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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

La sécurité autour et à l’intérieur de l’Octopus a été triplée. Depuis la visite de Solas et son avertissement sybillin, Amos et moi ne lésinons pas sur les dépenses vouées à garder mon bébé en sécurité, que ce soit ici ou au loft. De mon côté, je suis constamment tiraillée entre l’envie de la garder loin de l’Octopus et de ses sous-sols, et celle de l’avoir en permanence sous les yeux pour être certaine qu’il ne lui arrive rien. Consciente qu’elle est plus en sécurité loin de moi, mais incapable de faire taire mon instinct maternel de lionne, je suis constamment sur le qui-vive, en permanence tendue comme un ressort. Plusieurs employés du casino et, surtout, plusieurs membres de l’organisation criminelle que ses sous-sols abritent en ont déjà fait les frais. En temps normal, je possède une réserve de patience plus que gigantesque. Ces derniers temps, elle a tendance à s’épuiser bien plus rapidement à cause de l’angoisse et du manque de sommeil induit par cette dernière. Impossible de fermer l'œil la nuit quand je crains de réaliser que j’ai perdu mon bébé au réveil. Impossible de connaître un vrai sommeil réparateur alors que mes nuits sont agitées de cauchemars qui explorent tous la même peur : qu’il arrive quelque chose à Micah. D’épaisses couches de maquillage hors de prix me permettent peut-être de donner le change mais je ne me fais guère d’illusion, je suis au bord de l’épuisement. Je repousse mes limites et je tiens autant grâce à ma résilience que grâce à Amos, toujours sobre et étonnement bien plus solide que moi. Peut-être est-ce le résultat de son expérience militaire, mais il agit sans se laisser envahir par la peur quand, de mon côté, elle me parasite.

Tous les yeux sont tournés vers l’extérieur du casino. Ce sont les effectifs postés aux entrées et sorties qui ont le plus gonflé sans que ceux de l’intérieur n’ait à en souffrir pour autant. Pour l’instant, je suis encore capable de faire preuve de discernement. C’est pour ça que, lorsque mon regard croise celui de Spencer alors que je suis occupée à distribuer des ordres et à inspecter la marchandise, mon sang se glace dans mes veines.

Avant qu’elle ne pénètre dans la pièce, j’étais occupée à briefer les différents dealers présents dans les sous-sols de l’Octopus quant aux signes auxquels je voulais qu’ils restent attentifs. Toute présence de la Ruche sur mon territoire - celui du Club - doit-être perçue comme une menace, encore plus qu’habituellement. Les têtes connues du gang rival sont passées en revue, et Lou et Mitchell - on est jamais trop prudent - deviennent les ennemis numéro un. Je sensibilise les troupes sur les différents signes ou situations qui doivent à partir d’aujourd’hui systématiquement m’être rapportées. Autour de moi chacun écoute et s’affaire ensuite à recomposer son stock. Chaque sachet de poudre est pesé, chaque pilule comptée sous mes yeux avant que les pourvoyeurs de bonheur synthétique ne quittent un à un la salle des stocks avec assez de marchandise pour quarante huit heures - jamais plus, en cas d’arrestation. A voix basse, j’échange avec Carly. La raison de cet aparté : deux dealeurs que je sens fébriles et inquiets et qu’il convient de surveiller. Elle me rapporte le récit d’une agression, l’un de ses oisillons secouée et brutalisée par l’un des mes hommes, et je lui promets que je prendrai les mesures adéquates.

Plusieurs membres du Club sont encore dans la pièce quand mon regard croise celui de ma demi-soeur, et je suis toujours en plein échange avec l’ancienne escort. Alors que Carly, sans réaliser la présence de l’intruse dans la pièce, continue à me parler, je pose une main sur son épaule pour l’inviter à se taire. Je ne la regarde plus. Mon regard est dardé sur la blonde qui semble regretter son intrusion mais qui reste la, paralysée. Carly l’observe, me jette un coup d'œil, et attend mes instructions. A voix basse mais d’un ton ferme, je lui demande de sortir et d’emporter avec elle les derniers dealeurs présents dans la salle des stocks. Autoritaire malgré son jeune âge, le petit oiseau sait se faire écouter. Personne ne conteste son autorité et, quand bien même en auraient-ils eu l’envie qu’un regard dans ma direction aurait suffit à les convaincre de se faire petit. La jeune femme ferme la porte derrière elle, me laissant seule avec Spencer à qui ne n’ai pas encore adressé le moindre mot. Le visage fermé et neutre, je croise mes mains devant moi et toise la jeune femme. Je m’adresse à elle d’un ton égal et dépourvu d’émotions. Sans passer par quatre chemins, je lui demande ce qu’elle fait là, et comment elle est arrivée jusqu’ici.

rp écrit dans le cadre des défis du NaNoWriMo 2022, avec les dialogues au style indirect.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

Quand Spencer bosse, elle évite les conneries. Du moins en théorie. Ca la tient assez occupée pour éviter de penser à tous les mauvais choix qu’elle pourrait prendre, et elle fait ce qu’elle peut pour toujours être à proximité d’un collègue histoire d’avoir quelqu’un qui la surveille sans même en être conscient. Et ça fonctionne pas trop mal jusque là, depuis sa reprise de poste elle est pleine de bonne volonté, ne rechigne pas à la tâche et se permet de rouler des yeux uniquement lorsqu’on ne peut pas la voir. C’est même à peine si elle compte ses heures, parce que plus de temps passé ici, ça veut aussi dire moins de possibilités de tout foutre en l’air quand elle est seule avec ses pensées. Alors elle est là, souvent, peut-être trop mais tant pis. Au moins on ne pourra pas lui reprocher de tirer au flanc ou de continuer de profiter du nom qu’elle partage avec la proprio des lieux.
Rien d’incroyable ou d’anormal aujourd’hui jusqu’à ce qu’elle l’aperçoit, un grand brun aux épaules larges, l’air pas tranquille et qui ne dénote pas particulièrement dans le paysage. C’est à peine si elle lui a prêté attention dans un premier temps, ce n’est pas rare de croiser des gens nerveux ici, ceux qui ont des choses à cacher souvent; des maris addicts aux jeux d’argent et qui viennent flamber les économies du ménage ici, ce genre de choses. Mais cette fois ce n’est pas ça. Ce type, là, elle le connaît. Elle l’a déjà vu plus d’une fois à l’époque où elle trouvait sa came dans certains quartiers, et il n’était pas là pour consommer ou acheter quoi que ce soit, non. Non, lui, il était là pour vendre. Son regard croise brièvement celui de Spence qui détourne les yeux en attendant qu’il l’interpelle, mais rien. Pas un mot, pas un geste. Sans doute qu’il ne l’a pas reconnue, qu’il a oublié son visage parce qu’au final, il croise tellement de camés désespérés qu’il finit par les confondre. Une âme égarée ou une autre, ça ne change pas grand-chose pour un type comme lui. La question maintenant, c’est de savoir ce qu’il fout là. Clairement il n’est pas assez con pour venir faire une livraison dans un endroit pareil, et il ne doit pas être assez riche pour se permettre de venir griller ses thunes ici. Il a l’air de connaître les lieux, ne semble pas chercher son chemin ou avoir l’intention de jouer ou boire un verre et se dirige d’un pas sûr vers un accès en théorie inaccessible à la plupart des employés, tout ça pour la franchir sans aucune difficulté. Il se fait même tenir la porte par le vigile qui reprend ensuite son poste sans même battre des cils. Trop obnubilée par ce qu’elle vient de voir, c’est à peine si la jeune femme entend son collègue lui parler. Ce n’est que lorsqu’il lui touche le bras qu’elle revient parmi les vivants dans un sursaut, offrant un sourire d’excuse nerveux au concerné. Dernier regard curieux vers la porte et elle reprend son shift comme si de rien n’était. Enfin presque. Régulièrement, elle surveille l’accès pour essayer de déterminer si l’autre compte en sortir un jour. Elle ne sait même pas ce qui se cache là derrière. Quand elle a posé la question, on lui a parlé de stockages et sur le moment, elle n’a pas cherché plus loin. Peut-être des cuvées spéciales pour des gros clients ou qu’importe.
Elle ne tient plus et, contre tout bon sens, décide que c’est une bonne idée d’aller voir. Elle le regrettera sûrement plus tard, mais elle a besoin de savoir ce qu’un type comme lui vient foutre ici, tant pis si elle se fait tirer les oreilles pour s’être rendue dans un endroit limité d’accès. Promis, elle ne cassera rien et personne ne s’en rendra compte. Elle feint une envie pressante auprès des collègues, et le plus naturellement du monde, s’approche de la porte pour voir le vigile se tendre prêt à l’intercepter. “Ma soeur m’a demandé de descendre”, qu’elle ment dans un souffle, tentant le genre de bluff finira par lui retomber dessus, c’est sûr. Le grand dadais semble hésiter, puis devant l’air convaincu et convaincant de la petite blonde, la laisse finalement passer. Plus qu’à espérer qu’il n’y ait pas de secrets d’états là-dessous, sans quoi il risque d’avoir des problèmes aussi.
Trop tard maintenant, la voilà qui suit les couloirs jusqu’à entendre des voix peu distinctes, mais il lui semble reconnaître celle de Raelyn.
Spencer se rapproche, s’attend à beaucoup de choses mais pas à ça. C’est surréaliste, digne d’un de ces films que Mac aime tant, complètement inattendu et pourtant même pas tant que ça. Il y avait des signes depuis le début, des détails qui auraient dû lui sauter aux yeux ou au moins éveiller ses soupçons. En tout cas si elle en a eu, elle s’est bien gardée de les exprimer, ça l’arrangeait bien de ne pas savoir, tant pis si sa curiosité était titillée en permanence. Elle n’était pas supposée voir ça, jamais, et ça se confirme lorsque le regard de Raelyn croise le sien. Et cette fois, impossible de le détourner ou de courir en sens inverse en espérant échapper aux conséquences. Spencer se fige, parfaitement consciente qu’elle n’a rien à faire ici, parfaitement au courant que ça va changer pas mal de choses. L’aînée souffle quelque chose à cette fille que Spence a croisée à plusieurs reprises là-haut, et elle embarque tous les autres types avec elle. Personne ne dit plus rien, la blonde se garde bien de commenter quoi que ce soit et lorsque la porte se referme, elle se retrouve seule face à une Raelyn qui a l’air tout sauf ravie, en témoigne la façon dont elle adresse ses questions. Les yeux de la jeune femme balayent un instant la salle alors que tout son corps est tendu au point de ne plus savoir bouger, puis finalement son attention retourne sur sa bienfaitrice. « J’ai vu Aaron descendre. » ou qu’importe son vrai nom, au dealeur. « C’était- J’voulais savoir ce qu’il venait foutre ici alors j’ai- Je l’ai suivi. » Belle erreur, belle erreur. « C’est quoi tout ça ? » Comme si c’était sa place de poser des questions.
C’était trop beau tout ça.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

Il existe peut-être un millier de raisons qui m’ont poussée à ne pas dire la vérité sur mes activités professionnelles à ma soeur, la première étant que je ne suis pas le genre d’idiote qui mettrait en péril la pérennité de l’organisation criminelle parce que mon coeur me dicte que c’est la chose à faire. Il ne le fait pas d’ailleurs, je ne suis pas non plus facile à attendrir. Au-delà de toutes les raisons qui existent déjà pour quiconque - l’existence du Club doit rester un secret pour ne pas le mettre en péril, ou risque que chacun d’entre nous se retrouve derrière les barreaux - Spencer est une addict et, par conséquent, elle est imprévisible. Pour l’instant, elle est sevrée mais qui peut se porter garant pour elle et affirmer qu’elle ne replongera jamais ? Personne, je ne m’y risquerais pas moi-même. Et si un jour, pour un gramme de poudre, elle nous vendait ? Elle signerait l’arrêt de mort de l’organisation, le mien, celui de mon amant et époux et celui de chaque personne qui irait pourrir en prison loin des siens. Mon bébé, ma petite fille se retrouverait seule et rien au monde ne me révulse plus que l’idée de ne plus pouvoir la protéger. Un autre gang prendrait ma place, une autre figure forte des bas-fonds de la ville et la roue ne serait pas brisée pour autant. Je ne connais pas non plus ma demi-sœur, certainement pas assez pour lui faire confiance avec ce genre de secret qui vaut littéralement des millions et ma vie toute entière. Alors oui, j’ai également voulu la tenir éloignée de tout ça pour sa propre sécurité - et sa sobriété - mais c’est loin d’être la seule et unique raison. Je n’agis jamais par bonté d’âme et pu magnanimité. Je m'illustre par bien des qualités, mais pas ces dernières.

Si je me transforme en pierre lorsque mon regard croise celui de la blonde, ce n’est que de courte durée. Savoir garder son sang-froid et une capacité qu’il convient de développer et de cultiver lorsqu’on est à ma place, et j’ai fait mes preuves à ce niveau-là à bien des reprises. Plutôt que de laisser mes sentiments me tétaniser, j’agis avec froideur et efficacité. En une poignée de mots adressés à mon petit oiseau, je fais vider la pièce. Même Callum n'agit pas comme une ombre, la mienne, dans ces souterrains. Ici, je suis la reine. Ici, je ne suis normalement entourée que de personnes de confiance et le garde du corps attend devant la porte. « J’ai vu Aaron descendre. » - « Je ne t’ai pas demandé ce que tu avais vu, mais ce que tu fous ici. » J’ignore duquel de mes hommes elle parle, certainement un dealeur, l’une de ses anciennes fréquentations. Elle aurait aperçu le pape ou le roi d’Angleterre en question que je n’en aurais rien eu à faire pour autant. Les règles sont claires. Elle a fouiné. Elle a trahi la confiance que je lui accorde, celle que Amos lui accorde, en descendant au sous-sol, un endroit hors limite. La porte est toujours gardée par un agent de sécurité. Où était-il ? Comment a-t-elle parvenu à le convaincre de la laisser descendre ? En prononçant mon nom, celui que nous partageons sans que cela ne soit plus réellement un secret ? « C’était- J’voulais savoir ce qu’il venait foutre ici alors j’ai- Je l’ai suivi. » Croit-elle que je suis idiote ? Que je ne sais pas qu’elle a dû mentir à l’agent censé garder la porte et interdire l’entrée à quiconque n’étant pas accrédité ? Elle ne l’est pas. Calme, en apparence peu impressionnable et perturbable, je crois mes mains dans mon dos. « Il y a un agent de sécurité posté là-haut. Comment tu es passée ? » Un agent de sécurité qui perdra son travail dans l’heure puisque je ne tolère pas les erreurs susceptibles de tous nous mettre en danger.

« C’est quoi tout ça ? » Je jette un coup d'œil derrière moi, comme si j’en avais besoin pour savoir de quoi elle parle. Le menton droit, un port de tête altier, je ne cille ni ne fais preuve de la moindre émotion. « Ce qui met un toit au-dessus de ma tête et celle de ma fille. » Je ne parle pas de Micah par hasard, mais pour qu’elle prenne conscience des conséquences qu’aurait une trahison. « Et la tienne, accessoirement. » Et qui paye ses dettes et sa cure de désintoxication, aussi. « Tu n’aurais pas dû descendre. » Pas parce qu’elle doit craindre une punition, mais parce qu’elle était bien plus en sécurité lorsqu’elle ne soupçonnait rien. Je me souviens de cette fois où elle a eu le droit à une version édulcorée de mon passé. Celle qui disait que je suis sortie avec un homme loin d’être fréquentable qui m’a présenté à des gens qui le sont tout autant, mais que je n’ai jamais rien fait d’autre que de vivre dans un appartement leur appartenant. Se doute-t-elle à présent qu’il y a bien plus à dire sur mon passé et mon présent que ça ? Que je ne suis pas l’innocente mère de famille et riche femme d’affaires que j’ai cherché à lui faire croire que j’étais ?

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

Et la voilà, la mauvaise décision de trop. Celle qui pourrait tout changer et pas dans le bon sens du terme. Elle le sait à l’instant où elle passe la porte et qu’elle décide de se lancer sur les traces du dealeur. Elle en a la confirmation à l’instant où elle entend ces voix et est témoin de la scène. Le regard à moitié perdu de la coupable qui accroche celui de sa demi-soeur. Et juste comme ça, il est déjà trop tard pour faire marche arrière et prétendre n’avoir rien vu. Tous les autres témoins sont congédiés et s’exécutent dans un ballet silencieux, et bientôt il ne reste plus que les deux Blackwell. Spencer a beau être debout face à l’autre, elle est loin d’être celle qui a l’ascendant et elles le savent toutes les deux. La jeune femme n’a aucune idée d’où se foutre et est loin de se douter de la gravité de la situation. Qu’est-ce qu’elle fout là alors qu’elle devrait être en haut, loin de tout ça et de ce monde qu’elle n’a au final fait qu’effleurer pendant des années ? Elle essaie d’expliquer, s’embourbe dans ses justifications sans pour autant répondre clairement. «  Je ne t’ai pas demandé ce que tu avais vu, mais ce que tu fous ici. Il y a un agent de sécurité posté là-haut. Comment tu es passée ? » Les lèvres pincées, la blonde jette un oeil vers l’endroit où tous les autres se sont éclipsés puis revient vers Raelyn et son air glacial. « Il m’a laissée entrer, faut croire qu’il a pas eu le mémo. » Celui qui disait que malgré son nom, elle n’avait qu’un accès limité au casino et qu’elle n’avait rien à faire de ce côté-là du miroir. Le pire c’est que si elle avait été rembarrée par le vigile, elle n’aurait peut-être pas insisté. Pas aujourd’hui, en tout cas. Peut-être que dans une autre configuration, elle serait tombée nez à nez avec quelqu’un qui n’aurait pas pris la peine de discuter avec elle. L’idée lui traverse brièvement l’esprit et lui glace le sang.

Ca ne l’empêche pas de questionner maladroitement la propriétaire des lieux, quand bien même ce n’est ni le moment, ni sa place de le faire. « Ce qui met un toit au-dessus de ma tête et celle de ma fille. Et la tienne, accessoirement. » Au final, elle ne peut même pas dire qu’elle est surprise, Spencer. Depuis tout ce temps, il y avait tellement de points d’ombres que c’est même étonnant qu’elle n’ait jamais rien vu avant. Le numéro du dealeur, Otto, la mise en garde sur les produits estampillés de la petite abeille, toutes ces petites choses mises bout à bout que ça aurait dû lui mettre la puce à l’oreille depuis bien longtemps. Seulement voilà, si ça titillait sa curiosité, ça l’arrangeait bien de ne pas connaître les détails. Ce genre de secret, c’est lourd à porter et tout le monde sait que les gens comme Spencer ne sont pas les plus fiables. Preuve en est qu’il suffit de quelques secondes de silence pour que son regard dérive vers un sachet laissé là et qu’elle s’imagine déjà essayer de l’embarquer sans qu’on ne la voit faire. Elle n’en a pas besoin mais elle pourrait, au cas où. Au cas où. Elle s’en veut déjà d’avoir ce genre de pensées, mais c’est plus fort qu’elle. « Tu n’aurais pas dû descendre. » ça sonne comme un rappel à l’ordre et c’est suffisant pour récupérer son attention. L’intruse enfouit ses mains au fond de ses poches et serre les poings, ça évitera de les laisser se balader à la première opportunité. « Sans déconner. » Qu’elle lâche dans un souffle sans même réfléchir. C’est même pas tant de l’insolence volontaire, c’est simplement là le seul moyen qu’elle ait trouvé pour extérioriser le trop plein d’émotions qui la traversent à cet instant précis. Ca fait vraiment beaucoup à procéder d’un coup, là. Depuis un an, Spencer s’est imaginé tout un tas de trucs sur Raelyn et sa fulgurante ascension. Comment on passe de rat des rues complètement dépendant à la coke à femme d’affaire propriétaire d’un foutu casino de luxe ? Elle est habituée à côtoyer des petites frappes qui se prennent pour des grands gangsters plus importants qu’ils ne le sont vraiment, le genre de type qui profite sans l’ombre d’un remord des plus faibles qui ont eu le malheur de tomber dans le cercle vicieux de la drogue et des addictions engendrées, mais là, là ça a l’air plus gros, beaucoup plus gros. Comme quoi le dicton qui dit que le crime ne paie pas, c’est une belle connerie, la preuve que si. Sauf que voilà, c’est peut-être bien le moment critique qui fait que Spencer n’en profitera plus. Elle est entrée sur un territoire interdit, s’est foutue dans une situation qui la dépasse complètement et de laquelle elle ne peut plus s’extirper parce que la scène dont elle a été témoin, ce n’est pas le genre qu’on peut effacer de sa mémoire et faire comme si de rien n’était. « C’est- » Merde, la voilà qui ne sait plus quoi dire, ses pensées partent dans tous les sens et elle est bien incapable d’organiser le bordel dans son cerveau pour justifier sa présence ici. « Ce type, là, Aaron, j’ai déjà eu à faire à lui avant et je- » Un pas après l’autre, c’est mieux que rien. « J’sais pas, j’l’ai vu arriver là et faire comme chez lui, j’étais supposée faire quoi, pas me poser de questions ou m’inquiéter de voir un type comme lui débarquer ici ? » La réponse, elle la connaît déjà. Raelyn va lui dire que oui, que ce n’était pas ses affaires et qu’elle aurait dû continuer à fermer les yeux et à ignorer tous les événements un peu louches dont elle pouvait être témoin. « Remarque, ça explique beaucoup de choses. Entre lui et Otto ça commençait à faire beaucoup. » Il est où lui d’ailleurs ? Non pas qu’il lui manque, mais son absence récente n’est pas tout à fait passée inaperçue auprès de la jeune femme. Elle détestait le savoir dans les parages et encore plus le croiser, quand bien même ça n’arrivait qu’en de rares occasions, c’était déjà beaucoup. Mais elle ne disait rien, gardait ses états d’âme pour elle et restait le plus loin possible de lui. C’était pas le top, mais ça marchait. La vraie question désormais, c’est de savoir où ça les mène. Où ça laisse Spencer maintenant qu’elle a eu un aperçu de l’envers du décor. « Alors hm... Il se passe quoi maintenant ? » Raelyn l'a aidée à s'en sortir, elle peut tout aussi bien la renvoyer dans son bourbier d'un claquement de doigts si ça lui chante.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

« Il m’a laissée entrer, faut croire qu’il a pas eu le mémo. » - « Il va le recevoir cette fois. » Il ne va pas garder son travail, mais j’imagine que je n’ai pas besoin d’être plus claire pour que la blonde ne comprenne que je n’ai pas l’intention d’inscrire l’agent de sécurité en question - je verrai bien duquel il s’agit en remontant et, s’il a compris son erreur et a quitté son poste pour brouiller les pistes, sur les caméras de vidéo surveillance - à un séminaire pour le sensibiliser à la sécurité et à la confidentialité au travail. Je ne le dis pas à la blonde pour l’impressionner ou lui faire peur, simplement parce qu’il est à mon sens important qu’elle comprenne que, dans mon monde, les actes ont des conséquences et qu’elle ne peut pas vivre dans le mépris des règles, comme elle le fait la majorité du temps.  

Je vois qu’elle est mal à l’aise. Je sens qu’elle regrette même peut-être ce qu’elle définit certainement comme l’une des plus grosses conneries de sa vie. Mais ce qui transpire surtout, c’est une forme de crainte ou en tout cas de méfiance. Se demande-t-elle qui je suis ? Si elle s’est trompée sur toute la ligne, me concernant ? En vient-elle à penser qu’elle n’aurait jamais dû me faire confiance aveuglément ? Que moi et mes activités professionnelles - dont elle ne doit à l’heure actuelle que deviner les détails - nous sommes un danger pour sa sécurité ? Elle aurait certainement raison. Si j’ai tenu à la garder éloignée du Club, c’est parce que c’est également ce que je pense. Je n’ai pas la moindre intention de m’en prendre à elle, mais certaines personnes voulant me nuire pourraient développer ce genre de dessein, s’ils apprenaient son existence. Je ne suis pas obsédée par l’idée de la protéger comme c’est le cas pour mon bébé, mais j’apprécie assez la gamine pour ne pas lui souhaiter de “rencontrer” un peu trop brutalement l’univers dans lequel j’évolue. Alors elle peut s’armer d’ironie autant qu’elle le veut, je suis assez lucide pour reconnaître une tentative de noyer le poisson et de garder son anxiété sous contrôle. Je repère aussi les coups d'œil déjà trop fréquents et appuyés qu’elle jette en direction de la marchandise, certainement tentée de céder, puisqu’elle doit ressentir les effets du manque comme rarement elle les a ressenti, en présence de ce poison.

« C’est… Ce type, là, Aaron, j’ai déjà eu à faire à lui avant et je… » Je ne sais toujours pas duquel de mes hommes elle parle, et ça n’a toujours pas la moindre importance puisque j’ai deviné qu’il s’agit d’un dealer. Seul un vendeur de mort peut l’avoir poussée à l’investigation. « J’sais pas, j’l’ai vu arriver là et faire comme chez lui, j’étais supposée faire quoi, pas me poser de questions ou m’inquiéter de voir un type comme lui débarquer ici ? » - « C’est exactement ce que t’étais supposée faire. » Pour qui s’est-elle prise ? Pour une justicière ? Pour celle qui sauverait le casino d’une infraction ? Je ne tolérerais pas qu’elle me prenne pour une idiote : l’homme - contrairement à elle - a passé tous les contrôles de sécurité sans qu’aucun agent ne l’arrête. C’est elle qui n’a rien à faire au sous-sol. « Remarque, ça explique beaucoup de choses. Entre lui et Otto ça commençait à faire beaucoup. » - « Tu es trop curieuse Spencer. » Bien trop pour sa propre sécurité. « Ici, il faut que tu te contentes des réponses que je te donne. » Parce que je fais les lois, pas elle, pas l’état Australien non plus, dans ma conception des choses. « Alors hm... Il se passe quoi maintenant ? » Je penche la tête sur le côté, cherchant à comprendre ce qu’elle craint, ce qu’elle croît qu’il va se passer. Dans son esprit, a-t-elle déjà écrit un scénario digne d’un film de gangsters hollywoodien ? S’imagine-t-elle que Callum - qui attend de l’autre côté de la porte - va lui briser la nuque et que nous nous débarrasserons ensuite de son corps dans la Brisbane River ? « Maintenant, on va monter. Parce que t’as rien à faire ici. » Et pas parce que le contact avec la marchandise doit être compliqué pour elle - je me moque bien de ce qu’elle ressent, sur l’instant, mais parce que les sous-sol cachent encore une multitude de choses qui lui sont et doivent lui rester innaccessibles. Aussi lentement qu’un prédateur s’approcherait de sa proie, je m’avance vers elle et glisse une main sur son épaule, moins pour la réconforter que pour la guider, lui imposer de se mettre en marche et de le faire dès à présent. Derrière la porte, je croise Callum qui, sans un mot, comprend la situation et nous emboite le pas, un mètre seulement derrière nous.  

Je guide ma demi-soeur jusqu’aux bureaux situés au premier étage et, là, je la pousse à s’asseoir d’une pression de ma main sur son épaule. Sans un mot, je fais le tour du bureau en chaîne et, plutôt que de m’asseoir sur ma chaise, je reste face à la vitre sans teint qui nous permet à Amos et moi d’observer l’intérieur de l’établissement depuis notre perchoir. Au terme de quelques secondes de silence, je finis par croiser les bras sous ma poitrine et tourner ma tête dans la direction de la blonde. « Otto travaille pour moi, tu as posé une question, et je n’ai pas menti. » Je l’ai certainement fait pas omission, puisque je savais qu’elle penserait qu’il était question de l’Octopus, et je ne l’ai pas guidée dans la bonne voie. « Tu as tiré les conclusions que tu voulais tirer. » Je pousse un soupir, et je pivote finalement complètement vers elle, m’appuyant contre la vitre. « Tout ce qu’il se passe là-dessous, c’est à moi, ça m’appartient. » Autrement dit, je ne suis pas l’un des rouages d’un mécanisme qui m’englobe et me dévore. Je règne sur ce petit monde. « C’est cliché mais c’est vrai : moins tu en sais, mieux tu te porteras, crois-moi. » Ce n’est même pas une menace, c’est un avertissement, parce que je possède des ennemis aussi peu regardants des lois que je ne le suis également. « Qu’est ce que ça change pour toi, ce qui se passe vraiment ici ? » Va-t-elle flancher ? « Qu’est ce que tu vas faire de cette information ? » Représente-t-elle un risque pour moi, mon organisation et, surtout, ma famille ?

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« Il va le recevoir cette fois. » Inutile d’être un génie pour savoir qu’il va se faire passer un savon, peut-être même pire que ça. Sur le moment, Spencer ne s’empêcher de penser qu’elle n’irait pas jusqu’à le virer et puis finalement, l’idée ne paraît pas si grotesque que ça en vue de ce qui se cachait derrière cette foutue porte interdite. Et encore, c’est sans doute là le meilleur scénario pour le type, qui sait jusqu’où ça peut aller pour une erreur pareille. Et la voilà qui se rend compte que déjà, elle recommence à se faire des films alors que c’est justement le genre de chose qu’elle est supposée éviter.

Sa ligne de défense, bien que véridique et surtout sincère, est sûrement loin d’être suffisante aux yeux de la patronne des lieux. Raelyn n’a nullement l’air convaincue et ne manque pas de lui faire remarquer. « C’est exactement ce que t’étais supposée faire. » Faire l’autruche, fermer les yeux sur les évidences, elle est pourtant douée pour ça, Spencer.
« Tu es trop curieuse Spencer. Ici, il faut que tu te contentes des réponses que je te donne. » Elle le sait déjà, tout ça. Le problème étant qu’elle fonctionne pareil qu’un enfant, la blonde. Si on lui interdit quelque chose sans lui dire pourquoi et qu’en prime on lui agite sous le nez, arrivera forcément un moment où elle va céder et contourner l’obstacle. Par pur esprit de contradiction, par envie de savoir, par besoin de ne pas être laissée dans le noir. Quand elle demande ce qui va se passer par la suite, elle ne s’attend pas spécialement à se faire menacer ou à se voir disparaître dans l’outback. Sa plus grosse crainte sur le moment, c’est surtout de se retrouver désavouée et de repartir à la case départ après avoir enfin goûté au genre de vie qui semble à peu près lui convenir. Et même si elle est préparée à ce genre de situation, elle n’est pas certaine de réussir à l’encaisser encore une fois. Malhreuseusement pour elle, la jeune femme a bien du mal à formuler des pensées cohérentes tant son esprit est obnubilé par la présence des substances dans son champs de vision. Si elle fait de gros efforts pour ne pas fixer les sachets de bonheur artificiel, elle a bien du mal à se concentrer sur un point fixe. « Maintenant, on va monter. Parce que t’as rien à faire ici. » Sortir d’ici apparaît presque comme une délivrance, et si ce n’est sûrement pas la raison première du changement de lieu, c’est au moins aussi salvateur. Sans un mot, elle se laisse guider, le regard bas et les poings fermement enfoncés dans le fin fond de ses poches pour éviter tout geste qui pourrait être mal perçu.

La mâchoire serrée au point d’être douloureuse, elle s’assoit sans un mot et fixe obstinément ses chaussures alors que Raelyn bouge dans le bureau. Un peu malgré elle, sa jambe se met à bouger d’elle-même, signe évident de son stress qui continue à monter en flèche. « Otto travaille pour moi, tu as posé une question, et je n’ai pas menti. » Le mensonge par omission, elle connaît bien ça aussi, Spencer. Et vu ce qu’il y avait à garder secret, elle ne peut pas tellement s’étonner que Raelyn s’en soit servi. « Tu as tiré les conclusions que tu voulais tirer. » « Ça aurait dû me sauter aux yeux avant, il avait pas tellement la dégaine d’un prestataire pour le casino. » Tout comme elle n’avait pas tellement la dégaine d’une serveuse d’établissement de luxe avant d’être prise en charge. « Tout ce qu’il se passe là-dessous, c’est à moi, ça m’appartient. » Ainsi donc ça se confirme, elle n’est pas un simple rouage dans la machine, elle est la clé qui fait tourner le tout. « C’est cliché mais c’est vrai : moins tu en sais, mieux tu te porteras, crois-moi. » Spencer souffle un rire amer. Cette chanson-là, elle ne la connaît que trop bien. C’est ce qu’elle se répète en boucle pour justifier les secrets qu’elle se garde bien de partager avec sa partenaire et celui-là ne fera que s’ajouter à la pile déjà bien trop importante des choses qu’elle ne lui dira jamais. Elle s’en veut d’avance mais tant pis, c’est pour son bien. Alors sur ce point, elle ne peut pas vraiment contredire Raelyn. D’un côté elle a envie d’en savoir plus, surtout maintenant qu’elle a eu un bref aperçu de ce qui se passe sous la surface. De l’autre, elle sait qu’elle n’a pas besoin de s’ajouter une telle charge supplémentaire. « Qu’est ce que ça change pour toi, ce qui se passe vraiment ici ? » « Je- J’en sais rien. » Concrètement, peut-être à part le regard nouveau que ça lui apporte sur sa bonne samaritaine, ça ne change pas grand-chose. Ce milieu, elle l’a fréquenté en étant au plus bas de la pyramide, elle sait plus ou moins comment ça fonctionne et ce que ça implique. « Je pense pas vraiment être la mieux placée pour dire quoi que ce soit à ce sujet. » Parce que cette entreprise planquée dans les sous-sols d’un casino est pourtant bien présente à la surface. Ca fait des années que Spencer en profite, la seule chose qui a changé depuis, c’est la façon dont elle le fait. Elle est passée de la clientèle cible à celle qui profite malgré elle de l’argent généré par tout ça. Tout n’est qu’une question de perspective, au final. « Et pour le reste… Je compte pas essayer d’aller dévaliser les stocks, si c’est ça qui t’inquiète. » Dans l’immédiat elle en est sûre, en tout cas. Elle préfère ne pas songer à la possibilité de replonger tout en sachant qu’il y a tout ça en bas, juste à portée de main. « Qu’est ce que tu vas faire de cette information ? » « Qu’est-ce que tu veux que j’en fasse ? » Le moment est particulièrement mal choisi pour jouer la carte du cynisme. « J’vais quand même pas aller voir les flics pour leur raconter ou en parler au premier venu, si ? » La question est purement rhétorique bien évidemment, la réponse est toute trouvée dans l’esprit de la jeune femme. Si elle va sûrement avoir besoin de temps pour procéder sa découverte impromptue, elle sait très bien que l’ouvrir est tout sauf envisageable. Il y a un an encore, peut-être qu’elle aurait tenté de négocier, peut-être qu’elle aurait mal terminé mais à ce moment-là elle n’avait rien à perdre et tout à gagner. En encore, elle aurait probablement demandé genre quelques doses en échange de son silence, rien d’extravagant. Aujourd’hui ce n’est plus le cas et elle sait très bien qu’au moindre faux pas, on peut lui reprendre tout ce qu’elle a obtenu en un simple claquement de doigts. « Rien du tout, j’vais rien faire du tout. » La précision est inutile, pourtant la voilà de nouveau en train de tenter de se justifier. « Toi comme moi on sait que j'ai rien à gagner à l'ouvrir. » Certains avec une folie des grandeurs un peu démesurée verraient là une opportunité qu'il faut absolument saisir pour complètement changer de vie. Ce n'est pas Spencer, ça, c'est même tout l'inverse puisqu'on lui a souvent reproché de manquer d'ambition et de trop se laisser porter par les événements. En voilà la preuve encore une fois. « J’ai pas envie de vous créer des problèmes, à toi ou à… tout ça. » Tout ça, le business qu’elle gère ou l’organisation qu’elle préside, au choix. Ou même à sa famille, puisqu’elle n’a pas manqué de lui rappeler qu’il s’agit là de son gagne-pain. Du vrai.
Spencer lâche un soupir et s’enfonce dans le fauteuil, se masse l’arête du nez avant de reprendre. « J’comprends. Pourquoi t’as pas voulu et tu veux pas m’en parler, j’comprends. » Elle pose une main sur sa jambe pour tenter de se calmer un peu et empêcher les mouvements frénétiques qui n’ont pas cessés depuis qu’elle s’est assise. « J’me ferai pas confiance non plus pour un truc aussi gros. » Pour plein de raisons évidentes qu’il est inutile d’énumérer encore une fois. « Mais j’te jure que j’ai pas l’intention d’aller en parler à qui que ce soit. » De toute façon, c’est pas tellement le genre de sujet qu’on aborde au détour d’une conversation.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

« Ça aurait dû me sauter aux yeux avant, il avait pas tellement la dégaine d’un prestataire pour le casino. » Dans d’autres circonstances, je me serais certainement tout autant amusée de la situation que la gamine, mais je suis mortellement sérieuse. Il est question d’affaires, il est question de sécurité et même d’anonymat : autant de choses sur lesquelles, malgré mon statut de leader de l’organisation, je rends des comptes à une organisation autrement plus grande que le Club. Les dirigeants de l’Honoured Society me considèrent comme une partenaire indépendante, mais il va sans dire que le vent tournerait si le Club venait à trop attirer l’attention sur sa maison mère ou si les profits venaient à baisser si drastiquement que je serai incapable de verser des dividences conséquents. L’appartenance à quelque chose d’à double tranchant. Ils peuvent autant tirer le gang d’une situation périlleuse que nous enfoncer la tête dans le sable, si toutefois ils venaient à décider que nous sommes devenus des poids morts. Après mon “coup d’état”, j’ai réussi à convaincre les grosses têtes de l’organisation criminelle que je pouvais éviter une guerre civile au Club et que j’étais également la meilleure personne pour tenir les rênes. J’ai dû être convaincante, puisqu’ils n’ont pas décidé de verser dans l'ingérence de mes affaires. Depuis, à part quelques occasionnelles réunions avec les dirigeants de la mafia australienne, je n’ai eu que très peu de rapports avec eux. En tant que femme, j’ai eu du mal à gagner leur confiance, mais je crois pouvoir affirmer que je l’ai fait.

Alors je ne laisserais personne gâcher ça ou mettre en péril ma position. Et c’est assez pour que je n’esquisse pas le moindre sourire face à la plaisanterie de la blonde, me contentant de détourner mon regard et de le garder fixé sur la vitre donnant sur la salle plutôt que sur elle. ”Je suis on ne peut plus sérieuse”, voilà ce que mon attitude distante clame. « Je- J’en sais rien. Je pense pas vraiment être la mieux placée pour dire quoi que ce soit à ce sujet. » - « Pourtant, je te demande. Pas de m’adresser des reproches, pas de me faire la morale, mais de me partager le fond de ta pensée. » Parce qu’il sera bien plus instructif que des promesses en l’air, celles de ne rien dire. Parce que sa réaction à chaud me permettra de juger si elle est digne de confiance ou si je dois trouver une solution. « Et pour le reste… Je compte pas essayer d’aller dévaliser les stocks, si c’est ça qui t’inquiète. » - « Je me fous des stocks. » Ce n’est pas exactement vrai, mais disons que, dans le cas présent, c’est bien là la dernière de mes préoccupations. « Pour ta sobriété, je préfèrerais que tu ne le fasse pas. Mais au-delà de ça, je m’en moque. » Ne suis-je pas généreuse et magnanime avec ceux qui, parmi mes employés, consomment des drogues dures ? J’autorise ce genre d’incartade, tant que le travail est bien fait et que les quantités ne sont pas trop conséquentes.

« Qu’est-ce que tu veux que j’en fasse ? » Ce qu’elle aurait dû demander, c’est plutôt ce que je lui interdit d’en faire. Mais je crois qu’elle n’est pas idiote et qu’elle n’ignore pas la réponse à cette question. « J’vais quand même pas aller voir les flics pour leur raconter ou en parler au premier venu, si ? » - « Ce genre d’humour, tu ferais mieux de t’en abstenir. » Sur l’heure, en tout cas. Et tant que mon regard sur elle et mon attention à tout ce qui va passer la barrière de ses lèvres est une mise à l’épreuve. « Rien du tout, j’vais rien faire du tout. » Je l’observe avec froideur, tentant de jauger son authenticité. « Toi comme moi on sait que j'ai rien à gagner à l'ouvrir. » Alors c’est de ça qu’il est question, de ce qu’elle a à gagner ou pas ? « J’ai pas envie de vous créer des problèmes, à toi ou à… tout ça. » - « Et si tu avais quelque chose à gagner, est-ce que ça changerait quelque chose ? » Impassible, je m’arrache à la contemplation de la salle pour pivoter mon buste dans sa direction. Je fais un pas vers elle, et je m’assied sur le rebord du bureau. « Si on te payait grassement pour ces informations ? Si on te proposait un deal ? » Bien sûr, personne de sain d’esprit ne me répondrait que, dans ce cas, il serait prêt à reconsidérer la chose. Mais je me targue d’être assez bonne lectrice, lorsque le livre en question est un être humain. Je connais l’odeur de la peur, celle de la trahison et celle du mensonge. Ce n’est pas sa réponse qui m’intéresse, mais le ton qu’elle emprunte, la sueur qui perlera ou non sur son front et ses hésitations. « Ici, personne ne signe de son sang. » Je ne demande pas à mes hommes de s'entailler le doigt pour échanger un peu de sang avec moi et nous lier par ce genre de serment archaïque. « Mais si je pouvais me permettre d’avoir des doutes concernant ta loyauté avant, c’est plus le cas. » Plus maintenant qu’elle est descendue au sous-sol. Certainement pas alors qu’en plus de savoir ce qui se trame ici, elle a rencontré mon bébé.

« J’comprends. Pourquoi t’as pas voulu et tu veux pas m’en parler, j’comprends. » L’approche qu’elle choisit me surprend. Elle me place dans une position où elle sous-entend que je pourrais avoir besoin de lui présenter des excuses, et elle m’en dédouane. Sauf que je ressens pas la moindre culpabilité à l’idée de lui avoir menti. « J’me ferai pas confiance non plus pour un truc aussi gros. Mais j’te jure que j’ai pas l’intention d’aller en parler à qui que ce soit. » - « Ramène pas tout à toi Spencer, ça n’avait rien de personnel. » Je pousse un soupir, avant de quitter mon perchoir pour m’installer sur la chaise de bureau, face à la jeune femme. Le regard vague, j’observe à nouveau la salle derrière moi, avant de tourner à nouveau la tête dans ma direction. « Y’a quinze ans. Je sortais avec un type qui trempait dans des affaires pas très légales. L’appartement dans lequel on vivait a été perquisitionné. » Je reprends mot pour mot mes explications de ce début d’année. Celles auxquelles je m’étais limitée. « Cette partie là est vraie. Il est mort lors de cette perquisition, ça aussi ça l’était. » C’est la suite qui constitue un mensonge par omission. « Mais j’ai jamais ignoré dans quoi il trempait. Rapidement, il m’a introduite auprès de ses pairs. » Aaron ne m’a pas tenue à l’écart du Club. Le gang, c’était sa normalité et c’est devenu la mienne. « J’ai commencé en bas de l’échelle. Et j’ai grimpé. » Jusqu’en haut, de toute évidence. Je laisse mes doigts, jusque-là appuyés contre ma tempe, retomber mollement sur le bureau. Je ne la quitte plus des yeux, à présent.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

Un jour elle apprendra à rester à sa place, à faire ce qu’on lui dit et à ne pas chercher la petite bête jusqu’à finir par se faire mordre la main. Un jour elle saura quand détourner les yeux, quand la fermer ou au contraire, quand l’ouvrir. Mais pas aujourd’hui visiblement, pas encore. Y a toujours trop de choses qui la travaillent et qui accaparent son attention, trop de questions laissées sans réponses malgré son besoin de savoir. Alors au bout d’un moment, forcément, la curiosité l’emporte. Le reproche n’est pas nouveau, on le lui a souvent adressé et c’est exactement le genre de chose qui lui a déjà attiré des problèmes par le passé. Quand on lui demande ce qu’elle pense de tout ça, c’est difficile pour elle d’assembler ses idées et de former une vraie réponse cohérente. Mais réellement, comment répondre à cette question ? « Pourtant, je te demande. Pas de m’adresser des reproches, pas de me faire la morale, mais de me partager le fond de ta pensée. » « Je sais pas quoi te dire, Raelyn. Je m’attendais pas vraiment à pousser une porte et à tomber sur ma frangine dans le rôle de Tony Montana. » Qu’elle dit en se massant l’arête du nez, ça promet un sacré mal de tête pour décanter tout ça. « Je- J’me posais des questions depuis un moment parce que tous les p’tits trucs mis bouts à bouts ça faisait beaucoup, mais là c’est- » Elle soupire et secoue la tête. « C’est beaucoup d’un coup. » Est-ce que ça change la vision qu’elle avait de Raelyn ? Oui, très certainement. De quelle façon ? C’est encore difficile à dire dans l’immédiat. « Je me fous des stocks. Pour ta sobriété, je préfèrerais que tu ne le fasse pas. Mais au-delà de ça, je m’en moque. » Au moins, ça a le mérite d’être clair.

« Ce genre d’humour, tu ferais mieux de t’en abstenir. » Pour une fois, elle ne détourne pas le regard, Spencer. Elle maintient celui de son aînée parce que même si la pseudo plaisanterie ironique tombe à l’eau, elle est on ne peut plus sérieuse. Elle ne compte pas en parler, ni aux flics ni à personne d’autre. Les balances finissent rarement bien dans ce milieu, qu’importe qui ils sont et qu’importe leur nom. Alors celui qu’elle partage avec ne la protègera pas si jamais on la soupçonne d’avoir vendu la mèche. « Et si tu avais quelque chose à gagner, est-ce que ça changerait quelque chose ? Si on te payait grassement pour ces informations ? Si on te proposait un deal ? » Encore une fois, ce sont mille pensées d’un coup qui traversent l’esprit de Spencer. Qu’est-ce qui se passera si elle donne la mauvaise réponse, si elle hésite une seconde de trop, ou pire, si elle se retrouve réellement confrontée à ce genre de situation ? Encore une fois, il ne faut pas être un génie pour se douter de ce qu’attend Raelyn ici. Elle ignore quel genre de deal on serait prêt à lui proposer pour des informations aussi sensibles, probablement un gros paquet de fric si ça vient d’un concurrent sur le marché de la vente de médicaments sous le manteau. « Non. » Le ton est assuré, maîtrisé, parce que c’est ce qu’elle est supposée dire, qu’il n’y a pas d’autre réponse possible. En vérité, la vraie question qu’il faudrait lui poser c’est ce qu’elle a à perdre dans cette histoire, à savoir, absolument tout. Question de perspective et de timing, il faut croire. Plus que tout désormais, elle veut garder ce qu’elle a. La Spencer d’il y a un an aurait probablement répondu autrement, ou du moins elle aurait hésité. La fille complètement paumée qui volait pour s’octroyer gagner un peu d’argent, ce qu’elle n’avait pas, qu’elle voulait et qu’on refusait de lui donner ou qui avait absolument besoin de sa dose. Elle a pris très au sérieux l’adage qui dit qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Aujourd’hui cependant, tout est différent. Il n’est plus question de simple vénalité ou même de survie, toute son attention est tournée sur la façon dont elle peut changer et faire mieux. C’est compliqué parce qu’elle n’a jamais su faire, mais elle apprend. Elle essaye, se concentre sur ce qui est réellement important et ce n’est certainement pas l’argent. Alors pas question de vendre qui que ce soit ou quoi que ce soit au plus offrant. « Je rien dire, même contre de l’argent. En ce qui me concerne j’ai rien vu rien entendu en bas. » Ce qui l’inquiète toujours malgré tout, c’est la suite des événements. « Ici, personne ne signe de son sang. Mais si je pouvais me permettre d’avoir des doutes concernant ta loyauté avant, c’est plus le cas. » Doucement, elle acquiesce en pinçant les lèvres. Le discours n’a rien d’étonnant, question de sécurité pour son entreprise, et par-dessus tout, sa famille. « Tu penses vraiment qu’après tout ce que t’as fait pour moi depuis qu’on se connaît je vais saisir la première opportunité qui se présente pour te planter un poignard dans le dos ? » Si elle n’est pas toujours la plus fiable ou la plus digne de confiance sur certains points, elle n’est en revanche pas la plus déloyale. « Je suis pas la plus impliquée dans l’affaire, mais je me doute bien de ce qui pourrait se passer si ce genre d’info sortait. » Et ce, qu’elle tombe dans l’oreille des autorités, ou pire.

« Ramène pas tout à toi Spencer, ça n’avait rien de personnel. » Non, bien sûr. « Y’a quinze ans. Je sortais avec un type qui trempait dans des affaires pas très légales. L’appartement dans lequel on vivait a été perquisitionné. Cette partie là est vraie. Il est mort lors de cette perquisition, ça aussi ça l’était. » Elle ne se souvient plus exactement de quand date cette discussion là, mais elle se rappelle de l’histoire. Bien sûr qu’il y avait plus que ce qu’elle avait dévoilé la première fois. « Mais j’ai jamais ignoré dans quoi il trempait. Rapidement, il m’a introduite auprès de ses pairs. » Presque religieusement, Spencer écoute sans jamais quitter des yeux Raelyn. « J’ai commencé en bas de l’échelle. Et j’ai grimpé. » Elle a même visiblement fait plus que ça vu la position qu’elle occupe aujourd’hui. « Félicitations, j’imagine. » Autant ne pas demander comment ou pourquoi elle se retrouve désormais à la place du dessus. « Du coup t’es quoi maintenant ? » Elle ose tout de même poser la question, parce que dans le fond elle brûle de savoir dans quoi elle vient de mettre les pieds. Est-ce que c’est quelques vendeurs à la sauvette qui bossent pour elle et l’aident à arrondir ses fins de mois ? Est-ce que c’est plus que ça ? « Genre patronne de tous les trafiquants de Brisbane ? » Est-ce qu’il est question de gangs ou de guerres intestines au sein d’un ou plusieurs réseaux ? Encore une question qu’elle n’aurait pas dû poser. « Non, tu sais quoi, oublie que j’ai demandé, je veux pas savoir en fait. » Malgré sa curiosité qui fait qu’elle reviendra sûrement sur le sujet, elle n’est pas sûre d’avoir vraiment envie d’en savoir plus sur ce monde qu’elle n’a fait qu’explorer en surface. « J’imagine qu’Amos est au courant de tout ça, aussi ? » C’est juste histoire de s’assurer qu’elle ne risque pas de faire de bourde en sa présence. Et puis, difficile d’imaginer qu’il y a tout un réseau underground qui se joue juste sous son nez sans qu’il n’en sache rien.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

« Je sais pas quoi te dire, Raelyn. Je m’attendais pas vraiment à pousser une porte et à tomber sur ma frangine dans le rôle de Tony Montana. » - « C’est bien que t’arrives à garder ton sens de l’humour dans des moments comme celui-là. Ça montre que t’as pas froid aux yeux. » Cela peut tout autant montrer qu’elle ne tient pas énormément à la vie, et l’allusion est presque rendue claire par mon ton qui ne dissimule rien des menaces voilées que je tiens à son encontre. Spencer est une gamine maligne, résiliente et de laquelle je me sens proche d’une façon surprenante, certainement un peu parce qu’elle me renvoie face à celle que j’étais à vingt à peine et celle que je serais devenue si j’avais stagné, si, comme elle, je m’étais enfermée dans mon addiction et ma médiocrité. Mais elle a beau être toute ces choses, elle n’est rien face à mes propres intérêts et ceux de ma famille - ils ont fusionnés pour ne faire qu’un à mes yeux - elle n’est rien et si un jour elle me poussait qu’elle est devenue trop dangereuse, je n’hésiterais pas à prendre des mesures radicales. « Je- J’me posais des questions depuis un moment parce que tous les p’tits trucs mis bouts à bouts ça faisait beaucoup, mais là c’est- C’est beaucoup d’un coup. » - « T’as décidé de pousser des portes que t’étais pas supposée pousser. T’as voulu entrer dans la cour des grands. Maintenant, il faut assumer. » Je n’exigerai pas d’elle qu’elle accepte que mon trafic et le gang sont un héritage familial dans lequel elle doit s’investir - non, je la préfère toujours loin de tout ça - mais elle n’a plus le luxe de s’effondrer et de se rouler en boule dans un coin de la pièce. J’attends d’elle de redresser la tête et d’encaisser comme l’adulte qu’elle est.

J’attends surtout d’elle qu’elle me convainque que mon secret est à l’abri avec elle. Qu’elle restera muette comme une tombe sous la pression, et qu’elle ne me dénoncera pas contre de l’argent ou un deal avantageux. Je sais ce que c’est que de vouloir sauver sa peau. Même lorsque je lui était loyale, j’aurais vendu Mitchell plutôt que d’être envoyée derrière les barreaux ou de recevoir une balle entre les deux yeux. Et c’est parce que je sais ce que c’est que d’être opportuniste que je me méfie. « Je rien dire, même contre de l’argent. En ce qui me concerne j’ai rien vu rien entendu en bas. » - « J’aime ce que j’entends. » J’aime la posture qu’elle adopte : l’ignorance est parfois notre plus grande alliée. C’est l’une des raisons pour laquelle je l’avais jusque-là volontairement laissée dans le flou concernant mes activités. « Tu penses vraiment qu’après tout ce que t’as fait pour moi depuis qu’on se connaît je vais saisir la première opportunité qui se présente pour te planter un poignard dans le dos ? » » - « Je pense que je sais ce que c’est que c’est que de vouloir sauver ses fesses. Ou d’avoir cruellement envie de pouvoir s’offrir une dose. » J’évolue dans un monde qui n’est ni tendre ni juste, bien que je fasse mon possible pour placer le mérite au centre des valeurs du Club. La loyauté avec. « Je suis là où je suis parce que j’ai délogé la personne qui portait la couronne avant moi. » C’est comme ça que les choses marchent, dans la pègre. La méfiance est de rigueur, je dirai même qu’elle est vitale. « Je suis pas la plus impliquée dans l’affaire, mais je me doute bien de ce qui pourrait se passer si ce genre d’info sortait. » - « Parfait. Tu te doutes de comment je me sentirais, si elle sortait de ta bouche dans ce cas. » L’expression est un euphémisme pour évoquer toutes les façons les plus créatives les unes que les autres que je trouverais pour le lui faire regretter.

« Félicitations, j’imagine. » Un mince sourire étire mes lèvres, mais c’est là ma seule réaction. Du reste, je ne la quitte pas des yeux, espérant certainement lire son âme et trouver la réponse à la question que je me pose : Spencer est-il oui ou non digne de confiance ? « Du coup t’es quoi maintenant ? Genre patronne de tous les trafiquants de Brisbane ? Non, tu sais quoi, oublie que j’ai demandé, je veux pas savoir en fait. » Elle secoue la tête et je me contente de hausser les épaules en guise de réponse. « Disons que personne ne me donne d’ordre. » Et que je n’ai - presque - aucun compte à rendre à personne. « C’est une place confortable. » Une dont je ne croyais pas vouloir à l’époque où j’étais le bras droit de Mitchell. Une que je ne lui aurais jamais arrachée s’il ne m’avait pas trahie et s’il n’avait pas menti pendant plus d’une décennie. « Une place que j’entends conserver. » Une place pour laquelle je suis prête à tuer. Je ne lorgnais pas sur le pouvoir, mais j’y ai pris goût. « J’imagine qu’Amos est au courant de tout ça, aussi ? » Surprise, je penche la tête sur le côté de je hausse un sourcil. « A ton avis ? » Pense-t-elle que je serais capable de faire tout ça dans le dos de mon âme sœur. « Amos est mon âme sœur, mon partenaire, mon complice, avec tout ce que cela implique. » Mes intérêts sont aussi les siens. « Il sait exactement qui je suis. » Et il m’aime sans avoir jamais essayé de changer quoi que ce soit chez moi. « Il l’a embrassé. » Il a embrassé la personne que je suis, ma cause et mes intérêts. « J’ai jamais vu le monde en noir et blanc, Spencer. » Mes notions de bien et de mal ont toujours été flous, difficiles à toucher du doigt. « Mais ça ne m’empêche pas de savoir qui je suis. Ce que je suis. » Le mauvais camp, autrement dit. J'ai du sang sur les mains, de façon aussi certaine que si j'avais appuyé moi-même sur la détente. Cela ne me fais ni chaud ni froid, mais est-ce le cas de la blonde ? « J’ai besoin de savoir si ça constitue un dilemme moral pour toi. » L’appât du gain se contre, l’opportunisme également. Mais l’envie de faire le bien ? C’est bien plus ennuyeux à gérer.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« C’est bien que t’arrives à garder ton sens de l’humour dans des moments comme celui-là. Ça montre que t’as pas froid aux yeux. » Instinct de survie, besoin de garder la face dans un moment comme celui-là, qu’importe les raisons, y en a à qui ça ne plait pas et qui n’auraient pas hésité à lui faire comprendre de manière brutale. C’est déjà arrivé, ça arrivera de nouveau, mais ici ça n’a pas l’air d’être le genre de Raelyn. « T’as décidé de pousser des portes que t’étais pas supposée pousser. T’as voulu entrer dans la cour des grands. Maintenant, il faut assumer. » Un bref rictus étire les traits de Spencer alors qu’elle pince les lèvres en hochant la tête.

Rien vu, rien entendu, c’est la politique qui a lieu dans ce milieu là. Quand on est témoin d’une scène potentiellement gênante qui implique quelqu’un de plus fort que soi, on détourne le regard, on oublie ce qu’on vient de voir et surtout on garde sa bouche fermée. Les balances sont rarement bien vues, tout comme les traîtres. « J’aime ce que j’entends. » Bien, au moins pour une fois elle a trouvé les bons mots. « Je pense que je sais ce que c’est que c’est que de vouloir sauver ses fesses. Ou d’avoir cruellement envie de pouvoir s’offrir une dose. » « Si j’ai rien vu, y a pas de raison pour laquelle j’devrai sauver mes fesses. » Techniquement pas de raison qu’on lui tombe dessus pour lui soutirer des informations, elle n’aura de toute façon pas grand chose à raconter, ou en tout cas aucune information sensible à partager vu l’étendue de son implication dans cette entreprise. Quant au fait de vouloir s’offrir une dose, il ne lui reste plus qu’à espérer rester sobre et ça devrait s’arranger tout seul. « Je suis là où je suis parce que j’ai délogé la personne qui portait la couronne avant moi. » Spencer hausse les sourcils, pas vraiment certaine de l'interprétation à faire de cette annonce. Déloger la personne avant elle, ça veut dire quoi ? Comment ça s'est passé ? Sûrement pas avec une poignée de main et une tape sur l'épaule. Les détails lui échappent encore, mais elle a bien une vague idée de ce qui a pu se passer. « Parfait. Tu te doutes de comment je me sentirais, si elle sortait de ta bouche dans ce cas. » La blonde acquiesce, presque gravement, l’air de dire qu’elle a bien reçu le message. Terminées les tentatives d’humour pour s’alléger l’esprit, là c’est sérieux, possiblement son avenir proche qui peut se jouer en fonction de ses réponses et de son attitude. « Disons que personne ne me donne d’ordre. C’est une place confortable. Une place que j’entends conserver. » « Je ferai rien qui mettra ça en péril. » Et s’il lui faut mentir par omission auprès de ses proches, soit, rien de nouveau là encore.

Et la question à deux dollars, Amos dans tout ça ? « A ton avis ? » Comme elle s’en doutait, bien évidemment qu’il est au courant. Et bien assez tôt, il saura également qu’elle a franchi la ligne sans y être invitée. Peut-être qu’il viendra lui aussi en rajouter une couche auprès de Spencer, juste histoire de marquer le coup et de bien s’assurer qu’elle gardera le silence sur ce qu’elle sait. Elle pourra alors tenir le même discours qu’à Raelyn ; celui du rien vu rien entendu. « Amos est mon âme sœur, mon partenaire, mon complice, avec tout ce que cela implique. Il sait exactement qui je suis. Il l’a embrassé. » Là-dessus, Spencer ne peut pas en dire autant en ce qui concerne la personne qui partage sa vie. Hors de question qu’elle en parle, que sa moitié soit mise au courant parce qu’elle sait d’avance que ça serait une catastrophe pour elles. Ça ne sera qu’un mensonge de plus enfermé dans la boîte à secrets, voilà tout. La jeune femme acquiesce, désormais presque pleinement consciente du genre d’endroit dans lequel elle a mis les pieds.  « J’ai jamais vu le monde en noir et blanc, Spencer. Mais ça ne m’empêche pas de savoir qui je suis. Ce que je suis. » Pas juste une bienfaitrice qui a soudainement décidé de s'occuper de sa camée de petite sœur, pas non plus une gentille mère de famille innocente. Y a des enjeux dont Spencer ne peut que deviner l’étendue et c’est déjà un gros morceau à digérer. « J’ai besoin de savoir si ça constitue un dilemme moral pour toi. » Bonne question. Tout dépend du degré d’implication qu’on lui demandera d’avoir dans tout ça. Si Raelyn la veut toujours loin de ses affaires, aucun souci là-dessus. « Non. » Tant qu’on lui demande juste de fermer les yeux, elle est très bien capable de le faire et de continuer à prétendre ne rien voir. Elle est même plutôt douée pour ça. « C’est tes affaires, ça me concerne pas. » Et Spencer n’a pas de droit de regard, de jugement ou de remise en question. « Ça change pas ce que t’as fait pour moi et j’me fous bien de savoir d’où vient l’argent ou de comment t’as réussi. » Autant dire les choses comme elles sont. Que ça soit de l’argent sale ou gagné honnêtement, elle n’a jamais fait la fine bouche avant, il n’y a pas de raison que ça commence maintenant. C’est ce même pognon qui l’a sortie de la rue y a un an de ça, qui a épongé sa dette auprès de l’italien, alors au diable la moralité. S’il doit y avoir un retour de karma plus tard, soit, elle gérera ça en temps voulu. « Je- Je sais pas exactement où ça nous laisse, maintenant que j’ai vu ça… Genre ça change un truc pour toi ? » Est-ce qu’il lui faut faire ses preuves du genre test de loyauté pour s’assurer de son silence, est-ce que Raelyn va fermer les yeux et elle aussi prétendre que rien de tout ça n’est arrivé ? « J’demande rien de plus que ce que j’ai actuellement, au cas-où. » La précision est sûrement inutile, mais elle ne veut pas que sa question soit mal interprétée; elle n’est pas en train de réclamer une place et encore moins une part de gâteau, tout ce qu’elle veut, c’est que les choses restent comme elles sont.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

« Si j’ai rien vu, y'a pas de raison pour laquelle j’devrais sauver mes fesses. » Le regard fixé sur la demoiselle, je hoche la tête, signe que ce que j’entends me satisfait ou en tout cas me convient, pour l’instant. Je ne la mettrais pas dans une position dans laquelle elle devra faire ses preuves - je ne suis pas certaine qu’elle ait les épaules pour - mais j’ai bien l’intention de la garder à l'œil. Carly va devenir son ombre, et tant pis si cela lui déplaît puisqu’elle n’affectionne pas particulièrement la petite blonde depuis qu’elle a découvert qu’elle et moi partagions le même sang. Pendant les prochains jours, les prochaines semaines, je veux savoir à qui elle parle, quand et de quoi. Je veux connaître les lieux dans lesquels elle se rend et si elle est accompagnée, ainsi qu’à quelle heure elle rentre chez elle ainsi que l’itinéraire qu’elle emprunte. Ma confiance en Spencer est ténue, limitée. « Parfait, tu n’as rien vu. » Et moi, je ne lui rendrai pas de compte sur le système de surveillance que je mettrai en place à l’instant où elle aura passé la porte du bureau. « Je ferai rien qui mettra ça en péril. » - « C’est autant dans ton intérêt que dans le mien. » Au-delà des possibilités de représailles, le destin de Spencer est intimement lié au mien : elle me doit tout. Sans moi, elle croulerait sous les dettes et serait à la rue. Sans moi, elle serait morte d’une seconde ou troisième overdose avant d’avoir obtenu une place dans un centre de désintoxication. Je ne rougis pas lorsqu’il s’agit de rappeler aux autres toutes les raisons pour lesquelles ils me sont redevables, mais je ne crois pas avoir besoin de le faire avec ma demi-sœur.

Si je m’inquiète de sa morale, c’est parce que je sais que c’est à ce niveau que tout se jouera. Je peux lui proposer plus d’argent que tous mes ennemis, je peux la mettre en sécurité et à l’abri du besoin pendant le restant de ses jours, elle peut même vivre à mes frais à l’autre bout du globe si je considère qu’elle constitue un danger, ici. Mais si elle décidait d’incarner le glaive de justice, si ce qu’elle a vu la choque dans ses valeurs, je ne peux pas acheter ou contrer ça. « Non. » Bien. « C’est tes affaires, ça me concerne pas. » Mes affaires, et celles de tout un tas de gens ici. « Ça change pas ce que t’as fait pour moi et j’me fous bien de savoir d’où vient l’argent ou de comment t’as réussi. » L’argent immaculé n’existe pas. Elle devrait le savoir Spencer, puisqu’elle a enrichi les poches de trafics similaires au mien toute sa vie. « Parfait. Tu ne descendras plus jamais en bas. » C’est un ordre autant que la promesse que je n’ai pas l’intention de l’impliquer dans tout ça parce qu’elle a eu la mauvaise idée de descendre dans les profondeurs de l’Octopus. « Tu n’échangeras à propos de ça avec aucun autre employé. Ni avec les contacts que j’ai pu te fournir. » Certains employés du casino connaissent une partie de la vérité, d’autres sont naïfs, innocents comme des enfants et puisqu’elle ne peut pas faire la différence, je ne veux qu’elle échange de ça avec personne. Quant aux contacts en question, ce sont des dealeurs et s’ils connaissent tous de mes activités, je ne veux pas qu’il puisse témoigner que la jeune femme n’était pas sans savoir tout ce qui se tramait sous la surface, au cas où ils seraient interrogés. « Il y a des zones de la ville que tu dois éviter, à partir d’aujourd’hui. » Le bowling de ma Nemesis, QG de sa petite bande de malfrats des bacs à sable et les environs. Le restaurant de Mitchell et les quartiers autour. J’ai menacé ses sœurs, il prendrait un malin plaisir à me renvoyer l’ascenseur. « Si tu ne le fais pas, je le saurai. » Parce que j’ai des yeux et des oreilles partout mais, surtout, parce que j’entends la faire suivre. « Et pour ce point-là, c’est de ta propre sécurité qu’il est question. Je n’ai pas que des amis. » Elle n’est pas idiote, Spencer. Elle se doute qu’on n’arrive pas là où je suis en collectant les bons points.

« Je- Je sais pas exactement où ça nous laisse, maintenant que j’ai vu ça… Genre ça change un truc pour toi ? » Je l’observe et me demande où elle veut en venir. A-t-elle pu que je la mette à la rue ou de se retrouver sans emploi, ou craint-elle de me perdre, puisqu’à ses yeux je représente sa seule forme de famille ? « J’demande rien de plus que ce que j’ai actuellement, au cas-où. » - « Non. Si tu es intelligente, ça ne changera rien. » Mon avis sur la demoiselle n’est pas altéré. A sa place, j’aurais fouiné volontairement et depuis longtemps. Mais j’aime penser qu’à sa place, je ne me serais pas faite attraper. « Otto sera plus un problème pour toi. Il n’est plus dans les parages. » Cela n’a que peu de rapport avec le reste mais, à présent qu’elle connaît une partie de la vérité, elle peut aussi savoir cela. Je comprends après coup que ma phrase n’est pas limpide et que certains pourraient comprendre que je me suis débarrassée de lui d’une façon permanente. « Il a été arrêté. Rien à voir avec nous. C’était un idiot. » Je plonge mon regard dans le sien, je sonde ses yeux bleus. « T’es en sécurité ici si tu respectes les règles, Spence. Ça n'a pas changé. »

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« Parfait, tu n’as rien vu. » Nouvel hochement de tête, elle hésite même presque à carrément tendre la main pour sceller le pacte de façon officielle mais ça serait trop en faire. L’acquiescement devra faire l’affaire et pour le reste, ça sera à elle de faire gaffe à ce qu’elle fait et surtout ce qu’elle dit. Dans une situation pareille, autant partir du principe que personne n’est digne de confiance et tant pis si ça la ramène un an en arrière lorsqu’elle ne parlait qu’à peu de monde. « C’est autant dans ton intérêt que dans le mien. » Forcément. Mettre les mauvaises personnes dans la confidence, c’est ouvrir la porte aux mauvaises surprises et se tirer une balle dans le pied pour le futur.

Mais soit, Spencer s’exprime sur le fait que ça ne change rien de son côté pour le moment, elle aura tout le temps du monde de ressasser et d’hyperfocus sur le sujet et toutes les conséquences plus tard, lorsqu’elle sera seule et que son cerveau se rendra compte de la merde que ça peut causer si elle n’y prend pas gare. « Parfait. Tu ne descendras plus jamais en bas. » Pas vraiment le choix, il faut croire. Pas vraiment une surprise non plus et puis, ça l’arrange quand même pas mal. Ce n’est pas si loin du monde qu’elle a connu pendant quelques années, elle n’a pour autant pas tellement envie d’y remettre le nez et certainement pas à plus grande échelle. « Tu n’échangeras à propos de ça avec aucun autre employé. Ni avec les contacts que j’ai pu te fournir. » Ca paraît plutôt logique. Impossible de différencier ceux qui sont dans la combine et ceux qui ne le sont pas. « Okay. » qu’elle confirme avec un énième hochement de tête, au moins histoire de dire qu’elle n’a pas complètement perdu sa voix avec toutes ces nouvelles informations. « Il y a des zones de la ville que tu dois éviter, à partir d’aujourd’hui. » « Mais- » Ca par contre, c’est tout de suite beaucoup moins drôle, alors elle s’apprête à râler avant de s'interrompre. Y a déjà toute une partie qu’elle évite de son propre chef pour justement ne pas se retrouver face à certaines personnes, mais il faut croire qu’il va lui falloir ajouter quelques lieux à sa liste déjà bien trop longue. « C’est genre… Des endroits en particulier ou carrément des quartiers ? Et on parle de combien de zones ? » Même si dans le pire des cas, Brisbane est assez grande pour ne pas systématiquement tomber sur des problèmes, ça fait quand même chier de devoir encore plus se restreindre. « Si tu ne le fais pas, je le saurai. » La grimace incommodée est bien difficile à masquer, mais qu’est-ce qu’elle peut répondre à ça en vérité ? Elle doute que Raelyn la fasse fliquer, ses employés ont sans doute bien d'autres choses à foutre que de devoir suivre une Spencer en train de se paumer dans les endroits qu’il ne faut pas. En revanche, ils seront sûrement avisés qu’elle n’est pas supposée se trouver à tel ou tel endroit et ça sera vite rapporté en cas de transgression. « Et pour ce point-là, c’est de ta propre sécurité qu’il est question. Je n’ai pas que des amis. » « J’imagine. » quand on évolue dans un milieu comme ça, ils sont même rares, ceux qui peuvent être qualifiés d’amis. Ca doit être d’autant plus vrai quand on a un rang au-dessus comme c’est le cas pour l’aînée. Il n’est pas difficile d’imaginer que porter le même nom et porter le même nom que Raelyn, c’est potentiellement se promener avec une cible sur le dos et l’idée est loin de l’enchanter. Mais elle a ouvert la boîte de Pandore et il n’y a pas de retour en arrière possible, il lui faut assumer et vivre avec ce qui en est sorti, maintenant.

Et forcément avec tout ça, elle s’inquiète de la suite des événements, Spencer. Si ça ne change techniquement rien de son côté, ça ne veut pas dire qu’il en va de même pour l’autre concernée. Après tout, Raelyn ne lui doit rien et par extension, rien ne l’oblige à garder quelqu’un comme Spence. Parce que la jeune femme en est certaine, s’il lui faut choisir entre l’organisation pour laquelle elle a sué sang et eau, ou sa jeune demi-soeur qui est là depuis à peine un an, la décision sera vite prise. « Non. Si tu es intelligente, ça ne changera rien. » Bien malgré elle, Blackwell relâche un souffle soulagé. La vérité c’est qu’elle ne sait pas vraiment à quoi s’attendre, elle essaye de faire au mieux, mais elle a appris à ses dépends que c’est souvent loin d’être suffisant ; autant rester sur ses gardes. « Otto sera plus un problème pour toi. Il n’est plus dans les parages. » Elle penche la tête sur le côté, les sourcils légèrement froncés, écoutant avec attention. « Il a été arrêté. Rien à voir avec nous. C’était un idiot. » « Il a foutu quoi ? » A tous les coups il a été coffré en essayant de buter quelqu’un dans la rue, c’est bien son genre et surtout, c’est bien fait pour sa gueule. « J’peux pas vraiment dire qu’il va me manquer. » Ou qu’elle est triste de son sort, même. « C’est heu- Pour longtemps ou genre dans quelques mois il est dehors ? » Non pas que ça change quoi que ce soit, elle a tout fait pour ne pas le recroiser depuis le tragique incident de l’année dernière et il n’est pas non plus venu lui chercher des noises alors y a pas de raison pour qu’il le fasse en revenant à la civilisation, elle ne lui doit plus rien. « T’es en sécurité ici si tu respectes les règles, Spence. Ça n'a pas changé. » Malgré tout, elle a un peu de mal à se laisser convaincre. « Donc il s’est rien passé, il se passera plus rien, je descends plus jamais et ça en reste là ? » Le résumé est grossier, mais loin d’être incorrect. Sur le papier, ce plan lui convient plutôt pas mal ; à l’heure actuelle elle a tout sauf envie de se retrouver impliquée dans ce genre d’histoire plus que de raison et clairement, elle en sait déjà trop et il va lui falloir un moment pour complètement procéder les informations.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

Maintenant que Spencer sait, il est hors de question de lui laisser arpenter les quartiers les plus dangereux de la ville pour quelqu’un qui porte mon nom. En temps normal, je lui aurais conseillé de les éviter autant que possible mais, compte tenu des dernières révélations de Solas, je brandis le panneau d’interdiction pure et simple. Si Aberline s’est mise en tête de s’en prendre à ma petite fille, pourquoi ne sauterait-elle pas sur l’occasion en apprenant que j’ai une demi-sœur ? « Mais- » Je ne secoue pas la tête, je ne fais pas la grimace, je reste stoïque et immobile, mais je crois que mon simple regard suffit à ce qu’elle comprenne que ce n’est ni négociable, ni discutable. « C’est genre… Des endroits en particulier ou carrément des quartiers ? Et on parle de combien de zones ? » - « Le nord de la gare, principalement. A l’est du parc Albion. Y’a un établissement en particulier dont je te filerai l’adresse. » Le bowling ou ma nemesis tient sa petite affaire. « Là-bas, tu foutras jamais les pieds. » C’est une affirmation, pas une question ou ni même un ordre. Je m’exprime sur le genre de ton qu’utilisent ceux qui sont habitués à ce qu’on leur obéisse sans chercher à discuter. « Tant que tu reste sous Bowen Hills, tu devrais être en sécurité. » Je tiens à ce qu’elle comprenne tout le sérieux qui se cache derrière ces avertissements, alors j’ajoute. « Je suis sérieuse Spencer. Le climat est… compliqué, en ce moment. Pour l’instant et jusqu’à ce que je te dise le contraire, évite tout ce qui se trouve au nord de la gare. » Peut-être qu’un jour, les choses seront plus simples et que l’interdiction se résumera au Bowling, mais pour l’instant, prudence est mère de sûreté. « Si quelqu’un te pose des questions, si tu trouves quelqu’un étrange ou suspect, tu me préviens directement, c’est clair ? » Les avertissements de Solas m’auraient-ils rendue paranoïaque ? Je ne jurerais pas du contraire. « J’imagine. » Ainsi, le sujet est clos. Elle ne discute pas, et je n’ai pas non plus l’impression qu’elle ait l’intention de volontairement transgresser les nouvelles règles que je pose. Contrairement à ce que l’on pourrait croire au premier abord, elle n’a rien d’une tête brûlée inconsciente.

« Il a foutu quoi ? » Je n’avais pas l’intention d’avoir une longue discussion au sujet de l’ancien cambrioleur, mais je ne vois aucun inconvénient à lui exposer la situation : elle n’a rien à voir avec le Club et peut-être se sentira-t-elle un peu plus en sécurité. « J’peux pas vraiment dire qu’il va me manquer. » - « Je m’en doutais. » Si on me demandait quelles sont les personnes favorites de la blonde, je ne citerais pas l’Italien. « Je te le dis pour que tu puisses dormir sur tes deux oreilles. » Même si le cambrioleur n’aurait pas osé défier mes ordres ou, plutôt, mes interdictions. Et s’approcher de Spencer en faisait partie. « C’est heu- Pour longtemps ou genre dans quelques mois il est dehors ? » - « Il a été arrêté pour tentative de meurtre. » Sur une personnalité publique en plus de ça, ce qui ne manquera pas de rendre son procès médiatique et qui poussera le tribunal à vouloir faire de lui un exemple. « Je doute qu’il sorte avant plusieurs années. » Je n’ai en revanche pas peur qu’il parle : il sait très bien que, dans le cas échéant, ce ne sont pas les barreaux de sa prison qui m’empêcheront de l’atteindre. Le faire taire serait d’une facilité enfantine, vraiment.

« Donc il s’est rien passé, il se passera plus rien, je descends plus jamais et ça en reste là ? » - « Comme je te l’ai dit. » Je hoche la tête, consciente que ce que je lui affirme a valeur de promesse. Je ne suis pas de celles qui les brise facilement et sur un coup de tête, si je possède une qualité, c’est bien la loyauté. « Tu ne dois en parler à personne, désolée, mais j’insiste sur ce point. Même à ta… » J’ignore ce que la jeune femme qu’elle fréquente depuis plusieurs mois représente pour elle. Nous ne sommes pas le genre de sœur à se retrouver autour d’un brunch pour parler de notre vie privée. « Ta compagne. Personne, c’est clair ? » Je sais que c’est dur, de mentir à un être cher. Mais Spencer est intelligente, elle comprendre que c’est en partie pour cette dernière qu’elle doit le faire.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

Ca fait beaucoup d’un coup, et au final elle ne peut pas tellement jouer les surprises ou s’offusquer de la situation. Elle a poussé la porte sans qu’on l’y invite, elle a ouvert la boîte de Pandore et il faut maintenant assumer sa part de responsabilité et tant pis si c’est plus gros que ce qu’elle aurait imaginé. « Le nord de la gare, principalement. A l’est du parc Albion. Y’a un établissement en particulier dont je te filerai l’adresse. » La blonde acquiesce en silence, prenant le temps de dessiner un plan mental histoire d’essayer de visualiser les zones indiquées. A priori ce n’est pas le genre d’endroits qu’elle avait l’habitude de fréquenter, donc ça ne devrait pas être particulièrement difficile de continuer. « Là-bas, tu foutras jamais les pieds. » « Ouais, okay. » qu’elle souffle en hochant de nouveau la tête. « Tant que tu reste sous Bowen Hills, tu devrais être en sécurité. » Ca la fait un peu tilter, l’idée de devoir se promener en surveillant constamment par-dessus son épaule. Elle l’a déjà trop fait, s’était persuadée que cette période de sa vie était désormais terminée et voilà qu’il va falloir de nouveau se montrer vigilante. Le truc c’est que cette fois, elle ne sait pas tellement ce qui l’attend ou contre qui il faut se montrer méfiante. « Je suis sérieuse Spencer. Le climat est… compliqué, en ce moment. Pour l’instant et jusqu’à ce que je te dise le contraire, évite tout ce qui se trouve au nord de la gare. » Bien sûr qu’elle est sérieuse, elle l’est toujours et aujourd’hui encore plus vu la tronche qu’elle tire. Elle aimerait bien savoir en quoi le “climat est compliqué”, ce que ça implique réellement et les proportions que ça peut prendre. Mais ce n’est pas particulièrement un bon moment pour la jeune femme de s’ajouter des charges mentales supplémentaires qu’elle peut éviter. Elle cogitera un moment dans son coin, reviendra vers Raelyn avec ses questions quand ça lui prendra et d’ici là, elle fera du mieux qu’elle peut pour respecter les instructions qu’on vient de lui donner, ça lui changera. « J’imagine que j’vais éviter de trop en demander. » C’est pas l’envie qui lui manque, pourtant. Mais elle a le vague sentiment qu’elle a déjà bien assez abusé pour aujourd’hui et probablement pour les années à venir. S’agirait pas de se mettre à dos Raelyn plus que de raison. « Si quelqu’un te pose des questions, si tu trouves quelqu’un étrange ou suspect, tu me préviens directement, c’est clair ? » Trouver quelqu’un suspect peut vouloir dire beaucoup de choses, il va falloir faire gaffe à ne pas tomber dans la paranoïa non plus.

« Je m’en doutais. Je te le dis pour que tu puisses dormir sur tes deux oreilles. » « Merci. » C’est presque triste de se réjouir du malheur d’un autre, mais tant pis. Elle prend les bonnes nouvelles là où elle peut, tant pis si ça implique que quelqu’un ait terminé en taule. « Il a été arrêté pour tentative de meurtre. Je doute qu’il sorte avant plusieurs années. » « Tant mieux. » Autant ne pas faire croire qu’elle est désolée pour son sort, ça serait un mensonge bien difficile à faire avaler. Elle se retient même d’ajouter un “bien fait” qui serait sûrement de trop ; elle n’en pense pas moins cependant. Une source de problèmes dont elle n’aura plus à se soucier, dommage qu’elle ne puisse pas vraiment le célébrer avec qui que ce soit.

« Comme je te l’ai dit. » La nouvelle confirmation coule de source. Bon sang, dans quoi est-ce qu’elle s’est embarquée, encore ? « Tu ne dois en parler à personne, désolée, mais j’insiste sur ce point. Même à ta… Ta compagne. Personne, c’est clair ? » Un maigre sourire amer étire les lèvres de la jeune femme qui se contente de secouer la tête. « Ouais, non. Je comptais pas le faire. » Ca sort comme si c’était une évidence, et si ça l’est aux yeux de la jeune femme, ce n’est pas forcément le cas pour Raelyn qui a visiblement tendance à tout partager avec son compagnon. La plus jeune aimerait pouvoir en dire autant, mais c’est loin d’être le cas. « C’est pas son monde, tout ça. Elle comprendrait pas. » Et puis Spencer refuse la simple idée qu’elle puisse se retrouver mêlée de près ou de loin à ne serait-ce que la plus petite rumeur. C’est sûr qu’elle va flipper, c’est sûr qu’elle va complètement paniquer et la blonde sait d’avance comment ça risque de se terminer. Bien sûr que Blackwell va garder ça pour elle, tant pis si l’autre a l’impression qu’elle cache des choses, tant pis si elle ne comprend pas, c’est pour son bien et c’est mieux que la vérité. « Et puis je doute qu’ils apprécient ce genre de confidence dans les groupes de parole. » Sa manière à elle de dire qu’elle ne voit pas tellement de gens en dehors de ceux dont Raelyn a déjà entendu parler. Quant à ceux que tu connais qui pourraient être intéressés par ce genre d’informations, ça fait des lustres que tu les as plus vus. « J’dirai rien. » Une promesse qui ne devrait pas être si compliquée que ça à tenir, elle s’imagine mal débarquer dans une conversation random pour lâcher un “hey, moi c’est Spencer, mes parents étaient des cons et ma demi-soeur est baronne de la pègre, et vous votre journée ?” On a difficilement vu pire comme approche. « Je heu- C’est tout ? Enfin j’peux y aller ou t’as d’autres conseils à formuler ? » A défaut de pouvoir s’envoyer une dose, elle aurait bien besoin d’une clope, là.