L’un des membres du groupe de NA qu’Arthur fréquentait régulièrement était décédé d’une overdose. Il paraissait être l’élément le plus fort du groupe, celui qui prenait souvent la tête des conversations et qui semblait toujours avoir un bon conseil pour ceux qui venait réellement en chercher dans ce genre de réunion. Il était l’exemple même de tout ce qu’Arthur détestait et pourtant l’annonce de son décès soudain est venu chambouler le Coventry comme jamais il n’aurait pu l’imaginer. Il s'était revu à l’hôpital, il y a un an de cela, affaibli et mal en point, soudainement conscient de tout ce qui n’allait pas dans sa vie et de tout ce qu’il tentait de dissimuler derrière la drogue et derrière les soirées. Pour la toute première fois, il s'est retrouvé à deux doigts de s’exprimer lors d’une réunion, prêt à dire qu’il consommait encore, qu’il ne savait pas comment s’arrêter et qu’il n’avait clairement pas envie de terminer comme James, autrement dit six pieds sous terre et dans un cercueil. Mais il n’avait rien dit, il s’était contenté de soupirer face aux multiples conseils prodigués par Malone et il avait continué des dénigrer toutes les personnes présentes dans la salle en ne cessant de se rassurer sur le fait qu’il était en plein contrôle de sa propre consommation. Le duel l’avait poursuivi tout au long de la soirée, jusqu’à la boîte de nuit qu’il avait choisie un peu par hasard et puis il avait abandonné sa conscience et ses questions sur un banc, entre deux jolies filles et quelques lignes de poudre blanche.

Pour ne pas penser, Arthur s’est laissé entraîner dans l’une de ses spirales infernal, consistant à sauter tout ce qui bouge et à s’enfariner le nez de manière constante. Jusqu’à ce qu’il rate l’une des réunions les plus importante de sa carrière pour cette nouvelle affaire qui ferait de lui un roi s’il venait à l’obtenir. Arthur n’a pas su être là, trop occupé à s’embrumer l’esprit pour ne pas penser à tout ce que l’annonce d’un stupide décès avait réveillé chez lui. Sebastian avait pris sa place sans aucun remords et Arthur s’était retrouvé comme un con à arrivé au bureau avec trois heures de retard et un costume même pas repassé sur le dos. Et il avait pris un savon. Un de ceux qui lui donnait cruellement envie de mettre la main sur un sachet de poudre dans la seconde qui suivait. On lui avait rapporté que l’affaire n’était pas encore perdue et dans un élan de dynamisme inspirer par son esprit encore coké, il avait décidé de tout arrêter. Finis les soirées jusqu’à l’aube, il allait mettre les bouchées doubles pour prouver qu’il était capable, qu’il allait la gagner cette affaire et tout seul, sans l’aide de personne.

Cela faisait deux jours qu’il n’avait touché à rien. Deux jours à enchaîner les cafés et autres cannettes de Red Bull pour satisfaire cette envie qui lui démangeait la peau. Quarante-huit heures à courir dans les sens, sans réellement faire de pause pour dormir ou manger. Tout son corps lui réclamait une dose, au travers de nausées interminables, d’une envie de s’arracher la peau à plusieurs endroits et par cette envie incontrôlable de demander à tous ceux autour de lui dans cette salle de réunion, de juste se taire. Mais il tenait le coup. Il essayait tout du moins. Il avait prévu de ne pas se rendre à la prochaine réunion des NA, il pouvait s’en sortir sans eux et sans partager son histoire, mais il avait reçu un message rappelant que les prochaines rencontres étaient ouvertes et que chacun membre pouvait se présenter avec un proche. Il s’était juré de ne pas tomber là-dedans, mais c’était avant l’énergie retrouvée, c’était avant sa décision d’arrêter pour de bons. Personne ne connaissait son addiction dans cette ville, personne à part l’un de ses plus vieux amis.

Il n’avait pas réfléchi quand après la réunion ses mains, c’était mis à trembler de manière incontrôlée. Avant, il serait parti chez lui en trombe, pour prendre sa dose et continuer sa journée comme si de rien était. Ce soir, son esprit se bat encore contre son corps, toujours entacher à l’idée de tout arrêter. Alors, il n’est pas retourné son appartement, mais a conduit jusqu’à Bayside avant de s’arrêter devant cette maison qu’il ne connaissait pas. Jamais l’esprit agité d’Arthur ne lui fait remarquer qu’il aurait dû prévenir de sa visite. Il n’a pas le temps pour cela, il doit le faire maintenant avant de reculer. C’est ainsi qu’il frappa à la porte d’une manière bien trop énergétique avant que son doigt ne trouver le bouton de la sonnette qu’il enfonce à deux reprises. Il n’avait pas revu Swann depuis leur dernière conversation chaotique. Il avait bien envoyé un présent aux deux futurs mariés, mais Arthur est incapable de se souvenir si Swann l’avait remercié. Tant pis, la porte était en train de s’ouvrir et lui ne cessait de se balancer sur la pointe de ses pieds. « Hey ! » Un léger silence s’étira avant que son agitation ne l’emporte. « Je te dérange pas ? » Si Swann venait à l’envoyer bouler, il en serait terminé des efforts d’Arthur, il en était à peu près certain. Durant l’espace d’un court instant, il avait presque envie que le jeune homme l’envoie sur les roses, il aurait alors la parfaite excuse pour replonger sans attendre. « Je voudrais te demander quelque chose. » Arthur ne s’était jamais senti autant partagé entre l’envie de se faire entendre par Swann et le désir de tout gâcher pour retourner à ses travers. « C’est important. » qu’il s’entendit ajouter alors que son corps paraissait incapable de se tenir droit sans s’agiter.

@swann buchanan

Les coups contre la porte se mêlent à une double pression contre la sonnette, le tout ne faisant que démontrer l’urgence d’une situation que Swann ne comprend pour encore pas. Quand bien même, c’est avec une certaine suspicion qu’il ouvre la porte, les sourcils froncés car bien incapable de prédire ce qu’il trouvera de l’autre côté de cette dernière. Son regard s’adoucit quelque peu lorsqu’il reconnaît Arthur mais ses muscles ne se détendent pas pour autant, pas alors qu’il est particulièrement bien placé pour savoir où on est l’état de leur relation aujourd’hui, la nouvelle proximité de leur quotidien n’aidant apparemment pas. « Hey ! » Il tente un sourire, alors Swann le lui rend, non sans passer outre l’agitation évidente qui est celle de son ami. « Je te dérange pas ? » Rory n’est pas là, Maisie n’est pas là non plus. La décision lui revient donc à lui et à lui seul et les mots viennent rapidement, naturellement. “Non, bien sûr.” Peu importe l’état de leur relation, peu importe la violence ou la date de leur dernière dispute ; il reste son ami. Il reste un ami à qui il tendra toujours la main, même si Arthur a le don de le blesser bien plus que qui que ce soit en ce monde. Sa voix calme dénote de celle, bien plus agitée, du Coventry, et c’est sans en tenir le moindre commentaire qu’il lui ouvre la porte plus largement pour le laisser rentrer. Peu importe la raison de cette visite, le blond comprend déjà qu’elle est importante pour lui et qu’elle ne peut décemment pas avoir lieu sur son palier.

« Je voudrais te demander quelque chose. C’est important. »

Il s’agite, il est nerveux. Les signes sont évidents mais Swann n’arrive pas à en déterminer la raison pour autant, pas même lorsqu’il observe son ami faire quelques pas dans sa maison. Il referme aussitôt la porte derrière lui, soucieux de ne pas laisser le moindre regard indiscret s’immiscer chez eux. Les mots d’Arthur ne sont pas pour le rassurer et, déjà, il mentirait s’il disait ne pas craindre de savoir ce dont son ami semble tant vouloir lui parler. “Tu sais que tu peux tout me dire, hein ?” Malgré leurs éternelles différences d’opinion sur toutes choses, il peut tout entendre de la part d’Arthur, quitte à ce que les mots aient parfois des conséquences non désirées. Il peut tout entendre. Il ne promet pas de pouvoir tout excuser ni même tout expliquer, mais il peut au moins écouter et, par extension, promettre de faire de son mieux pour être présent et l’épauler. “Tu vas bien ?” De toutes les questions qu’il pourrait lui poser, celle-ci est la plus importante à ses yeux, en témoigne le regard désolé qu’il pose un instant sur lui avant de vriller ses prunelles sombres ailleurs, bien conscient qu’Arthur ne veut pas de son empathie et encore moins de sa pitié. Alors, Swann s’occupe les mains en préparant un thé, comme si une simple boisson pouvait avoir le don de régler tous les maux.

Juste avant que la porte ne s’ouvre, un brin de lucidité vint frapper Arthur, conscient que sa présence sur ce palier n’est probablement pas la bienvenue. Dans le fond, c’est tout ce qu’il cherche, que Swann campe sur sa position, qu’il lui claque la porte au nez pour lui offrir la meilleure des excuses pour replonger. Il le voit parfaitement, au travers de son excitation, le regard méfiant que lui offre celui qui était son ami. Alors, il attend la sentence, les mots qui le pousseraient à nouveau dans ses travers sans plus jamais avoir besoin de se justifier auprès de qui que ce soit, mais ils ne viennent pas. Il y a bien eu une hésitation, mais d’une si courte durée qu’Arthur serait prêt à exprimer son mécontentement. « Non, bien sûr. » Ce n’était pas dans son plan de base, si tenter qu’il y en avait réellement un à l’origine de cette visite impromptue. Les raisons ont été multiples entre son départ du centre-ville et l’instant où le panneau de bois s’était ouvert pour mieux révéler son camarade de toujours. « Oh. » qu’il souffle un peu décontenancer. « Cool. » Il aurait probablement dû se douter que son agitation allait éveiller la curiosité de Swann ou tout simplement que l’anglais n’avait jamais réellement su le rejeter complètement. Il aurait pu prévoir bien des choses, mais Arthur était dans l’incapacité la plus totale de former une pensée cohérente à l’instant pris en étau entre son envie de s’en sortir et ce désir insurmontable de juste prendre une dose pour chasser toutes les pensées qui se heurtent violemment contre les parois de son crâne.

Ce n’est que l’excitation qui courait dans ses veines qui l’aidèrent à mettre un pied devant l’autre afin de pénétrer dans la demeure de Swann. Conscient de n’avoir jamais mis les pieds entre ces quatre murs, le regard d’Arthur s’attarda alors sur les moindres détails qui pouvaient capter son attention. Les photos suspendues dans des cadres, le moindre petit objet de décoration, tout ce qui pouvait attirer son regard et tenter d’apaiser son agitation grandissante. « Tu sais que tu peux tout me dire, hein ? » Il avait entendu la voix de Swann dans son dos, mais les mots lui paraissent distants, comme un son brouillé par des grésillements. « Hmmm. » Pour la première fois, Arthur avait le droit à un petit aperçu du nouveau quotidien de son ami. Une vie qui paraissait rangé, droite et incroyablement cosy à en juger par l’apparence intérieure de la maison, tout ce que lui avait toujours cherché à fuir, ce qu’il avait touché du doigt à une époque avant de tout balancer de travers. Il n’ose pas avancer plus que quelques pas, coincés entre l’entrée et ce qui semblait être le salon de la résidence. Tout son corps ne cessait de vibrer sous une excitation qu’il ne saurait définir, mais qui l’empêchait ultimement de déposer son regard sur un point fixe. « Tu vas bien ? » Il avait entendu la question, avait même hoché de la tête avant de suivre Swann du regard et de réaliser que le jeune homme semblait le fuir. « Oui. Enfin… Non. Fin, je sais pas, je crois ? » Les mots se sont bousculés tour à tour pour passer la barrière de ses lèvres en premier dans une cacophonie qui ne donnait plus aucun sens à rien. « Ouais peut-être. » Qu’elle était la question de Swann déjà ? Arthur ne sait plus réellement. Il aimerait s’asseoir, mais ses jambes le portent à faire des allers-retours le long des comptoirs de la cuisine. Swann ne l’avait pas encore rejeté et il n’avait pas prévu aussi loin. « Un mec de mon groupe de NA est mort. » Il se devait de le dire à haute voix, cela rendait son dilemme bien plus tangible accroché à une réalité qu’il n’avait guère envie d’affronter. « Il allait bien et PAF… » Sa voix était montée d’une octave accompagnée d’un geste brutal, ses bras se balançant dans l’espace comme pour souligner la soudaineté de l’événement. « Une overdose. » Arthur avait réchappé à cette expérience, il se souvenait encore du réveil à l’hôpital, de l’incompréhension et de tout ce qui en avait suivi. Il n’avait pourtant pas hésité à replonger dès que Nora lui avait présenté un sachet de poudre, dès que ses pensées en étaient revenues à être trop bruyante et trop affolée. C’était simple, il savait gérer, mais une seule idée restait fixer entre tout ce tourbillon agité. « J’ai pas envie de mourir. » Et dans la seconde qui suivit, parce qu’Arthur n’allait certainement pas laisser le silence s’étaler au travers de cette révélation qu’il était bien incapable de mesurer dans son état, son attention s’était tournée ailleurs. « Oh t’as un chien ? » Il voyait cette petite boule de poil qui n’osait pas trop entrer dans la pièce et son pas précipité à envoyer l’animal se réfugier un peu plus loin dans le couloir. « T’avais reçu mon cadeau ? Si ça te plaît pas vous pouvez changer. » Il fallait qu’il joue la carte de la distraction, il fallait peut-être qu’il s’en aille également, mais une force le clouait dans cette cuisine, parce qu’il avait tout de même décidé de venir, personne ne l’y avait forcé. Il était venu chercher quelque chose auprès de Swann, n’importe quoi, un refus ou une main tendue.

Swann l’observe avance dans sa maison sans doute, mais avec une immense appréhension, et l’idée que quelque chose ne tourne pas rond. Ainsi, il n’arrive pas à se retenir bien longtemps avant de lui demander comment il se porte, sans que ce ne soit une question de politesse uniquement. « Oui. Enfin… Non. Fin, je sais pas, je crois ? » Et dans la longue liste des réponses qu’il aurait pu lui donner sans que cela ne rassure le moindre instant Swann, celle-ci en faisait partie. Il répond par la positive pour lui faire plaisir ou pour ne pas faire parler de lui outre mesure, voilà tout ce que Swann voit et comprend dans son attitude autant que dans ses mots plus saccadés que jamais. « Ouais peut-être. » Arthur a une grande gueule, mais jamais lorsqu’il s’agit de parler de ses sentiments, ou de ce qui pourrait ne pas aller. “Peut-être ?” Il pose à nouveau la question, sincèrement soucieux. Swann veut une vraie réponse, le genre de franc-parler qu’il n’ose généralement qu’en sa présence parce que les années les ont unies plus que jamais. Ils se sont toujours tout partagé, ils se sont toujours tout dit, et cela vaut toujours son pesant d’or malgré les disputes et les déconvenues survenues entre-temps. Cela n’enlève rien à leur amitié et à la confiance établie ; n’est-ce pas ? Tout, dans son regard qu’Arthur ne confronte pas, hurle que Swann voudrait qu’il s’explique davantage et lui permette d’y voir plus clair dans une situation impossible à déchiffrer sans son aide.

« Un mec de mon groupe de NA est mort. » La bouche de l’anglais prend la forme d’un ‘o’ sincèrement surpris autant qu’il est désolé. Il pouvait s’attendre à beaucoup de choses, sans doute, mais pas à entendre la mort d’un de ses amis, ou tout du moins c’est le lien que Swann imagine s’être créé entre Arthur et l’homme dont il est question. « Il allait bien et PAF… » - “Il a… ?” Fait une overdose ? Swann n’ose pas prononcer le mot de peur de brusquer son ami qui n’en a certainement pas besoin, il se tait pour mieux l’observer arpenter la cuisine de long en large, plus anxieux que jamais. « Une overdose. » C’est bien ce qu’il craignait, alors. La gorge nouée, il présente brièvement ses condoléances. “Je suis désolé.” Ne pas connaître l’homme dont il parle ne l’empêche pas de se montrer empathique, surtout alors que le thème du deuil reste profondément ancré dans son cœur et dans son histoire. “Tu le connaissais personnellement ?” A quel point il va mal ? A quel point il est affecté ? A quel point il a besoin d’aide sans jamais oser le formuler ainsi, ou le demander ? Swann a tant de questions qu’il enterre subtilement (ou presque) sous terre, ses grands yeux soucieux plantés sur le profil de son ami qui n’arrive pas à tenir en place.

« J’ai pas envie de mourir. »
“Hey, Arthur, tu vas pas…”
« Oh t’as un chien ? »

Le blond avait commencé à s’avancer vers lui dans l’optique de poser une main contre son épaule, mais la question d’Arthur le prend de court, autant que les pas qu’il esquisse en direction du chien qui ne semble rien comprendre non plus à ce qu’il se passe. Ce dernier, sur ses gardes, esquisse plusieurs pas en arrière pour ne pas qu’Arthur s’approche de trop près, mais il garde tout de même un œil sur eux, au cas où. “On l’a adopté il y a quelques mois, oui.” Il se prend au jeu et répond aux questions, bien qu’il anticipe déjà qu’Arthur ne souhaite pas réellement s’intéresser à leur chien. Il esquisse le fond de la véritable conversation, en réalité. « T’avais reçu mon cadeau ? Si ça te plaît pas vous pouvez changer. » Swann esquisse un sourire triste, non parce qu’il l’est réellement mais parce la situation de son ami le touche. “Ca nous plaît beaucoup. Merci. On a commencé à discuter pour savoir quand l’utiliser.” Il tient à le souligner, même s’il ne donne pas plus d’importance que ça au sujet de son cadeau, certain qu’Arthur n’a pas fait tout ce chemin uniquement pour s’assurer qu’il a bien visé. Ainsi, il fait quelques pas en sa direction uniquement pour poser une main rassurante entre ses omoplates et le guider vers le canapé du salon, soucieux de le voir se poser au moins un instant. “Parle moi de ton ami. Il s’appelait comment ?” Si Arthur ne sait pas de quoi parler par lui-même, alors cela n’a rien d’un problème, parce que la voix posée de Swann a un bon millier de questions pour lui en même temps qu’il prend place à ses côtés sur le canapé.

« Peut-être ? » Arthur hausse les épaules dans un geste dramatique, incapable de donner une meilleure réponse, pas réellement conscient que cela puisse interroger son ami. « Ouais. » Juste une possibilité d’aller bien, mais aucune affirmation. Il n’avait jamais réellement su poser des mots sur ses émotions et Arthur avait depuis bien longtemps abandonné l’idée de tout cacher à Swann quand il avait toujours été le seul à avoir un accès privilégié au véritable Arthur. Cette visite n’avait rien de parfaitement anodine qu’importe combien le Coventry s’efforçait de vouloir le cacher. Il était agité, bousculé par un flot d’émotions en tout genre qui ne faisait guère de sens dans son esprit perturbé par les derniers événements. Arthur avait besoin de lâcher son sac quelque part et il ne connaissait pas meilleur endroit qu’aux pieds de Swann, qu’importe si leur dernière rencontre s’était achevée sur un ton qui avait tout de la sonorité d’un point final sur leur amitié. Dans l’urgence de l’instant, il avait besoin de tout dire sans trouver le temps d’y appliquer les formes. « Je suis désolé. » Haussant un sourcil Arthur s’apprêtait à demander des expliquer à Swann, désolé pour quoi au juste ? « Tu le connaissais personnellement ? » - « Non pas vraiment. » Ce n’était pas là que se tenait l’importance selon lui, mais Swann voulait savoir, il voulait comprendre. Il en avait toujours été ainsi dans leur relation, le Buchanan étant la force tranquille du duo, l’équilibre qui parvenait – parfois – à ramener les deux pieds d’Arthur sur la terre ferme.

Le brun balança une vérité toute crue, un genre que personne ne pourra jamais lui faire répéter, avant de renverser la tendance pour éloigner le sujet de la conversation de sa personne. Il avait entendu la protestation de Swann, dans son agitation, il avait tout de même perçu la tension qui s’était installée dans la pièce, mais il n’arrivait pas à poser son esprit. Arthur était devenu un électron libre qui venait se heurter avec chaos contre les murs, pris au piège dans une tempête qui faisait bouillonner le sang au creux de ses veines. Arthur avait envie de s’arracher la peau, de hurler que rien ne pouvait aller. L’anglais avait autant envie de fuir que d’implorer Swann de lui venir en aide. « On l’a adopté il y a quelques mois, oui. » - « C’est chouette. » Tout était bon pour un peu de distraction, pour prétendre encore quelques minutes qu’il allait parfaitement bien. « Ça nous plaît beaucoup. Merci. On a commencé à discuter pour savoir quand l’utiliser. » - « Cool. » La moindre syllabe venait lui brûler la gorge et Arthur songeait sérieusement à partir désormais. Il n’avait aucune idée de comment amener le sujet, il n’était même pas sûr de vouloir donner autant d’accès à celui qui restait, malgré tout, son meilleur ami. Mais Swann connaissait encore les rouages, il savait encore comment s’y prendre, dans une douceur qui avait toujours eu don de faire lever les yeux au ciel au Coventry. Habitué à protester, Arthur se laissa tout de même guider vers le canapé, incapable de retenir le balancement de sa jambe ou de contrôler ses doigts qui vinrent commencer à gratter le creux de son coude. « Parle moi de ton ami. Il s’appelait comment ? » - « James. » La réponse était simple, mais au milieu de la crise, Arthur fronça les sourcils. « C’était pas mon ami. » Il ne connaissait pas réellement cet homme, il n’avait fait que le croiser de temps à autre, lorsqu’il daignait se rendre à une réunion, rien de plus. Ce n’était pas son ami et pourtant, Arthur ne cessait de penser à l’annonce que leur avait fait le responsable. Il était mort, comme ça, du jour au lendemain, emporté par ses addictions. Et Arthur se mit à rire. « C’était un putain de menteur qui faisait croire aux autres qu’on pourrait s’en sortir. » Les barrières vinrent s’effondrer à mesure que son rire emplissait la pièce. Arthur ne savait tout simplement plus comment mener sa barque entre la moitié de son esprit qui jurait être en plein contrôle et l’autre qui était terrifié à l’idée de venir une nouvelle overdose. Il ne pouvait pas rester assis aux côtés de Swann et s’épancher sur ses sentiments, il n’était pas venu ici pour cela. Pourquoi est-ce qu’il était venu jusqu’ici aux justes ? Arthur se leva pour faire les cent pas, pour prétendre ne pas sentir le regard de Swann sur son profil. Il tournait en rond comme un lion en cage alors que ses mains se mirent à trembler de nouveau. « J’ai envie de… » Il se sentit incapable de poursuivre le cours de sa pensée, les mots coincés dans le fond de sa gorge, la vérité résidant dans le silence qui vint s’installer entre eux. Il avait besoin que Swann tende la main vers lui tout autant qu’il crevait d’envie de se prendre une dose. Arthur commençait à avoir chaud, vraiment très chaud, alors qu’il ne cessait de tourner en rond et que tout lui paraissait soudainement très flou. « T’as pas quelque chose ? N’importe quoi… » Il en avait besoin, il ne pouvait pas continuer dans cet état, il n’avait pas envie de mourir, il voulait juste s’amuser et ne pas penser à ses obligations. Il n’avait jamais eu l’intention de tomber si bas. Arthur se mit à tirer sur le col de sa chemise, il se sentait lentement crevé de l’intérieur et la peur a fini par prendre le dessus. « Faut que tu m’aides Swann. »

Arthur avait cruellement besoin qu’on lui tende la main.

Arthur fait sûrement en cet instant le meilleur small talk de toute sa vie. Il parle du chien, il parle du cadeau offert au couple, il précise que l’homme en question n’était pas vraiment son envie, il se contente d’un ouais face à une question qui aurait mérité une immense explication. Il se débat à contre-courant, et il arrive à garder la tête hors de l’eau, sans que Swann ne sache quoi en penser. Il n’en démord pas pour autant et, déjà, il l’interroge à nouveau sur cet ami dont il est question. Il semble avoir déclenché quelque chose chez Arthur: jamais il n’aurait parlé d’une personne autre que lui-même, sinon. « James. » James. Il hoche la tête, retient le prénom. « C’était pas mon ami. » Et Swann préférera plutôt utiliser son prénom que ce terme, à partir de maintenant, même s’il n’arrive pas à penser qu’il est autre chose qu’un ami d’Arthur. Tout du moins, il est quelqu’un qui a eu un impact dans sa vie, quel qu’il soit. “D’accord.” Il concède, n’ayant aucune envie de se battre sur ce sujet là. « C’était un putain de menteur qui faisait croire aux autres qu’on pourrait s’en sortir. » - “Il ne mentait pas.” Et cette fois-ci, Swann ne lui laisse pas le temps de réfléchir davantage: il remet à sa place la vérité et souligne qu’ils peuvent survivre à l’addiction et qu’ils peuvent la vaincre. Personne n’oserait dire que c’est simple ou même rapide, mais c’est au moins possible. Arthur est un guerrier, il saura trouver le moyen de s’en sortir: son ami n’en doute pas une seule seconde. Il ne veut pas douter.

Arthur se lève aussitôt et commence à faire le tour de l’appartement, chose que son ami n’arrête pas. S’il veut marcher pour tenter de se calmer un tant soi peu, alors il compte bien le laisser faire. « J’ai envie de… » De ? Swann fronce les sourcils, ne voulant pas comprendre ce qu’il sous-entend avec ces quelques maigres et simples mots. « T’as pas quelque chose ? N’importe quoi… Faut que tu m’aides Swann. » - “Pas comme ça Arthur.” Il ne lui donnera rien. Il ne lui donnera rien parce qu’il n’a rien, tout simplement, et même si tel avait été le cas, il aurait continué à tenir Arthur aussi éloigné que possible de tout ce qui représente une addiction pour lui. Son ami a besoin d’aide, c’est évident, et de son côté l’anglais la lui fournira, peu importe la façon. “Je vais t’aider, bien sûr.” Peu importe à quel point les choses sont parfois compliquées avec Arthur, il n’en reste pas moins un de ses plus chers amis, et une personne qu’il continuera à aimer et soutenir, quoiqu’il advienne. Il n’est pas facile à vivre, il a un caractère bien à lui, mais il n’en reste pas moins son ami. “T’es clean depuis combien de temps ?” Il ne s’y connaît pas autant qu’il le voudrait en la matière mais il jure d’apprendre, il jure de faire au mieux. Il jure qu’il peut arriver à l’aider, et il jure qu’Arthur s’en sortira. “Je sais pas… Je sais pas ce dont t’as besoin, mais je veux aider, ok ?” Relevé à son tour, il a déjà fait quelques pas en direction de son ami pour tenter de calmer ses gestes et éviter qu’il s’énerve contre le col de sa chemise. Swann repousse simplement ses mains avec les siennes, et il ouvre le premier bouton de sa chemise, pour lui donner l’impression de mieux respirer, même si cela n’y change sûrement rien. “C’est ça que tu voulais me demander ?” Depuis tout ce temps, est-ce qu’il cherche simplement les mots pour demander de l’aide ?

Il s’entêtait à combler la conversation pour ne rien laisser paraître, pour toujours attirer l’attention de Swann sur un point différent et ne jamais avoir a croiser son regard plus de quelques secondes. Il était prêt à continuer le jeu encore longtemps, mais le blond était encore capable de lire son ami, pour le plus grand malheur d’Arthur. Il avait toujours été comme cela Swann, à vouloir qu’Arthur parle de ses émotions, à lui demander de se poser pour laisser sortir ce qu’il gardait bien trop souvent pour lui. « Il ne mentait pas. » Le bon samaritain était de retour et il n’avait suffi que de cette petite phrase pour que le Coventry remette en question sa présence dans cette maison. « T’y connais rien ! » Quelle idée stupide de venir ici. Dans quel but en plus ? Il n’était plus réellement en capacité d’accorder la moindre cohérence à ses pensées. Il était là et Swann avait ce regard empli de pitié qu’Arthur détestait de toutes ses forces. « Arrête de me regarder comme ça. » Il n’était pas un être faible, il était en pleine capacité de ses moyens, il savait qu’il devait agir avant de sombrer plus loin encore. Le problème étant que les mots semblaient rester coincés dans le fond de sa gorge sans jamais trouver le chemin jusqu’à ses lèvres. Il y a des milliers de choses qu’Arthur serait prêt à dire à Swann, mais aucun son ne venait rouler sur sa langue. Il avait confiance en son ami, c’est bien la seule pensée cohérente qui s’élevait parmi le chaos.

Le manque s’écoulait dans ses veines tel un poison, il n’arrivait pas à se poser, il avait l’impression d’avoir beaucoup trop chaud et qu’à chaque nouveau pas sa tête allait exploser. Arthur ne tenait pas en place, il crevait d’envie de consommer, n’importe quoi, tout ce qu’on pourrait lui proposer. « Pas comme ça Arthur. » Retenant son souffle, il s’attendais à ce que Swann le mette à la porte, après tout il l’avait bien chercher, qui voudrait d’un camé pour ami ? Il avait été affreux avec Swann, il avait tout fait pour le pousser loin de lui et maintenant il venait pleurer à ses pieds ? Arthur se détestait d’agir ainsi, de ne plus être capable de faire la part des choses. Il oscillait entre le masque qu’il n’avait de cesse d’afficher au reste du monde et tout ce qu’il aimerait abandonner juste là dans le salon de celui dont il a toujours été le plus proche. « Je vais t’aider, bien sûr. » Aucune hésitation ne vint teindre le ton employé par Swann, bien au contraire, et cela stoppa net la ronde entamée par Arthur. « Vraiment ? » Il allait faire cela malgré tout ce qui lui avait dit. Swann allait lui tendre la main ? « T’es clean depuis combien de temps ? » Il lui fallut une minute avant de retrouver sa voix et surtout le fil de ses pensées. « Deux jours. » A quelques heures près, quelque chose comme ça. Autrement dit rien du tout, est-ce que l’on peut même considérer cela comme une période de sobriété ? Arthur avait besoin d’une dose, tout son corps s’allumait de différents signaux, de sa gorge qui ne cessait de se fermer à la sensation de brûlure qui parcourait tout son avant-bras. Il avait bien du mal à croire que Swann allait volontairement lui venir en aide et pourtant le jeune homme s’approcha lentement d’Arthur pour venir déboutonner son col de chemise et soudainement, il eut l’impression de respirer un peu mieux. « Je sais pas… Je sais pas ce dont t’as besoin, mais je veux aider, ok ? » Tel un enfant, il hoche la tête, cherchant à retrouver une respiration normale alors que son cœur continuait à battre dans ses oreilles. « C’est ça que tu voulais me demander ? » Une nouvelle fois, il hocha de la tête alors que ses doigts vinrent former deux poings serrés le long de ses cuisses. Auparavant, Arthur aurait trouvé une parade, n’importe laquelle, pour détourner l’attention, pour prétendre que Swann avait bien mal entendu, mais aujourd’hui… Il n’y avait plus de parade et toutes les barrières explosèrent d’un seul coup. « J’ai fait une overdose à Londres, c’est pour ça qu’on m’a envoyé ici. » Pour le tenir éloigner de ses mauvaises habitudes, pour qu’il retrouve un droit chemin, celui dont son paternel serait fier. « Je te jure qu’au départ, je consommais plus. » Il avait tenu, plusieurs mois, ce fut dur et laborieux, mais il avait su tenir, juste un temps. Puis il y avait eu des retrouvailles, la pression d’un travail qu’il était bien loin de parfaitement maîtriser et ce foutu désir de ne pas tomber, de conserver la face et de rester au-dessus des autres. « Aux réunions… » Tout était flou, il ne donnait que des bribes d’informations à Swann, mais il fallait qu’il parle maintenant, il le savait. « On a le droit d’amener quelqu’un, pour un soutien ou un truc comme ça. » Et désormais, il n’osait plus croiser le regard de son ami. « Est-ce que tu… Tu pourrais venir ? » C’est surtout cela qu’il était venu demander à Swann. « Je… » Arthur hésita, juste une minute, dans un souffle, il hésita à prononcer les prochains mots, lui qui n’avait jamais rien demander à personne, mais qui soudainement était parfaitement conscient de tout ce qu’il n’était, en réalité, plus capable de faire seul. « S’il te plaît Swann. » Il ne pouvait demander à personne d’autres, il n’y avait que Swann qui avait le droit de le voir ainsi.

Et Arthur ne savait plus vraiment s’il espérait que Swann accepte ou s’il était juste impatient d’entendre son refus pour replonger sans plus aucune barrière et sans aucun filet pour le retenir.

« T’y connais rien ! » Arthur laisse exploser sa colère et Swann ne dit rien, parce qu’il sait que ce n’est pas le bon moment pour lui demander d’être terre à terre. Il hurle par colère autant que par peur, et Swann le laisse volontairement faire, avec le mince espoir qu’il finira par se sentir libéré d’un certain poids après. Après tout, il a raison: l’anglais n’y connaît rien. Il voudrait avoir les capacités d’aider et de comprendre son ami, mais il n’y connaît rien. « Arrête de me regarder comme ça. » L’anglais lève les mains, signe qu’il capitule sur ce sujet au moins. Il a appris à choisir ses batailles, et celle-ci n’en fait pas partie pour l’heure. Il ne veut pas énerver Arthur avant que ce dernier soit enfin arrivé à lui statuer la raison de sa visite ici, et c’est aussi la raison pour laquelle il n’hésite pas un seul instant au moment d’enfin mettre une barrière à ses mots et actions: Swann ne lui procurera rien d’illégal. Il veut l’aider, il le lui dit, mais il a ses limites et il ne risque pas de les modifier pour lui.

Il veut l’aider et, surtout, il va l’aider, ce qui va de pair avec le besoin d’en savoir plus sur l’état de santé de son ami. Et qui dit état de santé, dit surtout addiction en ce qui le concerne, raison pour laquelle Swann veut savoir où en sont ses efforts, notamment en termes de sobriété. « Deux jours. J’ai fait une overdose à Londres, c’est pour ça qu’on m’a envoyé ici. » Les informations s’accumulent, mais c’est bel et bien celle de son overdose qui fait tomber Swann de haut, en témoigne son regard qu’il déporte aussitôt dans celui de son ami. Pris de court, il le jauge un instant, espérant sans doute qu’il lui annonce que ce n’est qu’une blague. Les mots ne viennent pas, et la réalité devient un peu plus pesante encore. “Merde. Tu… Tu en as des séquelles ?” Il ose espérer que non, sinon cela voudrait purement et simplement dire qu’il a été aveugle durant de longs mois, et il aurait beaucoup de mal à se le pardonner. « Je te jure qu’au départ, je consommais plus. » - “Je te crois.” Ils sont dans la même équipe, et il veut que son ami le comprenne, parce que cela veut déjà dire qu’il n’a pas à se justifier devant lui. Pour ça, ou pour n’importe quoi d’autre. Swann lui fait confiance, que ce soit à tort ou à raison, cela reste un fait immuable. Il estime beaucoup leur amitié. « Aux réunions… On a le droit d’amener quelqu’un, pour un soutien ou un truc comme ça. Est-ce que tu… Tu pourrais venir ? » Cette question est une autre surprise pour l’anglais, mais cette fois-ci il tarde bien moins avant de répondre. « Je… S’il te plaît Swann. »  qu’il a encore le temps d’articuler, avant que les mots de Swann ne soient cette fois ajoutés en hâte, pour ne pas laisser le doute perdurer. “Oui. Bien sûr, oui.” Il est touché à plusieurs niveaux, tant parce que cela signifie qu’Arthur prend sa nouvelle sobriété à coeur que parce qu’il l’a tout simplement choisi, lui. Parfois, il doute que leur amitié signe autant pour Arthur que pour lui-même, et ce sont des instants comme celui-ci qui lui font simplement se rappeler qu’ils ont des façons bien différentes d’acter leurs sentiments. “T’es comme un frère pour moi, tu sais que je serai toujours là pour toi.” Dans les bons comme dans les mauvais moments, il promet de ne jamais l’abandonner, et il a à coeur de croire que les années écoulées tendent à lui donner raison. “Je dois faire quelque chose en particulier ? Ou je viens simplement à ces séances avec toi ? Je suis désolé, tu vas devoir tout m’expliquer, je crois.” Et lui, naïvement, il espère que cette occupation lui fera pendant un temps oublier la douleur du jeûne, laquelle il ressent de façon évidente.

« Merde. Tu… Tu en as des séquelles ? » Swann paraissait sincèrement inquiet. Pas seulement parce qu’Arthur venait de déballer son sac à ses pieds et qu’il se devait de feindre une quelconque attention. Non, cela semblait aller au-delà de la bienséance pour démontrer une inquiétude en tout point liée à leur amitié et qui menait Arthur à ne plus vouloir se cacher derrière des excuses. « J’ai des troubles de l’attention. » Ce n’était pas quelque chose de nouveau en soit quand il avait toujours eu bien du mal à se concentrer sur une seule tâche en particulier, mais cela s’était réellement aggraver cette dernière année et le médecin avait mis cela sur le dos de son overdose sans qu’Arthur ne soit pleinement convaincu du lien de cause à effet. « Plus qu’avant en tout cas. » qu’il ajouta tout de même afin de nuancer. Il ne savait pas si cela pouvait s’ajouter à une potentielle liste de séquelle, mais c’est bien tout ce qui lui venait à l’esprit pour répondre à l’interrogation de Swann. « Je te crois. » C’était bien cela le plus fou dans toute cette action d’aveu déballé à toute vitesse. Arthur avait envisagé bons nombres de scénarios en frappant à la porte de l’anglais et jamais il ne s’était convaincu que Swann allait démontrer un véritable intérêt et une préoccupation quelconque à son sujet. Il aurait voulu répliquer, mais pour la toute première fois quelqu’un venait de le croire sur parole, sans demander de justifications, sans remettre en doute son honnêteté et Swann le croyait véritablement. Arthur ne s’était jamais rendu compte à quel point il avait besoin qu’on le croie, que l’on entende sa version de l’histoire quand bien même elle était complètement décousue et parfois loin d’être pourvue de logique. « Merci… » qu’il souffla doucement sans jamais croiser le regard de son plus vieil ami.

La douceur dont faisait preuve Swann poussa Arthur à poser la question pour laquelle il était réellement venu jusqu’ici. Il s’attendait à un refus, tout son esprit n’espérait que cela de la part de l’anglais, une bonne grosse réponse négative qui lui ouvrirait les portes de tous les interdits, mais une fois encore Swann se décida pour la surprise. « Oui. Bien sûr, oui. » Et jamais Arthur ne s’attendait à être autant soulagé d’entendre cette réponse. « T’es comme un frère pour moi, tu sais que je serai toujours là pour toi. » Il aurait voulu le contredire, lui rappeler qu’il n’était même pas invité au mariage de son ami, mais les mots restèrent coincer dans le fond de sa gorge. Arthur ne savait plus comment gérer les différentes émotions qui étaient en train de le submerger, entre un soulagement profond de pouvoir se faire entendre et la sensation que tout cela ne pourra jamais durer. Il avait tout autant envie de se cacher chez Swann pour reste de l’éternité, que ses pieds avaient envie de fuir dans la direction opposée. Il se sentait ballotté dans un sens et puis l’autre sans jamais trouver l’ancre qui parviendrait à le tenir plus longtemps d’un côté malgré la main tendue de Swann juste face à lui. « Il y a qu’à toi que je pouvais demander ça. » Que ce soit en Australie ou ailleurs dans le monde, Arthur ne faisait pas confiance à grand monde, mais il savait que Swann allait pouvoir mettre son propre jugement de côté. « Je dois faire quelque chose en particulier ? Ou je viens simplement à ces séances avec toi ? Je suis désolé, tu vas devoir tout m’expliquer, je crois. » Haussant des épaules, épuisées d’avoir tourné en rond et ayant la tête qui lui tournait légèrement, Arthur finis par reprendre place sur le canapé. « Je sais pas vraiment. » Ce n’est pas comme s’il était la personne la plus assidue au groupe de paroles ou même le plus attentif de tous. « Je… J’y vais quand je dois faire signer mon papier et j’ai jamais ouvert la bouche. » Une seule fois, on l’avait obligé à donner son prénom et à au moins catégoriser son addiction, il avait répondu du bout des lèvres avant de se renfermer dans son silence pour le reste de la séance. « Je suppose qu’ils veulent voir que l’on est entouré. » Il en venait à énumérer tout ce qui lui semblait plausible sans jamais avoir pris le temps d’écouter la fin des explications de Malone lors de la dernière séance. « Je peux pas aller dans un centre, j’ai trop de boulot et puis c’est pas pour moi ces trucs-là, je vais bien, okay ? » Les pensées d’Arthur ne faisaient plus réellement de cohérence, il cherchait à convaincre Swann que rien de tout cela n'était grave, tout en continuant à se persuader qu’il n'allait pas mourir et que son overdose n’allait pas se reproduire. « Et tu ne dois rien dire à mon père. Faut que tu me promettes Swann ! » Arthur venait tout juste de réaliser que le Buchanan était le seul à avoir un quelconque lien avec sa famille, juste assez pour être en contact avec eux si cela s’avérait nécessaire. Il fallait qu’il se calme, mais son esprit ne cessait de galoper dans tous les sens.

« J’ai des troubles de l’attention. » Il écoute avec sérieux, il note mentalement les informations, il hoche de la tête pour marquer le geste. Peu importe à quel point les choses peuvent parfois devenir très compliquées avec Arthur, il est et reste son ami, et Swann se montrera toujours compréhensif à outrance à son égard. Il n’y a rien de véritablement étonnant dans ce qu’il lui dit là, et si Swann a toujours été quelqu’un de très actif, pour Arthur cela a toujours revêtu une forme différente, qui prend aujourd’hui le nom de troubles de l’attention. « Plus qu’avant en tout cas. » Les pensées d’Arthur semblent s’aligner avec celle de Swann, et ce dernier comprend que les choses se sont aggravées pour son ami, sans que cela ne rende évidemment sa vie quotidienne plus simple. “Je comprends.” Il n’aurait pas pu s’en rendre compte avec quelques maigres minutes de discussion, mais si Arthur le lui dit, alors Swann le croit sur parole, à commencer parce qu’il n’a aucune sorte de raison de remettre sa parole en doute. Qui plus est, il n’est pas en train de vanter ses mérites, alors cela ne ferait aucun sens qu’il lui mente. « Merci… » La seule raison pour laquelle le blond rompt le contact visuel avec son ami, c’est pour simplement presser sa main autour de son bras, dans un geste quasi fraternel et l’assurance supplémentaire qu’il répondra toujours présent pour lui.

Lorsqu’Arthur lui formule enfin une demande d’aide, Swann y accède aussitôt, sans même y réfléchir à deux fois. S’il sait aujourd’hui qu’il protégera son couple envers et contre tout, il veut croire de tout son cœur que tendre la main à son ami n’interférera pas avec une telle idée, raison pour laquelle il ne réfléchit pas davantage. Le problème ne se posera pas. Il ne veut pas qu’il se pose. « Il y a qu’à toi que je pouvais demander ça. » Ce qui est une preuve d’amitié sans pareille, aux yeux de l’anglais, et il l’accueille avec bienveillance, comme en témoigne son sourire. Au-delà de vouloir se montrer amical, il veut surtout venir en aide à son ami, et c’est la raison pour laquelle il ne tarde pas davantage avant de lui demander comment il peut y arriver. « Je sais pas vraiment. Je… J’y vais quand je dois faire signer mon papier et j’ai jamais ouvert la bouche. » Swann esquisse une moue empathique, comprenant aisément au travers des mots d’Arthur qu’il n’est pas vraiment le meilleur exemple qu’ils aient. Pour autant, il a à coeur de se rattraper, et c’est tout ce que son ami retient de la situation: Arthur veut s’en sortir, et il y arrivera. “C’est pas grave. On verra ensemble comment les choses se passent.” qu’il se contente de dire. Ils sont dans cette aventure ensemble, maintenant, et ils veulent la même chose: qu’Arthur aille mieux, et qu’il finisse par aller bien. « Je suppose qu’ils veulent voir que l’on est entouré. » Maintenant plus que jamais, il l’est, et Swann jure qu’il ne le laissera pas tomber. « Je peux pas aller dans un centre, j’ai trop de boulot et puis c’est pas pour moi ces trucs-là, je vais bien, okay ? » L’idée apeure Arthur, et ce n’est pas quelque chose que le blond trouve étonnant. Lui aussi, dans sa situation, il n’aurait absolument pas envie de se retrouver dans un centre aux murs blancs et à l’odeur douteuse. Il ne doute pas du professionnalisme et de la dévotion du personnel de tels endroits, mais il comprend qu’ils ressemblent bien plus à une prison qu’à quoi que ce soit d’autre. “Personne ne parle de centre, d’accord ? On ira à ces séances tous les deux.” Justement parce qu’il ne veut pas le forcer à se soigner d’une autre façon ; il ne veut pas avoir à utiliser de tels recours qui ont trop de chance de se montrer contre-productifs.

« Et tu ne dois rien dire à mon père. Faut que tu me promettes Swann ! » Son regard trouve rapidement le sien et les mots de Swann s’ajoutent tout aussi rapidement à la conversation. “Je ne lui dirai absolument rien.” Parce que là encore, ce sera sans nul doute contre productif. “Ça sera juste toi et moi, d’accord ? Et on va s’en sortir.” C’est tout ce qu’il veut. Voir son ami heureux, épanoui, et en bonne santé. Arthur le mérite.