En recevant le message de Maria, il mentirait s’il disait ne pas avoir pesé le pour et le contre avant de lui répondre. Non pas qu’il ne souhaite pas la voir, là n’est pas le sujet, mais bien parce qu’il voulait s’assurer d’avoir la force nécessaire pour mettre le nez en dehors de chez lui aujourd’hui. Si tel n’avait pas été le cas, il aurait été un poids bien plus qu’autre chose et ce n’est pas une chose qu’il veut imposer à son amie. Il veut justement être cet ami rayonnant et toujours prêt à aider ; l’idée qu’elle puisse avoir une autre image de lui aurait tout eu pour lui briser le coeur, raison pour laquelle il a redoublé d’efforts pour trouver la motivation de sortir. C’est au moins un effort qu’il pourra conter avec joie à Rory et à son nouveau psy, et rien que pour ça il estime que cela vaut la peine de sortir de ce qui est récemment (et bien malgré lui) devenu sa nouvelle zone de confort.

Cette sortie de l’après-midi a été sa motivation pour sortir faire son jogging matinal, habitude très largement oublié durant les dernières semaines écoulées et qu’il avait à coeur de reprendre, surtout maintenant qu’il sait que leur chien a lui aussi à coeur de se défouler. Ainsi, c’est avec Brownie tenu en laisse, accrochée au tour de sa taille, qu’il a arpenté durant quelques kilomètres la plage près de leur maison, pour profiter de la brise matinale, pour tenter de fatiguer un minimum le chien pour qu’il soit plus calme durant la journée (en vain, comme toujours). Pour s’occuper, tout simplement, parce qu’une part de lui avait déjà hâte de retrouver Maria, plusieurs heures avant l’heure de rendez-vous convenue. Ainsi, cela explique sans doute pourquoi il est arrivé au café avec plusieurs minutes d’avance, assez pour justement déjà avoir eu le temps de commander un café et de le boire, avant de faire suivre une deuxième commande, Maria arrivant dans le même élan ou presque. « Hey ! » Le sourire de l’anglais grandit doucement, sincère. « Comment tu vas ? J’espère que je t’ai pas trop fait attendre. » Son sourire se retrouve un peu plus appuyé encore, pour la rassurer quant à ses mots. “Je viens à peine d’arriver.” Il ment naturellement, sans conséquences. “Et tout va bien. Je suis content que tu m’aies proposé qu’on se voit, ça m’a motivé à sortir ce matin. Et toi ?” Swann se contente de vaguement résumer son quotidien pour n’en sortir que le plus réjouissant, que ce qui l’arrange à raconter aussi parce qu’il ne désire pas que cette discussion tourne au pathos d’une façon ou d’une autre. Il est avec Maria pour passer un bon moment et absolument rien d’autre.

“Tu sais ce que tu veux ?” Il demande, lui montrant du doigt l’ardoise servant de carte pour qu’elle fasse son choix, déjà prêt à lever le bras pour demander poliment à un serveur de venir prendre leur commande, bien au fait qu’elle n’osera pas déranger qui que ce soit, quand bien même il s’agit justement de leur métier. “Une raison particulière à ce rendez-vous, d’ailleurs ?” Il continue, simplement curieux.

Les salutations sont simples, faciles. Les mots sortent naturellement, basculant d’une politesse à une autre avec une joie non feinte sur le regard de l’anglais. « Tant mieux si ça a pu te rendre productif. » Le problème n’a réellement jamais été la productivité supposée de Swann, mais il ne se formalise pas qu’elle le pense, surtout alors que c’est plutôt pour l’arranger alors qu’il n’a aucune envie de s’épancher moindrement sur sa vie personnelle. Plus que tout, il n’a pas envie d’embêter Maria avec tout ça, surtout alors qu’il se fait simplement une joie de la retrouver et de passer un bon moment avec elle, habitude qu’il aurait voulu ne jamais perdre. « Je vais bien aussi, je suis allée nager ce matin, avant de me faire dégager de la piscine parce qu’ils fermaient plus tôt aujourd’hui. T’y crois toi ? Depuis quand ils n’ouvrent pas la piscine le week-end ? C’est d’une idiotie. » Il rigole alors qu’elle s’emporte rapidement, comme à son habitude il faut dire. Décidement, jamais Swann ne comprendra la capacité qu’on certain à monter aussi rapidement dans les tours, mais il mentirait s’il disait vouloir leur ressembler moindrement. Alors, comme toujours, il passe outre les problèmes pour se concentrer sur autre chose. “T’as pu nager combien de temps ? J’aimerais bien reprendre la natation, de temps en temps, et je t’avoue que l’océan est souvent un peu trop froid.” Il avoue dans un rire quelque peu gêné, ne lui disant pas qu’en réalité il n’a aucune envie de s’aventurer trop loin du bord, encore largement traumatisé par la mort de son frère après qu’il soit parti surfer. Il ne voudrait pas que Rory se retrouve seul à son tour à cause d’un accident de la sorte.

La commande de Maria est réalisée en un claquement de doigt, énième trait de son caractère qui tend toujours à faire sourire l’anglais, amusé par son éternelle assurance qui transparaît en toutes circonstances. « Oui, un thé au jasmin. » Et puisqu’il prendra un autre thé à son tour, il serait bien le dernier à se plaindre du choix de la jeune femme en ce qui concerne leur rencontre improvisée (ou presque) dans ce café. C’est alors par curiosité s’il demande si elle lui a proposé ce rendez-vous avec une idée derrière la tête ou par simple mélancolie, ce qui l’un comme l’autre s'avère être une réponse parfaitement acceptable à ses yeux. « Pour être honnête, oui, j'avais quelque chose à te proposer. » Sa curiosité piquée, il relève son regard sombre dans les prunelles de la jeune femme, le déviant seulement temporairement au moment de faire part au serveur de sa commande à son tour. « J'ai beaucoup de gamins dans une de mes classes et c'est pas facile de tous les gérer toute seule parfois, du coup je cracherait pas sur quelqu'un pour m'aider avec eux tu vois. Et j'avais pensé à toi, si t'es d'accord. Je me disais que ça pourrait être pas mal, comme ça se rapproche un peu de ce que tu faisais avant, donc t'as déjà un peu d'expérience. » L’attention le touche, évidemment, et cela se traduit par un simple sourire en coin, ajouté à un regard qu’il laisse dévier sur le sol pendant un court instant. Il sait que Maria n’est pas la première à accepter de demander de l’aide, et que cela lui coûte aussi sûrement de le faire, même face à lui, même alors qu’elle sait qu’elle pourrait tout lui confier et qu’il continuerait tout de même à répondre présent. “Tu te rends compte que je vais les laisser faire toutes les bêtises du monde, pas vrai ?” Oh, il ne leur laissera jamais rien faire de dangereux, mais il faut bien avouer qu’il serait le premier à encourager leurs mauvaises idées, ne serait-ce parce qu’il les trouverait amusantes à son tour. Son sourire amusé disparaît rapidement au profit d’une mine un peu plus sérieuse, cependant. “Je serais heureux de t’aider. Et de me rendre utile.” L’anglais reprend donc, hochant doucement la tête pour coupler le geste à la parole. “Tu as une idée de ce que tu voudrais que je fasse ? Ça fait quasiment deux ans que je me contente de mon travail, je suis sûrement un peu rouillé.” Et déjà, sans évoquer toutes les raisons derrière cet arrêt, il laisse un rire sincère et simple se faire entendre à nouveau.

« Oh pas très longtemps, deux petites heures je pense. J'y suis allée tranquillement donc j'étais super loin de mes temps habituels aussi. » - “Deux petites heures, oui, bien sûr.” Il reprend avec un certain, le prouve le sourire qu’il affiche au coin des yeux. Ce serait énorme pour n’importe qui mais pas pour Maria, dont les capacités en la matière ne sont certainement plus à prouver. Elle est douée et, surtout, elle a une force de caractère admirable. Il se doute déjà que son “tranquillement” à elle n’a rien à voir avec celui du reste du monde, pas même pour lui qui a tout de même pour habitude d’aller courir ou, de façon générale, de toujours faire un sport ou un autre. Maria, c’est un autre niveau, et il l’admire bien plus qu’il ne la jalousie - à commencer parce qu’il ne la jalouse pas le moins du monde, justement. « Mais ça fait toujours du bien d'aller nager un peu. » Swann hoche la tête, voulant bien la croire. Le temps où il allait lui-même nager lui manque, raison pour laquelle il lui en a rapidement parlé, comme pour s’assurer que son soutien soit le dernier dont il ait besoin pour franchir un obstacle invisible. « Tu devrais totalement t’y remettre, la piscine est chauffée en plus, t’auras pas froid  comme ça. Puis y’a plein de profs pour te donner des cours aussi, si t’as oublié comment on faisait. » Il laisse échapper un sourire sincère, associant les cours de natation dont elle parle à ceux consistant à apprendre comment nager. “Je peux rentrer dans un bassin sans couler encore, je te le jure.” Il reprend donc, sur l’éternel même ton de la plaisanterie. “Tu me le dis la prochaine fois que t’y retournes ? Je viendrai, si je suis libre.” Et puisqu’il est loin d’être réellement occupé par son travail, dernièrement, il y a fort à parier qu’il pourra se permettre de passer une heure ou deux à la piscine à ses côtés, pour passer un peu de temps avec son amie autant que pour reprendre le goût aux sorties variées et aux activités sportives.

Finalement, Maria change drastiquement de sujet pour lui faire une autre proposition, celle de l’aider à s’occuper des elèves lors de ses cours de sport ; le genre d’annonce qu’il n’aurait jamais pu anticiper et pour laquelle la surprise se lit sur ses yeux. Il ne lui faut néanmoins pas longtemps avant de répondre par la positive à sa demande, non sans lui demander de préciser dans quelle mesure elle aurait besoin de lui et de ses services, soucieux de se préparer au mieux pour le moment venu. « Oui, j'ai quelques idées. Ça serait surtout pour garder un œil sur eux pendant les exercices, parce que j'ai essayé, mais c'est pas facile de surveiller une trentaine de marmots en même temps. » Et pour ça, il jure qu’il est doué. Il pourra avoir l'œil partout, il pourra devenir le meilleur ami de n’importe quel ado qui acceptera de lui tenir un peu la discussion, entre trois matchs et deux exercices en tout genre, qu’il laisse pleinement Maria gérer. “Ca, je peux m’en charger.” Après tout, ce serait comme être le père de quelques adolescentes, et un jour c’est ce à quoi ressemblera sa vie (bien que Rory et lui et leur idée d’une “grande famille” ne compte pas trente enfants, il faut l’avouer). Déjà, cette pensée a tout pour l’attendrir et lui procurer une certaine joie, qui vont de pair avec l’envie omniprésente d’aller au bout des idées de Maria. « Puis j'avais aussi pensé à faire des demi-groupes en fonction de leur niveau, je trouve que ça serait surement mieux pour eux, comme ça les plus avancés se feront pas chier et les moins sportifs viendront peut-être moins à reculons. » Il hoche à nouveau la tête, ne pouvant que tomber d’accord avec elle. “Je m’occuperai des moins forts, si tu veux.” Parce qu’il aura la délicatesse de leur trouver des exercices à leur niveau qui, sans les ménager, les feront progresser autant qu’ils le peuvent, sans avoir la moindre pression d’élèves éternellement meilleurs qu’eux.

En plus de simplement répondre par la positive, il s’imagine déjà le moment venu, entouré d’adolescents plus ou moins envieux d’apprendre. Il a surtout hâte du moment où il aura l’impression de se sentir utile, pour son amie mais aussi pour ces enfants qui ne demande finalement qu’un peu d’attention. “Tu sais, je pensais pas t’en parler comme ça, mais, même si j’ai envie de t’aider et que ça me rend sincèrement heureux, je suis pas certain que je sois le meilleur candidat sur le long terme.” Il veut la prévenir, quitte à ce qu’elle envisage peut-être un autre candidat pour le rôle et que ça provoque à Swann un pincement au coeur. Il pourrait l’accepter sans trop de mal. “On a entamé une procédure d’adoption, avec Rory, et même si on peut pas savoir quand on arrivera au bout… J’aurai sûrement la tête ailleurs, le moment venu.” Quand il sera papa ; voilà ce qu’il n’ose pas encore statuer tout haut, certain que trop d’espoirs finiront par le tuer. Ils n’en sont qu’au début et n’ont pas l’ombre d’une idée de la date à laquelle ils verront enfin le bout du tunnel, mais puisque cela risque de toucher Maria, elle mérite de le savoir. Elle mérite aussi de le savoir parce que cela représente une étape importante de sa vie et qu’il est heureux de la partager, tout simplement, même s’il se contente encore pour le moment de se mordre l’intérieur de la joue à l’image d’un adolescent, justement, ses mains enroulées autour de la tasse brûlante.

Son humour ne semble pas prendre auprès de Maria mais il n’en fait pas une montagne, se contentant de remuer la cuillère au fond de sa tasse, la fumée s’en échappant le laissant encore croire que le thé est bien trop chaud pour être bu. « Je préfère être prudente. C’est toujours mieux de réapprendre les bases quand ça fait un moment qu’on est redevenu exclusivement une espèce terrestre. » Bien sûr, oui. Dit comme ça, il ne peut définitivement pas aller contre, à commencer parce qu’il n’en a pas envie et qu’il n’est pas doté du moindre esprit de contradiction. Au contraire, Swann préfère largement contenter ses proches et tendre en leur sens, quand il le pense du moins. Affirmer sa position n’est pas une chose qu’il craint. “Je comprends, oui.” Il serait le dernier à refuser de la jouer sécuritaire, raison pour laquelle il ajoute un sourire au moment de lui répondre. Ils iront pas à pas lorsqu’il l’accompagnera pour la première fois à la piscine à nouveau, à n’en pas douter. Et de son côté, il sera tout simplement heureux de se changer les idées et de faire une chose nouvelle de ses journées. - Pas de soucis, je t’enverrais un message avant d’y aller. Je pense y retourner après le boulot dans la semaine sûrement. » Et il répondra présent, à n’en pas douter. Le dernier tournage de Rory est terminé depuis quelque temps maintenant et puisque le suivre de plateaux en plateaux est la seule raison pour laquelle il a changé de métier, Swann reste désormais chez eux, alors que son fiancé est encore voué à faire quelques interviews et shootings ici et là, pour préparer la promotion du film. Il n’y a rien dont il abuse, rien dont il ne prévienne pas Swann en avance non plus. Il le lui a dit et l’anglais n’a aucun mal à le croire en retour: leur vie de couple passe avant ses rêves hollywoodiens. “Alors on se verra dans la semaine.” Et il attendra sagement sa proposition.

D’un sujet à un autre, il accepte sur un coup de et de lui donner un coup de main avec ses élèves, quand bien même il n’a véritablement aucune idée de ce que cela peut impliquer. Il se contente de penser que cela se rapproche de son ancien travail auprès des Juniors de foot de la ville, et il ne fait que penser par dessus qu’il se sentira au moins utile. Et qu’il en a cruellement besoin, dernièrement. « Super ! Ça me sauve un peu la vie que tu puisses venir je vais pas te mentir. » Il sourit à nouveau, heureux d’entendre que sa présence pourra véritablement l’aider et qu’elle ne cherche pas seulement à lui trouver des occupations. “Comme je te l’ai dit, je serai heureux d’aider.” De ce fait, comme il le voit pourtant arriver, elle n’a pas à le remercier outre mesure. Ils n’auront qu’à dire qu’ils se rendent chacun service, et ce ne serait rien d’autre que la pure vérité. Pour autant, la conscience de Swann lui impose d’ajouter quelques détails, à commencer par le fait qu’il n’est pas certain de pouvoir assurer son aide sur le long terme, à cause de ses futures fonctions de père, qui devraient arriver dans l’année à venir si les choses se passent comme il l’espère. « Blimey ! Mais c'est super comme nouvelle ça ! Oh putain je suis trop contente pour vous ! » Son bonheur fait plaisir à voir, tout comme Swann était de toute façon naturellement heureux de lui faire part de la nouvelle, laquelle est encore secrètement cachée au sein de leur couple et de leurs plus proches amis et familles. “Je le suis aussi.” Il avoue, l’air enfantin, les joues peu à peu rosies sous le coup de l’émotion. Il est terriblement heureux de cette annonce et de tout ce dont leur avenir est déjà devenu synonyme. « J'espère que ça va bien se passer pour vous et que tout le processus ne sera pas trop long. » - “On s’est préparé aux longueurs administratives, on sait à quoi s’attendre.” Il voudrait à son tour espérer que le processus ne sera pas trop long mais pour dire vrai, il n’y croit pas un seul instant, justement parce qu’il s’est un peu trop préparé à toutes les sortes de démarches pour en ignorer leur chance de mal se terminer.

« Et je comprends totalement si tu veux prendre un congé paternité, ta famille passe avant c'est évident. » Il ouvre la bouche un instant sans qu’aucun mot n’en sorte, sans doute pris de court par le terme de congé paternité. C’est un concept tangible auquel il n’avait pas encore osé penser, pour un bon millier de raisons différentes. “On verra le moment venu, d’accord ? Je voulais juste te prévenir.” Et de son côté, il est surtout terrifié par les faux espoirs, raison pour laquelle il n’y a rien de véritablement précis dans ses mots. Il sait qu’il sera père un jour, il le sait du plus profond de son cœur, mais le quand est une question à laquelle il n’a certainement pas la réponse. « Mais en attendant, si t'es toujours partant pour m'aider, moi je vois pas d'inconvénients à ce que ce ne soit pas forcément permanent. » Son thé maintenant tiède, il le porte finalement à ses lèvres, sans oublier de hocher la tête. “Tu m’enverras par message les horaires aussi ? Pour le moment, je suis pleinement disponible, alors autant en profiter.” Pour le moment, tout est aussi simple que cela, alors ils peuvent en profiter sans se soucier du reste, si ce n’est de finir de profiter de leur sortie au café.