Jo lui manque. Un peu, juste un peu, mais elle lui manque quand même. Parce qu’apparemment, statuer qu’elles ont le droit de s’embrasser sans déjà s’imaginer à devoir assumer l’étiquette de “couple” ne fait pas tout, la blonde ne souhaite rien changer à cette entente, sauf peut-être justement le fait de la voir un peu plus souvent. Un peu, juste un peu. Pour boire des milk-shakes, pour qu’elle ressemble à nouveau à une gamine incertaine de pouvoir aborder un sujet ou un autre de peur que Jo explose ; pour une fois que ce n’est pas elle-même qui menace d’un tel comportement.

Les milk-shakes au nombre de trois tiennent dans un équilibre instable entre ses mains maladroites, elle dont le trajet en voiture ne fait finalement que peu de sens, du poste de police au restaurant, pour finalement retrouver le centre-ville et l’appartement de Jo, partagé avec personne d’autre qu’Ava. Ava qui, bien sûr, a elle aussi le droit à sa boisson, ayant été adoptée bien trop tôt par Charlie en tant que sa propre grand-mère pour que cela ne soit pas la traduction de son manque flagrant de relations avec sa famille. “Ouvrez, c’est le livreur.” Qu’elle annonce, un peu trop amusée de sa blague pour ce qu’elle est véritablement, pas du tout douée pour tenter d’opter pour une voix plus grave par la même occasion.

“Bonsoir Jo.” Elle penche légèrement la tête, ajoute un sourire trahissant son bonheur, lui présente sa première boisson avant de déjà faire quelques pas dans l’appartement qu’elle connaît de toutes façons déjà. “Bonsoir Ava.” Elle parle à peine plus fort, affiche un sourire différent, mais lui tend toujours sa boisson, en précisant que sa petite-fille a pensé à elle - Jo, bien sûr, elle n’oserait pas se qualifier ainsi. Charlie n’en est pas là, elle se contente de jouer le bon rôle, simplement parce que c’est facile. Et après avoir échangé quelques mots avec sa grand-mère, elle dédie déjà à nouveau toute son attention à la danseuse, en profitant pour enfin prendre une gorgée de sa boisson à son tour, les yeux brillants et amusés. “Je savais pas que t’avais des amis. Genre, vraiment, je veux dire. Pas juste des gens que t’as pas beaucoup insulté.” Le genre d’amis sur lesquels elle peut compter malgré son mauvais caractère, le genre de personnage qui comptent assez à ses yeux pour qu’elle pense à leur souhaiter un bon anniversaire sur ses réseaux sociaux sacrés, quitte à mettre à mal son feed. “C’est un truc de chanteur de tous vous connaître entre vous ?” Ou un truc de star en sens large, peut-être. Charlie n’en sait rien, bien sûr, ce n’est pas son monde et cela ne l’intéresse pas le moins du monde. Ce qu’elle veut savoir, en revanche, c’est la relation qui les unit tous les deux, avec Midas. Non parce qu’elle se reproche quoi que ce soit - oh, non, certainement pas - mais bien uniquement parce que la curiosité l’anime, comme à son habitude.

@jo carter

Charlie n’eut pas besoin de sonner à la porte de la petite maison qu’elle partageait avec Ava pour que Jo la laisse entrer. Avant qu’aucun bruit ne vienne déranger la quiétude relative du 421, un air de Sarah Vaughan s’échappant d’une petite radio dont elle régla le volume au passage, elle lui ouvrit la porte à la volée en lui disant "Entre." Sans lui accorder un seul regard sur le moment, trottinant un pied nu, l’autre surélevé par un talon, ce qui rendait sa démarche inconfortable, jusqu’au salon ou un tas relatif de tissus pailletés et de chaussures en tout genre était disposés pour un tri saisonnier qui lui fit réaliser qu’elle s’habillait probablement beaucoup trop court — mais aussi qu’elle avait toujours des fringues qui appartenaient à Megan. Rien à foutre, elle statuerait sur quoi en faire plus tard, quand elle serait seule à ronger son frein à propos de la blonde qu’elle n’avait pas revu depuis le mois d’août. En attendant, elle se laissa asseoir sur le canapé pour enlever son talon, et suivit brièvement du regard l’échange entre Ava et Charlie, saisissant le milk-shake qu’elle lui tendit avec grâce. Le sien, Jo le posa sur la table-basse avant de se lever pour dire à sa grand-mère "Je vais un peu dehors, t’appelles si t’as besoin de quelque chose, hm ?" Et Ava roula des yeux comme la femme lucide qu’elle était parfois, lui disant de filer en tirant sur sa paille, le nez plongé dans un bouquin qu’elle savait qu’elle ne lisait pas, se contentant de suivre les lignes des yeux parce qu’elle n’était plus capable que de ça, ces derniers temps "Viens." que dit Jo à Charlie en lui montrant la direction de la cuisine de la tête et en dépassant la porte qui donnait vers le jardin, plus précisément sur une véranda ouverte où était entreposées et entretenues des plantes en pots et des vieilleries au centre desquelles trônait une balancelle qu’elle investit lourdement, un pied glissé sous ses fesses.

Elle prit une gorgée de son milk-shake en attendant que Charlie s’installe à côté d’elle, la suivant des yeux quand elle eut soudain l’air d’une débile profonde tandis qu’elle tentait de comprendre ce qu’elle était en train de lui demander. Elle fronça le haut de son nez en avalant sa gorgée, eut besoin d’une seconde ou deux pour comprendre ou elle voulait en venir, puis ouvrit finalement grand la bouche quand elle crut saisir le sens de sa question sans savoir si elle avait bon. Mais elle n’était pas idiote Jo, alors elle lui rétorqua sans craindre de se planter "Tu m’as perdue le temps de trois secondes. Je suis pas bonne pour résoudre les énigmes." qu’elle lui fit, secouant la tête en enchaînant, haussant les épaules en dérivant ses yeux sur la panorama du jardin des Carter "Tu parles de Sterling ?" Sterling, la désinvolture dans son ton était aussi factice que la ligne fournie de ses longs cils.
Mais évidemment, de qui d’autre ? C’était une question qu’elle aurait pu se poser à elle-même, tant depuis quelques temps, ses pensées ne tournaient quasiment qu’autour de lui — si ça devenait le cas pour ses conversations, elle commencerait à prétendre que c’était un problème. Mais pas dans l’absolu. Dans l’absolu, elle eut un léger sourire en biais qui lui fit ajouter, calant son gobelet dans l’espace vide formé par ses cuisses "Pourquoi ça t’intéresses, tu veux des scoops sur lui pour briller en société ?" Et peut-être qu’elle se vantait indirectement dans le fond, d’en savoir assez sur lui pour écrire un recueil, mais c’était chose courante avec Jo, de se faire mousser, alors comment savoir ?  Elle secoua la tête tout en reposant ses yeux sur Charlie, et après avoir tiré une  nouvelle rasade de milk-shake sur sa paille, elle ajouta "On a fait la même émission. Et quand je dis, on a fait la même émission, je veux dire qu’on l’a faite ensemble. C’était le deuxième finaliste de ma saison." Inutile de dire que c’était elle la première et de mettre l’accent sur le fait que c’était lui qui avait remporté le trophée. Sa carrière le prouvait sans qu’elle ne soit obligée de mettre sa défaite en exergue. Doucement, ses sourcils se froncèrent tous les deux à la fois "Tu sais pas utiliser Google, ou comment ça se passe ?" La question se justifiait. Parce qu’elle avait vérifié elle-même ; quand on tapait Midas Sterling sur Google et qu’on cliquait sur Images, à la troisième lignes des petites vignettes, photo deux de cette même ligne, soit à la quinzième photos de l’ensemble, c’était elle qu’on voyait à ses côtés, et personne d’autre.

@Charlie Villanelle  

Le bazar qui est celui de Jo dans l’appartement lui fait relativiser celui qui se produit parfois, lorsqu’elle a la garde des jumeaux plus de deux jours de suite, ou quand elle est occupée à droite ou à gauche pour prendre le temps de s’occuper de son appartement. En somme: assez souvent. "Viens." Et elle vient donc, bien sûr, ses lèvres enroulées autour de sa paille pour tenter de cacher le sourire qu’elle affiche à ainsi observer Jo se démener pour mettre un pas devant l’autre dans cette allure plus déséquilibrée que jamais. “T’es vraiment du genre à faire un vide dressing ?” Non, elle ne le croit pas un seul instant. Elle pense plutôt que Jo s’assure de ne pas avoir oublié la tête décapitée de qui que ce soit dans une de ses (immenses ?) poches.

Comme si elles avaient dix ans, la blonde prend donc place à son tour sur la balancelle, un regard amusé posé en direction de la danseuse alors qu’elle déblatère tout son discours et ses interrogations cachées au sujet de Midas et de cette photo postée sur internet. "Tu m’as perdue le temps de trois secondes. Je suis pas bonne pour résoudre les énigmes. Tu parles de Sterling ?" Est-ce qu’elle lui a dit son nom ou est-ce qu’ils se sont contentés de s’envoyer en l’air ? Étonnamment (sans doute aucun), Charlie penche plutôt sur la seconde option. Mais puisqu’il est une star, elle associe naturellement l’un et l’autre, raison pour laquelle elle se contente de hocher la tête, sans doute avec une vigueur trahissant sa curiosité toujours plus grande. "Pourquoi ça t’intéresses, tu veux des scoops sur lui pour briller en société ?" - “Ca veut dire que t’en as ?” Une question répond toujours à une autre, cela devrait être une règle entre elles, surtout alors que Jo sait déjà qu’elle se moque bien de connaître les dessous du monde des stars. Les scoops, ce n’est pas ce qui l’intéresse, étrangement. Le fait de savoir si oui ou non Jo en a à son sujet, par contre, ça l’intéresse. Allez donc savoir pourquoi. Peut-être que c’est parce que cela pourrait prouver qu’ils se connaissent bien, peut-être même vraiment bien. Qui sait ? (Jo, bien sûr que Jo sait.)

"On a fait la même émission. Et quand je dis, on a fait la même émission, je veux dire qu’on l’a faite ensemble. C’était le deuxième finaliste de ma saison." Charlie hoche la tête, sans pour autant oublier de faire la moue: c’est un bon début, mais si c’est ce à quoi se résume son scoop au sujet du chanteur, c’est bien décevant. Elle a su qu’ils avaient fait la même émission mais ses recherches n’étaient pas allées jusqu’à savoir s’ils avaient été en lice la même année. Maintenant, plus aucun doute ne demeure quant à une question qui n’existait pourtant pas. "Tu sais pas utiliser Google, ou comment ça se passe ?" - “Pardon, c’est un truc du commun des mortels ça, de demander à ses amis plutôt qu’à Wikipedia.” Elle n’est pas amère, Charlie, pour une fois. Elle se contente de lui rappeler qu’elles évoluent encore dans des mondes assez différents et que oui, bien sûr qu’elle aurait cherché son nom sur Instagram ou dans des articles si elle en avait eu la curiosité, mais elle préférait encore demander directement à celle qui est devenue la principale intéressée de cette histoire. “Il est resté ami avec toi alors que tu lui as raflé la victoire sous le nez ? Mignon, ce Midas.” Nul besoin de préciser qu’il est mignon dans tous les sens du terme, l’australien, et que si Charlie commence doucement à balancer ses pieds sous la balancelle, c’est parce qu’elle a définitivement oubléi de laisser son âme d’enfant quelque part en grandissant.

"T’es vraiment du genre à pas en faire ?" Ce fût la réponse de Jo à Charlie qui n’en finissait plus d’apprendre des choses à son sujet visiblement. Mais oui, elle était de ce genre-là. La blonde serait même surprise d’apprendre que la majorité des fringues qu’elle avait dans son placard était de la seconde main qu’elle dénichait en friperie ou dans les brocantes, et que sa grand-mère reprisaient comme la couturière émérite qu’elle avait été, du moins quand elle se rappelait comment faire, et que ses vieilles mains réussissaient à faire autre chose que trembler. Mais Jo, elle n’était pas sans savoir que le point de vue de Charlie, il partait d’un constat fantasmé par ce qu’elle voulait bien lui donner, et laisser transparaître, et ça ne la gênait pas de faire partie de sa liste de personnages préférés dans ce grand roman qu’était sa vie — tant qu’elle était à la première place de cette liste, ça lui allait de toute façon.

Plus tard, elle se demanderait comment la conversation avait pris cette tournure quand elle venait à peine d’arriver ici, à la maison de sa grand-mère qui transpirait d’une tranquillité dans laquelle elle se sentait bien, bien que parfois, ça l’oppressait de se cantonner à ce cadre-là quand elle savait qu’elle avait tout un champs de possibilités ailleurs, dans un endroit qu’elle avait foulé de ses talons hauts, au moins le temps d’une saison. Et comme tous ses songes en ce moment la menait irrémédiablement à Midas, elle se demanda si Charlie n’avait pas des talents de voyance pour parler de lui juste maintenant sans que Jo ne se sente véritablement en phase avec l’idée d’en dire davantage.
Elle ne parlait pas de Midas, Jo. Jamais. À personne. Il faisait partie de ce qu’elle gardait pour elle, elle la grande gueule qui passait son temps à l’ouvrir pour tout un tas de choses : lorsque Midas était concerné, elle devenait brusquement moins volubile, parce qu’elle estimait que tout ce qui tournait autour de lui, autour d’eux en l’occurence, ça ne regardait personne. Elle était prête à laisser les gens s’imaginer ce qu’ils voulaient, ça avait été le cas durant toute la durée de la dernière saison de The X Factor, mais quand il s’agissait d’être vraie et de se montrer précise pour poser des mots, elle était soudainement pudique. Et ça n’y coupa pas là non plus, quand elle répondit à Charlie avec un léger sourire en coin qui pourrait passer pour de l’effronterie, quand en réalité ce n’était que de la pudeur déguisée "Ça veut dire que je dirais rien, pas même sous la torture." Toute forme de torture, même la plus cruelle.
Elle tira sur sa paille pour avaler une gorgée fraîche  et trop sucrée de son milk-shake lorsque son regard se perdit sur Charlie et sur sa capacité à réagir comme une gamine de 12 ans face à un nouveau jouet "Faut t’habituer à côtoyer le haut du panier, ma chérie." qu’elle lui fit en fronçant le nez quand sa réponse à propos de Google et Wikipédia lui vint à la figure, et qu’elle l’observa en plissant les yeux, ses sourcils se fronçant de nouveau quand elle enchaina, et qu’assez naturellement malgré sa réserve, Jo lui rétorqua "C’est lui qui a gagné. Et on a jamais été amis." Ce n’était pas mesquin de le prétendre, c’était la vérité. Si on demandait à Jo quelle place occupait Midas à ses yeux, le terme ami ne lui viendrait même pas à l’esprit parce que ce n’était pas ça : c’était autre chose, un entre-deux en plus de la certitude partagée qu’il était probablement ce qui ressemblait le plus à une âme-soeur dans le sens le plus basique du terme. Est-ce que ça regardait Charlie ? Pas le moins du monde, et en ce sens, elle préférait s’arrêter sur ce qu’elle ajouta dans un léger rire qui la fit remuer sur la balancelle, troquant son gobelet contre celui de Charlie pour y goûter avant de lui dire, son éternel sourire mutin accroché à son visage peu maquillé, aujourd’hui "Il m’a demandé le numéro de Meg une fois, t’as peut-être tes chances si vraiment il t’intéresse." Mais il préfère les brunes, qu'elle pensa en simultanée. Et enfin, elle porta le gobelet qu’elle avait piqué à Charlie à ses lèvres, mordillant le bout de la paille en souriant sous cape puisqu’elle ne faisait que plaisanter, assez peu intéressée par le fait de jouer les rabatteuses pour Midas en réalité.

@Charlie Villanelle  

"Ça veut dire que je dirais rien, pas même sous la torture." Ça veut dire qu’elle en a. Elle en a définitivement, bien sûr. Charlie n’a pas besoin de plus pour déjà afficher un sourire conquérant, quand bien même elle ne lui a pas cédé la moindre once de terrain, quand bien même elle a tout simplement rien gagné non plus. Au fond, ce n’est pas tant les scoops en eux-mêmes que la blonde recherche, elle qui s’amuse tout simplement de l’idée qu’ils existent. Ce qu’il se passe dans les coulisses de leurs histoires, ça ne l’intéresse plus vraiment. "Faut t’habituer à côtoyer le haut du panier, ma chérie." Le haut du panier est en train de boire un milk-shake sur une balancelle alors que sa mamie veille sur le vide dressing en cours, alors bizarrement, elle pense qu’elle n’aura aucun mal à s’adapter au changement, et les mots de Jo la font rire simplement. Elle prend à son tour une gorgée supplémentaire de sa boisson, sourire dans le vide, sans doute un peu trop fière d’avoir en sa possession un fait que Jo ignore. “T’as pensé à consulter ? Pour ton problème de chevilles ?” Peut-être que Charlie devrait cocher les corps de métier du haut du panier avec qui elle arrive à aller au bout des choses. Ce serait marrant, tant que cela n’arrive pas aux oreilles des jumeaux bien sûr.

"C’est lui qui a gagné. Et on a jamais été amis." Peut-être que si elle continue de le répéter, elle pourra arriver à convaincre Charlie. Pour l’heure encore, cela semble largement compromis, puisque cette dernière se contente de lever les sourcils et le regard en sa direction, l’air de dire “oui bien sûr”. Au moins, elle est assez occupée à la toiser et la juger pour ne pas se plaindre du changement temporaire de milk-shake que Jo lui impose. Dans ce jardin, elles ont l’air d’enfants qui parlent de garçons. "Il m’a demandé le numéro de Meg une fois, t’as peut-être tes chances si vraiment il t’intéresse." Plus que jamais, elle laisse un sourire naître et grandir sur ses lèvres, son regard clair porté sur celui de Jo. “Je suis une grande fille, j’ai déjà son numéro.” Est-ce que ce sont les blondes qui l’intéressent, alors, s’il a voulu tenter quelque chose avec Megan ? Oh, simple question de curiosité: Charlie ne s’en plaint pas, elle ne s’en vante pas non plus, bien consciente qu’une fois leurs habits enlevés, il n’est plus du genre à se demander la teinte exacte de la chevelure de la femme face à lui. “C’est vrai que maintenant que tu le dis, il a dû parler à peu près dix sept fois de sa victoire.” Elle ne le considère pas comme imbus, simplement il aime rappeler ses exploits et ses qualités, sans que ce soit un trait de caractère pour déplaire à Charlie qui a très largement épuisé son quota de petits amis à devoir prendre dans ses bras pour un rien. “Il s’est rien passé entre toi et lui ? Parce que un, il est plutôt pas mal et pas mauvais non plus et deux, ça ça serait clairement le genre de truc que j’aurais lu sur une page Wikipedia.” Ils n’ont jamais vraiment été amis, mais ça n’empêche pas qu’ils aient pu remplacer ça par autre chose. Elle n’en sait rien, Charlie, elle se contente de demander, non sans un sourire en coin.

"Si t’essayes de me blesser, pars sur autre chose." Charlie, elle donnait l’impression de découvrir que Jo avait la grosse tête, sauf qu’à part la faire sourire doucement, la grosse tête en question, ça n’eut pas d’autre effet, si ce n’était peut-être de songer rapidement au fait que, si elle devait consulter un médecin, ce ne serait sûrement pas pour ses chevilles, et l’admettre, c’était partir sur des débats qu’elle n’avait pas envie d’avoir, maintenant ou jamais.
Un peu comme la conversation qui était en train de se jouer entre elles à ce moment-là et qui, franchement, la mettait mal à l’aise. Assez en tout cas pour que le temps d’un long, très long instant, juste après les paroles de Charlie qui lui avoua que quoi, elle avait mis le grappin sur Midas ?, Jo garda le silence sans pour autant éteindre la machine qu’était son cerveau. Ses yeux bruns, ils se posèrent résolument sur Charlie pendant qu’en l’espace d’une seconde à peine, elle lui réserva un chapelet mental d’insultes, toutes les plus gratinées les unes que les autres "Attends, je reviens." qu’elle lui fit soudainement, se levant d’un bond gracieux de la balancelle en troisième vitesse en prétextant avoir entendu Ava l’appeler quand, en fait, ce n’était pas la vérité, et qu’elle profita de cette excuse pour s’échapper de l’endroit où elles s’étaient posées pour entrer un instant à l’intérieur de la maison. Le milk-shake de Charlie toujours dans la main, Jo trottina jusqu’à la cuisine en lui promettant de revenir rapidement — et Ava n’avait pas appelée, effectivement, mais l’instinct de survie de sa petite-fille était assez aiguisé pour savoir quand réagir à une attaque ennemie, même en incognito. S’enfonçant dans la cuisine pour s’appuyer contre le premier meuble qu’elle trouva, elle ouvrit le gobelet de milk-shake qu’elle avait dans la main pour cracher dedans, et remua son ingrédient secret avec la paille, arborant une nonchalance qui ne laissait pas déborder ce qu’elle ressentait à l’intérieur quand sa réaction était la preuve tangible que : putain, pourquoi lui ? La blonde avait précisément visé juste, et retirée dans la cuisine, Jo se demanda si elle ne l’avait pas fait exprès ; parce qu’encore une fois, le parcours de Midas, il était étroitement lié au sien, et que si on s’intéressait un minimum à ce qu'il avait accompli jusqu’ici, son nom ressortait irrémédiablement. Quelle salope, qu’elle pensa en vérifiant que le milk-shake avait toujours une couleur uniforme alors elle venait d’y déverser son venin en allant chercher assez loin dans le fond de sa gorge. Elle s’octroya un petit moment dans la cuisine, à prendre une profonde inspiration, ses ongles se réunissant en une posture de yogi mal entraîné, le gobelet du milk-shake refermé, quand en vérité, c’était peine perdue de croire qu’elle allait réussir à se contenir. Subitement, Jo, elle avait envie de lui défoncer la gueule à Charlie.

Mais elle ne le ferait pas. Pas tout de suite, en tout cas "C’est pour ça que t’es venue ici ?" qu’elle lui demanda en la rejoignant comme si de rien n’était, lui tendant de nouveau son gobelet en récupérant le sien pour mieux se laisser tomber à ses côtés ; dans la manoeuvre, ça l’avait exemptée de devoir répondre à sa question à propos de si oui ou non il s’était passé quelques choses entre eux, ce qui sur le moment n’avait pas d’importance parce qu’elle était déjà concentrée sur l’envie pressante de lui faire de la peine, à Charlie "Pour te vanter d’avoir réussi à ramener dans ton pieu quelqu’un avec un peu plus de standing que tes gus habituels ?" À l’autre bout de la balancelle, elle lui accorda un regard sourcils haussés "Y a des trucs que j’ai pas envie de savoir, que ce soit à ton sujet ou au sujet du sien, et tu sais, le connaissant, il apprécierait moyen que tu contes ses exploits dans toute la ville, mais je dis ça." Elle ne disait rien, s’autorisa-t-elle à ne pas ajouter, sentant son coeur pulser dans sa poitrine, et son sang dévaler ses veines au point que ça lui faisait un peu mal à chaque extrémité ; parce qu’elle avait la rage, Jo, et qu’à la fixer comme elle était en train de le faire, elle espérait au moins, qu’à terme, elle lui laisserait un trou au milieu du front.
En attendant, elle lui balança avec un sourire en coin, son visage s’illuminant faussement quand elle lui demanda, un doigt pointé dans sa direction "Mais attends, c’est pour te venger de qui cette fois-ci ?" Elle pencha la tête, l’air de rien, les coins de sa bouche marquant un mouvement vers le bas pendant qu’elle poursuivait sur sa lancée "C’est vrai, t’en es pas à ton premier coup d’essai avec quelqu’un qui a une petite notoriété." Elle eut un rire, du genre qui sonnait tellement faux qu’il ne trompait personne "Faut quand même saluer ta progression. Je peux pas rivaliser avec le meilleur vendeur d’albums du pays de ces dix putains de dernières années, c’est clair." Quelle salope, qu’elle pensa encore une fois, attrapant sa paille par la base pour la foutre dans sa bouche sans pour autant la lâcher du regard.

@Charlie Villanelle  

"Si t’essayes de me blesser, pars sur autre chose." Elle n’essayait pas de la blesser, non. Elle y arrive souvent, en réalité, mais ce sont autant de fois que Charlie ne l’a pas désiré, simplement qu’elle n’a jamais pris le temps de peser ses mots parce qu’elle est toujours égale à elle-même, enfant maladroite pour un rien malgré ce qu’en dit son âge grandissant, sa famille, son métier. Sa maturité devient effectivement toute relative lorsqu’elles en viennent à aborder le sujet de Midas (largement encouragées par les seules paroles de Charlie) et que la jeune femme ne sait faire autre chose que vanter l’ajout de ce dernier à son tableau de chasse qui, il faut bien l’avouer, n’avait pas connu de nouvelles entrées depuis bien longtemps. Après tout, elle avait promis de se tenir à carreau, et elle était parvenue à tenir sa promesse. Cette nuit passée avec Midas, elle ne la voit même pas comme une entorse, finalement, mais bien une sorte de récompense pour effort fourni. Appelez ça comme vous le voulez, ou faites comme Jo, à déjà fuir à la rescousse d’Ava sans que Charlie ne puisse bien sûr rien en dire. "Attends, je reviens." Alors, elle se contente de l’observer partir, ramenant entre ses lèvres la paille du gobelet temporairement échangé avec Jo.

Et si Charlie continue de se balancer avec insouciance sur la balancelle, son regard perdu dans le vide mais des idées plein l’esprit pour occuper la journée qu’elle pense passer auprès de son amie, cette dernière revient rapidement pour que la blonde revoit à la baisse ses attentes. "C’est pour ça que t’es venue ici ?" Les gobelets s’échangent à nouveau sans qu’elle ne dise rien, sans qu’elle ne comprenne quoi que ce soit non plus alors qu’elle ne comprend pas véritablement le fond de sa question. Oh, elle se doute qu’elle parle bien plus de Midas que des milk-shake, de toute évidence, mais elle attend de sa part qu’elle précise davantage la question: quel est ce ça, exactement ? "Pour te vanter d’avoir réussi à ramener dans ton pieu quelqu’un avec un peu plus de standing que tes gus habituels ?" Et par ces quelques mots, plus que jamais elle comprend que Jo ne répondra pas à sa propre question, préférant bien plus attaquer à son tour plutôt que quoi que ce soit d’autre. “Heureuse de savoir que tu le mets sur un niveau au dessus.” L’ironie n’est qu’à moitié présente, parce que si elle se moque du haut standing que Jo semble octroyer à Midas, elle ravale surtout difficilement les mots à son égard, autant ceux qui la résument à une traînée que ceux qui laissent sous-entendre sans la moindre délicatesse qu’elle se contente de baiser avec tout ce qui passe. Pourtant, elle tente de faire les choses bien et de ne pas déjà laisser sa colère prendre le dessus. "Y a des trucs que j’ai pas envie de savoir, que ce soit à ton sujet ou au sujet du sien, et tu sais, le connaissant, il apprécierait moyen que tu contes ses exploits dans toute la ville, mais je dis ça." - “Pourquoi est-ce que t’en as soudainement quelque chose à foutre, sérieux ?” Pourquoi est-ce qu’elle monte autant sur ses grands chevaux, pourquoi est-ce que Midas est apparemment une chasse gardée alors que, selon ses mots, c’est à peine s’ils s’adressent un regard en se croisant ? Elle aimerait comprendre, Charlie, elle le jure, mais elle n’a pas les codes et encore moins les indices nécessaires. Aussi mignon soit-il, il n’a jamais été une cible à ses yeux et l’est seulement devenu lorsqu’elle a posé ses yeux sur lui au bar, jamais avant, jamais lorsqu’il se résumait à un de ces dizaines et dizaines d’autres chanteurs qui passent à la télévision. “Je t’en parle à toi, et déjà t’imagines que je suis allée m’inscrire sur un forum à la con pour participer au sujet “j’ai couché avec une célébrité.”” Elle n’en sait rien, elle le jure, mais elle serait prête à parier cher pour dire que ce genre de chose existe et que d’autres personnes, bien plus réelles que son compte qui n’existe pas, postent effectivement leurs histoires (inventées, sans nul doute) chaque jour, pour recevoir un brin d’attention de la part d’autrui. En d’autres termes: toute la ville n’est pas au courant, et toute la ville ne le saura pas, ne serait-ce pas qu’elle se respecte un tant soi peu et qu’elle n’a pas non plus envie de traîner le nom de Midas dans une boue de la sorte. Il a pris le temps de lui expliquer qu’il ne voulait pas de petite amie, c’est sûrement une bonne personne. “Je suis pas en train de te faire des dessins de ce qu’on a fait ni de te parler de la taille de sa bite, redescends.” Elle lui dit simplement qu’elle connaît intimement l’homme en question ; et c’est tout. C’est vraiment tout. Elle ne veut pas parler des détails, elle ne veut pas non plus lui dire qu’elle a été la première à lui demander son numéro, parce qu’il a l’air clean et que la vie de célibataire rangée n’est définitivement pas celle qui lui correspond le mieux, alors elle recherchait un peu de présence, un peu de chaleur aussi.

Mais Jo, elle, a encore bien des sujets dont elle souhaite vouloir parler. "Mais attends, c’est pour te venger de qui cette fois-ci ?" Et cette fois-ci, le regard de Charlie vrille en sa direction, plus capable de mimer la moindre fausse chaleur ou joie. “Toi, apparemment ? Tu penses que c’est le cas, pas vrai ?” Parce qu’elle réagit ainsi, parce qu’elle fait déjà un parallèle avec la façon dont elles se sont rencontrées, il y a de ça un an déjà. “Je me suis dit que cette fois-ci, coucher avec la personne en question serait quand même bien plus impactant que deux-trois baisers.” Le voir se rhabiller en sortant de l’immeuble, voilà le genre de photos de star qui fait vendre, pas vrai ? Ce n’est en rien ce que Charlie a imaginé, pas un seul instant, mais elle accepte le rôle définit par Jo pour finalement mieux le tourner en dérision encore, tentant par la même occasion de lui faire comprendre qu’elle est réellement en train de la blesser avec des remarques puériles à ce point. Et dire que l’inspectrice pensait qu’elles avaient réussi à créer un petit semblant d’amitié, de quelque chose. "C’est vrai, t’en es pas à ton premier coup d’essai avec quelqu’un qui a une petite notoriété." Y’en a qu’un seul qui la joue la sainte-nitouche des deux, pourtant. Qu’un seul, aussi, doté d’une véritable technique sans pareille pour lui casser les couilles. "Faut quand même saluer ta progression. Je peux pas rivaliser avec le meilleur vendeur d’albums du pays de ces dix putains de dernières années, c’est clair." - “T’étais pas contente que j’ai touché à ton précieux Midas, maintenant t’es pas contente que j’ai touché à un chanteur qui vend mieux que toi, donc ? T’as même la moindre idée d’à quel point je m’en fous, de savoir qui vend quoi, qui est écouté par qui ?” Elle s’en moque que Midas soit une star, tout comme elle s’en moque que Jo en soit une, à un niveau différent. Elle se moque de tout, Charlie, en réalité, et c’est sans nul doute ce genre d’attitude qui lui vaut aujourd’hui un sévère retour de bâton qu’elle n’avait pas su anticiper. “Je sais très bien que tu me fais pas une crise de jalousie pour nous.” Parce qu’entre elles, il n’y a rien, du moins pas vraiment ; et ça a été mis au clair il y a plusieurs mois déjà. “Et j’ai aucune intention de mettre le grappin sur le gars, donc redescend.” Elle lui laisse, si c’est finalement tout ce dont il est question: Midas, elle le voulait dans son lit, mais certainement pas à ses côtés pour une vie toute entière faite de ses yeux bleus et de son sourire digne d’une couverture Vogue.

Il ne fallait pas que Charlie se méprenne : elle couchait avec qui elle voulait, la vie de Jo ne changerait pas si elle décidait de se taper le premier qui passe. En fait, elle ne serait pas surprise de se rendre compte qu’elle serait la première à craquer à propos du pseudo-pacte qu’elles avaient passé concernant les histoires d’amour, ou qu’importe comment les appeler. Elle était à la limite de la dépendance affective, la blonde, il ne fallait pas être sorti d’une grande école pour s’en rendre compte : un chien lui passait devant dans la rue, et elle en tombait sous le charme en un claquement de doigts. Non, ce qui la touchait le plus, c’était qu’elle venait ici dans l’espoir de lui soutirer des infos sur Midas en mettant sur le tapis le fait qu’elle avait passé la nuit avec lui avec une nonchalance qu’elle avait envie de lui enfoncer par tous les orifices, et clairement pas de façon agréable. Une preuve supplémentaire qu’elles n’étaient rien de plus que des connaissances avec un côté qui avait été posé par la blonde elle-même sans que Jo n’y trouve rien à redire parce qu’elle aussi, elle se sentait seule parfois : mais elle n’en avait pas soudainement quelque chose à foutre de Midas, non. De Charlie en revanche, elle n’en aurait bientôt absolument rien à carrer, et ça se matérialisa par le fait qu’elle la blesserait le plus fort possible pour lui retirer toute envie de ne serait-ce que faire un pas vers elle désormais.
Elle ne voyait que ce qui lui tombait devant les yeux, Charlie, et sûrement que dans son esprit bouffé par les codes de la société, prétendre qu’on est pas amis avec quelqu’un, ça veut forcément dire qu’on ne lui accorde que très peu d’intérêt : elle ne pouvait pas être plus loin de la vérité, et Jo ne s’échinerait pas à se justifier à ce sujet, trop occupée à préparer sa prochaine invective pour vouloir lui expliquer par le menu ce qu’impliquait vraiment sa relation avec Midas.

"Tu m’en parles à moi uniquement parce que tu voulais en savoir plus à son sujet, fais pas comme si t’étais en train de me faire une faveur en me racontant que t’as fini dans son lit. Je m’en cogne de qui tu baises, que ce soit clair." En l’occurence, elle ne s’en cognait pas là, mais encore une fois, ce n’était pas parce qu’elle réservait à la blonde une tendresse particulière d’habitude. C’était parce que Midas était impliqué, point final "Ouais, comme si ça change grand-chose qu’elle soit petite ou grande, dans tous les cas ça t'empêche pas de te les prendre, toutes celles que tu rencontres sur ton chemin." Elle voulait la jouer vulgaire, elle était à peu près sûre de pouvoir rivaliser sans trop faire d’effort. La preuve en était "Viens pas me faire la morale en me disant de redescendre quand tu savais très bien ce que t’étais en train de déclencher." lui dit-elle sans ciller, un peu comme un conseil bienveillant craché avec mélodie, reprenant sur le même ton quand elle eut terminé de lui répondre "Je crois pas au hasard, moi." Et c’était vrai, Jo n’était pas assez optimiste pour croire que tout n’était pas écrit quelque part. Ça la rassurait de croire au contraire, ça lui permettait aussi de faire preuve de mauvaise foi quand elle se retrouvait dans ce genre de situation, à devoir gérer son impulsivité quand dans le fond, elle se sentait acculée par l’idée qu’elle était en colère, mais que ce n’était pas justifié parce que Midas ne lui devait rien, comme elle ne lui devait rien non plus. Oui, mais "De tous les mecs sur qui tu pouvais passer, t’as précisément choisi celui avec qui on m’a prêtée une histoire, avoue que c’est quand même putain de bizarre comme coïncidence." Et là, elle eut un sourire marqué par un froncement de sourcils qui illustrait bien l’idée qu’elle ne croyait pas à ses salades "Je sais, tu vis pas dans un monde où tu te renseignes sur avec qui tu couches avant de le faire, mais peut-être que c’est ton signal pour commencer avant de t’en manger une dans la gueule." Par elle, ou par quelqu’un d’autre. CQFD.
"Je te le dis pour pas que tu chiales si jamais je réussis pas assez à prendre sur moi et que je finis par te défoncer les dents : ferme ta gueule, Charlie. C’est un conseil que je te donne." lui fit-elle en quittant soudainement la balancelle quand elle mentionna de nouveau son précieux Midas, laissant son milk-shake derrière elle, et que se tournant vers elle, elle la pointa avec un doigt, toute trace de bienveillance ayant quitté son visage "Tu crois ce que tu veux en ce qui me concerne, mais tourne sept fois ta langue dans ta bouche quand tu cites son nom, parce que je te promets que j’ai de quoi faire de ta vie un enfer si tu continues à trouver ça drôle de le traiter comme un coup que t’as tiré pour combler le vide de ton existence pourrie." Bon, elle exagérait un peu, mais en l’occurence, elle avait au moins de quoi de lui péter les genoux, même si la blonde faisait au moins quatre têtes de plus qu’elle, et qu’elle pesait sans doute quinze kilos de plus. Jo n’avait peur de pas grand-chose en terme de bagarre, mais elle ne voulait pas en arriver là, alors assez raisonnablement au demeurant, faisant preuve d’assez de self-control pour retenir ce qui vibrait partout dans son corps tendu par tout un tas de d’émotion, elle lui dit en baissant son doigt "Barre-toi maintenant."

@Charlie Villanelle  

Elle avait commencé à comprendre que le sujet de Midas serait houleux, oui. Mais rien ne l’avait préparée à ce qu’il le soit autant, à ce que Jo sorte purement et simplement de ses gonds sans assez d’avertissement au préalable, aux yeux de Charlie tout du moins. Elle lui en parle à elle comme elle aurait pu en parler à qui que ce soit d’autre, n’en ayant rien à faire de lui tenir la liste des personnalités publiques avec lesquelles elle a pu avoir une aventure (ils sont deux, alors la liste n’est pas bien longue). Elle lui en parle à elle parce qu’elle est naïve au point de penser qu’elles étaient peut-être amies, maintenant, au delà de leur plan pour se faire prendre en photo, au-delà du pacte les autorisant à s’embrasser sans conséquences. Tout ce dont Charlie a envie, maintenant, c’est bel et bien de lui en mettre une pour qu’enfin la jeune femme soit remise à sa place et qu’elle apprenne qu’elle ne peut pas tout dire à tout le monde, qu’elle n’est personne et qu’elle n’a surtout aucun pouvoir, pas même alors que l’art de la séduction s’arrête au droit de l’embrasser et absolument rien de plus. L’avis de Charlie à ce sujet ? Ce n’est clairement pas de cette façon qu’elle risque de pouvoir se trouver quelqu’un, surtout pas de contenter Midas, que la blonde connaît sur le plan intime à défaut du reste au moins. Lui, si jamais la question se posait, elle est plutôt certaine qu’il aurait du mal à accepter le pacte de “on s’embrasse et rien de plus”. Mais elle ne le connaît pas, après tout, et Jo semble vouloir insister à ce sujet. Grand bien lui fasse, ce n’est pas Charlie qui clamerait le contraire. “T’es hystérique. Me fais pas croire que ça a quoi que ce soit d’une réaction normale, tout ça, et essaye encore moins de me faire porter le chapeau.” Elle ne veut pas lui faire la morale, Charlie, mais elle veut encore moins porter le blâme pour une faute qui n’est pas la sienne.

Elle se doutait que les deux se connaissaient, mais elle ne se doutait pas que cela allait de paire avec une Jo mordant tout ce qui passe près de son si précieux collègue, ce même collègue dont elle ne lui a jamais parlé, véritable petit secret gardé sous scellé. “T’es une grande malade, voilà ce que t’es. Tu peux pas simplement me dire que t’as un putain de crush sur lui, donc tu préfères me traiter de pute pour passer tes nerfs et espérer que ça va me tenir loin de lui.” Elle n’avoue toujours pas qu’il y a quelque chose entre eux, elle n’explique toujours pas non plus pourquoi elle le défend avec autant d’ardeur, comme elle avait accusé Léo avec cette même énergie à l’époque. Il est sur un piédestal sans que Charlie n’arrive à comprendre pourquoi, et elle ne cherche même pas à le faire, tout simplement parce que cette histoire n’est pas la sienne et ne l’intéresse pas. Elle se l’est tapée parce que c’est ce qu’elle voulait, sans penser plus loin, mais désormais il y a effectivement tout à parier qu’elle recommencera, en toutes connaissances de cause cette fois. Parce que c’est justement en lui ordonnant de se tenir loin de lui qu’elle compte faire tout l’inverse, à son tour plus capable que jamais de jouer à la plus conne, jeu auquel elle est tout particulièrement douée. “Ta grande gueule, utilise la plutôt pour lui mettre le grappin dessus plutôt que de t’en prendre à ceux qui osent le faire à ta place.” Qu’elle lui en mette une si elle veut, mais flic ou pas, Charlie rendra la pareille. Elle n’est pas du genre violente et elle ne le sera jamais, mais elle sait se servir d’un flingue maintenant.

Jo lui conseille de fermer sa gueule, sans doute qu’elle parle aussi de ses cuisses par la même occasion. La blonde voudrait conseiller tout le contraire à Jo (en ce qui concerne les cuisses, surtout) mais c’était avant de se rappeler qu’elle n’en a effectivement plus rien à faire de rien en ce qui la concerne. Elle finira vieille fille, entourée de sa grand-mère pour le temps qu’il lui reste, et sans doute que c’est tout ce qu’elle mérite, à être aussi imbuvable et à partir au quart de tour. Charlie se pensait mal placée pour juger qui que ce soit en la matière, ce qui était finalement avant de connaître Jo: maintenant, elle sait bien qu’il existe des cas pires que le sien. "[...] je te promets que j’ai de quoi faire de ta vie un enfer si tu continues à trouver ça drôle de le traiter comme un coup que t’as tiré pour combler le vide de ton existence pourrie." Cette ultime remarque arrache un rire à la blonde, parce que la menace vient de nulle part et qu’elle a surtout aucune valeur à ses yeux. “Qu’est-ce que tu comptes faire, Jo ? Ta vie se résume à mettre des petites jupes et des paillettes sur les yeux.” Elle ne le fera pas, elle ne le dira pas, mais s’il y en a bien une des deux qui pourrait jouer de son métier pour faire de la vie de l’autre un enfer, c’est Charlie. A commencer par Ava, dont elle a classé l’affaire rapidement ; affaire qui pourrait connaître de plus amples études, affaire qui pourrait amener les services sociaux à s’en mêler. Elle pourrait tomber rapidement, Jo, bien plus rapidement qu’il ne lui en faudrait de temps pour proférer de nouvelles insultes. Charlie peut accepter ses reproches sans trop ciller, sans doute habituée à son caractère impossible, mais elle tolère bien moins l’ajout de menaces à l’équation et n’hésite pas à montrer les crocs à son tour pour l’occasion. Elle l’a cherché, cette fois, elle qui est malvenue pour reprocher à Charlie de combler le trou de son existence pourrie là où Jo se contente de la subir.

"Barre-toi maintenant."
“Va te faire foutre.”

Elle n’avait pas besoin qu’on lui montre la porte pour déjà vouloir la prendre, se contentant finalement de jeter son gobelet encore à moitié plein au visage de Jo. A aller se laver, peut-être qu’elle pourra déjà commencer son maquillage pour ce soir ; ce n’est qu’un gain de temps. Une fois que ses pas atteignent la cuisine, elle ralentit et offre un au revoir poli à Ava, qui n’a rien à voir avec cette discussion. Pour autant, elle n’y réfléchit pas à deux fois avant de refermer la porte derrière elle avec fracas, n’ayant plus qu’une seule idée en tête, laquelle se résume au prénom de Midas.