel, et que les menaces risquaient d'être menées à exécution, elle tenait à ne pas s'éloigner de celui qui pourrait la défendre face à tout ça. Faut qu’on trouve le crâne. Elle fronçait les sourcils, ne s'arrêtait pas de marcher en pressant le pas. Quoi ? Tu veux vraiment te lancer dans cette chasse aux trésors ? L'idéal aurait été de fuir, ou d'informer les autorités, non ? Tu crois qu’il nous menaçait vraiment? Il parlait de qui, en disant le leur livrer? Tant de questions auxquelles elle n'avait pas plus de réponses, et elle détestait cette sensation d'impuissance. J'en ai aucune idée. Tu crois que ça pourrait être une blague ? Elle serait de mauvais goût si c'était le cas, mais il y avait un espoir que ce le soit. Quoi que cet espoir finit par s'envoler alors que d'un coup, le navire se mettait à tanguer, comme si une énorme tempête venait de se lever sans prévenir. Winston, que se passe-t-il ? Il faut qu'on trouve un moyen de s'en aller. Il doit bien y avoir des canots de sauvetage, non ? Son regard trahissait la panique qui venait de s'emparer d'elle.

Alma ne regardait même plus où elle mettait les pieds ; elle faisait une confiance aveugle à son mari, qui semblait savoir comment agir dans toute cette panique. Il avait toujours été un homme d'action et il le prouvait ce soir, encore une fois. Oui. Ça devrait aller vite. De son côté, Alma était peu convaincue par cette chasse aux trésors. Elle préférait croire qu'il y avait une autre explication à tout cela, que peut-être ces évènements n'étaient qu'une mascarade. Je pense pas. Il aurait mis fin à la blague avant. Et puis, il est recherché ce crâne tu sais. Peut être qu’il le cherche depuis longtemps et qu’il a vrillé... Elle fut surprise de ces révélations, et semblait comprendre qu'il avait des informations qu'elle n'avait pas, qu'il n'avait pas jugé bon de partager avec elle - ce qui, ne le cachons pas, l'inquiétait beaucoup. Tu as déjà entendu parler de tout ça ? C'est dingue ! La course poursuite ne s'arrêtait pas et elle espérait qu'ils se dirrigent vers une solution de s'échapper du navire, mais ce n'était pas le cas. On prendra une chaloupe après si tu veux, mais je ne suis pas sur que ce soit la meilleure idée pendant une tempête. On va finir à l’eau. Sur ce point là il n'avait pas tort, pourtant elle ne pouvait s'empêcher de n'avoir qu'une seule envie : fuir, le plus loin et le plus vite possible. Je crois que je connais à peu près le secteur où se trouve le crâne. Tu penses pas que ce serait plus utile pour tout le monde qu’on mette la main sur ce qu’il nous demande? Si ça peut au moins le calmer. Il voulait se dévouer pour la cause et elle trouvait ça charmant. Sérieusement, ce n'est pas à l'équipage de gérer ce problème ? Tu n'es pas là pour travailler, il faut penser à nous avant de vouloir aider tout le monde. Et puis soudain des connexions se faisaient dans son esprit, et elle s'arrêtait net, lâchant la main de Winston. Attends... comment tu pourrais connaître le secteur où il se trouve ? Tu as quelque chose à voir avec tout ça ?

Oui, c’est dingue. Il l'admettait et pourtant Alma avait un goût amer en bouche, de ceux qui suffisent à vous persuader que votre instinct est en plein éveil. Elle sentait qu'en plus de toute cette situation qui n'avait aucun sens, quelque chose n'allait pas avec Winston - elle détestait y penser. Imaginer que son mari était en train de lui mentir en pleine situation de crise était très perturbant, presque plus que les cris qui résonnaient parfois dans les couloirs du navire, que les horreurs qui étaient en train de s'y dérouler. Déjà qu’ils doivent gérer les passagers en pleine panique et le bateau qui traverse une tempête... Qu’est ce que tu veux faire d’autre de toute façon? Rester calfeutré dans notre chambre? Elle secouait la tête, ne comprenant pas bien où il voulait en venir. Ses arguments tenaient la route, mais elle ne comprenait pas pourquoi il tenait tant à se lancer dans cette course contre la montre. Ça, ou s'assurer que des secours sont prévenus ? En tout cas quelque chose de plus rationnel que de se lancer dans une chasse aux trésors dont on ne sait rien. Elle commençait clairement à paniquer, à perdre patience. Ses gestes le prouvaient, et surtout le fait qu'elle lâche sa main et recule d'un pas. Qu’est ce qu’il y a Alma? Tu es en train de paniquer pour rien là. Elle s'énervait clairement, la frayeur prenant le dessus sur la raison. Pour rien ? Tu te rends pas compte que c'est n'importe quoi ? Qu'on vient de nous menacer de tous nous tuer ? Et alors qu'elle était sur le point de craquer complètement, il finit par se montrer charmant d'un coup d'un seul. Il faut dire qu'il savait parfaitement comment agir avec elle. Tu me fais confiance ou pas? Elle hésitait à peine avant de lui répondre et d'attraper sa main à nouveau. Oui, bien sûr que je te fais confiance... je ne comprends rien, c'est tout. Tout ça n'a aucun sens. C’est une affaire au boulot. Et bien qu'elle aurait voulu en savoir plus, elle ne savait que trop bien qu'il ne pouvait pas toujours tout lui dire. Alors ils repartaient main dans la main, descendant une portion d'escaliers, ayant enfin réussi à s'éloigner de la foule et des cris. Les passagers présents au dîner venaient de s'éparpiller dans les différentes parties du navire, et elle profitait de ce moment pour se remettre à poser des questions. Et donc, tu vas m'expliquer ce que c'est tout ça ? Pour une fois, elle n'en démordrait pas. Tu vas me dire que notre présence ici n'était que liée à cette affaire ?

C’est pas la première fois pour moi tu sais. Et ça s’est toujours bien terminé. Alors ça se terminera encore bien ce soir. Habituellement, Alma aimait voir Winston sûr de lui. Elle aimait savoir confiant, savoir qu'il avait la situation bien en mains. Le contexte de ce soir était particulièrement étrange et remettait tout en question, même ça. Elle essayait pourtant de relativiser, sachant qu'elle pouvait lui faire confiance, qu'elle avait envie de le croire lorsqu'il tentait de la rassurer. Il était difficile pour Alma de se laisser convaincre, mais elle choisissait pourtant de suivre son mari, consciente qu'elle n'avait que peu d'autres choix que celui ci. Fuir toute seule à la recherche de plus d'aide n'aurait probablement mené à rien, et il était hors de question qu'elle se sépare de lui. Je sais. Elle aurait voulu se blottir contre lui dans leur cabine pour le reste de la nuit, elle aurait voulu ne jamais avoir entendu ces cris horrifiants, ne jamais avoir vu la mine sombre et menaçante de leur capitaine. Pourtant les évènements étaient bien réels, et si Winston avait raison sur une chose, c'était bien sur le fait que s'échapper, en plein océan, ne serait pas une tâche aisée. Alors elle suivait l'amour de sa vie dans les couloirs du navire, tâchant de garder le silence, à l'affut de tout ce qui pourrait être un danger pour eux. Jusqu'à ce qu'une connexion se fasse dans son esprit, et qu'une nouvelle question vint franchir les limites de ses lèvres. A la base non. Je ne savais pas que le crâne était ici jusqu’à quelques jours avant notre départ. Alors quand ça s’est su, je me suis proposé. Mais je ne savais pas non plus que le capitaine était si... instable. Elle avait le sentiment qu'il lui cachait une part de la vérité, et que quelque chose était en train de se briser entre eux. Comme si cette affaire permettait à la brune de le voir sous son vrai jour, alors qu'elle n'avait pour l'heure que des soupçons, et aucune conviction. Mais... C’est compliqué. C’est un objet qui se passe de main en main, sous le manteau. Il y a eu des histoires assez lugubres avec ce crâne. Les gens perdent un peu la tête quand ils veulent s’en emparer. Et visiblement, c’est le cas du capitaine... Rien pour rassurer la jeune femme, qui avait de plus en plus de mal à comprendre ce qu'il était en train de se dérouler. Tu aurais dû m'en parler, ce n'est pas rien Winston. Qu'elle réprimandait, comme si cela pouvait encore changer quelque chose à la situation. Tu le cacherais où toi? Elle fronçait les sourcils, répondant sans trop y réfléchir. Hm... j'en sais rien, il doit y avoir des coffres dans la cale, ou... Elle se stoppa net, bien décidée ce coup ci à en savoir plus et à faire comprendre à son mari qu'elle était loin d'être ravie de son comportement. Mais t'es sérieux ? Tu n'as vraiment que ce foutu crâne en tête ? Tu ne vas même pas t'excuser de m'avoir embarquée là dedans ? Que les choses aient tournées au vinaigre était une chose ; qu'il continue de lui cacher des informations en était une autre, d'autant plus qu'il remettait sa chasse aux trésors sur la table alors même qu'ils étaient en train d'avoir une conversation. Que tu ne me dises pas tout je le conçois, mais que tu me mentes à ce point là, c'est quand même n'importe quoi. Au final, rien n'était logique ce soir. Tu comptais me parler de tout ça un jour, si l'histoire ne t'avais pas échappée ?