Greta était quelqu’un de simple, si le courant passait et qu’elle était à l’aise alors elle n’avait aucun mal à se comporter avec des inconnus comme elle l’aurait fait avec des amis de longue date. Alors elle ajoutait, ici et là, des pointes de sarcasme qui semblaient exaspérer un Arthur probablement peu habitué à ne pas être vu comme un dieu vivant qu’il fallait brosser dans le sens du poil pour ne pas le voir s’échapper. Elle n’avait aucune envie qu’il s’échappe, mais s’il restait, il devait le faire en ayant pleinement conscience de qui elle était réellement. « J’ai dit que je n’apprécie pas la raison qui les amène à s’intéresser à moi, j’ai pas dit que j’avais fait vœu de chasteté. » Il marquait un point. Il était évident que pour les activités auxquelles il s’adonnait avec ces filles-là, il n’avait même pas besoin de les apprécier et Greta se souvenait de certaines nuits passées avec des hommes qui n’en valaient pas la peine, juste pour s’amuser et la seule différence entre elle et Arthur était que si lui passait pour un don juan, elle, en revanche, ne pouvait réellement se vanter de ses histoires d’un soir - les joies de la société moderne. « Et après on se demande pourquoi les clichés ont la vie dure… » Greta avait arqué un sourcil après cette réponse parce qu’il lui avait semblé évident qu’elle n’était pas sérieuse. Bien sûr, le seul fait de se présenter lui avait ouvert un nombre de portes incalculable et elle savait qu’elle pouvait obtenir tout ce qu'elle voulait, pourtant, s’appeler ainsi ne l’avait pas rendue imbue de sa personne. Elle savait simplement ce qu’elle valait, et jugeait utile qu’Arthur en ait conscience. « Et donc toi tu as décidé de jouer la cruche ? » « Ni une cruche ni quelqu’un de superficiel comme le suggère ce foutu nom de famille. » C’était à son tour de lancer les hostilités alors que le caractère d’Arthur reprenait le dessus. « Je vais noter que t’as aucun second degrés et poursuivre, ce serait dommage de tout gâcher maintenant. Mais fais attention quand même, Coventry, tu peux redescendre aussi vite dans mon estime que tu y as grimpé. » Greta jouait avec son verre mais aussi avec son regard provocateur qu’elle venait planter dans celui d’Arthur pour ne plus le quitter. Elle imaginait à peu près son caractère et il ne devait pas être habitué à ce que quelqu’un n’aille pas dans son sens, pourtant, la blonde n’avait aucune crainte à l’idée de dire tout haut ce qu’elle pensait et une chose était sûre, Greta ne s’encombrait pas de discours qui la dévalorisaient. Malgré tout, cette petite pointe d’agacement du garçon avait là aussi quelque chose de séduisant et elle le savait au fond d’elle, elle serait prête à lui laisser beaucoup de chance maintenant qu’ils avaient fait un pas l’un vers l’autre. « Alors n’utilise pas la carte de ton nom de famille. » avait-il commencé avec cet air hautain qui le qualifiait si bien, son sourire à elle ne la quittait plus. « J’ai pas envie de connaître la Greta Sighbury confectionné pour le grand public, crois- moi celle-là je la connais déjà très bien. »  Il laissait planer l’idée qu’il existait plusieurs versions différentes d’elle-même et en prononçant tout haut cette vérité, il avait aussitôt balayé l’agacement de la blonde. Il avait raison, les journaux donnaient une version de qui elle était bien à eux et lire la presse la faisait toujours beaucoup rire, cependant, dans ce contexte, il était ensuite difficile de donner une autre image alors elle se plaisait à voir que lui arrivait très bien à voir au-delà.

« Je préfère la Greta qui me parle de ses bouquins et de ses envies d’ailleurs. » « Tu auras la Greta que tu mérites. » Parce que cette version là ne serait disponible que pour le Arthur Coventry qui s’était dévoilé ce soir. Il s’était tant dévoilé que Greta en voulait plus, se surprenant à vouloir le questionner et à le voir se prêter au jeu. « Je mords pas, je t’assure. » « Tu aboies juste, alors ? » avait-elle encore une fois répondu avec la répartie qui la caractérisait si bien et en faisant référence à ces moments d’animosité entre eux qui ne gâchaient pourtant pas ce tête à tête. Il avait secoué la tête et ignoré la provocation et elle l’avait gratifié d’un sourire parce qu’il semblait enfin se caler à son rythme et à accepter que la conversation n’ait pas pour but d’élire un gagnant. Au contraire, ils apprenaient à se connaître, se laissant aller à des discussions qu’elle n’avait pratiquement avec personne, pas avec son frère parce qu’il n’aurait pas toléré de savoir qu’elle envisageait de fuir, pas avec ses amis parce que leur évoquer son départ aurait été trop difficile, aurait rendu la chose trop concrète. « Loin c’est où ? » Greta avait laissé s’échapper un long soupir. « Je sais pas, la Nouvelle-Zélande ? Nouvelle-Calédonie ? Nouvelle quelque chose ? »  avait-elle commencé en riant. « L’Australie, sinon, Swann nous en a tant parlé… » En parlant, la blonde se rendait compte combien il lui était difficile de s’imaginer une nouvelle vie sans aucune attache, et l’idée de partir dans un pays ou l’un de ses amis pourrait s’établir rendait son hypothétique départ bien plus facile à imaginer. De ce qu’elle savait de la popularité de sa famille, si l’Australie avait un lien infaillible avec l’Angleterre et que leurs créations y étaient connues, ce n’était pas le cas pour les potins autour des Sighbury et la cadette passerait probablement inaperçue alors l’idée la laissait rêveuse. « Tu prends jamais le temps d’être seule, pas vrai ? » La solitude n’était effectivement pas quelque chose qu’elle connaissait et c’était sûrement la raison pour laquelle elle la redoutait tant. Depuis petite, Greta avait été entourée de gouvernants, d’attachés de presse et d’autres personnes travaillant pour ou avec ses parents. Le monde avait toujours ressemblé à une ruche en ébullition et si le bourdonnement cessait, cela l’angoisserait probablement, elle qui n’appréciait la solitude que dans l’immense chambre de chez ses parents. « J’ai aucun problème à être seule. Mais sur le long terme, j’ai besoin de mon frère. Y’a que lui qui comprend ce que c’est qu’être nous. » Arthur comprenait, lui aussi, mais il était encore trop tôt pour savoir s’il pourrait devenir un pilier dans sa vie et l’idée même était invraisemblable, leur relation ayant commencé de la pire manière qui soit. Entre drogues et heures entières à se chamailler comme des adolescents. Ce soir, pourtant, Arthur lui montrait qu’il était plus que tout ce qu’il avait bien voulu lui montrer et la curiosité de Greta était mise à rude épreuve. « Je sais mieux prétendre que toi, c’est tout. » Elle le croyait sur paroles parce qu’elle-même le voyait comme quelqu’un de sûr de lui et qui savait où il allait, un garçon en totale opposition avec elle dont les ambitions étaient freinés par une carrière déjà toute tracée au sein de sa famille. « J’ai aucune idée de ce que je ferais demain, j’ai choisi la médecine parce que c’est ce qui m’ennuie le moins, parce que j’ai conscience que je ne pourrais jamais être enfermée dans un bureau toute la journée comme mon père. » Greta ne le quittait pas des yeux, hochant la tête à chacune de ses paroles.« J’ai pas la prétention de vouloir devenir PGD ou un médecin reconnu, mais c’est ce qu’on attend de moi depuis la minute de ma naissance. » L’entendre parler de prétention l’avait fait sourire, lui qui débordait d’assurance et frôlait parfois le mépris selon à qui il s’adressait, voir cette carapace se fissurer au fur et à mesure de la discussion avait quelque chose d’excitant qui maintenait Greta en haleine. « Alors si de temps en temps je peux prendre le chemin de traverse, je me gêne pas. Personne ne va nous juger Greta, il n’y a que toi et moi dans ce bar. » Un rapide coup d’oeil dans le bar avait suffi à ce qu’elle réalise qu’ils étaient effectivement seuls, le bar proche de la fermeture, la laissant prendre conscience du temps qu’avait duré leur discussion. La blonde n’avait pas vu le temps passer, captivée par ces confidences et se laissant elle-même aller à des mots qu’elle n’avait sans doute jamais dit à personne. « Tu sais que tu viens de me donner envie de partir pour de vrai ? J’en parlais juste, mais au final, je crois que c’est ce dont j’ai besoin. Terminer mon bouquin, le publier et partir pour refaire ça, anonymement. » Le menton posé sur sa main, Greta se confiait sans même réaliser qu’elle était passée d’une appréhension à l’idée qu’Arthur se moque de sa passion pour l’écriture à se confier à lui avec une simplicifé déconcertante. « Est-ce que je suis remonté dans l’estime de Greta Sighbury ? » « Si je te dis oui, ça me mène à quoi ? » Ils se défiaient du regard et elle pensait pouvoir y lire tout un tas de choses. Elle l’avait prévenu un peu plus tôt, s’il venait de prendre une place privilégiée dans son estime, il pourrait la perdre tout aussi facilement - Greta fonctionnait comme ça, s’attachait et se détachait tout aussi vite.

« Tu veux aller faire un tour ? » Elle avait acquiesé en riant, se demandant pourquoi le barman ne les avait pas déjà mis dehors. Peut-être parce que lui aussi avait réalisé l’alchimie entre ces deux-là et qu’il n’aurait pas pu se résoudre à percer cette bulle dans laquelle ils étaient depuis des heures. « Tu m’emmènes au bord de la Tamise ? Pas que je veuille t’entraîner dans un truc romantique, c’est le seul endroit qui me vient en tête » Il avait haussé les épaules et la blonde s’attendait déjà à une de ces remarques assassines mais elle avait attrapé son sac à main pour prendre la sortie du bar, tendant au passage un billet en guise de pourboire au serveur en lui souriant. Il avait participé, sans le vouloir, à quelque chose de grand - le rapprochement de deux gosses de riches qui n’avaient avant cela aucune affinités. Tout était devenu si naturel entre eux ce soir qu’elle n’aurait pas été étonnée qu’il lui prenne la main et elle aurait apprécié retrouver cette connexion qu’ils avaient eu dans le bar alors qu’Arthur traçait des lignes sur son avant-bras. Ils étaient restés silencieux jusqu’à arriver au bord du fleuve où Greta avait enlevé ses escarpins pour soulager ses pieds. « Promis je dirais à personne qu'Arthur Coventry a emmené une fille ici. » avait-elle lancé parce que quelque chose lui disait qu'il n'était pas du genre à participer à ce genre de tableau romantique à souhait. Ce n'était pas non plus ce que recherchait Greta, elle avait juste envie de voir cet endroit, de profiter du calme de l'eau et de ne pas voir s'arrêter cette soirée. Et, surtout, elle avait encore évité tous les clichés en lui proposant simplement de rentrer chez lui ou de passer la nuit quelque part. Cela aurait été trop simple et aurait probablement gâché ce qu'ils étaient en train de construire. « T’as déjà passé la nuit avec une fille, genre juste passé la nuit ? » Ils s’étaient assis sur un banc et elle avait posé sa tête sur son épaule sans même demander la permission : dans d’autres circonstances, ils auraient pu déjà être sous les draps et s’il n’avait pas envie d’un rapprochement, il n’aurait pas hésité à lui faire comprendre. « Je suis en train de me dire que j’ai jamais passé autant de temps à discuter avec un mec. » Sauf Swann ou des amis masculins, peut-être, et encore, elle ne se souvenait pas avoir fait la fermeture d'un bar comme ils venaient de le faire. Et ce duo là n'avait rien à voir avec ses amitiés masculines. La nuit était tombée depuis bien longtemps et le reflet de la lune sur l’eau avait captivé Greta jusqu’à ce qu’elle retrouve le regard d’Arthur qu’elle était restée là, à fixer en souriant.

« Ni une cruche ni quelqu’un de superficiel comme le suggère ce foutu nom de famille. » Elle venait de mordre à l’hameçon et Arthur du réfréner un sourire vainqueur. Donc Greta Sighbury avait du caractère. Pas simplement pour l’écran de fumée qu’elle présentait en société, mais plutôt pour défendre cette personne qu’elle était réellement une fois les artifices mis de côté. Arthur était ravi, lui qui préférait les femmes ayant du répondant et pas celle qui était prête à tout pour se plier aux envies d’un seul homme. « Je vais noter que t’as aucun second degré et poursuivre, ce serait dommage de tout gâcher maintenant. Mais fais attention quand même, Coventry, tu peux redescendre aussi vite dans mon estime que tu y as grimpé. » Levant les mains en l’air en signe de paix, Arthur se laissa quelque peu hypnotiser par le regard de la blonde. Il aimait ce qui se jouait sous ses yeux. Peu à peu, chacun en venaient à oublier le rôle qu’ils avaient pour habitude de tenir, laissant apparaître des réactions bien plus spontanées. « Je voudrais pas te fâcher. » qu’il souligne d’un sourire blagueur. Greta lui faisait tourner la tête et Arthur n’avait aucune envie de voir la conversation prendre fin, mais jouer avec les limites a toujours été son jeu favori. Il souhaitait la pousser dans ses retranchements pour mieux observer la moindre de ses réactions. Greta dansait avec lui, visiblement amusé par cette ambiance. « Tu aboies juste, alors ? » Une fois encore, Arthur hocha la tête pour mieux marquer l’affirmation. « Uniquement pour tes beaux yeux. » Il jouait la carte de la provocation à s’en brûler les doigts, mais Arthur était déjà persuadé que le jeu en valait la chandelle. S’il n’avait aucune idée où cette soirée allait bien pouvoir les mener, il était certain de ne pas vouloir voir cette dernière se terminer.

La conversation glissait d’un sujet à l’autre sans que jamais il ne se lasse. Au contraire, Arthur se trouvait à devenir curieux, étant véritablement intéressé par tout ce que Greta avait à lui dire. « Je sais pas, la Nouvelle-Zélande ? Nouvelle-Calédonie ? Nouvelle quelque chose ? » Le rire de Greta résonna dans la pièce amenant un léger rictus sur les lèvres d’Arthur. Elle paraissait bien moins renfermée désormais, prête à lui parler un peu plus ouvertement de ses propres envies. « L’Australie, sinon, Swann nous en a tant parlé… » Pourtant, elle ne semblait que partiellement emballée par ses envies d’ailleurs, comme si elle n’osait pas vraiment faire le premier pas. « J’ai aucun problème à être seule. Mais sur le long terme, j’ai besoin de mon frère. Y’a que lui qui comprend ce que c’est qu’être nous. » Arthur ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. Il connaissait bien le frère de la blonde, Carmine, j’ai un balai coincé dans le cul, Sighbury. S’il lui était facile de prendre le temps avec Greta, il n’avait jamais tenté d’avoir la moindre conversation avec le second héritier. Arthur ne se mélangeait que très peu avec ses semblables, surtout ceux qui ne lui inspiraient rien. Il pouvait comprendre le besoin que ressentait Greta d’être entouré d’une certaine familiarité, mais à un degré assez faible. Arthur n’était pas aussi proche de Charlotte, sa petite sœur. Tout du moins, pas au point de ne pas savoir imaginer sa vie sans elle. Depuis la petite enfance, Arthur s’était voulu être un garçon indépendant, ne réclamant jamais de câlin ou que l’on joue avec lui, préférant concentrer l’attention des adultes sur sa capacité à s’adapter au moindre évènement. « Ne t’enferme pas dans des habitudes faciles. » qu’il finit par souffler à une Greta qui lui paraissait rêver les yeux ouverts désormais. « Je suis persuadé que tu t’en sortirais à merveille toute seule. » Il sentait chez elle cette force de caractère nécessaire pour oser s’aventurer sur un terrain de jeu inconnu. Maintenant, Arthur se demandait si elle serait partante pour entamer un bout d’aventure avec lui. Ses propres pensées venaient le surprendre, mais Arthur laissait les évènements s’enchaîner sans en avoir une pleine maîtrise.

Le temps s’était écoulé à toute allure, les sujets s’enchaînant sans que jamais la conversation ne soit forcée. La plaisanterie commune avait laissé place à quelque chose de plus profond, un échange sur leur vision de ce monde qui était le leur. Arthur n’avait aucunement envie que tout s’achève brutalement sur la fermeture d’un bar et le partage d’un trajet en taxi. « Tu m’emmènes au bord de la Tamise ? Pas que je veuille t’entraîner dans un truc romantique, c’est le seul endroit qui me vient en tête » Surpris par la demande, il finit néanmoins par hocher la tête. Se levant dans un mouvement quelque peu exagéré, il vint présenter son bras à Greta, tel le gentleman qu’il avait été éduqué à devenir. « Mademoiselle. » Ils n’étaient pas des enfants de cinq ans et Arthur n’allait clairement pas lui tenir la main, mais ils pouvaient marcher ainsi, laissant le silence remplir tout ce qu’ils n’avaient pas encore su se dire. Habituellement mal à l’aise avec le silence, Arthur ne ressentait pas le besoin de poursuivre la discussion, laissant ses pensées rembobiner tout ce qui venait de se dérouler dans ce bar du bout du monde. « Promis je dirais à personne qu'Arthur Coventry a emmené une fille ici. » Il éclata de rire en venant s’installer à ses côtés. « S’il te plaît. J’ai une réputation à tenir ! » Arthur savait parfaitement ce qui pouvait se dire à son sujet. On avait fait de lui un goujat dès qu’il fut en âge de fréquenter la gent féminine et il n’avait jamais donné tort aux rumeurs. A quoi bon, il n’avait rien à prouver à personne. « T’as déjà passé la nuit avec une fille, genre juste passé la nuit ? » Il dût retenir une grimace, son regard rivé sur le fleuve. Il n’était pas certain qu’elle apprécie la réponse qu’il pourrait lui donner. Arthur n’avait jamais fait cela, il ne prenait jamais le temps de connaître les filles avec qui il couchait. Ses relations étaient éphémères, sans cesse. Arthur se voulait d’être un homme sans attache. Il avait testé quelques relations, mais rien n’était sérieux, il n’avait pas le temps pour cela, n’en avait jamais ressenti l’envie pressante. « Pas vraiment non. » qu’il finit par murmurer sans oser se tourner vers Greta. « Je suis en train de me dire que j’ai jamais passé autant de temps à discuter avec un mec. » Il relâcha un soupire qu’il n’avait même pas remarqué retenir, soulagé de comprendre que Greta n’avait pas posé la question pour émettre un jugement, mais bien plus pour constater un fait. Elle comme lui n’avait jamais ressenti une telle connexion, de celle qui vous pousse à rester assis l'un à côté de l’autre, discutant de tout et de rien, sans jamais avoir envie de presser la conclusion entre des draps froissés. Arthur était attiré par Greta, il n’allait pas le nier, mais il avait également envie d’apprendre à la connaître et n’avait pas à cœur de simplement l’attirer dans son lit pour une nuit sans lendemain.

Un léger sourire vint étirer les lèvres d’Arthur alors qu’il sentit le regard de Greta sur son profil. Il prit une seconde avant de tourner la tête dans sa direction, le visage de la jeune femme soudainement très proche du sien. Il n’existait plus rien en dehors de la bulle qui s’était créée entre eux des heures auparavant. Il n’avait aucune idée de ce qui était en train de se dérouler. Une étrange sensation de looping venait de s’installer dans sa poitrine et son regard était verrouillé à celui de Greta. Il aurait pu relever la moindre nuance d’opale dans le creux de ses prunelles avant que son regard ne s’abaisse sur les lèvres de la jeune femme. Il en avait envie, de l’embrasser. Pas pour le pari, ni pour poursuivre un jeu idiot. Il ne savait pas réellement ce qui l’animait, mais Arthur finit par relever la main en douceur, venant placer une mèche blonde derrière l’oreille de Greta. « Qui aurait cru qu’on finirait par se parler sans s’insulter à chaque phrase. » Un rire nerveux s’échappa d’entre ses lèvres alors que son corps se rapprochait dangereusement de celui de la jeune femme. Une fois encore, ses yeux firent un aller-retour entre le regard intense de Greta et ses lèvres rosées. Arthur pouvait sentir le souffle de la blonde contre sa joue et il ne voulait plus reculer. Il avait l’intention de plonger tête baissée. Il attendit une seconde, observa ses lèvres encore une fois avant de relever les yeux. Ce qu’il lut dans le regard de Greta le poussa à rompre la distance entre eux. Ses lèvres se posèrent sur celle de Greta dans un geste à la fois doux et timide.

La discussion avait pris une tournure légèrement différente et si en temps normal elle aurait du donner envie à Greta de faire un pas en arrière et de repartir sur les à priori qu’elle avait à propos d’Arthur, ce soir était différent. Cette tension rajoutait au côté excitant de le découvrir autrement et elle avait préféré faire de cette déclaration de guerre un jeu de séduction. Greta le mettait en garde, pourtant, ses yeux le dévoraient et l’alcool l’aidait à avoir assez de confiance en elle pour défier l’héritier. « Je voudrais pas te fâcher. » Son visage s’était abaissé pour l’encourager dans un mouvement approbateur. « Uniquement pour tes beaux yeux. » Et la jeune femme était venue battre des cils de manière excessive pour l’exaspérer encore un peu plus mais plutôt que d’attaquer, il avait cette fois choisi d’éclater de rire et elle l’avait imité, ravi de le voir suivre sa ligne de conduite. Si la conversation la captivait, Greta ne réussissait cependant pas à être totalement concentrée, l’idée de l’avoir avec Arthur Coventry lui laissant un sourire en coin dont elle ne se défaisait pas. Jamais elle n’aurait pu penser pouvoir se confier autant à quelqu’un et voir que c’était avec lui qu’elle le faisait avec le plus de facilité avait quelque chose de déroutant et elle s’était surprise à l’observer d’une manière différente. Ses yeux venaient se poser sur son visage et, n’y voyant plus tout l’égocentrisme dont il pouvait faire preuve mais la sincérité de ses paroles, s’y attardaient toujours un peu plus. « Ne t’enferme pas dans des habitudes faciles. » Ses pupilles avaient trouvé les siennes désormais et il avait toute son attention. « Je suis persuadé que tu t’en sortirais à merveille toute seule. »  Mais ce nouveau visage qu’il lui montrait ne lui donnait aucune envie d’être seule et elle avait baissé les yeux pour se forcer à chasser cette pensée de son esprit. « C’est le plus beau compliment que tu pouvais me faire, ça. » avait-elle finalement conclu.

C’était sûrement l’alchimie du moment qui l’avait fait choisir si rapidement un lieu parce qu’elle n’avait aucune envie de se séparer de lui tout de suite. Ils avaient passé des heures ensemble maintenant mais ce n’était pas assez, elle avait besoin de plus. « Mademoiselle. » Elle avait volontiers attrapé son bras avant de le suivre avec enthousiasme, alors que quelques heures auparavant, c’était avec une certaine appréhension qu’elle avait décidé de poursuivre la soirée avec lui. Puisqu’elle avait été à l’initiative de leur escapade sur les bords de la Tamise, l’héritière était venue le rassurer, cette soirée resterait leur petit secret. « S’il te plaît. J’ai une réputation à tenir ! » Que ce soit pour préserver sa - mauvaise - réputation ou pour garder ce moment rien qu’à eux, Greta n’en dirait rien mais profiterait de chaque instant. Comme pour s’assurer que le moment demeurerait unique pour lui aussi, comme si elle sentait que cette soirée serait le début de quelque chose, elle lui avait demandé s’il avait déjà eu l’occasion de passer une nuit à discuter, sans aucune arrière-pensée. « Pas vraiment non. » Alors elle avait confirmé la même chose et avait détourné le visage pour dissimuler le sourire qui ne la quittait plus. Ils s’étaient installés face au fleuve et ils étaient restés silencieux, Greta affichait toujours ce même sourire qu’elle espérait plus discret dans la pénombre et elle avait finalement tourné la tête pour prendre le temps de l’observer comme elle l’avait fait dans le bar. A nouveau, elle se surprenait à apprécier chacun de ses traits et lorsqu’il s’était tourné vers elle, le rose lui était monté aux joues à l’idée de s’être fait surprendre. Mais Arthur avait soutenu son regard et ce moment avait été encore plus intense que les précédents. A chaque seconde qui s’écoulait, elle pouvait sentir son estomac se nouer, l’attente se mélangeant à l’appréhension. Sa main avait frôlé sa joue et les sentiments s’étaient décuplés. Il avait replacé une mèche de cheveux derrière son oreille et le regard de la blonde suivait chacun de ses mouvements. « Qui aurait cru qu’on finirait par se parler sans s’insulter à chaque phrase. » Il avait presque murmuré, elle était restée silencieuse, elle n’avait plus rien à dire et l’attendait. Arthur s’était rapproché d’elle et c’était son cœur qui battait la chamade alors que les pupilles de l’anglais oscillaient entre ses yeux et ses lèvres. Greta suppliait du regard sans jamais dire un mot et ce moment avait semblé durer des heures avant qu’enfin ses lèvres ne viennent se poser sur les siennes. C’était différent de tout ce qu’elle avait connu, un sentiment fort qui l’effrayait presque. Pourtant, perdue dans ce baiser qu’elle lui avait rendu en posant sa main sur l’arrière de son crâne pour perdre ses doigts dans ses cheveux, elle avait fini par ne plus penser à rien d’autre qu’à lui. « Je te jure que si tu me rappelles pas demain... » avait-elle murmuré, son front posé sur le sien et leurs lèvres encore à quelques centimètres seulement.