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@maisie moriarty

(c) daisy-johnson.tumblr.com

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Damon s’était pourtant promis de ne plus se laisser glisser sur cette pente là. Cela avait été long comme processus, et il était arrivé à cette conclusion qu’après de longues discussions avec lui-même - car pour ce sujet là, il n’avait jamais réussi à trouver l’interlocuteur idéal pour partager ses pensées, ses émotions -, mais il savait que ce n’était bon pour personne si il persistait à emprunter ce chemin là. Pas que l’envie n’avait pas été présente plus d’une fois, loin de là même. Simplement ses actions et ses décisions avaient fait assez de dégâts de la sorte pour qu’il continue ainsi sans sciemment se rendre compte des dommages collatéraux qu’il causait autour de lui. Alors, après sa dernière visite chez Angus après l’enterrement de la mère de ce dernier, Damon s’était simplement effacé de la vie du jeune homme. Bien sur, ils gravitaient toujours dans des cercles de vie assez proches, se rendant trop de jours par semaine au sein de la même entreprise, mais hormis un sourire en coin chargé de tendresse pour lui, l’italien ne s’était jamais permis d’aller plus loin. Même lorsque l’occasion pour le travail de parler à Angus s’était présentée - et c’était arrivé là plus d’une fois -, il avait passé le relai et les discussions en question à d’autres de ses collèges. Cela lui brisait le coeur, mais c’était le moins qu’il pouvait faire afin de rendre à Sutton l’espace nécessaire pour respirer: il avait tant envahi cet endroit sur les dernières années que cela en devenait étouffant pour tout le monde. Damon était donc devenu un fantôme, un souvenir, quelqu’un que l’on évoquait avec un sourire nostalgique sur les lèvres. Tant de choses différentes auraient pu en ressortir, de cette histoire; au moins deux coeurs auraient pu ne pas être brisés, si seulement la vie était aussi simple. Cette dernière ne l’avait jamais été, ne le serait jamais, et la chose la plus saine à faire pour Damon était de s’habituer à l’absence prolongée d’Angus dans son quotidien, puisque leurs chemins ne se croiseraient plus de la même façon désormais.

Et il avait tenu sa promesse, pendant de longues semaines et tout autant de semaines qui s’y associaient. Il était resté en marge d’une vie où il n’avait plus sa place, à observer de loin le renouveau d’un homme qu’il avait réussi à briser à coup d’amour trop prononcé. Car c’était ça le plus dur dans cette situation, pour Damon: il avait aimé Angus. De tout son coeur, de tout son être, de tout son corps. Mais l’amour était ravageur, l’amour était espiègle; s’en remettre était une aventure à lui seul, une fois qu’il avait cessé de vous donner du bonheur. Il savait pourtant qu’agir de la sorte, ne plus s’interposer, était ce dont ils avaient tous deux besoins. Et promis qu’il s’y serait tenu s’il ne s’était pas mis à remarquer l’absence de Sutton. Une semaine, au début; il s’était dit qu’il avait enfin songé à s’octroyer des congés pour profiter un peu plus de la présence de son petit frère, et de sa nouvelle copine peut-être également - même si cette pensée là ne le rendait pas ravi bien sur, il n’avait cependant pas le moindre mot à dire sur la situation. Une seconde semaine avait fini par s’ajouter à la première, et même si c’était toujours bon signe cela avait fait froncer les sourcils de l’italien. Angus n’était pas du genre à lâcher du lest, à se reposer sur ses lauriers; s’absenter du travail autant de temps ne le ressemblait pas. Au début de la troisième semaine, Damon s’était autorisé à réellement s’inquiéter et était monté voir la responsables des ressources humaines - c’était peut-être le seul avantage d’être, encore pour le moment, vu comme le fils du patron c’était que les informations lui tombaient toutes prêtes dans la bouche. Avec plus de détails que ce qu’il pouvait espérer, souvent. « Angus Sutton ? Il a démissionné mon chou. Y’a déjà plus d’un mois, juste avant que ton père nous annonce son départ aussi. Angus disait qu’il le supportait plus, ce que j’ai jamais compris parce-que Crocodilo était près à le prendre sous son aile… » Il n’avait pas écouté la suite de ces bavardages de commère, parce-qu’il avait eu l’information dont il avait besoin. Ainsi, Angus avait finalement pris la décision de partir. Une espèce de vague de soulagement souffla sur le coeur de Damon lorsqu’il réalisa que, peut-être, tout n’était pas perdu pour le brun et que recommencer sa carrière dans une autre entreprise était la meilleure chose qui pouvait lui arriver. Au moins, il n’aurait pas sur son dos le grand patron qui avait envie de l’égorger pour avoir soi-disant corrompu son fils - la belle blague.

Saviez vous que lorsque vous alliez chez le fleuriste, et que vous demandiez une petite carte avec écrit Félicitations ! dessus pour agrémenter les fleurs, la personne face à vous derrière le comptoir risquait de vous demander si c’était pour un enfant à venir ou un mariage célébré ? Damon s’attendait à beaucoup de chose mais en rien à cette question, si bien qu’il avait bégayé et s’était donc retrouvé avec un joli C’est un garçon ! accroché avec un ruban bleu sur le papier qui enveloppait le bouquet. Il avouait sans mal ne pas avoir maîtrisé la situation, sur ce coup là - mais il était à peu près sur que cela tirerait un rire à Angus de connaître cette histoire, et Dieu qu’il aimait l’entendre rire. Avant de se pointer à l’appartement portant le nom de Sutton, il était passé récupérer une boite de chocolats chez le chocolatiers, pour assurer tous ses arrières - il savait parfaitement que Samuel lorgnerait sur cette dernière et serait ainsi moins occupé à vouloir écouter leur conversation d’adultes. Pas qu’il y aurait réellement quelque-chose à cacher: Damon y allait juste pour le féliciter pour sa décision, et surement pour son nouveau poste ailleurs. Certes, il brisait sa promesse de ne plus réapparaître sans cas d’extrême urgence dans le quotidien d’Angus, mais n’était-ce pas là presque un cas d’extrême urgence ? Avec un sourire pareil sur ses lèvres, de toutes façons, aucun des deux Sutton n’oserait le laisser sur le pallier. Alors, ce fut avec une confidence lui gonflant un brin de trop le torse qu’il avait frappé quelques coups sur le bois de la porte. Parce-qu’il n’avait absolument aucune idée de tout ce qui pourrait mal tourner en cet instant, simplement heureux de pouvoir montrer à Angus que, même de loin et en silence, il était fier de lui. « Promis, je reste pas longtemps ! » Il avait élevé la voix, afin de pouvoir se faire entendre depuis l’intérieur de l’appartement, où il entendait un peu de bruit se faire. Rien de nouveau sous le soleil non plus, rien d’inquiétant une fois de plus. « C’est Damon, au fait. » Qu’il se permit d’ajouter sur une voix moins bien assurée cette fois. Au cas où il n'ait pas reconnu sa voix, au cas où - qu'il osait penser avec un petit rire dans son esprit - il aurait oublié à quoi pouvait ressembler la voix de celui qui l'avait toujours dévoré du regard dès l'instant où leurs chemins s'étaient croisés. C'est Damon, comme si ce dernier n'était pas parfaitement au courant en plus de ça que peu de personnes connaissaient cette adresse et se seraient permis de venir jusqu'ici; il y avait mille et une raisons que pour que ce soit lui derrière cette porte, et pour que sa présence soit reconnue immédiatement. En tous cas, il essayait de se rassurer avec de telles pensées comme il le pouvait.

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@damon williams

(c) harley & luleaby

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(LOGAN CITY, LOGEMENTS). Ça fait des jours que je n’ai pas quitté cet appartement, trop occupée à vouloir m’assurer de le laisser derrière moi au plus vite. Je ne supporte plus de vivre ici et je ne resterai pas une minute de plus que nécessaire entre ces murs qui me rappellent constamment mon erreur. Il serait plus simple de les conjuguer au pluriel, en réalité, mais elles découlent toutes de la même source ; et de ce mensonge que j’ai inventé de toute pièce seulement pour faire enrager mon abruti de frère. J’aurais dû le savoir, que ça tournerait mal, et qu’il y aurait des dommages collatéraux. Mais d’ordinaire, j’en fais les frais, je n’étends pas ceux-ci aux autres. Mais cette fois-ci, j’ai atteint Angus et Samuel. Et je ne peux même pas dire que c’est malgré moi ; je savais très bien que c’était une possibilité. Je voulais seulement croire, comme trop souvent, que j’arriverais à prendre le dessus sur mon frère. Mais mon arrogance a  de nouveau causé des dégâts que je ne sais pas réparer. Que je n’ai pas voulu réparer. Ou plutôt, je l’ai espéré, mais je n’ai même pas essayé, parce que le combat me semblait perdu d’avance. Incapable d’avouer à Angus comme je me sentais par rapport à toute cette affaire, piégée entre ma foutue loyauté induite par les liens du sang vis-à-vis de Seth et mon affection non-assumée pour mon colocataire, j’ai pris la décision de ne pas en prendre, justement. J’ai laissé des messages à Angus pour lui confirmer que j’étais toujours en vie et que je paierai ma part du loyer. Et si je me suis excusée par écrans interposés, je n’ai pas été capable de le faire de vive voix, consciente que mes émotions et ma culpabilité finiraient par me trahir. Et qu’en vue de la situation, il aurait eu bien d’autres choses à gérer que mes larmes et mes justifications bancales alors que je ne suis même pas concernée. Et que je pouvais pas lui infliger ça. Je pouvais pas lui infliger une confrontation alors qu’il a probablement perdu son boulot et, avec lui, toute la sécurité qu’il était en mesure d’offrir à Sam depuis le décès de leur mère. Sam a certainement perdu ses repères et j’y ai contribué, d’une façon ou d’une autre, alors que je m’étais toujours jurée de protéger ce gosse comme s’il était le mien, malgré l’inimité que je pouvais ressentir à l’égard d’Angus. On s’était juré, dans notre foutue bataille, de ne jamais toucher à nos frères. Et j’ai pas su respecter ma promesse ; j’ai pas su non plus l’assumer.

J’ai préféré fuir et les jours se sont transformés en des semaines, m’assurant de passer récupérer quelques affaires en l’absence de mes deux colocataires pour ne pas avoir à les croiser et à tenir une conversation dont je suis incapable de maîtriser le contenu. Je sais que je suis fautive. Je sais que mon attitude n’est pas adéquate, qu’il aurait fallu affronter Angus pour qu’il puisse au moins me balancer toutes ces choses qu’il doit penser de moi pour l’aider à se soulager et à mieux vivre toute cette histoire. Il ne peut pas s’en prendre à un Seth enfermé dans sa cellule et j’aurais dû me proposer comme substitut. Parce que je partage le même sang que Seth, parce que je nous ai mis dans cette position en le suppliant de jouer ce rôle qui n’aurait jamais dû aller aussi loin. J’aurais dû l’écouter cracher sa colère sur moi et j’aurais dû accepter celle-ci. J’aurais dû et j’aurais pu, parce qu’il n’était pas censé être aussi important pour moi, Angus et qu’en ce sens toute sa haine n’aurait pas dû m’atteindre. Mais je pouvais pas. Je pouvais pas accepter de l’entendre prononcer des mots que je redoute tant, des mots que j’ai déjà entendu de tant d’autres avant lui, d’être le sujet d’une déception que j’ai déjà bien trop souvent infligée aux autres. Je pouvais pas tolérer qu’il se range à ses mêmes autres en découvrant la personne que je peux être et que, je promets, j’essaie de tenir à distance. Mais elle revient toujours ; et mes mauvaises décisions finissent toujours par détruire ce que j’essaie de construire. Je sais même pas ce que j’essayais de construire avec lui. Je sais juste que ça me manque.

Et que je le déteste. Je le déteste autant qu’il me déteste, alors qu’il est parti sans m’en informer et que je ne suis pas en droit de lui en vouloir. Mais je lui en veux, je lui en veux d’être parti et de m’avoir laissée derrière lui, de m’avoir fait comprendre que je ne valais pas mieux qu’un post-it sur un comptoir, alors même que je suis celle qui l’a obligée à en arriver-là. Je le déteste parce que j’ai déjà épuisé toute la haine que je peux retourner contre moi-même et que j’ai besoin de l’étendre à d’autres pour ne pas devenir folle à la contenir. Je le déteste de m’obliger à faire mes cartons dans cet environnement qui était devenu le mien et qui est désormais à nouveau inconnu. Je le déteste que chaque chose dans cet appartement se rapporte à lui et à son absence. « Promis, je reste pas longtemps ! » Et je le déteste de me laisser gérer les visites impromptues et les explications que je n’ai plus la force de donner alors que j’ignore volontairement la personne derrière la porte pour me remettre à mon déménagement que je souhaite terminer au plus vite. « C’est Damon, au fait. » Mais il insiste et mon intuition me dit qu’il insistera tant qu’il n’aura pas obtenu la réponse qu’il désire tant. Si ce n’est pas aujourd’hui, ce sera un autre jour, un où je ne serai plus là et je pourrais très bien le laisser s’épuiser derrière la porte, mais je ne peux m’y résoudre et je finis par aller ouvrir. « Et moi c’est Maisie et je connais pas de Damon. » Que j’annonce sans faire d’efforts de sympathie, dans une tentative de l’inviter à retourner d’où il vient ou à décliner plus précisément son identité – je ne me suis pas encore décidée quant à l’option que je préfère.

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@maisie moriarty

(c) daisy-johnson.tumblr.com

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Il sentait qu’il y avait une présence dans l’appartement, autant parce-qu’il y avait de la lumière à l’intérieur que parce-que son instinct lui dictait que c’était effectivement le cas. Mais alors qu’il était désormais devant la porte, Damon n’était plus autant sur de son coup quant à l’idée de se pointer ici sans prévenir à l’avance. Il aurait pu envoyer un message à Angus, le prévenir qu’il comptait passer,  attendre un retour de sa part pour agir de la sorte. Mais il avait laissé sa maigre impulsivité gagner sur le coup et désormais, il regrettait presque de s’imposer de la sorte. Si le silence et la distance avaient été de mise entre eux deux, ce n’était pas pour rien; il balayait ces derniers d’un revers de la main, comme si de rien n’était, en cet instant alors qu’il patientait devant la porte close. Angus pourrait l’envoyer paitre s’il désirait, mais qu’au moins il le dise clairement - l’italien laisserait quand même le bouquet de fleurs sur le pas de la porte.

Ce ne fut en rien le brun qui apparut cependant, alors que le pan de bois se dérobait sous ses yeux. Et de toutes les visions qu’il aurait désiré avoir en cet instant Damon, celle sous ses yeux n’était pas sa préférée. « Et moi c’est Maisie et je connais pas de Damon. » Les yeux clairs de l’italien s’accrochèrent au moindre trait du visage de la jeune femme, comme s’il les découvrait pour la première fois tout en les connaissant par coeur. Bien sur que c’était Maisie qui lui ouvrait la porte, pourquoi se trouvait-il étonné comme ça après tout. Ses paupières papillonnèrent un instant supplémentaire, avant que Damon ne détourne le regard. Bien sur aussi qu’elle en connaissait pas de Damon. « Maisie, salut. » En revanche, bien malgré lui surement, il savait parfaitement qui était la jeune femme devant lui. Autant parce-que Angus n’avait eu guère le choix que de lui en parler - il pouvait remercier Samuel sur ce coup là, et le fait que lui n’avait su mentir à Damon -, que parce-que son propre frère faisait partie du paysage plus ou moins proche de l’italien. S’il n’y avait pas eu cette rencontre là, avec Murphy et le Moriarty, au restaurant quelques mois plus tôt il n’aurait jamais eu accès au visage de celle qui se tenait devant lui. S’il n’avait pas su faire un plus un assez rapidement, et connecter toutes les pièces du puzzle, Damon aurait pu ne pas la reconnaitre aujourd’hui. Malheureusement pour lui, il était un peu trop malin pour ne pas réussir à comprendre les choses évidentes de la sorte. « Je m’attendais pas à ce que ce soit toi qui ouvre la porte. » Il avait toujours au moins l’honnêteté pour lui, Williams. « Angus est là ? » Parce-que de toutes façons, c’était bien beau que ce soit elle qui se tienne dans l’encadrement de la porte, mais ce n’était pas Maisie qu’il désirait voir aujourd’hui. Autant parce-qu’il ne tenait pas vraiment à faire connaître avec celle qui partageait désormais le quotidien d’Angus, que parce-qu’il était réellement là pour féliciter Sutton d’avoir réussi à partir de la MHI malgré tout ce qu’elle avait pu un jour représenter pour lui. « Vraiment promis, j’en ai pas pour longtemps. Je veux pas vous déranger. » Parce-qu’il savait parfaitement que sa place était hors du tableau principal désormais, et il avait fait la paix avec cette idée, avec le temps. Et que si Maisie était celle qui arrivait à rendre le sourire à Angus, c’était tout ce qu’il avait besoin d’avoir comme information. Peut-être qu’il était un peu vexé que la jeune femme ne sache pas qui il était, mais il n’avait pas prévu de causer de scène en cet instant et comptait tenir sa promesse: il passait et repartait aussi vite que la première action serait effectuée. « Je veux juste le féliciter et après je pars. » Alors il insistait un instant pour parvenir à ses fins, sentant le jugement dans le regard de celle qui se tenait face à lui depuis qu’elle avait daigné ouvrir la porte. Le regard de Damon se posa un instant dans celui de Maisie, avant de se laisser aller au delà de son épaule, tentant d’attraper la moindre information provenant de l’intérieur de l’appartement. Il était de toutes façons plus grand qu’elle, ce n’était pas sa silhouette qui l’empêchait de jouer au curieux.

tw : langage cru

Je cherche dans ma mémoire, mais je ne trouve aucune mention d’un Damon qui saurait me permettre d’associer ce visage à un souvenir. Et quand bien même son chemin aurait déjà croisé le mien que je ne suis pas d’humeur à jouer aux devinettes, ce qui s’entend à la manière dont je le reçois. Je le regrette un instant, bien consciente qu’il n’y est pour rien quant à ma mauvaise humeur, mais je n’arrive pas pour autant à me montrer plus chaleureuse. Parce qu’il ne me faut pas longtemps pour comprendre une chose ; s’il ne me connaît pas, il connaît probablement l’autre occupant des lieux, celui dont le nom est longtemps resté seul sur la sonnette avant que le mien ne le rejoigne quelques mois plus tôt. La collocation a été tellement courte que je ne peux pas me surprendre d’ignorer l’identité de la plupart des connaissances d’Angus, ce n’est pas comme s’il appréciait les visites ou me parlait de ses proches, de toute évidence. J’analyse toujours les traits de Damon sans parvenir à les identifier, finissant par définitivement abdiquer alors que mes sourcils se froncent face à sa familiarité. « Je m’attendais pas à ce que ce soit toi qui ouvre la porte. » - Et je déteste cette impression de ne pas être à armes égales, alors qu’il semble en connaître plus sur moi que je n’en connais sur lui. Néanmoins, il confirme mes craintes et le fait qu’il est bien là pour Angus – j’imagine qu’à défaut de me présenter aux autres, il a au moins souligné qu’il avait eu une nouvelle colocataire. Malheureusement pour Damon, ça ne m’aide pas à être plus chaleureuse, alors que sans même avoir mentionné Angus, le seul fait qu’il soit celui qui nous lie suffit à augmenter ma colère contre le fuyard. Je n’ai plus aucune envie de parler de lui, de penser à lui, d’entendre son nom ou quoi que ce soit qui se rapporte tout simplement à lui et Damon, involontairement, ne fait que ça. « On se connait ? » Je lui demande sans quitter son regard, tout en sachant la réponse à cette question. « Angus est là ? » Angus, donc, et ma mâchoire se crispe. Ce connard – pardon, c’est impoli ? – s’est barré sans même prévenir son entourage. Depuis que j’ai retrouvé l’appartement vidé de sa présence et de ses affaires, je me suis interrogée quant à savoir si d’autres avaient eu le droit au même traitement que moi, s’ils étaient dans le flou de ce qu’il est advenu de lui. J’imagine que j’ai un semblant de réponse ; et loin de me réconforter sur le fait que je n’ai pas été une exception quant aux circonstances de sa fuite, je suis agacée de cette posture de messagère – parce qu’il y a bien quelqu’un qui va devoir annoncer à Damon qu’Angus n’est pas là. Qu’Angus n’est plus là. « Vraiment promis, j’en ai pas pour longtemps. Je veux pas vous déranger. » J’ai presque de la peine pour cet inconnu alors qu’il tient réellement à apercevoir le Sutton ; et je déteste être l’annonciatrice de mauvaises nouvelles malgré ma rancœur à l’égard du principal concerné. « Il est pas là. » Que je finis par dire alors que je réfléchis toujours à une façon d’amener les choses sans être trop brutale – alors qu’en réalité, j’ai juste envie de l’envoyer se faire foutre au même titre qu’Angus, pacre que s’il est son ami, alors il devient mon ennemi par la force de la rancune. « Je veux juste le féliciter et après je pars. » - « Il va pas rentrer, j’veux dire. » Ce n’est pas une histoire de quelques minutes, de quelques heures, c’est une histoire dont j’ignore la temporalité, en réalité, alors qu’Angus semble être parti pour ne jamais revenir. Son regard qui guette au-dessus de mon crâne m’énerve plus que de raison alors qu’il ne semble pas croire en mes paroles – je ne devrais pas lui en vouloir, moi-même je n’ai pas voulu croire en sa manière de faire. « Il est pas là, je te dis ! » Ma voix porte un peu plus, alors que je me décale pour le laisser entrer et que je lui montre le chemin avec ma main. « Tu peux fouiller si tu veux. Tu trouveras pas ses affaires. » Même si l’appartement est encore meublé, il suffit qu’il observe les marques des cadres qui ont disparu au mur ou qu’il fonce en direction de la chambre d’Angus pour découvrir les commodes vidées de ses vêtements. « Il s’est barré et j’ai aucune idée d’où il est. » D’accord, j’aurais pu faire preuve de plus de délicatesse, mais j’en suis incapable et c’est lui qui paie les pots cassés. Je crois que j’apprécie un peu trop le fait qu’il soit un inconnu, un peu trop pour justifier de déverser ma colère sur lui sans avoir à en payer les conséquences puisqu’au moment où je fermerai cette porte, il disparaîtra de ma vie aussi vite qu’il n’est arrivé. « Alors si t’as la chance d’avoir de ses nouvelles, tu peux l’envoyer se faire foutre de ma part, merci. » Je laisse échapper un soupir face à ma colère qui ne devrait pas en être ; après tout, je savais très bien qu’Angus et moi, nous n’étions pas voués à réellement devenir amis. Ça a toujours été un jeu et il était évident que le jour où il prendrait fin serait abrupt, seulement, j’étais persuadée d’avoir l’avantage. « Tu devais le féliciter pour quoi, au juste ? D’être un lâche qui abandonne tout le monde ? » Ouais, félicitations Sutton et enfonce-toi bien ton gâteau dans le cul.

@Damon Williams

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@maisie moriarty

(c) daisy-johnson.tumblr.com

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La surprise qu’il pouvait lire sur les traits de la jeune femme face à lui se devaient de n’être que le pale reflet de celle qu’il ressentait en cet instant. Il ne savait pas qu’il avait la possibilité de tomber sur elle, en toquant à cette porte. Il ne pensait pas qu’une autre personne qu’Angus pouvait habiter à cette adresse - et en toute franchise, cela lui faisait mal au coeur pour mille et une raisons, que ce soit le cas. « On se connait ? » Damon pinça légèrement ses lèvres, gardant le silence un moment supplémentaire. Ils ne se connaissaient pas, non, ou pas officiellement: lui savait parfaitement qui se tenait sur le pas de cette porte, même si c’était plutôt par un concours de circonstances que par des informations données par l’autre principal intéressé. Et pour rajouter une touche d’ironie à toute cette affaire, il connaissait même le frère de la demoiselle. En revanche, il était forcé de voir que le contraire n’était en rien vrai, et qu’Angus n’avait pas du piper le moindre mot quant à qui il était - ou il n’avait su appuyer de photo sur le nom qui s’associait à sa personne, à minima. Elle était dans le flou, ce n’était pas du tout son cas, et même s’il aurait préféré que ce soit pas le cas, le coeur de Damon eut un pincement qui n’était en rien agréable. « Non, on se connait pas vraiment. » Et même si Maisie paraissait presque adorable à première vue - si on mettait de côté la mauvaise humeur qu’elle portait dans ce regard qui lui permettait d’observer l’italien -, ce n’était pas pour elle qu’il était venu jusqu’ici aujourd’hui, Damon.

C’était Angus qu’il souhaitait voir. « Il est pas là. » Peut-être ne voulait-il surtout pas être dérangé, et encore moins par la tête blonde qui se tenait sur le pas de sa porte. Il pouvait l’entendre, ça, Damon; il était heureux de pouvoir le féliciter en personne mais s’il ne souhaitait pas avoir de contact avec lui, il n’y aurait pas mort d’homme: les choses n’avaient qu’à être dites, il laisserait le boulet à Maisie et repartirait aussi vite qu’il était arriver. « Il va pas rentrer, j’veux dire. » Et alors que le regard du jeune homme ne pouvait s’empêcher de passer par dessus la brune, de regarder au delà de sa présence s’il croisait celle de quelqu’un d’autre, ses sourcils se froncèrent un brin sur son visage. Il va pas rentrer était tout de même une étrange façon d’annoncer qu’une personne n’était pas disponible. Peut-être n’était-il pas encore rentré, plutôt ?

« Il est pas là, je te dis ! » La voix de Maisie avait perdu de son calme, et Damon ne sut faire autrement cette-fois ci que de porter son attention sur elle. Il ne voulait pas être intrusif, mais il l’avait dit lorsqu’elle avait ouvert la porte: il ne s’attendait pas à la voir ici, et ce n’était de toutes façons pas pour elle qu’il avait fait le déplacement. Il n’était pas contre l’idée qu’ils papotent un petit peu - ils pourraient échanger sur Angus, leur point commun et le rôle qu’il remplissait auprès de la jeune femme après l’avoir rempli aux côtés de Damon -, mais malheureusement il préférait pouvoir voir Angus le plus rapidement possible pour ne pas l’importuner de nouveau comme il l’avait jusqu’alors trop souvent fait. « Il est pas là, j’ai compris, excuse moi. » Il comprenait alors qu’il avait été, malgré lui mais l aurait pu se douter de cette finalité, de trop dans cette équation. Cependant, elle ne comptait pas se contenter de lui dire une nouvelle fois qu’il n’était pas là, puisqu’elle alla même jusqu’à se décoller légèrement pour laisser une meilleure vue à Damon sur l’intérieur de l’appartement. « Tu peux fouiller si tu veux. Tu trouveras pas ses affaires. » Finalement, regarder à l’intérieur de l’habitation n’était plus sa priorité: toute son attention était reportée sur la jeune femme désormais. « Pourquoi je trouverais pas ses affaires ? » Il avait l’impression que son coeur avait compris plus rapidement que sa tête, ou se doutait de quelque-chose, alors qu’il accélérait la cadence et lui laissait d’avance la bouche bien plus sèche. « Il s’est barré et j’ai aucune idée d’où il est. » Toute trace de bonne humeur ou d’empressement s’effaça du visage de l’italien, alors que ses bras en tombaient presque le long de son corps. « Quoi ? » Prononcé comme une supplication, du bout des lèvres - parce-qu’il avait mal entendu, hein, c’était forcément ça ?

« Alors si t’as la chance d’avoir de ses nouvelles, tu peux l’envoyer se faire foutre de ma part, merci. » Il avait l’impression qu’un million d’informations tentaient d’entrer dans son crâne, et toutes en même temps. « Tu devais le féliciter pour quoi, au juste ? D’être un lâche qui abandonne tout le monde ? » - « D’avoir démissionné. Je voulais le féliciter de s’être barré de la Michael Hills, je… » Son regard, qui se teintait d’un voile que toute personne connaissant un minimum Damon pouvait reconnaître d’avance, s’abaissa pour se concentrer sur ses chaussures et celles de la jeune femme face à lui. « J’arrive pas à croire, il… Il est vraiment parti ? » Parce-que ce n’était, de toutes façons, pas le genre de nouvelles qui faisait plaisir à entendre. « Je veux dire… » Il avait malheureusement l’impression qu’une partie de lui n’était pas tant surprise de cette nouvelle, et c’était peut-être celle qui faisait le plus mal. « Je comprends pas. » Et les yeux qu’il leva en direction de Maisie étaient déjà bordés de larmes, parce-qu’il ne savait rien faire de mieux que d’être trop sensible à la moindre parole prononcée, chargée d’une nouvelle qui n’était pas forcément bonne - surtout lorsque cela concernait quelqu’un qui comptait pour lui. Angus comptait pour lui, comme il avait compté depuis le premier jour où leurs chemins s’étaient croisés. « Il est parti depuis quand ? » Oh, elle n’était déjà pas ravie de l’avoir trouvé sur le pas de la porte de l’appartement, mais Maisie allait définitivement vouloir lui faire la peau s’il continuait à être collant de la sorte. Ce n’était pas bien grave: il avait un bouquet qui n’avait plus de destinataire pour se faire pardonner.

« Non, on se connait pas vraiment. » Le type me tutoie aussitôt la porte ouverte et même si on a l’air sur un pied d’égalité concernant notre âge, ça n’est pas le cas concernant notre connaissance de l’autre, j’en suis persuadée. Il est trop familier avec moi, comme s’il était déjà en mesure de mettre un prénom sur mon visage avant que je le fasse par moi-même. « Pas du tout, même. » Je précise au cas où l’évidence semble lui échapper. J’ai aucune foutue idée de qui il est et, surtout, il n’a pas l’air décidé à m’aider à y voir plus clair, merci bien. Je déteste cette impression d’être désavantagée alors que ma présence semble contrecarrer ses plans, sans même savoir pour quelle raison. Ou plutôt, j’aimerais autant que la raison que j’ai en tête ne soit pas la bonne alors qu’il me paraît de plus en plus évident que c’est l’autre locataire (le précédent ?) des lieux dont il désire la présence. Sauf que je n’ai aucune envie de parler d’Angus, pas plus que je n’ai envie de faire le messager pour les proches qu’il n’a pas tenu bon de tenir au courant de son départ précipité. Damon me confirme que c’est bien le Sutton qui a sa préférence et autant arracher le pansement sans tourner autour du pot comme il le fait quant à son identité : l’homme qu’il désire voir n’est pas là et ne sera probablement plus là avant un certain temps. C’est  tout ce que je peux lui offrir comme réponse, bien incapable d’en dire plus puisque je n’en sais moi-même pas plus sur toute cette histoire.

Sauf que Damon a décidé de tester ma patience et non loin de se contenter de faire le pied de grue sur ce seuil de porte, il ne trouve rien de mieux à faire que de mettre ma parole en doute en tendant le cou pour observer derrière moi. Son attitude m’insupporte encore plus que sa visite surprise ou l’obligation qu’il m’impose sans le vouloir d’aborder Angus, et ma voix s’élève pour lui faire comprendre que son geste ne sert à rien. Je sais pas vraiment ce qu’il n’a pas pigé dans mes mots, il me semble qu’« il ne va pas rentrer » est plutôt claire comme affirmation. Je croyais qu’Angus s’entourait seulement de personnes intelligentes et emmerdantes, et concernant Damon s’il peut se vanter d’être dans la seconde catégorie, pour la première je commence à émettre des doutes. « Il est pas là, j’ai compris, excuse moi. » Ouais, excuse-toi et casse-toi, surtout. Je me retiens de le dire, parce que je sais qu’il n’y est pour rien quant à ma mauvaise humeur, Damon, et que ce n’est pas à lui de récolter la rancœur que je destine à Angus sous prétexte qu’il est le seul qui se présente à moi ou qu’il a dû être proche de mon ancien colocataire. Mais il met ma patience à rude épreuve et je me décale pour qu’il puisse cesser de douter de mes paroles. « Pourquoi je trouverais pas ses affaires ? » Parce qu’il s’est barré et que j’ai aucune idée d’où il est, voilà pourquoi, Damon. « Quoi ? » Je pince les lèvres alors que sa surprise ne provoque que mon agacement. C’est injuste, je sais, mais j’y peux rien ; j’ai plus aucun coupable vers lequel diriger ma colère et je déteste d’avance le mauvais rôle que je vais me coltiner auprès du blond en étant la messagère d’une nouvelle qu’il n’est visiblement pas prêt à entendre. « D’avoir démissionné. Je voulais le féliciter de s’être barré de la Michael Hills, je… » - « Il a démissionné ? » Cette fois-ci, c’est moi qui suis surprise. Angus n’a pas été viré ? La faute de Seth ne s’est pas répercutée sur lui ? Ou il a été incité à démissionner dans un dernier élan de compassion pour cet employé qui leur a donné tant sans compter ? Je comprends plus rien et je ne sais pas ce que ça veut dire. Est-ce qu’Angus a démissionné dans le but de quitter la ville en sachant que ses opportunités ici étaient terminées ? Est-ce qu’il a, tout ce temps, prévu d’en chercher ailleurs ? Est-ce qu’il a démissionné pour éviter certaines conséquences ou est-ce que ce sont les conséquences qui l’ont forcé à démissionner ?

« J’arrive pas à croire, il… Il est vraiment parti ? » Je reporte mon attention sur le blond que j’ai oublié durant quelques instants, mon expression se différenciant de la sienne quant au fait que je refuse de faire couler des larmes pour le Sutton alors que lui semble prêt à en déverser des milliers. « Je veux dire… » Et je ressens désormais une détestable sensation de malaise, alors que je maudis silencieusement Angus : je déteste réconforter les gens, encore plus quand ils ne sont pas mon problème. Damon ne devrait pas être le mien. « Je comprends pas. » - « Moi non plus. » Si, je crois que je comprends. Je crois que j’ai ma responsabilité, surtout, mais je suis incapable de mettre l’accent sur ce détail. Parce que si Damon est capable de se mettre dans un état pareil sous le coup de la tristesse, je préfère ne pas savoir comment il peut réagir sous la colère. « Chiale pas je t’en supplie. » Je saurai pas gérer. « T’es son frère ou son mec pour réagir comme ça ? » Que je finis par demander, en évitant soigneusement son regard qui m’embarrasse. Mais bordel, j’ai aucune envie d’avoir à gérer un inconnu qui se met à chialer sur le pas de ma porte, mais j’ai pas l’impression de pouvoir faire autrement. « Il est parti depuis quand ? » - « J’en sais rien. » Et c’est la vérité. C’est pas que je veux me débarrasser de Damon (un peu quand même), mais j’en sais rien. Alors que je relève les yeux vers lui, restant silencieuse un instant, je laisse échapper un soupir qui en dit long sur mon ressenti quant à toute cette situation. « Tu veux entrer ? » Et sans même attendre sa réponse, je lui tourne le dos pour retrouver la pièce à vivre et surtout un canapé sur lequel je m’asseye, car si Damon a des questions, j’en ai moi aussi et quelque chose me dit qu’il est sûrement le seul à pouvoir y répondre. Je devrais pas m’intéresser à Angus, indirectement ou non. Il mérite même pas que je lui offre une seconde supplémentaire de mon temps, mais j’ai besoin de savoir qu’il va bien. Que s’il ne m’a pas donné de nouvelles, qu’il n’en a pas données à Damon non plus, ensemble on arrivera à constituer assez d’éléments pour croire que c’est le cas. « On s’est disputé, je suis partie quelques temps et quand je suis revenue, il avait mis les voiles avec Samuel. » Que j’informe Damon quand il finit par me rejoindre. « Je connais pas son entourage, j’ai aucune idée s’il a prévenu quelqu’un ou non. » J’ai pas l’impression et si la situation vient à se reproduire, ce qui est certain est que je n’ouvrirai pas la porte. « Je savais pas qu’il avait démissionné, je croyais qu’il avait été viré. » J’avoue, m’en fichant bien de ce que j’ai le droit de transmettre ou non, Sutton n’a qu’à être là pour s’y opposer. « C’est quand, la dernière fois que tu l’as vu ? » Je sais pas si ça changera grand-chose, au fond. Mais je veux croire que quelqu’un l’a vu après moi, après Seth, et qu’il pourra m’aider à penser que tout va bien. Pour lui, du moins.

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« Pas du tout, même. » Elle ne le connaissait pas du tout, mais l’inverse n’était pas tout à fait vrai. C’était là la nuance qu’elle n’avait pas entre les mains, Maisie, et ce n’était pas véritablement le moment pour lui expliquer toutes le subtilités de la chose. Damon était venu pour voir Angus, ce dernier était assez grand pour apporter à la jeune femme les réponses aux questions qu’elle pourrait avoir par la suite; pas qu’il était malpoli, l’italien, loin de là même mais il mesurait surtout l’ampleur de sa présence parasite dans la vie de Sutton et il voulait aller au plus vite pour ne pas s’imposer de trop davantage.

Il n’aurait cependant pas l’occasion de voir cette partie là de ses envies se réaliser, puisque le brun n’était pas présent ici, n’était même plus du tout présent à Brisbane. De toutes les nouvelles qu’il aurait pu apprendre en venant ici aujourd’hui, cette dernière ne faisait pas partie de la liste mentalement pré-établie qu’il avait faite. La surprise qui apparut sur son visage aux mots de la jeune femme n’avait donc rien d’exagérée ou de faussée, elle était même le parfait miroir de ce qu’il pouvait ressentir en cet instant. Apparemment cependant, il n’était pas le seul à qui il manquait quelques informations. « Il a démissionné ? » Cependant, il était trop désarçonné en cet instant pour répondre de suite à la question de Maisie. C’était ce qui lui avait été donné comme information par le service des ressources humaines, comme quoi Angus avait pris la porte de son plein gré; et il ne voyait aucune raison pour que quelqu’un là-bas lui mente, alors qu’aucun d’eux n’avait une dent contre cet italien là. Contre son paternel, la liste était longue, mais Damon était bien vu de la boite et par ses employés.

« Moi non plus. » Que Maisie lui répondit du tac-au-tac, lorsqu’il formula qu’il ne comprenait pas tout ce qui pouvait toucher, en réalité, au départ d’Angus. Ca ne faisait pas tant de sens que ça, ou du moins il lui manquait quelques informations pour avoir une vue d’ensemble bien plus détaille que celle qu’il avait en cet instant. Certes, son avenir à la MHI n’était plus forcément aussi brillant qu’il avait pu l’être à un moment donné, mais il avait encore le temps de retourner sa veste, de faire une belle carrière et de trouver d’autres opportunités surtout - c’était pour toute cette partie là que Damon souhaitait le féliciter d’avoir démissionné. Une carrière, il avait toute sa vie pour la construire. Certes, d’un autre côté, il y avait toute son histoire personnelle qui avait été quelque peu chamboulée les mois écoulés en première partie d’année, lorsqu’il avait vu une constante de son quotidien disparaitre; mais il avait toujours Samuel à ses côtés, et il avait bien d’autres personnes pour lui tenir compagnie lorsqu’il en avait besoin. La façon dont Maisie réagissait en cet instant montrait bien qu’elle tenait un minimum à Sutton, sinon elle ne se serait pas offusquée d’apporter le sujet du jeune homme aussi facilement. « Chiale pas je t’en supplie. » La voix de la dite-demoiselle fit relever le regard de Damon dans sa direction, là où il s’était brièvement perdu dans ses pensées pendant une poignée d’instants. Il ne s’était même pas rendu compte que les émotions avaient pris un instant le dessus, suite à l’idée qu’Angus puisse être parti pour de bon, pour de vrai, pour des raisons qu’il ne pourrait jamais comprendre. Pas qu’il se devait de lui donner des explications, loin de là - simplement, il faisait partie des personnes importantes pour le coeur de l’italien et il aurait aimé savoir qu’il allait bien, plutôt que d’apprendre qu’il fuyait pour mille et une raisons. Il inspira longuement. « Je vais pas chialer, c’est bon. » C’était optimiste de sa part d’annoncer une telle chose alors qu’il n’était que très - trop - peu maitre de ses émotions, la plupart du temps. « T’es son frère ou son mec pour réagir comme ça ? » Un instant, il fronça les sourcils. La question tombait quelque peu comme un cheveux sur la soupe - surtout qu’elle était supposée être bien au courant qu’il n’était ni l’un, ni l’autre; à défaut de savoir qui il était réellement. « Je peux pas être son mec si t’es sa meuf. » Il secoua quelque peu la tête, prenant un instant supplémentaire pour se recentrer autant que possible. « Mais je suis son ex, si on peut dire, je crois. » Parce-que tout avait toujours été trop flou entre eux, et que Damon ne s’était jamais senti légitime de rien du tout. Alors, il croyait mais surtout espérait ne jamais s’être trompé en se présentant de la sorte lorsque les rares occasions de le faire s’étaient présentées.

« J’en sais rien. » - « Comment ça t’en sais rien ? » - « Tu veux entrer ? » Sa question était arrivée après quelques instants de silence, lorsqu’elle avait remonté enfin son regard dans le sien. Ses yeux noisettes avaient quelque chose d’hypnotisant.

Elle ne s’était cependant pas embarrassée à l’idée de l’attendre, tournant déjà les talons pour revenir d’où elle venait, à l’intérieur de l’appartement. Après avoir pincé les lèvres un instant, avoir hésita un second, Damon l’avait finalement suivi à l’intérieur de ce dernier. Avec un espèce de poids sur ses poumons, cependant; il ne savait pas si ce dernier était du à une vague d’émotions qu’il ne saurait géré et qui s’approchait dangereusement, ou si c’était celles déjà en place depuis trop de temps en son sein qui lui rappelaient leur présence. Maisie s’était déjà assise dans le canapé, le temps qu’il referme la porte à sa suite et qu’il la rejoigne dans la pièce à vivre. Lui se contenta pour le moment de fourrer ses mains dans les poches de sa veste. « On s’est disputé, je suis partie quelques temps et quand je suis revenue, il avait mis les voiles avec Samuel. » Au moins, le gamin était à ses côtés; c’était une importante, qu’importe les éléments supplémentaires que la jeune femme apportait. « C’était une violente dispute ? » Pas qu’elle lui devait la moindre explication ou quoi que ce soit non plus, mais Angus n’était pas du genre à baisser les bras facilement. Alors, à ses yeux, qu’il soit parti juste pour ça paraissait gros. « Je connais pas son entourage, j’ai aucune idée s’il a prévenu quelqu’un ou non. » Damon baissa son regard, quelque peu gêné. Il ne connaissait pas tant que ça non plus l’entourage de Sutton, en grande partie parce-que cela faisait quelques temps qu’il n’était plus concerné par cette dénomination - et que cela lui faisait mal au coeur, bien sur. « J’ai pas été prévenu, comme tu peux le comprendre, mais j’ai pas la prétention de faire partie de la liste des privilégiés. » Plus maintenant, en tous cas. Fut-un temps il aurait peut-être pu prétendre être le premier sur cette dernière, aujourd’hui les choses avaient bien changé. « Il a toujours été discret auprès de tout le monde de toutes façons. »

« Je savais pas qu’il avait démissionné, je croyais qu’il avait été viré. » Soupirant quelque peu, Damon avait fini par avaler les quelques pas qui le maintenaient à distance du canapé pour s’asseoir à son tour sur ce dernier. Maisie ne l’avait pas invité à le faire, mais elle aurait qu’à exprimer son mécontentement si ce geste l’offensait. Elle l’avait invité à entrer, après tout. « Je l’ai appris du service des ressources humaines, parce-que ça faisait un bout de temps que je l’avais pas vu et que je commençais à m’inquiéter. » Trop longtemps qu’il n’avait pas reconnu sa silhouette au détour d’un couloir ou à la cafétéria. « C’est quand, la dernière fois que tu l’as vu ? » Il esquissa une petite moue; le voir était dans le cas de l’italien un concept un peu ambitieux. « Y’a plusieurs semaines. Au début, je pensais qu’il était en vacances, et après je commençais à trouver que les vacances étaient un peu longues. » Surtout que Angus faisait partie du bas de la chaine alimentaire au sein de la MHI, depuis que Saül ne voulait plus l’avoir à ses côtés - depuis qu’il avait découvert que son poulain préférait passer du temps dans les bras de son fils plutôt qu’à apprendre à ses côtés. Damon avait l’impression que des dizaines d’années s’étaient écoulées depuis le moment où tout avait changé, tant trop de choses avaient justement changé depuis. « Quand j’ai su qu’il avait démissionné, je pensais que c’était parce-qu’il les avait enfin envoyé se faire foutre. » Une pointe d’humour triste, autant dans ses mots que sur les traits de son visage, était perceptible. « Ca me fait chier que ce soit pas le cas. » Parce-que si lui n’avait jamais eu le courage d’agir de la sorte, il aurait tant aimé que ça puisse être le cas d’Angus. Il ne méritait pas de trainer dans les pattes de ces gens là; ni que Damon traine dans les siennes, malheureusement, par extension. « C’était quand, votre dispute ? » Qu’il renchérit finalement, après un instant de silence, relevant ses yeux humides mais promis sans larmes en direction de la jeune femme.

Je le rectifie aussitôt, alors qu’il entreprend de nuancer mon affirmation. Je ne suis pas dupe ; je me rends compte qu’il en sait plus qu’il ne veut bien le dire et puisqu’il semble vouloir préserver le mystère, je préfère nous remettre à égalité. S’il ne dit rien, c’est qu’il ne sait rien – la logique est discutable, mais elle me réconforte à cet instant. J’ai aucune idée de qui est ce type, de ce que ce « vraiment » implique, mais je n’apprécie pas la façon dont il fait perdurer le suspense sur son identité ou sur la manière dont il connaît mon prénom. J’ai bien des intuitions, mais j’aimerais autant qu’elles ne se confirment pas. Je sais que notre fausse relation avec Angus a duré bien assez longtemps pour que l’on se surprenne à parler de l’autre en son absence – et pas uniquement pour le descendre, à ma plus grande surprise – mais ce n’est pas pour autant que j’ai envie d’être mise face à cette probabilité. Je veux pas savoir ce qu’il a pu dire sur moi, ni ce qu’il a pu penser me concernant, je veux juste oublier qu’il a fait partie de ma vie et qu’il en est sortie de la manière la plus brutale qui soit. Mais je n’ai pas vraiment le choix alors qu’à défaut de résoudre le mystère qui entoure ce Damon, je peux au moins aligner quelques éléments qui me font comprendre que c’est une connaissance d’Angus, et pas seulement un voisin de passage. Ils devaient bosser au même endroit, ou au moins se parler régulièrement, pour que le blond ait remarqué son absence sur son lieu de travail. Qu’Angus a quitté volontairement, contrairement à ce que j’ai pu croire. À vrai dire, j’en savais rien, j’ai pas osé à m’intéresser à sa vie professionnelle pour ne pas avoir la confirmation que le licenciement que j’anticipais a bien eu lieu. Parce qu’il serait en partie de ma responsabilité, et que ça n’en est pas une que j’ai envie de prendre à cet instant. Je crois que me désintéresser de son sort m’aidait, paradoxalement, à ne pas être envahie par les scénarios tous plus probables les uns que les autres. Maintenant que j’ai connaissance de ce fait, je ne peux pas m’empêcher de me demander quels sont les détails qui l’entourent. Une démission peut cacher beaucoup de choses ; là où un licenciement aurait au moins eu le mérite d’être clair et indiscutable.

Il comprend pas, Damon. Et moi non plus. Ou plutôt, j’ai envie de ne pas comprendre, alors que sans prétendre avoir toutes les cartes en mains, je connais certains éléments qui ont poussé Angus à quitter la ville. Mon silence radio n’a probablement pas aidé, alors que, comme trop souvent, ma seule manière d’affronter mes problèmes a été de les fuir. Ça fonctionne, en général. Je les ignore, je prétends qu’ils n’existent pas jusqu’à réussir à les oublier. Mais cette fois-ci, c’est un échec, et tout me rapporte à Angus et toutes ces choses que j’aurais pu faire différemment pour ne pas en arriver là. La fragilité de Damon se heurte à ma froideur alors que l’humidité au coin de ses yeux menacent de se déverser et que je ne suis pas outiller pour ça. Je manque peut-être de délicatesse, mais j’imagine que l’énerver aura au moins le mérite de contrebalancer sa tristesse. « Je vais pas chialer, c’est bon. » C’est au moins ça, même si mon regard continue de le scruter pour déterminer de sa bonne volonté. Il m’a quand même l’air au bord de l’éclatement, et je comprends pas vraiment pourquoi ça lui tient autant à cœur. « Je peux pas être son mec si t’es sa meuf. » Je tente de masquer ma surprise alors qu’il connaît ce détail, et que j’imagine que ça fait partie du « vraiment » de tout à l’heure. « Mais je suis son ex, si on peut dire, je crois. » Et cette fois-ci je n’arrive pas à garder contenance quand je sens mon visage qui doit changer de teinte, et mes traits se crispent à cette annonce. Je sais même pas pourquoi je réagis ainsi, pourquoi j’ai l’impression de me prendre un coup dans l’abdomen, alors que rien n’empêche Angus d’avoir une vie privée. Je m’attendais juste pas à ce que son ex... soit un mec. Ouais, je sais, c’est ridicule, mais je peux pas m’empêcher de réaliser que je le connais beaucoup moins que ce que je pensais ; et, surtout, que j’ai été stupide de croire qu’il pourrait changer son regard sur moi. Alors je me tais, tente de ravaler les émotions que cela agite à l’intérieur de moi, me concentre sur la suite des maigres explications que je peux fournir en tenant de ne pas me montrer trop déstabilisée. « Comment ça t’en sais rien ? » J’en sais rien, parce que je suis partie avant que lui ne le fasse ; et que j’ai donc aucune idée de la temporalité des faits puisque j’avais déjà fui cet appartement au moment où cela s’est produit. Je m’installe sur le canapé sans attendre sa réponse à mon invitation, consciente que les minutes qui vont suivre risquent de me demander beaucoup d’énergie. « C’était une violente dispute ? » Pas vraiment, en réalité. Ça n’en était même pas vraiment une, juste de l’ignorance en bonne et due forme. « Non, c’est l’après qui a été violent. » Je ne sais même pas pourquoi je lui en parle. Sûrement parce que j’en ai plus besoin que je ne veux bien l’admettre. « Je l’ai ghosté. » Et ma voix traduit du peu de fierté que je ressens à cet instant, même si ça m’a paru être la solution la plus adéquate. « C’est pour ça que j’ai aucune idée de quand il est parti, ça fait que quelques jours que j’ai remis les pieds ici. » Je précise, plus à l’aise de porter mon regard ailleurs plutôt que d’affronter le sien qui ne manquera pas de me dire que j’aurais pu faire les choses différemment. « J’ai pas été prévenu, comme tu peux le comprendre, mais j’ai pas la prétention de faire partie de la liste des privilégiés. » Oh, ça c’est donc mal terminé, visiblement. « Il a toujours été discret auprès de tout le monde de toutes façons. » J’acquiesce en relevant les yeux vers lui, lui demandant : « C’était un secret, entre vous ? » J’interroge alors qu’il me parle de discrétion, avant d’ajouter : « et ça date de quand ? » J’aimerais lui demander si ça a duré longtemps, mais je n’ai pas envie d’avoir la réponse. La réponse de Damon à celle que je viens de poser me fera sûrement bien assez mal, alors qu’il m’apparaît évident que si Angus a accepté de jouer le jeu, c’est aussi parce qu’il avait besoin de passer à autre chose. Et qu’il m’a probablement utilisée comme je l’ai fait ; sauf que lui visant à rendre un ex jaloux et que je ne suis pas sûre d’apprécier ce rôle.

J’observe Damon me rejoindre, admettant que j’étais persuadée qu’on lui avait montré la sortie et non pas qu’il l’avait prise volontairement. « Je l’ai appris du service des ressources humaines, parce-que ça faisait un bout de temps que je l’avais pas vu et que je commençais à m’inquiéter. » Ils travaillent ensemble, donc. Je commence à mettre les pièces ensemble, et le puzzle que je compose ne me plaît pas. « Y’a plusieurs semaines. Au début, je pensais qu’il était en vacances, et après je commençais à trouver que les vacances étaient un peu longues. » Il s’est soucié de son absence, lui, contrairement à moi ; et je comprends qu’il est bien plus attaché à Angus que je ne pourrai jamais le prétendre. « Quand j’ai su qu’il avait démissionné, je pensais que c’était parce-qu’il les avait enfin envoyé se faire foutre. Ca me fait chier que ce soit pas le cas. » - « Pourquoi il aurait fait ça ? » Je lui demande, avant de préciser : « Il a jamais cessé de me faire comprendre que sa carrière valait mieux que celle des autres et qu’il était destiné à être quelqu’un d’important. Qu’il avait des ambitions, lui. » J’oublie un instant que ces informations peuvent donner une mauvaise image d’Angus, alors qu’il ne me doit rien : on a jamais été ensemble et il n’avait pas à faire preuve de bienveillance à mon égard. Mais je comprends pas pourquoi il a tout envoyé balader, alors que MHI était son occasion de gravir les échelons et d’obtenir les chances dont la vie l’a privé. « C’était quand, votre dispute ? » - « Début septembre. » Ouais. Je l’ai ghosté pendant longtemps ; et j’en suis pas fière. Et je m’offusque pas des yeux mouillés de Damon, parce que cette fois-ci je n’ai pas envie de le réprimer mais de le rejoindre dans sa tristesse. « Et j’imagine que t’as pas réussi à le contacter par un autre biais ? » Ou peut-être qu’il n’a pas essayé. « Il y a plein de choses que j’ignore sur lui, je suis désolée de pas pouvoir t’aider plus. » Il le connaît sûrement mieux que moi, c’est l’évidence et je crois que c’est plutôt moi qui ai besoin de ce qu’il peut m’apporter. « Vous bossiez ensemble, alors ? » Je lui demande, ma voix qui se veut plus posée et ma curiosité qui ne demande qu’à être satisfaite. Pour comprendre les zones de mystère qui entourent Angus, pour avoir un peu l’impression qu’il est encore là, aussi.

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Si Damon n’était pas autant aveuglé par ses propres émotions en cet instant, peut-être qu’il aurait remarqué le changement de teint qu’avait pris le visage de Maisie. Elle avait réussi à cacher au mieux sa réaction lorsqu’il avait avoué à haute voix connaitre le fait qu’Angus était en réalité le petit ami de la jeune femme désormais - de façon officielle, en tous cas, puisqu’il n’avait pas non plus tous les tenants et aboutissants de la situation -, mais celle qui s’était emparée de ses traits lorsque l’italien lui avait dit être l’ex-copain de Sutton s’était vue comme le nez au milieu de la figure. La seule chance qu’elle avait eu pour elle en cet instant, vraiment, était que les yeux du blond étaient trop humides et ses pensées trop focalisées sur le fait qu’Angus n’avait apparemment pas non plus donné de nouvelles à sa petite-amie pour remarquer que cette dernière ne faisait pas forcément la fière. « Non, c’est l’après qui a été violent. » Leur différent n’avait donc pas explosé de façon spectaculaire, c’étaient les retombées du feu d’artifice qui laissaient des dégâts. « Je l’ai ghosté. C’est pour ça que j’ai aucune idée de quand il est parti, ça fait que quelques jours que j’ai remis les pieds ici. » - » Ah. » Ah, oui. Ce qui pourrait expliquer pourquoi ils avaient tous mis autant de temps à se rendre compte qu’Angus n’était plus dans les parages, si chacun y était allé de sa méthode pour s’éviter. Entre lui et Damon, les choses étaient plus ou moins implicites depuis longtemps désormais, et il se contentait de l’observer de loin pour s’assurer qu’il allait toujours bien la plupart du temps. Pour Maisie, en revanche… une partie de lui se disait qu’elle aurait pu être un élément clef et qu’elle avait préféré se cacher; une partie de lui ne pouvait s’empêcher de se dire qu’elle avait une part de responsabilité dans cette situation. Il n’avait pas tous les éléments qui pourraient lui permettre d’établir une vérité de la sorte à haute voix, mais certains indices pointaient dans la même direction c’était inévitable.

« C’était un secret, entre vous ? et ça date de quand ? » La question déstabilisa un instant Damon, qui releva son regard toujours empli d’émotions vers la jeune femme. Il ne s’attendait pas à ce qu’elle se tente sur ce terrain là, mais en réalité il ne savait pas pourquoi il était encore étonné: il venait de lui-même le dire, Angus avait toujours été discret sur beaucoup de choses et avec bien des personnes. Que Damon ait gardé cette partie là de sa vie privée privée, justement, avait des raisons on ne pouvait plus fondées; Sutton aurait pu en parler, il n’avait jamais eu à garder leur idylle secrète de son côté. « C’était plus ou moins un secret, oui. » De ceux sur lesquels, même une fois découverts, il ne pourrait en dire plus; parce-que pour lui, il y avait toujours des enjeux importants sur lesquels il ne pouvait faire un croix. « Et c’était l’année dernière. En début d’année dernière. » La précision là était importante, en revanche, car officiellement après il avait rencontré Megan et le coup de foudre avait instantané. S’il n’ajoutait pas d’autre précision, mais que Maisie creusait de ce côté là, ce serait d’ailleurs les explications qu’il se trouverait être obligé de donner: son coeur avait penché pour une autre. La réalité était mieux dans l’ombre que mise en lumière. « Il t’en avait pas parlé, je me trompe ? » Il plissa quelque peu le bout de son nez en posant la question, parce-qu’une partie de lui n’était pas sure d’avoir envie d’entendre la réponse dite à haute voix. C’était évident, mais puisqu’ils en étaient à enfoncer des portes ouvertes pour tenter de ressortir de cette discussion avec les mêmes bases d’informations, autant qu’il continue sur la lancée.

« Pourquoi il aurait fait ça ? » Démissionner, et envoyer paitre la boite dans la même lancée. « Il a jamais cessé de me faire comprendre que sa carrière valait mieux que celle des autres et qu’il était destiné à être quelqu’un d’important. Qu’il avait des ambitions, lui. » Merde. Dans son excitation, Damon avait oublié que c’était effectivement le cas, en apparence: la MHI était tout ce dont rêvait Angus. C’était peut-être toujours le cas, dans les grandes lignes, mais il était évident qu’avec tout ce qu’il avait appris par la suite quant à l’envers du décor, cela avait du le dégouter. « C’est le cas. Il a des ambitions, on peut pas lui retirer ça. » L’italien l’avait vu plus d’une fois bucher comme un forcené pour atteindre coute que coute ses objectifs, il savait que c'était effectivement là tout un pan du caractère d’Angus. « Mais comme pour toutes les grosses boites, parfois la pub fait plus envie que la réalité. » Cela aurait pu être traduit par un il a découvert que son patron était un gros connard en cours de parcours aisément, mais le pub n’était pas d’enfoncer Sutton d’une quelconque façon dans une situation qu’il n’avait déjà pas initialement choisie. Damon comprenait que Maisie soit quelque peu confuse dans l’idée de l’imaginer démissionner avec les informations qu’elle avait à sa disposition, mais ce n’était pas son rôle à lui de lui donner le pourquoi du comment - Angus le ferait un jour, s’il en avait vraiment envie. Il espérait que non, car cela vaudrait à expliciter une partie des véritables raisons qui avait poussé le brun à agir de la sorte; mais si cela pouvait lui permettre de reconstruire certains ponts dans certaines relations, qui était-il réellement pour juger ? Alors que c’était là une méthode dont il avait usé et abusé avec ses proches, au détriment de Sutton justement ?

De toutes façons, les ponts semblaient avoir été coupés depuis un certain temps entre Maisie et le brun, assez en tous cas pour qu’elle ne semble pas avoir de ses nouvelles dernièrement - assez pour qu’elle n’ait pas su avant ces derniers jours qu’il avait disparu de la ville. « Début septembre. » Oui, vraiment longtemps alors. « Et j’imagine que t’as pas réussi à le contacter par un autre biais ? » Damon secoua quelque peu la tête, soupirant un brin par la même occasion. « J’ai pas essayé. » Et ce n’était pas là une preuve d’une quelconque mauvaise fois de sa part. « Je suis venu directement ici, et je suis tombé sur toi, donc j’ai pas eu le temps ni le besoin de le contacter d’une autre façon pour le moment. » Et de toutes façons, avec les nouveaux éléments qu’elle lui donnait en plus, il était à peu près sur que qu’importe la façon dont il chercherait à le contacter, Angus ne lui répondrait pas. S’il ne le faisait pas pour Maisie, il ne le ferait pas pour lui; cela lui faisait mal au coeur de le constater, bien sur, mais c’était ainsi que les choses de la vie allaient. Il était le premier à avoir attirer ce genre de finalité sur eux, il était celui à blâmer. « Il y a plein de choses que j’ignore sur lui, je suis désolée de pas pouvoir t’aider plus. » Esquissant une petite moue d’excuses à son tour, Damon haussa les épaules. « C’est pas ta faute, t’as pas à t’excuser. » Il savait pertinemment qu’Angus compartimentait sa vie, et que bien des aspects de cette dernière ne se croisaient pour aucun prétexte; il en était le meilleur exemple. Maisie n’avait rien à se reprocher: il était vrai qu’il aurait désiré  avoir un peu plus d’informations, mais ce n’était pas sur elle qu’il jetterait le blâme loin de là. « Vous bossiez ensemble, alors ? » Posant son regard un instant sur le visage de la jeune femme, il détourna ensuite ce dernier pour le laisser vagabonder partout ailleurs, s’enfonçant un peu plus dans le canapé, soupirant légèrement dans la foulée. « On bossait pour la même boite, oui. » Ensemble était un bien grand mot. « On appartenait pas au même service, mais… » Il eut un petit rire: à repasser les événements de la sorte en revue, il trouvait les choses presque ridicules désormais. « Mon père avait décidé de le prendre sous son aile, alors nos chemins se croisaient plus souvent même si on répondait pas du même service. » Parce-que c’était une des façons d’expliquer les choses, parce-que c’était également la façon dont les événements étaient arrivés. S’il n’avait pas été le fils du patron, s’il n’avait pas été autant ambitieux, ils seraient restés de simples inconnus au sien de la fourmilière que pouvait être la MHI. « Et il est devenu le poulain de mon père parce-qu’il est ambitieux et qu’il a des capacités que d'autres n’ont pas, effectivement. » Et après un petit silence et un froncement de nez un peu gêné. « Mon père étant le patron. »

J’ai fui Angus pour ne pas me confronter à ma propre part de responsabilités ; et c’est désormais ce Damon qui s’en charge à sa place. Sans le vouloir, j’en suis bien consciente, mais ce n’est pas suffisant pour rendre sa présence plus appréciable, pas alors que l’amertume amenée par la finalité de ma relation avec Angus se transpose sur la visite surprise de ce type. Je pourrais mentir, lui dire que j’ignore tous des raisons qui ont amené notre connaissance commune à fuir sans prévenir qui que ce soit. Je ne dois rien à Damon, mais je n’arrive pas pour autant à me montrer déloyale à l’égard d’Angus, quand bien même ma colère est encore vive. Lui rejeter toutes les fautes serait la solution de facilité, celle vers laquelle il serait logique que je me tourne en vue des décisions que j’ai pu prendre au cours des derniers mois. Mais il ne mérite pas d’être taxé comme le méchant de toute cette histoire, pas alors que son attitude est finalement un miroir de la mienne. Je ne peux pas m’en plaindre ; et passé l’étonnement de cette visite, j’arrive à peu près à reprendre mes esprits pour me montrer moins sournoise que j’aimerais réellement l’être. Presque raisonnable, on dira, même si ce n’est pas vraiment un terme qui m’a souvent caractérisée en compagnie d’Angus ; et que je me déteste déjà de vouloir obtenir des réponses autant que Damon, alors que celles qu’il m’offre sont loin de me plaire. Ce Damon semblait connaître mon identité et nous sommes désormais sur un pied d’égalité quand il m’avoue être l’ex d’Angus. Cette fois-ci, je suis bien incapable de rester stoïque, pas alors que la révélation m’ouvre un pan de la vie d’Angus que ce dernier n’a jamais évoqué en ma compagnie. C’est stupide ; la première question qui me passe par la tête consiste à savoir si ça l’a dégoûté d’avoir eu à jouer les conjoints, non pas pour notre évidente inimitié, mais simplement parce que je ne suis pas du bon sexe pour lui plaire. Qu’il m’ait caché l’existence de Damon ne me dérange pas ; on ne s’est jamais épanché sur notre vie privée l’un envers l’autre et sur plein d’autres sujets également, en réalité cette rencontre ne fait que confirmer à quel point j’étais loin de connaître Angus. Mais il n’y a rien à faire ; et je me sens honteuse de ne pas réussir à les imaginer en couple, à ne pas vouloir accepter l’idée, sans réellement réussir à comprendre pourquoi celle-ci me heurte à ce point. « Ah. » L’interjection de Damon est aussi courte qu’elle n’est lourde de sens, alors que je perçois tout le jugement qu’il m’adresse à cet instant et que mon regard se baisse pour ne pas avoir à en lire plus. Il ne le dit pas, mais il le pense ; je suis fautive. Je ne peux pas lui en vouloir, car si les rôles avaient été inversés, je suis consciente que je lui aurais fait porter le poids de la disparition d’Angus, prétextant que, de par la nature de leur relation, il aurait dû être en mesure de réagir, d’en faire plus, de lui faire changer d’avis. Damon n’a pas tous les éléments en main et je ne peux pas lui en vouloir de me condamner de la sorte, pas alors que sa vision des choses est parfaitement recevable. Au contraire, je lui suis presque reconnaissante de ne pas profiter de l’occasion pour pointer du doigt mes erreurs, pour me rappeler à l’ordre et me faire passer un sale quart d’heure comme je le mériterais ; comme je l’aurais fait si j’étais à sa place.

C’est peut-être parce que je ne suis pas dans mon bon droit que je devrais m’abstenir de me montrer plus curieuse ; mais je ne peux pas m’en empêcher alors qu’il paraît évident que Damon connaît un Angus que je n’ai probablement pas eu l’occasion de rencontrer. Ma seule opportunité de le découvrir se fait alors au travers de ce que Damon voudra bien me dire. « C’était plus ou moins un secret, oui. » Je ne sais même pas ce que cela m’apporte d’en avoir la confirmation. Peut-être que ça me rassure quant aux raisons qui font que je suis restée dans l’ignorance. « Et c’était l’année dernière. En début d’année dernière. » Quelques mois avant que je demande à Angus de me rendre un tel service, et tout à coup tout semble prendre une autre signification. Est-ce qu’il a voulu se venger de ce Damon ? Est-ce que si ce dernier connaît mon existence, c’est uniquement parce qu’Angus s’en est servie dans l’espoir d’attiser sa jalousie ? Ce n’est pas tant le fait qu’Angus ait pu se servir de moi comme je me suis servie de lui, c’est qu’à ma différence, il m’a tenu dans l’ignorance de son plan. S’il me l’avait demandé, je me serais fait un plaisir de l’aider à faire regretter leur rupture à Damon. « Il t’en avait pas parlé, je me trompe ? » Je secoue la tête par la négative, finissant par réussir à reprendre la parole. « Non. » Que je confirme avant de reprendre, plus hésitante : « Il m’a jamais vraiment parlé de lui. » Et pourtant, j’avais l’impression d’avoir appris à le connaître. Je connaissais son travail, ses ambitions, son travail, et si ça peut paraître beaucoup, je réalise que ce n’était que du superficiel. « Encore moins de toi. » Je découvre son existence à l’instant et la pilule est plus dure à avaler que je ne l’aurais cru. « C’était sérieux entre vous ? » Je finis par secouer à nouveau la tête pour l’empêcher de répondre, alors que j’ajoute : « Non, laisse tomber. Tu serais pas là si ça ne l’était pas. » Ou s’il n’avait pas encore de l’affection pour Angus ; et c’est bien une chose que je n’ai pas envie d’entendre de la bouche de Damon.

Pas plus que je n’avais envie de découvrir pour la démission d’Angus, comme m’informe Damon. Ça ne colle pas. Le garçon que j’ai connu n’aurait jamais pris le risque de quitter une entreprise dans laquelle il semblait réussir à se faire sa place, et qui aurait pu lui permettre de se hisser là où il a toujours vu sa place. « C’est le cas. Il a des ambitions, on peut pas lui retirer ça. » Et parce que Damon le connaît mieux que moi, je ne peux que songer aux nombreux commentaires qu’Angus a pu me faire ; et à quel point il a dû se sentir honteux à l’idée de me présenter comme sa petite amie – c’est probablement la raison pour laquelle il ne l’a jamais fait auprès de Damon. Même si tout cela était faux, il y avait une part de vrai ; et ce n’est pas celle que j’aurais souhaitée. « Mais comme pour toutes les grosses boites, parfois la pub fait plus envie que la réalité. » Et il m’en a jamais parlé. Je l’ai tellement chambré sur son job de riche qu’il n’a probablement pas jugé nécessaire de me dire à quel point il s’y sentait mal. Et c’est ridicule, parce que j’étais la première à mettre de la distance entre nous et aujourd’hui je réalise à quel point j’aurais voulu pouvoir l’aider à gérer ce genre de choses. « Et dire qu’il m’en voulait quand je parlai de sa ‘’boîte de merde’’. » Je mime les guillemets et j’ai un rire nerveux, car même si ce n’était pas particulièrement sympathique de la part de sa ‘’copine’’ que de critiquer son environnement professionnel, je constate que je n’avais pas tort, finalement. Mais toujours est-il que je n’aurai jamais les vraies réponses quant à sa décision, et que je ne cesserai jamais de me demander s’il a préféré anticiper l’humiliation d’un licenciement à cause de mon frère. Ce n’est certainement pas Damon qui va m’apporter son aide sur cet aspect-là, pas alors qu’il ne semble n’avoir eu aucun contact avec Angus. « J’ai pas essayé. » Mais alors pourquoi venir aujourd’hui ? Il aurait eu mille opportunités d’essayer de le contacter plutôt que de se pointer-là, m’obligeant à faire des hypothèses sur les raisons de sa venue. « Je suis venu directement ici, et je suis tombé sur toi, donc j’ai pas eu le temps ni le besoin de le contacter d’une autre façon pour le moment. » Je reste sceptique et donc muette, alors que je finis par m’excuser de ne pas pouvoir lui apporter les réponses qu’il désire. « C’est pas ta faute, t’as pas à t’excuser. » Pourtant, il sait autant que moi que j’ai ma part de responsabilités, mais encore une fois je le remercie de ne pas pointer celle-ci du doigt. « On bossait pour la même boite, oui. »  Et je me mords la lèvre d’avoir critiqué la fameuse boîte quelques secondes plus tôt. « On appartenait pas au même service, mais… » Mais ça a suffi pour qu’ils soient importants l’un pour l’autre. « Mon père avait décidé de le prendre sous son aile, alors nos chemins se croisaient plus souvent même si on répondait pas du même service. » Oh, papa est dans la boîte aussi et un instant je me sens à nouveau mal à l’aise, alors qu’il apparaît évident que Damon a lui-aussi des ambitions en plus d’avoir des contacts. Rien d’étonnant à ce qu’Angus ait peut-être mentionné mon existence, mais ce soit arrêté à ça. « Et il est devenu le poulain de mon père parce-qu’il est ambitieux et qu’il a des capacités que d'autres n’ont pas, effectivement. » Mais tout ça ne m’aide pas à remettre de l’ordre dans mes pensées, alors que si Angus s’était fait une telle place, il aurait dû être accepté comme gendre idéal. « Mon père étant le patron. » Que Damon finit par m’informer après un silence et je finis par détourner mon regard quand je constate qu’il s’est porté trop longtemps sur lui. « Euh, désolée pour le. Hm, boîte de... enfin, voilà. » Que je bafouille un instant, l’ayant insulté contre mon gré. « Ton père n’a pas approuvé votre relation ? » Que je finis par demander, alors que c’est la seule option qui me paraît cohérente. « J’veux dire, il a déchanté, oui, mais s’il était le poulain de ton père, ça devait quand même aller pour lui, non ? » J’ai sûrement une vision trop simpliste de la chose, alors que je finis par reprendre la parole : « C’est juste que... ça a aucun sens, j’ai l’impression. » Parce que je sais de quoi il en retourne, au fond, alors que je finis par soupirer avant d’arracher le pansement : « Seth, enfin, mon frère, il a... il a volé un bijou dans la boîte de ton père. » Que je confesse, en baissant la tête, assumant que l’information n’est certainement pas secrète dans la boîte. « Il a utilisé Angus pour entrer dans l’établissement. J’étais persuadée que c’était la raison pour laquelle il ne travaillait plus là-bas. » Et alors que je ne m’autorise toujours pas à relever les yeux, je corrige : « Enfin, je suis toujours persuadée que ça a un lien. » Que je précise, alors que je finis par relever la tête pour capter son regard. « Et je peux te garantir qu’Angus n’était pas au courant de ce que prévoyait mon frère. » Je ne sais pas trop ce que j’essaie de faire ; et ça prend du sens quand je lui demande, ou plutôt que je lui supplie : « Je sais pas ce qu’en pense ton père, mais.. enfin, s’il pouvait juste le savoir... » Même si je doute que ma parole puisse valoir grand-chose.

@Damon Williams

you left us far behind

@maisie moriarty

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***
A sa question, elle secoua la tête dans un premier temps. « Non. Il m’a jamais vraiment parlé de lui. » Malheureusement, cela ressemblait bien au Angus qu’il avait connu, qui préférait tout garder pour lui plutôt que de partager ce qu’il pouvait ressentir et vivre en réalité. Tout le contraire de Damon, à y regarder de plus près. « Encore moins de toi. » La précision tombait désormais sous le sens, et ce fut par une petite moue presque désolée qu’il réagit aux paroles de la jeune femme. Il était désolé, qu’elle n’ait pas pu avoir cette discussion là avec le principal intéressé et que ce soit lui qui lui apporte une partie du passé d’Angus alors que ce n’était en rien la place qu’il aurait du tenir. « C’était sérieux entre vous ? » Damon n’eut même pas le temps de poser son regard sur elle que déjà, elle secouait la tête et revenait à la charge. « Non, laisse tomber. Tu serais pas là si ça ne l’était pas. » Dans d’autres circonstances, peut-être que cette perspicacité aurait amusé l’italien. Peut-être que dans un moment différent, il aurait souligné cet éclair de génie. En cet instant seulement, il remarquait à quel point elle avait affreusement raison, et à quel point il se devait d’être pathétique en cet instant. La réponse pour lui aurait été que bien sur que c’était sérieux, entre Angus et lui; autant parce-que ça l’avait réellement été que parce-que Damon étant Damon, tout était sérieux pour lui au point où il tombait amoureux un jour sur deux. Mais si elle l’avait deviné et qu’elle ne souhaitait pas qu’il réponde réellement à la question, alors il resterait silencieux, pincerait les lèvres et se contenterait de poser un instant peut-être de trop un regard compatissant sur elle.

Bien sur qu’elle se montrait curieuse, Maisie, à propos de la façon dont les chemins de Angus et Damon avaient pu se croiser à un moment donné dans le temps. Ce n’était pas le jeune homme qui pourrait lui en vouloir, alors qu’il s’était pointé sur le pas de la porte d’un appartement qui n’était pas le sien et s’était tout de même imposé par la suite. « Et dire qu’il m’en voulait quand je parlai de sa "boîte de merde’’. » Le petit rire, l’imitation avec les mains et les mots qui allaient de paire avec tout ça tirèrent un petit sourire à Damon. Effectivement, c’était ce qu’elle appelait une boite de merde et il ne pouvait pas lui en vouloir de qualifier la MHI de telle sorte. Après tout, s’il le pouvait, il mettrait lui-même le feu à tout ça - il aurait pu tout dissoudre, s’il avait décidé de reprendre la direction à la suite de son père, mais même pour y mettre le feu il n’aurait pas été jusque là. C’était en tous cas effectivement là bas qu’il avait rencontré Angus, qu’ils avaient travaillé plus ou moins ensemble, que leurs chemins s’étaient finalement séparés aussi. L’ordre des événements avaient leur importance, surement un peu, mais dans tous les cas la finalité serait la même - et l’inévitable fait qu’Angus avait fini par claquer la porte d’un bureau y cachant un dragon ne pouvait être réfuté. Le dragon étant bien sur en réalité un crocodile, mais la confusion était presque facile à faire. Pour Damon, cependant et malheureusement, c’était le surnom de papa dont il avait affublé le patron de la boite depuis qu’il avait été en âge de parler - information qui était encore inconnue jusqu’alors pour Maisie, c’était facile à deviner avant même qu’elle ne prenne de nouveau la parole. « Euh, désolée pour le. Hm, boîte de… enfin, voilà. » Il esquissa un petit sourire presque désolé, en réalité. « Boite de merde, tu peux le dire, je le pense aussi. » Il n’était plus dans une phase de sa vie où il avait envie de prétendre avoir une quelconque affinité pour l’entreprise dans laquelle il travaillait. « Et t’as pas à t’excuser, du coup. »

« Ton père n’a pas approuvé votre relation ? » Le terrain était glissant. « J’veux dire, il a déchanté, oui, mais s’il était le poulain de ton père, ça devait quand même aller pour lui, non ? » De façon presque imperceptible, les lèvres du jeune italien se pinçaient de plus en plus, jusqu’à former une ligne fine et presque blanche désormais. « C’est juste que... ça a aucun sens, j’ai l’impression. » Oh, ça avait du sens lorsque toutes les informations pouvaient être révélées - ce qui n’était pas le cas présentement, ce qui n’était jamais le cas en réalité puisqu’il n’était pas possible pour Damon de dévoiler les véritables raisons pour lesquelles Angus n’était pas celui partageant son quotidien aujourd’hui. « Mon père n’a pas approuvé l’union, non, effectivement. » Appeler Saül son père à haute voix était quelque-chose d’étrange, n’ayant plus tant que ça l’habitude de le faire dans son quotidien, ayant opté pour le prénom de ce dernier dès que l’option était disponible. En tous cas, ce n’était pas sur cette première partie là de réponse qu’il comptait mentir, puisqu’effectivement il n’existait pas un monde, ironiquement, où une union entre deux hommes était approuvée par le patriarche Williams. Cependant, ce n’était pas cette raison là qui devait rester en avant, qui devait être diffusée. Alors soupirant légèrement, il reporta son regard sur ses mains et ses doigts jouant entre eux d’une façon quelque-peu nerveuse. « Mais c’est pas ça qui a posé problème entre nous. J’ai rencontré quelqu’un d’autre, je suis tombé amoureux, je me suis marié. » Encore une fois, l’ordre des événements avait son importance et n’était pas tout à fait celui là, mais c’était un détail qui se devait de garder pour lui. « C’est ce qui a mis un terme à la relation entre Angus et moi. » Pour ce qui était de la partie du poulain, en revanche… « Pour ce qui concerne mon père, c’est juste un sale con. Y’a pas besoin d’autre explication. » Ce qui justifiait que Sutton ne souhaite plus bosser pour lui, sans avoir besoin de creuser quoi que ce soit. Une explication qui devrait suffire à tous les employés, en réalité.

« Seth, enfin, mon frère, il a... il a volé un bijou dans la boîte de ton père. » Il pinça les lèvres. « J’en ai entendu parler, oui. » Parce-qu’il avait assez régulièrement les oreilles qui trainaient, et qu’il avait une assez bonne bouille pour que toutes les commères de l’entreprise lui fassent un rapport détaillé des derniers potins en date. « Il a utilisé Angus pour entrer dans l’établissement. J’étais persuadée que c’était la raison pour laquelle il ne travaillait plus là-bas. » Cette partie là de l’histoire, en revanche, était nouvelle pour Damon. Il haussa quelque peu un sourcil, reportant son regard sur la jeune femme à ses côtés sur le canapé. « Enfin, je suis toujours persuadée que ça a un lien. » Maisie reporta finalement, enfin même, ses yeux dans ceux de l’italien. « Et je peux te garantir qu’Angus n’était pas au courant de ce que prévoyait mon frère. Je sais pas ce qu’en pense ton père, mais.. enfin, s’il pouvait juste le savoir… » Le blondinet souffla un petit rire par le nez; ce n’était pas ce type de réaction qu’il aurait préféré avoir en cet instant, mais c’était surtout qu’il ne s’était jamais attendu à ce qu’une discussion autour de la MHI s’oriente de cette façon là. « Mon père en a rien à foutre, tu sais. » Et ce n’était même pas pour rassurer la jeune femme qu’il disait ça: c’était purement et simplement la vérité. « Je suis presque sur qu’il se rappelle même pas que ce type d’incident est arrivé, même qu’il y ait prêté un réel intérêt. » Ca ne le touchait pas personnellement, alors à quoi bon y prêter la moindre attention ? « D’ici quelques semaines de toutes façons il bossera plus là-bas, alors ça lui passe bien au dessus. » Laissant un soupire lui échapper, il finit par se lever pour s’approcher de la fenêtre derrière le canapé, donnant sur l’extérieur du bâtiment. Il avait eu l’habitude de regarder à travers ces carreaux là plus d’une fois, il y avait ce qui lui semblait être une vie entière de ça. « J’arrive pas à savoir si c’est pour Angus que tu me précises ça, ou pour ton frère, mais dans tous les cas c’est pas mon père qui écouterait ce que j’aurais à dire sur le sujet. Ni personne au sein de la boite. Tout le monde s’en fout. »

Le constat me désole d’autant plus que je suis forcée de le reconnaître face à celui qui a partagé la vie d’Angus. Ce dernier ne m’a jamais vraiment parlé de lui et je ne sais même pas pourquoi j’ai l’impression d’être autant désavantagée. Ce n’est pas comme s’il y avait une compétition entre Damon et moi, ni même si nous avions la même relation avec Angus. Il avait mille raisons de se confier à Damon, il n’en avait aucune de s’ouvrir face à moi, d’autant que j’étais la première à balayer les tentatives d’en dire plus que nécessaire sur moi-même, l’empêchant inévitablement d’en faire de même. Je ne sais même pas ce que je recherchais, ce n’est même pas comme si Angus était toujours un inconnu ou comme si je n’avais pas mille questions à lui poser. J’imagine que j’ai eu peur de réaliser qu’il était loin de l’image que je m’étais faite de lui et que cela aurait concrétisé certaines choses que j’ai commencé à ressentir à son égard, autant de choses que je m’interdis pour de très bonnes raisons. J’ignore si l’on pourrait parler de jalousie, j’ai jamais vraiment ressenti ça dans un tel contexte, parce que je n’ai jamais eu personne qui m’intéressait suffisamment pour que je me sente menacée par les fantômes du passé. Parce qu’il paraît évident qu’il y a une raison pour laquelle jamais Angus ne m’a parlé de Damon, autant qu’il y en a une qui explique la présence de ce dernier aujourd’hui, à deux doigts de fondre en larmes au moment d’apprendre le départ de notre connaissance commune. Qui était bien plus que ça pour Damon, et qui ne sera jamais rien d’autre pour moi. Mon regard se baisse face à ce constat, pour ne pas avoir à supporter la supériorité de Damon, qui n’est même pas volontaire, mais qui se justifie par sa seule présence ici. Il était important. Il l’est sans doute encore, bien plus que je ne le serai jamais.

Sans quoi j’aurais su pour sa démission, au lieu de me faire des idées pendant des semaines. Je sais que j’aurais pu résoudre ce mystère en osant affronter Angus, mais je n’ai pas eu le courage de le faire, j’ai préféré agir comme la lâche que j’ai toujours été, alors même que je n’étais pas sans savoir que son métier ne l’emballait pas réellement. Je l’ai assez chambré là-dessus, au même titre qu’il me chambrait sur mon manque d’ambitions. Je ne savais seulement pas à quel point je visais juste, mais je ne l’ai jamais pris au sérieux au point de m’en inquiéter. Le paradoxe est étrange, compte tenu de la manière dont il ne cessait de vanter les mérites de sa boite, et de paraître offusqué au moment où j’osais la critiquer. Mais je constate aujourd’hui que mon opinion n’était pas si éloignée de la vérité, sans doute pour d’autres raisons qui lui appartiennent. De mon côté, je n’ai jamais compris qu’il vende son âme à une entreprise de cet acabit, alors qu’il m’a toujours semblé plus... terre-à-terre, Angus, malgré ses ambitions. Sa boite de merde, donc, méritait amplement son statut si j’en crois Damon... qui est le fils du patron. Shit. « Boite de merde, tu peux le dire, je le pense aussi. » Je fronce les sourcils, loin de comprendre comment il peut utiliser de tels termes alors qu’il bosse pour l’entreprise familiale et, par extension, pour son père. « Et t’as pas à t’excuser, du coup. » -  « Ça doit être sympa, les réunions de famille, par chez toi. » Je tente de dédramatiser avec un rire, toujours aussi nerveux. Mais il ne pourra pas nier que, d’un point de vue extérieur, son discours est particulier. Et même si je suis curieuse, je ne suis pas là pour lui demander la nature de ses relations avec son père, alors même qu’elles m’aident à comprendre, de plus en plus, les raisons qui ont pu pousser Angus vers la sortie. Car évidemment que le père n’a pas approuvé la relation, et là-aussi j’ai des milliers de questions, car je ne comprends pas comment c’est possible. Angus est le gendre qui coche d’innombrables qualités, et pour ce qui est de Damon, il m’a pas l’air d’être un mauvais type. Je sais que mon avis ne se base pas sur grand-chose, mais ça me suffit. « Mon père n’a pas approuvé l’union, non, effectivement. » -  « Ton père a l’air charmant. » Vu l’insistance mis sur ce terme et la froideur avec laquelle il le nomme. J’imagine que ça leur a fait un autre point commun, avec Angus. « Mais c’est pas ça qui a posé problème entre nous. J’ai rencontré quelqu’un d’autre, je suis tombé amoureux, je me suis marié. » -  « Oh, wow. » Que je ne peux pas m’empêcher de commenter, surprise par cet enchaînement que je n’avais pas vu venir et que je ne comprends pas plus. Pourquoi venir jusqu’ici, alors, s’il a rencontré quelqu’un d’autre – impliquant qu’il a largué Angus – au point de l’épouser dans la foulée ? Ça n’a pas de sens et je réalise à quel point Angus est un   mystère que je n’aurais probablement jamais pu résoudre. « C’est ce qui a mis un terme à la relation entre Angus et moi. » Il l’a trompé ? Il a fait ça ? Mon regard se durcit sans même que je le réalise, gardant la question pour moi afin de m’éviter d’un jugement qui n’aurait pas sa place – si, totalement, en réalité. J’imagine qu’on peut appeler ça la bienséance. « Pour ce qui concerne mon père, c’est juste un sale con. Y’a pas besoin d’autre explication. » Définitivement agréables, les réunions de famille, si même le fils parle ainsi de son père.

Je peux pas vraiment juger, j’ai un sale con pour frère et je suis donc bien placée pour savoir qu’on ne choisit pas sa famille. « J’en ai entendu parler, oui. » J’imagine que la nouvelle n’a pas été ignorée par son père, et qu’on y vient peut-être, à la raison pour laquelle cela a pu peser sur la décision d’Angus, à défaut d’en être à l’origine. Je rappelle l’histoire, même si ça me coûte, uniquement parce que je compte en arriver à un certain point ; peu importe que son père soit con, j’ai au moins besoin que cela soit dit. Le rire qu’il m’offre en guise de réponse me fait perdre contenance alors que mon regard ne le quitte pas, dans l’espoir d’y voir plus clair. « Mon père en a rien à foutre, tu sais. Je suis presque sur qu’il se rappelle même pas que ce type d’incident est arrivé, même qu’il y ait prêté un réel intérêt. » Non. Non, ce n’est pas la réponse que je souhaitais ; parce que cela remet tout en cause. La manière dont j’ai fui en étant persuadée des conséquences que cela pourrait avoir sur Angus ; et aujourd’hui je découvre qu’elles auraient été minimes. J’ai tout gâché pour rien, en d’autres termes, et cette fois-ci ce sont bien mes yeux qui s’humidifient alors que je m’adresse la même réflexion qu’à Damon quelques minutes plus tôt ; chiale pas. « D’ici quelques semaines de toutes façons il bossera plus là-bas, alors ça lui passe bien au dessus. » Si Damon parvient à se lever pour guetter à travers la fenêtre, de mon côté je me recroqueville, mes genoux qui se serrent l’un contre l’autre, mes coudes se posant sur ceux-ci, tandis que mes mains passent sur mon visage. « J’arrive pas à savoir si c’est pour Angus que tu me précises ça, ou pour ton frère, mais dans tous les cas c’est pas mon père qui écouterait ce que j’aurais à dire sur le sujet. Ni personne au sein de la boite. Tout le monde s’en fout. » Et il insiste, en plus. Tout le monde s’en fout. Sauf moi, vraisemblablement, et ça a suffi pour tout gâcher. « Pour Angus. Mon frère est un sale con. » Je reprends les mots qu’il a utilisés précédemment. Mon frère est un sale con ; dont le mauvais choix en reste un, mais bien moins catastrophique que ce que j’ai pu imaginer. Ça remet toutes les choses en perspective, sauf qu’il est bien trop tard pour ça. « Tu pourras refermer derrière toi ? » Que j’arrive à lui demander en me pinçant la lèvre, me fichant bien d’être impolie. Je parviens encore à contenir mes émotions quelques instants, mais je sais qu’elles ne tarderont pas à exploser ; et je ne me trompe pas, lorsque c’est le cas une fois seule.

@Damon Williams