it must be exhausting always rooting for the anti-hero

@arthur coventry

S'il y avait bien un trait de caractère qui correspondait bien à Malone, c’était observateur. Depuis qu’il était enfant, il avait cette capacité à avoir son regard qui trainait un peu partout, même là où il n’était pas attendu, à enregistrer les informations que ses yeux pouvaient croiser. Il avait cette capacité à savoir légèrement se mettre en retrait, à préférer laisser les autres parler plutôt que de s’exprimer lui-même, à écouter plutôt qu’à argumenter. Pas qu’il ne présentait pas un caractère certain, attention loin de là - lorsqu’il pouvait s’y mettre, il n’était pas des plus tendres; simplement que le temps et les épreuves lui avaient appris à davantage se plier à la volonté commune plutôt que d’exercer un libre arbitre en solitaire. C’était pour cette raison qu’il se plaisait, en grande partie, autant lorsqu’il était encore militaire. Obéir aux ordres, observer ce qui pourrait être important pour une mission, rapporter tout détail pouvant être important à un supérieur hiérarchique. Tout ce qui composait son quotidien semblait avoir été fait pour lui.

Ces dernières années, ce n’était pas sur le terrain qu’il avait pu mettre à disposition ses qualités, cependant. Gentiment mis à la porte de chez les militaires plusieurs années plus tôt, alors que son physique ne lui permettait plus d’exercer comme il se devait - et qu’il ne désirait pas être relayé au rang de fonctionnaire assis derrière un bureau à faire de la paperasse toute la journée -, c’était dans le but de venir en aide à des personnes déchues comme lui qu’il mettait ses talents d’observateur hors paire à disposition. Chercher les signes du manque, repérer les habitudes qui pouvaient devenir dangereuses, les paroles qui n’existaient pas lors de la dernière rencontre. Ces changements pouvaient être des points positifs, bien sur; ces derniers cependant avaient tendance à être rapidement repérés par ses interlocuteurs, alors que les négatifs avaient plutôt pour habitude d’être relayés au second plan. Alors, Malone s’appliquait encore davantage pour les trouver, pour les pointer gentiment du doigt afin d’aider quiconque aurait besoin de lui, d’une main tendue.

Si bien qu’il n’avait pu s’empêcher que d’observer le comportant d’Arthur. Il ne le connaissait pas personnellement, mais le visage du jeune homme faisait partie des quelques habitués de ces dernières semaines; et il avait déjà passé trop de fois le seuil de l’association pour qu’il ne le remarque pas. En revanche, ce n’était pas là pour les bonnes raisons que l’exercice s’était relevé facile pour Constantine, puisque c’était par son comportement nonchalant et surtout je-m’en-foutiste qu’il avait repéré Arthur. Le jeune homme venait, repartait, sans s’être prêté à l’exercice de partager un peu de lui lors des séances. Certes, ce n’était pas obligatoire - et Malone était bien placé pour savoir à quel point cela pouvait être compliqué de s’ouvrir à de parfaits inconnus. Mais il y avait avoir le trac, ne pas se sentir à l’aise, et le faire exprès. Clairement, l’anglais appartenait à cette dernière catégorie et ce n’était pas pour faire plaisir au blond, qui l’attendait près de la table du responsable de la séance de partage du jour. Si personne ne lui avait rien dit jusque maintenant, l’injustice n’était pas quelque-chose qui plaisait à Malone et celui qu’il avait déjà renommé le petit con dans son esprit n’allait pas s’en sortir aussi facilement. « Je vais m’occuper de sa fiche, à lui. » Il avait fait un signe de tête à l’autre bénévole qui était à ses côtés ce soir, en montrant Arthur qui remontait dans leur direction. « Parce-qu’il commence à se foutre de nous et que j’aime pas ça. » Pas qu’il s’énervait facilement ou que c’était là dans ses habitudes, bien au contraire. Malone était ce qu’on pouvait appeler une force tranquille, et il en fallait beaucoup pour le faire sortir de ses gonds. Simplement, ceux qui se croyaient supérieurs n’avaient pas à être traités de la sorte.

Alors, lorsque Arthur arriva à la table, Constantine mit la main à plat sur le bout de papier qu’il lui présenta - mais sans apposer la moindre signature ou le moindre tampon. « Il est peut-être temps de faire une évaluation, t’en penses quoi ? » Cette méthode était proposée à bien des membres de l’association, à titre indicatif afin de pouvoir faire le point sur les progrès qui avaient été faits et les pratiques mises en place afin de pouvoir continuer à les voir apparaitre. Normalement, elles étaient davantage programmées à la demande des membres, et non mis en place à l’initiative des bénévoles. Mais Malone savait qu’en approchant d’un tel sujet, il touchait un point sensible chez l’anglais face à lui - car, si son observation était bonne et il se trompait rarement, le brun n’allait pas être capable de lui pointer le moindre progrès du doigt, puisqu’il n’était pas là pour ça mais simplement pour que quelqu’un d’extérieur prouve par un tampon sur une feuille qu’il avait bien été présent et qu’il s’était tenu au rendez-vous qui lui avaient été imposés. Il connaissait ce sentiment, Malone, que trop bien; c’était également pour quoi il ne laissait pas ce dernier s’installer trop longtemps chez les autres pour qu’ils puissent s’en détacher le plus rapidement possible et que ce dernier ne les tire pas vers des profondeurs desquelles il était difficile de s’extirper.

Arthur n’avait pas fermé l’œil depuis près de deux jours. Oh, il avait bien fait une micro-sieste sur la chaise de son bureau, dans la position la plus inconfortable qui soit et il pouvait encore en sentir les effets dans la raideur qui accompagnait chaque mouvement de sa nuque, mais il n’avait pas réellement dormi. D’un énième gala sans intérêt, il avait fini par se laisser embarquer par Nora dans une fête d’un tout autre genre où sa sobriété – déjà fragile – avait été remise en question dès l’instant où elle lui avait fait passer l’encadrement de la porte. S’en était suivi une nuit endiablée, entre consommation excessive d’alcool et quelques lignes de poudre blanche inégalement partagée avec la blonde. Ils se sont pris pour les rois du monde, empreint de la nostalgie d’une période entièrement révolue, mais déterminé à prétendre que tout pouvait être encore aussi simple. Avec elle, Arthur avait jeté ses responsabilités au placard, pour les troquer contre une adrénaline que seule la cocaïne pouvait encore lui produire. Il s’était juré de rester raisonnable, après tout, ce n’était pas grand-chose juste, une ligne ou deux, il était encore capable de maîtriser sa consommation, ce n’était que pour pimenter un peu la soirée. Qu’importait s’il avait rajouté quelques grammes après une longue et intense parenthèse entre les draps, ce n’était que pour tenir le coup, il devait se rendre au bureau. Arthur s’était laissé accaparer par ses obligations, enchaînant alors les tasses de café et les sucreries pour maintenir son attention, pour ne pas flancher face à la fatigue qui se faisait évidente. Il avait planché sur cette affaire importante avec tous les autres, parce qu’il se jurait d'avoir retrouvé l’énergie et la volonté de s’investir. Jusqu’à la retombée, qui l’avait laissé avec quelques sueurs froides et une nausée indescriptible. Il avait arrosé le tout avec un peu de whisky et un cachet d’ecstasy retrouver dans le fond de son portefeuille, pour tenir encore une ou deux, pour clôturer ce mail d’une importance extrême et pour aller rappeler à son ennemi professionnel, que c’était encore lui, le chef d’orchestre. S’en est venu une autre soirée, dans un lieu différent encore, avec une population toujours plus déchantée, aucune belle demoiselle pour l’accompagner, mais le même vice qui avait fini par gagner. Si bien qu’il n’avait pas vu le temps défiler se laissant totalement emporter par l’euphorie éphémère et cet ultime sentiment de toute-puissance qui en venait à altérer tout son raisonnement. Alors, Arthur n’avait pas dormi cette nuit encore, il avait préféré enchaîner sur une autre journée de travail, une réunion fut enchaînée par une autre, puis on avait requis sa présence pour un rendez-vous et pour finir son téléphone portable, c’était mis à sonner à tue-tête dans son bureau pour lui rappeler qu’il devait se rendre à cette fichue réunion, pour signer ce fichu papier auquel son paternel tenait tant.

C’est comme cela qu’Arthur avait finir par se retrouver assis sur l’une de ces chaises en plastique inconfortable au possible et qui semblait prendre un malin plaisir à grincer au moindre de ses mouvements. Entre deux soupirs, quelques roulements de yeux et une énième session de scroll intense sur l’écran de son téléphone, le jeune homme avait tenter de feindre un quelconque intérêt sur les propos porté par les autres. Le résultat final était toujours le même, Arthur les trouvait tous ringards au possible à venir déballer leur vie devant une bande d’inconnu simplement enfermé dans cette pièce pour se donner bonne conscience. Les effets de ses précédentes soirées eurent fini de se dissiper pour de bons et le Coventry devenait passablement agité sur sa chaise. Un mal de crâne était en train de naître entre ses tempes et il avait oublié son étui à lunettes dans sa voiture garé à plusieurs rues d’ici, parce que bien entendu cette fichue réunion se tenait dans le quartier le plus fréquenté du coin. Perdu dans son monde, presser à l’idée que l’enfer s’en termine et quelque peu obséder à l’idée de reprendre une dose maintenant que tout le monde ne cessait de parler de drogue, Arthur ne prêtait aucune attention à son environnement. Il n’avait pas remarqué la paire d’yeux fixer sur lui depuis plusieurs minutes, lui tout ce qui lui importait, c’était de se barrer en ayant obtenu une signature sur sa fiche. Rien de plus.

« Il est peut-être temps de faire une évaluation, t’en penses quoi ? » Arthur releva à peine les yeux de son téléphone avant de réaliser que son interlocuteur ne semblait pas vouloir lui rendre sa feuille. « Ouaiiiis, super initiative. » Il accole le tout de son sourire mégawatt, et faux-cul au possible, celui qui avait toujours su faire son effet auprès des autres. « Mais j’ai un rendez-vous, je suis pressé. » Ne pouvait-il pas simplement signer cette foutue feuille de présence, Arthur n’avait pas l’intention de s’attarder et encore moins de se plier à une séance de mise au point sur ses émotions et toute autres merdes qui serait pondu dans ce genre d’endroit. Mais voilà que le responsable voulait se la jouer tête dure. Ce n’est pas la première fois que le Coventry croisait ce visage entre ses murs et au fond de lui, il savait, à la perfection, ce qui allait s’en venir, mais il n’était pas venu ici pour cela, pas aujourd’hui. « Je suis venu non ? Alors tu peux signer mon papier ? » Arthur n’a pas la patience de jouer à ce jeu, la fatigue commençait enfin à se faire sentir et surtout sa patience avait une limite si fine.

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C’était ça le soucis aussi, lorsque vous alliez dans des associations qui étaient majoritairement gérées par des personnes qui étaient à votre place encore quelques mois, quelques années plus tôt: elles savaient repérer les signes. Les signes de mensonges, ceux d’abus de pouvoir également, sans oublier les signes du manque et des veines bien remplies. Les yeux de Malone n’avaient pas eu besoin d’être formés pour se mettre à repérer de près, de loin, tous ces signes; il avait fait partie de ceux cherchant à les cacher au reste du monde pendant de trop longues années. Il connaissait toutes les techniques pour tenter d’éviter le regard d’autrui sur soi, pour toutes les raisons mentionnées au dessus et même bien plus encore, alors lorsque Arthur s’approcha de la table derrière laquelle il se tenait, Malone avait déjà anticipé toute l’entrevue qui pourrait découler de cette rencontre. Et il n’y avait aucune version de cette dernière qui serait apprécié par l’anglais.

« Ouaiiiis, super initiative. » Il avait mis plus d’un instant avant de s’apercevoir que Constantine était en train de s’adresser à lui, et déjà que ce dernier n’était pas d’humeur à faire dans la délicatesse et la gentillesse, cela n’allait pas arranger le cas d’Arthur. Il avait vu également qu’il avait tendance à facilement rester le regard plongé sur son téléphone lorsque les autres parlaient, comme si leur avis et leur histoire n’imploraient pas à ses yeux - et par extension, aux yeux du monde. Tout, absolument tout dans ce type de comportement énervait Malone. Un petit sourire crispé apparut sur ses lèvres, pour marquer l’occasion d’ailleurs. « Mais j’ai un rendez-vous, je suis pressé. » J’ai un rendez-vous, ou quelqu’un m’attend je peux vraiment pas rester, couplés d’un je me sens mieux ça va pas être nécessaire; le prenait-il vraiment pour une bleu ? « Un rendez-vous plus important que celui que t’avais ici ? » Haussant un sourcil, le regard que le jeune homme portait sur celui face à lui soulignait son manque de patience pour ce qui était en train de se tramer sous ses yeux. Si Arthur voulait jouer à ce petit jeu là avec lui, il lui rendrait la pareille sans trop de soucis; ils étaient faits du même bois, d’une certaine façon, il savait très bien la façon dont il pouvait se sentir en ce moment et ce qui finirait par le faire sortir de ses gonds si besoin était. « Je suis venu non ? Alors tu peux signer mon papier ? » La main de Constantine toujours posée à plat sur le dit-papier, cette dernière finit par faire glisser la feuille pour la rapprocher de son côté à lui plutôt que de celui de l’impatient. Le sourire de Malone était d’autant plus énervé, d’autant plus moqueur aussi bien qu’il sache parfaitement que ce n’était pas utile d’utiliser ce dernier. « Non. »

Alors, il redressa ses prunelles pour les accrocher à celles de l’anglais. Tout, dans le moindre trait de son visage, transpirait le fait qu’il ne méritait en aucun cas une signature ou un coup de tampon sur sa feuille aujourd’hui; pas plus que les autres jours en réalité, mais peut-être que d’autres bénévoles n’avaient pas vu d’inconvénients à le faire pour se débarrasser de la présence de ce jeune homme imbu de son propre comportement. « Je vais pas être insultant au point de te demander de rajouter un s’il te plait, parce-que dans tous les cas ma réponse sera: non. » Cependant, même si effectivement il se serait bien passé de ce type de comportement au sein des réunions pour ceux qui essayaient vraiment de s’en sortir, Malone s’était toujours promis de ne jamais laisser quelqu’un qu’il savait dans le besoin de côté. Parce-que même s’il faisait le malin, Arthur avait besoin d’aider - c’était d’ailleurs pour cette raison là qu’il était présent, plusieurs soirs désormais, dans cette salle croisant tant d’inconnus par an. Peut-être que ce n’était pas une idée qui venait à la base de lui-même, mais il se sentait à une certaine hauteur obligée de trainer sa carcasse défoncée jusque l’association, alors c’était que ça devait compter pour quelqu’un d’autre. « C’est qui, qui t’oblige à venir ici ? » La feuille d’Arthur était bien en sécurité dans la poche de la veste de Malone désormais, le jeune anglais ne pourrait donc pas la récupérer tant que Constantine aurait décidé que cela valait le coup de lui donner. « T’as pas l’air heureux d’être là, alors je suppose que c’est pas toi qui choisis. » Certaines personnes autour d’eux jetaient des regards tantôt inquiets, tantôt étonnés en direction de Malone - il faut dire que là n’était pas dans ses habitudes d’agissement, lui qui savait garder son calme et un comportement adéquate en général en toutes situations. Il n’en avait que faire cependant, son attention n’étant pas dirigée vers ces derniers mais seulement sur Arthur, toujours face à lui pour le moment. « Et malheureusement, c’est pas toi qui choisis non plus quand ta feuille est signée ou non, donc à moins que t’arrives à me prouver que ça vaut le coup que je mette un coup de tampon dessus aujourd’hui, elle restera avec moi. » Parce-que non seulement ça le ferait reculer d’une séance dans l’objectif que la personne lui imposant sa présence ici avait du lui fixer, mais en plus il perdait les signatures précédentes si Malone gardait la feuille avec lui. Il n’était pas sur que ce soit totalement dans ses cordes, d’agir de la sorte, mais tant pis: si ça valait le coup, il prenait le risque. Il avait vu plus coriace que l’homme face à lui, il avait connu plus dangereux que tout simplement un homme.

Feindre l’attention Arthur savait le faire à la perfection. Tout se jouait dans un sourire en coin, un regard un peu plus appuyé et quelques hochements de tête bien placé pour prétendre à une dévotion sans faille et donner l’illusion parfaite attendu par son interlocuteur. Feindre, il pouvait le faire dans son sommeil, mais le responsable du jour semblait vouloir se montrer plus coriace que ses prédécesseurs. « Un rendez-vous plus important que celui que t’avais ici ? » L’anglais se trouva dans l’incapacité physique de retenir ce roulement des yeux soulignant l’indifférence que pouvait lui provoquer ce genre de question. Tout dans sa vie était bien plus important que passer une minute de plus dans ce trou miteux. « Contrairement à certains ici, j’ai un job. » Haussant un sourcil, Arthur chercha à imiter la position de son interlocuteur, prouvant en tout point que son impatience pouvait aisément matcher celle du blond. « Un vrai job. » Et non pas celui qui consistait à soi-disant prêcher la bonne parole auprès d’un public amoché par des années de cames et autres dérives en tout genre. « Non. » Ce qui n’était jusqu’alors qu’une petite attitude provocatrice commençait à lentement jouer avec les nerfs du Coventry. « Je vais pas être insultant au point de te demander de rajouter un s’il te plait, parce-que dans tous les cas ma réponse sera: non. » Lentement, les poings d’Arthur vinrent se serrer à ses flancs tandis que son regard suivait sa feuille de présence qui était en train de disparaître lentement dans la poche du fauteur de troubles. Voilà que l’autre se prenait pour un sauveur prêt à enfiler sa cape de bon samaritain pour montrer à Arthur qu’il pouvait l’aider sur le droit chemin. Ou n’importe quelle autre connerie du genre. « J’ai pas que ça à faire. » Et surtout, il n’avait désormais plus aucune patience.

Dans bien d’autres circonstances, Arthur aurait déjà effectué sa meilleure sortie dramatique agrémentée par quelques noms d’oiseaux balancés en direction de celui qui semblait déterminé à lui tenir tête. Le désir de tout laisser exploser en vient à le faire trembler sur place sans que jamais il ne laisse toute la place à l’indifférence qui savait si bien le définir. Arthur ne bronchait pas, il attendait le prochain coup en se balançant sur la pointe de ses pieds parce qu’il savait pertinemment qu’il ne pouvait manquer cette signature. Si le blond pensait que le Coventry devait lui rendre des comptes, lui savait à la perfection que l’appel de son paternel arriverait dès demain avec le désir d’un compte-rendu détaillé de ses dernières réunions et la demande expresse de faire parvenir cette fichue feuille au psy de la famille. « C’est qui, qui t’oblige à venir ici ? » Le point était bien trop sensible pour que le Coventry ne prenne le temps de réfléchir à une remarque pertinente. « En quoi ça te regarde ?! » Il venait de laisser la porte ouverte à toutes les possibilités, désormais l’emmerdeur avait la confirmation que la présence d’Arthur à ce genre de réunion échappait à sa propre volonté. « T’as pas l’air heureux d’être là, alors je suppose que c’est pas toi qui choisis. » Il ne sut retenir un roulement d’yeux accompagné par un faible éclat de rire sarcastique. « Qui serait heureux de passer sa soirée avec monsieur l’emmerdeur et les camés du coin ?! » Penchant légèrement la tête sur le côté, il attendait une reprise de volée, une quelconque remarque qui lui permettrait de se faufiler dans la faille afin de créer une dispute qui les éloignerait du sujet principal et lui permettrait, peut-être, de récupérer sa maudite feuille. « Et malheureusement, c’est pas toi qui choisis non plus quand ta feuille est signée ou non, donc à moins que t’arrives à me prouver que ça vaut le coup que je mette un coup de tampon dessus aujourd’hui, elle restera avec moi. » L’espace d’un court instant, Arthur s’échappa dans un coin de son esprit. Il se voyait céder à cette colère sourde qui le faisait trembler, attrapant les bords de la table pour l’envoyer valdinguer à l’autre bout de la pièce avant de hurler à en perdre la voix pour dénoncer cette injustice qu’il n’était plus réellement en état de comprendre. La réalité vint le rattraper lorsque Malone se racla la gorge et que toutes les stratégies qui semblaient traverser l’esprit d’Arthur ne viendraient pas à lui amener la conclusion qu’il désirait. Il avait besoin de cette feuille pour gagner du temps, pour qu’on lui fiche la paix. Il avait également cruellement envie de se taper une ligne sur la première surface plane disponible. Alors, il se devait de jouer. « Tu veux savoir quoi ? » Il avait compris, depuis le départ, qu’il allait devoir donner un peu de sa personne pour obtenir son dû. « Que je te dise que je consommais encore ce matin ?! Faut peut-être que je rajoute quelques larmes pour l’effet mélo ? » Arthur tentait l’affront en déballant cette vérité qu’il ne pouvait presque plus cacher face au regard bien trop connaisseur de celui qui ne cessait de lui tenir tête. « Que je préférerais encore m’éclater la tronche avec n’importe quelle came plutôt que de devoir débattre sur toutes vos conneries ? » Il n’avait aucune foi en la thérapie, Arthur ne voyait aucune issue, car il se persuadait sans cesse de n’avoir aucun problème. Lui, il savait parfaitement gérer sa consommation, lui, il était capable d’arrêter du jour au lendemain, il n’était pas comme eux, il n’était pas un cas perdu. « Je sais ce que je fais et je sais surtout que j’ai besoin de cette signature. » Son ton venait de tomber de quelques octaves, prenant la forme d’un feulement assassin tandis qu’il se rapprocha de quelques pas. « Alors rends-moi mon papier. » Ou tout pourrait mal tourner.

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Le roulement d’yeux ne passa pas inaperçu; Malone remarquait tous les détails de toutes façons, il avait été formé à ce type de chose. Il décida cependant de ne pas le pointer du doigt, étant donné qu’il n’avait pas encore pris la température du comportement de l’homme face à lui. « Contrairement à certains ici, j’ai un job. Un vrai job. » Heureusement qu’il n’avait jamais été du genre à démarrer au quart de tour, sinon il serait venu attraper le brun par le col pour lui faire comprendre que provoquer les gens ne le mènerait nulle part. A défaut de pouvoir réagir de la sorte, il se contenta d’hausser légèrement l’un de ses sourcils sur son visage. « Félicitations à toi alors. » Parce-qu’il comprenait aussi également parfaitement le sous-entendu, et qu’il ne rentrerait pas dans ce petit jeu là. Le but n’était pas de créer un polémique, ni une bagarre, mais bien de jouer son rôle jusqu’au bout et de permettre d’être l’obstacle, parfois, nécessaire dans la vie d’autrui - comme d’autres avaient pu remplir ce rôle dans sa vie à lui au fil des années. « J’ai pas que ça à faire. » Oui oui, pardon: il était vrai que Malone avait que ça à faire de se trouver face à des petits arrogants dans son genre, et que monsieur avait une vraie occupation dans la vie autre que de traiter mal les personnes qu’il croisait et qui tentaient de lui venir en aide.

Ce n’était pas un petit excité dans son genre qui allait faire perdre pied à Malone, et ce n’était pas non plus en adoptant ce type de comportement que ce dernier serait impressionné. Il ne plierait pas sous les menaces - à peine - dissimulées, et garderait la feuille qu’Arthur voulait récupérer bien au chaud dans la poche de sa propre veste. Car il était persuadé que l’anglais en avait besoin plus pour une tiers personne que pour lui-même, et qu’il aurait plus de chance de réussir à lui être vraiment utile en utilisant un moyen de pression qu’en le laissant repartir de la sorte dans la nature. Ce n’était pas une méthode particulièrement catholique, mais du moment qu’elle portait ses fruits il n’en avait que peu à faire Constantine. « En quoi ça te regarde ?! » Oh, et apparement il avait touché un point sensible au passage. « Qui serait heureux de passer sa soirée avec monsieur l’emmerdeur et les camés du coin ?! » Un fin sourire ne sut être retenu côté bénévole, aux mots prononcés par Arthur. Malone haussa dans la foulée légèrement un de ses sourcils sur son visage. « Je suis monsieur emmerdeur ou le camé du coin dans cette histoire ? » Bien sur qu’il jouait sur l’humour alors qu’il savait parfaitement que cela allait énerver davantage l’homme en face de lui; mais il n’avait pas peur et ne se laisserait pas prendre de haut de la sorte alors qu’il était lui droit dans ses baskets.

Et si la colère était perceptible dans son regard, et que tout son comportement montrait à quel point il fulminait intérieurement, étonnement lorsque Malone lui demanda s’il avait une et une seule bonne raison à lui donner pour qu’il signe sa feuille, ce ne fut pas la réponse qu’il attendait qui se fit entendre. Il s’attendait à ce qu’il passe par dessus le petit bureau pour l’étrangler à mains nues, alors qu’au contraire il répondit d’une voix presque calme à l’homme face à lui. « Tu veux savoir quoi ? Que je te dise que je consommais encore ce matin ?! Faut peut-être que je rajoute quelques larmes pour l’effet mélo ? Que je préférerais encore m’éclater la tronche avec n’importe quelle came plutôt que de devoir débattre sur toutes vos conneries ? » - « Tu consommais encore ce matin mais tu prétends arriver ici en étant sobre ? » Bien sur que Malone allait insister sur le point et la question soulevée avec ce dernier; il comprenait ce qui le pousserait à agir de la sorte car il l’avait fait plus d’une fois, mais ce n’étiat pas là une méthode qu’il encourageait ou défendait pour autant. Alors, il appuya sa question d’un regard un brin moins clément à faire des efforts désormais. « Je sais ce que je fais et je sais surtout que j’ai besoin de cette signature. Alors rends-moi mon papier. » Ce fut un rire amer qui s’échappa un peu contre son désir d’entre les lèvres de Malone. Il savait ce qu’il faisait - à d’autres. Malone connaissait la chanson, et savait comment cette histoire terminait réellement une fois le rideau tiré.

Alors, il finit par se lever de sa chaise, pour poser ses paume sur la table et bras tendus, coudes bloqués, il fit basculer légèrement son torse en avant. Ainsi, il pouvait regarder Arthur par dessus ses cils, avec un regard dénué de patience désormais, montrant qu’il n’était pas celui étant intimidé dans cette situation et que si l’anglais voulait, les rôles pouvaient être inversés. « Tu sais ce que tu fais, hein ? Donc là maintenant tout de suite si je te décris la façon dont l’adrénaline peut courir tes veines à chaque dose que tu t’enfiles, tu peux me jurer que t’auras pas envie de t’en faire une ligne à peine sorti d’ici ? Même que t’arriveras à pas te la faire sur ma table devant moi, hein ? » Il risquait de faire sortir Arthur de ses gonds, mais tant pis: il ne se laisserait pas faire. « Tu fais les efforts, on les fait aussi. Tu fais pas les efforts, tu peux toujours attendre pour qu’on soit cléments avec toi. Si tu veux qu’on atteste de ta bonne volonté et que t’as pas envie de lever le petit doigt pour faire le moindre effort, apprends au moins à être meilleur acteur. » Il releva quelque peu son menton, pour plonger son regard noirci dans celui de l’anglais. « Je t’ai dit: c’est pas toi qui fixe les règles, j’ai dit non pour la signature et tu retrouveras ta feuille que quand on aura vu des efforts. Des vrais, efforts. » Il se redressa complètement. « Et si la personne qui attend après ta feuille est pas satisfaite de toi, elle peut toujours m’appeler pour que je puisse servir de témoin de ta mauvaise volonté. »

« Je suis monsieur emmerdeur ou le camé du coin dans cette histoire ? » Arthur n’était pas censé pas tomber dans le panneau, il se devait d’être plus malin que l’homme face à lui. Il en avait connu bien d’autre qui avait cherché à le faire sortir de ses gonds au travers d’un certain sarcasme en toute somme plutôt minable et pourtant… Il tomba tête la première, dans le simple désir de faire payer son affront à monsieur, je me pense meilleur que les autres. « Laisse-moi deviner… » Il avait sorti son sourire en coin, celui qui dessinait ce rictus sur les traits de son visage, celui qui ne présageait jamais rien de bon. « T’étais le camé de service qui est devenu monsieur l’emmerdeur. » Arthur ne connaissait rien de Malone, les deux hommes ne s’étant croisé qu’en de rares occasions, mais il sentait ce truc chez lui. Ce sentiment de rédemption qui semblait accorder au blond le droit d’émettre un jugement sur le parcours des autres. « Et tu penses pouvoir sauver ma pauvre âme en peine avec ton savoir ? » Un ricanement se faufile entre ses lèvres laissant échapper tout le dédain qu’il souhaitait lui cracher à la figure. Arthur n’avait pas le temps pour tout cela, il devait avoir cette signature, son père allait lui réclamer le papier dès le lendemain, il le savait parfaitement. Il était déjà trop tard pour tenter de trouver une autre réunion et très honnêtement, il préférait encore chercher des noises à Malone plutôt que s’infliger une autre soirée passée dans une cave pourrie à écouter les déboires des autres. « Tu consommais encore ce matin, mais tu prétends arriver ici en étant sobre ? » Non vraiment, il commençait très sérieusement à lui taper sur le système celui-là. « Je t’ai demandé si c’est ce que tu voulais entendre, je n’ai jamais dit que c’était la stricte vérité. » Arthur avait listé tous les supposés éléments que Malone se voulait d’entendre pour lui lâcher un peu de lest. Il n’était tout de même pas assez con pour aller hurler sur tous les toits que sa sobriété était compromise depuis bien longtemps déjà. « T’es pas censé écouter les gens avant de tirer des conclusions ?! » Sur ce terrain, ils pouvaient être deux à jouer et Arthur n’était pas du genre à abandonner le premier.

La tension ne cessa de grimper entre les deux jeunes hommes. Ils se trouvaient désormais à niveau égal, l’un en face de l’autre, prêt à en découdre. L’un cherchait à défendre son programme, l’autre ne voulait que récupérer son fichu bout de papier. Ce ne devait être que cela, une querelle insignifiante pour une histoire de signature, mais Malone semblait vouloir rendre tout cela bien plus personnel. « Tu sais ce que tu fais, hein ? Donc, là, maintenant, tout de suite, si je te décris la façon dont l’adrénaline peut courir tes veines à chaque dose que tu t’enfiles, tu peux me jurer que t’auras pas envie de t’en faire une ligne à peine sortie d’ici ? Même que t’arriveras à pas te la faire sur ma table devant moi, hein ? » C’est tout le corps d’Arthur qui se mit à réagir face à ces quelques paroles. Ses doigts commencèrent à le démanger, s’agitant dans de légers soubresauts, il pouvait exactement ressentir cette adrénaline décrite par le responsable, cette course effrénée au plaisir éphémère. Juste quelques minutes de plénitude, assez pour venir couper les bruits ambiants et entourer son monde de coton qui ne laissait rien passer d’autres que l’ivresse du moment. Arthur vibrait de la tête aux pieds à la simple idée de s’envoyer une ligne sur la table en plastique et les mots lui manquaient cruellement pour venir contredire son adversaire. « Ta gueule ! » Ce n’était pas sa meilleure répartie, on lui avait appris à être bien plus distingué et plus subtile dans ses approches, mais le manque était en train de prendre le dessus. Arthur voulait que Malone se taise, tout de suite ! « Tu fais les efforts, on les fait aussi. Tu fais pas les efforts, tu peux toujours attendre pour qu’on soit cléments avec toi. Si tu veux qu’on atteste de ta bonne volonté et que t’as pas envie de lever le petit doigt pour faire le moindre effort, apprends au moins à être meilleur acteur. » Malone le défiait du regard et Arthur senti ses poings se refermer le long de son corps. La provocation l’atteignait de tous les côtés, il ne savait comment gérer cette fausse indignation et les règles que l’on cherchait soudainement à lui imposer. « Je t’ai dit: c’est pas toi qui fixe les règles, j’ai dit non pour la signature et tu retrouveras ta feuille que quand on aura vu des efforts. Des vrais, efforts. » La patience d’Arthur venait d’arriver à expiration. Il n’avait plus envie de jouer le bon élève, il ne voulait plus entendre les accusations du blond. « Je savais pas que l’on entrait en prison en venant ici. » Il se prenait pour qui ce gars-là ? Arthur aurait déjà dû partir depuis longtemps, il aurait dû abandonner cette fichue feuille, tourner le dos à tout le monde et juste disparaître, mais il y avait cette voix dans un coin de sa tête qui lui rappelait que son père attendait des résultats et qu’il ne pouvait pas s’avouer vaincu. Pas une fois encore.

« Et si la personne qui attend après ta feuille est pas satisfaite de toi, elle peut toujours m’appeler pour que je puisse servir de témoin de ta mauvaise volonté. » Il suffit de cette dernière remarque pour que la bienséance d’Arthur s’envole par la fenêtre. Il jeta au feu son éducation et toute la bonne conduite dont on l’avait nourri depuis la naissance pour mieux se propulser vers l’avant et attraper le col de Malone entre ses doigts fins. Il serra de toutes ses forces, ramenant du mieux possible le corps du blond vers le sien, malgré la table qui restait entre eux deux. « Tu ne vas appeler personne. » La voix d’Arthur se fit menaçante, l’autre avait tapé sur l’unique point sensible, la seule raison qui le poussait encore à venir aux réunions. Son père ne devait rien savoir de sa rechute, il se devait de penser que son fils était revenu sur le droit chemin, qu’Arthur passait son temps à travailler comme un acharné et rien de plus. D’une légère pression de ses doigts, il amena le visage de Malone encore plus près du sien, plongeant ses prunelles folles dans celle éternellement calme du médiateur. « Et tu vas me rendre ce putain de bout de papier ! » Il n’allait pas être en mesure de le demander plus calmement, encore moins de céder aux attentes de l’homme. « Le deal, c’est de se pointer aux réunions, non ? » Il ne lâchait toujours pas l’autre, voulant avoir son attention encore quelques instants. « Je viens dans ta cave pourrie une fois par semaine pour écouter les pleurnicheries des uns et des autres. » Et c’était amplement suffisant, cela méritait toutes les signatures du monde à ses yeux. Nulle part, il était mentionné l’obligation de participer ou le fait que les intervenants pouvaient se permettre d’imposer de quelconques règles. Arthur n’allait pas céder. Il avait besoin de sa feuille, il ne partirait pas sans, qu’importe si ses convictions ne cessaient de s’effriter à mesure que les tremblements s’emparaient de son corps. Il vint coller l’objet contre le torse du blond sans jamais le lâcher du regard. « Donc, maintenant, tu vas signer ! » Il ne voulait pas en arriver aux menaces, mais il était à deux doigts de retourner la pièce, prêt à s’engager dans une crise sans plus aucun contrôle. Il avait besoin de sa feuille, il ne partirait pas sans, qu’importe si ses convictions ne cessaient de s’effriter à mesure que les tremblements s’emparaient de son corps. Il avait besoin de cette putain de signature et après cela, il allait avoir besoin d’une dose. « Aller bouge ! » Arthur était en train de perdre le contrôle petit à petit…

it must be exhausting always rooting for the anti-hero

@arthur coventry

« Laisse-moi deviner… T’étais le camé de service qui est devenu monsieur l’emmerdeur. Et tu penses pouvoir sauver ma pauvre âme en peine avec ton savoir ? » Bien sur que ce fut avec un petit rire amer, frottant un instant le bout de son nez de son index, que Malone reçut les paroles du jeune homme. Pendant un instant, il dut se rappeler ce pourquoi il était là réellement pour ne pas avoir le réflexe de lui en retourner une de suite. « Tu vises plutôt juste, effectivement. » Parce-que même si les paroles d’Arthur ne lui plaisaient en rien, il n’était pas ici non plus pour mentir et pour se archer derrière des faux-semblants; c’était justement tout le contraire de ce qu’il demandait à ceux qui passaient le seuil de l’association, et c’était ce à quoi il s’était promis de ne jamais donner de nouveau son temps. Il avait été de ceux qui mentait à longueur de journée pour donner le change et avoir l’impression de s’en sortir; il ne désirait plus appliquer les comportements qui avaient failli le conduire à sa perte. Alors, hors de question qu’il se défile devant celui qui perdait pied, de son côté. « Je t’ai demandé si c’est ce que tu voulais entendre, je n’ai jamais dit que c’était la stricte vérité. T’es pas censé écouter les gens avant de tirer des conclusions ?! » - « Ecouter les gens est une chose, les croire en est une autre. » Le provoquer n’était bien sur, en revanche, pas une idée de génie. Mais il fallait aussi que l’autre se rende à l’évidence que son comportement n’était pas de ceux attendus ni respectables, et qu’il ne s’en sortirait pas simplement en sortant les crocs. Il en avait vu d’autres, Constantine, ce n’était pas l’anglais qui lui ferait perdre ses moyens.

Cependant, si Malone savait parfaitement gérer ses émotions et sa colère - jusqu’à un certain point, d’accord, mais ce dernier était bien loin et surtout en territoire qu’il n’irait pas visiter -, ce n’était apparemment pas le cas de Coventry. « Ta gueule ! » Si la conversation n’était pas sur le point de virer problème, il aurait pu ajouter ici un petit sourire; il se contenta de renchainer, de souligner les points qui n’allaient pas dans leur échange et qui constituaient les raisons qui le poussaient à agir de la sorte. Si Arthur voulait sa feuille signée aujourd’hui, il aurait du y penser plus tôt et ne pas jouer à l’idiot, voilà tout. Ce n’était pas au bon vouloir de chacun ici, les règles ne changeraient pas parce-que monsieur n’était pas ravi de la tournure des événements. « Je savais pas que l’on entrait en prison en venant ici. » Il n’avait pas connu la prison, Malone, et il doutait franchement que ce soit le cas d’Arthur. La comparaison était forte, mais ce que l’homme face à lui ne comprenait pas c’était que la prison n’était pas ici: elle était dans les gestes et les habitudes qui s’installaient face aux drogues utilisées. « Tu la créées tout seul, la prison. » Il le dirait à chaque fois, même si le jeune homme ne semblait pas disposer à entendre de tels arguments. Il garderait une continuité dans son discours, même s’il était remis en question à chaque fois.

Et il aurait pu continuer longtemps dans cette direction là s’il n’avait finalement pas appuyé sur le mauvais bouton - plus ou moins intentionnellement, disons qu’il fallait faire des tests et qu’apparement, le dernier sur la liste était concluant. Puisqu’à peine Constantine avait-il terminé de prononcer ses mots qu’Arthur passait par dessus la table pour l’empoigner par le col. S’il ne s’était pas attendu à une telle réaction à un moment donné, Malone n’aurait pas eu sa place ici; si bien qu’en réalité, aucune surprise ne fut de mise sur les traits de son visage alors qu’il laissait l’autre diriger cette colère sourde en lui dans sa direction. « Tu ne vas appeler personne. » Il laissa Arthur l’attirer encore davantage vers lui. « Et tu vas me rendre ce putain de bout de papier ! » Du coin de l’oeil, Malone vit que l’autre bénévole qui se tenait non loin d’eux depuis quelques minutes s’était levé de sa chaise; il lui fit signe de laisser tomber, qu’il avait la situation en mains. Pour le moment certes, c’était plus Arthur qui le tenait lui en mains, mais il n’était pas inquiet; comme dit: il en avait connu des pires, des situations. « Le deal, c’est de se pointer aux réunions, non ? Je viens dans ta cave pourrie une fois par semaine pour écouter les pleurnicheries des uns et des autres. » Prétextant être réellement faible face à la poigne de Coventry, Malone plia quelque peu davantage vers la table lorsqu’il le bougea, et fit mine de sursauter lorsqu’il lui colla la feuille contre le torse pour lui souligner encore une fois la raison qui le poussait à agir de la sorte. « Donc, maintenant, tu vas signer ! Aller bouge ! » Sauf que cela commençait à être lassant; en plus de ne pas se rendre compte du déni dans lequel il se trouvait - mais sur ce point là, il ne pouvait lui reprocher pour de vrai, ne connaissant que trop bien ce point de vue -, il ne s’apercevait pas qu’il n’avait en réalité aucune main-mise sur la situation. Finalement, soupirant, Malone décida qu’il était temps de remettre les pendules à l’heure. « Avant de t’en prendre à quelqu’un comme ça, tu ferais mieux de savoir à qui tu t’adresses. »

Il n’était pas de ceux apportant réellement de grands discours ou comprenant toutes les subtilités que certains arguments pouvaient apporter. Malone était un homme de terrain, et un habitué des résolutions de conflits par la force malheureusement. Alors, sans qu’Arthur ne l’ait vu venir - ce dernier semblait bien trop concentré de toutes façons sur sa maudite feuille, une fois de plus, et sur aucun autre élément autour -, il l’attrapa à son tour par son col par surprise, tirant dessus si fort qu’il fut obligé de plier et de le lâcher. L’instant d’après, c’était le nez du jeune anglais qui allait taper gentiment contre la table entre eux, juste assez fort pour compléter la surprise, mais pas assez pour abimer son joli minois tout de même. Dans un mouvement souple, Malone se servit de sa seconde main pour sauter par dessus la table; dans la foulée, sans attendre et sans laisser une seule seconde de répit, il fit une clef de bras à Arthur afin de le maintenir la tête contre la table. Tout ça sans avoir une seule goutte de sueur perlant de son front - comme quoi, même les substances ingérées pendant des mois et des années n’avaient pas eu bon d’un bon entrainement. « Je t’ai dit que non, je signerai pas ta putain de feuille. Maintenant, va falloir que tu te calmes si tu veux que je te lâche. » Il savait qu’il n’était pas là pour ça et qu’il n’avait aucun droit de faire la police sur ces lieux là, en réalité. Mais il n’allait pas se laisser malmener par un merdeux dans le genre d’Arthur, là où ce dernier n’en faisait qu’à sa tête et se prenait pour le roi du monde. Et si Coventry tentait de se débattre, Malone resserrerait sa prise sur la clef de bras - il finirait par grimacer pour quelque-chose de valable, au moins. « Tant que t’auras pas compris pourquoi tu fais ça et que tu mépriseras les autres qui sont ici comme ça, c’est toi qui va la fermer et filer droit. »

« Tu la créées tout seul, la prison. » Ce type de remarque Arthur l’avait entendu dans bien d’autres bouches auparavant. Il avait déjà eu toutes les versions qui faisaient de lui le coupable idéal de ses propres malheurs et tout autre versant tenant à lui rappeler que vivre, c’était choisir et que le choix, il l’avait eu il y a des années de cela. C’était la solution de facilité, ce qu’on lui balançait pour tenter de le déstabiliser, mais l’effet escompté ne prenait jamais le pas sur tout ce qu’Arthur pensait de sa propre personne. Il avait conscience d’être en partie responsable du problème, mais il ne supportait pas qu’une tierce personne se donne le rôle de petit conseiller. Surtout lorsque cette personne prenait les traits de Malone, qu’il jugeait incapable de pouvoir donner des conseils à qui que ce soit. Arthur n’était pas prêt à entendre l’histoire d’un mec qui avait réussi à s’en sortir puisqu’il n’acceptait toujours pas l’idée que l’on puisse s’en sortir un jour. Pour le Coventry, tout ce petit monde cherchait à se mentir pour se donner une bonne image comme il n’avait eu de cesse de le faire dans sa propre vie. Et au fond, tout ce qu’il voulait, c’est qu’on lui signe sa feuille et qu’on lui fiche la paie.

L’autre avait décidé de jouer avec ses nerfs et sans le regard de son père vrillé dans son dos, Arthur avait tendance à perdre son sang-froid bien trop facilement. Il était plus simple de laisser libre cours à sa colère plutôt qu’affronter les raisons qui le poussaient encore à venir ici malgré son état et son manque de volonté. Son agitation n’améliore en rien la situation, il cherche à pousser l’autre à bout, mais c’est lui qui perd la bonne vision des choses. Il se croit tout-puissant, use de sa voix d’homme avec pouvoir, celle qu’on avait forcé dans sa personnalité, celle qui lui donnait l’illusion d’une carapace. Arthur avait perdu pied dans la conversation, mais l’homme en face de lui ne comptait pas se laisser déstabiliser aussi facilement. « Avant de t’en prendre à quelqu’un comme ça, tu ferais mieux de savoir à qui tu t’adresses. » - « T’es personne. » La réplique lui avait semblé trop facile, toute sa vie, on lui avait répété qu’il était mieux que l’autre, qu’il faisait partie de l’élite.

Emprisonné dans sa colère, obséder par l’envie de voir son papier revenir entre ses mains, Arthur n’a pas pris le temps de lire les réactions de Malone, de remarquer que sa patience se balançait sur un fil bien trop fin. Il n’a pas le temps de comprendre, soudainement sa tête heurte la table et la douleur envie le côté gauche de son visage. Arthur voudrait crier, mais le son resté coincé dans sa gorge dès lors que son bras se trouve tordu dans son dos et qu’il prend conscience que Malone a pris le dessus. « Je t’ai dit que non, je signerai pas ta putain de feuille. Maintenant, va falloir que tu te calmes si tu veux que je te lâche. » Arthur s’agite malgré tout, il cherche à se débattre, il ne veut pas abandonner le combat aussi rapidement, il avait toujours eu le dessus sur les autres, ce n’est pas un camé qui allait lui faire baisser sa garde. « Lâche-moi connard ! » À se tortiller dans tous les sens, Arthur manque de tomber plus loin que la table, mais Malone le retient dans une poigne de fer, tirant légèrement son bras vers l’arrière. Juste un peu, un centimètre encore et Arthur pourra sentir l’os cassé. « Lâche-moi ! » Il était en train de se donner en spectacle, il pouvait entendre les voix autour de lui, le murmure de la rumeur et des doigts que l’on pointe dans sa direction. La douleur fait naître quelques larmes aux coins de ses yeux et Arthur se sent plus humilié que jamais. « Tant que t’auras pas compris pourquoi tu fais ça et que tu mépriseras les autres qui sont ici comme ça, c’est toi qui vas la fermer et filer droit. » Il suffirait à Arthur de céder, de dire tout ce que l’autre cherchait à entendre pour pouvoir être relâché, mais il s’entête à ne pas vouloir perdre autant la face. Il a depuis longtemps cesser de s’agiter et c’est finalement un autre des intervenants qui demande à Malone de le lâche. Arthur récupère son bras, le plaquant contre son torse. En relevant les yeux, il remarque tous ces gens qui l’observent et la honte s’infiltre dans chacun recoin de son être. Il en a déjà oublié sa feuille et les conséquences, il a oublié pourquoi il voulait absolument récupérer ce fichu bout de papier. Habituellement, il aurait hurlé la menace d’un procès, d’une vengeance et bien d’autres insultes en tout genre. Aujourd’hui, c’est avec la queue entre les jambes qu’il s’enfuit vers la sortie sans jamais recroiser le regard de Malone.

La véritable leçon, il finira par l’apprendre, plus tard, avec une autre forme de violence et une réalité qui le forcera a envisager toutes les options pour ne pas sombrer sans trouver un jour l’espoir de réellement pouvoir s’en sortir.