| L'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne [PV Laurie] |
| | (#)Dim 30 Oct 2022 - 23:41 | |
| J’avais attendu si longtemps qu’elle réponde, qu’elle appelle, qu’elle me donne un signe de vie, quel qu’il soit, un signe minimal d’un premier pas de sa part dans ma direction. Quand il était finalement arrivé, j’avais senti ma voix craquée sous l’impact de l’émotion. Ma fille qui m’appelait. Pire qui demandait que l’on se voie, en personne, pour parler. L’espoir qui avait envahi ma poitrine l’avait emplie d’une douce chaleur si différente de celle qui l’envahissait lorsque mon cœur se mettait à battre si vite qu’il en manquait des battements. Et puis j’avais réalisé que ce repas à saveur de retrouvailles correspondrait à son vingt-sixième anniversaire de naissance.
Vingt-six ans, et presque cinq d’un silence presque total, entrecoupés des nouvelles expéditives que m’avaient données leur mère avant qu’elle aussi ne s’évapore dans la nature abandonnant ses responsabilités parentales au profit d’une quelconque histoire de couchette. Chaque anniversaire et chaque Noël avait été souligné. Des présents envoyés ou déposés sur le pas de la maison qui avait vu grandir ma belle Isla et mon bel Alistair. Mais chaque année venait avec le fait que je savais qu’ils grandissaient tous les deux, qu’ils changeaient. Chaque année, je m’étais interrogé afin de savoir si le présent convenait ou s’il était d’une étrange banalité. Sans avoir d’immenses moyens pour les gâter, j’avais fait de mon mieux pour leur offrir ce qui leur plairait. Ils étaient peu à peu devenus des étrangers. Choisir le cadeau parfait qui ne ferait pas impersonnels était de plus en plus difficile.
Il me vint assez rapidement en tête qu’il fallait dans le peu de temps avant la rencontre que je trouve quelque chose pour souligner l’occasion mais que cette fois-ci j’aurais la chance de pouvoir lui voir le visage lorsqu’elle ouvrirait les petits présents. C’était peut-être le coup à la tête que je m’étais mangé deux jours avant l’appel mais je ne pouvais m’empêcher de ressentir une réelle anxiété en devant choisir quelque chose qui lui plairait alors que j’ignorais si le bref aperçu que j’avais eu d’elle aux urgences était un mirage ou une réalité. Il y avait bien sur ce livre qui se rajouterait à une importante collection d’écrits gaélique écossais que je lui avais offerts au fil des années. Mais ça me semblait si peu que de me contacter d’un livre tout simple.
Bravant mon mal de crâne cadeau de ma chute, je m’étais aventuré vers le centre commercial : un premier arrêt au bijoutier m’avait amené à acheter un fin bracelet de cheville en or rose sur lequel j’avais fais gravé son prénom dans une fine écriture. Cependant, je me disais encore qu’avec toute l’absence qu’il y avait, ce n’était pas suffisant, pas assez pour compenser l’absence provoqué par notre divorce à Margaret et moi. C’était plus complexe qu’il ne le paraissait que d’admettre que c’était ma faute. Ce fut donc cette impression qu’un simple bracelet fin et délicat avec de petites fleurs légères qui avaient peut-être une allure trop enfantine pour la jeune femme qu’elle était devenue pendant notre silence… qui me poussa à faire quelque chose d’insensé.
Je passais la porte d’une boutique de maquillage que les jeunes appelleraient « branchée » sans doute. J’utiliserais pour ma part le terme « agressante » avec ces néons clairs, sa musique d’ambiance aux allures de violons désaccordés (si on s’en tenait à mon avis de profanes sur la musique qui était à la mode en ce moment et qui semblait être si formatée qu’elle était toute pareille) et ses odeurs de parfum trop forte. C’était une mauvaise idée avec le mal de crâne que je me tapais, une horrible vrille dans la tête… Me contenter du bracelet en espérant qu’il soit suffisant avec le bouquin? Oui… Parce que qui étais-je pour savoir quoi que ce soit au maquillage. Du temps où j’étais marié, je ne l’avais presque jamais remarqué sur la peau de mon ex-femme, pas parce que je ne l’avais pas regardé. Non, simplement parce que ce n’était pas ce genre de détail sur lequel je m’attachais. Oui. Je fixais le présentoir de l’entrée comme si c’était un territoire inconnu et une zone de guerre. Un soupir s’échappa de mes lèvres alors que j’entamais de sortir, le cerveau trop stimulé par ce caractère publicitaire dont je n’étais en aucun cas la cible. @Laurie Wright |
| | | | (#)Dim 6 Nov 2022 - 11:56 | |
| ≈ ≈ ≈ {l'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne} crédit/(jessicahuangs/tumblr) ✰ w/ @Muiredach MacLeod Il n'y a pas assez d'iced latte dans le monde pour faire partir ta gueule de bois. Voilà, ce que tu te dis dans la petite pièce réservée aux employées, dans l'arrière-boutique et les coulisses du Queen Street Mall, tirant sur ta paille comme si ta vie en dépendant, plantée devant ce miroir. Tu tentes de faire disparaitre les excès de la veille de ta peau laiteuse, ça, le manque de sommeil, la solitude qui te ronge de l'intérieur et tout ce qui cloche chez toi. Juste un peu plus de crème, un peu plus de fondation, un peu plus de primer et ça finira bien par disparaitre, non ? C'est ce que tu essayes de te dire depuis des années, parce que porter une armure, c'est bien mieux que d'assumer la vérité et quand une de tes collègues arrive, tu lui offres un sourire quand elle te demande si tu as eu une longue nuit. Longue, trop courte, à arpenter les rues de Brisbane et à servir de porte-bonheur à un Winston soucieux de parier et de laisser tout son argent sur la table... T'étais pas prête pour les rayons du jour, pas prête pour la réalité et décidément pas prête à revenir à une vie adulte. Mais tu le fais, satisfaite de ton maquillage, de ta tenue et de ton apparence extérieure, tu finis ton café avant de rejoindre le reste des employés. Immédiatement, ta patronne te tombe dessus, elle est beaucoup plus réveillée que toi et il te faut prendre une bonne inspiration pour comprendre ce qu'elle te dit, des annulations dans ta journée de maquilleuse, elle te colle à l'entrée en attendant, vu que tu es la seule bien maquillée aujourd'hui. Tu acceptes le compliment et comme le meilleur de tous les soldats, tu vas te planter devant l'entrée. Pour faire un grand sourire et diriger les gens qui sont les plus perdus, leur dire ce que tu as utilisé pour ton look de la journée. Un exercice très épuisant, tu t'en rends bien comptes après trois clientes, tu n'as pas envie de sourire tout de suite, il y a pas de téléphones braqués sur toi, personne à impressionner et pourquoi tu as pris ce boulot déjà ? Oh oui, pour manger, tu adorerais pouvoir faire demi-tour, décider de la donne où et quand mais ce n'est pas le cas. Tu ne salues pas la prochaine qui arrive et de l'autre côté de la boutique, tu sens le regard inquisiteur de ta supérieure posée sur toi. Merde, elle a remarqué ? Elle te fait un signe vers la personne qui s'en va, un bonhomme en plus, si rare dans votre petite boutique, autant te rattraper. "Bienvenue chez MAC, est-ce que je peux vous aider ?" Tu te plantes devant lui, bien droite, lâchant cela sur un ton plus qu'enjoué, le sourire tellement forcé que ton visage menace de se fissurer et de se craqueler. Tu le sais, pire encore, tu peux le sentir et même toi, tu sais que tu en as trop fait, tu te détends la seconde suivante. Changeant du tout au tout, la vraie Laurie faisant son apparition avec une expression un peu blasée. Parce que tu n'as pas envie de faire cela et de prendre les clients par la gorge pour leur dérober leur portefeuille, et pourtant, c'est ce que l'on te demande de faire. A dire vrai, tu es surprise qu'on vienne se perdre ici, qu'on fasse l'effort d'un petit voyage inutile, qu'on se confronte aux autres et qu'on joue ce jeu-là. En ligne, c'est beaucoup plus facile, quelques clics, quelques clacs et l'affaire est réglée, on a tout ce qu'on veut, sans jamais interagir avec une seule personne directement. Ce qui est beaucoup plus simple à tes yeux. "Vous avez le droit de prendre la fuite, mais ma manager a encore eu un accroc avec sa copine, donc elle fait passer sa frustration sur nous, on m'a refilé l'accueil et je dois m'assurer que tout le monde à une bonne expérience." Voilà ce que tu penses vraiment et ce que personne n'ose dire, un peu de pouvoir ça monte à la tête de tout le monde, mais dans le cas de quelqu'un de frustré qui n'a sûrement pas eu un orgasme depuis des mois... c'est une combinaison dangereuse, trop dangereuse, vous en payez tous les deux les frais, autant toi que l'homme en face de toi. Qui est plus vieux que la plupart de toutes vos clientes et même vos clients et aucune trace de maquillage sur sa face, tu as plus envie de lui recommander un bon anti cerne et un sérum de vitamine C qu'autre chose, mais chaque chose en son temps. "Quoi que... quelque chose me dit que le tube de gloss n'est pas pour vous, non ?" Tu regrettes les mots dès qu'ils quittent tes lèvres en réalité, qu'est-ce que tu en sais, hein Laurie ? Ce n'est jamais écrit sur le visage des gens ce qu'ils veulent vraiment ou ce qu'ils font sur leur temps libre. Vraiment, tu te détestes là tout de suite d'avoir fait une telle présomption. "Si c'est le cas je m'en excuse, c'est pas bien de faire dans le cliché, je devrais le savoir." Oui, toi mieux que quiconque tu devrais le savoir, si ce genre de clichés régissait le monde, Laurie ne serait pas là aujourd'hui.
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| | | | (#)Dim 13 Nov 2022 - 23:08 | |
| Ce genre de boulot aurait été sans contredit l’un des cercles de mon enfer personnel. J’avais choisi de travailler dans un milieu où les interventions sociales avaient bien leur place : il y avait ces victimes d’actes criminels qui avaient besoin d’une présence empathique et ces proches d’individus emportées trop tôt qui avaient soif d’une douceur pour s’accorder le temps de digérer que l’être cher ne revienne pas. Cependant, prétendre que j’étais doué pour enrober une vérité ardue de sucre serait quand même bien se foutre de la gueule du monde. J’avais trop de difficulté à identifier mes propres émotions et à savoir comment les reconnaître chez les autres. Ce qui m’avait mené à mon métier, c’était plutôt le côté énigme. Pas l’aspect entregent dont je manquais cruellement même si je n’étais peut-être pas le plus prompt à l’admettre. C’était ce qui faisait de moi un excellent enquêteur pour tenir un interrogatoire, mais un piètre contact avec les familles. Bref, je m’égarais dans mes pensées. J’avais eu l’occasion de faire une faculté de droit et l’académie de police sans avoir besoin de travailler. J’avais (en partie du moins) conscience de ma chance. Parce que je savais qu’adolescent, j’aurais exécré bosser dans la restauration et été d’une nullité abyssale pour me retrouver dans une boutique qui n’était pas une librairie pour essayer de vendre des produits que j’aurais probablement détestés.
Cette boutique de maquillage en particulier aurait été le pire endroit et je le réalisais alors que j’effectuais lentement un demi-tour pour faire face, presque nez à nez, avec une demoiselle, ce qui était rare de mon côté. Je tenais de l’asperge : un modèle mince et filiforme avec une vague d’amertume qui transparaissait dans un grand nombre de ses aptitudes. Le ton qui franchit les lèvres colorées était si enjoué qu’il semblait faux, tout comme le sourire. Je ne comprenais pas les gens qui étaient en mesure de feindre le bonheur à pleines dents. Cette impression de pression qui venait avec les mots savamment choisis qui rajoutaient à l’allure criarde de l’accueil. Cela confirmait mon intuition que je n’étais pas à la bonne place. Ce fut peut-être ce bref regard en direction de la porte d’entrée ou l’absence de réaction autre qu’un sourcil froncé qui retira le sourire forcé qui se trouvait sur le visage en un clignement d’œil. Ma réponse devait ressembler à celle d’un de ces grands cerfs qui rencontrait les phares d’un véhicule pour la première fois de son existence. Mis à part un vague non de la tête, je n’avais fait aucun geste. Les jeunes d’aujourd’hui me surprenaient à l’occasion dans leur facilité à une franchise juste et bien calculée. Dans leurs mots exacts et tranchés qui paraissaient dans le ton de la femme désabusée qui se trouvait devant moi à m’autoriser à me pousser loin de cette infernale boutique. Pas que j’attende une quelconque permission pour pouvoir m’enfuir. J’avais plutôt une nette tendance à faire à ma tête si tel était mon désir. Mon cardiologue confirmerait sans doute que j’étais une tête de mule rarement égalée dans ce bas monde. Et pourtant je restais planté là alors qu’elle continuait à parler d’un ton blasé. C’était trop d’informations. Si bien que je marmonnais dans ma langue maternelle : « Je ne suis même pas certain de ce que c’est… » dans son moment d’hésitation après qu’elle ait mentionné que le tube de gloss n’était pas pour moi. Margaret, mon ex-femme, n’avait jamais été très portée sur le maquillage. Ou du moins, rajoutons cela sur la longue liste de choses auxquelles j’avais été d’une profonde indifférence bornée. C’était peut-être quelque chose à partir de quoi commencer. Je déglutis lentement. « Le fait que j’ignore ce que c’est du gloss devrait répondre à votre question. », dis-je du tac au tac sans spéculer sur ce qu’elle voulait dire par son constat qu’elle aurait dû le savoir mieux que quiconque. Oh! Il n’y avait aucun tort à admettre nos lacunes sur un sujet en particulier. Ça n’empêchait pas que ma réplique fût sèche dans mon accent qui roulait sans délicatesse. Pour être honnête, l’humilité par rapport à mon manque de compréhension d’un paquet de trucs modernes me paraissait, de toute évidence, inculquée avec une force depuis un certain temps. Mon air était donc sérieux : « Je… non… », grommelais-je, doucement. J’avais presque pris ma décision de m’éloigner, dans le but de déserter la boutique. Mais, pour une raison qui m’échappait, la réponse négative me semblait peu comme excuse avant de me carapater « Je veux juste faire un bon cadeau d’anniversaire à ma fille. Je crains que le livre acheté fasse radin… et puis que le bracelet ne lui plaise pas. Donc je souhaitais ajouter du maquillage. Mais ça fait impersonnel. Et puis je n’y connais absolument rien. » Est-ce que la vendeuse à l’air blasée avait demandé mon histoire de vie? Non. Est-ce qu’elle se prenait quand même plein la gueule de mon incertitude de père incompétent qui voulait sans tambour ni trompette faire une bonne impression sur sa fille maintenant qu’elle lui donnait une deuxième chance? «[/size] C’est ridicule. Je ne sais même pas si elle se maquille non seulement. [size=12]», admis-je d’une voix douce en évitant son regard. Il y avait des gens au poste de police (où je passais le plus clair de mon temps) qui n’avaient pas eu le droit à autant de mots de ma part, au cours du mois précédent alors qu’ils m’avaient posé des questions pas mal plus ouvertes que ce que la pauvre vendeuse avait fait. @Laurie Wright |
| | | | (#)Dim 20 Nov 2022 - 13:46 | |
| ≈ ≈ ≈ {l'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne} crédit/(jessicahuangs/tumblr) ✰ w/ @Muiredach MacLeod Parler à des inconnus et vendre, vendre à tout prix, ce n'est pas si effrayant que cela. Quand tu es d'humeur à le faire, bien entendu. En temps normal, tu prétends juste qu'il y a une caméra braquée sur toi en permanence et que tu as un rôle de régulière dans la meilleure sitcom de tous les temps. Ouais, c'est Laurie qui fait rire le public, elle encore qui a les meilleures lignes et les meilleurs costumes. C'est débile et franchement pas très sain comme mécanisme, tu le sais, cependant, cela te rassure. Tu n'as jamais été en mesure de vraiment l'expliquer, en fait si, tu nies la vérité, tu as eu toute une flopée de thérapeutes dans ta vie, pour t'aider à gérer Lawrence, pour approuver ton opération, et tu sais que tu dois remercier ta mère pour cela. Merci Catherine de t'avoir appris qu'en faisant des sourires, des pirouettes et des girouettes, on pouvait obtenir un peu plus d'amour, l'approbation des autres et ainsi, continuer de vivre. Aujourd'hui, tu n'es pas d'humeur à faire des courbettes, pourtant tu essayes, tu as besoin de ce job comme on aurait besoin d'oxygène et face à la mine perdue de l'homme, tu ravales un rire. "Oh, on en est là, vous savez ce qu'on dit hein ? Il y a un début pour tout." Il est paumé, à des kilomètres de sa zone de confort et de son élément, tu as presque envie de le prendre dans tes bras et de lui dire que tout va bien se passer. Presque, tu ne le fais pas, tu as besoin d'un peu plus d'éléments pour l'aiguiller et faire en sorte qu'il reparte avec ce dont il a besoin. Il lui faut du temps pour trouver ses mots et tu as fréquenté assez de créature de son espèce pour savoir qu'il ne faut pas le bousculer, il va trouver les mots justement et il te parle de sa fille. Un cadeau d'anniversaire. Oh, c'est ça que font les pères normaux ? La pensée est là, elle flotte triste et amère et tu te demandes un instant si ton propre paternel aurait fait l'effort. Tu sais bien que non, les cartes d'anniversaires avec dix dollars perdus dedans adressé à Lawrence Wright ont arrêté d'arriver depuis longtemps maintenant que tu y songes. Faudrait bien arrêter de rêver, la réalité c'est que tu n'as pas eu cette chance, alors oui, voir un autre père essayer, ça ne devrait pas te toucher, mais c'est le cas. Le sourire que tu as est un peu plus sincère, moins travaillé et moins creusé. "Au moins vous faites un effort, ça devrait compter pour quelque chose. Ouais, je le dis, ça compte pour quelque chose." Tu le décides même, même si tu ne le connais pas, que tu ne connais rien de sa vie ou de sa relation avec sa fille, tu décides qu'elle en a de la chance cette mystérieuse inconnue et que sa vie à elle doit valeur un peu plus que la tienne. Comment ça pas besoin d'enfoncer le clou ? Tu ne le fais pas, t'as pas le cœur pour et tu es là pour faire ton boulot après tout. "Gardez les reçus dans tous les cas et si elle vous déteste au point de vous le dire en face, vous pourrez toujours récupérer vos sous, ça serait dommage que ça se perde." Tu es presque cynique, presque, ça reste la vérité, offrir un cadeau à quelqu'un c'est toujours un peu épineux en réalité, trop compliqué et un peu trop stressant, vraiment. "Sur ces bonnes paroles, je peux vous suggérer une carte cadeau ? Okay, c'est impersonnel, mais elle pourra se faire plaisir et dépenser de l'argent qui n'est pas à elle. Je ne peux pas parler pour toute la population féminine, mais ça fait toujours du bien." Toi, tu sais que tu te sens toujours mieux quand tu laisses l'idiot du coin redorer son ego en t'offrant un verre dans un bar ou même une paire de chaussures, c'est le numéro le plus facile du monde après tout, prétendre vouloir de l'affection pour récupérer quelque chose de purement matériel. Oui, tu l'as déjà fait, cela fait certainement de toi une mauvaise fille, cependant, les types en question n'ont jamais véritablement été innocents alors... Alors tu hausses les épaules, continuant ta liste de suggestions. "Sinon, on a des boites toutes préparées par là pour les cadeaux, c'est un peu plus cher, mais il y a toutes les bases dedans." Petit signe de la main pour lui, son portefeuille et sa fille. C'est coûteux, il pourrait trouver moins cher ailleurs, tu le sais, tu le fais parfois, cependant, s'il était remué par la simple vue d'un tube de gloss, il risque vraiment d'être perdu parmi les différentes option, cela ne fait absolument aucun doute à tes yeux. Tu te tournes vers lui en faisant une moue, avant d'avoir une autre idée, tout aussi lumineuse que les autres, tu en es bien certaine. "Et au pire, vous avez une photo ? Je suis du genre douée pour identifier les produits que les gens ont sur la face... ne me demandez pas pourquoi." Une proposition un peu déplacée, ça, tu pourrais le voir si tu étais un peu plus réveillée, et qui dépasse certainement tes attributions de simples vendeuses, c'est certain. |
| | | | (#)Mer 21 Déc 2022 - 9:29 | |
| C’était quand même curieux de me retrouver avec une vendeuse dans ce genre de boutique qui semblait autant prôner une honnêteté sans filtre ni tabou que moi. Considérant que ce type de boulot paraissait mettre l’accent sur un important jeu d’ombre et de lumière aux vagues absents de duperie, c’était plutôt ironique et j’allais presque décider que je l’appréciais un peu lorsqu’elle répliqua avec une de ses ripostes toutes faites qu’il y avait un début à tout. C’était vrai, mais ces énoncés avaient toujours eu une allure de prémâchée dont il était possible de se passer de bon cœur. Dans ma barbe, je marmonnais un : « Je n’ai jamais aimé ce genre de phrases tout entendues. », plus grognon que ce que j’aurais bien voulu avant d’expliquer ce qui m’avait amené ici, sur ce territoire étranger, où ma peau qui n’avait pas aperçu la silhouette d’une crème hydratante (c’était un produit ça… non?) depuis que j’avais quitté ma femme (et encore, autrefois, elle s’était contentée de voir le tube à loisir appuyé sur le comptoir du lavabo d’une salle de bain maritale sans jamais être formellement introduit).
La demoiselle avait l’air déterminé que mon effort était digne de mention et comptait pour quelque chose avant de rajouter que je devais bien faire attention de conserver les factures pour ne pas perdre la petite somme que j’avais dépensée si jamais je manquais la marque sur les trois chefs de récompense (à défaut d’être accusation, ce qui aurait été vachement plus approprié pour déposer, mais jamais à l’égard de ma grande fille). « J’espère qu’elle le verra comme ça. Mais je garderais bonne note : prévoir la déception potentielle en conservant les factures. » L’ironie avait franchi mes lèvres avec un sérieux désabusé qui semblait bigrement similaire à celui de la femme. Ce ne serait pas la première fois que je ne serais pas à la hauteur. Les familles étaient si complexes. Un mélange d’effort et de dureté. Des cœurs qui pouvaient prendre de véritables siècles pour accepter des choses. J’étais presque prêt à reconnaître que mon admission à l’urgence et le fait que je l’avais croisé était peut-être la seule raison pour laquelle nous nous retrouvions dans cette curieuse position pour renouer. Mieux qu’avant que je passe l’arme à gauche potentiellement.
Les suggestions m’arrachèrent à cette sombre pensée. « Non, je me suis toujours opposé à l’idée de lui offrir une carte-cadeau ou un montant d’argent. Même si ça fait plaisir… je suis de l’école qu’un cadeau est quelque chose qui a été choisi avec attention. » Ce n’était peut-être pas la plus productive des techniques que de recaler automatiquement la première option qu’elle me lançait. Oui des fonds amenaient du bonheur, mais c’était si impersonnel, si… C’était un synonyme d’un aveu. Admettre que j’avais échoué à la connaître comme mon enfant, bien que c’était elle qui m’avait rejeté de toutes ses forces. Je contemplais donc pendant un instant la pensée de lui offrir un des coffrets-cadeaux déjà tout faits. Je n’avais certes pas les plus grands moyens du monde, mais il y avait de quoi célébrer entre les retrouvailles et son anniversaire.
Vient alors la suggestion que je montre une photo. Ça ne me semblait pas si stupide que ça comme idée considérant que j’étais si loin de ma zone de confort n’ayant jamais vraiment été très intéressé par ces produits quand Margaret les utilisait que j’aurais été incapable d’en identifier un seul pour sauver ma vie. « J’en ai une… photographie. », murmurais-je en fouillant dans mes poches pour y récupérer mon portefeuille. Un cliché qui ne convenait sans doute pas à la situation dans ces jours plus heureux. Ce n’était pas Margaret qui serait forte sur l’option de m’envoyer quoi que ce soit. Si j’avais été capable de tolérer les appels (rares, courts et expéditifs) avec mon ex-femme, j’aurais certainement pu comprendre toute la portée de sa défection parentale alors que je n’avais que l’envie de reprendre contact avec mes enfants qui me rongeait de l’intérieur. Aucune photo donc depuis cette photo prise avant le divorce, lorsque ma fille avait presque ses vingt-deux ans. Presque cinq ans qui étaient écoulés une éternité, un gouffre immense qui séparait les balbutiements de l’âge adulte de l’endroit où elle était maintenant dans sa vie. Une photo qui avait été usée un peu par le passage des années dans le cuir de mon portefeuille.
En tournant pour trouver l’emplacement où elle était, bien en évidence avec son frère dans la pochette prévue pour ça, je finis par admettre : « Elle date cependant. Je veux dire, je ne suis pas très doué sur les machins sur les Internets. » J’avais même aussi vaguement conscience que ma propre mère, octogénaire devenant en douceur un nonagénaire, se conformait mieux aux téléphones intelligents et aux nouvelles technologies qui prenaient tant de place dans le quotidien de tout le monde… pas à coup sûr la mienne. Pas ma tasse de thé dans toutes mes rigidités. Mais c’était une question d’époque. Ceux de mon âge n’étaient pas immanquablement nés avec ces appareils surpuissants dans les mains comme la génération de mes enfants, comme celui de la jeune femme qui se trouvait devant moi et à qui je tendis la photo en admettant :. « Elle a presque cinq ans. » C’était à mon tour d’être un déserteur parental. Ça indiquait l’espèce de malaise qu’il y avait entre ma fille et moi. L’espace et le silence qui avaient fini par prendre tout l’espace entre nous là où une belle complicité avait un jour résidé. Je rajoutais d’un ton bourru : « Je suis presque certain que son style a changé un peu. Elle est médecin, je crois. » Parce que j’étais presque sûr que je l’avais vu aux urgences même si, le cœur encore battant la chamade, la tête étourdie par le choc, je n’avais eu comme seule envie que celle de m’enfuir vers un très loin qui n’avait que peu d’équivalents. Et pourtant, dans ma voix, il y avait de la fierté lorsque je dis le métier que je pensais qu’elle occupait. « Et puis, ça doit changer au même degré que la mode, non? Ce genre de machin. » Du maquillage. Pas un bidule. Mais cette terminologie m’échappait aussi, bien que je comptais sur les doigts d’une main le nombre de fois où j’avais autant parlé qu’à cet instant. Si mon ex-femme avait besoin de nouvelles paires de chaussures chaque année (alors que j’osais à peine m’en acheter une qui ne soit pas pour randonnée), j’étais prêt à parier que le maquillage devait suivre les mêmes lignes de modes. Je n’avais visiblement aucune utilité en tendant une photo si vieille qu’elle semblait provenir d’une autre époque — quand elle était enfant en un certain sens. Heureusement qu’elle fut ma première-née. L’image aurait été terrible avec mon fils de tout juste quatorze ans sur la photo à côté qui était maintenant majeur. « C’était mon ex-femme qui s’occupait de ce genre de cadeau dans le temps. » @Laurie Wright Mille excuses pour l'attente. |
| | | | (#)Dim 1 Jan 2023 - 12:26 | |
| ≈ ≈ ≈ {l'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne} crédit/(jessicahuangs/tumblr) ✰ w/ @Muiredach MacLeod Face à l'air plus que désapprobateur de l'homme en face de toi, tu ne peux t'empêcher de rouler des yeux. Parce qu'entre sa façon de se tenir ou même de parler, tu as l'impression d'être revenue au temps du lycée où tu avais des professeurs persuadés de tout savoir mieux que tout le monde. Mais si, ce ton, c'est le ton de moi j'ai bien vécu et je sais de quoi je parle, pas toi... Et tous ces adultes-là avaient tort, et lui aussi, tu n'as peut-être que 26 ans mais franchement, tu as connu beaucoup plus de haut et de bas que la plupart : la dépression, Lawrence, les déceptions, le passage au bloc opératoire et toute la douleur qui a suivi... seulement 26 ans et tu as déjà vécu deux vies tout entières et ça, ce n'est pas écrit sur le visage de la petite jeune que tu es. Alors oui, tu roules des yeux, ouvertement, ne t'en cachant pas vraiment, tout en répliquant : "Ew, vous avez quel âge ? 50 ans ? Les gens qui parlent comme vous devraient être dans un musée, gardés sous verre, vraiment mais un seul problème à la fois... Okay ?" Parce que vous n'êtes pas là pour refaire le monde mais pour un but précis. C'est bien pour cela que tu suggères la photo, pour repartir dans un territoire que tu connais et pour arrêter de te dire que l'homme en face de toi est un père qui fait des efforts. Comme quoi, c'est possible, donc le tient n'avait aucune excuse, vraiment, aucune. "Les machins sur internet ? Je n'ai peut-être pas tort avec l'idée du musée." Tu as un petit rire et tu n'hésites pas à te rapprocher pour en voir un peu plus et analyser la demoiselle. Ouais, personne ne t'a demandé de le faire mais rien ne le retient ici, il peut partir s'il estime que tu vas trop loin. "Elle est jolie votre fille, et je suis certaine qu'elle se maquille, avec des pommettes pareilles, franchement, elle devrait !" Que tu réponds aussitôt quand il te dit que la photo date, hmm, un autre père qui a disparu, pourquoi ça ne t'étonne pas ? Tu arrives à conserver ton sourire pro et ne pas lui envoyer un regard assassin, parce que tu commençais à bien l'apprécier ce parfait inconnu, comme quoi, Laurie, ça ne sert à rien de rêver, à rien du tout. "Médecin hmm, donc elle doit avoir des horaires absolument folle et pas une minute pour s'occuper d'elle, autant aller directement à l'essentiel et lui proposer des basiques, et une bonne gamme de produit pour se démaquiller et que sa peau se remette des shifts affreux. Et de tout ce qui traine dans les hôpitaux." Que tu dis la seconde suivante, un peu rapidement, te concentrant sur ton boulot, c'est la seule chose qui te permet de ne pas te laisser bouffer par le reste en ce moment, et il veut toujours un cadeau, alors c'est ce que tu vas lui trouver, ni plus, ni moins. "Oui, j'ai côtoyé beaucoup de médecins dans ma folle jeunesse." La phrase est ponctuée par un clin d'oeil, parce qu'il ne se doute de rien, personne ne se doute de rien avant que tu ne t'expliques, on te voit comme une vraie femme maintenant et c'est le plus important. Il te sort de tes pensées en précisant que c'était son ex-femme qui s'occupe de cela en temps normal, un soupir profond t'échappe. "Et vous voulez quoi ? Que je vous joue un air sur le plus petit violon du monde ? C'est 2022, ex-femme ou pas, n'importe qui peut acheter ce genre de produit, on se détend, Dad, ça va bien se passer." Tu accompagnes ta phrase d'une petite tape sur sa poitrine à lui avant d'attraper un panier et le lui tendre. "Tenez ça." Tu lui fais ensuite signe de te suivre dans les allées de la boutique, pour tes conseils, pour que tu balances quelques produits dans le panier, qui pourraiten plaire et soudainement faire de lui autre chose qu'un parent clairement trop vieux et dépassé par tout. "Baume pour les lèvres avec un petit peu de paillettes pour se faire remarquer... un anti-cerne qui ira très bien avec sa complexion, un pinceau qui fonctionne avec la plupart des palettes et... on oubliera pas la lotion apaisante pour la fin de la journée." Tu as un sourire pour une de tes collègues au passage, voyant qu'elle est en train de faire la même chose avec une cliente en l'occurrence. Vous avez traversé la moitié du magasin maintenant et tu te tournes vers lui, une main posée sur ta hanche droite. "Vous emballez tout ça et ça devrait lui plaire." |
| | | | (#)Sam 14 Jan 2023 - 13:00 | |
| Chaque personne avait son propre vécu. La nature humaine en elle-même jouait probablement un certain rôle dans le jugement que chaque individu tendait à porter sur tout être qui croisait son chemin. Il était aisé de juger sans comprendre et beaucoup plus ardu de comprendre le jugement qui était porté, les motivations pour ces actions. Même dans cet imperceptible (et incessant) dialogue intérieur, le jugement pouvait même venir à notre propre égard. J’avais, vaguement, conscience que je pouvais me montrer exaspérant. Mes rigidités et mon incapacité (chronique) à m’adapter aux changements de mon environnement n’était pas sans poser un problème dans ce moment qui lui ne se gênait pas pour avancer dans un tourbillon : dans mon immobilité, je me décalais progressivement.
Je n’étais donc qu’à demi-étonné du roulement d’yeux exaspéré de la jeune femme qui devait plus ou moins avoir l’âge de ma fille lorsque ma cinquantaine naissante pointait assez allégrement son nez dans mes paroles. Bien sûr que pour elle, probablement née à cette époque où l’internet avait toujours fait partie de la vie. Et puis, j’étais même objectivement capable de l’admettre que je n’étais pas le plus réceptif à ces changements, ce que j’admis en lui concédant qu’elle avait peut-être raison. « Peut-être pas en effet. J’ai beaucoup de difficulté à le prendre ce virage technologique. » Je n’étais pas assez idiot pour prétendre que j’avais une relation paisible avec les nouvelles technologies. M’entendre gueuler après mon poste informatique quand j’étais à mi-chemin dans la rédaction d’un rapport d’enquête n’était plus nécessairement surprenant pour mes collègues du service informatique.
Comme pour beaucoup d’éléments dans ma vie, le fait que je n’avais qu’une exposition limitée à ces choses jouaient pour beaucoup. Oui, internet était omniprésent, mais hors du bureau, je ne l’utilisais presque jamais. La même chose pour cette boutique dans laquelle j’avais l’étrange impression de ne pas être à ma place et l’ironie de la voix de la jeune femme ne m’aidait pas nécessairement. Oui, j’avais une infime conscience que le maquillage n’était plus aussi limité aux femmes que ce qu’il était dans ma jeunesse. Un des serveurs au petit café où j’allais quotidiennement chercher mon décaféiné portait bien du vernis à ongle aux couleurs éclatantes. Cela ne voulait pas pour autant dire que je réussissais à me sentir comme moins qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine dans cet endroit qui m’était si étranger. Une indifférence des plus assurées à l’esthétisme jouait probablement un certain rôle. Je n’avais jamais réellement remarqué le maquillage sur le visage de Margaret, ça ne la rendait pas, à mes yeux, plus belle. Elle l’était. Tout simplement. Tout comme ma fille sur cette photo.
J’eus un petit sourire léger lorsque la vendeuse me dit qu’elle était belle et qu’elle devait sans doute se maquiller avec les pommettes qu’elle avait. J’avais un parti pris pour la trouver ravissante, mais mes enfants avaient toujours été la meilleure manière de faire ressortir une douceur qui trop souvent disparaissait de ma voix. Je pris note de la remarque sur le fait qu’elle avait souvent fréquentée les médecins dans sa jeunesse avec un clin d’œil que je ne suis pas vraiment comment interpréter. Avait-elle été malade? Ce n’était pas réellement de mes affaires si je me devais d’être honnête. « Je me doute bien pour l’horaire catastrophique, même si c’est probablement plus mon âge qui m’amène à les fréquenter un peu trop souvent dans mon cas. Je vais vous croire sur parole. Vous êtes après tout bien plus une experte que moi dans le domaine. »
Dans son ironie, elle se voulait rassurante, dans le contact mais ça n’empêchait pas que cette boutique fût beaucoup pour moi. Je n’avais pas l’impression que c’était une erreur d’admettre que c’était mon ex qui avait offert ce genre de cadeau, que j’étais perdu et désemparé. J’avais attendu cinq ans qu’elle décroche et c’était beaucoup d’émotions à gérer. Une tornade qui prenait beaucoup de place dans ma tête. Alors je jugeais pertinent de me justifier en prenant le panier après quelque chose que je n'arrivais pas nécessairement à distinguer entre de l’humour à mon égard (par la tape sur la poitrine) ou une moquerie sincère de mon inaptitude à être à la bonne hauteur. « Non, ce n’est pas ça… Je ne remarquais même pas quand leur mère était maquillée… » et il n’y a eu personne dans ma vie depuis leur mère. Si j’étais honnête, il n’y aurait probablement plus jamais personne qui aurait la patience de m’endurer au quotidien. « Alors cette boutique est loin de ma zone de confort… et je n’aime pas vraiment en sortir. », admis-je calmement en la suivant dans les rayons.
Je la laissais empiler dans le panier le baume, l’anticerne (un produit dont le nom assez transparent aurait sans doute pu être utile dans mon cas), un pinceau et une lotion. Je me contentais de hocher la tête lorsqu’elle s’arrêta pour se retourner et me dire d’emballer le tout et que ça devrait lui plaire. Vraiment? J’avais besoin d’approuver avec un hochement de tête alors que je n’avais absolument aucune idée de ce qui se passait exactement. « Je vous fais parfaitement confiance que ça sera assez avec le bracelet en plus. » dis-je en ressentant quand même le besoin d’être un peu rassurer sur ma décision, mais n’osant pas réellement le faire. J’avais déjà pris trop de son temps et les néons me donnaient mal à la tête. @Laurie Wright |
| | | | (#)Sam 28 Jan 2023 - 11:30 | |
| ≈ ≈ ≈ {l'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne} crédit/(jessicahuangs/tumblr) ✰ w/ @Muiredach MacLeod Tu ne mettrais pas le client du jour sur ta liste des pires clients, vraiment pas, il te l’a dit, il l’admet, il est dans un univers haut en couleurs qui le dépasse. Et tu supposes que tu peux être considérée de trop pour une première fois. Oui, tu l’as toujours su en réalité, que ce soit Laurie ou Lawrence, vous avez toujours été de trop, et c’est sûrement pour cela que le maquillage te plaît autant. Toi, tu n’y vois que des peintures et des paillettes qui sont là pour déguiser et donner un peu plus de tout à n’importe quelle situation, pour faire en sorte que le monde brille autant que toi et que tout le monde voit tout comme tu le vois. C’est ton super pouvoir, en plus du reste, en plus de la vie avortée de Lawrence qui ne sera jamais finie, c’est ce que tu t’es toujours dit. Donc non vraiment, tu en as vu d’autres, des femmes trop exigeantes prêtes à critiquer ta technique, des clients espérant avoir une petite ristourne parce qu’ils ont aimé quelques-uns de tes posts sur Internet, ou ceux qui vont chercher plus loin avec les insultes... Il n’est pas le pire et tu hausses les épaules, sans perdre ton léger sourire, à sa remarque sur son ex-femme. “Et vous n’êtes pas le premier homme qui ne remarque pas une femme maquillée, si c’était un crime, les prisons seraient encore plus remplies que ça hein...” Il est plus âgé que toi, blanc et sûrement cent pour cent attiré par les femmes et uniquement pour ces dernières, bien entendu qu’il ne saurait pas faire la différence entre du rouge à lèvres et du gloss... Ça lui colle trop bien à la peau, et ce, même si tu détestes les clichés, ils existent bien pour une raison, pas vrai ? Il a l’air convaincu dans tous les cas, c’est tout ce qu’on demande de toi et on peut dire que oui, tu as très bien rempli ton rôle, tu espères que ta manager lâchera un peu de lest pour le reste de la journée. “Voilà, passons à la caisse, si seulement tous les problèmes pouvaient être résolus avec quelques articles et un joli bracelet... la vie serait beaucoup plus facile.” Tu le guides vers un des comptoirs qui est libre et tu rentres rapidement ton identifiant et tu scannes ses produits, attrapant ton sac. C’est automatique, c’est la même chose à chaque fois maintenant que tu y penses. “Je vous mets quelques échantillons gratuits aussi, ça va lui plaire et avant que vous ne posiez la question, non, il n’y a pas de prix sur les boites, donc vous pouvez emballer ça tranquille.” Tu préfères le préciser, vu qu’il t’a dit qu’il était complètement débutant dans tout ça, oui, l’addition est salée au final, presque cent dollars quand tu y penses bien, mais est-ce que le prix est vraiment important pour ce genre de produit ? De ton avis oui et non, quand la qualité est au rendez-vous, il ne faut pas hésiter à sortir sa carte de crédit et sans broncher en plus, quand il s’agit de la énième marque d’une pseudo-célébrité ou quelqu’un qui est juste là pour ce faire des sous... Autant dire non tout de suite. Mais MAC est une de ces marques éternelles, que personne ne peut toucher et qui est là pour rester, il fait le bon choix. Sous le comptoir, tu trouves une de tes cartes de business et tu lui en fait glisser une. “Ma carte, parce qu’on m’a dit que je ne la donnais pas assez.” Il y a ton numéro de téléphone, un email, le tout accompagné de tes titres officiels et officieux : Laurie W. Make up artist, queer enthusiast, local trans girl. Et oui, vous êtes tous encouragés à avoir des cartes de visites mémorables et la tienne ne ment absolument pas, tu ne te caches rien du tout et de ton expérience, il vaut mieux être directe et dès le début. “Laurie c’est moi.” Mais ça, il s’en doutait déjà. “Il vous faut autre chose ?” Tu le lui demandes avec de nouveau, un sourire très professionnel et préfabriqué sur le visage, histoire de conserver les apparences jusqu’au bout. |
| | | | | | | | L'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne [PV Laurie] |
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